UMP : Sarkozy gagne sans triompher - Haut-Rhin
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UMP : Sarkozy gagne sans triompher - Haut-Rhin
3 Pour mieux comprendre Di m a nc he 3 0 no v em b r e 201 4 L ' AL S A CE POLITIQUE UMP : Sarkozy gagne sans triompher Les militants UMP ont élu Nicolas Sarkozy président avec 64,5 % des voix, mais sans le plébisciter, en donnant un score important à Bruno Le Maire. La présidentielle 2017 passera par une primaire à droite. Nathalie Mauret C’est fait : Nicolas Sarkozy, avec 64,5 % des voix, a été élu président de l’UMP. Mais il est loin des 85 % qu’il espérait lorsqu’il est entré en campagne, mi-septembre. L’image de l’homme providentiel, du sauveur providentiel qui vient au secours de sa famille politique, n’est pas au rendezvous. Nicolas Sarkozy est certes depuis hier soir le patron de l’UMP, mais il n’est pas ce qu’il voulait devenir : incontestable. Il souhaitait être le candidat naturel de la droite pour 2017 : il ne l’est pas. Son camp espérait atteindre au moins 70 % : ce n’est pas le cas. Les primaires pour 2016 sont donc depuis hier soir une obligation pour l’UMP. C’est d’autant plus clair que les adhérents ont massivement voté : la participation (58,1 %) dépasse les scores de 2004 (53,3 %) et de 2012 (54,3 %). Bruno Le Maire : l’autre gagnant Car Bruno Le Maire, qui frôle les 30 %, réalise un excellent score. Ancien ministre de l’Agriculture de Nicolas Sarkozy, le député de l’Eure a fait campagne sur le thème du renouveau et de la transparence. Il recueille l’assentiment du tiers des militants, pourtant naturellement très attachés à l’ancien président de la République. « C’est la victoire du renouveau et de l’intégrité », nous assure Damien Abad, député de l’Ain et membre de l’équipe rapprochée de Bruno Le Maire. Avec ce score, l’ancien ministre prend aussi une longueur d’avance sur les autres quadras de l’UMP. Nico- las Sarkozy devra compter avec Bruno Le Maire, mais aussi avec Hervé Mariton. Le score du maire de Crest (Drôme) est loin d’être anecdotique (6,32 %). La position de Nicolas Sarkozy sur le mariage pour tous lui a sans doute enlevé quelques voix, mais elle a surtout libéré au centre un espace important qu’a su prendre Bruno Le Maire. « Il y a des talents, des débats. C’est le signe que nous sommes un grand parti démocratique, et c’est heureux », veut croire Daniel Fasquelle, député maire du Touquet et soutien de Nicolas Sarkozy. Réactions Bruno Le Maire « Les militants ont montré clairement et massivement qu’ils voulaient du renouveau à l’UMP […] Je suis et je resterai toujours du côté du rassemblement de ma famille politique ». Alain Juppé « Habemus papam ! Je félicite Nicolas Sarkozy pour sa victoire. Je lui adresse mes félicitations très amicales. À lui maintenant de redonner à l’UMP l’élan qu’elle attend, et pour cela il faudra rassembler ». Et maintenant ? « Passer à l’action » « Le temps est désormais venu de passer à l’action », a réagi Nicolas Sarkozy sur les réseaux sociaux.Pas d’euphorie de sa part : il a rendu visite à ses troupes dans son QG, où il a été applaudi, mais est reparti sans faire de déclaration à la presse. Il sait que la campagne pour la primaire de 2016 a commencé dès hier soir. Certes, ses principaux rivaux l’ont félicité : Alain Juppé, qui a parlé le premier, a insisté sur la participation satisfaisante ; et François Fillon a accompli l’exploit de féliciter le vainqueur sans citer son nom : « L’union n’est pas la soumission. Un grand parti moderne accepte la différence », écrit l’ancien Premier ministre dans un communiqué. Nicolas Sarkozy qui veut rassembler sa « famille politique » a donc du travail. Alain Juppé et François Fillon sont dans les startingblocks, et ils ne sont pas les seuls. Un scrutin cyber-attaqué Le vote électronique des quelque 268 000 adhérents de l’UMP a connu quelques bugs, dus à des cyber-attaques. Pour le secrétaire général de l’UMP par intérim, Luc Chatel, ces tentatives d’infraction du site internet n’étaient pas une surprise : la société mandatée pour organiser le vote électronique les avait anticipées. « Il y a eu plusieurs tentatives de piratages qui sont, d’après les experts, organisées. Ce n’est pas de l’amateurisme », a précisé Luc Chatel. Ce dernier a tout de même porté plainte, au nom de l’UMP, dans la nuit de vendredi à samedi. Mais il y a peu de chances pour que les policiers en charge de l’enquête sur ces cyber-attaques retrouvent la trace de ces hackers, qui n’ont aucune revendication à part celle de tester la sécurité des sites partout dans le monde. Pour les militants, cela s’est traduit parfois par l’impossibilité de voter dans les premières heures du vote, vendredi soir, et par des encombrements hier, a expliqué l’UMP. François Fillon « Je félicite le nouveau président de notre formation et ses deux concurrents qui ont enrichi avec force cette campagne […]. J’invite au respect de toutes les opinions exprimées lors de cette élection. L’union n’est pas la soumission. Un grand parti moderne accepte la différence ! » Jean-Christophe Cambadélis Nicolas Sarkozy, ici au côté de Carla Bruni, retrouve le poste de président de l’UMP qu’il avait déjà conquis en 2004 avec 85 % des voix. Photo AFP « Le temps est désormais venu de passer à l’action. Dès lundi, je rencontrerai les principaux responsables de notre famille politique afin de créer les conditions du plus large rassemblement. Ce vote marque un nouveau départ pour notre famille politique… Nous devons être unis et nous consacrer à la recherche de solutions nouvelles pour la France » Nadine Morano Sur Twitter : « Merci à tous les @AmisSarkozy de votre action depuis 2 ans. Le président est de retour notre association a accompli sa mission et sera dissoute. » Jean-Pierre Raffarin « Un résultat qui désigne un vainqueur et trois gagnants. Rassemblement ! » 64,5 % C’est le pourcentage de voix obtenu par Nicolas Sarkozy (soit 100 159 voix sur les 155 417 suffrages exprimés). Il devance Bruno Le Maire (29,18 % des voix) et Hervé Mariton (6,32 %). La participation a été de 58,1 % sur 268 236 inscrits. Nicolas Sarkozy Hier soir sur Facebook Bruno Le Maire, qui frôle les 30 %, réalise un excellent score. Questions à « Sarkozy est passé de plébiscitaire à majoritaire » Le fait que Nicolas Sarkozy n’ait pas eu de vrais concurrents a dénaturé le scrutin. Il aurait été plus intéressant et plus utile qu’il y ait François Fillon ou Alain Juppé. Bruno Le Maire et Hervé Mariton étaient des inconnus pour le grand public au début de la campagne, ce qui a installé Sarkozy comme étant archi-favori. Et pourtant, ils ont engrangé des soutiens et BrunoLeMaireafaitunepercéedans lessondagessurl’électoratdedroite. C’est mauvais pour Nicolas Sarkozy qui cherchait un retour d’homme providentiel. Le principal enseignement de cette campagne est que le sarkozysme n’est plus qu’un courant parmi d’autres à droite. Il est passé de plébiscitaire à majoritaire. Francis Brochet le changement des statuts et le nouveau nom. Le deuxième chantier est pour Sarkozy de transformer son image, endommagée dans l’électorat de droite et du centre droit durant la campagne. Il doit enfin s’imposer commeleferdelancedel’opposition à Hollande. Avec en ligne de mire la primaire ? DR Le premier chantier de Sarkozy ? Il y en a trois. Le premier est de mettre en place son système bonapartiste publicitaire qui veut un dialogue direct avec les adhérents en supprimant les corps intermédiaires : c’est Photo AFP Les différents partis politiques au risque de la démocratie Thomas Guénolé Politologue Que va changer cette campagne au sein de l’UMP ? Le premier secrétaire du PS sur Twitter : « Nicolas Sarkozy moins bien élu que prévu, mais élu, donc félicitations. Je vous propose un débat sur l’avenir de la France. » Le cœur du sujet, dès maintenant, devient Sarkozy-Juppé. Cette rivalité n’est pas une querelle d’ambition, maisl’incarnationdel’an-tagonisme profond à l’intérieur de la droite, qui estlepositionnementpouroucontre la lepénisation. C’est le sujet depuis trente ans, depuis la montée du FN. Recueilli par N.M. « C’est vous qui choisirez le président de la République », promettaient les gaullistes avant le référendum de 1962 sur son élection au suffrage universel. Depuis, cette logique de l’élection du chef s’est immiscée à l’intérieur des partis. Cette année, nous comptons cinq élections partidaires. Le Front national aujourd’hui, avec pour seule candidate Marine Le Pen, mais qui avait remporté un vrai duel contre Bruno Gollnisch en 2011. L’UDI mi-novembre, qui a élu JeanChristophe Lagarde en deux tours assez serrés. Le Parti radical en juin, pour une victoire de Laurent Hénart contestée par sa concurrente Rama Yade. Enfin le Modem en janvier, qui a réélu François Bayrou sur un score stalinien. L’appel direct aux militants est une procédure assez nouvelle. Auparavant, les dirigeants LII02 Jean-Christophe Lagarde, récemment élu président de l’UDI. DR Laurent Hénart, élu à la tête du Parti radical en juin. DR des partis contrôlaient le processus de diverses manières, par exemple les courants et motions au Parti socialiste. Celui-ci n’en est d’ailleurs pas vraiment sorti, côté Premier secrétaire, mais il a innové sur un autre terrain : des primaires pour élire son candidat présidentiel. Réservées aux militants en 1995, puis toujours plus ouvertes jusqu’en 2012, où pouvaient voter tous les sympathisants déclarés. Cela pose au moins deux questions. Le dirigeant du parti doit-il être le candidat présidentiel ? Pas forcément, comme le montre l’exemple du PS, mais aussi de l’UMP, avec l’absence d’Alain Juppé et de François Fillon au scrutin d’hier. Cette manière de faire est-elle plus démocratique ? Oui, par définition, mais avec le risque, souvent dénoncé, d’une « démocratie d’opinion » tenant plus de la téléréalité que du débat d’idée.