Chapitre 22 - Précis d`anesthésie cardiaque
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Chapitre 22 - Précis d`anesthésie cardiaque
PAC • Précis d’Anesthésie Cardiaque CHAPITRE 22 GROSSESSE ET CHIRURGIE CARDIAQUE Mise à jour: Novembre 2011 Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 1 Table des matières Introduction Adaptations cardiovasculaires à la grossesse Hémodynamique maternelle Hémodynamique fœtale Chirurgie cardiaque chez la parturiente Présentation d’un cas Grossesse et CEC Anesthésie pour chirurgie cardiaque Considérations éthiques Grossesse et cardiopathies 2 5 5 6 11 11 12 16 20 21 Valvulpathies Cardiopathies congénitales Cardiomyopathies Embolie amniotique Mode d’accouchement Bibliographie Lectures conseillées Références Auteurs 21 24 26 28 28 29 29 29 31 Introduction Les cardiopathies sont la première cause de mortalité non-obstétricale chez la parturiente; elles sont responsables de 15% des décès maternels [34]. La présence d’une cardiopathie sévère est considérée comme une contre-indication majeure à la grossesse, car le système cardio-vasculaire peut brutalement mettre en danger la vie de la mère et du fœtus lorsqu’il est incapable de s’adapter aux modifications physiologiques induites par la grossesse. Il n’est pas rare qu’un œdème pulmonaire inaugural démasque une cardiopathie sévère et méconnue au cours du deuxième ou du troisième trimestre [61]. En présence d’une cardiopathie congénitale cyanogène ou d’une hypertension pulmonaire, les mécanismes d’échange placentaire sont incapables de compenser l’hypoxémie maternelle chronique et le fœtus meurt soit d’hypoxie, soit de prématurité. Les deux dernières décennies ont été le témoin d’une diminution considérable de cette mortalité du fait d’un conseil génétique approprié et d’une amélioration importante de la prise en charge cardiologique et chirurgicale des parturientes. Plusieurs facteurs en sont responsables : Diminution des maladies rhumatismales; Correction chirurgicale précoce des cardiopathies congénitales et acquises; Traitement médical proactif des arythmies et de l’insuffisance cardiaque. Le corollaire en est évidemment une augmentation du nombre de femmes souffrant de cardiopathies traitées en âge de procréer (1-4% des parturientes). Une revue de la littérature publiée de 1984 à 1996 précise le pronostic de la chirurgie cardiaque en cours de grossesse, pendant l’accouchement et au cours du post-partum. Durant ces douze années, la morbidité et la mortalité fœtale en CEC ont été respectivement de 9% et 30%, la morbidité et la mortalité maternelles de 24% et 6% [66]. Ces valeurs s’élèvent respectivement à 29% et 12% lorsque l’intervention s’est déroulée immédiatement après l’accouchement, et à 38% et 14% lorsqu’elle a été réalisée quelques jours plus tard (Tableau 22.1). Même si on les considère comme acceptables, les risques maternels sont plus élevés que dans une population non-obstétricale, particulièrement lorsque Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 2 l’intervention est proche de l’accouchement. Les opérations qui ont lieu après la 27ème semaine de gestation et les urgences extrêmes contribuent largement à l’aggravation du pronostic maternel. Le Tableau 22.2 précise le moment de l’intervention chirurgicale par rapport à la grossesse, en distinguant la période qui précède l’accouchement de celle qui le suit à court terme et à plus long terme. Vingt à trente pourcent des interventions se déroulent dans un contexte de décompensation cardiovasculaire aiguë, voire en urgence extrême. La plupart des patientes sont opérées entre la 20ème et la 35ème semaine de gestation. La période optimale pour réaliser ce type d’interventions se situe entre la 24ème et la 28ème semaine [66]. Au cours du premier trimestre, l’immaturité de l’organogenèse accroît le risque tératogénique et celui d’avortement spontané, alors qu’au cours du troisième trimestre, c’est le déclenchement prématuré du travail qui pose problème. Tableau 22.1 : Pronostic périnatal et maternel selon le moment de la chirurgie Moment de la chirurgie Patientes (CEC) Morbidité (total) Pronostic périnatal Mortalité (total) Mortalité (CEC) Morbidité (total) Pronostic maternel Mortalité (total) Mortalité (CEC) Pendant la grossesse Post-partum immédiat 70 (59) 41 (36) 4 / 45 9% (2-21) 9 / 40 23% (11-38) 19 / 64 30% (19-42) 2 / 40 5% (1-17) 16 / 55 29% (18-43) 1 / 35 3% (0-159 17 / 70 24% (15-36) 12 / 41 29% (16-46) 4 / 70 6% 2-41) 5 / 41 12% 4-26) 3 / 59 5% (1-14) 4 / 36 11% (3-26) Post-partum tardif 50 (42) 6 / 49 12% (5-25) 0 / 41 0% (0-9) 0 / 41 0% (0-9) 19 / 50 38% (25-53) 7 / 50 14% (6-27) 5 / 42 12% (4-26) Nombre de cas, pourcent et intervalle de confiance de 95%. Le pronostic périnatal inclut les cas avec un fœtus vivant au début de la chirurgie, le pronostic néonatal en post-partum et les complications des nouveau-nés. D’après référence 66. Tableau 22.2 : Semaines de gestation et chirurgie Moment de la chirurgie Patientes (CEC) Urgence extrême* Admission (semaines de gestation) Chirurgie (semaines de gestation) Accouchement (semaines de gestation) Intervalle chirurgie accouchement (semaines) Pendant la 70 16 19.3 +/- 6.9 21.1 +/- 6.8 37.0 +/- 2.6 16.9 +/- 7.7 grossesse (59) 23% (2-37) (2-37) (28-40) (0-32) Post-partum 41 13 33.7 +/- 4.0 34.6 +/- 3.2 34.6 +/- 3.2 -immédiat (36) 32% (25-40) (28-40) (28-40) -Post-partum 50 10 33.5 +/- 5.9 -36.0 +/- 3.7 0.5 – 7.8 tardif (42) 20% (18-40) § -(25-40) (0.03-38) Nombre de cas, moyenne +/- SD, range. Pour l’intervalle chirurgie – accouchement : médiane +/- SD et percentile 25 – 75. * Urgence extrême : décompensation cardiaque sévère ou réanimation précédant immédiatement la chirurgie. § Treize patientes (26%) ont quitté le service et ont été hospitalisées à nouveau après l’accouchement. D’après référence 66. Dans une série de 74 patientes (1964 – 2002), les principaux facteurs qui ont contribué à la mortalité maternelle ont été la gravité de la cardiopathie préopératoire (NYHA III et IV) et la nature urgente de la chirurgie. Dans cette étude brésilienne, les valvulopathies rhumatismales étaient prépondérantes (Tableau 22.3) [2]. La chirurgie cardiaque en cours de grossesse n’en demeure pas moins problématique. Le conflit d’intérêt entre la mère et le fœtus, la prise en charge en urgence dans une situation clinique le plus Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 3 souvent défavorable et la vulnérabilité maternelle pendant le post-partum sont des éléments qui contribuent à aggraver le risque de cette chirurgie. L’anesthésiste qui prend en charge une telle patiente doit connaître les problèmes spécifiques liés à la maladie cardiovasculaire ainsi qu’à son traitement médical et chirurgical, mais également les problèmes physiologiques et physiopathologiques associés à la grossesse. Tableau 22.3 : Facteurs de risque de mortalité maternelle Décès maternel Facteurs de risque Oui Non p > 35 ans < 35 ans 27.3 % 70.0 % 72.7 % 30.0 % 0.023 Ré-opération Oui Age maternel 66.7 % 33.3 % Non 26.2 % 73.8 % Chirurgie Urgence 70.6 % 29.4 % 18.9 % 81.1 % IV 66.7 % 33.3 % III II 20.0 % 16.7 % 80.0 % 83.3 % 66.7 % 33.3 % 28.9 % 71.1 % Electif Classe NYHA pré-opératoire Protection myocardique Cardioplégie Anoxie 0.016 < 0.001 0.003 0.053 NYHA = New York Heart Association D’après référence 2. Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 4 Adaptations cardiovasculaires associées à la grossesse Il n’est guère possible de fonder une stratégie de prise en charge pour la parturiente souffrant de cardiopathie sur des études comparatives contrôlées et randomisées, parce que la plupart des publications sont des registres de cas, des rapports isolés ou des revues de la littérature. Par conséquent, il est utile de rappeler les principales modifications hémodynamiques de la grossesse pour définir une attitude qui soit cohérente avec cette situation particulière : Augmentation du volume circulant ; Baisse des résistances artérielles ; Augmentation de la fréquence et du débit cardiaque ; Anémie et hypercoagulabilité. Hémodynamique maternelle Volume intravasculaire et pression artérielle Le volume intravasculaire augmente de 35-50% au cours de la grossesse. Proportionnellement, le volume plasmatique croît plus que la masse des érythrocytes, respectivement 50% versus 20-30%, participant ainsi au phénomène d’"anémie physiologique" de la parturiente. L’activation du système rénine – angiotensine via les oestrogènes et la progestérone favorise une rétention hydrosodée par le biais d’une sécrétion d’aldostérone et d’hormone anti-diurétique. Une augmentation de la concentration plasmatique de prostaglandines (PGI2 et PGE2) s’associe à une diminution de la réponse vasoconstrictrice à l’angiotensine II, permettant ainsi de conserver un volume intravasculaire augmenté en présence d’une pression artérielle normale. Cette hypervolémie relative et cette anémie physiologique trouvent leurs raisons d’être au cours d’une grossesse normale, mais elles participent fréquemment à une détérioration hémodynamique maternelle en présence d’une pathologie cardiaque préexistante. A l’accouchement, chaque contraction utérine provoque une autotransfusion de sang qui augmente encore le volume circulant. La grossesse se caractérise par une diminution relativement discrète de la pression systolique et plus importante de la pression diastolique. Ce phénomène est évident dès le premier trimestre et plus prononcé au cours du deuxième trimestre [9]. Il s’atténue au cours du troisième trimestre, avec des valeurs qui deviennent proches de celles que l’on mesure avant la grossesse. De nombreux facteurs peuvent interférer avec les valeurs de pression artérielle, notamment l’âge et la parité [11]. Fréquence et débit cardiaque Au cours d’une grossesse normale, la fréquence cardiaque maternelle augmente d’environ 10-20% et le débit cardiaque de 40-50%. Cette augmentation, parallèle à l’élévation de la consommation d’oxygène, débute dès la 8ème semaine de gestation et culmine entre la 24ème et la 28ème semaine [12]. L’augmentation du débit cardiaque (DC) est secondaire à deux phénomènes : L’augmentation du volume circulant accroît la précharge ventriculaire ; en conséquence, l’élévation du volume télédiastolique ventriculaire augmente le volume d’éjection via le mécanisme de Frank-Starling ; Au cours du deuxième trimestre, l’augmentation du DC devient de plus en plus tributaire de l’élévation de la fréquence cardiaque. Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 5 La consommation d’oxygène (VO2) augmente progressivement jusqu’à la fin du troisième trimestre pour atteindre 125-130% des valeurs de la femme non enceinte. Le DC s’élève encore d’un cran immédiatement après l’accouchement. Cette adaptation physiologique est probablement le principal facteur de décompensation cardiovasculaire en présence d’une cardiopathie sévère, notamment les sténoses valvulaires et l’hypertension pulmonaire. Circulation utéro-placentaire Le développement progressif de la circulation utéro-placentaire influence considérablement la physiologie cardiovasculaire de la femme enceinte. Le débit sanguin utérin (DSU) représente environ 3% du débit sanguin maternel au cours du premier trimestre et 10-15% au cours du troisième trimestre. Il est caractérisé par une absence d’autorégulation. Il est directement proportionnel à la pression moyenne de perfusion utérine (PPU) et inversement proportionnel aux résistances vasculaires utérines (RVU). DSU ~ PPU / RVU Par conséquent, une stimulation alpha-adrénergique diminuera le DSU par le biais d’une augmentation des RVU, alors qu’une stimulation béta-adrénergique n’aura que peu d’effet sur le DSU, parce les artères utérines sont spontanément dilatées au maximum. Quel que soit le contexte clinique, la pression moyenne de perfusion utérine reste un élément critique, mais ce n’est pas le seul. Syndrome de compression aorto-cave Le syndrome de compression aorto-cave se manifeste chez presque toutes les femmes enceintes au cours du troisième trimestre, lorsqu’elles sont allongées sur le dos [32]. La compression de la veine cave par l’utérus compromet le retour veineux et le remplissage ventriculaire droit, provoquant une chute du débit cardiaque. Un réflexe de compensation, via les barorécepteurs, augmente le tonus sympathique, les résistances périphériques et la fréquence cardiaque pour tenter de maintenir la pression artérielle. Néanmoins, 10% des patientes présentent des symptômes compatibles avec un syndrome de compression aorto-cave, à prédominance cave lorsqu’il s’exprime par une hypotension maternelle et à prédominance aortique lorsqu’il s’exprime par une bradycardie fœtale. Une prédisposition vaso-vagale et un réseau de circulation paravertébrale collatérale peu développé peuvent contribuer à la genèse de ce syndrome. Ce mécanisme peut devenir critique lorsque les traitements interfèrent avec l’activation du système sympathique (hypotenseurs, béta-bloqueurs, inhibiteurs de l'enzyme de conversion, anesthésie générale ou locorégionale). Modifications cardiovasculaires pendant le post-partum Le pic d’augmentation du DC et de la fréquence a lieu immédiatement après l’accouchement. Par la suite, les paramètres cardiovasculaires se normalisent progressivement au cours des 12 à 16 semaines qui suivent la délivrance placentaire. En fait, le volume d’éjection, le volume télédiastolique et le débit cardiaque restent élevés et les résistances vasculaires périphériques abaissées pendant plusieurs mois après l’accouchement [52]. Cette normalisation est très variable d’une patiente à l’autre et il n’est pas rare d’observer une décompensation cardiovasculaire pendant cette période, plus particulièrement en présence de sténose mitrale et aortique. Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 6 Adaptation cardiovasculaire à la grossesse La grossesse se caractérise par une régulation hémodynamique particulière - augmentation du volume circulant - baisse des résistances artérielles - augmentation de la fréquence et du débit cardiaque - augmentation du volume plasmatique, anémie, hypoalbuminémie - hypercoagulabilité - compression aorto-cave Le débit utéro-placentaire est pression-dépendant parce qu’il ne possède pas d’autorégulation. Chaque contraction utérine représente une autotransfusion. L’accouchement et le post-partum provoquent une augmentation supplémentaire du débit cardiaque. Le retour à la normale prend plusieurs mois. Hémodynamique fœtale Système nerveux autonome et hypoxie La régulation de la circulation fœtale mérite quelques précisions. Le canal artériel (ductus arteriosus) est une communication anatomique dérivant plus de 90% du débit du cœur droit (artère pulmonaire) vers le cœur gauche (aorte). Il permet une circulation parallèle court-circuitant la circulation pulmonaire, dont les résistances sont élevées et partiellement contrôlées par le système nerveux autonome. Le ventricule gauche perfuse le myocarde et le système nerveux central, le ventricule droit perfuse l’aorte descendante et les organes distaux via le canal artériel. Bien que les deux ventricules travaillent de façon parallèle, la débit de sang oxygéné qu’ils éjectent est différent (Figure 22.1). Le fœtus contrôle la pression partielle d’oxygène de son sang par ses propres chémorécepteurs. Les plus importants et les plus sensibles aux variations d’oxygène sont ceux de l’arc aortique. Ils sont à l’origine de différents mécanismes de contrôle de l’hypoxie qui entrent en action notamment au cours d’une circulation extracorporelle (CEC). La réponse initiale à une hypoxie foetale est une tachycardie et une augmentation de pression artérielle via la sécrétion de catécholamines, d’ACTH et de vasopressine. Lorsque l’hypoxie s’aggrave au-delà d’un seuil critique (PaO2 < 16 mmHg), elle entraîne une bradycardie provoquée par une stimulation vagale via les chémorécepteurs du bulbe et de l’arc aortique. La redistribution de la circulation fœtale se fait par le biais d’une augmentation de la postcharge du ventricule droit, puis du volume et de la pression télédiastolique de l’oreillette droite, et finalement de la précharge ventriculaire gauche, permettant ainsi une perfusion privilégiée du myocarde et du système nerveux central. Cette redistribution est également favorisée par une diminution d’impédance de la circulation cérébrale en réponse à l’hypoxie. Le coeur du fœtus varie son débit cardiaque de deux manières : Par un effet chronotrope prédominant via le contrôle qu’exerce le système nerveux autonome ; l’effet inotrope est beaucoup moins important ; Selon le phénomène de Frank-Starling. Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 7 Déchets du foetus Aorte Poumon Artère pulmonaire Foie Nutriments et O2 de la mère Poumon Rein gauche Cordon ombilical V ombilicale Sang artériel Artères ombilicales Sang veineux Sang mêlé Figure 22.1: Schéma de la circulation foetale. Cette régulation neurovégétative joue un rôle fondamental dans le maintien et le développement des conditions hémodynamiques fœtales et dans les situations de stress. L’effet inhibiteur de la stimulation vagale s’oppose à l’effet facilitateur de la stimulation sympathique. Mais cette opposition n’est pas la somme algébrique des deux effets comme on la rencontre chez l’adulte. Le système nerveux sympathique prévaut largement sur le système nerveux parasympathique au cours de la gestation, et la situation s’inverse progressivement en fin de grossesse et pendant la période néonatale. L’influence du système nerveux autonome sur le contrôle de la fréquence cardiaque a été mise en évidence par le blocage des récepteurs cholinergiques et béta-adrénergiques du foetus. Le blocage des récepteurs cholinergiques par l’atropine augmente la fréquence cardiaque d’environ 10%, mais seulement chez le fœtus à terme. Chez le fœtus immature, cette augmentation est beaucoup moins marquée (4%). A l’inverse, le blocage des récepteurs béta-adrénergiques par le propranolol provoque un effet beaucoup plus important en diminuant la fréquence cardiaque d’environ 10% chez le fœtus immature, 12% chez le fœtus prématuré et 14% chez le fœtus à terme [4]. Les variations de fréquence cardiaque fœtale en réponse à une stimulation vagale dépendent de la prévalence de l’activité sympathique au moment de la stimulation [37,38]. Cette exagération de la réponse inhibitrice du système parasympathique vis-à-vis de l’activité sympathique a été qualifiée d’antagonisme accentué de la réponse vagale [39]. Elle pourrait contribuer à la genèse de certaines bradycardies au cours de la CEC. Ce type de réponse pourrait être expliqué par l’augmentation progressive du contrôle neuro-humoral au cours de la gestation, probablement par le biais d’une prépondérance du système alpha-adrénergique [64]. Ce contrôle neuro-humoral est maximal à terme, Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 8 puis diminue progressivement pendant la période néonatale. En contraste, le système parasympathique joue un rôle prédominant dans le contrôle de la circulation pulmonaire et du débit sanguin à travers le canal artériel [53,67]. Evaluation ultrasonographique de la circulation foetale La circulation utéro-placentaire et foeto-placentaire conditionne le développement du fœtus. C’est par le développement des techniques ultrasonographiques qu’il est possible aujourd’hui d’évaluer l’impédance des vaisseaux sanguins de ces différentes unités fonctionnelles au cours de la gestation. Les figures qui suivent donnent quelques exemples d’évaluation de l’hémodynamique fœtale : artère utérine (Figure 22.2), artère ombilicale (Figure 22.3), aorte, artère cérébrale et cœur droit (Figure 22.4). IP artère utérine A B C Figure 22.2 : Image US-doppler montrant l’artère utérine et l’artère iliaque externe (A), la courbe de vélocité de l’artère utérine à la 24e semaine de gestation (B) et l’index de pulsatilité (IP) de l’artère utérine en fonction de la gestation (moyenne, percentiles 5 et 95) (C). L’impédance des artères utérines diminue comme la gestation progresse. Jusqu’à la 24 – 26e semaine, la chute initiale est due à l’invasion trophoblastique des artères spiralées. Plus tard, elle est expliquée par un effet hormonal persistant sur l’élasticité des parois artérielles. A B Artère ombilicale C Veine ombilicale Figure 22.3 : Image US-doppler montrant un cordon ombilical (artère en rouge et veine en bleu) (A), la courbe de vélocité de l’artère et de la veine ombilicales (artère en-haut, veine en-bas) (B), et l’index de pulsatilité de l’artère ombilicale en fonction de la gestation (moyenne, percentiles 5 et 95) (C). A remarquer que le flux artériel a une apparence caractéristique en dent-de-scie, alors que le flux veineux est continu. Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 9 A B C VCI Ao descendante Figure 22.4 : Image US-doppler montrant une vue parasagittale du tronc fœtal avec l’aorte descendante (rouge) et la veine cave inférieure (bleu) (A), une vue transverse de la tête fœtale montrant le polygone de Willis (B), et les flux sanguins à travers la valve tricuspide à 28 semaines de gestation (C) ; onde E : remplissage ventriculaire précoce, onde A : remplissage auriculaire. Hémodynamique foetale Comme le canal artériel dévie > 90% du débit du VD vers l’aorte à cause des RAP très hautes, le fœtus possède une double circulation: - le VG alimente le myocarde et le système nerveux central - le VD alimente les organes sous-diaphragmatiques La réponse à une hypoxie est une tachycardie, puis une bradycardie si la PaO2 fœtale est < 16 mmHg. La régulation sympathique prévaut sur la régulation para-sympathique chez le fœtus ; la situation s’inverse en fin de gestation et dans la période néonatale. Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 10 Chirurgie cardiaque chez la parturiente La chirurgie cardiaque en cours de grossesse est une situation à haut risque, aussi bien pour la mère que pour le fœtus [66]. La mortalité maternelle est en moyenne de 9% pour les remplacements valvulaires, de 20% pour la dissection aortique, de 22% pour la thrombectomie pulmonaire, et de > 30% en cas d’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) ; La mortalité fœtale moyenne en cas de circulation extracorporelle (CEC) est de 20-30%. Les principaux prédicteurs de complications cardiovasculaires pendant la grossesse sont les suivants: Anamnèse de décompensation cardiaque ou d'arythmie; Classe d'effort NYHA III ou IV; Dysfonction ventriculaire gauche (FE < 0.35); Sténose sévère de la valve mitrale (< 0.6 cm2/m2) ou aortique (< 0.6 cm2/m2); Cyanose (SaO2 < 90%, Hb > 150 g/L); Hypertension artérielle pulmonaire (PAPs > 50 mmHg au repos). Présentation d’un cas Le premier objectif de la prise en charge anesthésiologique est d’assurer la sécurité de la mère tout en permettant une survie fœtale dans les meilleures conditions possibles. Ce type d’interventions relevant parfois de l’urgence extrême, il est prudent de garder à l’esprit quelques éléments importants, illustrés par la présentation de cas qui suit [33]. Une femme souffrant d’une régurgitation aortique sévère consécutive à plusieurs épisodes d’endocardite bactérienne est prévue pour un remplacement de valve aortique à la 19ème semaine de gestation du fait d’une aggravation hémodynamique progressive (stade NYHA passant de II à III). La patiente a été placée en décubitus latéral droit partiel pendant toute l’intervention. La CEC a été réalisée avec un débit non pulsatile, une pression de perfusion de 77 - 90 mm Hg, un débit de 3.5 – 4.0 L/min/m2 et une température centrale de 34 - 35 °C. Les courbes de vélocité sanguine ont été enregistrées par une technique ultrasonographique au niveau des artères utérines et des vaisseaux du fœtus, avec un calcul des indices de pulsatilité (PI), qui est un index de résistance vasculaire (Figure 22.5). Pendant la période préopératoire, les caractéristiques hémodynamiques fœtales étaient dans les limites de la norme et l’impédance des artères utérines était de 3.9 (norme 0.5 – 1.5 à 20 semaines de gestation). Pendant la CEC, une bradycardie fœtale est apparue après le clampage de l’aorte (de 120 à 75 bpm) associée à une augmentation de l’impédance de l’artère ombilicale de 1.7 à 7.0 (PIAU) et une disparition du débit diastolique. L’impédance de l’artère cérébrale moyenne a diminué de 2.0 à 0.92 (PIACM), alors que s’est élevée l’impédance de l’aorte descendante de 2.22 à 3.55 (PIAoD), de la veine cave inférieure de 2.7 à 9.3 et du ductus venosus de 0.6 à 1.7. Pendant la circulation extracorporelle, le débit dans l’artère utérine était non pulsatile et son impédance s’est normalisée par la suite. Immédiatement après l’intervention, l’utérus a présenté quelques contractions qui ont cédé à l’administration de sulfate de magnésium. Deux jours après l’intervention, le fœtus a développé une discrète dilatation des ventricules cérébraux progressant vers une hydrocéphalie puis un hydrops sévère avec des signes d’ascite, d’œdème cutané et d’effusions pleurales. Cinq semaines après l’intervention, la patiente a décidé d’interrompre la grossesse en accouchant d’un enfant mort-né de 900 g dont l’autopsie a été refusée. Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 11 Figure 22.5 : Rythme cardiaque fœtal (FHR) et index de pulsatilité (PI) de l’aorte fœtale descendante (Dao), de l’artère cérébrale moyenne (MCA) et de l’artère ombilicale (UA) avant, pendant et après la circulation extracorporelle. PRE = préopératoire ; AN = pendant l’anesthésie générale, avant la circulation extracorporelle ; BP = début de la circulation extracorporelle ; AC = pendant la circulation extracorporelle avec clampage aortique ; 15’ – 105’ = respectivement minutes qui suivent le début de la circulation extracorporelle ; p.o. = postopératoire ; bpm = battements par minute (29). Dans cet exemple, il est probable qu’un débit sanguin non pulsatile dans l’artère utérine ait provoqué une inadéquation de la perfusion placentaire secondaire à une vasoconstriction des artères utérines et éventuellement des vaisseaux ombilicaux, suivie d’une hypoxie fœtale qui s’est exprimée par une bradycardie sévère. La persistance de cette bradycardie fœtale est associée à une baisse du débit cardiaque à travers la valve aortique fœtale de plus de 80% entre le début et la fin de la CEC (43 mL/min et 6 mL/min, respectivement) (Tableau 22.4) ; cette baisse est accompagnée d’une hypotension aggravant l’hypoxémie et l’acidémie préexistante. La redistribution de la circulation fœtale s’est traduite par une diminution importante des résistances de la circulation cérébrale, d’une augmentation de celles de l’aorte descendante et de l’artère ombilicale (voir Figure 22.1). La bradycardie fœtale n’explique que partiellement la redistribution de la circulation fœtale parce qu’elle n’est en fait que le reflet d’une vasoconstriction foeto-placentaire préalable. Grossesse et CEC Physiopathologie Dans le contexte non physiologique de la CEC, les mécanismes qui régulent la perfusion foetoplacentaire sont multifactoriels et complexes. Ils débordent largement du cadre d’un raisonnement basé uniquement sur la pression et le débit de perfusion maternelle et semblent dépendre plus directement des facteurs qui déterminent l’importance de la vasoconstriction des artères utérines et/ou des vaisseaux du cordon ombilical et du foetus. Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 12 Plusieurs études montrent que l’absence de pulsatilité du débit sanguin en CEC joue un rôle important dans l’inadéquation de la perfusion placentaire, en favorisant une vasoconstriction des artères utérines et des vaisseaux foeto-placentaires. A l’inverse, un débit pulsatile semble préserver les mécanismes de biosynthèse du NO de l’endothélium vasculaire et diminue l’activation du système rénine – angiotensine fœtal [65]. La préservation de la médiation endothéliale de la régulation de la circulation foeto-placentaire est un facteur important du bien-être fœtal, dans ces conditions du moins. Tableau 22.4 : Débit cardiaque fœtal à travers les valves aortique et pulmonaire, vélocité sanguine à travers les valves mitrale et tricuspide [33]. Préopératoire Anesthésie Début de CEC Début de clampage aortique 15 min après clampage 35 min après clampage Fin de clampage aortique Fin de CEC 15 min après CEC 35 min après CEC Postopératoire (2 jours) Valve aortique (mL/min) Valve pulmonaire (mL/min) Valve mitrale (cm/sec) Valve tricuspide (cm/sec) 72 98 12.2 43 35 56 43 44 12.4 9.7 5.6 5.2 5.0 4.3 2.3 3.4 5.5 14.1 5.8 5.2 3.4 23 18 6 11 26 62 104 7.8 3.1 12.7 D’un autre point de vue, dans un modèle animal, l’administration de stéroïdes ou d’un inhibiteur de la cyclo-oxygénase comme l’indométacine prévient l’augmentation des résistances vasculaires placentaires pendant et après la CEC [55]. Cet effet traduit soit une inhibition de la production de vasoconstricteurs placentaires comme certaines prostaglandines, soit une augmentation de la production de vasodilatateurs placentaires comme les leukotriènes, soit les deux. Bien que la fréquence cardiaque du foetus permette une certaine autorégulation de la circulation fœtale face à de petites variations de température, une hypothermie centrale maternelle expose le fœtus à un risque de déséquilibre acido-basique, de troubles de la coagulation, d’arythmies cardiaques, voire de fibrillation ventriculaire ou d’arrêt cardiaque. Elle peut également entraîner une hypertonie utérine ou des contractions [48]. De plus, en terme d’échange gazeux, de débit sanguin trans-placentaire et de flux sanguin dans les organes fœtaux, un placenta exposé à une hypothermie devient un mauvais pourvoyeur d’oxygène [43]. Lorsque l’hypothermie s’associe à une alcalose maternelle qui déplace la courbe de dissociation de l’oxyhémoglobine vers la gauche et favorise une diminution de la pression partielle en O2 et du contenu en O2 du sang fœtal, les conditions de survie du fœtus deviennent précaires [15,31]. L’hypocapnie provoque une vasoconstriction utéroplacentaire, alors que l’hypercapnie augmente le flux utérin. La température centrale du fœtus dépasse celle de la mère d’environ 0.5 °C et celle du liquide amniotique d’environ 0.2 °C. La température du liquide amniotique diffère de celle de la paroi utérine d’environ 0.1 °C. La capacité de diffusion thermique des villosités choriales est nettement supérieure à celle de la surface corporelle du fœtus et des annexes. Ces gradients thermiques relativement faibles entre le fœtus et la mère n’expliquent pas une hypothermie centrale fœtale par un mécanisme de diffusion. Pratiquement toutes les variations thermiques fœtales que l’on observe au cours d’une CEC se font par voie sanguine via le placenta et le cordon ombilical [35]. Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 13 De plus, au moment du réchauffement maternel à la fin de la CEC, la vasoconstriction des vaisseaux ombilicaux et fœtaux peut perturber les échanges thermiques entre le sang de la mère et celui du fœtus et ralentir l’équilibration thermique foeto-maternelle qui se fera malgré tout par diffusion. Cette hypothèse pourrait expliquer la réapparition tardive des bruits cardiaques fœtaux, plus de deux heures après l’intervention [40]. Bien que l’origine des contractions utérines au moment du réchauffement qui suit une hypothermie modérée ou profonde ne soit pas connue, elles n’en demeurent pas moins caractéristiques et susceptibles de provoquer une perturbation de la circulation foeto-placentaire. Il est possible que l’effet de dilution de la CEC diminue la concentration plasmatique de progestérone, et augmente ainsi l’excitabilité de l’utérus [46]. La fréquence cardiaque fœtale répond transitoirement à une augmentation du débit de perfusion maternel et de la pression de perfusion. Cependant, la tendance à la bradycardie est d’autant plus marquée que la CEC se prolonge. Classiquement, la restauration de la circulation maternelle spontanée en fin d’intervention s’associe à une tachycardie fœtale transitoire. Lorsque l’équilibre acido-basique, la pression de perfusion et le débit sont dans les limites de la norme, certains auteurs ont suggéré que les doses souvent très élevées d’opiacés (par exemple le fentanyl) pouvaient être responsables de cette bradycardie [19]. Cette observation est d’autant plus fâcheuse qu’une bradycardie fœtale est synonyme d’insuffisance du débit cardiaque fœtal et donc d’acidose. A noter que la perte de la fréquence cardiaque fœtale en cours d’intervention n’est pas obligatoirement synonyme de mort fœtale et que la situation obstétricale doit être réévaluée dans la période postopératoire avant d’émettre un pronostic précis et documenté. Recommandations pour la CEC La CEC peut entraîner des variations majeures du flux utéro-placentaire et avoir des effets délétères sur le fœtus à cause de l’activation inflammatoire, de la dépulsation du flux, de l’hypotension et de l’hypothermie. Malheureusement, il n’existe aucune étude systématique des variations hémodynamiques du fœtus au cours de la CEC, et les recommandations de bonne pratique que l’on peut formuler restent du domaine empirique [6,10]. Le choix d’une technique d’anesthésie appropriée. Le choix de la technique d’anesthésie doit s’appuyer sur le contexte clinique de la mère en se souvenant que, hormis les myorelaxants, tous les médicaments traversent la barrière placentaire et que leurs effets peuvent être différents chez la mère et chez le fœtus (voir Tableau 22.5). Le choix d’agents inotropes. Toutes les amines traversent la barrière placentaire. Elles peuvent provoquer une vasoconstriction non seulement sur les artères utérines, mais également sur les vaisseaux du cordon ombilical et du fœtus. L’installation sur la table d’opération. Des coussins sous le côté droit permettent de basculer le bassin et l’abdomen de 15° vers la gauche pour décomprimer l’axe aorto-cave. L'utilisation de débit et de pression de circulation extracorporelle appropriés. Par principe, le débit et la pression de perfusion de la pompe de CEC doivent être relativement élevés, respectivement ≥ 3.0 L/min/m2 et > 70 mmHg. De plus, il existe aujourd’hui de nombreux arguments parlant en faveur d’un débit pulsatile pour tenter de prévenir une vasoconstriction excessive des artères utérines. L’utilisation d’un inhibiteur de la cyclooxygénase et de stéroïdes peut être utile, mais reste du domaine empirique. Le maintien de la normothermie. L’utérus supporte mal les chocs thermiques associés au refroidissement et réchauffement de la circulation centrale via la CEC. Pour éviter le déclenchement de contractions utérines inappropriées, il est préférable de travailler en normothermie. Par ailleurs, l’utilisation de médicaments tocolytiques comme le sulfate de magnésium semble favorable, particulièrement à la fin de la CEC [16]. Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 14 Tableau 22.5 : Principaux médicaments anesthésiques et cardiovasculaires. Médicament Degré de risque pour le foetus Passage trans-placentaire B Oui Kétamine D Oui Etomidate Propofol C B Midazolam D Inducteurs Thiopental Débit sanguin utérin Tonus utérin Commentaires Oui Oui hors travail en travail hors travail en travail --- Oui -- B Oui à 0.5 MAC à 1.5 MAC à 2.0 MAC tocolytique 0.5 à 1.0 MAC B Oui -- C Oui > 0.5 µg/kg/min Adrénaline C Oui Dopamine C Oui Phényléphrine C Oui B Non -- -- C Oui -- -- Effet anticoagulant intrinsèque à forte conc. C Oui -- -- Diurèse foetale A Oui C Oui Tératogène pendant le 1er trimestre ( ?) Volatils Sévoflurane Desflurane Bloque prob. l’action des oxytociques > 1.5 MAC Opioïdes Fentanyl Sufentanil Amines Noradrénaline Hémostase Héparine Protamine Diurétiques Furosémide Tocolytiques Sulfate de magnésium Nitroglycérine diminue la variabilité des BCF Bradycardie foetale faible conc. fortes conc. < 5 µg/kg/min > 10 µg/kg/min DSU RVU Acidose foetale à forte conc. Adapté de: Landau R and Smiley RM Anesthesia for cardiac surgery in the pregnant patient. In: Cardiac Anesthesia, second edition Estafanous FG et al. Lippincott Williams & Wilkins, Philadelphia, 2001 Note: les indications fournies par ce tableau sont très générales et parfois empiriques. Degrés de risque des agents pharmacologiques pour le fœtus. A : les études contrôlées ne démontrent pas de risque. B : pas d’évidence de risque, mais pas d’études humaines adéquates. C : les études humaines manquent, les études animales sont positives ; à n’utiliser que si le bénéfice potentiel justifie le risque encouru. D : évidence positive de risque significatif ; utilisable seulement en cas de risque vital. X : formellement contre-indiqué. Le maintien du meilleur transport d’O2 possible. L’hématocrite doit rester > 28% et la SaO2 > 97% en cours de CEC. Le maintien strict de l’équilibre acido-basique maternel selon le mode alpha-stat. L’équilibre acido-basique maternel est important parce que l’alcalose maternelle déplace la courbe de dissociation de l’oxyhémoglobine vers la gauche et limite le transport trans-placentaire d’oxygène. Le maintien de la normoglycémie. Toute hypoglycémie de la mère retentit immédiatement sur la physiologie du fœtus. Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 15 Une durée de clampage aortique et de CEC la plus courte possible. Une hémodynamique fœtale mal maîtrisée pendant la CEC privilégie une redistribution de la circulation foetale au profit des structures nerveuses centrales et au détriment des autres organes, en favorisant l’aggravation de l’acidose fœtale. La surveillance cardiotocographique. Cette surveillance est nécessaire mais peu spécifique. Elle permet éventuellement d’anticiper un problème vasoactif ou utérotonique sans pouvoir toujours le corriger de manière efficace. Une tocolyse s’impose si des contractions surviennent : sulfate de magnésium (risque d’hypotension), ritodrine ou terbutaline (risque de tachycardie), nitroglycérine (risque d’hypotension), inhibiteurs des prostaglandines (risque d’hémorragie et de fermeture du canal artériel). Les halogénés induisent une atonie utérine. Un obstétricien (accompagné d’un pédiatre selon l’âge de la grossesse) doivent rester en stand-by pour une délivrance d’urgence en cas de souffrance fœtale prolongée. Lorsqu’il existe un conflit éthique potentiel entre la survie de la mère et celle du fœtus, la priorité est logiquement donnée à celle de la mère. Mais il va de soi que cela ne peut se faire qu’après une réflexion approfondie et consensuelle de l’équipe soignante et des parents. Grossesse et CEC La stratégie de protection fœtale pendant une CEC comprend plusieurs éléments. - tilt latéral gauche de 15° - normothermie (T° > 35° C) - débit circulatoire élevé (≥ 3.0 L/min/m2) - pression de perfusion > 70 mmHg - maintien de l’Ht maternel > 28% et de la SaO2 > 97% - maintien de l’équilibre acido-basique par une stratégie alpha-stat - maintien de la normoglycémie maternelle - restriction maximale du temps de CEC et de clampage aortique - tococardiogramme continu du foetus - tocolyse (sulfate de Mg2+, ritodrine, terbutaline, nitroglycérine) Anesthésie pour la chirurgie cardiaque Pharmacologie La grossesse modifie substantiellement la pharmacocinétique des médicaments (Tableau 22.5). L’augmentation du DC et du volume circulant élève le volume de distribution (Vd) et augmente la vitesse d’élimination (clairance) des substances ; L’augmentation du volume plasmatique et l’hypoalbuminémie modifient la fixation protéique des substances ; la fraction libre est plus importante, donc le risque de toxicité augmente. Concernant leur risque sur le fœtus, les médicaments peuvent être classés en trois catégories : 1) agents sûrs pour le fœtus, 2) agents probablement sans risque mais dont l’inocuité n’est pas entièrement démontrée chez l’homme, et 3) agents contre-indiqués car tératogènes ou abortifs. Etant Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 16 en général hautement liposolubles, les principaux agents d’anesthésie passent la barrière utéroplacentaire et diffusent dans le fœtus (Tableau 22.5) [10]. Etomidate : probablement sans effet, il est un agent de premier choix pour sa stabilité hémodynamique. Propofol et thiopental : non toxiques, mais très hypotenseurs. Opiacés : dépression respiratoire et bradycardie fœtales. Halogénés : relaxants utérins, ils baissent le flux utéro-placentaire. Curares : étant ionisés et hydrophiles, ils ne passent pas la barrière utéro-placentaire. Antihypertenseurs : les béta-bloqueurs (labetalol), l’hydralazine et les anticalciques (nicardipine, difédipine) sont considérés comme sûrs ; la nitroglycérine cause une atonie utérine. Le nitroprussiate est controversé, donc il est plus prudent de l’éviter. Les IEC sont contre-indiqués. Anticoagulants : les anti-vitamines K sont contre-indiqués pendant le 1er trimestre à cause du risque tératogénique ; ils peuvent être repris au-delà et interrompus avant l’accouchement pour être remplacés par l’héparine. L’héparine, non-fractionnée ou de bas poids moléculaire, ne passe pas la barrière utéro-placentaire ; elle est sans risque. Anti-arythmiques : la lidocaïne et le sotalol sont sûrs ; l’amiodarone est contre-indiquée, la digoxine et le vérapamil sont risqués [45]. Monitorage fœtal Passée la 22ème semaine, une surveillance fœtale par tococardiogramme est indiquée en peropératoire, à la condition que soit présente une personne qualifiée pour l’interpréter et qu’un plan soit décidé à l’avance sur la conduite à tenir en cas de bradycardie [10]. Les causes possibles de bradycardie fœtale sont l’hypotension artérielle, la baisse du débit de l’artère utérine, l’hypoxie, les contractions utérines, l’hypothermie et certains médicaments. Le traitement doit être immédiat et agressif. Optimisation de la SaO2 maternelle ; Augmentation du débit de CEC (> 3.0 L/min/m2) ; Correction des anomalies acido-basiques ; Normalisation de la glycémie maternelle (éviter l’hypoglycémie) ; Ajuster la profondeur de l’anesthésie au minimum nécessaire. En cas de contractions utérines, on administre un tocolytique : magnésium, inhibiteur des prostaglandines, catécholamine béta-adrénergique, nitroglycérine. Monitorage de la mère Le monitorage de la parturiente est celui de toute chirurgie cardiaque : cathéter artériel, voie veineuse centrale et ETO. Le cathéter artériel pulmonaire est très souvent indiqué, en particulier pour sa capacité à mesurer la SvO2. Il est nécessaire en cas de sténose aortique ou mitrale sévère, en cas d’insuffisance ventriculaire ou de défaillance cardiaque, en cas d’HTAP, de SDRA et de prééclampsie. Des gazométries sont fréquemment réalisées pour surveiller les échanges gazeux, l’équilibre acido-basique et la glycémie. La saturation cérébrale en O2 (ScO2) de la parturiente (voir Chapitre 6 Mesures de l’oxygénation tissulaire) est une technique de monitorage potentiellement très utile pour évaluer l’apport d’oxygène au fœtus, puisque la SaO2 des artères utérines est théoriquement la même que celle des artères cérébrales [16a]. Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 17 Technique d'anesthésie La technique d’induction d’une anesthésie générale doit tenir compte d’une part des impératifs associés à la grossesse (plus particulièrement une préoxygénation efficace et une induction en séquence rapide avec protection des voies aériennes) et d’autre part des contraintes associées au contexte physiologique. Le monitorage invasif comprend généralement un cathéter intra-artériel et un cathéter veineux central ou, plus fréquemment, un cathéter artériel pulmonaire de Swan-Ganz permettant d’estimer la SvO2 et les pressions de remplissage du ventricule gauche, et d’anticiper une éventuelle hypovolémie et/ou un œdème pulmonaire. L’échocardiographie transoesophagienne est recommandée dès l’induction de l’anesthésie, soit comme technique diagnostique, soit comme élément de monitorage cardiaque périopératoire. La plupart des médicaments utilisés pendant une anesthésie générale traverse la barrière placentaire. Il convient donc de privilégier des substances dépourvues d’effets tératogènes, plus particulièrement lorsque l’intervention a lieu au cours du premier trimestre (Tableau 22.6). La pharmacocinétique et la pharmacodynamique des médicaments diffèrent considérablement entre la mère et le fœtus, notamment à cause des différences dans les protéines plasmatiques et le pH, et à cause de l’immaturité des systèmes enzymatiques fœtaux. De plus, le placenta est un site de biotransformation de nombreuses molécules susceptibles d’influencer l’état du foetus. A ce jour, il n’est pas possible de préciser une stratégie anesthésiologique adaptée à ce genre de situation. Le choix de la technique d’anesthésie doit se baser sur les compétences spécifiques de l’équipe d’anesthésistes et sur le contexte clinique (physiopathologie de la maladie cardiovasculaire, situation hémodynamique au moment de l’évaluation, technique chirurgicale et stratégie post-opératoire). La grossesse s’associe à un certain degré de résistance aux agents vasoconstricteurs, comme les médicaments alpha-adrénergiques et l’angiotensine II [24,25]. Le mécanisme de cette tolérance n’est pas très clair, il implique probablement des modifications pharmacocinétiques et pharmacodynamiques associées à la grossesse. Des doses plus élevées ou des perfusions continues sont parfois nécessaire pour obtenir l’effet hémodynamique maternel désiré. Il est d’ailleurs probable que la résistance à la vasoconstriction, d’origine endogène ou exogène, s’exprime différemment chez la mère et dans l’unité foeto-placentaire. Dès lors, la restauration de l’hémodynamique maternelle par le biais d’agents vasoconstricteurs pourrait se faire au détriment de celle du fœtus ! L’éphédrine, la phényléphrine, la dobutamine, la dopamine, l’adrénaline, la noradrénaline ont toutes été utilisées avec plus ou moins de succès au cours d’interventions cardiaques en cours de grossesse (Tableau 22.5 et 22.6) [1,22,28,35,50a,68]. Le monitorage de la fréquence cardiaque fœtale est indispensable, en se souvenant que cette mesure est un signe clinique très peu spécifique dont l’origine peut être multifactorielle. Technique opératoire La sternotomie médiane est la voie d’abord la plus fréquente. Pour la réaliser, la patiente doit être allongée en décubitus dorsal. Il faut se souvenir que, dans cette position et dès le deuxième trimestre, la compression de la veine cave par l’utérus peut limiter considérablement le retour veineux et le débit cardiaque. Il convient donc d’adopter une position moins défavorable en inclinant latéralement la table d’opération. L’abord chirurgical par thoracotomie (gauche pour une cure de coarctation aortique ou droite pour un RVM), pose moins de problème en terme de compression de la veine cave parce que la patiente est couchée partiellement en décubitus latéral, position nettement plus favorable. Après la sternotomie et l’ouverture du péricarde, l’oreillette droite et la crosse aortique sont canulées pour permettre la mise en place d’un circuit de CEC. Dès la mise en route de cette circulation, le volume circulant est rapidement dérivé de la circulation pulmonaire vers l’oxygénateur et la pression moyenne de perfusion diminue en même temps que les résistances vasculaires périphériques. Le débit Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 18 sanguin est progressivement corrigé d’une part par le volume perfusé de la machine vers la patiente et d’autre part, par une stimulation adrénergique endogène et parfois exogène. Une canule du retour veineux placée dans la veine cave inférieure peut perturber le drainage du sang veineux en aval de l’utérus et par conséquent la perfusion de l’unité foeto-placentaire. De plus, les embolies gazeuses artérielles que l’on observe parfois au début de la circulation extracorporelle perturbent également le transfert d’oxygène à l’intérieur du placenta. Tableau 22.6 : Risque des principaux agents cardio-vasculaires pendant la grossesse [50a]. Médicament Acenocoumarol Aspirine Adénosine Amiodarone Atenolol Bisoprolol Clopidogrel Danaparoid Digoxine Diltiazem Disopyramide Fondaparinux Furosémide Héparine Hydralazine Hydrochlorothiazide IEC et ARA Isradipine Labetalol Lidocaïne Méthyldopa Métoprolol Nifédipine Nitrate, nitrés Procainamide Propanolol Quinidine Sotalol Spironolactone Statines Verapamil Warfarine Catégorie de risque Passage placentaire Passage dans le lait D B C D D C C B C C C C C B C B D C C C B C C B C C C B D X C D oui oui non oui oui oui inconnu non oui non oui oui oui non oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui, toléré non oui oui oui inconnu non oui oui oui non oui, toléré non oui oui oui inconnu oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui inconnu oui oui Degrés de risque des agents pharmacologiques pour le fœtus. A : les études contrôlées ne démontrent pas de risque. B : pas d’évidence de risque, mais pas d’études humaines adéquates. C : les études humaines manquent, les études animales sont positives ; à n’utiliser que si le bénéfice potentiel justifie le risque encouru. D : évidence positive de risque significatif ; utilisable seulement en cas de risque vital. X : formellement contre-indiqué. Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 19 La grossesse crée un contexte maternel plutôt défavorable, parce que la progestérone abaisse les résistances vasculaires systémiques maternelles et diminue la réponse aux agents vasoconstricteurs. Le débit sanguin dans les artères utérines étant directement, mais pas exclusivement, dépendant de la pression de perfusion dans les artères utérines, il est évident que le début de la CEC est un moment critique pour la survie du fœtus. Anesthésie de la parturiente pour la chirurgie cardiaque A l’exception des curares (hydrosolubles), tous les agents d’anesthésie passent la barrière utéroplacentaire. - étomidate : sans risque - thiopental, propofol : sûrs, mais risque d’hypotension artérielle - halogénés : diminuent le tonus utérin - opiacés : dépression respiratoire et bradycardie foetales - curares et héparine : ne passent pas la barrière utéro-placentaire ; considérés comme sûrs - antihypertenseurs : béta-bloqueurs, anti-calciques et hydralazine sont sûrs ; les IEC sont contre-indiqués ; le nitroprussiate est controversé (à éviter de préférence) - anti-arythmiques : béta-bloqueurs et lidocaïne sont sûrs ; amiodarone contre-indiquée Monitorage fœtal : tococardiogramme Monitorage maternel : de type invasif (cathéter artériel, ETO, cathéter de Swan-Ganz, SvO2, ScO2). La CEC se caractérise par une relative résistance auy agents hypertenseurs, parce que la progestérone abaisse les RAS et diminue la réponse aux vasoconstricteurs. Considérations éthiques Un problème éthique peut se poser lorsqu’il existe un conflit d’intérêt entre la mère et le fœtus. Dans la présentation qui précède, deux éléments devaient être pris en considération : l’âge du fœtus et la condition de la mère. Au cours de la 19ème semaine de gestation, le fœtus n’est absolument pas viable ex utero. Lorsque l’accouchement se produit avant la 26ème semaine, la morbidité et la mortalité fœtale sont très élevées, avec des séquelles neurologiques sérieuses à long terme chez plus de 30% des nouveau-nés. Après la 26ème semaine, les chances de survie de bonne qualité augmentent considérablement chez plus de 80% des nouveau-nés prématurés. Chez la mère, l’évolution rapidement défavorable de l’insuffisance aortique et de la cardiomyopathie congestive a imposé sans délai un remplacement de la valve aortique. Le problème éthique se serait posé si l’on avait pris la décision de différer l’intervention jusqu’à ce que le fœtus soit raisonnablement viable, soit un report d’intervention de plus de sept à huit semaines. Une option confortable, celle qui est adoptée le plus souvent, privilégie moralement la mère et considère le fœtus comme une entité morale secondaire [21]. Cette façon de voir est en adéquation avec certains principes de notre société comme ceux de l’intégrité corporelle, de l’autonomie du patient et du respect de la sphère privée. Néanmoins, un certain nombre d’articles commencent à concrétiser la notion de "droits du fœtus" [23,42,56], en contradiction avec les recommandations du comité d’éthique de l’ACOG [14], qui précise qu’il n’est jamais justifié d’imposer une option de traitement médical ou chirurgical à une femme enceinte sous le prétexte de protéger son fœtus. Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 20 Grossesse et cardiopathies On estime que 1-4% des femmes enceintes souffrent d'une cardiopathie: maladie valvulaire, congénitale, coronarienne ou cardiomyopathique. Dans les pays industrialisés, on rencontre majoritairement des cardiopathies congénitales, alors que les maladies rhumatismales dominent le tableau dans les pays émergents. Ces affections requièrent un traitement médical ou chirurgical lorsqu’elles présentent un risque excessif pour la parturiente. Les six facteurs principaux qui aggravent le pronostic sont : Anamnèse d’AVC, d’AIT ou d’arythmies majeures ; Insuffisance cardiaque de degré NYHA III-IV ; Fraction d’éjection du VG < 0.4 ; Obstruction au flux gauche : sténose mitrale (S < 1.5 cm2) ou aortique (S < 1.0 cm2) ; Hypertension pulmonaire (PAPs > 50 mmHg au repos) ; Cyanose (SaO2 < 90% au repos). Dans les cas sévères, la mortalité maternelle au cours de la grossesse s’élève jusqu’à 50% [10]. Valvulopathies Idéalement, la valvulopathie devrait être diagnostiquée et traitée avant la grossesse chez les femmes qui désirent enfanter. Il est recommandé d’opérer la sténose mitrale et la sténose aortique avant que la femme soit enceinte lorsque ces sténoses sont serrées, même si elles sont asymptomatiques [7,27,50a,63]. Les complications des valvulopathies surviennent en général pendant le troisième trimestre, lorsque le DC est le plus élevé. Elles se caractérisent par une péjoration de l'état clinique (passage à une classe fonctionnelle III-IV), des arythmies et un oedème pulmonaire [5]. Les pathologies les plus fréquemment rencontrées chez la jeune femme sont la sténose mitrale, la bicuspidie aortique, l'insuffisance mitrale (IM) ou aortique (IA) avec décompensation gauche, et le syndrome de Marfan avec IA et anévrysme de l'aorte ascendante. D’une manière générale, les sténoses imposent une dangereuse restriction du débit cardiaque, alors que les insuffisances sont bien tolérées à cause de la vasodilatation artérielle de la grossesse. Sténose mitrale La sténose mitrale est la cardiopathie valvulaire la plus fréquente chez la femme enceinte. Elle impose une quasi-fixité au débit cardiaque. Elle est très mal tolérée pendant la grossesse dès que la surface mitrale est < 1.5 cm2, même si la patiente est préalablement asymptomatique [7,63]. Le gradient à travers la valve est proportionnel au débit cardiaque (DC) ; comme ce dernier augmente pendant la deuxième moitié de la grossesse, le gradient transmitral s'élève de 25-50%, et la pression augmente dans l'oreillette gauche; ce phénomène conduit à la stase et à l'oedème pulmonaires. L'OAP est associé à un risque élevé de fausse-couche [17]. D'autre part, la tachycardie qui accompagne l'augmentation du DC raccourcit dangereusement la diastole, et le débit transmitral chute. La mortalité maternelle augmente avec la péjoration de l'état clinique. De 1% lorsque la mère est en classe I-II, elle s'élève à 5% en classe III et à 14-17% en classe IV, surtout en cas de fibrillation auriculaire [29]. Les enfants nés de mères souffrant de sténose mitrale ont un poids de naissance inférieur à la moyenne. Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 21 La césarienne est souvent préférée car elle évite les difficultés d'un long travail, mais la délivrance par voie basse est éventuellement possible [26]. La péridurale ne modifie pas significativement l'hémodynamique si l'installation du bloc est très progressive et si l’on utilise de faibles concentrations d’anesthésique local, mais la rachi-anesthésie est déconseillée à cause de la baisse de précharge et de postcharge. Si une intervention cardiaque de sauvetage est nécessaire pendant la grossesse parce que le traitement médical est insuffisant et que la surface mitrale est inférieure à 1.0 cm2, il est préférable de procéder à une commissurotomie percutanée par dilatation au moyen d’un ballon; cette intervention n’est envisageable que si la valve n'est pas calcifiée. On évite autant que possible de devoir procéder à un remplacement valvulaire en CEC pendant la grossesse, car les risques sont élevés pour le fœtus (mortalité fœtale 20-30%) [2]. Insuffisance mitrale Deuxième par ordre de fréquence, l'insuffisance mitrale est en général bien tolérée, surtout pendant la grossesse où la vasodilatation modérée et la tachycardie améliorent la situation hémodynamique. Seuls 5% des cas se compliquent d'OAP et 4% de tachyarythmie auriculaire [3]. Le prolapsus mitral est en général bien supporté. Par contre, la stimulation sympathique du travail peut augmenter les résistances périphériques et accroître la régurgitation. La césarienne sous rachi-anesthésie ou l'accouchement par voie basse sous péridurale sont parfaitement réalisables. Sténose aortique La fixité du débit cardiaque imposé par la sténose aortique est la cause d'une détérioration hémodynamique chez 20% des mères souffrant de la maladie, le plus souvent secondaire à une bicuspidie. Lorsque le gradient moyen est > 50 mmHg (sténose serrée), la mortalité par insuffisance gauche peut s'élever jusqu'à 11%, avec un pic dans la période du péripartum [60]. La tachycardie est mal supportée. L'hypovolémie est plus à craindre que l'OAP. Comme il est absolument nécessaire de maintenir la précharge et les résistances périphériques, la rachi-anesthésie est contre-indiquée. La péridurale est possible, à condition de maintenir les résistances périphériques avec un vasoconstricteur, de veiller à une installation très progressive du bloc, et d’utiliser de faibles concentrations d’anesthésique local [3,5]. Insuffisance aortique Encore davantage que pour l'IM, la vasodilatation modérée et la tachycardie de la grossesse améliorent la situation hémodynamique dans une IA, mais la situation peut se péjorer lors des stimulations sympathiques du travail et de l'accouchement. Le risque est fonction du degré de symptomatologie de la parturiente. La dilatation aortique ascendante du syndrome de Marfan comporte un risque de 1% de dissection A. De ce fait, la grossesse est contre-indiquée lorsque le diamètre aortique est > 4.5 cm [50a]. Un anti-hypertenseur, un béta-bloqueur (sotalol) et un contrôle très strict sont nécessaires dès que le diamètre aortique dépasse 4.0 cm. En cas d’IA, la loco-régionale est un bon choix pour l’accouchement. Dans le syndrome de Marfan, il faut à tout prix prévenir les poussées hypertensives liées au travail par voie basse à cause du risque de dissection aortique aiguë ; la césarienne programmée est plus sûre, que ce soit sous rachi-anesthésie ou sous anesthésie générale. Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 22 Prothèses valvulaires Chez les femmes porteuses d’une prothèse valvulaire, la mortalité oscille entre 1% et 4%, principalement à cause des problèmes thrombo-emboliques [51,63]. Les anti-vitamine K font courir des risques d'abortus, de prématurité et d'embryopathie lorsqu'ils sont administrés entre la 6ème et la 12ème semaine, et d'hémorragie cérébrale foetale pendant le travail. Ils doivent être remplacés par de l'héparine non-fractionnée ou de l’héparine de bas poids moléculaire, qui ne franchissent pas la barrière placentaire et sont sûres pour le fœtus [30,50a]. Traitement Le traitement des valvulopathies en cours de grossesse a pour but de diminuer la symptomatologie et de permettre le développement du bébé jusqu'à l'accouchement; il ne vise aucunement l'avenir à long terme de la mère [7,50a,63]. Les sténoses serrées symptomatiques malgré le traitement médical peuvent être dilatées par voie percutanée; les insuffisances peuvent en général être contrôlées par vasodilatateurs et diurétiques. Un remplacement valvulaire en CEC pendant la grossesse n'est justifiable que si la vie de la mère est en danger et que si la technique percutanée est contre-indiquée, parce que la mortalité fœtale en CEC est de 20-30% [2]. L'interruption de la grossesse est justifiée si la vie de la mère est menacée en cas de: Dilatation et dysfonction du VG en aggravation (FE < 0.35); Syndrome de Marfan avec IA et dilatation de l'aorte ascendante (diamètre > 4.5 cm); Sténose aortique ou mitrale serrée symptomatique, qui ne peut pas être dilatée par voie percutanée. Si les conditions hémodynamiques sont stables, l'accouchement par voie basse est en général possible; la péridurale diminue les conséquences hémodynamiques du travail, mais le bloc doit être installé très lentement et les concentrations d’anesthésique local réduites pour éviter les modifications de précharge et de postcharge. La césarienne sous AG ou rachi-anesthésie est indiquée lorsque le travail de l’accouchement (poussée hypertensive, manœuvre de Valsalva, autotransfusion lors des contractions) peut décompenser la maladie, comme en cas de syndrome de Marfan avec IA et dilatation sévère de l'aorte, ou en cas d'instabilité hémodynamique sur sténose aortique ou mitrale. Toutefois, la rachi-aneshésie est déconseillée lorsque la précharge et la postcharge ne doivent pas baisser, comme dans les sténoses aortique ou mitrale. En cas de maintien de l'anticoagulation à cause d’une prothèse valvulaire mécanique, la césarienne sous anesthésie générale est la seule solution possible [50a,63]. La technique d’anesthésie pour les parturientes souffrant de valvulopathie est déterminée par les contraintes hémodynamiques de la maladie valvulaire. Elle est décrite en détail au Chapitre 11 (Anesthésie et valvulopathies) et résumée dans l’Annexe C (Recommandations générales pour l’anesthésie lors de valvulopathies). Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 23 Grossesse et valvulopathie Corriger la valvulopathie avant la grossesse; même asymptomatique, la sténose serrée est une indication au RVA ou au RVM. En cas de décompensation en cours de grossesse, privilégier les interventions percutanées, car la mortalité fœtale voisine 20-30% en CEC. Avec un traitement médical adéquat, l'IM et l'IA sont en général tolérées pendant la grossesse et l'accouchement. Le traitement des valvulopathies en cours de grossesse a pour but de diminuer la symptomatologie et de permettre le développement du bébé jusqu'à l'accouchement; il ne vise aucunement l'avenir à long terme de la mère. L'interruption de grossesse est indiquée en cas de décompensation ventriculaire progressive, de syndrome de Marfan (IA + dilatation de l'aorte ascendante) et de sténose aortique ou mitrale serrée symptomatique non dilatable. Cardiopathies congénitales Les modifications hémodynamiques importantes de la grossesse (augmentation de 50% du volume circulant, augmentation de 30-40% du DC et de la fréquence, abaissement des RAS) ont une influence majeure sur les cardiopathies congénitales. Un shunt non-cyanogène gauche - droit est en général bien toléré pour autant que la fonction ventriculaire gauche soit conservée et que la pression pulmonaire soit encore normale. Lorsqu’ils sont importants, toutefois, les shunts G-D peuvent décompenser le VG et s’accompagner d’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) ; dans ce cas, c’est le degré d’HTAP qui domine le pronostic [47]. Un shunt cyanogène droit - gauche est augmenté par la vasodilatation artérielle, par le stress de l'accouchement, et par l’augmentation des RAP sous l'effet de la décharge sympathique. En cas d'HTAP sévère, les RAP sont fixes et ne baissent pas avec la vasodilatation artérielle de la grossesse; la composante droite - gauche du shunt va augmenter et la malade devenir cyanosée. Dans les lésions où le débit cardiaque est diminué par une sténose éjectionnelle, comme dans la coarctation de l'aorte, l'augmentation du débit cardiaque de la grossesse ne peut se faire que par le biais d'une élévation de la fréquence cardiaque, parce que le volume systolique ne peut pas augmenter. Il faut éviter toute bradycardie chez ces patientes [44]. Le taux de complications cardiaques pendant la grossesse oscille entre 11% et 33% chez les femmes souffrant d'une cardiopathie congénitale (moyenne 12%) [18,49,50a]: décompensation cardiaque, cyanose, poussée d’HTAP, thrombo-embolie, arythmie, endocardite. La mortalité maternelle varie de 1% à 40% selon les pathologies [66]. En présence de cyanose marquée au repos (SpO2 ≤ 90%) ou d'HTAP sévère et fixée (syndrome d'Eisenmenger : PAPm > 55 mmHg, RAP > 800 dynes•s•cm-5), elle est de 30-50% [50a,53]. Le décès survient souvent plusieurs jours après la délivrance [50]. La cyanose présente avant la grossesse est un facteur aggravant le pronostic: alors qu'il n'est que de 15% chez les femmes non cyanosées, le taux de morbi-mortalité peut dépasser 50% lorsque la cyanose est marquée [58]. Les facteurs de mauvais pronostic sont : SpO2 < 90% au repos, Hb > 150 g/L avant la grossesse, PAPs ≥ 50 mmHg au repos (PAPmoy > 25 mmHg, RAP > 300 dynes•s•cm-5), Dysfonction du VD. Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 24 La mortalité infantile moyenne est de 4% et le taux de prématurité de 16%, ce qui est plus de quatre fois supérieur aux taux normaux dans les pays industrialisés [18]. Elle s’élève jusqu’à 40-65% dans le syndrome d’Eisenmenger et les cardiopathies cyanogènes sévères, proportionnellement au degré d'hypoxie de la mère. Dans ces pathologies, la prématurité survient dans 22-65% des cas, et le poids de naissance des enfants est plus bas que la norme [18]. L’HTAP et la cynaose sévères sont donc une indication à un avortement thérapeutique en début de grossesse. D'une manière générale, l'anesthésie loco-régionale rachidienne, et particulièrement la rachianesthésie, est vivement déconseillée dans les situations où la vasodilatation artérielle systémique aggrave la situation: shunt droit - gauche, shunt bi-directionnel avec HTAP ou sténose pulmonaire, shunt correctif pour bas débit pulmonaire (shunt de Blalock). Par contre, elle est recommandée dans les situations où il faut éviter une augmentation des RAS: shunt gauche - droit, CIA, CIV. Lors d'hypertension pulmonaire ou de situations où il est souhaitable de baisser les RAP, une anesthésie générale avec hyperventilation est préférable; toutefois, une anesthésie péridurale avec un bloc d'installation très progressive est possible, pour autant que la précharge du VD soit maintenue [41]. Anesthésie pour les affections principales Les recommandations peuvent être résumées brièvement [27,44,50]. CIA, CIV et tout shunt G-D simple: éviter toute augmentation des RAS ; la vasodilatation de la grossesse leur est favorable. Anesthésie rachidienne (péridurale et intrathécale) recommandée pour l'accouchement par voie basse et pour la césarienne; anesthésie générale éventuellement possible pour la césarienne. Shunt palliatif ou correctif (Blalock-Taussig, Waterston): éviter la baisse des RAS, car elles déterminent le débit pulmonaire. Anesthésie générale recommandée; la péridurale est possible si l'installation du bloc est très progressive et la sympathicolyse minimale. Coarctation de l'aorte: maintenir la tachycardie et les résistances artérielles (RAS élevées). Anesthésie générale recommandée pour la césarienne; l'anesthésie péridurale est éventuellement possible pour un accouchement par voie basse; la rachi-anesthésie est contreindiquée à cause de la baisse des RAS. Prévoir un cathéter artériel post-ductal pour surveiller la pression artérielle distale à la coarctation, puisqu’elle détermine la pression du système utéro-placentaire. Tétralogie de Fallot, shunt D-G: la baisse des RAS et le travail de l’accouchement aggravent la cyanose et sont responsables d’une hypoxémie fœtale. L'anesthésie générale est préférée; halogéné avec esmolol et néosynéphrine en cas de crise hypoxique. La péridurale n'est pas recommandée, mais elle est éventuellement possible avec une installation très progressive du bloc et un maintien de la précharge du VD. La rachi-anesthésie est formellement contreindiquée (baisse excessive des RAS). Syndrome d'Eisenmenger (HTAP fixée): le débit pulmonaire est fixe et ne peut pas suivre une augmentation de la demande en O2 ; l’élévation du volume circulant augmente encore la PAP ; la baisse des RAS aggrave la cyanose (augmentation de la composante D-G du shunt). L'anesthésie générale avec hyperventilation est recommandée; une péridurale est exceptionnellement possible, mais avec installation très progressive du bloc et maintien de la précharge du VD. La rachi-anesthésie est formellement contre-indiquée. Bicuspidie et anévrysme de l’aorte (syndrome de Marfan) : la poussée hypertensive du travail fait courir un grand risque de rupture ou de dissection. Prévoir une césarienne sous AG pour stabiliser la pression artérielle. La technique d’anesthésie pour les parturientes souffrant de cardiopathie congénitale est déterminée par les contraintes hémodynamiques de la pathologie. Elle est décrite en détail au Chapitre 15 (Anesthésie lors de cardiopathies congénitales de l’adulte). Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 25 Grossesse et cardiopathies congénitales La baisse des RAS de la grossesse est favorable aux shunts G-D simples (CIA, CIV), mais défavorables aux shunts correctifs (Blalock) et aux shunts D-G cyanogènes (Fallot). L’augmentation du DC et du volume circulant ne peut pas être assurée en cas d’HTAP ou de dysfonction ventriculaire. La cyanose et l’hypoxie fœtale augmentent en cours de grossesse. Les malformations cyanogènes et l’HTAP sévère sont une contre-indication à la grossesse. Facteurs déterminant majeurs de la gravité du pronostic : - SpO2 < 90% au repos - Hb > 150 g/L avant la grossesse - PAPs ≥ 50 mmHg au repos (PAPmoy > 25 mmHg, RAP > 300 dynes•s•cm-5) - dysfonction du VD La mortalité maternelle varie de 1% à 40% selon les pathologies. La mortalité infantile moyenne est de 4% et le taux de prématurité de 16%,). Elle est la plus élevée dans l’HTAP sévère fixée et dans les cardiopathies cyanogènes sévères, proportionnellement au degré d'hypoxie de la mère. L’ALR rachidienne est conseillée dans les shunts G-D simples (CIA, CIV), mais déconseillée dans les shunts D-G cyanogènes, dans les shunts correctifs et dans l’HTAP sévère. Cardiomyopathies Cardiomyopathie du péripartum La cardiomyopathie du péripartum est un diagnostic d'exclusion pour une insuffisance cardiaque congestive qui survient dans le dernier mois de la grossesse ou dans les 5 mois qui suivent l'accouchement, en l'absence d'antécédents ou de cardiopathie d'étiologie déterminée [5]. Son pic d’incidence est à 2 semaines après la délivrance. Elle est plus fréquente chez les parturientes âgées, chez les multipares et dans les grossesses gémellaires (1:4’000 naissances), ainsi que dans certains pays d’Afrique sub-saharienne. La moitié des cas se résolvent sans séquelles, mais pour les autres, la mortalité est de 20-50% [8]. Le VG est dilaté (diamètre télédiastolique > 2.7 cm/m2 ), la FE basse (< 0.35), les arythmies et les embolies fréquentes. Une grossesse ultérieure présente un risque très élevé de décompensation ventriculaire gauche et de décès [20]. L'histologie révèle un processus inflammatoire, une fibrose et une perte de myocytes. Comme la maladie s’accompagne d’une élévation du taux d’anticorps anti-actine/myosine, il est possible qu’elle soit déclenchée par le relargage d’antigènes lors de l’accouchement. Deux éléments étiopathogéniques se détachent actuellement : 1) une chute des oestrogènes, qui favorisent normalement l’adaptation du myocarde aux besoins de la grossesse, et 2) une production de prolactine anormale, qui est cardiotoxique [59]. Le traitement consiste en repos strict et traitement de l’insuffisance cardiaque : vasodilatateurs (hydralazine, amlodipine ; les inhibiteurs de l’enzyme de conversion sont contre-indiqués pendant la grossesse), anticoagulation et catécholamines béta-adrénergiques, voire ECMO en cas de choc cardiogène [10]. Une nouvelle piste se dessine avec l’utilisation de la bromocryptine, qui est un Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 26 agoniste dopaminergique à activité anti-prolactine et qui diminue le taux de complications et de décès de 80% à 10% [59]. Le plus souvent, la délivrance améliore la situation. Les principes de l'anesthésie pour l’accouchement consistent à abaisser la postcharge (vasodilatateurs) et à stimuler la contractilité (catécholamines béta). L'anesthésie loco-régionale est adaptée à ce but. L’équipement doit comprendre un monitorage invasif : cathéter artériel, voie veineuse centrale, ETO en cas d’anesthésie générale. Un séjour aux soins intensifs est nécessaire dans le postopératoire. Insuffisance ventriculaire En cas de cardiomyopathie dilatative avec dysfonction du VG, on considère que le risque pour la parturiente est important mais non prohibitif tant que la FE est ≥ 0.4 ; lorsqu’elle est ≤ 0.35, le risque maternel est très élevé et l’interruption de grossesse doit être envisagée [50a]. Coronaropathies Une coronaropathie stable sans ischémie active ni dysfonction ventriculaire ne pose en général pas de problème majeur [50a]. Par contre, un syndrome coronarien aigu n'est pas exceptionnel pendant la grossesse. On estime qu'il survient dans 1:10'000 cas, particulièrement lorsque la mère est âgée, fumeuse, diabétique, hypertendue ou consommatrice de cocaïne [36]. La mortalité maternelle est de 5-15% et celle de l'enfant de 17%. Les agents utérotoniques (methylergométrine, ocytocine, prostaglandine) peuvent induire des vasospasmes coronariens accompagnés d’une baisse des résistances artérielles systémiques et d'une augmentation des résistances vasculaires pulmonaires et de la fréquence cardiaque, ce qui est une combinaison particulièrement dangereuse en cas de coronaropathie [8,10]. Arythmies Les arythmies, dont le pronostic dépend de la cardiopathie sous-jacente, sont traitées en fonction de la compatibilité des substances avec le développement fœtal. La cardioversion et la défibrillation sont sûres ; l’énergie requise est la même qu’en-dehors de la grossesse ; Certains béta-bloqueurs, les bloqueurs calciques, l’adénosine, la procainamide et la lidocaïne sont des médicaments sans risque majeur ; L’amiodarone est contre-indiquée ; La thermo-ablation est possible, mais doit être reculée au 2ème trimestre et s’accomnpagner d’une protection radiologique très stricte du fœtus. Hypertension artérielle Le seuil de traitement est fixé à 140/90 mmHg chez la femme enceinte. Des valeurs ≥ 170/110 mmHg constituent une urgence médicale et une indication à une hospitalisation. Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) et les antagonistes du récepteur de l’angiotensine (ARA) sont contre-indiqués. Le traitement de première intention est l’alpha-méthyldopa ; en cas de nécessité, certains bétabloqueurs (sotalol) sont utilisables, de même que les anticalciques (voir Tableau 22.6) [50a]. Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 27 Cardiomyopathie du péripartum Insuffisance cardiaque congestive qui survient dans le dernier mois de la grossesse ou dans les 5 mois qui suivent l'accouchement, plus fréquente chez les parturientes âgées, chez les multipares et dans les grossesses gémellaires. Mortalité : 20-50%. Traitement : repos strict, vasodilatateurs, anticoagulation, catécholamines béta-adrénergiques, soutien hémodynamique par ECMO. En investigation : bromocryptine. Traitement de l’hypertension artérielle : alpha-méthyldopa, sotalol, Mg2+, dérivés nitrés; IEC et ARA contre-indiqués. Les recommandations pour l’utilisation des principaux médicaments cardiovasculaires chez la femme enceinte sont résumées dans le Tableau 22.6 [50a]. Il en ressort que les seules substances sûres sont l’aspirine, le danaparoide, l’héparine, l’hydrochlorothiazide, la méthyldopa, les nitrés et le sotalol. Embolie amniotique Le passage de matériel fœtal dans la circulation maternelle est un événement catastrophique qui survient pendant le travail et dans les premières heures post-partum. Il se présente comme un choc cardiogénique, souvent accompagné de dissociation électro-mécanique. Il est léthal dans 86% des cas ; son incidence est de 0.01 - 0.1‰ des accouchements [13]. L’embolisation intra-pulmonaire provoque une vasoconstriction pulmonaire massive qui entraîne une défaillance aiguë du VD, suivie secondairement d’une insuffisance du VG probablement liée à la libération massive de toxines inflammatoires [13]. Une échocardiographie immédiate, si possible transoesophagienne, met en évidence une ou des masses en transit dans les cavités droites. Il s’agit de fragments de 1-3 cm, inhomogènes et d’apparence gélatineuse, que l’on voit flotter momentanément dans l’OD et le VD, tous deux dilatés et défaillants [54,57]. L’insuffisance tricuspidienne est massive. La dysfonction du VG n’est visible que chez les patientes qui ont survécu à la première heure de l’événement. Mode d'accouchement Les parturientes qui présentent une cardiopathie de classe NYHA I-II peuvent accoucher par voie basse, munies d'un monitorage invasif. Celles qui sont en classe NYHA III-IV ne peuvent pas assumer l'augmentation du débit cardiaque de 20-40% réclamé par la délivrance vaginale; elles doivent accoucher par césarienne de manière programmée [62]. A l'exception des cardiopathies congénitales, le choix entre anesthésie loco-régionale ou générale pour la césarienne n'a pas d'impact significatif sur le devenir de la mère ni de l'enfant, pour autant que l'hémodynamique soit maintenue aussi stable que possible [8]. D'une manière générale, la rachi-anesthésie est contre-indiquée à cause de la brutalité du bloc sympathique. Les agents utérotoniques (methylergométrine, ocytocine, prostaglandine) doivent être manipulés avec beaucoup de précaution et administrés en perfusion plutôt qu’en bolus. Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 22 Grossesse et anesthésie cardiaque 28 Bibliographie Lectures conseillées BORIS P, COX W, GOGARTEN W, MARCUS MAE. Maternal cardiac disease. 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