ERZULIE Forgive me, I failed

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ERZULIE Forgive me, I failed
CM LE GUELLAFF
ERZULIE Forgive me, I
failed
Publié sur Scribay le 22/02/2016
ERZULIE Forgive me, I failed
À propos de l'auteur
Passionnée depuis l'enfance par la lecture, le théâtre et l'écriture, je m'en étais
éloignée par trop de travail et de responsabilités. Heureusement les hasards
capricieux de la vie ont répondu à mes envies. Je reviens à mes passions. Je cultive
en toute liberté tout ce que j'ai pu engranger de rencontres, d'histoires, de
sentiments, de sensations, d'émotions, de jeux, d'enjeux, de positions et de postures,
d'impuissances, de pouvoirs et de contre-pouvoirs, des hontes et des fiertés
glorieuses...tout ce qui fait l'humain et l'inhumain entre les rêves et les réalités
détournées, entre les objections et les injonctions, entre les paris et les certitudes
inavouées.
Avouez qu'il y a matières à développer et que nous ne serons jamais assez pour les
épuiser: vivent la lecture et l'écriture!
À propos du texte
"Ce texte s’inspire d’un « fait divers » réel datant de plusieurs années. Une jeune
femme fut retrouvée à plus de mille kilomètres de son domicile sans aucun papier et
avec 50 € en poche. Elle revendiqua haut et fort une identité dont les autorités
administratives ne trouvèrent aucune trace. Déclarée officiellement amnésique,
l’hôpital psychiatrique dans lequel elle fut transférée lança un appel à témoin.
Reconnue par des proches, il s’avéra que sa véritable identité était toute autre,
preuves à l’appui. Elle la contesta apportant de nombreux détails sur celle qu’elle
prétendait être. Les éléments apportés par ce récit ne constituent qu’un éclairage
imaginaire. Il serait à considérer comme fortuit s’il révélait ou approchait une
quelconque réalité…"
Licence
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ERZULIE Forgive me, I failed
Chapitre VII.1 : Mémoire du temps pour une
libération conditionnelle
La surveillante hésite, porte la main sur la poignée, semble entendre une respiration
légère. Elle se reprend, se détourne et poursuit son chemin. Elle n’a pas respecté le
protocole, elle est seule et personne n’en saura rien. Elle prie le ciel pour qu’il en
soit ainsi.
" J’ai tellement prié pour que l’Autre n’ouvre plus cette porte. La dernière étape
semble proche mais le processus n’est pas terminé. Je suis à moitié libérée ; je le
sens. Ma main droite et mes doigts me piquent et me brûlent.
J’attends…
Ma vue se trouble ; j’ai froid et chaud en même temps… Mon cœur s’emballe puis se
calme, en écho.
Au creux des reins, une poussée violente m’étreint, me casse et me brise. Je suis
morcelée… Impossible de bouger mes bras et mes jambes. Je suis tétanisée.
J’attends…
Je ne sais encore si je dois compter le temps qui s’écoule. Je me tiens prête, debout
face à l’issue.
J’attends…
Je sens enfin la chaleur d’un rayon de lumière sur mes épaules engourdies et
douloureuses. Je devine le seuil s’éclaircir sous le reflet. Les murs reprennent leur
forme et les angles se redessinent.
J’entends à nouveau les bruits du jour qui s’annoncent : brancards, casiers, sabots
rythment et martèlent de coups le couloir et son sol. A chaque son et mouvement, je
reprends possession de mon corps…
Je fais un pas en arrière. Je résiste à la contrainte du vertige qui m’éparpille encore.
Ma main droite se lève et rejoint mes yeux. Je sens à ma joue un brin de laine
effilochée. Je ne peux encore voir mais, je sais.
Je retrouve ma poupée à mes côtés. Je la lui avais confiée ou elle me l’avait volée, je
ne sais plus.
Mon double est partie, cette autre que j’ai croisée et côtoyée si peu de temps, n’est
plus. Je le sais.
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ERZULIE Forgive me, I failed
Aujourd’hui sera le jour de sa mémoire et de ma liberté.
J’attends…
Des larmes à nouveau percent mes iris et s’échappent sur mes joues. Je me souviens
avoir croisé sur ma peau cette longue balafre ; l’eau de mon cœur lave sa cicatrice.
Je commence à retracer notre première rencontre, non pas celle de cette nuit si
sauvage où je fus investie, envahie à perdre mon identité, mais celle ou j’ai rencontré
ma jumelle.
Et Je pleure enfin. Mes larmes portent le goût de nos amertumes et nos rancœurs.
Ma jumelle ! En ai-je déjà parlé ? Il me semble que oui et je ne me rappelle pas à
qui…"
A cet instant, une onde glacée l'enveloppe ; ce sera la dernière. D’un souffle à peine
perceptible, s’échappe une ultime menace : " Tu n’aurais pas dû ; tu as brisé le
secret, le "hunxo". Tu as osé provoquer la peur et cru pouvoir soustraire la
connaissance aux jeux des pouvoirs. Tu… "
Une vitre se brise, les débris de verre explosent sur le sol et, en cascade, enchaînent
les fragmentations.
Le visage couvert de larmes rouges, Dominique C. ébauche un sourire et s’assied sur
le bord du lit.
Elle cherche sa montre et constate son absence. Elle veut connaître l’heure ; cela
devient son urgence.
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