alicaments quand la minceur épouse le cholestérol
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alicaments quand la minceur épouse le cholestérol
DOSSIERalica 48 29/03/06 11:38 Page 32 Dossier ALICAMENTS QUAND LA MINCEUR ÉPOUSE LE CHOLESTÉROL L’explosion des produits minceur a fait réfléchir : l’émergence des « alicaments » antihyperchoslétérolémiants se confirme. Commentaires courroucés du ministère de la Santé et de l’Afssaps qui dénoncent une « instrumentalisation de la santé ». Une certitude : l’allégation thérapeutique entretient une confusion diagnostique dont les assurances complémentaires tirent aujourd’hui profit pour contractualiser directement avec les consommateurs « patients ». Après la MAAF, les AGF envisagent à leur tour un partenariat avec un géant de l’agro-alimentaire. Tour d’horizon des produits, des chiffres et de l’évolution des ventes. —————— P H A R M A C E U T I Q U E S _ AV R I L 2 0 0 6 algré des chiffres moins élevés que chez ses proches voisins, la France enregistre une progression spectaculaire des ventes de compléments alimentaires chaque année. Une progression qui pourrait exploser avec le décret devant paraître ces jours-ci pour réglementer ces produits (voir encadré). En 2005, les compléments alimentaires représentent 552 millions d’euros de chiffre d’affaires pour 38 millions d’unités vendues en pharmacie et parapharmacie (+11 % en valeur, +10 % en volume par rapport à 2004). Un secteur profitable pour les officines qui concentrent 87 % des ventes1 (progression de 9,9 %), et récupèrent ainsi les marges perdues sur le développement des génériques, non compensées par le faible apport de l’automédication, et le déremboursement de médicaments. De plus, François Thévenin, directeur d’IMS Consumer Health, remarque l’implication croissante des laboratoires pharmaceutiques dans la production de compléments alimentaires. « C’est le cas de Merck. Ses forces de vente vont naturellement vers les officines pour les démarcher sur leurs médicaments et en profitent pour présenter leurs compléments alimentaires. » Il reconnait cependant que « la croissance s’est un peu ralentie cette année, en particulier sur le segment de la ménopause qui chute de 16 %, soit 10 millions d’euros de perte ». La minceur et les toniques continuent à bien se porter et de très fortes hausses sont à noter pour les compléments « dont l’importance est moindre en volume comme l’ophtalmologie (+33 %), les reminéralisants osseux (+69 %), les défenses immunitaires (+38 %) ». Pour François Thévenin, il s’agit d’un « changement de la consommation, introduite par la recherche du bien-être et qui se développe maintenant sur des segments orientés santé ». Jacques Karlsson, secrétaire général de Synadiet (Syndicat national des fabricants de produits diététiques, naturels et compléments alimentaires) complète en indiquant le chiffre d’affaires total : « au moins 850 millions d’euros, dont 55 % sont imputables aux officines, le reste se répartissant entre les grandes et moyennes surfaces, ventes par correspondance, ventes directes et surtout ventes via Internet ». Il insiste sur le fait que le marché français est en retard par rapport aux autres états européens : « on a beaucoup pro- M DOSSIERalica 29/03/06 11:38 Page 33 49 Le partenariat MAAF/Unilever autour de la gamme Fruit d’Or pro-activ, censée aider à lutter contre le cholestérol, est vivement critiquée par les associations de consommateurs. gressé mais on devrait déjà dépasser les 2 milliards d’euros santé dont la population des pays développés comme la de ventes. Cela s’explique par notre retard réglementaire déFrance n’a guère besoin. Et si carences il reste, elles peufavorable aux fabricants français sur le marché national et vent être comblées par une alimentation équilibrée et vaeuropéen et par le manque de références scientifiques fariée, incluant notamment fruits et légumes. vorables ». Une certitude : l’explosion des compléments D’où le Programme National Nutrition-Santé (PNNS) lancé minceur qui représentent un tiers du chiffre d’affaires des en 2001 par le gouvernement pour inciter les Français à faire compléments alimentaires, loin devant les toniques (16 %) attention à leur alimentation. Parmi ses objectifs, la et les compléments indiqués pour la ménopause (10 %). consommation accrue de fruits et légumes est en bonne Le marché de la minceur n’est d’ailleurs pas la chasse garplace, tout comme le sport, la réduction du cholestérol, la dée des compléments alimentaires. Les lutte conte l’obésité. Là où le bât blesse, groupes agro-industriels ont bien compris Des aide-minceur c’est que le PNNS disposait d’à peine 6 milque la santé faisait vendre. lions d’euros en 2003, tous supports trop souvent confondus, pour promouvoir les fruits et lésurvendeurs Des carences inexistantes. Margarines, gumes, face à des industriels qui ont déyaourts, laits, céréales, œufs, thés… sont prépensé 1,3 milliards pour la seule publicité sentés comme un « plus » pour lutter contre le cholestérol, télévisée 2. Aujourd’hui, les rayons recèlent d’aliments santé présentés comme indispensables à la croissance, au bienl’ostéoporose, les agressions bactériennes journalières… être, au transit intestinal… Sans oublier les aide-minceur et entrent facilement dans l’alimentation quotidienne. Plus trop souvent survendeurs. Passons aux têtes de gondoles acchers que leurs cousins sans allégation santé, ceux qu’on aptuelles : le fameux yaourt Danacol de Danone et toute la pelle désormais les « alicaments » font fureur dans le pagamme de Fruit d’Or pro-activ développée par Unilever, nunier du consommateur. Au grand dam des associations de méro un mondial de l’industrie agroalimentaire. Des proconsommateurs qui s’inquiètent de ces habitudes proches duits qui font d’autant plus parler d’eux qu’ils développent de l’acte thérapeutique. Les professionnels de santé affirun nouveau marketing, via des partenariats avec des com- ment d’ailleurs que ces produits affichent une allégation AV R I L 2 0 0 6 _ P H A R M A C E U T I Q U E S DOSSIERalica 29/03/06 11:38 Page 35 51 ALICAMENTS d o s s i e r 35 plémentaires santé. Quoi de mieux pour appuyer une allégation santé ? Un marketing annoncé en grande pompe en novembre dernier autour des produits proactiv, enrichis en stérols végétaux. C’est ce que MAAF Assurances et Fruit d’Or pro-activ nomment « un partenariat précurseur dans la lutte contre l’hypercholestérolémie » à travers le lancement de l’opération « Pur Bonus Santé ». Ainsi, sur présentation des preuves d’achats, la MAAF rembourse jusqu’à 40 euros ses adhérents consommant la gamme Fruit d’Or pro-activ. La levée de boucliers ne s’est pas fait attendre. Le ministre de la Santé et des Solidarités, Xavier Bertrand, rappelle que « la santé ne doit pas être instrumentalisée ». Et les associations de consommateurs tirent à boulet rouge. L’UFC-Que Choisir s’élève contre ce « pas supplémentaire dans l’instrumentalisation scandaleuse de la santé à des fins purement marketing ». L’association souligne le danger de « faire passer pro-activ pour un médicament miracle » et demande « le retrait pur et simple de ce projet et de toute exploitation publicitaire qui pourrait en être faite ». Olivier Andrault, chargé de mission agriculture et alimentation souligne que la MAAF et Unilever « ont le beurre et l’argent du beurre : ils mettent en avant un produit qui se fait passer pour un médicament sans avoir à subir toutes les vérifications pour son autorisation de mise sur le marché et ils bénéficient de surcroît de la publicité, interdite pour les médicaments ». L’association CLCV (Consommation, logement, cadre de vie) est tout aussi catégorique : « les allégations santé autour de ces produits sont de nature à induire des comportements alimentaires préjudiciables aux consommateurs ». Un argument fort que vient de reprendre l’UFC-Que Choisir pour assigner la MAAF en justice. Sa décision, annoncée le 24 mars dernier, s’appuie sur trois « omissions » dans lesdites Un décret pour faire la différence entre maigrir et mincir « Alors que la France avait la plus forte absence de réglementation en terme de compléments alimentaires, elle devient l’un des pays les mieux dotés », se réjouit Jacques Karlsson, secrétaire général de Synadiet (Syndicat national des fabricants de produits diététiques, naturels et compléments alimentaires). Le décret signé le 9 mars par les ministres de l’Industrie, la Santé, l’Agriculture et les Finances, transpose la directive européenne 2002/46/CE et en profite pour instaurer une véritable réglementation. Premier apport : une définition statutaire indiquant que les compléments alimentaires sont « des denrées alimentaires dont le but est de compléter le régime alimentaire normal et qui constituent une source concentrée de nutriments ou d’autres substances ayant un effet nutritionnel ou physiologique ». Il précise aussi les ingrédients autorisés en France dans les compléments alimentaires et encadre leurs conditions d’emploi : ingrédients alimentaires traditionnels, vitamines et minéraux, autres substances à but nutritionnel ou physiologique, plantes et préparations de plantes, excepté tout ingrédient ayant des propriétés exclusivement pharmaceutiques ou thérapeutiques. S’ajouteront à ce décret des arrêtés substances et plantes, un système de listes positives qui s’allongeront au fur et à mesure des autorisations. Outre des recommandations pour mieux communiquer, ce décret prévoit les procédures d’autorisation pour les compléments alimentaires contenant un ingrédient non autorisé en France ou en Europe. Il instaure ainsi une « reconnaissance mutuelle » lorsqu’un fabricant veut utiliser une substance autorisée dans un état membre autre que la France, avec le dépôt d’une déclaration d’intention 2 mois avant commercialisation auprès de la DGCCRF. Pour les substances non autorisées en Europe, une demande d’autorisation nationale est nécessaire. « Le libre échange est enfin appliqué en matière de compléments alimentaires mais ces derniers sont soumis à l’évaluation pour obtenir une autorisation d’emploi. Une précaution supplémentaire particulière à la France. Les Français seront plus compétitifs et pourront commercialiser bien plus de compléments alimentaires », note Brigitte Lelièvre. Concernant les allégations santé, « un texte européen devrait voir le jour au 2e semestre 2006 », indique Jacques Karlsson. Un dispositif attendu – même si les autorités sanitaires (Afssa, Afssaps, DGCCRF) encadrent déjà rigoureusement la communication des produits bénéfiques pour la santé – en particulier par les associations de consommateurs qui se méfient des produits enrichis et autres probiotiques qu’elles réunissent sous le vocable d’alicament. Leur obstination est déjà payante à l’image de CLCV qui a obtenu de Danone le retrait d’un spot télévisé sur Actimel, qui vantait trop ses « capacités défensives ». Pour le Bureau de vérification de la publicité, tout est dans l’art de marcher sur le fil. Un produit ne peut se vanter de « renforcer les défenses naturelles » mais il peut « aider les défenses naturelles ». De même, le mot maigrir est banni de la publicité car relevant du médicament, mais pas le terme mincir… AV R I L 2 0 0 6 _ P H A R M A C E U T I Q U E S DOSSIERalica 29/03/06 11:38 Page 37 ALICAMENTS d o s s i e r 53 publicités : « la nécessité de consulter un médecin avant de consommer ces produits, les autres facteurs intervenant dans le taux de cholestérol, le suivi médical obligatoire lors d’une consommation prolongée ». Enfin, le Ciss (Collectif inter-associatif sur la santé) déplore ce partenariat qui dénature la mission des mutuelles complémentaires de santé car elles « choisissent le marketing agroalimentaire au détriment de la politique de santé et apportent un label médicament à des produits qui n’en sont pas ». Hausse du CA des compléments minceur 310 305 300 295 308 290 + 8% 285 Stratégie payante. Cela n’empêche pas la MAAF et Unilever de revendiquer un partenariat allant dans le sens de la prévention. Connue pour ses coups marketing choc, la MAAF a rapidement accepté la proposition d’Unilever, qui a déjà testé un partenariat de même type avec la complémentaire santé VGZ aux Pays-Bas. Une réussite marketing (+25 % de ventes) qu’il importe aujourd’hui en France. Après la gratuité de la couverture santé aux sociétaires au chômage depuis plus d’un an en 1997, la garantie des accidents thérapeutiques en 1999 et le remboursement du renouvellement de lunettes de vue sans ordonnance en 2004, le groupe MAAF signe une stratégie payante. « Nous sommes dans une période de croissance sur toutes nos offres. Dans le secteur santé, notre acPro-activ sous le croissement est deux à trois feu des critiques fois plus important qu’ailleurs. Il est trop tôt pour mesurer les retombées de ce partenariat, mais il devrait augmenter notre vitesse de développement », indique Didier Bourdonnais, directeur du marketing et de la communication de MAAF Assurances et maître d’œuvre du partenariat. « Un projet de loi souhaite que les assurances santé s’engagent dans deux opérations de prévention. Cette loi a pris du retard et nous ne voulions plus attendre. Ce partenariat est un engagement dans la lutte contre le mauvais cholestérol (LDL), pour faire baisser le nombre d’accidents cardio-vasculaires. » Mais alors pourquoi ne pas proposer le remboursement des consultations auprès de nutritionnistes ou diététiciens ? « Notre contrat Biorythme comprend huit niveaux, les niveaux 3 à 8 prennent en charge les consultations diététiques », dément Didier Bourdonnais. Quant à la gamme pro-activ, elle est toujours sous le feu des critiques. Ce que résume bien Mariette Gerber, membre du comité d’experts spécialisés en nutrition humaine de l’Afssa : « en sus du risque de consommation par des personnes qui n’ont pas besoin de stérols et le risque d’une surconsommation (3 grammes par jour de stérols maximum), la nécessité d’une alimentation équilibrée pour toute personne dyslipidémique n’est pas suffisamment mise en avant. Les consommateurs vont penser que si c’est bon pour le cholestérol, c’est bon pour tout. Or, ce type de produit ne convient pas par exemple à des personnes obèses, car trop calorique. De plus, on ne connaît pas les effets des phytostérols sur le long terme. Ils font bien baisser le taux de cholestérol dans le cadre d’un régime approprié, mais rien ne prouve que cela à un effet sur la morbidité et les risques cardio-vasculaires ». D’où la réticence à voir cette gamme dans les rayons des grandes surfaces et en vente libre. D’autant que les stérols sont contre-indiqués dans l’alimentation des femmes enceintes, allaitantes et les enfants de moins de cinq ans. Mais Unilever a pris soin de l’indiquer sur chaque 286 280 275 CMA 11/2004 CMA 11/2005 Pharmacie et parapharmacie réunies, les compléments alimentaires minceur voient leur chiffre d’affaires progresser de 8 %, passant de 286 millions d’euros en 2004 à 308 millions d’euros en 2005. Les officines progressent pour leur part de 6 % et occupent 84 % du marché. La minceur, un tiers des compléments alimentaires DIVERS TOTAL REMINÉRALISANTS 2% AUTRES OSSEUX 4% 7% OPHTALMOLOGIE 4% MINCEUR 32% SÉDATIFS 6% CHEVEUX PHANÈRES 6% SOLAIRES 6% TONIQUES 16% PEAU 7% MÉNOPAUSE 10% Le marché de la minceur reste loin devant les autres familles de compléments alimentaires, occupant 32 % du marché. Les toniques sont toujours en bonne place avec 16 % des ventes. A noter cependant une perte de vitesse importante du secteur de la ménopause avec une chute de 16 %, compensée globalement par les augmentations surprenantes enregistrées chez des familles plus restreintes en volume comme les reminélarisants osseux ou l’ophtalmologie. emballage produit et la MAAF fait confiance à ses adhérents pour utiliser cette gamme à bon escient. En outre, l’incorporation de ces stérols dans un aliment n’assure pas qu’ils soient consommés en bonne quantité. Cela a amené Unilever à élargir sa palette et notamment à mettre au point la boisson lactée « un par jour ». Aide à la consommation. Les associations de consommateurs relèvent aussi que ces produits sont 20 à 30 % plus chers que les non enrichis et s’étonnent de la discrimination latente de ce tarif. C’est là que la MAAF intervient : « il est plus difficile de bien se nourrir avec peu d’argent car les fruits, les légumes, le poisson sont chers. C’est aussi le cas des produits enrichis en stérols. Après calcul, nous avons estimé que la dépense supplémentaire à l’année est de 40 euros si on consomme pro-activ plutôt qu’un produit non- AV R I L 2 0 0 6 _ P H A R M A C E U T I Q U E S DOSSIERalica 29/03/06 11:38 Page 39 ALICAMENTS d o s s i e r 55 enrichi. C’est la somme que nous remboursons. Ce n’est pas seulement une prime pour récompenser le bon consommateur mais aussi une aide à la consommation et à une bonne gestion du portefeuille ». Unilever souhaite-t-il redorer son blason ? Ou simplement se diversifier ? Ou développer un créneau porteur ? Toujours est-il que la MAAF précise : « notre partenariat ne concerne que la gamme Fruit d’Or pro-activ ». Un partenariat qui a fait couler beaucoup d’encre, amenant même l’Afssaps à réagir. « La communication de la gamme Fruit d’Or pro-activ a repris des recommandations de l’Afssaps à destination des professionnels de santé, mais de façon partielle. Notre directeur général a réagi le 6 février dernier pour replacer ces recom- Les boissons « miracle » sous haute surveillance Security Feel Better, l’élixir miracle, ne fait pas recette auprès des autorités françaises. Son arrivée dans les grandes surfaces et l’engouement de la presse sur le sujet, a entraîné une levée de boucliers en février de la part des associations de consommateurs, de médecins alcoologues et des structures de prévention routière. Security Feel Better est présenté comme une boisson faisant « baisser le taux d’alcoolémie trois à six fois plus vite ». La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a diligenté une enquête fin février (toujours en cours) et un arrêté du 24 février 2006 a suspendu sa mise sur le marché pour une durée d’un an, parce que « présentée au consommateur comme susceptible de diminuer son degré d’imprégnation alcoolique ». De telles allégations « peuvent induire des comportements dangereux et des risques pour la santé : incertitude du taux réel d’alcool, sentiment de fausse sécurité, incitation à la consommation d’alcool avant la conduite qui va à l’encontre de la politique de prévention de la sécurité routière ». En 1999, le Conseil supérieur d’hygiène publique s’était prononcé pour une interdiction du produit et avait souligné l’insuffisance d’études cliniques et les risques pour le consommateur. La DGCCRF avait intenté un procès au fabricant de la boisson, PPN SA, qui avait abouti à un non-lieu autorisant la vente du produit mais pas sa publicité. « Les interdictions spécifiques à la publicité concernent les médicaments, les armes à feu. La liste n’est pas exhaustive, la décision d’un tribunal peut faire jurisprudence », explique Joseph Besnaïnou, directeur général du Bureau de vérification de la publicité (BVP). « Nous avons déjà demandé le retrait de boissons comme Moderalco ou Desalco, pouvant entraîner des comportements dangereux, d’autant que l’Afssa indique que cette allégation n’est absolument pas prouvée », précise la DGCCRF. Et Claudine Lemer, membre du Ciss, de préciser : « la baisse du degré d’imprégnation alcoolique n’induit pas la suppression des effets de l’alcool ingurgité ». La boisson française va devoir miser sur l’exportation. Le souci se situe maintenant dans le principe de libre circulation des marchandises, en particulier en Europe mais aussi via d’Internet. Car depuis quelques mois, un complément alimentaire en vente aux Pays-Bays, Paraxine®, vante ses vertus anti-alcool. Il devra cependant attendre le décret français sur les compléments alimentaires pour demander la reconnaissance mutuelle… que la France sera en droit de refuser. mandations dans leur contexte », explique Marie-Laurence Gourlay, directrice du département de l’évaluation de la publicité. « Un encart promotionnel publié dans la presse grand public s’appuie sur les recommandations de l’Afssaps pour promouvoir les bienfaits de produits alimentaires réduisant le taux de cholestérol. L’usage détourné et partiel de ces recommandations conduit l’Afssaps à préciser que la prise en charge de la réduction du taux de cholestérol nécessite un avis médical et qu’elle s’appuie en premier lieu sur un régime alimentaire adapté et sur une bonne hygiène de vie », a indiqué l’Agence. Crises sanitaires. Le partenariat n’a pas encore fini de faire parler de lui, d’autant qu’il devrait être suivi en avril par un accord presque identique entre Danone et les assurances AGF autour du yaourt Danacol. En attendant, beaucoup notent une incohérence entre les déremboursements massifs de médicaments engagés par l’Etat et le fait qu’une complémentaire santé rembourse un aliment. Plus encore, la MAAF rembourse une marque. « Cela revient « L’alimentation moins cher à la MAAF de rembourser 40 euros à l’anen perfusion » née que des traitements en hausse lourds en cas de maladies ou d’accidents cardio-vasculaires. Mais pour faire de la prévention, il faut rembourser tous les aliments de même type et non une marque précise. Du coup, on fait croire aux adhérents de la MAAF que seul ce produit fonctionne, c’est de la publicité mal déguisée », souligne Claudine Lemer, membre de l’Union féminine civique et sociale (UFCS), association faisant partie du Ciss. C’est ce que l’UFC-Que choisir appelle « une intrusion inadmissible d’intérêts marketing dans la sphère privée » et « une discrimination flagrante pour les personnes qui ne consommeront pas pro-activ ». Toutes ces critiques ne vont pas ralentir la course des industries alimentaires sur le marché de la minceur. Vient ainsi de débarquer aux Etats-Unis la barre chocolatée censée réduire les problèmes cardio-vasculaires… dont les effets ne sont pas prouvés, et qui ne risque pas de contribuer à une baisse de la tendance au « grignotage » ou à ce que les médecins appellent « l’alimentation en perfusion ». Le marketing santé est aujourd’hui très efficace. Il n’échappe à aucun secteur alimentaire et profite d’une succession de crises sanitaires et de la prévalence croissante des maladies liées aux déséquilibres alimentaires pour se faire sa place au soleil. Mais les instances de régulation veillent, aussi bien au niveau européen que français, et permettent d’assurer une certaine sécurité dans les allégations des produits santé tout en empêchant la commercialisation d’aliments dangereux. Déjà des progrès sont notables et les slogans sans fondement tels que « plein de bon lait » ont simplement été supprimés. Désormais, les produits déséquilibrés, par exemple très gras, ne peuvent se prévaloir d’une allégation santé, même s’il est avéré qu’ils sont riches en calcium… ■ MÉLANIE MAZIÈRE (1) Données IMS novembre 2005 – voir graphiques (2) Source : UFC-Que Choisir. Enquête marketing alimentaire : le double jeu des industriels – 27 avril 2004