Un robot aide-soignant: vive le progrès
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Un robot aide-soignant: vive le progrès
Débats Ripostes Zora a vu le jour dans une jeune entreprise flamande. C’est un “robot humanoïde” destiné à assister les personnes âgées, les enfants atteints d’autisme, les malades hospitalisés en pédiatrie, neurologie, réadaptation… l Très populaire, la machine a déjà reçu pas mal de soutien. Mais elle interpelle aussi. l Un robot aide-soignant : vive le progrès ? Zora, présentée en septembre 2013 à l’hôpital universitaire de Gand. Oui Vous avez conçu un robot intervenant dans le domaine des soins de santé. Comment a-t-il vu le jour? Zora a été créé sur la base d’un robot qui existe déjà depuis quelques années, mais dont l’usage était limité au cadre académique. Nous voulions commercialiser un robot humanoïde. Au cours de ces recherches, les Mutualités chrétiennes nous ont suggéré de nous di riger vers les soins de santé, la demande existant. L’hôpital universitaire de Gand nous a contactés, nous demandant de développer le robot à motiver les en fants dans la revalidation. Ils avaient constaté que ces derniers avaient besoin d’autre chose que d’un hu main pour les assister dans leurs efforts. Les premiers résultats ont immédiatement été convaincants. Une maison de retraite nous a ensuite contactés. Si nous savions accomplir la tâche avec des enfants, pourquoi pas avec des personnes âgées? La réaction d’un public ayant à peine connu le GSM a été phénoménale. De puis lors, nous sommes présents dans 28 instituts, en Flandre et aux PaysBas, en attendant de finaliser d’autres installations à l’étranger. Quel est le rôle de Zora? Elle aide à la motivation dans la revalidation. Les aidessoignants nous ont ensuite aiguillés dans diffé rentes facultés à ajouter à Zora. Il est ainsi possible pour les aidessoignants de parler à distance à travers le robot via leurs tablettes. Il joue à des jeux thérapeu tiques avec les patients atteints d’Alzheimer ou de dé mence. Il est capable de lire le journal, les livres. On réfléchit à d’autres adaptations. Dans tous les cas, le robot est mis au service de l’humain, il le soutient. Le robot n’est pas destiné à le remplacer? Non, il vient comme une assistance aux aidessoi gnants. Sans eux, ce robot (58 cm de hauteur, 12 kg) ne pourrait pas fonctionner. Pourtant, son prix est moins élevé qu’un employé. Nous mettons les robots en location pour moins de 300 euros par mois… Mais nous les avons créés dans le but d’assister dans des exercices répétitifs et non pas pour remplacer le personnel existant. 52 QBMT n Dans chacun de ces environnements, le robot est allié et confident. Il tisse du lien là où il n’y en a plus, il rassure dans un milieu ressenti comme hostile. S’il soulage le personnel en l’assistant dans des tâches répétitives, il n’est nullement voué à le remplacer. Anticipant la diminution – voire la disparition – des maisons de repos, ses concepteurs voient en lui une solution d’avenir. FABRICE GOFFIN Directeur de QBMT Créateur du robot Zora. “Le robot est pour les personnes âgées un compagnon à qui ils peuvent s’adresser – au lieu du mur ou du petit oiseau. Il leur apporte chaleur et réconfort. Dans les services pédiatriques, il est l’allié des enfants.” Ne risque-t-on pas de déshumaniser les contacts sociaux? Que du contraire. Il permet de restaurer un lien qui n’existe plus ou d’en créer là où il n’y en avait pas. On entend qu’il est scandaleux de proposer des robots alors que les personnes âgées ont plutôt besoin de chaleur humaine. Mais ceuxlà mêmes qui travaillent avec les robots au quotidien disent, d’abord, que c’est leur choix et, ensuite, combien ils apprécient cette compagnie. Prenez cet exemple: une maison de repos a été mise en contact avec une école. Ce que les en fants inscrivent sur l’ordinateur, le robot le transmet aux personnes âgées. Agissant comme une tierce per sonne, il a permis de créer du lien entre des généra tions qui se sont ensuite rencontrées. Le nombre de visites extrêmement bas de certains retraités pose question, et ce, même s’ils ont encore de la famille. Leurs membres ne se déplacent plus souvent. Le ro bot est pour eux un compagnon à qui ils peuvent s’adresser – au lieu du mur ou du petit oiseau. Il leur apporte chaleur et réconfort. Dans les services pédia triques, il est l’allié des enfants. Récemment, l’un d’eux s’est fait mordre par un chien au visage. Il fallait trois personnes pour le mobiliser à chaque désinfec tion. Il a suffi qu’il voie la réaction de Zora en subis sant le même traitement pour que l’enfant dédrama tise. Ces “traitements symboliques” sont très utiles dans les services de pédiatrie. Est-ce une solution d’avenir? Selon les prévisions, d’ici 2025, la robotique huma noïde sera un marché plus gros que celui des ordina teurs. Ils sont une solution d’avenir. Ils pourraient ré pondre à une pénurie du personnel dans le secteur de la santé mais surtout, répondre à une réalité qui se fera plus prégnante : celle de la suppression des mai sons de repos, peu rentables, pour garder les person nes chez elles. Le robot sera alors une aide familiale, capable dans un premier temps d’ouvrir les portes, allumer la télévision, etc. Sans négliger le coût moin dre d’une telle organisation pour les finances publi ques. Entretien: Valentine Van Vyve La Libre Belgique - jeudi 22 janvier 2015 © S.A. IPM 2015. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.