Troisième partie: Schémas équivalents de transformateurs
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Troisième partie: Schémas équivalents de transformateurs
Troisième partie: Schémas équivalents de transformateurs III - 330 Contenu de la troisième partie Cette troisième partie est consacrée à l'étude des schémas équivalents de transformateurs tels qu'on peut les utiliser dans des simulations électriques du convertisseur. Au contraire de la seconde partie, le travail revêt ici un caractère plus bibliographique, partant d'une recherche des schémas équivalents existants pour dégager les plus intéressants d'entre eux. Le chapitre X constitue une introduction aux schémas équivalents. Dans une première étape, on y cerne les spécificités des schémas à utiliser pour la simulation des transformateurs au sein des convertisseurs de puissance. La plus grande partie du chapitre est ensuite consacrée à l'examen des éléments constitutifs de base modélisant les différents effets magnétiques, dissipatifs et électrostatiques. On y étudie également les schémas les plus usuels. Le chapitre XI étudie un schéma particulier: le schéma CCS. On en analyse la constitution, qui est discutée, et on présente les résultats de l'implémentation qui en a été faite et testée au moyen d'un transformateur réel. Le chapitre XII examine deux schémas supplémentaires: les schémas LEG. L'un est un schéma inductif multisorties tandis que l'autre est un schéma complet (modélisant l'ensemble des effets inductifs, dissipatifs et capacitifs) limité à deux enroulements. Enfin le chapitre XIII examine de manière complémentaire d'autres approches menant à des schémas divers. Les conclusions de cette troisième partie sont rassemblées dans la synthèse du chapitre XIV. III - 331 X. Eléments constitutifs Dans ce premier chapitre, qui tient lieu d'introduction aux schémas équivalents, nous passons en revue les trois types de phénomènes à modéliser: les effets magnétiques (modélisés par des coupleurs et des inductances), dissipatifs (résistances) et électrostatiques (capacités). Nous détaillons les principales options disponibles pour traduire ces effets et introduisons les notions qui seront utiles pour l'étude de schémas équivalents particuliers dans les chapitres suivants. L'étape d'identification des éléments est également abordée. Plan du chapitre X.1 Introduction ............................................................................................................... 333 X.2 Phénomènes magnétiques........................................................................................ 336 X.3 Phénomènes dissipatifs ............................................................................................ 348 X.4 Phénomènes électrostatiques................................................................................... 352 X.5 Conclusion.................................................................................................................. 356 X - Eléments constitutifs III - 332 X.1 Introduction Dans ce premier point, nous précisons quelque peu la notion de schéma équivalent telle qu'examinée dans le contexte de notre recherche. Le schéma équivalent étant un modèle, une comparaison peut être faite avec les modèles en éléments finis utilisés dans la seconde partie de cette thèse. Nous cernons ensuite les particularités des schémas équivalents à utiliser dans le cadre de la simulation de convertisseurs de puissance. X.1.1 Le schéma équivalent en tant que modèle Le but d'un schéma équivalent, dans le cadre de notre travail, est de reproduire certains comportements d'une pièce magnétique. Cette définition insiste par elle-même sur le fait qu'on ne peut reproduire tous les aspects d'une pièce réelle. Une première tâche est donc de cerner les effets à modéliser en fonction de l'application à laquelle on destine le schéma. Insistons sur le fait que le schéma équivalent idéal n'existe pas. Nous présenterons dans cette troisième partie de nombreux exemples de schémas: certains sont très complets mais lourds à utiliser, d'autres, plus basiques, s'avèrent adéquats dans des applications plus ciblées. On peut également recourir à différents schémas pour une même pièce magnétique suivant le degré de précision souhaité. De ce fait, un schéma équivalent se caractérise tout autant par les éléments qu'il comporte que par les effets dont il tient ou ne tient pas compte et par le domaine sur lequel il est valable. Un parallèle peut d'ailleurs être fait avec la deuxième partie de ce travail: un schéma équivalent est un modèle, au même titre que les modèles utilisés en éléments finis. Nous ne ferons donc rien d'autre, une fois de plus, que des simulations. Cette fois cependant, nous nous efforcerons de remplacer une pièce magnétique réelle par un schéma équivalent en éléments localisés utilisable dans un simulateur de circuit tel Spice ou Saber. Ce faisant, nous simplifions le dispositif réel de manière bien plus drastique que par une simulation par éléments finis puisque nous passons de plusieurs dizaines de milliers d'équations à quelques équations seulement. La réduction du modèle dans de telles proportions n'est évidemment possible que parce que nous nous limitons maintenant au comportement "extérieur" du transformateur, c'est-à-dire aux courants et tensions vus par celui-ci en interaction avec les autres éléments du convertisseur. Nous abandonnons tout ce qui concerne la compréhension des champs électromagnétiques à "l'intérieur" de la pièce. L'utilisation conjointe des deux types de modèles – élements finis et schéma équivalent– est d'ailleurs une illustration supplémentaire du principe consistant à toujours utiliser le modèle le plus approprié pour étudier un effet donné61. On assiste cependant à une évolution vers des simulations couplant le modèle en éléments finis de la pièce magnétique aux équations de circuit du convertisseur. Le module Saber MMP ainsi que la méthode du schéma équivalent électromagnétique des §IV.3 et §XIII.2 en sont des exemples. 61 X.1 - Eléments constitutifs: Introduction III - 333 Compte tenu de la réduction du nombre d'équations, le modèle simplifié que constitue un schéma équivalent oblige à accepter certaines approximations ou hypothèses. Des phénomènes ayant une certaine extension dans l'espace, comme on l'a vu dans la première partie, sont en effet traduits par un ensemble d'éléments localisés, dont le nombre et la répartition varient d'un schéma à l'autre et influencent le domaine de validité du schéma. Enfin, il ne suffit pas d'imaginer un schéma équivalent et de connaître son champ d'application: il faut encore lui associer une méthode pour identifier ses différents éléments à partir de la pièce réelle ou d'une simulation par éléments finis. Cette étape constitue souvent en elle-même un problème spécifique. En résumé, on peut donc dire qu'un schéma équivalent se caractérise par sa structure et les éléments qu'il comporte, mais aussi: - par les phénomènes qu'il prend ou ne prend pas en compte, - par les approximations et hypothèses sur lequel il est basé, - par l'application concernée et le domaine dans lequel il est valable, - et par la méthode d'identification qui l'accompagne. X.1.2 Spécificité des schémas équivalents pour les convertisseurs de puissance La plupart des schémas équivalents sont organisés autour d'un transformateur parfait modélisant le couplage entre un primaire et un ou plusieurs secondaires, ce qui reflète la fonction première d'un transformateur. Ce transformateur parfait est complété d'éléments supplémentaires (inductances, résistances, capacités) visant à modéliser les "imperfections" de la pièce réelle. Ces imperfections doivent être modélisées avec soin car elles ont un impact important sur le fonctionnement du convertisseur: chute de tension sur les inductances de fuite, pertes abaissant le rendement, résonances entre inductances et capacités parasites, etc. Si elles peuvent être gênantes, elles sont cependant également souvent mises à profit. C'est ainsi que les chutes de tension permettent de limiter les gradients de courant, que certaines topologies utilisent les résonances pour commuter les semi-conducteurs en dissipant moins de pertes, que les pertes du transformateur permettent d'adoucir les formes d'ondes en amortissant les résonances, etc. On comprend donc facilement dans ce contexte la nécessité de disposer de schémas équivalents fiables et détaillés. En ce qui concerne les convertisseurs de puissance, trois spécificités orientent le choix du type de schéma: - la grande majorité des transformateurs possèdent plusieurs secondaires délivrant des tensions différentes, - les formes d'ondes sont fortement chargées en harmoniques, - en fonctionnement normal, le noyau n'entre pas en saturation. X.1 - Eléments constitutifs: Introduction III - 334 La présence de plusieurs sorties, entre lesquelles existent des couplages, demande évidemment de considérer des schémas admettant plus de deux enroulements. On trouve couramment des transformateurs comportant quatre enroulements de puissance ou davantage. Compte tenu de la présence d'un grand nombre d'harmoniques, ces schémas doivent également être valables sur une large gamme de fréquence, spécialement si le convertisseur fait appel à une topologie résonante. Deux origines peuvent être distinguées dans la variation des impédances en fonction de la fréquence: les effets quasi-statiques d'une part, déjà étudiés dans la seconde partie, et les résonances entre inductances et capacités parasites du transformateur d'autre part. Rappelons que les courbes d'impédance typiques d'un transformateur réel ont été présentées au §II.3.3 (p. 59). Enfin, l'absence de saturation en fonctionnement normal permet en général d'ignorer la nonlinéarité de l'inductance de magnétisation, ce qui simplifie fort heureusement le schéma. On doit par contre prendre en compte ce phénomène dans certains cas spécifiques, comme par exemple celui des inductances saturables parfois utilisées dans les secondaires des convertisseurs multisorties. X.1.3 Conclusion Après avoir, dans la seconde partie, étudié les champs à l'intérieur du transformateur, nous nous attachons maintenant à le caractériser "de l'extérieur" pour insérer son modèle en éléments localisés dans la simulation d'un convertisseur. Parmi les nombreux schémas disponibles, nous devons cerner celui ou ceux qui conviennent bien à notre application tant par leur structure que par les phénomènes pris en compte, les hypothèses considérées, le domaine de validité et la méthode d'identification de leurs éléments. Tout l'intérêt d'un schéma réside dans sa manière de tenir compte des "imperfections" du transformateur réel, qui jouent souvent un rôle décisif dans le fonctionnement du convertisseur. Les différentes manières de prendre en compte ces imperfections (effets magnétiques, dissipatifs ou capacitifs) sont développées dans la suite de ce chapitre. Les caractéristiques générales des transformateurs utilisés dans les convertisseurs de puissance nous amènent a priori à diriger notre étude vers les schémas linéaires, multisorties et valables sur une large gamme de fréquence. X.1 - Eléments constitutifs: Introduction III - 335 X.2 Phénomènes magnétiques Un schéma équivalent de transformateur s'articule évidemment d'abord autour d'éléments modélisant les phénomènes magnétiques, à savoir des coupleurs et des inductances. Pour passer d'un modèle "spatial" en deux ou en trois dimensions à un tel schéma, deux démarches sont examinées: la première est basée sur une approche rigoureuse que nous appelons "matricielle" tandis que la seconde, légèrement plus empirique, mène au schéma classique bien connu. X.2.1 Couplages Flux et coefficients d'inductance L'élaboration d'un schéma équivalent suppose de passer d'un problème géométrique décrit dans un espace à deux ou à trois dimensions (ce que nous appelons un modèle "spatial") à seulement quelques grandeurs caractéristiques: les éléments localisés d'un schéma électrique. Dans un premier temps, nous cherchons uniquement à représenter les phénomènes magnétiques ou "inductifs", c'est-à-dire le fait qu'une variation du flux embrassé par un conducteur induit dans celui-ci une force électromotrice. Le flux embrassé dépend précisément des caractéristiques géométriques et physiques (ici la perméabilité) du problème. Dans un matériau linéaire, celles-ci peuvent être résumées en un coefficient d'inductance L constant liant le flux au courant qui lui donne naissance: ψ = Li (X.2-1) Plus précisément, l'inductance est proportionelle au carré du nombre de tours de l'enroulement (N) et inversément proportionnelle à la réluctance: N2 (X.2-2) ℜ Cette réluctance est l'analogue magnétique de la notion de résistance. Elle vaut classiquement pour un tube de flux de longueur l et de section S constante: L= l (X.2-3) µS C'est donc bien cette dernière grandeur qui permet finalement la traduction d'un phénomène spatial en une seule grandeur caractéristique, propre au modèle considéré. Certains schémas sont d'ailleurs basés sur la décomposition du problème géométrique en réluctances (voir §XIII.1). ℜ= Sachant qu'un courant variable, par l'intermédiaire du flux, induit une force électromotrice non seulement dans le conducteur qui porte ce courant mais également dans tout conducteur placé à proximité, on est amené à considérer, pour un système de n enroulements, n2 coefficients d'inductances, ou, en tenant compte de la symétrie de la matrice, n inductances propres et n(n-1)/2 X.2 - Eléments constitutifs: Phénomènes magnétiques III - 336 inductances mutuelles qui traduisent l'ensemble des effets inductifs existant entre les n conducteurs. Du point de vue des effets magnétiques, un transformateur linéaire à deux enroulements par exemple est donc fondamentalement caractérisé par le système ci-dessous: di1 di2 ⎧ ⎪⎪v1 = L1 dt + M dt ⎨ ⎪v = M di1 + L di2 2 2 dt dt ⎩⎪ (X.2-4) C'est ce système, singulièrement réduit par rapport au modèle spatial initial, que nous devons traduire en un schéma équivalent adéquat. Couplage parfait Considérons un transformateur à deux enroulements. La fonction première du transformateur est d'assurer un couplage entre ces deux enroulements, couplage qui trouve son origine dans l'existence d'un flux commun à ceux-ci. Le couplage est parfait lorsque la totalité du flux est commun aux deux enroulements. Une telle situation est obtenue théoriquement pour deux spires bobinées autour d'un noyau de perméabilité infinie. L'examen des réluctances montre qu'on a alors: L1 L M 1 = 22 = = 2 N1 N 2 N1 N 2 ℜ (X.2-5) Les courants et tensions sont alors liés par le rapport du nombre de spires, noté η et défini par: η= N2 N1 (X.2-6) En vertu de (X.2-5), le système initial (X.2-4) dégénère en effet en62: ⎧v 2 = ηv1 ⎨ ⎩i1 = −ηi2 (X.2-7) Compte tenu de ce système simplifié caractérisé par une valeur unique (η), un élément suffit pour caractériser la notion de couplage idéal. Il s'agit du transformateur parfait ou "coupleur" qu'on retrouve dans de nombreux schémas. Nous représentons cet élément par le symbole de la Figure III-1 ci-dessous. Le terme "coupleur" ainsi que sa représentation, au signe des courants près, sont empruntés à Kéradec [103]. 62 La seconde équation du sysème (X.2-7) traduit la conservation de la puissance. X.2 - Eléments constitutifs: Phénomènes magnétiques III - 337 i1 i2 p η p v1 v2 Figure III-1: Coupleur (transformateur parfait) à deux enroulements La notion de coupleur peut être facilement généralisée à n enroulements. Imaginons en effet davantage d'enroulements sur le même noyau de perméabilité infinie: tous voient à nouveau un même flux, ce qui amène à écrire: ⎧v j = η ij vi ⎪ N ⎨ ⎪i1 = −∑η1k ik k =2 ⎩ (X.2-8) avec les rapports de couplage ηij: η ij = Nj (X.2-9) Ni Nous associons au système (X.2-8) le symbole du coupleur multiple (représenté ici pour n=4): i1 v1 i2 η12 p p η13 p η14 p v2 i3 v3 i4 v4 Figure III-2: Coupleur multiple à quatre enroulements Contrairement à ce que la figure ci-dessus pourrait laisser croire, aucun enroulement du coupleur n'est privilégié. Le sens des flèches indique simplement comment sont définis les rapports de couplage à partir d'un enroulement choisi par convention comme le primaire. Les trois "secondaires" sont néanmoins également parfaitement couplés entre eux. La dissymétrie de la X.2 - Eléments constitutifs: Phénomènes magnétiques III - 338 représentation vient simplement du fait que trois valeurs (η12 et η13 et η14) suffisent à caractériser un coupleur à quatre enroulements. Note sur l'implémentation des coupleurs Les coupleurs, qui sont des éléments idéaux, interviennent dans la plupart des schémas équivalents. Il faut donc être à même de les implémenter dans un simulateur de circuit. On utilise généralement dans ce but des sources commandées [176], c'est-à-dire des sources de courant et de tension dont la valeur dépend du courant ou de la tension à un autre endroit du circuit. Les sources commandées, que nous représentons en gris, font partie des éléments de base disponibles dans les simulateurs de circuit. Le coupleur à quatre enroulements de la figure précédente peut par exemple être remplacé par le schéma de la Figure III-3 ci-dessous. i2 η12v1 i1 v1 η12i2 v2 i3 η13i3 η14i4 η13v1 v3 i4 η14v1 v4 Figure III-3: Implémentation d'un coupleur à quatre enroulements au moyen de sources commandées63 Un tel schéma correspond effectivement aux équations (X.2-8) du coupleur, à une nuance importante près: les sources commandées introduisent un sens dans les égalités. Ces sources calculent en effet les membres de gauche conformément aux tensions et courants dans les membres de droite, mais pas l'inverse. Si les coupleurs sont implémentés de cette manière, disposer une source de tension sur un des secondaires (par exemple pour simuler une mesure) ou une source de courant au primaire n'a aucun sens dans le simulateur de circuit. De ce fait, l'implémentation des coupleurs elle-même introduit une distinction entre enroulements puisque la source de tension doit obligatoirement être placée au primaire. Une autre possibilité, que nous n'avons pas testée, apparaît néanmoins comme une alternative. Il est en effet possible dans Spice de définir des mutuelles simplement en entrant un coefficient de 63 On notera que les sources de courant au primaire sont opposées au courant i . Ceci s'explique par la convention 1 choisie pour les courants au secondaire, définis positifs lorsqu'ils sont entrants. X.2 - Eléments constitutifs: Phénomènes magnétiques III - 339 couplage entre deux inductances existantes. L'emploi de coefficients de couplage unitaires (c'est-àdire vérifiant (X.2-5)) entre des inductances fictives devrait permettre une implémentation plus directe et plus satisfaisante du point de vue de la symétrie du schéma. X.2.2 Approche matricielle Couplage imparfait En pratique, il est impossible de coupler parfaitement deux enroulements: il existe toujours dans les dispositifs réels un "flux de fuite" qui réduit le flux commun par rapport au cas précédent. L'importance de cette réduction est caractérisée par le coefficient de couplage que nous avons déjà évoqué ci-dessus et dont la valeur devient maintenant inférieure à l'unité: k= M L1 L2 (X.2-10) Dans le cas d'un couplage magnétique imparfait, le quadripôle ne peut plus être décrit par un coefficient unique η: il faut revenir au système (X.2-4) caractérisé par les trois valeurs L1, L2 et M. C'est ici que commence véritablement l'élaboration d'un schéma équivalent dans lequel nous essayons de traduire l'imperfection de la pièce réelle par rapport à l'idéalité du coupleur. Premiers schémas équivalents La première possibilité pour modéliser un couplage imparfait est d'introduire directement les coefficients d'inductance L1, L2 et M (cette dernière valeur par l'intermédiaire d'un coefficient de couplage) dans Spice. Le "schéma équivalent" se confond alors avec la matrice des coefficients d'inductance. Cette approche est uniquement utilisée pour des modélisations sommaires du transformateur car elle limite assez fortement l'ajout d'éléments supplémentaires. Dans le même ordre d'idées, on peut obtenir un schéma général pour un nombre quelconque d'enroulements en connectant une inductance entre chaque paire de terminaisons du transformateur (Figure III-4, [103]). Un tel schéma, qui découle d'une analyse du système en admittances, comporte effectivement n(n+1)/2 variables qui forment un système équivalent à celui des coefficients d'inductance. Il est néanmoins difficile à interpréter physiquement. On ne peut notamment exclure l'apparition d'inductances négatives. La symétrie apparaissant dans ce schéma montre bien le traitement systématique appliqué aux équations, dans lequel aucun enroulement n'est privilégié. C'est la raison pour laquelle nous qualifions l'approche suivie ici de "matricielle", par opposition à une démarche plus empirique consistant à ajouter des éléments à des endroits bien choisis, détruisant parfois la symétrie du schéma comme nous en verrons des exemples. X.2 - Eléments constitutifs: Phénomènes magnétiques III - 340 i2 i3 v2 v3 i4 i1 v4 v1 Figure III-4: Exemple de schéma matriciel pour n=4 En modifiant légèrement les équations (X.2-4) du quadripôle, on trouve encore un schéma particulier pour n=2, équivalent, à une transformation "triangle/étoile" près, au schéma précédent (Figure III-5). Il est également peu utilisé pour les mêmes raisons (inductances négatives) mais s'approche du schéma classique que nous examinons dans le point suivant. i1 L1-M v1 L2-M M i2 v2 Figure III-5: Schéma équivalent à deux enroulements Schéma à mailles auxiliaires Enfin, une dernière variante assez intéressante tire profit de la possibilité d'utiliser des sources commandées [142]. Supposons en effet qu'on réécrive les équations de base (X.2-4), pour le quadripôle en régime, de la manière suivante: ⎧v 1 = v 11 + v 12 ⎨ ⎩v 2 = v 21 + v 22 (X.2-11) ⎧⎪v jj = jωL j i j ⎨ ⎪⎩v jk = jωM jk ik (X.2-12) avec X.2 - Eléments constitutifs: Phénomènes magnétiques III - 341 Les sources commandées permettent de calculer dans des mailles auxiliaires la valeur de chaque terme vjk individuellement comme dans le schéma de la Figure III-6. i1 v11 v12 v21 L1 v22 i2 L2 v1 v2 v12 i2 M12 v21 i1 M21 Figure III-6: Schéma à mailles auxiliaires pour n=2 (en haut: mailles principales; en bas: mailles auxiliaires) Ces mailles auxiliaires et les sources commandées permettent en fait d'implémenter les inductances mutuelles en associant une tension dans un enroulement au courant dans un autre enroulement. Pour les termes diagonaux vjj, il est plus simple d'insérer directement une inductance classique puisque le courant et la tension appartiennent à la même branche. Ce type de schéma peut très facilement être généralisé à n enroulements: chaque maille principale doit alors contenir n-1 sources commandées en tension correspondant à n-1 inductances mutuelles dans les n mailles secondaires. Nous en verrons un exemple au chapitre suivant. Si le schéma à mailles auxiliaires n'éclaire pas davantage la signification physique des coefficients d'inductance, il permet néanmoins l'usage d'éléments tout-à-fait classiques dans les simulateurs de circuit ainsi que l'extension à d'autres types de phénomènes. X.2.3 Identification des éléments du schéma Comme on l'a dit, outre la constitution du schéma équivalent se pose également la question de l'identification de ses éléments soit à des mesures réalisées sur un transformateur réel soit, si celuici n'existe pas encore, à un modèle (analytique, par éléments finis, etc). En ce qui concerne la pièce réelle, on réalise en principe n(n+1)/2 mesures, typiquement des essais en court-circuit et à circuit ouvert, permettant de calculer autant d'éléments dans le schéma. En ce qui concerne le modèle, une méthode largement répandue consiste à identifier terme à terme l'énergie magnétostatique du modèle avec celle du schéma équivalent. Dans le schéma de la Figure III-5 par exemple, l'énergie magnétostatique vaut: Wm = ( L1 − M )i12 ( L2 − M )i 22 M (i1 + i2 ) 2 + + 2 2 2 X.2 - Eléments constitutifs: Phénomènes magnétiques (X.2-13) III - 342 ou encore Wm = L1i12 L2 i22 + + Mi1i 2 2 2 (X.2-14) Or, en supposant le problème linéaire, on sait grâce au principe de superposition que le champ magnétique pour une configuration quelconque des courants dans les enroulements est la somme des champs magnétiques dus à chaque courant considéré individuellement. En notant Hj le champ relevé dans une simulation où seul l'enroulement j est parcouru par un courant ij, on peut écrire pour n=2 (l'intégrale portant sur tout le volume du problème64): Wm = r r r r r r 1 1 µ ( H ⋅ H * )dV = ∫ µ ( H 1 + H 2 ) ⋅ ( H 1 + H 2 ) * dV ∫ 2 V 2 V (X.2-15) En développant cette dernière relation et en l'identifiant terme à terme à (X.2-14), on obtient les formules des coefficients d'inductance (réécrites ici pour n quelconque): r r 1 L j = 2 ∫ µ ( H j ⋅ H *j )dV (X.2-16) V ij M jk = 1 2i j ik r ∫ µ (H V j r r r ⋅ H k* + H *j ⋅ H k )dV (X.2-17) Lorsqu'on connaît le champ magnétique sur base de simulations ou d'un résultat analytique, ces formules fournissent un moyen de calculer les coefficients d'inductance directement par intégration [3][170]. Cette méthode générale, applicable d'une manière analogue pour calculer les pertes et les coefficients de capacité, possède par contre l'inconvénient d'utiliser simultanément les résultats de deux simulations (notées ci-dessus j et k) pour le calcul des coefficients mutuels. Il faut encore noter que si le schéma lui-même peut être soumis à une forme d'onde quelconque, l'identification réduit sa validité à une seule fréquence. La dépendance en fréquence des effets magnétiques ne peut être modélisée qu'au prix d'éléments supplémentaires. X.2.4 Approche classique Schéma de base à deux enroulements Plutôt qu'une description en coefficients d'inductance, d'interprétation peu aisée, on préfère habituellement utiliser pour un transformateur à deux enroulements le schéma classique de la Figure III-7. Celui-ci est construit autour d'un coupleur (transformateur parfait) auquel on ajoute des éléments parasites: une inductance de magnétisation et deux inductances de fuite. On peut vérifier qu'on Dans (X.2-15) et les équations analogues, la notation * désigne le complexe conjugué et les champs sont supposés exprimés en valeurs efficaces. 64 X.2 - Eléments constitutifs: Phénomènes magnétiques III - 343 retrouve les équations d'un quadripôle magnétostatique –et donc que ce schéma est équivalent aux formulations précédentes– en prenant: ⎧ L f 1 = L1 − ηM ⎪ M ⎪ ⎨ L f 2 = L2 − η ⎪ ⎪⎩ Lm = ηM i1 Lf1 (X.2-18) Lf2 i2 η v1 Lm p p v2 Figure III-7: Schéma équivalent de base d'un transformateur à deux enroulements Si le schéma ci-dessus est très proche de celui de la Figure III-5 obtenu par l'approche matricielle, l'idée est ici d'obtenir une interprétation plus aisée basée sur les notions d'impédance de magnétisation et de fuite, plutôt que sur les coefficients d'inductance et de couplage. D'après Kéradec [103], ce schéma classique ne remplit cependant pas encore toutes les attentes pour plusieurs raisons. Discussion du schéma classique à deux enroulements La première raison concerne le calcul des trois inductances. En théorie, celles-ci peuvent être obtenues par intégration de la densité d'énergie magnétostatique sur le volume occupé par le flux correspondant, d'où l'interprétation aisée des éléments du schéma: Lm s'identifie au flux commun et chacune des inductances Lf1 et Lf2 au flux de fuite d'un enroulement. Mais si cette démarche convient bien pour quelques cas théoriques, il est difficile de séparer clairement les trois domaines pour les transformateurs réels, dans lesquels les spires d'un enroulement ne sont ni ponctuelles ni confondues. Une solution alternative consiste à calculer les coefficients d'inductance Lj et Mjk comme au §X.2.3 et à en déduire les valeurs de Lm, Lf1 et Lf2 sur base des relations (X.2-18) avec η=N2/N1. Mais pour les transformateurs réels, cette méthode peut également mener à des inductances de fuite négatives comme le montre un exemple donné dans [103]. En pratique, l'interprétation physique des éléments du schéma n'est donc pas si aisée qu'on pourrait le croire. X.2 - Eléments constitutifs: Phénomènes magnétiques III - 344 Kéradec fait remarquer que le schéma équivalent de la Figure III-7 introduit fondamentalement quatre variables (Lm, Lf1, Lf2 et η) alors que le quadripôle est pour sa part caractérisé entièrement par trois coefficients: L1, L2 et M. Une des valeurs du schéma peut donc être choisie arbitrairement. On égale généralement le rapport du coupleur η au rapport du nombre de spires en référence au transformateur parfait (X.2-7). Mais tout comme dans le schéma de la Figure III-5 (qui n'est en fait qu'un cas particulier correspondant à η=1), ce choix peut conduire à des inductances négatives. A l'inverse, Kéradec montre qu'on obtient toujours des valeurs positives à condition de prendre: M L1 ≤η ≤ L2 M (X.2-19) En choisissant le rapport du coupleur dans cette gamme de valeurs, on peut obtenir plusieurs schémas différents, équivalents entre eux. Par exemple, la valeur η = signe( M ) L2 L1 (X.2-20) mène à deux inductances série égales tandis que les valeurs extrêmes M/L1 et L2/M correspondent respectivement à une inductance de fuite primaire ou secondaire nulle. On retrouve ici le fait, déjà identifié dans la première partie de la thèse (§II.3.3 par exemple), que la séparation de l'inductance de fuite en deux contributions attribuables chacune à un enroulement est une opération arbitraire [185]. Conformément à cette idée, Kéradec appelle Lf1 et Lf2 des inductances de fuite partielles, leur somme étant l'inductance de fuite totale. Le fait que le rapport de couplage du transformateur parfait puisse être différent du rapport du nombre de spires apparaît lorsque toutes les spires d'un même enroulement n'embrassent pas exactement le même flux. Dans ces circonstances, la notion de flux embrassé par un enroulement devient évidemment insuffisante pour modéliser dans toute leur complexité des phénomènes répartis sur un certain volume. Au sujet de la répartition des inductances de fuite, citons également le travail de fin d'études de Daphné Gilon [67] consacré à l'étude d'un type de commutation résonante: le ZVT ("Zero Voltage Transition"). Dans le cadre de ce travail, nous avons pu constater pour un transformateur à deux enroulements qu'il était obligatoire de répartir l'inductance de fuite en deux parties pour modéliser de manière satisfaisante les formes d'ondes aux alentours de la résonance. Pendant une phase de la commutation, les deux diodes secondaires sont en effet simultanément passantes, ce qui a pour effet de court-circuiter l'inductance de magnétisation en l'absence d'inductance de fuite secondaire, menant à un comportement non conforme aux mesures. Ceci illustre bien le fait que chaque schéma, jusqu'aux éléments qui le composent, doit être particularisé à l'application considérée. Le schéma classique de la Figure III-7, s'il est effectivement d'une interprétation plus facile pour beaucoup de modèles théoriques, doit donc être utilisé avec discernement pour les transformateurs réels, surtout si les inductances de fuite jouent un rôle important dans le fonctionnement du convertisseur. X.2 - Eléments constitutifs: Phénomènes magnétiques III - 345 Généralisation à n enroulements Un autre inconvénient du schéma classique ci-dessus est qu'il ne se prête pas facilement à une généralisation pour plus de deux enroulements. La démarche habituelle consiste à ajouter des secondaires au moyen d'un coupleur multiple, et à attribuer à chacun de ceux-ci une inductance de fuite partielle (Figure III-8, dans laquelle la notation ' désigne une impédance reportée au secondaire). Lf1 Lf2' η12 Lm p p Lf3' η13 p Figure III-8: Extension du schéma classique à plusieurs enroulements Cette démarche est cependant incomplète puisqu'elle ne tient pas compte des couplages réels existant entre les secondaires: la preuve en est qu'un tel schéma contient 2n variables, ce qui est trop peu pour représenter les n(n+1)/2 coefficients d'inductance. Différentes possibilités existent pour tenir compte de ces couplages. Nous en donnerons deux exemples aux chapitres XI et XII. X.2.5 Conclusion Les effets magnétiques, c'est-à-dire les forces électromotrices induites dans un système de n conducteurs, peuvent être caractérisés en régime linéaire et à une fréquence donnée par n(n+1)/2 grandeurs: les coefficients d'inductance. Deux possibilités principales existent pour traduire ceux-ci en un schéma équivalent utilisable dans un simulateur de circuit. La première est l'approche matricielle, dans laquelle aucun enroulement n'est privilégié. Le système est décrit au moyen d'inductances dont certaines peuvent prendre des valeurs négatives et est donc relativement difficile à interpréter physiquement. X.2 - Eléments constitutifs: Phénomènes magnétiques III - 346 La seconde approche consiste à partir d'un transformateur parfait (dont l'implémentation dans un simulateur de circuit n'est pas triviale) et à lui adjoindre des éléments parasites menant au schéma classique bien connu. Malgré la cohérence et l'interprétation aisée des éléments dans des cas théoriques idéalisés, certains cas pratiques font apparaître des inductances négatives. On peut néanmoins remédier à ce problème en modifiant le rapport du coupleur parfait, qui devient alors indépendant du rapport du nombre de spires des enroulements. D'autre part, la généralisation de ce schéma classique à un nombre quelconque d'enroulements pose également certaines difficultés. On dispose donc d'une part d'une méthode rigoureuse mais relativement opaque quant à son interprétation et d'autre part d'un schéma apparemment plus proche des notions "physiques", mais qui doit être utilisé avec discernement. En gardant ces deux approches complémentaires, nous cherchons maintenant à compléter le schéma équivalent pour tenir compte des effets dissipatifs et capacitifs. X.2 - Eléments constitutifs: Phénomènes magnétiques III - 347 X.3 Phénomènes dissipatifs En plus des phénomènes magnétiques, un schéma équivalent doit également modéliser les effets dissipatifs dans le transformateur, à savoir les pertes cuivre et les pertes fer. Ces pertes, et plus spécialement les pertes cuivre, varient significativement avec la fréquence comme on l'a vu dans la deuxième partie. Nous reprenons l'analyse selon les deux approches examinées au chapitre précédent. X.3.1 Approche matricielle De manière générale, on peut tenir compte de l'ensemble des effets dissipatifs en ajoutant une partie résistive à chaque terme de la matrice des coefficients d'inductance [190]. Pour deux enroulements en régime sinusoïdal, on obtient donc le système: ⎧v 1 = ( R11 + jωL1 )i 1 + ( R12 + jωM 12 )i 2 ⎨ ⎩v 2 = ( R21 + jωM 21 )i 1 + ( R22 + jωL2 )i 2 (X.3-1) Insistons sur le fait que celui-ci englobe toutes les pertes, quelle que soit leur origine (donc notamment les pertes fer dans un transformateur). Tout comme la réluctance dans le point précédent, la résistance apparaît ici fondamentalement comme un coefficient résumant les propriétés géométriques et physiques du système, pour les effets dissipatifs cette fois (la propriété physique concernée est donc évidemment la conductivité électrique). En supposant la conducticité de chaque matériau constante (c'est-à-dire en négligeant la nonlinéarité et l'hystérèse du noyau), on obtient, suivant une démarche analogue à celle du §X.2.3, l'expression des "coefficients de résistance" Rjk par intégration de la densité de puissance dissipée par effet Joule (Jj représentant la densité de courant dans tous les conducteurs lorsque seul le conducteur j est parcouru par un courant net non nul ij): 1 1 r r R jj = 2 ∫ ( J j ⋅ J *j )dV (X.3-2) ij V σ R jk = 1 2i j i k 1 r ∫ σ (J V j r r r ⋅ J k* + J *j ⋅ J k )dV (X.3-3) A basse fréquence, l'intégrale (X.3-3) est nulle et (X.3-2) correspond à la définition classique de la résistance d'un conducteur. En présence d'effets quasi-statiques, comme c'est le cas dans les transformateurs de puissance, ces définitions s'écartent par contre un peu des notions habituelles. On observe par exemple que la "résistance propre" Rjj d'un enroulement, suite au fait que l'intégrale s'étend à tout le domaine comme pour les coefficients d'inductance, englobe les pertes dues à la densité de courant non nulle induite par effet de proximité dans les n-1 autres X.3 - Eléments constitutifs: Phénomènes dissipatifs III - 348 conducteurs. La résistance propre d'un conducteur inclut donc une partie des pertes générées dans les autres conducteurs [3]. Elle inclut également les pertes par courants de Foucault dans le noyau. D'autre part, la "résistance mutuelle" Rjk s'avère représenter le surplus des pertes par effet de proximité lorsque plusieurs conducteurs sont parcourus par un courant net (en fait les doubles produits apparaissant du fait que la densité de courant dans un conducteur est la somme de n densités de courant Jj dues aux courants ij). On remarque encore que les pertes totales d'un quadripôle en quasi-statique sont données, conformément à ces définitions, par: PJ ,tot = R11i12 + R22 i22 + 2 R12 i1i2 (X.3-4) Schéma équivalent Pour tenir compte des résistances propres et mutuelles dans un schéma équivalent de type matriciel, il suffit, conformément au système (X.3-1), d'adjoindre à chaque inductance une résistance en série. L'introduction des effets dissipatifs est donc très aisée puisque les schémas matriciels du §X.2.2 gardent la même structure. X.3.2 Schéma classique Pertes cuivre Plutôt qu'une démarche rigoureuse, on préfère dans le schéma équivalent classique introduire quelques résistances supposées d'interprétation physique aisée. Pour les pertes cuivre par exemple, on introduit typiquement une résistance série dans chaque enroulement comme à la Figure III-9. On s'aperçoit facilement que cette solution n'est que partielle puisqu'elle introduit n variables alors que le système, en présence d'effets quasi-statiques, est caractérisé par n(n +1)/2 coefficients de résistance. Dans ce cas, il n'y a évidemment pas moyen d'identifier terme à terme de manière rigoureuse les pertes totales du système (X.3-4) avec celles du schéma équivalent, qui valent: PJ ,tot = Rs1i12 + Rs' 2 i ' 22 = ( Rs1 + Rs 2 )i12 X.3 - Eléments constitutifs: Phénomènes dissipatifs (X.3-5) III - 349 Rs1 Lf1 Lf2' Rs2' η12 p Lm p Rfe Figure III-9: Schéma classique complété pour tenir compte des effets dissipatifs La variation en fonction de la fréquence des pertes cuivre et de l'inductance de fuite, lorsqu'on en tient compte, est généralement modélisée en remplaçant chaque impédance série par une "échelle" composée de résistances et d'inductances [137][143][176][178], selon une technique qui sera détaillée dans le prochain chapitre. Pertes fer Les pertes fer sont quant à elles le plus souvent modélisées par une simple résistance en parallèle sur l'inductance de magnétisation. La dépendance en fréquence (en f pour les pertes par hystérèse et en f 2 pour les pertes par courants de Foucault) n'est généralement pas modélisée, sauf par exemple par Shellmanns [178], qui propose un réseau d'impédances légèrement plus évolué que la classique paire R-L parallèle (voir §XIII.3.2). Le recours à des modélisations plus poussées n'a lieu que lorsqu'on désire tenir compte de la nonlinéarité de la ferrite. Il faut alors coupler le schéma équivalent à un modèle du matériau magnétique. De tels modèles, dont le plus connu est probablement celui de Jiles-Atherton, tentent de reproduire mathématiquement les cycles d'hystérèse majeurs et mineurs qui caractérisent le matériau. On entre là dans un domaine fort complexe traitant notamment de l'origine des pertes dans les matériaux magnétiques, un problème qui n'est pas encore entièrement résolu. Des efforts de recherche intensifs sont menés dans cette voie, en premier lieu par les fabricants de noyaux euxmêmes. Ce point, que nous ne développerons pas, a déjà été évoqué au §I.2.3. X.3.3 Conclusion En ce qui concerne les pertes cuivre, l'approche matricielle fait apparaître, en présence d'effets quasi-statiques, les notions quelque peu inhabituelles de résistance propre et de résistance mutuelle, analogues dissipatifs des coefficients d'inductance. Celles-ci peuvent être introduites dans un schéma de type "matriciel" en ajoutant simplement une résistance à chaque inductance déjà présente. Dans cette formulation, les pertes fer par courants de Foucault sont naturellement prises en compte, la ferrite étant considérée comme un matériau conducteur supplémentaire. L'approche retenue dans le schéma classique est nettement moins rigoureuse puisqu'elle consiste à introduire en série avec chaque inductance de fuite une résistance modélisant les pertes cuivre et en X.3 - Eléments constitutifs: Phénomènes dissipatifs III - 350 parallèle sur l'inductance de magnétisation une résistance représentant les pertes fer. Cette solution n'est forcément qu'une approximation puisqu'elle introduit trop peu de variables pour représenter tous les coefficients de résistance. X.3 - Eléments constitutifs: Phénomènes dissipatifs III - 351 X.4 Phénomènes électrostatiques Les enroulements n'étant rien d'autre que des conducteurs proches portés à des potentiels différents, ils introduisent des effets capacitifs dont les principales manifestations sont des résonances avec les inductances du transformateur ou du convertisseur. Le schéma équivalent doit en tenir compte notamment pour l'étude des alimentations résonantes et de la compatibilité électromagnétique. X.4.1 Approche matricielle Comme précédemment pour les inductances et les résistances, la démarche la plus rigoureuse consiste à identifier les capacités d'un transformateur que nous supposerons d'abord à deux enroulements. L'effet physique auquel nous nous intéressons ici est de nature purement électrostatique: il concerne uniquement la répartition du champ électrique et du potentiel électrique dans le transformateur. En simulation, on l'étudie au moyen de simulations différentes de celles utilisées pour les effets magnétiques (voir §V.2.2). La difficulté principale apparaissant en électrostatique est une multiplication des variables du problème. En effet, si du point de vue magnétique ou dissipatif l'état d'un transformateur à deux enroulements est décrit par deux courants, trois variables sont nécessaires pour les effets capacitifs: la différence de tension sur chacun des deux enroulements mais aussi la différence de tension entre ceux-ci, qui est également une variable du problème à part entière. v1 i1 i2 v2 n=2 i3 v3 Figure III-10: En électrostatique, un transformateur à deux enroulements est un 3-ports Comme on le voit sur la Figure III-10, on peut donc considérer que le système n'est plus caractérisé par deux enroulements mais plutôt, en supposant une des bornes au potentiel de référence, par trois terminaisons. En conséquence, il sera décrit par les équations électrostatiques: dv3 dv1 dv 2 ⎧ ⎪i1 = C11 dt + C12 dt + C13 dt ⎪ dv dv1 dv ⎪ + C 22 2 + C 23 3 ⎨i2 = C 21 dt dt dt ⎪ dv3 dv 2 dv1 ⎪ ⎪i3 = C 31 dt + C 32 dt + C 33 dt ⎩ X.4 - Eléments constitutifs: Phénomènes électrostatiques (X.4-1) III - 352 Il faut donc, compte tenu de la symétrie, six coefficients de capacité ou, plus généralement, n(2n-1) coefficients pour n enroulements. D'un point de vue théorique ou en simulation, ces coefficients peuvent être calculés par intégration de la densité d'énergie électrostatique sur tout le domaine par les expressions suivantes: r r 1 C jj = 2 ∫ ε ( E j ⋅ E *j )dV (X.4-2) vj V C jk = 1 2v j v k r ∫ ε (E V j r r r ⋅ E k* + E *j ⋅ E k )dV (X.4-3) dans lesquelles le champ Ej est celui relevé dans une simulation où on applique le potentiel vj à la terminaison j et un potentiel nul à toutes les autres. Les capacités sont toujours considérées comme constantes en fonction de la fréquence. Dénombrement des éléments de l'approche matricielle Le bilan des coefficients nécessaires à la description des trois types d'effets (inductifs, résistifs et capacitifs) montre au Tableau 35 qu'on arrive rapidement à un nombre fort important d'éléments. Un transformateur à quatre enroulements, courant dans les convertisseurs de puissance, demande en effet théoriquement 48 coefficients, dont plus de la moitié modélisent des effets capacitifs. nbre enroulements 2 3 4 n Lij 3 6 10 n(n+1)/2 nbre coefficients Rij Cij 3 6 6 15 10 28 n(n+1)/2 n(2n-1) Total 12 27 48 3n2 Tableau 35: Coefficients nécessaires à la description d'un système de n enroulements Outre le fait de devoir résoudre en simulation un système comptant autant de coefficients pour le transformateur seul, rappelons qu'il faut également mesurer ou estimer ces coefficients d'une manière ou d'une autre. On comprend mieux dès lors l'intérêt du schéma équivalent classique qui, bien que contenant certaines approximations, est plus facile à manipuler et à interpréter qu'un système complet comme on va le voir ci-dessous. X.4.2 Schéma classique Les articles traitant de l'introduction des effets capacitifs dans le schéma classique sont assez nombreux. Compte tenu du nombre élevé de coefficients de capacité, on ne s'étonnera pas de n'y rencontrer quasiment que des schémas à deux enroulements. X.4 - Eléments constitutifs: Phénomènes électrostatiques III - 353 La solution classiquement rencontrée pour tenir compte de manière exhaustive des effets capacitifs consiste effectivement à introduire six capacités dans le schéma. Une des manières de le faire est illustré à la Figure III-11 [160]. Il est possible d'établir une équivalence entre les capacités de ce schéma et les six coefficients de capacité du système (X.4-1). Cette manière de procéder, qui correspond en fait à une approche matricielle greffée sur le schéma classique, implique l'apparition de capacités négatives. schéma classique inductif et résistif Figure III-11: Schéma classique complété par six capacités Compte tenu de la lourdeur de ce schéma, surtout gênante au moment d'identifier ses éléments, la plupart des modèles sont simplifiés pour ne plus contenir que quatre, trois, deux, voire une seule capacité [25][28][40][88][146][180]. On jugera ces simplifications acceptables ou non en fonction du degré de précision qu'on désire obtenir dans la modélisation, un aspect que nous aurons l'occasion de discuter dans les deux chapitres suivants. A l'inverse de ces simplifications, on relève un modèle à dix capacités chez Prieto lorsqu'il considère les quatre terminaisons flottantes par rapport à la référence [160]. X.4.3 Limitation des effets capacitifs Outre les références citées ci-dessus, qui présentent des modélisations plus ou moins étendues des effets capacitifs, plusieurs articles s'attachent à l'analyse de ces effets en vue de les minimiser. Différentes stratégies de bobinage sont étudiées, notament au moyen de simulations par éléments finis, ainsi que la manière de connecter le transformateur dans le convertisseur. On trouvera davantage d'informations dans les références [12], [106], [155] et [156]. X.4.4 Conclusion Pour l'étude des effets inductifs et dissipatifs, nous avons logiquement considéré qu'un transformateur comporte autant de ports que d'enroulements. Du point de vue électrostatique, ce n'est plus vrai puisque les différences de tension entre les enroulements font également partie du problème. On est donc amené à considérer n-1 ports supplémentaires, ce qui augmente considérablement le nombre de coefficients à prendre en compte. X.4 - Eléments constitutifs: Phénomènes électrostatiques III - 354 Si du point de vue capacitif on peut compléter le schéma classique de manière matricielle (ajoutant six capacités –dont certaines négatives– pour deux enroulements), on se limite plus couramment à un nombre restreint de capacités bien choisies. On introduit inévitablement de ce fait des approximations, dont la validité dépend de l'application concernée. Nous aurons l'occasion de montrer des exemples extrêmes de cette démarche dans les deux chapitres suivants puisque ceux-ci présentent respectivement des schémas à une et à six capacités. X.4 - Eléments constitutifs: Phénomènes électrostatiques III - 355 X.5 Conclusion Au début de ce chapitre, nous avons rappelé qu'un schéma équivalent se caractérise tout autant par sa structure et les éléments qui le composent que par son domaine de validité, les hypothèses sur lequel il s'appuie, ou la méthode d'identification choisie. Compte tenu des spécificités des transformateurs utilisés dans les convertisseurs de puissance, nous avons identifié trois critères principaux dans la recherche d'un schéma équivalent: il doit être capable de modéliser des transformateurs à plus de deux enroulements, il doit tenir compte de la variation en fréquence des impédances (due aux effets quasi-statiques et aux résonances) et il peut être linéaire. Nous avons ensuite envisagé successivement les trois types d'effets à modéliser –magnétiques, dissipatifs et capacitifs– selon deux approches complémentaires. L'approche que nous avons appelée "matricielle" consiste, selon diverses méthodes, à transposer les équations de départ du nports en un schéma où aucun enroulement n'est privilégié. Elle mène à des schémas symétriques dont l'interprétation est peu aisée et qui contiennent notamment des éléments de valeur négative. Pour tenir compte des trois types d'effets, un schéma matriciel complet doit comporter 3n2 éléments. Compte tenu de la lourdeur d'un tel modèle, la seconde approche, celle du schéma classique, tente de limiter la multiplication des éléments tout en leur gardant autant que possible un sens physique, ce qui s'avère finalement assez relatif. La démarche, plus empirique, consiste alors à adjoindre à un transformateur parfait les éléments nécessaires à la modélisation des imperfections du transformateur. En ce qui concerne les phénomènes magnétiques, les deux approches se rejoignent. Des différences apparaissent plus nettement pour les effets dissipatifs et électrostatiques. L'approche classique donne alors des schémas moins rigoureux mais souvent plus faciles à manipuler. En pratique, les deux approches se complètent pour donner des schémas plus ou moins complexes en fonction des approximations qu'on s'autorise. Ayant de cette manière passé en revue les méthodes usuelles pour élaborer un schéma équivalent, nous détaillons dans les chapitres XI et XII deux schémas particuliers, le schéma CCS et le schéma LEG, qui nous apparaissent comme les meilleurs candidats pour modéliser les transformateurs de puissance. Nous en analysons l'élaboration ainsi que le domaine d'application, de même que la validité pratique pour le schéma CCS que nous avons appliqué à un transformateur multisorties réel. D'autres schémas seront encore brièvement examinés dans le chapitre XIII. X.5 - Eléments constitutifs: Conclusion III - 356 XI. Schéma CCS On trouve assez peu de schémas multisorties dans la littérature. Parmi ceux-ci, le schéma "CCS", pour "Coupled Choke Secondaries" ou "secondaires à inductances couplées", a été développé par Niemela, Owen et Wilson (Virginia Power Electronics Center). Ce schéma, qu'on peut voir comme une extension du schéma équivalent classique, est présenté dans une série de trois articles introduisant successivement: - un schéma multisorties de base comportant uniquement des éléments série et valable à une seule fréquence [142], - ce même schéma, modifié pour tenir compte de la variation en fréquence des résistances et des inductances de fuite [143], - et enfin un schéma complet comprenant en plus du précédent des éléments parallèles modélisant l'inductance de magnétisation, les pertes fer et partiellement les capacités parasites [146]. Ces développements sont présentés successivement dans les trois premiers points du chapitre. Les deux points suivants (§XI.4 et §XI.5) exposent comment nous avons validé le schéma dans Excel et l'avons ensuite mis en œuvre dans une application Delphi. L'exemple d'un transformateur réel multisorties permet de cerner plus précisément les possibilités et limitations de ce schéma. Plan du chapitre XI.1 Schéma CCS de base ............................................................................................... 358 XI.2 Modélisation des effets quasi-statiques................................................................. 363 XI.3 Schéma CCS complet.............................................................................................. 370 XI.4 Validation du schéma sur tableur .......................................................................... 378 XI.5 Mise en œuvre dans une application Delphi........................................................ 389 XI.6 Conclusion................................................................................................................ 395 XI - Schéma CCS III - 357 XI.1 Schéma CCS de base Nous présentons d'abord la version la plus simple du schéma CCS, décrite dans [142]: un schéma multisorties modélisant essentiellement les couplages entre les différents secondaires. Le schéma ne comporte que des éléments série et est valable à une seule fréquence. L'identification des éléments se fait sur base de mesures d'impédance en court-circuit. XI.1.1 Schéma de base L'idée de départ est de développer un schéma multisorties tenant compte de l'ensemble des couplages entre enroulements. La modélisation des couplages entre les différents secondaires est particulièrement importante car ceux-ci ont tendance à répercuter sur toutes les sorties les variations individuelles des charges du transformateur (un phénomène connu sous le nom de "cross-effect"). L'approche choisie, dont on trouve l'origine chez Rosa [170], est celle du schéma équivalent classique basé sur un transformateur parfait. Pour illustrer les équations, développées pour tout n, nous utilisons le cas particulier d'un transformateur à quatre enroulements. Schéma équivalent Le point de départ du schéma est un coupleur à quatre enroulements, représenté à la Figure III-12. A ce stade, le schéma comprend trois degrés de liberté: les trois rapports de couplage. i1 v1 i2 η12 p p η13 p η14 p v2 i3 v3 i4 v4 Figure III-12: Le coupleur multiple, point de départ du schéma CCS Le but du schéma CCS de base est de modéliser la non-idéalité des couplages ainsi que les effets dissipatifs entre secondaires uniquement. On considère pour cela que ceux-ci forment entre eux un système de n-1 (et non n) enroulements couplés. Ce système est donc décrit par une matrice de n(n1)/2 coefficients complexes prenant en compte les effets propres et mutuels existant entre les secondaires. XI.1 - Schéma CCS: Schéma CCS de base III - 358 Les auteurs font par contre explicitement l'hypothèse que le courant magnétisant est nul. L'inductance de magnétisation étant absente du schéma, celui-ci ne comporte donc, outre le coupleur, que des éléments série. Cette hypothèse, qui est une particularité par rapport à d'autres schémas, revient à dire que le couplage entre le primaire et les trois secondaires considérés globalement est parfait, c'est-à-dire que les ampères-tours du primaire se répartissent en totalité entre les trois secondaires. Compte tenu de ces considérations, on complète le transformateur parfait de la figure précédente en ajoutant du côté des secondaires un schéma équivalent à mailles auxiliaires (§X.2.2) de trois enroulements. L'ensemble obtenu forme le schéma CCS de base (Figure III-13). vC,2 i1 v1 η12 p i2 ZC,22 p v23 η12v1 v24 vC,3 v2 i3 ZC,33 η13 p v32 η13v1 v34 vC,4 v3 i4 ZC,44 η14 v32 v42 ZC,32 ZC,42 i2 p v42 η14v1 v23 v43 ZC,23 ZC,43 i3 v43 v4 v24 v34 ZC,24 ZC,34 i4 Figure III-13: Le schéma CCS de base pour un transformateur à quatre enroulements Equations décrivant le schéma On peut vérifier que le schéma obtenu répond aux équations suivantes: ⎧v j = η1 j v 1 + v C , j ⎪n ⎨ ⎪∑ N j i j = 0 ⎩ j =1 XI.1 - Schéma CCS: Schéma CCS de base ( j = 2..n) (XI.1-1) (XI.1-2) III - 359 qui sont celles d'un coupleur à n enroulements (X.2-8) dans les secondaires duquel on introduit des chutes de tension vC,j. Celles-ci modélisent l'ensemble des effets magnétiques et dissipatifs relatifs aux secondaires, décrits par le système matriciel: ⎧v C , 2 = Z 22 i 2 + Z 23 i 3 + Z 24 i 4 ⎪ ⎨v C ,3 = Z 32 i 2 + Z 33 i 3 + Z 34 i 4 ⎪v = Z i + Z i + Z i 42 2 43 3 44 4 ⎩ C ,4 (XI.1-3) Dans ce système, chaque impédance comporte une partie résistive et une partie inductive: Z jk = R jk + jωM jk (XI.1-4) Le système (XI.1-3) est implémenté, dans la figure précédente, par les mailles auxiliaires et les sources commandées (§X.2.2). Il faut attirer l'attention sur le fait que le schéma CCS ne peut modéliser un système complet à n enroulements. Dans notre cas (n=4), un tel système est en effet décrit par 10 coefficients complexes, alors que le schéma équivalent de la Figure III-13 ne comporte que 9 variables (6 pour le système au secondaire + 3 coefficients de couplage). Un degré de liberté a en effet été enlevé par l'hypothèse du courant magnétisant nul, traduite dans (XI.1-2). Notons encore que, selon le choix des auteurs, les rapports de couplage sont égaux aux rapports du nombre de spires entre enroulements, soit: η jk = Nk Nj (XI.1-5) En l'absence d'inductance de magnétisation, ce choix est logique puisque la totalité des ampèrestours du primaire se répartit entre les secondaires. La répartition a donc lieu a priori en fonction du nombre de spires de chaque enroulement. Les imperfections des couplages entre secondaires sont par contre prises en compte dans le schéma à mailles auxiliaires. XI.1.2 Identification des éléments du schéma Identification aux coefficients d'impédance Après avoir constitué le schéma, il est nécessaire d'en identifier les éléments ZC,jk. Une première possibilité est de déduire leurs valeurs des coefficients d'impédance Zjk, disponibles par exemple suite à une simulation par éléments finis. En introduisant dans les équations d'un système complet à n enroulements l'hypothèse du courant magnétisant nul (XI.1-2) et en comparant le système obtenu à (XI.1-1) et (XI.1-3), on obtient: Z C , jk = Z jk − η1 j Z 1k − η1k Z j1 + η1 jη1k Z 11 (XI.1-6) qui donne la solution recherchée. XI.1 - Schéma CCS: Schéma CCS de base III - 360 Identification sur base de mesures L'identification des éléments se fait plus couramment sur base de mesures. Compte tenu de l'hypothèse particulière sur le courant magnétisant, il faut évidemment uniquement considérer n(n1)/2 mesures en court-circuit. Une mesure à circuit ouvert n'aurait pas de sens puisque l'impédance de magnétisation est supposée infinie. Nous notons Z(jk) l'impédance mesurée au port j lorsque le port k est court-circuité, les n-2 autres ports étant laissés à circuit ouvert. On voit facilement sur le schéma de la Figure III-13 qu'une première série de mesures, réalisées au primaire en court-circuitant successivement chacun des secondaires, permet de déterminer les impédances propres: Z C , jj = η12j Z (1 j ) (XI.1-7) Une seconde série de mesures réalisées entre paires de secondaires permet de trouver la valeur des impédances mutuelles. On obtient après calcul l'expression [142]: Z C , jk = ⎫⎪ η1k 1 ⎧⎪ Z ( jk ) ⎬ ⎨η1 jη1k ( Z (1 j ) − Z (1k ) ) − η1 j 2 ⎪⎩ ⎪⎭ (XI.1-8) On prend également note de la relation suivante, qui indique une symétrie dans les mesures d'impédance en court-circuit: ⎛ η j1 ⎞ ⎟⎟ Z ( jk ) Z ( kj ) = ⎜⎜ ⎝ η1k ⎠ 2 (XI.1-9) On prendra garde de ne pas confondre le port court-circuité et le port d'où l'on effectue la mesure d'impédance. Si on inverse ceux-ci, la relation montre en effet qu'on obtient une valeur d'impédance multipliée par le carré du rapport de couplage (voir aussi §XI.4.6). XI.1.3 Conclusion Le schéma présenté ci-dessus résulte d'un mélange entre un schéma équivalent classique (couplage primaire/secondaires) et une approche matricielle (couplages entre secondaires). Au lieu de considérer tous les enroulements comme étant équivalents, une dissymétrie est introduite: le couplage primaire/secondaires est considéré comme "parfait" (hypothèse d'un courant magnétisant nul) alors qu'on modélise la non-idéalité des couplages entre secondaires. On obtient de ce fait un schéma plus lisible que s'il était purement matriciel. Compte tenu de la représentation des impédances au secondaire, on ne peut exclure dans celles-ci l'apparition de valeurs négatives. Le schéma CCS de base constitue une solution évidemment incomplète puisque nombre d'effets ne sont pas pris en compte. C'est cependant un point de départ très intéressant puisqu'il offre l'avantage de dépasser le stade du transformateur à deux enroulements. L'identification des éléments est assez simple, autant sur base des coefficients d'inductance que sur base de mesures en court-circuit. XI.1 - Schéma CCS: Schéma CCS de base III - 361 Commentaire [U70] : Les auteurs indiquent que l'absence d'inductance de fuite au primaire ne doit pas étonner car celle-ci est reportée aux secondaires. (cogiter: demande de réfléchir à la répartition del'inductance de fuite entre trois enroulements/une ou plusieurs inductances de fuite?) Le schéma n'est valable qu'à une seule fréquence. Pour lever cette limitation, les auteurs ont développé un schéma modélisant directement la variation des impédances en fonction de la fréquence. Le point suivant explique les modifications à apporter pour tenir compte des effets quasi-statiques. XI.1 - Schéma CCS: Schéma CCS de base III - 362 XI.2 Modélisation des effets quasi-statiques Comme expliqué dans la seconde partie, les effets quasi-statiques se manifestent par une variation de la résistance et de l'inductance des enroulements en fonction de la fréquence. Pour en tenir compte, les auteurs proposent d'introduire des "échelles" d'impédance, menant à un schéma appelé "FIE-CCS" ("Frequency-Independent-Element Cross-Coupled-Secondaries") [143]. La difficulté principale réside alors dans le fait d'identifier les éléments constituant les échelles, sur base de mesures réalisées sur une certaine gamme de fréquence. Mis à part cette modification, les hypothèses du schéma CCS de base restent d'application. XI.2.1 Impédance variable en fréquence Impédance en échelle Pour tenir compte de la variation en fréquence des impédances série, une approche assez classique [137][176][178] et finalement fort simple est proposée: elle consiste à remplacer chaque paire R-L du schéma de base (Figure III-13) par une échelle d'impédances comme à la Figure III-14. Cette opération concerne toutes les impédances ZC,jk, c'est-à-dire autant les impédances propres des mailles principales que les mutuelles des mailles auxiliaires. Par convention, nous considérons que le nombre d'échelons U est le nombre total de paires R-L dans l'échelle: la paire R1-L1 série compte donc pour un échelon. Rs R1 Ls L2 LU R2 RU L1 Figure III-14: Modélisation d'une impédance variable en fréquence par une échelle L'impédance d'un tel réseau en fonction de la fréquence vaut: U ω 2 Rq L2q + jωRq2 Lq q=2 Rq2 + ω 2 Lq Z eq (ω ) = R1 + jωL1 + ∑ 2 (XI.2-1) Cette fonction comporte des pôles aux fréquences fqP (q variant de 1 à U): f qP = XI.2 - Schéma CCS: Modélisation des effets quasi-statiques Rq 2πLq (XI.2-2) III - 363 Elle peut être décomposée en une partie résistive et une partie inductive comme suit: [ ] q=2 Leq ( f ) = 1 ω Rq U Req ( f ) = ℜe Z eq ( f ) = R1 + ∑ [ ] ⎛ f qP ⎞ ⎟ 1+ ⎜ ⎜ f ⎟ ⎠ ⎝ Lq U ℑm Z eq ( f ) = L1 + ∑ q=2 (XI.2-3) 2 ⎛ f ⎞ 1+ ⎜ P ⎟ ⎜f ⎟ ⎝ q ⎠ 2 (XI.2-4) 100 Req (ohm) RS3 RS2 10 1 RS1 0,1 1,E+03 1,E+04 1,E+05 1,E+06 1,E+07 1,E+08 f (Hz) 1,2E-05 LS1 Leq (H) 1,0E-05 8,0E-06 LS2 6,0E-06 LS3 4,0E-06 2,0E-06 1,E+03 1,E+04 1,E+05 1,E+06 1,E+07 1,E+08 f (Hz) Figure III-15: Courbes typiques d'impédance d'une échelle (U=3) La Figure III-15 montre l'allure typique des courbes de résistance et d'inductance équivalentes, obtenues ici pour trois échelons suivant un exemple tiré de [143]. Dans cette figure, on peut identifier des paliers horizontaux (en trait interrompu) correspondant aux valeurs particulières: XI.2 - Schéma CCS: Modélisation des effets quasi-statiques III - 364 i RSi = ∑ Rq (1 ≤ i ≤ U ) (XI.2-5) q =1 LSi = L1 + U ∑L q =i +1 q (1 ≤ i ≤ U ) (XI.2-6) En basse fréquence, la courbe de résistance vaut R1 (=RS1). Au fur et à mesure que la fréquence augmente, les résistances R2 à RU s'ajoutent successivement, pour arriver finalement à un palier valant la somme des résistances R1 à RU, soit RSU. A l'inverse, l'inductance équivalente vaut en basse fréquence la somme des inductances L1 à LU (soit LS1). Au fur et à mesure que la fréquence augmente, les inductances L2 à LU se retranchent pour rejoindre un palier de valeur L1 (voir également Figure III-17, p. 368). Les variations obtenues sont donc bien celles correspondant naturellement aux effets quasi-statiques: augmentation de la résistance et diminution de l'inductance. Identification des éléments de l'échelle Dans le schéma de base valable à une seule fréquence, il suffit, pour trouver la valeur des éléments ZC,jk, d'identifier les résistances et inductances aux valeurs correspondantes déduites des mesures sur le transformateur réel. Grâce aux échelles, on dispose cette fois de plus de degrés de liberté puisque les impédances ZC,jk sont rendues variables en fréquence. Notons Zmes,jk(f) les courbes d'impédance du transformateur réel auxquelles il faut les identifier. Conformément à (XI.1-7) et (XI.1-8), ces courbes sont déduites des mesures d'impédance en court-circuit Z(jk)(f), réalisées en un nombre fini de points répartis sur la gamme de fréquence. L'identification pose essentiellement deux problèmes: - le choix de la gamme de fréquence du modèle (notée fInf à fSup), - pour chaque impédance, le choix des valeurs Rq et Lq des éléments de l'échelle faisant le mieux correspondre l'impédance de celle-ci (Zeq(f)) à la mesure (Zmes(f)). Concernant le premier point, les auteurs insistent sur le fait que le modèle n'est destiné qu'à reproduire les effets quasi-statiques, de sorte que la gamme de fréquence est de toute façon relativement limitée. Si on élargit trop celle-ci, on risque de rencontrer dans le transformateur réel des effets non modélisés, dus à l'inductance de magnétisation pour les fréquences inférieures et aux capacités parasites des enroulements pour les fréquences supérieures. Ces éléments seront par contre intégrés dans le modèle CCS au chapitre suivant. La courbe Zmes(f) représente d'ailleurs une mesure de "l'impédance de fuite" (limitée aux éléments série) plutôt que de l'impédance en courtcircuit (voir §XI.3.4). En se limitant donc aux effets quasi-statiques, on peut voir sur la Figure III-15 que l'impédance de l'échelle est constante aux deux extrémités de la gamme de fréquence. Pour la limite fInf, qu'on choisira généralement dans le domaine statique, ce comportement est bien celui du transformateur XI.2 - Schéma CCS: Modélisation des effets quasi-statiques III - 365 réel, à l'inverse de la fréquence supérieure comme on le verra ci-dessous. En fonction de la largeur de la gamme de fréquence comprise entre ces deux limites, il convient de choisir un nombre d'échelons suffisant pour modéliser la variation des impédances avec la précision voulue. Mais il faut d'autre part éviter de multiplier les échelons sous peine d'alourdir très rapidement le modèle. En pratique, on ne dépasse pas trois à quatre échelons pour les transformateurs multisorties, correspondant typiquement à une gamme de fréquence de deux à trois décades. En ce qui concerne le choix des éléments eux-mêmes, on constate une particularité: chaque expression Req(f) (XI.2-3) et Leq(f) (XI.2-4) dépend de l'ensemble complet des valeurs Rq et Lq. Il est donc impossible d'identifier séparément les éléments résistifs et inductifs de l'échelle: on doit plutôt recourir à une méthode d'identification simultanée de tous les éléments. Deux méthodes différentes sont proposées suivant que l'échelle comporte deux échelons ou plus. XI.2.2 Première méthode d'identification (deux échelons) Lorsque l'échelle ne compte que deux échelons (U=2), l'identification est fort simple (Figure III16): - en basse fréquence, il suffit d'identifier les paliers de résistance et d'inductance avec ceux de la courbe mesurée. Compte tenu des relations (XI.2-5) et (XI.2-6), on a: RS 1 = R1 = Rmes ( f Inf ) LS1 = L1 + L2 = Lmes ( f Inf ) - (XI.2-8) à l'autre extrémité de l'intervalle, on identifie de la même manière l'inductance de l'échelle avec celle de la courbe mesurée, qui varie lentement: LS 2 = L2 = Lmes ( f Sup ) - (XI.2-7) (XI.2-9) par contre faire de même pour la résistance n'aurait pas beaucoup de sens puisque la résistance de l'échelle atteint un palier mais que la résistance mesurée suit une asymptote oblique (voir par exemple Figure II-13, p. 59). On préfère donc faire correspondre les deux courbes environ au milieu de l'intervalle, à une fréquence fmid prise dans la zone du graphe où la pente est la plus élevée. Le calcul de la résistance équivalente de l'échelle à une telle fréquence mène à la formule: R2 = 2 ⎤ ⎡ (2πf mid L2 ) 2 ⎢1 + 1 − 4⎛⎜ Rmes ( f mid ) − R1 ⎞⎟ ⎥ ⎜ 2πf L ⎟ ⎥ 2(Rmes ( f mid ) − R1 ) ⎢ mid 2 ⎝ ⎠ ⎦ ⎣ (XI.2-10) La méthode d'identification se résume donc aux équations (XI.2-7) à (XI.2-10). XI.2 - Schéma CCS: Modélisation des effets quasi-statiques III - 366 R L Rmes LS1=L1+L2 Req R1 Lmes Leq L1 f fmid f Figure III-16: Identification des éléments d'une échelle à deux échelons ("match-point curve fitting") Le fait de faire correspondre les deux courbes de résistance en un point particulier de la gamme de fréquence a donné son nom à cette méthode pour deux échelons: "match point curve fitting". Les auteurs recommandent de choisir la fréquence fmid au point où le facteur FR vaut deux65. Toujours d'après [143], un modèle utilisant une échelle de ce type pour chacune des impédances ZC,jk permet généralement de prendre en compte les premières harmoniques des formes d'ondes. Elle est cependant trop limitée si on désire un calcul des pertes en présence d'ondes carrées, qui demande la prise en compte de beaucoup plus d'harmoniques. XI.2.3 Seconde méthode d'identification (deux échelons et plus) Lorsque l'échelle compte plus de deux échelons, une méthode alternative est proposée, basée essentiellement sur l'identification de l'inductance ("inductance based curve fitting"). La première étape consiste à identifier les valeurs de l'impédance en basse fréquence, comme dans la méthode précédente. L'équation (XI.2-7) pour la résistance reste valable tandis que (XI.2-8) devient: U LS1 = ∑ Lq = Lmes ( f Inf ) q =1 (XI.2-11) La deuxième étape consiste à choisir les fréquences des pôles de la courbe Zeq(f), qui interviennent dans le calcul des résistance Rq: - la valeur de R1 étant déjà fixée, on passe directement au deuxième pôle, qu'on place à la fréquence fV corrrespondant au point d'inflexion de la courbe d'inductance: f 2P = f V (XI.2-12) 65 L'article original parle d'une fréquence où K vaut deux. Or K est la notation classique pour un autre facteur, R R introduit par Carsten et valant FR/X (voir §I.3.4 et §III.2.2). Nous supposons cependant qu'il s'agit bien du facteur FR puisque l'article parle simultanément du rapport RAC/RDC. XI.2 - Schéma CCS: Modélisation des effets quasi-statiques III - 367 - puis on place les pôles suivants à égale distance sur l'axe des fréquences, selon un facteur IP représentant un nombre de décades typiquement compris entre 1,2 et 2 Figure III-17): f qP = f qP−1 .10 (3 ≤ q ≤ U ) Ip (XI.2-13) Dans la troisième étape, en vue d'identifier l'inductance entre deux pôles successifs, on détermine des fréquences intermédiaires fqLS par un décalage OLS (valeur proposée: 0,63IP) à partir des fréquences des pôles: f qLS = f qP .10 OLS (2 ≤ q ≤ U ) (XI.2-14) Enfin on réalise l'identification proprement dite, sur base des valeurs mesurées de l'inductance aux fréquences fqLS d'une part, et sur base des fréquences des pôles fqP pour la résistance d'autre part: ⎧ L1 = Lmes ( f ULS ) ⎪ LS ⎨ L2 = LS1 − Lmes ( f 2 ) ⎪ LS LS ⎩ Lq = Lmes ( f q −1 ) − Lmes ( f q ) (3 ≤ q ≤ U ) (XI.2-15) ⎧⎪ R1 = Rmes ( f Inf ) ⎨ P (2 ≤ q ≤ U ) ⎪⎩ Rq = 2πf q Lq (XI.2-16) L LS1 Lmes(f) L2 L3 L1 0 3e étape OLS f2 f3 fV=f2P LS IP IP 2e étape f OLS LS f 3P f 4P Figure III-17: Identification des éléments de l'échelle XI.2 - Schéma CCS: Modélisation des effets quasi-statiques III - 368 par la méthode des inductances (exemple à 3 échelons) La Figure III-17 représente les étapes 2 et 3 de la démarche ci-dessus ainsi que l'interprétation des valeurs Lq sur base de la courbe d'inductance mesurée. La courbe d'inductance équivalente de l'échelle n'est pas représentée. On peut remarquer sur cet exemple à trois échelons que la gamme de fréquence sur laquelle le modèle est valable s'étend certainement jusqu'à fU+1P (ici f4P) puisque l'inductance du modèle est exacte à la fréquence fULS (ici f3LS). L'article propose encore une méthode de "projection" permettant de déterminer les impédances de fuite lorsque celles-ci sont masquées par les résonances dues aux capacités parasites. Comme on peut le voir, la méthode d'identification pour plus de deux échelons est fort complexe et basée sur plusieurs coefficients empiriques. Ceux-ci rendent la méthode assez difficile à mettre en œuvre en pratique. De plus, il faut remarquer que l'identification de la résistance est fort aléatoire puisque seule la valeur du palier basse fréquence est prise en compte. Ce point sera développé à la fin du chapitre, lors de la mise en œuvre du schéma sur un exemple réel. XI.2.4 Conclusion La variation des impédances en fréquence est obtenue par un procédé assez classique: l'utilisation de "réseaux" ou "échelles d'impédance" pour toutes les impédances du schéma. Ces échelles reproduisent naturellement l'augmentation de la résistance et la diminution de l'inductance caractéristiques des effets quasi-statiques. Elles ne sont par contre pas destinées à modéliser l'influence de l'inductance de magnétisation ou des capacités parasites par exemple. La difficulté principale consiste à déterminer la valeur des éléments constituant les échelles à partir des courbes mesurées sur le transformateur réel. On remarque que la courbe de résistance équivalente et celle d'inductance équivalente dépendent toutes les deux de l'ensemble des éléments de l'échelle, ce qui rend obligatoire une identification simultanée des deux courbes. Lorsque l'échelle comporte deux échelons, les auteurs proposent une méthode permettant une identification aisée des deux courbes dans une gamme de fréquence limitée (environ une décade). En présence de plus de deux échelons, une seconde méthode, basée essentiellement sur l'identification de la courbe d'inductance, apparaît nettement plus aléatoire: d'une part elle utilise plusieurs coefficients empiriques à ajuster, d'autre part l'identification de la résistance est très partielle. Compte tenu de la multiplication rapide des éléments du schéma, il convient en pratique de se limiter à trois voire quatre échelons. En fonction du niveau de précision souhaité, on peut espérer une gamme de fréquence de deux à trois décades. XI.2 - Schéma CCS: Modélisation des effets quasi-statiques III - 369 XI.3 Schéma CCS complet En combinant les acquis des §XI.1 et §XI.2, on dispose d'un schéma modélisant les impédances de fuite (inductances et pertes) d'un transformateur multisorties, en ce compris les variations dues aux effets quasi-statiques. La dernière étape consiste à compléter ces éléments série par des éléments parallèles tenant compte de l'inductance de magnétisation (supposée jusqu'ici infinie), des pertes fer et des capacités parasites. XI.3.1 Eléments parallèles Trois effets supplémentaires sont ajoutés au schéma CCS de base rendu variable en fréquence. Pour tenir compte de l'inductance de magnétisation et des pertes fer, les auteurs choisissent l'option tout-à-fait classique consistant à ajouter un circuit R-L parallèle au primaire du transformateur (voir §X.2.4 et §X.3.2). Ils y ajoutent encore, toujours en parallèle, une unique capacité destinée à modéliser la capacité parasite entre les spires du primaire. Celle-ci peut être vue comme une simplification extrême du schéma à six capacités du §X.4.2. Le circuit parallèle ainsi formé (et constitué des trois éléments notés RmTot, LmTot et CmTot) sera ensuite distribué à l'ensemble des enroulements (§XI.3.3). i1 i'1 η12 p ZC,22 p v1 CmTot RmTot η12v1 LmTot ZC,33 η13 p η13v1 Figure III-18: Première étape de l'ajout d'éléments parallèles Le but poursuivi en ajoutant ces trois éléments est double: étendre la gamme de fréquence d'une part et d'autre part lever l'hypothèse du courant magnétisant nul de manière à rendre le modèle valable pour n'importe quelle condition de charge (y compris à circuit ouvert par exemple). XI.3.2 Identification des éléments parallèles Les trois éléments forment un circuit R-L-C parallèle. Ils doivent être identifiés à partir de la mesure de l'impédance à circuit ouvert du transformateur réel sur toute la gamme de fréquence, mesure qui n'a pas encore été utilisée à ce stade. L'identification se fait donc de manière tout-à-fait indépendante de celle des impédances série. On fait d'ailleurs explicitement l'hypothèse que les chutes de tension sur celles-ci sont négligeables à circuit ouvert [146]. En conséquence, on mesure XI.3 - Schéma CCS: Schéma CCS complet III - 370 en théorie la même impédance, au carré du rapport de couplage près, quel que soit le port depuis lequel on effectue la mesure. Supposons donc qu'on réalise une mesure de l'impédance à circuit ouvert vue du primaire et qu'on dispose des résultats en module et en phase sur toute la gamme de fréquence, c'est-à-dire de deux courbes |ZOC(f)| et θOC(f). Celles-ci possèdent typiquement l'allure illustrée ci-dessous. Notre but est de choisir les valeurs RmTot, LmTot et CmTot de manière à reproduire des courbes d'impédance similaires. 1,E+06 |Zc| (ohm) 1,E+05 1,E+04 1,E+03 1,E+02 10 100 1000 10000 1000 10000 f (kHz) 90 Phase (deg) 60 30 0 -30 -60 -90 10 100 f (kHz) Figure III-19: Courbes typiques de l'impédance à circuit ouvert • A partir des valeurs|ZOC(f)| et θOC(f), on peut calculer un équivalent R-X parallèle sur toute la gamme de fréquence de la manière suivante: RP ( f ) = XP( f ) = XI.3 - Schéma CCS: Schéma CCS complet Z OC ( f ) cos θ OC ( f ) Z OC ( f ) sin θ OC ( f ) (XI.3-1) (XI.3-2) III - 371 • La valeur maximale de RP(f) indique la fréquence de résonance à choisir pour le circuit R-L-C de la Figure III-18. Elle fournit également la valeur de la résistance RmTot, égale à l'impédance du circuit à cette fréquence: RmTot = max{RP ( f )} = RP ( f res ) f res = • (XI.3-3) 1 Tot 2π LTot m Cm (XI.3-4) En-dessous de cette fréquence fres, on sait que le circuit R-L-C est essentiellement inductif. On peut calculer une inductance équivalente à chaque fréquence d'après: LOC ( f ) = Z OC ( f ) XP( f ) = 2πf 2πf sin θ OC ( f ) (XI.3-5) A l'extrémité inférieure de la gamme de fréquence, cette courbe atteint un palier qui fournit la valeur de l'inductance LmTot: LTot m = LOC ( f Inf ) • (XI.3-6) Similairement, on pourrait calculer une capacité équivalente pour les fréquences supérieures à la fréquence de résonance: C OC ( f ) = sin θ OC ( f ) 1 =− 2πf X P ( f ) 2πf Z OC ( f ) (XI.3-7) et prendre pour CmTot la valeur de cette courbe pour la fréquence la plus haute de l'intervalle. Cependant la courbe COC(f) étant souvent perturbée par des résonances supplémentaires non modélisées dans le schéma CCS, on préfère en pratique calculer CmTot sur base de la fréquence de résonance déjà relevée: C mTot = 1 (2πf res ) 2 LTot m (XI.3-8) Les équations (XI.3-3), (XI.3-6) et (XI.3-8) fournissent donc un moyen d'identifier les trois éléments du circuit R-L-C. XI.3.3 Distribution de l'impédance parallèle Pour arriver au schéma CCS final, les auteurs proposent une dernière opération. Celle-ci consiste à distribuer à tous les enroulements les éléments parallèles qui viennent d'être déterminés. Il suffit pour cela de diviser l'impédance parallèle en n circuits R-L-C (dans lesquels on multiplie les XI.3 - Schéma CCS: Schéma CCS complet III - 372 impédances des éléments par n puisque les circuits sont en parallèle) et de transférer un circuit à chaque secondaire en tenant compte des rapports de couplage (Figure III-20). i1 i'1 i'2 i2 v1 v2 Cm1 Rm1 Cm2 Lm1 Rm2 Lm2 i'3 Z(1k) Z'(1k) Schéma CCS de base i3 v3 Cm3 Rm3 Lm3 i'4 i4 v4 Cm4 Rm4 Lm4 Figure III-20: Distribution des impédances parallèles à tous les enroulements Chaque enroulement est donc complété d'un circuit R-L-C dont les valeurs sont calculées suivant: ⎧ ⎪ L = η 2 nLTot M 1j ⎪ mj ⎪ Tot 2 ⎨ Rmj = η1 j nRM ⎪ ⎪C mj = 1 C MTot ⎪⎩ η12j n (XI.3-9) Discussion On peut se demander si cette dernière opération est vraiment utile. D'un point de vue théorique en effet, elle n'est permise rigoureusement que si les chutes de tension sur les éléments série sont négligeables, hypothèse qui est effectivement citée dans [146]. Le rectangle de la Figure III-20 devient alors un simple coupleur au travers duquel les circuits R-L-C sont mis en parallèle, justifiant (XI.3-9). Dans cette hypothèse, la distribution n'apporte rien au schéma et multiplie même inutilement les éléments. Dans le cas où cette hypothèse n'est pas rigoureusement respectée, une impédance distribuée plutôt que localisée peut par contre s'avérer intéressante. Nous avons en effet rencontré un cas (§X.2.4) où le comportement du convertisseur était mieux reproduit en divisant l'impédance de XI.3 - Schéma CCS: Schéma CCS complet III - 373 fuite en plusieurs parties. La distribution résulte dans ce cas d'une approximation que nous aurons l'occasion d'évaluer lors de la mise en œuvre du schéma dans un cas pratique. D'autre part, on peut remarquer que l'ajout d'une impédance parallèle lève bien entendu l'hypothèse du courant magnétisant nul, présente dans le schéma de base. Du point de vue magnétique, on retrouve finalement un schéma classique formé d'un coupleur, d'une inductance de magnétisation (unique mais distribuée à tous les ports) et d'inductances de fuite reportées aux secondaires. Il conviendrait donc en théorie de remettre en cause le choix des rapports de couplage, conformément à l'analyse de Kéradec (§X.2.4), ce que les auteurs ne font pas. XI.3.4 Extraction des impédances de fuite Une distinction doit être faite entre deux types d'impédance. Dans le schéma de la Figure III-20, nous avons indiqué deux impédances Z(1k) et Z'(1k), supposées mesurées avec le secondaire k courtcircuité. La première est l'impédance de court-circuit, mesurable sur un transformateur réel depuis les bornes de l'enroulement. La seconde est l'impédance de fuite, qui suppose un courant magnétisant nul et à laquelle s'applique le schéma CCS de base. Cette nuance est évidemment valable quel que soit l'enroulement depuis lequel on fait la mesure. Ayant mesuré une impédance de court-circuit Z(jk) sur un enroulement quelconque, on peut calculer l'impédance de fuite correspondante Z'(jk) à condition d'avoir au préalable identifié les éléments parallèles. Il faut remarquer pour cela que la mise en court-circuit d'un enroulement k annihile évidemment l'effet du circuit R-L-C parallèle placé sur cet enroulement. Les n-1 autres circuits R-L-C du schéma sont par contre encore présents par l'intermédiaire du coupleur, de sorte que l'impédance parallèle totale vue du primaire lorsqu'un secondaire est court-circuité vaut: 1 Tot ⎧ ⎪ Lm ( jk ) = n − 1 Lm ⎪ 1 ⎪ RmTot ⎨ Rm ( jk ) = − 1 n ⎪ ⎪C m ( jk ) = (n − 1)C mTot ⎪ ⎩ (XI.3-10) Si on dispose de l'impédance en court-circuit sous la forme des courbes |Z(jk)| et θ(jk), un calcul en admittances montre qu'on peut obtenir l'impédance de fuite correspondante par [146]: Z (' jk ) = G(' jk ) − jB(' jk ) (G ) + (B ) 2 ' ( jk ) 2 ' ( jk ) (XI.3-11) avec les expressions: G(' jk ) = XI.3 - Schéma CCS: Schéma CCS complet cosθ ( jk ) Z ( jk ) − 1 Rm ( jk ) (XI.3-12) III - 374 Commentaire [U71] : Par contre pour la symétrie, ça ne se justifie pas ou alors avec une impédance K fois trop importante B(' jk ) = − sin θ ( jk ) + Z ( jk ) 1 − ωC m ( jk ) ωLm ( jk ) (XI.3-13) XI.3.5 Récapitulatif Schéma final et dénombrement des éléments La Figure III-21 montre le schéma final obtenu en combinant les apports des trois articles [142], [143] et [146]. On y voit le coupleur parfait et les impédances série variables en fréquence (dont les mutuelles entre secondaires), ainsi que les éléments parallèles. Tel que représenté, ce schéma peut être directement implémenté dans un simulateur de circuit puisqu'il utilise des sources commandées. (On se souviendra cependant de la dissymétrie que celles-ci peuvent introduire dans le schéma, voir §X.2.1). i1 i'1 η12i'2 v1 Cm1 Lm1 η13i'3 η14i'4 Rm1 i'2 i2 ZC,22 η12v1 v23 v24 Cm2 Lm2 Rm2 i'3 v2 i3 ZC,33 η13v1 v32 v34 Cm3 Lm3 Rm3 i'4 v3 i4 ZC,44 η14v1 v42 v43 Cm4 Lm4 v32 v42 ZC,32 ZC,42 i'2 v23 v43 ZC,23 ZC,43 i'3 où ZC = Rm4 v4 v24 v34 ZC,24 ZC,34 i'4 R1 L2 LU R2 RU L1 Figure III-21: Schéma CCS complet pour un transformateur à quatre enroulements XI.3 - Schéma CCS: Schéma CCS complet III - 375 Les Tableaux 36 et 37 permettent de calculer le nombre d'éléments du schéma complet en fonction du nombre d'enroulements du transformateur et du nombre d'échelons de chaque impédance ZC, à déterminer lui-même suivant la gamme de fréquence et la précision demandées. On y voit qu'on atteint rapidement une cinquantaine d'éléments –voire bien davantage– pour modéliser le transformateur seul. éléments modélisés implémentation n-1 sources de courant transformateur parfait n-1 sources de tension n-1 sources de courant couplages entre (n-1)(n-2) sources de tension secondaires (n -1)2 impédances ZC éléments parallèles n circuits R-L-C 2 Total: n +3 n -1+2U(n -1) 2 éléments nbre éléments n -1 n -1 n -1 (n -1)(n -2) 2U.(n -1)2 3n Tableau 36: Dénombrement des éléments du schéma CCS complet (n: nombre d'enroulements du transformateur, U: nombre d'échelons dans chaque impédance ZC) nbre enroulements n=2 n=3 n=4 n=5 nbre échelons (impédances ZC) U=1 U=2 U=3 U=4 11 13 15 17 25 33 41 49 45 63 81 99 71 103 135 167 Tableau 37: Nombre d'éléments du schéma CCS complet Identification des éléments En résumé, pour identifier les éléments du schéma complet à partir de mesures, la procédure à suivre est la suivante: - calculer les rapports de couplage du transformateur parfait à partir du nombre de spires des enroulements, - choisir une gamme de fréquence sur laquelle effectuer les mesures, - mesurer l'impédance à circuit ouvert, identifier le circuit R-L-C parallèle correspondant (§XI.3.2) et le distribuer à tous les enroulements (§XI.3.3), - mesurer n(n-1)/2 impédances de court-circuit et calculer les impédances de fuite qui s'y rapportent en soustrayant l'influence des éléments parallèles (§XI.3.4), - identifier les impédance ZC,jk propres et mutuelles sur base des méthodes proposées aux §XI.2.2 et §XI.2.3. XI.3 - Schéma CCS: Schéma CCS complet III - 376 XI.3.6 Conclusion Lors de cette troisième et dernière étape, des éléments parallèles sont ajoutés au schéma de base, rendu éventuellement variable en fréquence. Ces éléments, à savoir un circuit R-L-C parallèle distribué à tous les enroulements, modélisent l'inductance de magnétisation, les pertes fer et de manière très partielle les effets capacitifs. L'identification de ces éléments se fait sur base d'une mesure à circuit ouvert, selon une méthode classique. Réalisée comme première étape de l'identification du schéma, la détermination des éléments parallèles permet ensuite d'extraire, à partir des mesures en court-circuit, les impédances de fuite à identifier aux impédances série du schéma de base suivant les méthodes exposées au début du chapitre (§XI.1 et §XI.2). Du point de vue magnétique, le schéma est maintenant complet puisqu'il compte suffisamment d'éléments pour caractériser un système de n enroulements. Ces degrés de liberté sont cependant relativement mal exploités puisque les rapports de couplages sont pris égaux aux rapports du nombre de spires entre enroulements. Il aurait peut-être été préférable de les inclure dans les valeurs à identifier. L'élaboration du schéma au départ de l'hypothèse d'un courant magnétisant nul transparaît dans le fait que toutes les inductances de fuite sont reportées au secondaire. La distribution de l'impédance parallèle ne nous apparaît pas forcément une opération heureuse: elle multiplie les éléments du schéma sans ajouter de degrés de liberté. Dans l'hypothèse où les chutes de tension sur les éléments série sont négligeables (hypothèse nécessaire pour justifier la distribution), le bénéfice de cette opération n'est pas évident, bien qu'une impédance distribuée puisse parfois en pratique donner de meilleurs résultats qu'une impédance unique. Ce point sera approfondi lors de l'application à un transformateur réel. Du point de vue dissipatif, le schéma est également complet et n'appelle pas de commentaire particulier. Comme dans d'autres schémas, la résistance parallèle (pertes fer) ne dépend pas de la fréquence, au contraire des résistances série (pertes cuivre). Enfin du point de vue électrostatique, le schéma est très limité puisqu'il ne compte qu'une seule capacité (distribuée à tous les ports) quel que soit le nombre d'enroulements. Celle-ci est identifiée sur base de la mesure à circuit ouvert. On dispose donc finalement d'un schéma qui répond aux critères fixés au départ: il est linéaire, convient à un nombre quelconque d'enroulements et modélise dans certaines limites la variation en fréquence des impédances. Dans le point suivant, ce schéma CCS complet est appliqué à un transformateur réel. XI.3 - Schéma CCS: Schéma CCS complet III - 377 XI.4 Validation du schéma sur tableur Pour tester la validité du schéma CCS, nous l'implémentons d'abord, dans sa version la plus complète, dans le tableur Excel. Par ce moyen, nous extrayons le schéma équivalent d'un transformateur réel à quatre enroulements. Cette validation est l'occasion d'apporter une amélioration au modèle original quant à l'identification des paramètres. XI.4.1 Transformateur de test Transformateur utilisé La validité du schéma CCS complet est testée au moyen d'un transformateur utilisé dans une alimentation 200W multisorties fabriquée par I.T.S. Mitra66. Celui-ci est basé sur un noyau EE42/42/20 en ferrite 3F3 et est destiné à fonctionner à une fréquence de base de 100kHz. En toute rigueur, ce transformateur comporte en fait onze enroulements différents et deux écrans, ce qui donne une idée de la complexité des pièces magnétiques réelles. On se contentera cependant de considérer quatre enroulements principaux indiqués dans le tableau ci-dessous. On néglige de ce fait une partie des effets du dispositif réel, ce qui est une source de discordances à évaluer. Les mesures sont réalisées sur un analyseur d'impédance HP4192A mesurant l'impédance complexe dans une gamme de fréquence de 5Hz à 13MHz. enroulement 1 primaire nbre spires 24 nbre couches 2 conducteur fil rond 8 brins, ρ=0,2mm ruban 17mmx0,2mm 2 3 secondaire 5V secondaire 24V 2 13 2 1 fil rond 2 brins, ρ=0,45mm 4 secondaire 12V 7 1 fil rond 2 brins, ρ=0,45mm Tableau 38: Enroulements pris en compte dans le transformateur utilisé pour valider le modèle CCS XI.4.2 Implémentation du schéma sur tableur Classeur Excel Une première implémentation du schéma CCS complet dans Excel est réalisée à l'occasion du travail de fin d'études d'Alain Wauthier [208]. L'idée est alors simplement de valider le schéma équivalent en comparant les impédances mesurées en court-circuit et à circuit ouvert aux impédances correspondantes fournies par le schéma équivalent. 66 Transformateur référencé NC 4004 101 1086, convertisseur PE3238/02. XI.4 - Schéma CCS: Validation du schéma sur tableur III - 378 Alain Wauthier a dans ce but développé un classeur Excel complété de macros en VisualBasic qui calcule les éléments d'un schéma à deux, trois ou quatre enroulements sur base de mesures. Ce classeur comporte les feuilles de calcul suivantes: • trois feuilles réalisant l'interface avec l'utilisateur, à savoir: - une feuille pour l'entrée des données: le nombre de spires de chaque enroulement, la plage de fréquence du modèle et le nom des fichiers d'entrée (contenant les mesures) et de sortie (contenant les valeurs des éléments du schéma), - une feuille de résultats contenant les valeurs des impédances série et parallèle du modèle après calcul, - une feuille récapitulant les graphes des impédances série en fonction de la fréquence; • des feuilles réalisant le calcul des éléments proprement dits, à savoir: - une feuille "Z(11)" calculant la valeur des éléments parallèles totaux et leur distribution sur chaque enroulement (d'après les §XI.3.2 et §XI.3.3), - des feuilles "Z(ij)" calculant pour chaque enroulement la valeur des impédances de fuite à partir des mesures en court-circuit (d'après le §XI.3.4), - des feuilles "ZC,ii" et " ZC,ij" calculant les éléments des échelles (à un, deux ou trois échelons) modélisant la variation en fréquence des impédances de fuite calculées cidessus; • des feuilles supplémentaires définissant les macros et les interfaces graphiques présentées à l'utilisateur. Utilisation d'un tableur L'implémentation dans un tableur se justifie par la lourdeur du traitement de données nécessaire à l'obtention du schéma équivalent. Dans cet exemple, on modélise un transformateur à quatre enroulements dans la gamme 10kHz-2MHz. Chaque mesure d'impédance représentant une centaine de valeurs complexes sur cette gamme, on obtient donc environ 700 valeurs complexes (six mesures en court-circuit et une mesure à circuit ouvert) comme données de départ. Ces données doivent ensuite être traitées pour obtenir finalement un schéma comptant entre 50 et 100 éléments suivant le nombre d'échelons choisi (voir Tableau 37, p. 376). Entrer les résultats des mesures dans le tableur s'avère évidemment très fastidieux si on ne peut récupérer les résultats de l'analyseur sous forme de fichier. Le grand nombre d'éléments du schéma pose un problème analogue lorsqu'il s'agit de transférer le schéma équivalent dans Spice. Réalisées manuellement, ces deux opérations comportent un risque d'erreur important. Nous chercherons donc un moyen de les automatiser dans le chapitre suivant. Un autre inconvénient du tableur est la rigidité inhérente à sa structure en feuilles de calcul. Si on désire modéliser un enroulement supplémentaire, il faut en effet ajouter des feuilles de calcul et des macros, et de ce fait personnaliser le classeur à chaque utilisation. Introduire des variantes dans les XI.4 - Schéma CCS: Validation du schéma sur tableur III - 379 méthodes de calcul en vue d'améliorer l'identification des éléments se révèle également fort lourd en pratique. XI.4.3 Amélioration de la méthode d'identification par régression Ayant réalisé l'implémentation du schéma CCS, on l'applique au transformateur de test. L'identification des impédances parallèles donne des résultats corrects. Par contre, pour les inductances série, l'application de la méthode des inductances telle que décrite dans les chapitres précédents donne des résultats fort moyens: les impédances du modèle s'écartent de manière significative des courbes mesurées, même pour quatre échelons. Les discordances constatées semblent pouvoir être attribuées au caractère empirique des paramètres choisis pour l'identification des éléments série (FR, IP, OLS): les valeurs retenues dans les articles ne conviennent pas à notre transformateur de test. Les auteurs indiquent d'ailleurs que la méthode n'a été testée que de manière limitée sur quelques transformateurs. Pour résoudre ce problème, on pourrait songer à déterminer avec plus de précision les points caractéristiques des courbes participant à l'identification. Nous préférons nous diriger dans une autre voie: ajuster les éléments des échelles par régression. nous pouvons utiliser pour cela les fonctions de régression standard disponibles dans le tableur (fonction "solver"). Pour chaque impédance ZC,jk, les variables à ajuster sont les impédances Rq et Lq. La régression tient compte d'une contrainte: en basse fréquence, la somme des inductances de l'échelle est imposée (§XI.2.3). Une difficulté déjà évoquée apparaît: les courbes de résistance et d'inductance des échelles dépendent chacune de toutes les valeurs Rq et Lq. La régression doit donc s'opérer simultanément sur les deux courbes. Nous choisissons comme fonction Γ à minimiser de cumuler la somme des carrés des écarts (entre mesure et modèle) des parties résistive et inductive de l'impédance: ⎧ ⎧ 2⎫ 2⎫ Γ = wR ⎨∑ Log ( Rmes ) − Log ( Req ) ⎬ + wL ⎨∑ Lmes − Leq ⎬ ⎩ fréq ⎭ ⎩ fréq ⎭ [ ] [ ] (XI.4-1) Dans cette expression, l'indice "mes" indique la valeur mesurée tandis que "eq" désigne l'impédance équivalente de l'échelle dans le modèle. La résistance est prise en logarithme, de manière à ramener à un même ordre de grandeur les écarts observés en haute et en basse fréquence. Les poids wR et wL permettent de doser l'importance relative des deux courbes dans la régression. Ce cumul des erreurs des deux courbes est relativement peu rigoureux mais fournit une manière commode de contourner le problème posé par les paramètres empiriques dans la méthode originale. Il est d'ailleurs également utilisé, mais sans logarithme cette fois, dans [3]. De fait, on obtient un modèle nettement meilleur, reproduisant les impédances du transformateur sur toute la gamme de fréquence comme on le verra ci-dessous. XI.4 - Schéma CCS: Validation du schéma sur tableur III - 380 Commentaire [U72] : N.B.: en standard, type Newton ou éventuellement gradient conjugué En pratique, le tableur fournit pour chaque impédance série une première proposition pour les éléments de l'échelle et présente à l'utilisateur le résultat sous forme de courbes, à comparer avec les courbes mesurées. En fonction du résultat obtenu, l'utilisateur peut ajuster les poids wR et wL jusqu'à obtenir le meilleur compromis. Lorsqu'il est satisfait, il passe à l'impédance suivante, jusqu'à avoir identifié ainsi toutes les impédances du transformateur. XI.4.4 Résultats du modèle complet Pour présenter les résultats relatifs au transformateur de test, nous examinons successivement l'impédance à circuit ouvert, les impédances de fuite (échelles), et les impédances en court-circuit. Impédance à circuit ouvert La Figure III-22 montre trois courbes, quasiment confondues, du module de l'impédance à circuit ouvert. L'accord entre le modèle (courbe rouge) et le transformateur réel (courbe verte) est excellent, ce qui se vérifie également sur la phase, non représentée. 1,E+06 |Z| (ohm) 1,E+05 1,E+04 1,E+03 1,E+02 10 100 1000 10000 f (kHz) Figure III-22: Module de l'impédance à circuit ouvert (vert: mesure; rouge: modèle; bleu: R-L-C seul) La courbe bleue ajoutée sur le graphe montre encore l'impédance du circuit R-L-C parallèle seul. Elle confirme que l'impédance à circuit ouvert se ramène effectivement à celle d'un circuit R-L-C avec une très grande fidélité. On peut en déduire également que les chutes de tension sur les impédances série sont effectivement négligeables comme on en avait fait l'hypothèse. XI.4 - Schéma CCS: Validation du schéma sur tableur III - 381 Impédances de fuite Après avoir calculé l'impédance parallèle, on soustrait l'influence de celle-ci des mesures en courtcircuit pour obtenir les impédances de fuite. On identifie à celles-ci les impédances des échelles au moyen de la régression proposée dans le point précédent. La Figure III-23 montre un résultat typique obtenu ici avec quatre échelons pour une impédance de fuite ZC,jk. Les autres impédances série du transformateur montrent un accord comparable. Comme on le voit, la régression permet d'obtenir un bon accord sur toute la gamme de fréquence choisie, de 10kHz à 2MHz. Pour l 'inductance, l'écart entre les mesures est très faible: typiquement moins de 2%, sauf à la limite supérieure de la gamme de fréquence, où il atteint environ 8%. Pour la résistance, l'écart est plus important: typiquement 5 à 10% avec une valeur extrême de 50% à 2MHz. En ce qui concerne l'inductance mesurée, on note une dispersion importante des valeurs aux fréquences les plus basses. Si on désire identifier le modèle en présence d'une telle dispersion (qui est ici en dehors de la gamme de fréquence), il convient d'être vigilant à la valeur choisie en basse fréquence. On pourrait par exemple songer à un moyennage des valeurs mesurées. A l'autre extrémité de l'intervalle, la courbe mesurée comporte une résonance. En théorie, celle-ci ne devrait pas apparaître dans l'impédance de fuite puisqu'elle révèle un effet capacitif, normalement soustrait préalablement au niveau de l'impédance parallèle. On se souvient cependant que le schéma ne comprend qu'une seule capacité, ce qui est beaucoup trop peu pour modéliser l'ensemble des effets électrostatiques: en théorie, il en faudrait en effet 28 dans un schéma à quatre enroulements (voir Tableau 35, p. 353). D'autre part, il ne faut pas oublier que le transformateur réel comporte en fait onze enroulements, ce qui multiplie encore le nombre théorique de coefficients de capacité (en théorie jusqu'à… 231!). Compte tenu de cette modélisation très élémentaire au niveau de l'impédance parallèle, des effets capacitifs subsistent dans l'impédance de fuite, qui ne peuvent que médiocrement être pris en compte par les échelles. Celles-ci sont en effet uniquement destinées à modéliser les variations relativement lentes dues aux effets quasi-statiques. La gamme de fréquence du modèle apparaît donc limitée, en haute fréquence, par les effets capacitifs supplémentaires non réductibles à la capacité parallèle. C'est une conclusion importante quant aux possibilités du modèle. On obtient dans ce cas-ci un modèle valable sur un peu plus de deux décades, avec une très bonne précision grâce aux quatre échelons utilisés. Ce modèle comporte 99 éléments. XI.4 - Schéma CCS: Validation du schéma sur tableur III - 382 Rc,32 (ohm) 1 0,1 0,01 0,001 1 10 100 1000 10000 f (kHz) 5,E-07 Lc,32 (H) 4,E-07 3,E-07 2,E-07 1 10 100 1000 10000 f (kHz) Figure III-23: Comparaison de l'impédance de fuite ZC,32 du transformateur réel (en vert) et du modèle (en rouge), identifiée entre 10kHz et 2MHz Impédances de court-circuit Enfin, ayant identifié indépendemment les impédances de fuite et l'impédance à circuit ouvert, on peut vérifier la validité des impédances de court-circuit données par le modèle complet. On constate à la Figure III-24, ce qui est également valable pour les autres enroulements, que l'accord est très bon (courbes verte et rouge) sur la gamme de fréquence retenue, avec des écarts comparables à ceux cités pour l'impédance de fuite. Le modèle montre une résonance marquée aux environs de 8MHz entre la capacité parallèle et l'inductance série. XI.4 - Schéma CCS: Validation du schéma sur tableur III - 383 1,E+03 Req (ohm) 1,E+02 1,E+01 1,E+00 1,E-01 1 10 100 1000 10000 1000 10000 f (kHz) 4,E-05 Leq (H) 3,E-05 2,E-05 1,E-05 0,E+00 1 10 100 f (kHz) Figure III-24: Comparaison des impédances de court-circuit Z(41) (vert: mesure; rouge: modèle CCS) et de fuite ZC,41 (idem en trait interrompu) On constate encore que les impédances de fuite (en trait interrompu) sont très proches des impédances en court-circuit sur toute la gamme de fréquence. Des divergences n'apparaissent qu'en-dehors de celle-ci, en haute fréquence (résonances) mais également en basse fréquence pour l'inductance. L'hypothèse classique d'un courant magnétisant négligeable, à la base du schéma CCS, s'applique donc tout-à-fait au transformateur de test. Pour les fréquences les plus hautes, on retrouve le fait que l'extraction de l'impédance de fuite à partir de l'impédance de court-circuit ne constitue pas vraiment une amélioration marquante. Cette opération devrait en effet éliminer les effets autres que quasi-statiques. On constate au contraire que la courbe est tout aussi perturbée après cette opération, ce qui est dû comme on l'a indiqué à la présence d'effets électrostatiques non pris en compte dans le modèle. Compte tenu du fait que les deux courbes (court-circuit et fuite) s'identifient quasiment parfaitement en-dessous des XI.4 - Schéma CCS: Validation du schéma sur tableur III - 384 résonances, on peut même se demander si l'extraction de l'impédance de fuite est une opération utile. XI.4.5 Discussion des résultats Quant à la validité du modèle Le modèle CCS est à la base destiné à modéliser les impédances série, y compris leurs variations quasi-statiques sur une certaine gamme de fréquence. Il existe néanmoins une autre source de variation en fréquence des impédances, à savoir les résonances intervenant entre capacités et inductances et limitées en amplitude par les effets résistifs. Ces résonances s'identifient facilement dans les courbes par des variations de grande amplitude localisées en fréquence. En ce qui concerne les effets capacitifs, le schéma CCS est très élémentaire puisqu'il comprend une seule capacité, distribuée entre les enroulements. Il s'agit de la capacité parasite du primaire qui, à circuit ouvert, résonne avec l'inductance de magnétisation. Cette résonance est bien reproduite dans le modèle, comme en témoigne la Figure III-22. D'autres résonances apparaissent classiquement dans les impédances de court-circuit, typiquement aux environs de quelques mégahertz. Celles-ci sont multiples puisqu'elles mettent en jeu les impédances série et les diverses capacités parasites, fort nombreuses comme on l'a vu. Elles ne sont pas toutes visibles en pratique mais les plus importantes peuvent jouer un rôle majeur dans les convertisseurs utilisant des topologies résonantes. Or le modèle CCS ne permet pas de les prendre en compte puisque le seul degré de liberté relatif aux effets capacitifs est "consommé" pour modéliser la résonance à circuit ouvert, ici aux environs de 2,8MHz. On retrouve dans les impédances en court-circuit du modèle une résonance entre cette même capacité parallèle et l'inductance série concernée. Cette résonance a lieu à une fréquence plus élevée (environ 8MHz sur la Figure III-24) puisque l'inductance de fuite est plus faible que l'inductance de magnétisation. Il faut noter qu'on ne maîtrise aucunement dans le schéma la position de cette résonance puisque l'inductance de fuite et la capacité parallèle sont identifiées tout-à-fait indépendamment. La présence d'effets capacitifs supplémentaires, non modélisables par la capacité parallèle, fixe donc fondamentalement la limite supérieure de la gamme de fréquence du modèle. On ne peut espérer utiliser celui-ci avec précision qu'aux fréquences inférieures à ces résonances série, ce qui correspond quand même dans le cas testé à une gamme de fréquence de deux à trois décades. Dans ces limites, logiques compte tenu des choix opérés lors de l'élaboration du modèle, le schéma CCS s'avère excellent: il reproduit avec une grande fidélité les impédances d'un transformateur multi-enroulements, au prix d'un nombre d'éléments éventuellement assez élevé. XI.4 - Schéma CCS: Validation du schéma sur tableur III - 385 Notons encore que le fait d'avoir négligé sept des onze enroulements du transformateur de test (dont un enroulement identique à l'enroulement 4 du Tableau 38) n'a pas dégradé significativement la validité du modèle. On peut donc réaliser ce type d'approximation, très utile en pratique puisque la plupart des transformateurs de puissance comportent de nombreux enroulements auxiliaires. Quant aux hypothèses et à la méthode d'identification Suite aux résultats obtenus sur le transformateur de test, nous pouvons maintenant juger, dans le cadre limité de cette validation, les hypothèses utilisées au cours de l'élaboration du schéma et de l'identification de ses éléments. Nous pouvons ainsi apporter quelques nuances par rapport à la méthode originale. Au moment de déterminer l'impédance à circuit ouvert, on suppose que les chutes de tension sur les inductances série sont négligeables. La Figure III-22 montre que c'est effectivement le cas puisque l'impédance mesurée –comme celle du modèle– correspond presque exactement à celle d'un circuit R-L-C parallèle seul. L'hypothèse est donc justifiée, mais on peut se demander dans ce cas quel est l'intérêt de la distribution de ce circuit R-L-C sur les différents enroulements. Cette opération nous paraît dans la plupart des cas superflue, d'autant plus qu'elle alourdit assez nettement le modèle. Connaissant l'impédance parallèle (distribuée ou non), on calcule ensuite les impédances de fuite à partir des mesures en court-circuit. La Figure III-24 montre dans notre cas que sur la gamme de fréquence utile, la correction apportée de cette manière aux impédances série est minime. C'est essentiellement aux environs des résonances série qu'elle devient significative, mais on se trouve là à la limite de validité fréquentielle du modèle. Cette constatation est rassurante: elle confirme qu'on peut classiquement négliger le courant magnétisant lors d'une mesure en court-circuit, mais elle montre que l'extraction des impédances de fuite est également une opération superflue. Sous réserve d'une étude impliquant davantage d'échantillons, nous proposons donc d'alléger la méthode originale en supprimant deux opérations: l'extraction des impédances de fuite et la distribution des impédances parallèles aux différents enroulements. Rappelons également qu'en ce qui concerne les impédances de fuite, il convient de remplacer la méthode des inductances par une régression de type "moindres carrés". XI.4.6 Erreurs détectées dans l'implémentation sur Excel A posteriori, plusieurs erreurs ont été détectées dans l'implémentation faite sur tableur par Alain Wauthier. Trois corrections, dont nous avons tenu compte dans les résultats ci-dessus doivent être notées. Divergence de l'impédance de court-circuit XI.4 - Schéma CCS: Validation du schéma sur tableur III - 386 Dans l'implémentation originale [208], l'accord entre le modèle et la pièce réelle est loin d'être aussi bon. La conclusion du travail est d'ailleurs que le modèle reproduit bien la variation en fréquence des impédances de court-circuit mais qu'il subsiste pour certaines de celles-ci un décalage entre la courbe mesurée sur le transformateur réel et la courbe du modèle. Nous avons pu identifier que cette discordance vient simplement de l'inversion des ports 4 et 1 dans la mesure en court-circuit correspondante. Pour cette mesure, les valeurs sont donc faussées d'un rapport η142 conformément à (XI.1-9), ce qui entraîne un décalage de certaines courbes d'impédance. Si on corrige cette erreur, les résultats du modèle sont intrinsèquement meilleurs que ceux présentés dans les annexes de [208]. Sens des sources de courant au primaire On s'est également rendu compte que les sources de courant au primaire, intervenant dans l'implémentation du coupleur parfait, étaient inversées par rapport à celles présentées dans les articles originaux et dans cette thèse (voir par exemple la Figure III-21). Ce sens détermine essentiellement la convention utilisée pour le courant au secondaire (positif sortant au lieu de positif entrant). Facteur utilisé pour la distribution des impédances parallèles Enfin le facteur n/(n-1) multipliant l'impédance parallèle d'un enroulement dans l'extraction de l'impédance de fuite (§XI.3.4) a été appliqué deux fois dans le classeur original. Ceci fausse légèrement l'impédance du modèle à circuit ouvert et a très peu de conséquences sur les impédances en court-circuit, compte tenu du faible impact de cette correction comme expliqué au §XI.4.5. XI.4.7 Conclusion Compte tenu de la lourdeur des calculs nécessaires pour identifier le schéma CCS, l'identification des éléments est implémentée dans un tableur. Un transformateur réel à onze enroulements, dont on retient uniquement les quatre principaux, est utilisé comme dispositif de test. La méthode originale reproduit assez mal les impédances série du modèle, ce que nous attribuons à l'empirisme de la méthode des inductances proposée par les auteurs. En remplaçant cette méthode par une régression standard du tableur, appliquée à la somme des courbes de résistance et d'inductance de chaque échelle, nous obtenons un résultat bien meilleur. Les impédances en courtcircuit et à circuit ouvert du modèle reproduisent celles du transformateur de manière très satisfaisante (typiquement moins de 2% d'écart pour l'inductance, 5 à 10% d'écart pour la résistance). On constate encore qu'on ne peut espérer modéliser les résonances entre les inductances de fuite et les capacités parasites qui apparaissent dans les impédances en court-circuit. Cette conclusion est logique puisque le schéma comporte une seule capacité (distribuée entre les enroulements), servant XI.4 - Schéma CCS: Validation du schéma sur tableur III - 387 à la modélisation de la résonance à circuit ouvert. Le schéma CCS ne convient de ce fait pas pour les topologies résonantes. Compte tenu de cette limitation, la gamme de fréquence utile s'étend sur deux à trois décades à partir des paliers statiques. Suivant la gamme de fréquence et précision souhaitées, deux à quatre échelons seront typiquement utilisés pour modéliser les variations d'impédance. Les résultats obtenus sur le transformateur de test nous incitent à penser que les opérations de distribution de l'impédance parallèle à tous les enroulements et d'extraction des impédances de fuite à partir des impédances mesurées en court-circuit sont superflues. L'application du modèle à d'autres transformateurs devrait permettre de confirmer cette hypothèse, qui permettrait d'alléger sensiblement le modèle et la méthode d'identification. Pour terminer, quelques erreurs sont mises en évidence dans l'implémentation sur tableur réalisée précédemment. D'autre part, plusieurs inconvénients apparaissent, à savoir un encodage très fastidieux et source d'erreurs à l'entrée et à la sortie des données dans le tableur, et une structure relativement rigide de l'application, qui limite assez fortement les extensions ultérieures. XI.4 - Schéma CCS: Validation du schéma sur tableur III - 388 XI.5 Mise en œuvre dans une application Delphi Ayant validé le schéma CCS dans le point précédent, mais compte tenu de la rigidité de la mise en œuvre sur tableur, une nouvelle application est développée sur Delphi (pascal orienté objet) dans le cadre du travail de fin d'études de Marc Delcour [41]. Cette application comprend le transfert automatique des données à partir de l'analyseur d'impédance ainsi que la génération du schéma équivalent, directement intégré dans une bibliothèque Spice. La régression est cette fois basée sur la méthode de Levenberg-Marquardt. XI.5.1 Automatisation du transfert des mesures On l'a dit, l'opération consistant à entrer manuellement les impédances relevées sur l'analyseur est fastidieuse et source d'erreurs compte tenu du très grand nombre de données à encoder pour un transformateur multisorties. On souhaite donc rapatrier les données mesurées sur l'analyseur directement sous forme de fichiers. Le lecteur de disquettes de l'analyseur HP4195A, disponible chez I.T.S. Mitra, ne permet pas de le faire. Il utilise en effet un format spécifique qui se révèle incompatible avec le format des disquettes sur PC. Cet analyseur dispose par contre d'un port de communication GPIB, qui peut être relié à un PC par l'intermédiaire d'une carte d'interface. Une petite application de transfert, "datacapt.vee", est écrite au moyen du logiciel "hp.vee". Elle permet de rapatrier les mesures vers le PC sous forme de fichiers au format texte, suivant une procédure décrite dans [41]. Les fichiers texte sont ensuite décodés par l'application Delphi avant calcul des éléments du schéma (voir Figure III-28). Si l'automatisation du transfert de mesures peut paraître anecdotique, il s'agit cependant d'un point important puisqu'elle permet de réduire très significativement le délai et le risque d'erreur liés à l'introduction manuelle des données dans le module de traitement. Pour le transformateur de test, et compte tenu également de la génération automatique du modèle Spice expliquée ci-dessous, l'ensemble des opérations nécessaires à l'obtention du schéma équivalent passe ainsi d'environ une journée à une heure. L'opération la plus longue est alors la prise de mesure, qui demande de réaliser les court-circuits manuellement. XI.5.2 Méthode de régression alternative Méthode de Levenberg-Marquardt En ce qui concerne le calcul des éléments proprement dit, une modification importante est faite par rapport au chapitre précédent. Un tableur dispose en effet de fonctions de régression standard, généralement suivant les méthodes de Newton ou du gradient conjugué. Ce n'est plus le cas dans Delphi, où nous devons donc implémenter nous-mêmes une méthode de régression. XI.5 - Schéma CCS: Mise en œuvre dans une application Delphi III - 389 Nous nous proposons d'utiliser la méthode de Levenberg-Marquardt compte tenu des bons résultats obtenus avec celle-ci lors d'une recherche précédente axée sur la modélisation de semiconducteurs [194]. Cette méthode vise à minimiser l'erreur d'une fonction non linéaire ΓLM dépendant de m paramètres variables en utilisant les dérivées analytiques de ΓLM par rapport à ces paramètres. Elle peut être implémentée suivant des procédures disponibles dans la littérature [154]. A nouveau, il faut tenir compte du fait que les courbes d'inductance et de résistance doivent être optimisées simultanément. On considère de ce fait la fonction: ΓLM = wR Log Req + wL Leq (XI.5-1) où Req et Leq représentent l'impédance équivalente de l'échelle (voir (XI.2-3) et (XI.2-4)) et où les poids wR et wL jouent le même rôle que précédemment. Les valeurs de départ des paramètres Rq et Lq sont fournies par la méthode des inductances, quelque peu modifiée pour être rendue davantage portable à tous les types de transformateurs. Le choix de la méthode de Levenberg-Marquardt s'avère peu adéquat car celle-ci donne des résultats nettement moins bons que les méthodes standard du point précédent. Après optimisation, certaines courbes montrent en effet encore un décalage important par rapport aux mesures. La raison n'en est pas clairement identifiée: elle pourrait provenir soit de la difficulté éprouvée pour obtenir les valeurs de départ des paramètres –ce qui révèle une fois de plus le manque de généralité de la méthode des inductances–, soit de la fonction ΓLM qui, parce qu'elle représente le cumul de deux fonctions à optimiser, convient mal à la méthode de LevenbergMarquardt en particulier. Résultats Ci-dessous, nous montrons quelques résultats obtenus avec un transformateur du même type que celui utilisé précédemment, mais en considérant un enroulement supplémentaire (donc cinq au total), identique à l'enroulement 4 du Tableau 38. L'analyseur HP4195A utilisé couvre cette fois une gamme de fréquence de 100kHz à 30MHz. La mesure à circuit ouvert (Figure III-25) montre que le modèle est valable jusqu'à une fréquence de 3MHz environ. XI.5 - Schéma CCS: Mise en œuvre dans une application Delphi III - 390 1,E+06 |Z| (ohm) 1,E+05 1,E+04 1,E+03 1,E+02 1,E+05 1,E+06 1,E+07 1,E+08 f (Hz) Figure III-25: Impédance à circuit ouvert vue du primaire (vert: mesures; rouge: modèle) Cette même limite est également visible sur les graphes suivants (Figure III-26 et Figure III-27), qui montrent à titre d'exemple deux impédances mesurées en court-circuit. Sur le premier de ces deux graphes (impédance vue du primaire), on constate très bien la limite du modèle CCS: alors que la résonance du transformateur réel a lieu aux environs de 6MHz, le modèle reproduit une résonance assez significativement différente (plus proche de 8MHz) et les résonances suivantes divergent nettement. Dans le second graphe (impédance vue du secondaire 2), on constate un désaccord net que nous attribuons à l'utilisation de la méthode de régression de LevenbergMarquardt. 1,E+05 |Z| (ohm) 1,E+04 1,E+03 1,E+02 1,E+01 1,E+05 1,E+06 1,E+07 1,E+08 f (Hz) Figure III-26: Impédance vue du primaire avec le secondaire n°4 en court-circuit (vert: mesures; rouge: modèle) XI.5 - Schéma CCS: Mise en œuvre dans une application Delphi III - 391 |Z| (ohm) 1,E+02 1,E+01 1,E+00 1,E-01 1,E+05 1,E+06 1,E+07 1,E+08 f (Hz) Figure III-27: Impédance vue du secondaire n°2 avec le secondaire n°4 en court-circuit (vert: mesures; rouge: modèle) Compte tenu de ce désaccord, apparaissant typiquement dans les mesures entre secondaires, nous préconisons de revenir dans l'application Delphi à une méthode de régression plus classique, que nous n'avons pas eu l'occasion d'implémenter. XI.5.3 Génération automatique du modèle Spice Après calcul, lorsque les éléments du schéma équivalent sont connus, l'application Delphi génère directement le fichier texte (la "netlist") du modèle Spice. Elle utilise pour cela des fichiers-types à trois, quatre ou cinq enroulements, dans lesquels elle introduit les nouvelles valeurs. Un fichier intermédiaire est ainsi créé puis recopié dans une librairie à spécifier par l'utilisateur, de manière à faire apparaître le schéma comme un nouveau composant disponible dans Spice (Figure III-28). Pour utiliser le modèle dans un schéma d'alimentation, il suffit alors de choisir le symbole dont le nombre de sorties correspond au transformateur étudié et à lui associer, par l'intermédiaire de l'attribut "MODEL", le sous-circuit qui vient d'être intégré en tant que fichier texte à la librairie. On peut de cette manière créer autant de modèles de transformateurs que souhaité, et garder ceuxci disponibles dans des librairies de pièces magnétiques. XI.5 - Schéma CCS: Mise en œuvre dans une application Delphi III - 392 Réalisation des mesures liaison GPIB analyseur d'impédance datacapt.vee fichiers texte contenant les mesures Génération du schéma - lecture des données - calcul des éléments et optimisation - génération du modèle Spice application Delphi fichier texte intégré dans une bibliothèque Spice Simulation du convertisseur récupération du modèle souhaité dans le schéma du convertisseur et simulation Spice Figure III-28: Etapes de la génération du schéma équivalent à partir de mesures XI.5.4 Conclusion L'implémentation du schéma CCS dans une application Delphi permet de s'affranchir des contraintes d'un tableur. On peut notamment plus facilement décoder les fichiers de données, rapatriés depuis l'analyseur d'impédance par l'intermédiaire d'une liaison GPIB, et générer un souscircuit directement intégré dans une librairie Spice. Les opérations d'encodage étant supprimées, un gain de temps très important est réalisé et le risque d'erreur est fortement réduit. D'autre part, l'application peut beaucoup plus facilement être modifiée en fonction du nombre de sorties ou du nombre d'échelons désirés par exemple. On peut également songer à y intégrer XI.5 - Schéma CCS: Mise en œuvre dans une application Delphi III - 393 plusieurs schémas différents, à choisir en fonction de l'application choisie. Dans ce cadre, il serait intéressant d'introduire dans cette même application les solutions présentées au chapitre suivant (schémas LEG). En ce qui concerne le calcul proprement dit, le passage dans Delphi impose d'implémenter soimême une méthode de régression. A cette occasion, la méthode de Levenberg-Marquardt a été testée en raison des bons résultats obtenus dans un travail précédent. Celle-ci convient cependant peu au cas présent, soit à cause de la difficulté de déterminer les valeurs de départ des paramètres à optimiser, soit parce qu'elle s'accorde mal à l'optimisation d'une somme de deux courbes. Nous proposons donc de revenir à une méthode plus classique de type Newton ou gradient conjugué. XI.5 - Schéma CCS: Mise en œuvre dans une application Delphi III - 394 XI.6 Conclusion Le schéma CCS, développé par le Virginia Power Electronics Center, est un schéma linéaire multisorties. Il se caractérise par un rejet de toutes les impédances de fuite aux secondaires, une impédance parallèle constituée d'un circuit R-L-C distribué à tous les ports, et la présence d'une seule capacité. La variation en fréquence des impédances de fuite est modélisée par des échelles d'impédance. L'identification des éléménts a lieu en trois étapes: - l'identification classique des éléments parallèles à partir de la mesure de l'impédance à circuit ouvert, - l'extraction des impédances de fuite à partir des mesures en court-circuit, - l'identification des impédances série sur une gamme de fréquence donnée au moyen de méthodes empiriques ("match-point curve fitting" ou méthode des inductances). Après avoir étudié en détail la constitution du schéma, nous l'avons implémenté dans un tableur et appliqué à un transformateur multisorties utilisé dans une alimentation de 200W. Ce transformateur compte onze enroulements, dont nous ne considérons par hypothèse que les quatre ou cinq plus importants. Le schéma obtenu suivant la méthode originale donne des résultats fort moyens, montrant des écarts assez importants par rapport à l'impédance du transformateur réel. Sur ce point, on peut mettre en cause le caractère empirique des méthodes d'identification originales des éléments série, qui gagnent à être remplacées par des méthodes de régression standard. En tenant compte de cette modification, on obtient un modèle qui reproduit avec une très grande fidélité (quelques pourcents d'écart) les impédances du transformateur réel. La gamme de fréquence -deux à trois décades depuis les fréquences statiques- est limitée par les résonances série apparaissant dans les inductances de fuite. Puisque le modèle ne comporte qu'une seule capacité destinée à modéliser la résonance parallèle (impédance à circuit ouvert), il lui est en effet impossible de modéliser avec précision ces autres résonances: le modèle CCS ne convient donc pas pour des alimentations résonantes. On pourrait néanmoins imaginer d'augmenter le nombre de capacités du modèle comme dans plusieurs autres schémas présentés dans cette troisième partie. Le schéma ayant été validé sur tableur, il a ensuite été implémenté dans une application Delphi, beaucoup plus souple à modifier ou à compléter. Cette application automatise le transfert de mesures depuis l'analyseur d'impédance par l'intermédiaire d'une interface GPIB ainsi que l'intégration du schéma équivalent dans une librairie Spice. On réduit ainsi de manière drastique le délai et le risque d'erreurs liés au traitement des données. L'implémentation dans Delphi donne également l'occasion de tester une méthode de régression alternative, la méthode de LevenbergMarquardt, qui, bien qu'ayant donné des résultats intéressants dans une application précédente, se révèle ici inappropriée. Nous proposons donc de revenir à une méthode plus classique pour effectuer la régression. XI.6 - Schéma CCS: Conclusion III - 395 D'autre part, il nous semble que les opérations de distribution de l'impédance parallèle aux différents ports du schéma et de l'extraction des impédances de fuite à partir des impédances de court-circuit n'apportent pas de gain significatif. Elles alourdissent par contre la procédure de calcul des éléments. Sous réserve de confirmations de ces conclusions sur d'autres transformateurs, nous proposons donc de les ignorer. Une autre amélioration possible consisterait à dissocier les rapports de couplage des rapports du nombre de spires des enroulements et à les considérer comme faisant partie des paramètres à identifier. Une réserve doit encore être soulignée: la validation ci-dessus n'a considéré le transformateur qu'en tant que pièce isolée. Une validation du schéma équivalent au sein du convertisseur en fonctionnement serait souhaitable. On peut cependant supposer que cette validation ne remettra pas en cause les conclusions ci-dessus puisque la mesure des impédances à circuit ouvert et en court-circuit constitue d'après Kéradec [103] le meilleur moyen d'obtenir des valeurs correctes pour les impédances en fonctionnement. XI.6 - Schéma CCS: Conclusion III - 396 XII. Schémas LEG Dans ce troisième chapitre, nous présentons deux schémas équivalents développés par le Laboratoire d'Electrotechnique de Grenoble ("LEG"). Si nous n'avons pas eu l'occasion de les implémenter dans le cadre de notre thèse, ceux-ci fournissent des idées originales qui pourraient utilement compléter la démarche du chapitre précédent. Un troisième schéma, développé par le même laboratoire mais selon une toute autre approche, sera encore présenté au chapitre suivant. Plan du chapitre XII.1 Schéma inductif multisorties ................................................................................ 398 XII.2 Schéma complet à deux enroulements................................................................ 405 XII.3 Conclusion .............................................................................................................. 413 XII - Schémas LEG III - 397 XII. Schémas LEG Dans ce troisième chapitre, nous présentons deux schémas équivalents développés par le Laboratoire d'Electrotechnique de Grenoble ("LEG"). Si nous n'avons pas eu l'occasion de les implémenter dans le cadre de notre thèse, ceux-ci fournissent des idées originales qui pourraient utilement compléter la démarche du chapitre précédent. Un troisième schéma, développé par le même laboratoire mais selon une toute autre approche, sera encore présenté au chapitre suivant. Plan du chapitre XII.1 Schéma inductif multisorties ................................................................................ 398 XII.2 Schéma complet à deux enroulements................................................................ 405 XII.3 Conclusion .............................................................................................................. 413 XII - Schémas LEG III - 397 XII.1 Schéma inductif multisorties Le schéma inductif du LEG constitue une alternative originale aux schémas multisorties présentés dans les chapitres X et XI. Il repose sur l'orthogonalisation de la matrice inductance, qui permet d'obtenir un schéma ne contenant que des éléments positifs et directement mesurables. Sur base de [101] et [103], nous exposons ci-dessous le détail de ce schéma. XII.1.1 Orthogonalisation de la matrice inductance Orthogonalisation sur base de l'énergie magnétostatique Pour construire un schéma équivalent, la démarche consiste souvent à partir de la matrice symétrique des n2 coefficients d'inductance (comme on l'a fait dans le chapitre précédent) pour garantir qu'on prend en compte tous les effets inductifs propres et mutuels dans un système de n enroulements. Il faut ensuite rechercher une représentation de ces coefficients en éléments de circuits, ce qui distingue les approches les unes des autres. A partir de ce point de départ habituel, la démarche proposée par le LEG est assez originale. Elle consiste à orthogonaliser la matrice inductance en opérant un changement de base des courants comme nous allons l'expliquer. L'énergie magnétostatique d'un système de n enroulements est une forme quadratique des courants: W = 1 n ∑ 2 j =1 n ∑L k =1 ii jk j k (XII.1-1) ce qu'on écrit sous forme matricielle: W = 1 T [I ] [L][I ] 2 (XII.1-2) Considérons un second système de courants, obtenu par un changement de base décrit par la matrice λ: [I '] = [λ ][I ] (XII.1-3) Pour deux courants par exemple, ce changement de base s'écrit: ⎧⎪i1' = λ11i1 + λ12 i2 ⎨' ⎪⎩i2 = λ 21i1 + λ 22 i2 XII.1 - Schémas LEG: Schéma inductif multisorties (XII.1-4) III - 398 Dans cette nouvelle base, l'énergie magnétostatique –dont la valeur est inchangée– s'écrit: W = ( 1 T [I '] [λ ]−1 2 ) [L][λ ] T −1 [I '] (XII.1-5) ou encore W = 1 T [I '] [L'][I '] 2 (XII.1-6) La nouvelle matrice de coefficients d'inductance, dans la seconde base, est donc définie par: [L'] = ([λ ]−1 ) [L][λ ]−1 T (XII.1-7) Suivant [103], il est possible d'orthogonaliser le système, c'est-à-dire de trouver un changement de base λ tel que la matrice L' soit purement diagonale. En termes physiques, cela revient à trouver un système de courants i' pour lesquels les effets mutuels sont nuls. Du point de vue de l'énergie, tout se passe comme si n courants indépendants passaient dans n inductances propres lj non couplées (qui sont les termes diagonaux de la matrice L'). L'énergie magnétostatique s'écrit dans ce cas: W = 2 1 n ∑ l j i 'j 2 j =1 (XII.1-8) Dans la base orthogonale i', cette propriété permet de simplifier considérablement le schéma équivalent puisqu'il ne compte plus que n inductances au lieu de n2. Néanmoins, pour passer des courants i aux courants i', il faut intégrer dans le schéma le changement de base (XII.1-4), ce qui demande n2 coupleurs à deux enroulements utilisant les valeurs λjk comme rapports de couplage. Changement de base des tensions Sur base des définitions précédentes, on peut dégager des relations complémentaires qui concernent les tensions. Si on définit la matrice des tensions par: [V ] = jω [L ][I ] (XII.1-9) et de manière similaire les tensions dans la nouvelle base par: [V '] = jω [L'][I '] (XII.1-10) on obtient sur base de (XII.1-3) et (XII.1-7): [V '] = ( jω [λ ] ) [L][λ ] −1 T −1 [λ ][I ] (XII.1-11) soit: [V '] = ([λ ]−1 ) [V ] T XII.1 - Schémas LEG: Schéma inductif multisorties (XII.1-12) III - 399 Le changement de base des courants entraîne donc un changement de base des tensions décrit par la matrice inverse transposée. Ce changement de base doit également être implémenté dans le schéma équivalent. XII.1.2 Orthogonalisation de Schmidt et schéma équivalent Orthogonalisation de Schmidt Dans la version exposée ci-dessus, l'orthogonalisation a relativement peu d'intérêt du fait du grand nombre de coupleurs à intégrer au schéma équivalent pour représenter le changement de base. Ce nombre peut cependant être fortement réduit en utilisant une méthode d'orthogonalisation particulière bien connue: la méthode de Schmidt. D'après celle-ci, il est toujours possible, si les courants sont indépendants, d'obtenir une base de courants orthogonale par une transformation du type: ⎧i1' = i1 ⎪' ⎪i2 = λ12 i1 + i 2 ⎨' ⎪i3 = λ13 i1 + λ 23 i2 + i3 ⎪... ⎩ (XII.1-13) Les facteurs λ de ce dernier système peuvent être implémentés dans le schéma sous forme de n(n1)/2 coupleurs à deux enroulements [103]. Schéma équivalent à deux enroulements Pour deux enroulements (n=2), le changement de base des courants s'écrit67: ⎧⎪i1' = i1 ⎨' ⎪⎩i2 = η12 i1 + i2 (XII.1-14) utilisant la matrice [λ ] = ⎡⎢ 1 ⎣η12 0⎤ 1⎥⎦ (XII.1-15) La matrice inverse transposée vaut: ([λ ] ) −1 T ⎡1 − η12 ⎤ =⎢ 1 ⎥⎦ ⎣0 (XII.1-16) 67 Les coefficients λ du changement de base sont maintenant notés η pour rappeler qu'ils seront implémentés par des coupleurs. XII.1 - Schémas LEG: Schéma inductif multisorties III - 400 de sorte que ce changement de base se traduit pour les tensions par le système (voir (XII.1-12)): ⎧⎪v1' = v1 − η12 v 2 ⎨ ' ⎪⎩v 2 = v 2 (XII.1-17) Les expressions (XII.1-8), (XII.1-14) et (XII.1-17) peuvent être traduites dans le schéma suivant: η12i1 i2 i'2 v2 l1 η12 p p l2 i1=i'1 η12v2 v1 Figure III-29: Schéma inductif LEG à deux enroulements Ce schéma comprend bien deux inductances l1 et l2 parcourues respectivement par les courants i'1 et i'2. Le rapport de couplage η12 constitue la troisième variable. Compte tenu du sens du coupleur et pour la facilité des développements ultérieurs, le port 2 est considéré comme l'enroulement primaire. A titre indicatif, il est intéressant de calculer les inductances dans la nouvelle base en fonction de la matrice initiale par 2 l'intermédiaire de (XII.1-7): ⎡ ⎤ [L'] = ⎢ L1 − η12 L2 M − η12 L2 ⎥ L2 ⎣ M − η12 L2 ⎦ (XII.1-18) On voit immédiatement que pour obtenir un système orthogonal (éléments non diagonaux nuls), il suffit de choisir: η12 = M L2 (XII.1-19) qui mène aux valeurs finales: ⎡ M2 ⎡l1 0 ⎤ ⎢ L1 − [L'] = ⎢ L2 ⎥= ⎣ 0 l 2 ⎦ ⎢⎢ 0 ⎣ ⎤ 0⎥ ⎥ L2 ⎦⎥ (XII.1-20) Fondamentalement, le schéma de la Figure III-29 est simplement un schéma classique dans lequel on a reporté toute l'inductance de fuite au secondaire. On dispose de cette manière de trois variables, c'est-à-dire autant que la matrice inductance de départ. En choisissant pour le rapport de XII.1 - Schémas LEG: Schéma inductif multisorties III - 401 couplage la valeur M/L2 au lieu du rapport du nombre de spires, on assure que toutes les inductances sont positives. Si à ce stade-ci le schéma est peu différent de ceux vus au chapitre X, le caractère particulier de la démarche apparaît davantage lorsqu'on multiplie les enroulements. Schémas à enroulements multiples Sur base d'une démarche itérative, on obtient les schémas équivalents des Figures III-30 et III-31 pour respectivement trois et quatre enroulements [103]. i3 p v3 i2 l2 η23 p l3 p v2 η12 p η13 l1 p i1 v1 Figure III-30: Schéma inductif LEG à trois enroulements (en bleu: schéma à deux enroulements) i4 v4 p p l4 η23 p η14 p i2 p l2 p p v3 p η13 η24 i3 l3 η34 η12 l1 v2 p i1 v1 Figure III-31: Schéma inductif LEG à quatre enroulements (en bleu: schéma à deux enroulements; en rouge: éléments supplémentaires du schéma à trois enroulements) XII.1 - Schémas LEG: Schéma inductif multisorties III - 402 Compte tenu du fait que chaque nouveau schéma reprend celui d'un transformateur à n-1 enroulements, la méthode se généralise aisément pour tout n. XII.1.3 Identification des éléments du schéma Au total, le schéma compte n(n+1)/2 variables à identifier, qui se répartissent en n inductances lj et n(n-1)/2 rapports de couplage. Pour les inductances, l'analyse du schéma montre que lj est l'inductance vue du port j lorsque tous les ports d'indice inférieur à j sont à circuit ouvert et tous les ports d'indice supérieur à j sont courtcircuités. Par exemple, dans la Figure III-31, l2 est l'inductance vue du port 2 lorsque le port 1 est à circuit ouvert et les ports 3 et 4 sont en court-circuit. De ce fait, toutes les inductances lj, puisqu'elles sont directement mesurables, sont forcément positives. Cette propriété est confirmée par l'expression (XII.1-8) de la forme quadratique réduite, qui démontre que si l'énergie magnétostatique est positive, toutes les inductances lj le sont également. De la même manière, on peut montrer que le rapport de couplage ηjk vaut vj/vk lorsqu'on alimente le port k, tous les ports d'indice inférieur à k étant à circuit ouvert et tous les ports d'indice supérieur à k étant en court-circuit. XII.1.4 Dénombrement des éléments du schéma En supposant que chaque rapport de couplage est implémenté par deux sources de courant commandées (une source de courant et une source de tension), on peut évaluer à n2 le nombre d'éléments à introduire dans un simulateur de circuit pour implémenter le schéma inductif LEG. Par comparaison, le Tableau 36 (p. 376), qui dénombre le nombre d'éléments du schéma CCS, montre qu'il faut n(2n-1) éléments68 pour implémenter un schéma comparable purement inductif selon la méthode du chapitre précédent. Pour des transformateurs à trois, quatre ou cinq sorties, on obtient donc respectivement 9, 16 ou 25 éléments pour le schéma LEG au lieu de 15, 28 ou 45 éléments pour le schéma CCS. Le schéma LEG permet donc de réaliser une économie certaine de ce point de vue. Ce petit nombre d'éléments peut être attribué à l'absence de mailles auxiliaires, nécessaires pour représenter les mutuelles dans le schéma CCS. 68 Pour arriver à ce résultat, on considère dans le Tableau 36 que U vaut ½ (puisque chaque échelle est remplacée par une seule inductance, c'est-à-dire un demi échelon) et que l'ensemble des éléments parallèles demande n éléments au lieu de 3n. XII.1 - Schémas LEG: Schéma inductif multisorties III - 403 XII.1.5 Conclusion Le schéma LEG inductif est construit sur base d'une orthogonalisation de la matrice inductance, obtenue par un changement de base des courants. Cette démarche originale amène de nombreux avantages: - le schéma compte autant d'éléments (inductances et coupleurs) que la matrice inductance du système de n enroulements; - toutes les variables du schéma sont directement mesurables sur base de mesures en court-circuit ou à circuit ouvert. En particulier, les inductances sont toutes positives; - grâce à l'absence de mutuelles, le schéma LEG compte nettement moins d'éléments (asymptotiquement la moitié) qu'un schéma CCS comparable. Ce schéma représente donc une solution particulièrement élégante, alliant une méthode rigoureuse avec une interprétation physique relativement aisée. Il s'agit cependant à ce stade d'un schéma ne tenant compte que des effets inductifs. S'il est facile sur cette base d'imaginer une modélisation partielle des effets capacitifs et résistifs, la prise en compte de ces effets de manière exhaustive apparaît par contre moins triviale en présence de plus de deux enroulements comme on le verra dans le point suivant. XII.1 - Schémas LEG: Schéma inductif multisorties III - 404 XII.2 Schéma complet à deux enroulements Outre le schéma inductif que nous venons de présenter, le LEG propose également dans [33] et [101] un schéma complet, c'est-à-dire englobant les effets dissipatifs et capacitifs, mais limité à deux enroulements. Contrairement au schéma CCS, les effets capacitifs sont ici modélisés de manière exhaustive. XII.2.1 Schéma capacitif Comme on l'a signalé au §X.4.1, un transformateur à deux enroulements constitue du point de vue électrostatique un 3-ports puisqu'il est caractérisé par trois tensions indépendantes, par exemple celles de la Figure III-32. Un tel transformateur est donc décrit par six coefficients de capacité Cij. i1 i2 v1 v2 i3 v3 Figure III-32: 3-ports électrostatique Si on veut décrire de manière exhaustive les effets capacitifs, il faut donc introduire six capacités dans le schéma équivalent. Cette opération n'a de sens que si on s'intéresse aux variations d'impédance à des fréquences relativement élevées, où apparaissent les différentes résonances caractéristiques de ces effets électrostatiques. Il existe plusieurs possibilités pour introduire ces capacités dans le schéma. Nous en avons donné une première à la Figure III-9 (p. 350). Le LEG en propose deux autres reproduites à la Figure III33 ([12] et [33]). On peut en fait utiliser tout ensemble de capacités qui permet une identification terme à terme de l'énergie électrostatique du quadripôle, forme quadratique des tensions v1 à v3: W = 1 (C11v12 + C 22 v 22 + C 33 v32 ) + C12 v1v 2 + C13 v1v3 + C 23 v 2 v3 2 (XII.2-1) Par exemple, l'énergie électrostatique du schéma b ci-dessous vaut: 1 1 ⎛v W = γ 1v12 + γ 2 ⎜⎜ 2 2 2 ⎝η 2 ⎞ v 1 ⎛ ⎟⎟ + γ 3 ⎜⎜ v1 − 2 η 2 ⎝ ⎠ 2 ⎞ ⎟⎟ ⎠ 2 ⎞ 1 1 ⎛v 1 2 + γ 4 v32 + γ 5 ⎜⎜ 2 − v3 ⎟⎟ + γ 6 (v1 − v3 ) 2 2 ⎝η 2 ⎠ XII.2 - Schémas LEG: Schéma complet à deux enroulements (XII.2-2) III - 405 γ4 γ6 γ1 effets inductifs et dissipatifs η p p γ2 γ3 γ5 Schéma a γ6 γ3 A γ1 effets inductifs et dissipatifs γ5 γ2 η p C p B D γ4 Schéma b Figure III-33: Deux exemples de schémas complets à six capacités Ce qui permet l'identification: ⎧γ 1 = C11 + ηC12 + C13 ⎪ 2 ⎪γ 2 = η C 22 + η (C12 + C 23 ) ⎪⎪γ 3 = −ηC12 ⎨ ⎪γ 4 = C 33 + C13 + ηC 23 ⎪γ = −ηC 23 ⎪ 5 ⎪⎩γ 6 = −C13 (XII.2-3) Ceci permet uniquement une identification à partir des coefficients d'inductance du 3-ports. Lorsqu'on désire identifier les six capacités sur base de mesures, le LEG propose de passer par un schéma réduit intermédiaire comme expliqué ci-dessous. XII.2.2 Quadripôle électrostatique et schéma réduit Pour identifier les éléments inductifs et dissipatifs d'un transformateur à deux enroulements, il suffit de disposer de trois valeurs d'impédance, par exemple l'impédance à circuit ouvert vue de chacun des deux ports (ZCO1 et ZCO2) et l'impédance en court-circuit, vue du primaire (ZCC1) ou XII.2 - Schémas LEG: Schéma complet à deux enroulements III - 406 vue du secondaire (ZCC2). Ce nombre ne suffit pas pour les effets capacitifs puisque de ce point de vue le transformateur est un 3-ports. L'idée du LEG est de ramener momentanément le 3-ports à un vrai quadripôle, y compris du point de vue électrostatique, en fixant le potentiel primaire/secondaire v3. On considérera plusieurs quadripôles de ce type pour identifier les éléments du schéma complet. Il s'agit en fait de réduire le nombre de variables de trois à deux, c'est-à-dire de rendre v3 dépendant de v1 et de v2 plutôt que de le fixer à une valeur donnée. En pratique, cette opération est simplement réalisée en connectant ensemble deux bornes du transformateur. Par exemple, on annule v3 en connectant B à D dans la Figure III-33. Le Tableau 39 montre les connections possibles et la condition obtenue dans chaque cas. connexion B avec D A avec C B avec C A avec D A, B, C et D flottants A avec B et C avec D condition v3=0 v3= v1- v2 v3= v2 v3= v1 i3=0, ce qui implique v3=-(C13v1+C23v2)/C33 v1= v2=0 Tableau 39: Connections possibles pour fixer le potentiel v3 Lorsqu'une de ces connexions est réalisée, l'énergie électrostatique ne dépend plus que de v1 et v2: le transformateur est réduit à un quadripôle. De ce fait, trois coefficients suffisent pour décrire les effets capacitifs dans ce transformateur "réduit". En conséquence, on peut associer à un tel transformateur le schéma réduit de la Figure III-34, qui correspond au schéma b de la Figure III-33 dans lequel on a tenu compte de la connexion réalisée et où on a introduit un sous-ensemble relativement classique pour tenir compte des effets inductifs et dissipatifs. C3 r1 lS r2 2LP C1 2RP 2LP 2RP C2 p η p Figure III-34: Schéma réduit à trois capacités (le trait interrompu représente une des liaisons possibles pour réduire le transformateur à un quadripôle) XII.2 - Schémas LEG: Schéma complet à deux enroulements III - 407 Comportement asymptotique et résonances du schéma réduit Pour identifier les éléments de ce schéma réduit, le LEG adopte une fois encore une démarche relativement originale. Au lieu de baser cette opération sur certaines fréquences bien choisies, comme dans le schéma CCS, on propose ici de tenir compte du comportement des impédances sur toute la gamme de fréquence. Cette méthode est beaucoup plus fiable car moins sensible aux erreurs de mesure par exemple. Elle permet en même temps de se rendre compte rapidement si le modèle prend effectivement en compte les phénomènes observés ou se révèle trop limité. Pratiquement, on calcule l'impédance théorique du schéma réduit de la Figure III-34 et on en tire les comportements asymptotiques représentés ci-dessous (Figure III-35). 1 Log |Z| ω (C1 + C 2 ) 1 ZCC1 ω (C1 + C3 ) ZCO1 1 ⎛ CC ⎞ ω ⎜⎜ C1 + 2 3 ⎟⎟ C 2 + C3 ⎠ ⎝ ωLCO r1+ r2 r1 ωLCC ωLCC f1 f2 C1 + C3 C1 + C 2 f3 f4 Log f Figure III-35: Valeurs asymptotiques des impédances ZCO1 et ZCC1 du schéma réduit (la gamme de fréquence s'étend de quelques dizaines de Hz à quelques dizaines de MHz) Des courbes similaires peuvent être déduites pour les impédances ZCO2 et ZCC2, en permutant C1 et C2 et en multipliant l'expression de l'impédance par η2. En supposant que le couplage est proche de l'unité, ce qui permet des approximations courantes précisées dans [33], ce même calcul fait apparaître les fréquences suivantes, correspondant aux résonances illustrées à la Figure III-35: f1 = f2 = f3 = 1 2π LCO (C1 + C 2 ) 1 2π LCC (C1 + C 3 ) 1 2π LCC (C 2 + C 3 ) XII.2 - Schémas LEG: Schéma complet à deux enroulements (XII.2-4) (XII.2-5) (XII.2-6) III - 408 f4 = 1 ⎛ CC 2π LCC ⎜⎜ C 3 + 1 2 C1 + C 2 ⎝ ⎞ ⎟⎟ ⎠ (XII.2-7) Identification des éléments du schéma réduit Sur base des considérations précédentes, les neuf éléments du schéma réduit sont identifiés selon la méthodologie suivante: - on établit une connexion entre deux bornes du transformateur pour le réduire à un quadripôle véritable; - on mesure l'impédance complexe à circuit ouvert vue depuis chaque enroulement (ZCO1 et ZCO2) ainsi que l'impédance en court-circuit vue du primaire (ZCC1) et on en trace les courbes de Bode; - conformément à la Figure III-35, on identifie les inductances LCO1, LCO2 et LCC1 sur base de la première asymptote oblique de chacune des courbes; - on détermine ensuite les éléments inductifs du schéma: ⎞ LCO 2 ⎟⎟ ⎠ LCO1 ⎛ v2 ⎝ v1 η = sgn⎜⎜ lS = LCC1 k LP = LCO1 1+ k 2 (XII.2-8) (XII.2-9) (XII.2-10) avec k = 1− - LCC1 LCO1 (XII.2-11) les résistances r1 et r2 sont déterminées par les paliers basse fréquence des courbes ZCO1 et ZCO2 respectivement. Leur somme peut être vérifiée sur la courbe ZCC1; la résistance RP est égalée au module de l'impédance à la résonance f1; enfin les trois capacités C1, C2 et C3 sont calculées sur base des fréquences f1 à f3, avec une vérification éventuelle par la valeur f4. L'une des capacités peut être négative. XII.2.3 Identification des six capacités du schéma complet Dans le schéma réduit, la valeur des capacités C1 à C3 dépend de la connexion effectuée pour ramener le transformateur à un quadripôle. Pour la connexion B-D, illustrée à la Figure III-34, on obtient par exemple les relations: XII.2 - Schémas LEG: Schéma complet à deux enroulements III - 409 ⎧C1 + C 3 = C11 ⎪ 2 ⎨C 2 + C 3 = η C 22 ⎪ 2 ⎩C1 + C 2 = C11 + η C 22 + 2ηC12 (XII.2-12) En modifiant la connexion réalisée entre primaire et secondaire et en réalisant à nouveau un ensemble complet de mesures suivi d'une identification des capacités C1 à C3, on obtient un autre ensemble d'équations du type de (XII.2-12), correspondant à la connexion choisie. On peut de cette manière obtenir suffisamment d'équations pour déterminer les six coefficients Cij et donc les six capacités γj du schéma complet par l'intermédiaire de (XII.2-3). Les systèmes d'équations correspondant à chaque connexion sont donnés dans [12] et [33]. XII.2.4 Variation des pertes et des inductances en fonction de la fréquence L'introduction de six capacités dans le schéma équivalent à deux enroulements permet de tenir compte de manière exhaustive des résonances apparaissant dans les impédances. Par contre, on n'a pas encore tenu compte jusqu'ici des effets quasi-statiques, qui font également varier les résistances et les impédances du schéma en fonction de la fréquence. La nécessité de modéliser ces phénomènes apparaît notamment dans le fait que la première pente de la courbe ZCC1 dans la Figure III-35 est en pratique légèrement moindre que l'unité. Le même phénomène peut apparaître dans la courbe ZCO1 pour l'impédance parallèle, ce qui amène à "shunter" une partie de ces impédances par des résistances. Le LEG propose donc comme schéma final d'un transformateur à deux enroulements le schéma de la Figure III-36. Dans celui-ci, on peut reconnaître des échelles d'impédance, agissant à la fois pour les impédances série et parallèle, ce qui est une nouveauté par rapport au schéma CCS. γ6 γ3 γ5 lS -lS* r1 lS * r2 A C r* γ1 2LP* 2RP B 2R* γ2 2LP* 2R* 2(LP -LP*) η p p 2RP 2(LP -LP*) D γ4 Figure III-36: Schéma LEG complet à deux enroulements XII.2 - Schémas LEG: Schéma complet à deux enroulements III - 410 On note que ce schéma ne correspond pas tout-à-fait au schéma inductif à deux enroulements proposé à la Figure III-29 et découlant de l'orthogonalisation de la matrice. Il peut cependant facilement lui être ramené. Pour l'identification des résistances et inductances supplémentaires des échelles par rapport au schéma précédent (Figure III-34), on montre que la variation d'impédance atteint 50% de la variation totale à la fréquence fC = r* 2π l S − l S* (XII.2-13) et que la pente de l'inductance est maximale à la fréquence fM = r* 2π 3(l S − l S* ) (XII.2-14) Le relevé de ces deux fréquences permet donc de déterminer les valeurs r* et lS*. Une démarche similaire peut être appliquée pour les impédances parallèles. Cette méthode d'identification est fondamentalement très proche de celle proposée pour deux échelons dans le schéma CCS. Le LEG n'envisage pas des échelles à plus de deux échelons, bien que rien n'empêche de le faire dans le principe. XII.2.5 Conclusion Contrairement au schéma CCS, l'option prise par le LEG consiste à modéliser tous les effets capacitifs. Pour un schéma à deux enroulements, qui est le seul cas étudié, il faut donc introduire six capacités. L'identification de ces six capacités passe par la réduction du transformateur en un vrai quadripôle électrostatique. En pratique, cette opération est réalisée sans difficulté en connectant une terminaison primaire à une terminaison secondaire. Le schéma réduit ne compte alors plus que trois capacités qu'on identifie, ainsi que les autres éléments du schéma, sur base du comportement asymptotique des impédances. En variant la connexion entre primaire et secondaire, on peut déterminer plusieurs ensembles de valeurs des capacités du schéma réduit, qui permettent finalement de déterminer les six capacités du schéma complet. Les variations des impédances dues aux effets quasi-statiques sont d'autre part modélisées par des échelles à deux échelons, utilisées à la fois pour l'impédance série et pour l'impédance parallèle. L'identification est similaire à celle utilisée pour deux échelons dans le schéma CCS. Les confirmations expérimentales montrées dans [12] et [33] indiquent que le schéma LEG complet à deux enroulements ci-dessus permet effectivement de mieux tenir compte de la XII.2 - Schémas LEG: Schéma complet à deux enroulements III - 411 variation des impédances en fonction de la fréquence. En particulier, les fréquences de résonance du modèle reproduisent fidèlement celles du transformateur réel, ce qui est évidemment permis par le plus grand nombre de variables disponibles de ce point de vue. Le schéma LEG couvre donc une plus grande gamme de fréquence (quatre voire cinq décades) que le schéma CCS, ce qui en fait un candidat de choix lorsqu'il s'agit d'étudier une alimentation résonante. Ces conclusions sont cependant à nuancer: d'une part parce qu'elle sont données sous réserve d'une étude plus approfondie, puisque nous n'avons pas nous-mêmes implémenté et testé le schéma LEG et d'autre part parce que le LEG ne propose pas à notre connaissance de schéma complet à plus de deux enroulements69. Au moment de finaliser notre texte (septembre 1999), le LEG publie un article proposant un schéma à trois enroulements comportant un nombre réduit de capacités (par rapport aux quinze théoriquement nécessaires) [179]. 69 XII.2 - Schémas LEG: Schéma complet à deux enroulements III - 412 XII.3 Conclusion L'approche du Laboratoire d'Electrotechnique de Grenoble poursuit les mêmes buts que ceux qui ont amené au développement du schéma CCS. Des options différentes sont prises, qui mènent à deux solutions partielles: un schéma inductif multisorties et un schéma complet à deux enroulements. La démarche originale appliquée pour le schéma inductif multisorties consiste à orthogonaliser, par la méthode de Schmidt, la matrice impédance d'un système de n enroulements. Cette idée permet de faire disparaître les mutuelles du schéma, ce qui réduit asymptotiquement de moitié le nombre de ses éléments par rapport au schéma CCS. Tous les éléments du schéma (inductances et rapports de couplage) sont directement mesurables. Les inductances sont positives. D'autre part, pour le schéma complet à deux enroulements, deux particularités peuvent être soulignées. La première est que des échelles d'impédance sont utilisées à la fois pour les impédances série et pour les impédances parallèles, ce qui est une nouveauté par rapport au schéma CCS. La seconde est que les effets capacitifs sont pris en compte de manière exhaustive, par l'intermédiaire de six capacités. Leur identification est réalisée sur base du comportement asymptotique d'un schéma réduit à trois capacités, correspondant à un quadripôle électrostatique. Les six capacités permettent de modéliser les résonances série, ce qui donne à ce schéma un domaine de validité en fréquence plus étendu que le schéma CCS. L'idéal serait évidemment de généraliser ce dernier schéma à davantage d'enroulements. Cette démarche n'est cependant pas forcément souhaitable telle quelle car elle mènerait rapidement à un nombre de capacités très important dont une partie est peut-être inutile70. N'ayant pas eu l'occasion d'approfondir l'étude du schéma LEG, nous en soulignons dans le cadre de ce travail les éléments marquants: - l'orthogonalisation des inductances, - la modélisation de l'impédance parallèle par une échelle d'impédance, - la multiplication des capacités et la méthode d'identification par un schéma réduit qui lui est associée. En restreignant le nombre de capacités et sur base soit d'un schéma CCS soit d'un schéma inductif orthogonalisé, il nous semble possible de tirer profit de l'ensemble des idées données dans ce chapitre et dans le chapitre précédent pour obtenir un schéma multisorties valable sur une gamme de fréquence plus large que le schéma CCS. 70 Voir la note de bas 69 (page précédente). XII.3 - Schémas LEG: Conclusion III - 413 XIII. Autres types de schémas équivalents Dans ce dernier chapitre, nous présentons divers types de schémas équivalents élaborés selon des méthodes variées. Certaines de ces approches sont encore partielles mais livrent des pistes intéressantes, s'écartant souvent des schémas plus classiques des deux chapitres précédents. Sans avoir l'ambition de mener une étude exhaustive, nous complétons ainsi notre tour d'horizon des modèles de pièces magnétiques. Plan du chapitre XIII.1 Méthode des réluctances ..................................................................................... 415 XIII.2 Schéma équivalent électromagnétique.............................................................. 418 XIII.3 Schéma LEG basé sur la notion de propagation ............................................. 421 XIII.4 Analyse modale ..................................................................................................... 427 XIII.5 Conclusion............................................................................................................. 428 XIII - Autres types de schémas équivalents III - 414 XIII.1 Méthode des réluctances Dans ce chapitre regroupant des schémas divers, nous présentons une approche souvent utilisée qui consiste à identifier les chemins magnétiques et les réluctances à partir du modèle géométrique, de manière à tirer de celui-ci un schéma équivalent. XIII.1.1 Méthode des réluctances Comme on l'a rappelé dans le chapitre X, la réluctance est l'équivalent pour les phénomènes magnétiques de la résistance. On écrit en effet: φ= N2 i = Li ℜ (XIII.1-1) analogue de la loi d'Ohm, avec pour définition de la réluctance d'un tube de flux de longueur l et de section S constante: ℜ= l (XIII.1-2) µS L'analyse des phénomènes magnétiques peut donc notamment se faire selon une approche géométrique, basée sur la décomposition du transformateur en chemins magnétiques et en réluctances, comme le montre l'exemple de la Figure III-37. φin φair φout Rin Rair Rout y x Figure III-37: Un exemple de décomposition en réluctances pour un transformateur à deux enroulements De ces réluctances, on déduit un schéma "magnétique" auquel il suffit ensuite d'appliquer une transformation duale pour obtenir un schéma équivalent électrique comme à la Figure III-38 [45]. XIII.1 - Autres types de schémas équivalents: Méthode des réluctances III - 415 Ce schéma peut être ramené, par l'intermédiaire d'une transformation "triangle/étoile", au schéma classique. N1i1 φin φair φout Rin Rair Rout LS=N12/Rair i1 LP1= N12/Rin v1 N2i2 i2 η p LP2= N12/Rout p v2 Figure III-38: Schéma en réluctances (en haut) et schéma équivalent électrique (en bas) du transformateur de la figure précédente Lorsque le transformateur comporte plus de deux enroulements bobinés sur la jambe centrale d'un noyau classique, on obtient le schéma de la Figure III-39 [45][176][206]. LS1 LS2 LS3 η12 p v1 LP1 η13 p p v2 LP2 η14 p p v3 LP3 p v4 Figure III-39: Schéma équivalent d'un transformateur multisorties obtenu par la méthode des réluctances Le schéma équivalent obtenu en finale dépend de la décomposition en réluctances effectuée. On peut par exemple choisir de négliger certains flux de fuite ou de décomposer plus ou moins finement la géométrie du noyau. La décomposition en elle-même est relativement laborieuse. Les schémas en réluctances sont généralement utilisés lorsqu'on accorde une attention particulière à la géométrie du noyau. Ils sont généralement complétés par un petit nombre d'éléments parasites XIII.1 - Autres types de schémas équivalents: Méthode des réluctances III - 416 supplémentaires (résistances et capacités), ce qui limite forcément la portée des modèles. Un exemple de schéma relativement complet à deux enroulements est donné dans [40]. Notons que Wang, Witulski et al. [206] proposent, sur base d'un calcul de l'énergie, un schéma en réluctances qui tient compte du champ orthogonal dans la fenêtre de bobinage. XIII.1.2 Modèle gyrateur/capacités Sur base de la même décomposition en réluctances, Dixon propose un modèle alternatif appelé schéma "gyrateur/capacités" [45]. En introduisant un élément appelé "gyrateur", défini comme étant un quadripôle dont un port a une impédance inverse de l'autre, on peut éviter l'étape de transposition en un schéma dual dans la méthode précédente. Le schéma final possède ainsi une topologie déduite directement des chemins magnétiques identifiés à la première étape de la méthode. Les réluctances y sont modélisées par des capacités. XIII.1.3 Conclusion La méthode des réluctances est une analyse géométrique des flux dans le transformateur. Elle est généralement appliquée lorsqu'on s'intéresse particulièrement au noyau et est rarement complétée d'éléments auxiliaires destinés à modéliser les autres types de phénomènes. A notre connaissance, elle est peu appliquée dans les transformateurs de puissance multisorties, du moins dans le cadre de simulations du convertisseur. XIII.1 - Autres types de schémas équivalents: Méthode des réluctances III - 417 XIII.2 Schéma équivalent électromagnétique Ce schéma, développé par les universités de Madrid et d'Oviedo, a déjà été détaillé dans la seconde partie de ce travail en tant que moyen de calcul des champs 2D dans le transformateur. Il peut cependant également être utilisé lors de simulations du convertisseur. On part également ici de la géométrie de la pièce magnétique, dont on extrait un schéma équivalent modélisant les champs électromagnétiques. XIII.2.1 Schéma équivalent 1D Pour rappel, la méthode du schéma équivalent électromagnétique, que nous avons déjà présentée au chapitre IV de la seconde partie, consiste à exprimer les équations de Maxwell sous forme de schéma équivalent électrique. Dans le schéma obtenu, le courant représente le champ magnétique dans la fenêtre de bobinage et la tension représente le champ électrique dans les conducteurs. Cette méthode, qui peut être utilisée dans une analyse à une ou à deux dimensions, amène à modéliser chaque conducteur par un ensemble de cellules R-L, qu'il faut encore lier aux courants et tensions "électriques" aux ports du transformateur. La Figure III-40 donne l'exemple du schéma 1D d'un transformateur à deux enroulements. Le transformateur concerné pourrait par exemple être celui de la Figure III-37 déjà étudié au point précédent. v*=Ez primaire secondaire i*=Hy i1 N1/bw p i2 N2/bw p p v1 p v2 Figure III-40: Schéma équivalent électromagnétique d'un transformateur à deux enroulements Les éléments en bleu dans la figure ci-dessus appartiennent à la partie électromagnétique du schéma. Les courants et tensions i* et v* y représentent les champs magnétique et électrique. Les cadres en trait interrompu indiquent les deux conducteurs tandis que les trois inductances situées en dehors de ces cadres modélisent l'air dans la fenêtre de bobinage. Enfin les deux coupleurs réalisent la transition entre les grandeurs électriques propres au transformateur et les grandeurs électromagnétiques. XIII.2 - Autres types de schémas équivalents: Schéma équivalent électromagnétique III - 418 Dans une approche 2D, les échelles d'impédance figurant dans les encadrés sont remplacés par des réseaux à deux dimensions comme on l'a expliqué au §IV.3. XIII.2.2 Analyse des possibilités Parmi les modèles présentés dans cette troisième partie, le schéma équivalent électromagnétique est quelque peu particulier puisqu'il modélise les champs électromagnétiques dans le transformateur. Il s'agit donc d'un modèle qui va singulièrement plus loin que les schémas classiques se contentant de modéliser le transformateur vu de l'extérieur. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle ce schéma a été détaillé dans la seconde partie, consacrée à l'analyse des champs. Une autre particularité de ce schéma est qu'il ne demande pas d'étape d'identification. Ses éléments sont en effet déduits directement de la géométrie du transformateur. Compte tenu du fait qu'il peut être aisément implémenté dans un simulateur de circuit, on peut envisager d'utiliser ce schéma au sein d'une simulation complète de convertisseur, du moins si on se limite à un modèle 1D. L'analyse 2D génère par contre des schémas trop volumineux pour imaginer d'associer au transformateur les éléments du convertisseur71. Tel que présenté ci-dessus, le schéma se contente de modéliser les effets magnétiques et les pertes cuivre, en ce compris leurs variations quasi-statiques. La gamme de fréquence est limitée, du côté supérieur, par le nombre d'échelons choisi dans les conducteurs. On note l'absence de modélisation des effets électrostatiques, mais rien n'empêche de compléter le schéma par un système de capacités, comme dans le schéma LEG par exemple. Enfin, d'après les auteurs, on peut tenir compte grâce à des inductances supplémentaires dans la partie électromagnétique du schéma d'éventuels entrefers ou de non-linéarités du noyau. XIII.2.3 Schéma classique de l'université de Madrid Citons encore un schéma plus classique, développé également à l'université de Madrid, et présenté dans [3] et [4]. La Figure III-41 en montre une version à deux enroulements, dans laquelle on constate un caractère matriciel assez marqué dans les impédances série et les capacités. La modélisation électrostatique utilise seulement trois capacités. La particularité du modèle est de faire appel, au travers d'un coupleur "K" dont la nature n'est pas précisée, à un modèle non linéaire du noyau (symbolisé par le rectangle Zcore). On cite dans [3] la possibilité d'utiliser des réseaux (échelles) pour modéliser la variation en fréquence des impédances série. Un schéma à trois enroulements, contenant six capacités, six impédances série et une inductance parallèle, y est également présenté. Il ressort de nos discussions avec M. Cobos (Université de Madrid) que la version 1D du schéma électromagnétique est utilisée dans le logiciel "PEMag" d'Ansoft. Des schémas équivalents 2D peuvent également être générés dans ce logiciel, mais ils sont alors basés sur des simulations en éléments finis. 71 XIII.2 - Autres types de schémas équivalents: Schéma équivalent électromagnétique III - 419 C12 Z12 Z1 Z2 p η p K C1 C2 Zcore Figure III-41: Le schéma à deux enroulements (ou plus) développé par l'université de Madrid L'identification des différents éléments est réalisée sur base des coefficients d'impédances, par intégration de la densité d'énergie comme exposé au §X.2.3. On se reportera à [160], que nous avons déjà cité, pour une analyse plus détaillée de la modélisation des effets capacitifs. Ce schéma n'appelle pas de commentaire particulier puisqu'il présente simplement quelques variations sur une base tout-à-fait classique. Dans le même ordre d'idées, on pourra également se reporter aux travaux de Chan [28], qui présente un modèle tenant compte de l'hystérèse, et de Hui [88][89] qui adapte le schéma classique au cas particulier d'un petit transformateur d'isolation sans noyau utilisé à des fréquence élevées (plusieurs mégahertz) pour la commande d'un transistor. XIII.2.4 Conclusion Le schéma équivalent électromagnétique, déjà présenté au chapitre IV, est ici donné dans sa version complète, prête à être implémentée dans un simulateur de circuit. Il s'agit d'un schéma particulier par le fait qu'il modélise le comportement interne, c'est-à-dire les champs électromagnétiques, de la pièce magnétique. On peut néanmoins imaginer de l'utiliser dans une simulation de convertisseur, spécialement aux premières étapes de la conception puisque ses éléments sont calculés sur base de la géométrie du transformateur. On se limitera dans ce cas à un schéma 1D à compléter des traditionnelles capacités parasites. L'université de Madrid propose d'autre part un schéma plus classique, basé essentiellement sur une approche matricielle, qui montre un exemple de variation typique à partir du schéma de base. XIII.2 - Autres types de schémas équivalents: Schéma équivalent électromagnétique III - 420 XIII.3 Schéma LEG basé sur la notion de propagation Compte tenu des fréquences utilisées, on néglige en général toute notion de propagation dans les transformateurs de puissance (§II.1.3). Le Laboratoire d'Electrotechnique de Grenoble (LEG) propose cependant un schéma basé sur la propagation d'une onde électromagnétique dans un milieu multicouches [102][178]. Le transformateur est alors décomposé en lames d'impédances suivant un modèle unidimensionnel. XIII.3.1 Milieu multicouches Au chapitre XII, nous avons présenté deux schémas équivalents développés par le Laboratoire d'Electrotechnique de Grenoble et basés sur une approche relativement classique (quoique contenant certains aspects fort originaux). Constatant les limites de ce modèle, le LEG s'est lancé récemment dans le développement d'un autre schéma en partant cette fois des phénomènes de propagation. Ce schéma se limite pour l'instant à une décomposition unidimensionnelle du transformateur. ferrite air milieu multicouches cuivre y x z Figure III-42: Modèle 1D d'un transformateur à deux enroulements (les parties inférieure et supérieure du noyau sont supposées de perméabilité infinie) L'idée de départ est de considérer qu'un transformateur est constitué d'une suite de couches possédant des propriétés différentes (cuivre, air/isolant, ferrite), c'est-à-dire forme un milieu multicouches comme illustré à la Figure III-42 ci-dessus. Ce milieu voit une onde plane incidente qui se propage perpendiculairement aux couches (Figure III-43). On peut vérifier que les orientations des champs sont cohérentes avec celles constatées dans un transformateur. XIII.3 - Autres types de schémas équivalents: Schéma LEG basé sur la notion de propagation III - 421 ex y ey Hy(z) x Ex(z) z propagation ez Figure III-43: Orientation des champs et direction de propagation Cette modélisation est typique de l'optique. Dans l'hypothèse où les différentes milieux sont isotropes, homogènes et linéaires et que l'onde est monochromatique, chaque milieu est décrit uniquement par une perméabilité µ et une permittivité ε complexes. Ces deux valeurs tiennent notamment compte des pertes fer et des pertes cuivre. jω ε = σ + jωε (XIII.3-1) µ = µ '− jµ ' ' (XIII.3-2) On définit sur base de ces valeurs l'impédance caractéristique de chaque milieu par: ZC = µ ε (XIII.3-3) L'onde incidente traversant un milieu subit dans celui-ci une atténuation et un déphasage traduits dans le coefficient complexe A: A = e − jϕ (XIII.3-4) où ϕ = e zω µ ε (XIII.3-5) On montre enfin que le milieu considéré peut être caractérisé par le schéma équivalent de la Figure III-44 dans lequel: Z1 = Z C 1− A ⎛ϕ ⎞ = Z C j tan⎜ ⎟ 1+ A ⎝2⎠ XIII.3 - Autres types de schémas équivalents: Schéma LEG basé sur la notion de propagation (XIII.3-6) III - 422 Z2 = ZC 2A 1 = ZC j sin (ϕ ) 1 − A2 Z1 H1 Z1 (XIII.3-7) H2 Z2 IS E1 p η E2 p VS ES Figure III-44: Schéma équivalent d'une couche du transformateur considéré comme milieu multicouches Dans cette figure, le coupleur tient compte d'un éventuel champ uniforme ES supplémentaire dans un milieu conducteur, correspondant à l'application d'une tension VS sur un enroulement. Le rapport de couplage vaut dans ce cas: η=N ex ey (XIII.3-8) où N vaut le nombre de tours de l'enroulement. XIII.3.2 Particularisation aux milieux considérés Le schéma général ci-dessus peut être particularisé aux milieux rencontrés dans les transformateurs de puissance. Trois milieux sont identifiés: • un milieu "isolant non absorbant et non rayonnant", qui possède une permittivité et une perméabilité purement réelles. Il s'agit en pratique des isolants et plus particulièrement de l'air. Le développement en série des expressions (XIII.3-6) et (XIII.3-7) en fonction de la fréquence montre que dans ce cas Z1 est une inductance et Z2 une capacité. Aux fréquences usuelles cependant, le schéma complet de la Figure III-44 se réduit à une simple inductance série. On retombe donc sur le résultat du §XIII.2.1 (schéma équivalent électromagnétique), qui découle fondamentalement d'une démarche analogue. On constate également que le fait de considérer au départ la propagation n'est pas contradictoire puisqu'on retrouve à basse fréquence des résultats déjà établis. • un milieu "conducteur non magnétique" destiné à représenter les enroulements et caractérisé par une perméabilité relative unitaire et une permittivité diélectrique nulle. Aux fréquences usuelles, ces propriétés font apparaître sans surprise l'épaisseur de peau δ dans les expressions XIII.3 - Autres types de schémas équivalents: Schéma LEG basé sur la notion de propagation III - 423 complètes de Z1et Z2. Une première approximation (conservant uniquement le premier terme du développement) mène à considérer que Z1 est une inductance et Z2 une résistance. Le schéma obtenu est cependant très limité en fréquence puisqu'il ne prend pas en compte les variations quasi-statiques. On lui préfère donc le schéma plus évolué ci-dessous: lC/2 lC/2 H1 H2 6rC 6rC rC IS E1 p lC/6rC2 Z2 E2 η p VS ES Figure III-45: Schéma équivalent du milieu conducteur non magnétique où rC = 1 σ ez (XIII.3-9) lC = µ 0 e z (XIII.3-10) On reconnaît dans ce schéma une impédance série proche d'une modélisation en échelle. La gamme de fréquence est encore relativement limitée. • un milieu "magnétique dissipatif" représentant la ferrite. Au premier ordre, le modèle se réduit à l'équivalent R-L parallèle bien connu. Le LEG propose cependant un modèle plus complexe, représenté à la Figure III-46, qui permet de tenir compte d'une résonance de la ferrite apparaissant aux environs du mégahertz, voire déjà à des fréquences inférieures. Lf Rfm H1 E1 Rfe H2 Cf E2 Figure III-46: Schéma équivalent du milieu magnétique dissipatif XIII.3 - Autres types de schémas équivalents: Schéma LEG basé sur la notion de propagation III - 424 XIII.3.3 Schéma complet Pour obtenir un schéma complet du modèle 1D, il suffit de mettre bout-à-bout les schémas équivalents des différents milieux. Dans l'hypothèse où le flux de fuite hors de la ferrite est négligeable, on peut court-circuiter les bornes extrêmes puisque les ampères-tours y sont nuls (Figure III-47). p η1 p p V1 ferrite air η2 p V2 enroulement 1 air enroulement 2 air ferrite Figure III-47: Première étape pour obtenir le schéma complet En retravaillant quelque peu le circuit, on obtient pour notre exemple à deux enroulements le schéma final de la Figure III-48. Dans celui-ci, la variation des impédances série en fonction de la fréquence est finalement modélisée par une échelle classique et certaines simplifications ont été opérées compte tenu des ordres de grandeur des différents éléments [178]. enroulement 1 enroulement 2 i1 i2 air N2/N1 p p V1 V2 ferrite Figure III-48: Schéma final obtenu par la méthode de la décomposition en lames d'impédance Le schéma obtenu est finalement fort classique. L'intérêt de la décomposition en lames apparaît très peu puisque le seul élément atypique, à savoir la modélisation de l'impédance parallèle par quatre éléments, ne découle pas spécifiquement de cette approche. On s'étonnera d'autre part du petit nombre de capacités, qui ne permet pas une modélisation complète des effets électrostatiques. D'après les auteurs, cette démarche encore à compléter promet cependant des avancées intéressantes. XIII.3 - Autres types de schémas équivalents: Schéma LEG basé sur la notion de propagation III - 425 XIII.3.4 Schéma de J. Laeuffer Concernant les modèles utilisant la notion de propagation, citons également l'article de J. Laeuffer [105], qui étudie la propagation de l'énergie dans les transformateurs en considérant la ferrite et le cuivre comme des matériaux parfaits (c'est-à-dire respectivement de perméabilité et de conductivité infinies). L'article débouche sur un schéma équivalent contenant de nombreuses cellules L-C qui nous paraît difficilement utilisable dans une simulation de convertisseur. XIII.3.5 Conclusion En s'inspirant d'une modélisation typiquement utilisée en optique, le Laboratoire d'Electrotechnique de Grenoble considère le transformateur comme un milieu multicouches voyant une onde électromagnétique incidente. Dans cette approche, un schéma équivalent partiel peut être associé à chaque milieu et particularisé suivant les propriétés physiques de la ferrite, des conducteurs et des isolants. En finale, on obtient un schéma résultant de la concaténation des schémas de chaque milieu. Exploitant les simplifications d'usage aux fréquences utilisées dans les convertisseurs, on retombe néanmoins sur un schéma très classique dont la seule particularité, la modélisation de la ferrite par quatre éléments, ne découle pas de la méthode présentée. Les spécificités de cette méthode n'apparaissant qu'à plus haute fréquence, on peut se demander quel est l'apport véritable de cette méthode, sinon le développement théorique qui en est la base. Il nous paraît cependant intéressant d'être attentif à ses éventuels développements futurs. XIII.3 - Autres types de schémas équivalents: Schéma LEG basé sur la notion de propagation III - 426 XIII.4 Analyse modale Pour terminer, citons encore une technique particulière de modélisation développée au départ pour l'analyse des transformateurs de distribution: l'analyse modale. Celle-ci est spécialement destinée à l'étude des transitoires rapides. Quatre articles de Wilcox et al. décrivent l'analyse modale [209][210][211][212]. Cette méthode consiste à décomposer chaque enroulement en "sections" auxquelles on attribue des effets propres et mutuels. Le principe est tout-à-fait le même que la décomposition effectuée par Evans au §IV.2, mais étendu aux effets capacitifs et éventuellement dissipatifs. Chaque section est ensuite représentée par un schéma équivalent partiel très proche de ceux utilisés dans l'étude des lignes de transmission. L'analyse modale consiste à organiser et résoudre d'une manière particulière que nous ne détaillerons pas ici le système d'équations obtenu pour le transformateur complet à n enroulements. A titre d'exemple, la Figure III-49 montre un schéma grossier de transformateur à deux enroulements. Figure III-49: Schéma d'un transformateur à deux enroulements obtenu par analyse modale Le but de l'analyse modale est de tenir compte des effets répartis de manière plus complète que dans les méthodes précédentes, en mettant l'accent sur l'étude de transitoires rapides. La méthode ignore généralement la modélisation des pertes, abordée uniquement dans [210]. Comme on le voit, les schémas obtenus par cette méthode comptent de très nombreux éléments et apparaissent de ce fait peu appropriés aux simulations de convertisseurs de puissance. XIII.4 - Autres types de schémas équivalents: Analyse modale III - 427 XIII.5 Conclusion Compte tenu du caractère non exhaustif de cette troisième partie consacrée aux schémas équivalents, nous avons décidé d'y présenter essentiellement les modèles les plus intéressants en vue de la simulation d'un convertisseur complet. C'est ce qui nous a poussé, au terme de notre tour d'horizon des schémas existants, à développer principalement les schémas CCS et LEG aux chapitres XI et XII. Il est frappant de constater que quasiment tous les autres modèles figurant dans le présent chapitre et que nous avons jugés moins immédiatement applicables sont basés sur une étude géométrique du transformateur. La méthode des réluctances, le schéma équivalent électromagnétique, le schéma LEG basé sur la notion de propagation ou encore l'analyse modale consistent tous à d'abord décomposer le transformateur plus ou moins finement pour attribuer à chacune des cellules un schéma équivalent, du plus basique au plus évolué. Par rapport aux schémas CCS et LEG, cette approche a deux conséquences: - l'identification des éléments du schéma est basée sur les propriétés des matériaux et la géométrie du transformateur et non sur des mesures. Ceci implique d'une part qu'on peut obtenir le schéma du transformateur dès les premières étapes de conception, mais d'autre part qu'on ne tient pas compte des spécificités du dispositif réel une fois réalisé (impédances de connexion, variation d'un transformateur à l'autre, etc); - la décomposition géométrique est souvent une étape assez laborieuse menant à des schémas très lourds. D'un point de vue pratique, dans le cadre du dimensionnement et des simulations d'un convertisseur, ces caractéristiques expliquent notre préférence pour les schémas des chapitres XI et XII, plus maniables et plus proches du comportement réel du transformateur. Nous jugeons cependant les méthodes développées dans ce chapitre tout aussi intéressantes pour les perspectives plus larges qu'elles offrent quant à la compréhension des phénomènes présents dans les pièces magnétiques. XIII.5 - Autres types de schémas équivalents: Conclusion III - 428 XIV. Synthèse de la troisième partie Comme pour la seconde partie, nous proposons une synthèse des apports des chapitres précédents. Rappelons que le but de cette troisième partie était de rechercher les schémas les plus aptes à modéliser le transformateur dans une simulation électrique du convertisseur. Elaboration d'un schéma équivalent Spécificités des transformateurs de puissance Dans le chapitre X, nous nous sommes tout d'abord efforcés d'identifier les caractéristiques des schémas nécessaires à la simulation des transformateurs au sein des convertisseurs de puissance (§X.1). Compte tenu du fait que la ferrite n'entre pas en saturation au cours du fonctionnement normal du convertisseur, nous avons considéré celle-ci comme linéaire et avons choisi de modéliser les pertes fer de façon élémentaire. Notre recherche s'est alors orientée vers des schémas équivalents capables de prendre en compte un nombre quelconque d'enroulements, sur une gamme de fréquence allant du domaine statique jusqu'aux résonances du transformateur. C'est la combinaison de ces deux critères qui constitue la difficulté du problème envisagé. D'autre part, le schéma ne doit pas poser de problème de convergence du simulateur ni engendrer un temps de calcul prohibitif, ce qui est une contrainte supplémentaire importante. Eléments constitutifs Dans les paragraphes §X.2 à §X.4, nous avons identifié les éléments de base disponibles pour élaborer un schéma: des coupleurs et des inductances pour les phénomènes magnétiques, des résistances pour les phénomènes dissipatifs et des capacités pour les effets électrostatiques. Construire un schéma équivalent revient à combiner ces composants élémentaires –ce qui peut être fait de très nombreuses façons– pour traduire les imperfections du transformateur réel. En examinant les schémas les plus courants, nous avons relevé deux approches: - l'approche "matricielle": elle mène généralement à des schémas symétriques et rigoureux mais difficiles d'interprétation, - l'approche classique, qui consiste à construire le schéma en ajoutant à un transformateur parfait différents éléments parasites: on obtient alors un schéma plus facile à interpréter mais moins rigoureux. XIV - Synthèse de la troisième partie III - 429 Les schémas courants examinés au chapitre X ne répondent pas aux exigences que nous nous sommes fixées: soit parce qu'ils sont uniquement valables pour deux enroulements, soit parce que la modélisation qu'ils proposent est trop partielle. L'étude de ces schémas nous a néanmoins donné l'occasion d'aborder plusieurs notions importantes quant à la modélisation des phénomènes: - en ce qui concerne les effets inductifs, nous avons discuté le fait qu'il est préférable de ne pas identifier les rapports de couplage utilisés dans le modèle aux rapports du nombre de spires des enroulements du transformateur réel (§X.2.4), - en ce qui concerne les effets dissipatifs, nous avons rappelé les interprétations des résistances propres et mutuelles d'un système de conducteurs qui, aux fréquences quasi-statiques, s'écartent quelque peu des définitions habituelles de la résistance, - en ce qui concerne les effets électrostatiques enfin, nous avons souligné le problème de la multiplication des variables, qui explique en grande partie pourquoi la plupart des schémas quelque peu évolués se limitent à deux enroulements. Nous avons également attiré l'attention sur le fait que l'implémentation des coupleurs au moyen de sources commandées rend le schéma asymétrique. Une implémentation par coefficient de couplage, encore à tester, pourrait être préférable. Schémas multisorties Outre les schémas précédents présentés à titre d'introduction, deux études ressortent essentiellement de nos recherches bibliographiques: celle du Virginia Power Electronics Center (schéma CCS) et celle du Laboratoire d'Electrotechnique de Grenoble (schémas LEG). Toutes deux proposent des schémas multisorties capables de modéliser la variation en fréquence des impédances du transformateur. Le fait que deux schémas seulement soient disponibles à cette fin confirme la difficulté du problème envisagé dans cette troisième partie. Schéma CCS Schéma original L'idée du schéma CCS (chapitre XI) est avant tout de modéliser les couplages entre secondaires. Dans ce but, le schéma de base est constitué d'un système complet d'inductances propres et mutuelles représentant l'ensemble des effets inductifs entre secondaires (§XI.1). Le couplage de ces enroulements avec le primaire est par contre supposé parfait (l'inductance de magnétisation étant infinie). En pratique, ce système d'inductances peut être implémenté au moyen de boucles auxiliaires complétant un schéma classique. Ce schéma de base est valable à une seule fréquence. Dans une seconde étape (§XI.2), on remplace les inductances du schéma de base par des échelles d'impédance (comprenant des inductances mais aussi des résistances). Le schéma équivalent permet alors de modéliser les effets inductifs et dissipatifs, ainsi que leurs variations quasi-statiques sur une gamme de fréquence. Cet apport complique néanmoins l'identification des éléments. Deux XIV - Synthèse de la troisième partie III - 430 techniques d'identification possédant un caractère empirique marqué sont proposées dans la méthode originale. Enfin, dans une troisième étape, on complète le schéma d'un circuit R-L-C parallèle distribué à tous les ports (§XI.3). Le but est ici de modéliser l'inductance de magnétisation, les pertes fer ainsi qu'une partie des effets capacitifs. L'identification de ce circuit se fait classiquement à partir de la mesure de l'impédance à circuit ouvert. Implémentation sur tableur Nous avons implémenté dans un tableur (§XI.4) le schéma CCS complet décrit ci-dessus. A cette occasion, nous avons tout d'abord montré que les méthodes empiriques proposées par les auteurs pour identifier les éléments des échelles d'impédance sont fort complexes et peu efficaces. En particulier, elles ne conviennent pas pour le transformateur de test que nous avons utilisé, un transformateur de puissance à quatre enroulements utilisé en production chez I.T.S. Mitra. Une amélioration significative de la modélisation a été obtenue en recourant à des méthodes de régression classiques (de type Newton ou gradient conjugué). Moyennant cette correction, les résultats fournis par le schéma CCS se révèlent en excellent accord avec les mesures réalisées sur le transformateur de test: typiquement moins de 5% d'écart sur une gamme de fréquence de deux à trois décades à partir des paliers statiques, pour un schéma comportant entre cinquante et cent éléments. Ce schéma, parce qu'il ne comporte qu'une seule capacité, est cependant incapable de modéliser les résonances série faisant intervenir les impédances de fuite du transformateur. La gamme de fréquence du modèle est donc intrinsèquement limitée en-dessous de ces résonances, ce qui nous amène à le déconseiller pour les alimentations utilisant les techniques de commutation résonante. Hormis cette limitation, logique compte tenu des hypothèses retenues lors de son élaboration, les performances du schéma CCS sont jugées excellentes. Critique de l'identification des éléments La procédure de calcul des éléments étant relativement lourde, nous avons également analysé les étapes et hypothèses de celle-ci. Il apparaît que la distribution des impédances parallèles aux différents ports ainsi que l'extraction des impédances de fuite à partir des impédances de courtcircuit, deux opérations détaillées dans notre texte, ne se justifient pas réellement: elles alourdissent le schéma et la procédure de calcul sans apporter d'amélioration significative dans la qualité de la modélisation. Sous réserve d'une vérification de cette conclusion sur d'autres transformateurs, nous proposons de les ignorer. Nous proposons également, comme amélioration ultérieure, de considérer les rapports de couplage comme faisant partie des degrés de liberté du schéma, à déterminer lors de l'étape d'identification. XIV - Synthèse de la troisième partie III - 431 Implémentation sur Delphi Enfin, après la validation sur tableur, le calcul des éléments a été implémenté dans une application Delphi (§XI.5). Cette étape a permis d'automatiser le transfert des mesures à partir de l'analyseur d'impédance ainsi que la génération du schéma équivalent en un sous-circuit Spice, directement intégré dans une bibliothèque de composants. Ces deux apports ont permis de réduire très significativement le délai de mise en œuvre du schéma et le risque d'erreur lié à la manipulation d'un grand nombre de données. A cette occasion, nous avons testé l'utilisation de la méthode de régression de LevenbergMarquardt, qui s'avère finalement convenir nettement moins bien à ce problème particulier que les méthodes plus classiques utilisées sur tableur. En finale, nous disposons donc d'un outil calculant un schéma CCS sur base des mesures d'impédance d'un transformateur. Cet outil intègre plusieurs améliorations par rapport à la méthode originale quant à l'identification des paramètres. L'implémentation sur Delphi permet d'envisager divers développements comme par exemple l'amélioration de la procédure d'identification, le choix parmi plusieurs types et variantes de schémas, etc. Schémas LEG L'approche du Laboratoire d'Electrotechnique de Grenoble (chapitre XII) est une seconde piste tout aussi intéressante dans la recherche d'un schéma équivalent multisorties. Le LEG propose tout d'abord une méthode permettant d'élaborer un schéma inductif pour un nombre quelconque d'enroulements (§XII.1). Celle-ci est basée sur une orthogonalisation de Schmidt de la matrice inductance. Cette démarche est tout-à-fait remarquable par sa rigueur, sa généralité, le petit nombre d'éléments obtenu (asymptotiquement la moitié par rapport au schéma CCS) et le fait que le schéma reste assez facile à interpréter. L'inconvénient de ce schéma est évidemment qu'il se limite aux effets inductifs. Le LEG propose donc par ailleurs un schéma complet à deux enroulements72 (§XII.2). Deux idées particulières peuvent être relevées dans celui-ci, que nous n'avons malheureusement pas eu l'occasion d'implémenter: - l'identification du système de capacités, basée sur le passage par plusieurs schémas réduits et sur le comportement asymptotique des impédances, - l'utilisation d'une échelle d'impédances pour la modélisation de l'impédance parallèle (pertes fer et inductances de magnétisation). Grâce à la modélisation plus poussée des effets capacitifs, la gamme de fréquence est plus étendue que celle du schéma CCS, incluant cette fois les premières résonances série. Ce schéma est donc un 72 Les tout derniers développements proposent un schéma quasiment complet (certaines capacités sont omises) à trois enroulements [179]. XIV - Synthèse de la troisième partie III - 432 candidat de choix pour la modélisation des transformateurs utilisés dans les convertisseurs à commutation résonante. Autres types de schémas Enfin, nous avons regroupé au chapitre XIII différents schémas qui nous semblaient convenir moins directement au but recherché. Il est frappant de constater a posteriori que toutes les méthodes proposées dans ce chapitre sont basées sur une décomposition géométrique du transformateur, au contraire des schémas CCS et LEG qui adoptent une approche plus "externe". Nous avons ainsi principalement cité la méthode des réluctances, le schéma équivalent électromagnétique (à lier au §IV.3 de la seconde partie), le schéma LEG basé sur la notion de propagation et l'analyse modale. Deux propriétés typiques de ce type de schémas peuvent être soulignées: - les valeurs des éléments sont liées à la géométrie du transformateur: elles peuvent donc être calculées avant la réalisation de la pièce réelle. Elles n'incluent pas par contre certaines caractéristiques typiques de celle-ci comme par exemple les impédances des terminaisons; - les schémas obtenus sont extrêmement lourds à manipuler: on ne peut donc que très difficilement envisager de les inclure dans le schéma plus général d'un convertisseur. Cette dernière propriété explique pourquoi nous avons peu approfondi l'étude de ces schémas. Nous avons néanmoins jugé utile de les évoquer pour les approches complémentaires qu'ils représentent et certaines idées plus ponctuelles qui pourraient être transposées aux schémas CCS et LEG. Conclusion On pourrait croire que le choix et l'utilisation d'un schéma équivalent de transformateur est un problème résolu depuis longtemps: la littérature propose d'ailleurs de très nombreux articles à ce sujet. En y regardant mieux, on se rend cependant compte qu'il n'en est rien car cette variété de schémas correspond également à une variété de problèmes qui possèdent chacun leurs spécificités. Ainsi, pour les transformateurs de puissance utilisés dans les convertisseurs, seules deux approches nous semblent réellement répondre aux objectifs fixés: celle du schéma CCS et celle des schémas LEG. Ces deux approches se distinguent d'ailleurs elles-mêmes par la gamme de fréquence du modèle obtenu. Le premier de ces deux schémas, le schéma CCS, a été implémenté dans une application originale. En une heure environ (réalisation des mesures comprise), celle-ci fournit un sous-circuit Spice XIV - Synthèse de la troisième partie III - 433 contenant le schéma CCS d'un transformateurs multisorties, sur une gamme de fréquence qui peut aller jusqu'à trois décades. Ce schéma donne des résultats excellents pour peu qu'on ne doive pas modéliser les résonances série du transformateur, conformément à ses hypothèses. Pistes pour les recherches futures Le travail réalisé dans cette troisième partie propose donc une première solution pratique au problème de la modélisation. De nombreuses pistes peuvent encore être explorées pour la compléter. Nous suggérons notamment: - une mise en oeuvre du schéma CCS sur un échantillon plus large de transformateurs, en ce compris une validation au sein de l'alimentation elle-même; - l'intégration d'un nombre accru de capacités à ce schéma, par exemple selon une démarche analogue à celle du LEG (système complet) ou éventuellement selon une approche intermédiaire; - le développement de l'application Delphi en y intégrant les schémas LEG ou des méthodes d'identification alternatives des éléments (incluant par exemple les rapports de couplage dans le schéma CCS), de manière à créer un outil donnant à l'utilisateur le choix entre plusieurs types de schémas, méthodes d'identification et degrés de modélisation; - l'établissement de procédures de calcul des éléments (schémas CCS ou LEG) à partir de modèles en éléments finis. Outre ces pistes directement liées au travail effectué, nous pensons qu'il sera indispensable, si l'on désire étendre la modélisation vers des fréquences plus élevées (typiquement plusieurs dizaines de MHz), de s'intéresser: - d'une part aux méthodes de mesure des capacités, - d'autre part à la modélisation des pertes fer, pour lesquelles on devra probablement abandonner les modèles élémentaires appliqués jusqu'ici. XIV - Synthèse de la troisième partie III - 434