article d`Eurorégion sur la violence conjugale
Transcription
article d`Eurorégion sur la violence conjugale
PO37A ! EUROREGION " # AUSTERITE Blocage partiel à l’université du Mirail Toulouse. L’université Toulouse-Jean Jaurès (23 000 étudiants) était « partiellement bloquée », hier, par des étudiants et personnes extérieures au campus protestant notamment contre les politiques d’austérité. Dans un communiqué, le président de l’université Toulouse - Jean Jaurès (ex-Mirail), Jean-Michel Minovez, a annoncé que la veille au soir, « plusieurs groupes » avaient pénétré sur le campus, puis étaient entrés « par effraction dans plusieurs bâtiments et sur les zones de chantier afin de s’emparer de tous les objets nécessaires à la formation de barricades ». Cependant, la direction a décidé d’ouvrir hier matin une partie des bâtiments. # AVEYRON 17 à 20 ans requis contre les “meneurs” De 17 à 20 ans de réclusion criminelle ont été requis hier contre les « meneurs » de l’« expédition punitive » ultra-violente qui avait abouti à la mort d’un jeune homme originaire des Antilles, à Millau en 2010. « On ne peut pas dire que c’est une affaire qui a mal tourné », a déclaré l’avocat général Jérôme Laurent devant la Cour d’assises de Rodez. « Le groupe était déterminé, nombreux, encagoulé et armé. Il y a l’intention d’homicide », a-t-il ajouté, demandant 20 ans de réclusion criminelle pour Morad Laanizi, 26 ans, et 17 ans pour son frère, Taoufik, 32 ans. Les deux hommes sont accusés d’avoir été les meneurs d’« une expédition punitive » visant « les Antillais » et pour laquelle comparaissent depuis fin septembre 18 accusés. Le soir du 8 mai 2010, une vingtaine de jeunes forcent la porte de l’appartement de Jean-Ronald d’Haïty, 20 ans. Ils sont armés de couteaux, de battes de base-ball et même d’un sabre de samouraï. Jean-Ronald tente de fuir par une fenêtre. Il reçoit un coup de couteau dans le dos et un autre en plein cœur. Quelques semaines avant, Morad avait eu la mâchoire fracturée dans une bagarre avec un Antillais habitant à la même adresse que Jean-Ronald. Les amis antillais avec lesquels il passe la soirée sont parvenus à s’échapper. L’un reste caché dans les toilettes. Trois autres sautent du deuxième étage : une femme se fracture alors une jambe et un homme, une fois dans la rue, est coursé, attaqué à coups de couteau, assommé. # ACCESSIBILITE Des handicapés manifestent Toulouse, Auch. Une vingtaine de personnes, selon la police, dont certaines en fauteuil roulant, ont occupé lundi soir une partie de la Cité administrative à Toulouse dans le cadre d’un mouvement national visant à dénoncer le report de la loi sur l’accessibilité universelle. Dans la préfecture du Gers, à Auch, une quinzaine de personnes handicapées et à mobilité réduite occupaient également le centre de impôts. L’INDÉPENDANT MERCREDI 26 NOVEMBRE 2014 37 «La violence conjugale est un délit commis et laissé dans le secret» Le gouvernement a promis hier de faciliter les démarches des femmes victimes de violences conjugales. Il est vrai qu’il reste énormément à faire. Notre dossier. D Me Isabelle Steyer: «99% des violences sont impunis» es agresseurs mieux armés et des femmes qui passent pour des affabulatrices : l’avocate Isabelle Steyer, spécialisée dans la violence conjugale, dresse un constat alarmant, à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes. Les violences conjugales (connues) ont presque doublé en dix ans. Combien de plaintes aboutissent à une condamnation ? Une plainte sur dix parvient à une décision de condamnation. Mais, comme seulement une femme sur dix dépose plainte, cela signifie que seulement une femme sur cent voit son agresseur condamné. Comment expliquer que de nombreuses plaintes soient classées ? Les enquêteurs ne mettent pas la même énergie à recueillir la preuve de ces faits, que celle qu’ils déploient dans d’autres affaires : peu de perquisitions, peu d’actes comme le recueillement d’ADN, peu d’audition de témoins. La violence conjugale est un délit commis dans le secret et laissé dans le secret par les enquêteurs. Cela veut-il dire finalement ◗ Me Steyer est spécialisée dans la violence faite aux femmes. qu’une femme victime n’a guère de chance d’être entendue ? On peut dire ça. Particulièrement pour ce qui est du viol conjugal et de la violence verbale et psychologique. Une femme qui ne dispose pas de preuves irréfutables a-t-elle intérêt à porter plainte ? C’est pernicieux. Si la victime porte plainte et que sa plainte n’aboutit pas, elle passe pour une affabulatrice et ses plaintes seront récupérées contre elle, par la partie adverse, qui essayera de prouver que la victime ment et n’est pas stable. Finalement, la plainte se retournera contre la victime. Et l’agresseur pourra al- À SAVOIR 3919 : ces chiffres que l’on ne dit jamais assez ler encore plus loin, dans la maltraitance, à jamais. Que faire, alors ? Il faut que la violence sorte du foyer. Sans cela, la victime est démunie. Dans le cas de violence verbale, ou de harcèlement, d’injures, au sein du foyer, on n’a pas de témoins, sauf les enfants. Et le témoignage des enfants n’a pas de valeur. Si le harcèlement psychologique sort du foyer, si la femme est harcelée au travail, est poursuivie dans la rue, ou subit les appels téléphoniques incessants, la plainte aura plus de chances d’aboutir. Et si l’agresseur semble parfait, en société ? Comment faire ? A part le filmer ou l’enregistrer à la maison, je ne vois pas de solution. La plainte risque de se retourner contre la victime. Depuis vingt ans que vous faites ce travail, qu’est-ce qui a évolué ? On va dire que ça a évolué dans le bon sens. Mais, avec un effet pernicieux : on parle plus des violences, ce qui est bien, d’un côté. Mais, de l’autre, les agresseurs sont aussi mieux informés et peuvent donc mieux se préparer. Ils deviennent plus vicieux. Il faudrait que les victimes deviennent encore plus machiavéliques que leur bourreau. S’il y a des chiffres qu’il faut connaître, ce sont ceux du « 3919 », le numéro de téléphone destiné aux femmes victimes de violences conjugales et aussi aux témoins de ces violences. Le témoignage peut, en effet, non seulement sauver des vies en faisant intervenir les forces de l’ordre, mais en plus, il peut aider une plainte à aboutir. Selon l’ONU, qui organise la journée mondiale du 25 novembre, au niveau mondial, 70 % des femmes sont victimes de la violence au cours de leur vie. Dans 30 % des cas, l’agresseur est le conjoint ou l’ex-conjoint. En France, on estime qu’une femme sur cent, victime de violences, verra son agresseur condamné. Dans 99 % des cas, l’agresseur continue donc ses actions. Chaque année dans notre pays, plus de 200 000 femmes portent plainte, pour violences conjugales. Comme il n’y a que 10 % des femmes victimes qui osent déposer plainte, cela signifie que 2 millions de femmes subissent des violences, allant de l’injure à la privation des papiers d’identité, à l’isolement social, au viol conjugal ou aux coups. Plus de 80 % des femmes maltraitées ayant au moins un enfant, les enfants sont des victimes collatérales : en 2013, 33 enfants ont été tués par le compagnon de leur mère, dont 13 en même temps que leur mère. R.M. Recueilli par Rosanne Mathot «La justice ne suit pas nos plaintes» Témoignages de victimes rencontrées dans un CHRS de Montpellier. ◗ Les mots et les images claquent dans l’atelier d’expression artisitique du centre. K ., la quarantaine, vient depuis trois ans, régulièrement, au centre Elisabeth Bouissonade, à Montpellier. « Cela fait trois ans que j’ai déposé plainte. J’ai beaucoup de mal à comprendre la justice ». Victime de violences de la part de son compagnon, K. parle sans pathos et sans langue de bois. Une autre femme, victime elle aussi, nous emmène dans les coulisses du dépôt de plainte : « Lorsqu’on porte plainte, personne ne pense aux représailles que la femme va subir, lorsque le conjoint apprend qu’il y a eu dépôt de plainte. Du coup, de nombreuses femmes ont peur. Elles attendent de ne plus être avec leur compagnon, pour aller voir la police. Et là, on leur reproche Un officier de PJ : « On marche sur la tête » Au centre d’hébergement et d’accompagnement de femmes Elisabeth Bouissonade, à Montpellier, visite du maire et du préfet de Région. d’avoir trop attendu et de vouloir se venger de leur ex-ami. Elles passent pour des menteuses ». Si la directrice du centre se veut optimiste et déclare que les femmes « peuvent s’en sortir », K. est plus nuancée : « On ne s’en remet jamais vraiment. Quand on a vécu l’enfer et quand on n’a pas été assez protégée, on ne s’en remet pas complètement ». R.M. Des mots qui claquent «Suce salope ! «,«Tu n’es qu’un boulet, je vais te supprimer », « Sans moi, tu ne vaux rien, tu n’es qu’une merde ». Les mots et les images claquent, pire que des gifles, dans l’atelier d’expression artistique du centre montpelliérain d’accompagnement des femmes victimes de violences conjugales, le CHRS Elisabeth Bouissonnade. Pour la psychologue du foyer, l’art permet à ces femmes de mettre des mots sur leurs maux et surtout de modifier le rapport qu’elles ont avec leur corps et leur âme malmenés. Il s’agirait de se reconstruire et non de gratter une plaie qui est en train de cicatriser. « Comme si le schéma était unique, la violence conjugale est la même histoire, racontée des milliers de fois, par des femmes différentes » : au commissariat central de Montpellier, une officier de police, formée dans l’écoute de femmes se disant victimes de violences, semble fatiguée et désabusée. Ne souhaitant pas que son nom soit mentionné, elle explique la spirale systématique de la violence : « Au départ, tout va bien. Puis, peu à peu, le compagnon prive sa femme de ses papiers, des clés de la voiture, de son téléphone, il la fait vivre dans un isolement social. Elle perd ses repères. Et puis commencent les humiliations, et les accusations de l’homme « Tu me pousses à bout. C’est à cause de toi ! ». La femme ne sait plus où elle en est. Il lui faut beaucoup de courage pour sortir de ce schéma ». Contrairement aux idées reçues, aucun niveau social n’est épargné. La triple peine Pour cet officier de police montpelliérain, les femmes victimes de violence doivent souvent endosser une triple peine : « Une femme qui vient exposer son intimité, dans les détails les plus crus, à la police, est très très rarement une menteuse ! Mais, faute de preuves, la plainte n’est pas toujours suivie d’effet. La femme porte alors la douleur de ce qu’elle a subi et, en plus, la culpabilité d’avoir dénoncé l’homme qu’elle aime souvent encore et qui est souvent le père de ses enfants. Par ailleurs, elle s’expose publiquement en tant que victime et elle n’est pas entendue par la justice ! On marche vraiment sur la tête ». R.M.