Guy Alloucherie et les Veillées Un théâtre du vivre
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Guy Alloucherie et les Veillées Un théâtre du vivre
Jean-baptiste Roybon Guy Alloucherie et les Veillées Un théâtre du vivre ensemble. Exigence partielle à la certification finale Manufacture – Haute école de théâtre de Suisse romande Mai 2012 Remerciements 2 Bonjour, Je tiens à vous faire un petit résumé de l’état de mon mémoire. Mon introduction et conclusion ne sont pas encore faites. Ma première partie est là même que vous avez déjà lu. Je ne l’ai pas encore retravaillée. Il s’agit de mêler un historique sur le théâtre politique des année 90 aux parcours de Guy Alloucherie en n’y insérant la description du lieu ou il travail et ces paroles qui se trouvent à la fin de la partie. La deuxième partie est complète, peut être un peut trop. La troisième partie est incomplète. Cependant j’ai fait des résumés des deux dernières sous partie que je n’ai pas fini d’écrire. Voilà c’est un premier jet, avec toutes les difficultés pour écrire que se m’a demandé, cependant j’ai de plus en plus de plaisir à avancer sur ce mémoire. Je vous souhaite une très bonne lecture. Cordialement Jean-baptiste. 3 Sommaire Introduction ..........................................................................................5 1. PRESENTATION DE LA COMPAGNIE HVDZ, DE SONT FONDATEUR ET METTEUR EN SCENE GUY ALLOUCHERIE ET DE LEUR LIEU DE RESIDENCE, LA BASE 11/19............................................................................................................................ 6 1.1. REJOINDRE LE CŒUR DE LA BASE 11/19............................................................... 6 1.2. PRESENTATION DU PARCOURS DE GUY ALLOUCHERIE ET DE LA COMPAGNIE HVDZ. 2. .............................................................................................................................. 7 LES VEILLEES....................................................................................................... 11 2.1. QU'EST CE QU'UNE VEILLEE ? ............................................................................ 11 2.2. LA VEILLEE DE DUNKERQUE .............................................................................. 13 2.2.1. Les Interviews ............................................................................................. 14 2.2.2. Lecture sur scène ........................................................................................ 19 2.2.3. Travail avec les scolaires ........................................................................... 23 2.2.4. Portait des gens du quartier ....................................................................... 24 2.2.5. Images d'étudiants ...................................................................................... 25 2.2.6. Image du quartier ....................................................................................... 26 2.2.7. Vidéos des danses et acrobaties dans la ville ............................................. 26 2.2.8. Danses et acrobaties sur le plateau. ........................................................... 27 2.3. 3. LES FONDEMENT DE LA VEILLEE ........................................................................ 28 UN THEATRE DU VIVRE ENSEMBLE, MAIS A QUEL PRIX ? .................. 29 3.1. UN THEATRE DU VIVRE ENSEMBLE. ................................................................... 29 3.2. LA VEILLEE, UNE FORME DE DEMOCRATISATION CULTURELLE ? ..................... 31 3.3. LA VEILLEE, UNE MEDIATION CULTURELLE. UNE DERIVE ? ............................. 31 Conclusion .............................................................................................? 4 Introduction Il y a dans la réalité historique même, la réalité précise, la réalité datée, une poésie si effarante que toute invention strictement personnelle paraît malingre en comparaison. Arthur Adamov. Avant de rentrer à la Manufacture et de décider de devenir comédien, j’ai exercé pendant sept ans le métier d’éducateur spécialisé. Je travaillais en prévention spécialisée, ce que l’on appelait jadis éducateur de rue. Finalement je n’ai fait que changer de scène. Mon travail consistait à aller à la rencontre des gens dans le cartier où j’étais missionné, écouter leurs histoires et créer du mouvement là où leur vie semblait se carencer. Bien évidement c’est un résumé très grossier de ce travail, mais l’essentiel pour mon sujet se trouve dans cette phrase. Cette posture d’écoute que je devais tenir m’a souvent semblé fragile et dérisoire face à la densité des récits de vie. J’asseyais d’imaginer que j’assistais à une représentation pour avoir la bonne distance pour tout entendre. Seulement il me manquait le public avec lequel on aurait pu débattre et ainsi inscrire les paroles de ces gens comme des histoires tout autant singulières qu’universelles et donc nécessaires à la collectivité. (Je ferais mon introduction plus tard, je préfère avancer sur les parties du corps du texte. Néanmoins je vous envois ce début qui vous permet de comprendre l’origine du sujet). 5 1. Présentation de la compagnie HVDZ, de sont fondateur et metteur en scène Guy Alloucherie et de leur lieu de résidence, la Base 11/19 Je vais en premier temps vous parler du lieu où réside la compagnie. Cet endroit à un sens symbolique très fort et donne forcément à la compagnie une couleur, un caractère une direction à leur travail. Pour Guy, sont arrivée sur cet ancien carreau de mine, étant lui-même fils de mineur, va signer un changement radical dans son parcours. 1.1. Rejoindre le cœur de la base 11/19 Il est 12h05, le train me dépose à la gare de Lens. Olivier qui est administrateur de la compagnie est venu me chercher en voiture. La Fabrique Théâtrale de Loos-enGohelle de son vrai nom Base 11/19 (ancien puits de mine de charbon) se trouve dans la périphérie de Lens. Au cours du voyage le paysage architectural se transforme, les immeubles de la ville laissent place à de grandes rues toutes droites encadrées de part et d’autre d'habitations unifamiliales étroites, à un étage, avec un petit jardin. Ce sont les corons, ces habitations ouvrières où vivaient les mineurs. Les premiers corons que nous traversons sont de petites maisons blanches indépendantes avec leur petit jardin et leur portail. Olivier m’explique que c’était le quartier des ingénieurs. Progressivement ces maisons deviennent plus petites, collées les une aux autres, elles appartenaient aux contremaitres. Puis au croisement d’un carrefour le crépi blanc laisse la place à la brique rouge, les haies à de petits murets, les portails à de petites portes en fer : c’est le quartier des mineurs. Rapidement, il n’y a plus rien d’autre autour de nous que l’assemblage successif de ces petites maisons rouges. Où sont les commerces, les boulangeries, les bistrots, les églises ? Des milliers de petites maisons en brique comme une ancienne partie de « Tetris » que l’on n’aurait jamais finie. 6 Nous empruntons une petite route qui progressivement nous surélève des corons pour s’effacer soudainement par l’absence de goudron devant les portes du site minier. Ces portes ce sont « les jumeaux du 11/19 », comme on les surnomme dans la région. Deux terrils de 187 mètres couvrent une surface de 90 hectares, ce sont les plus hauts d’Europe. Ces petites montagnes sont les déchets pierreux (schiste noir) qui ont été écartés lors de l’extraction du charbon. Derrière se trouvent les bâtiments, La base 11/19 dont une partie est devenu la Fabrique Théâtrale. Au dessus des bâtiments s’élève le chevalement (une sorte d’échafaudage en forme de cône) et la tour 19 s’élançant à plus de trente mètres au-dessus du sol qui est en quelque sorte la cage de l’ascenseur qui descendait dans le puits. C’est ici que je rejoins Guy Alloucherie. Il me propose de faire l’interview dans l’une des salles de théâtre, « l’endroit sera plus adéquat que mon bureau » me dit-il. Nous traversons la grande salle appelée « salle des pendus ». Guy m’explique que ce nom fut donné à l’immense hall dans lequel les mineurs suspendaient, en hauteur, leurs vêtements, puis il rajoute : « comme autant de formes humaines dévitalisées flottant dans l’air ». Soudain, je ne vois plus cette salle de spectacle de la même manière, je distingue encore à travers le gril les crochets qui servaient à suspendre leurs habits. La sensation est étrange, je ne sais pas si ça me dérange ou si ça me fascine, sûrement un peu des deux. Finalement, c’est dans une petite salle de répétition, qui servait jadis de réfectoire, que nous nous installons. Guy y dispose une table, deux chaises, un thermos de café et deux petites tasses. Tout est prêt pour commencer. 1.2. Présentation du parcours de Guy Alloucherie et de la compagnie HVDZ. Guy Alloucherie est metteur en scène. Il débute au théâtre dans les années 80. Alors étudiant à Lille, il suit les ateliers théâtre du Prato où il rencontre Eric Lacascade, ensemble, ils créent une compagnie le Ballatum théâtre qu’ils co-dirigeront pendant quinze ans. En 1997, ils accèdent à la direction du Centre Dramatique National de Caen. Quelques mois après, Guy Alloucherie décide de quitter cette aventure et de créer la compagnie Hendrick Van Der Zee (HVDZ). En 1998 ils s’installent en résidence à la Fabrique Théâtrale à Loos-en-Gohelle et collaborent depuis, au titre d’artistes associés, 7 au projet artistique et culturel de Culture Commune – Scène Nationale du Bassin minier du Pas-de-Calais. Ce lieu fut réhabilité et revalorisé comme patrimoine minier en 1998 par Culture Commune. La Fabrique théâtrale est un espace mis à la disposition des artistes qui y écrivent, montent, peaufinent leurs spectacles. La création de cette compagnie et son installation à la base 11/19 marque un tournant important pour Guy Alloucherie. Pendant sont spectacle « Les Sublimes » en 2003, Guy raconte sur scène des parties de son histoire. Il dit au sujet de cette période : « Pour dire la vérité, en ce qui me concerne, je pense qu’en arrivant sur le site du 11/19, j’étais sérieusement largué. Après avoir co-dirigé le Ballatum Théâtre et, le temps d’une étincelle, le Centre Dramatique National de Caen, je ne savais plus du tout à quel saint me vouer, ni pourquoi j’avais pris la décision un jour de faire du théâtre. Si ce n’est pour faire comme et avec mon camarade Eric Lacascade. Je me suis souvent demandé à quoi je pouvais servir, pourquoi je faisais ce métier, pour quelle utilité. J’ai longtemps cru que ce n’était qu’une question existentielle et je me suis rendu compte en arrivant au 11/19 que c’était une question sociale, politique pour ainsi dire. » Depuis la compagnie HVDZ en est à son douzième spectacle, dont le dernier « les Atomics » est en création, et à leurs trentièmes veillées. « Marie » fut le premier spectacle (en 1997) mis en scène par Guy après son départ du Balatum Théâtre. Ce spectacle va être l’acte fondateur de la compagnie rassemblant Martine Cendre (qui travaillait déjà au Balatum Théâtre avec lui comme dramaturge), Marie Lettellier (danseuse chorégraphe) et Jachy Auvray (chorégraphe). Puis il va suivre dans la même année « C’est pour toi que je fais ça » qui fut la première expérience avec les arts du cirque créé avec des élèves du Centre National des Arts du Cirque de Chalons. En 1998 ils vont créer « Quoi l’éternité ? » en mêlant le théâtre et la danse. Avec la compagnie Anomalie en 2000 ils croisent le cirque, le théâtre, la danse, la musique et présentent « Et après on verra bien ». En 2001 Guy met en scène Kader Baraka dans un spectacle appelé «Je m’excuse » à partir du témoignage de vie dans le bassin minier que Kader va lui livrer. C’est le premier spectacle où Guy va utiliser le témoignage. Martine Cendre, me confie lors de mon entretien avec elle : « Après ce travail, les choses n’ont plus jamais été comme avant pour Guy. La parole portée par Kader était extrêmement dure, extrêmement 8 engagé, extrêmement politique. Guy était déjà très engagé, mais tout d’un coup il y a eu une prédominance du matériau humain. C’est devenu assez existentiel pour la compagnie. » En 2002, « Clown littéraire avec élastique » est un travail sur la parole, le témoignage, l’enfance, la mémoire. Puis en 2003 ils vont créer « Les Sublimes ». C’est un spectacle important pour la compagnie qu’ils nomment « spectacle-bilan, un état des lieux ». C’est la première fois qu’ils utilisent des interviews recueillies auprès de mineurs et qu’ils vont projeter sur scène. Guy Alloucherie y raconte son parcours de fils de mineur devenu metteur en scène de théâtre. Son enfance, son départ, puis son retour dans le pays minier, l'installation de sa compagnie à la Fabrique théâtrale. Tout ce qui a induit une mise en question du théâtre qu'il fait. Et les questions sous-jacentes surgissent au fil du spectacle : pourquoi, pour qui, comment faire du théâtre ? Sur le site internet de la compagnie HVDZ, Guy dit à propos de ce spectacle : « Les Sublimes, c'est l'envie et le besoin indispensable de parler du monde d'aujourd'hui. L'envie de faire coïncider engagement militant, action culturelle et recherche artistique. « Les Sublimes » ne raconte pas une histoire mais mille histoires. L'histoire prend corps, existe sous forme de bribes, de pistes à suivre : La parole, l'acrobatie, la danse s'enchaînent en plansséquences. On est dans une forme de théâtre particulier, comme au music-hall. On est dans un lieu où l’on peut prendre la parole. » A la suite de ce travail, Culture Commune va proposer à la compagnie HVDZ et KompleXKapharnaüm, dans le cadre de Lille 2004 - Captiale Européenne de la culture, de créer un spectacle sur le bassin minier à partir des gens qui y vivent. « La tournée des grands Ducs » va naitre à la suite de 9 mois de travail sur le terrain. C’est un spectacle déambulatoire mêlant arts vivants et vidéo retraçant les rencontres accumulées pendant cette période. C’est en écho à ce travail que la compagnie va créer les Veillées. Je reviendrai plus précisément, dans le chapitre suivant, sur l’historique et les fondements des Veillées étant le sujet que j’ai décidé de traiter. En 2007, ils créent « Base11/19 ». Ce fut un « gros » spectacle qui va tourner sur de grandes scènes comme l’Odéon. De même que « Les Sublimes », « Base11/19 » mêle les comédiens, les acrobates et les danseurs, afin d’allier le corps, le geste à la parole. Le corps comme prolongement d’une idée, politiquement, artistiquement, 9 intimement. Guy me dit lors de notre entretien : « Tout est lié au 11/19, c’est dire à quel point ça compte pour nous. D’ailleurs on a appelé ce spectacle-ci « Base11/19 ». A se demander si tout ce qu’on fait à Loos-en-Gohelle ne s’appelle pas comme ça : Base11/19. » En 2010 Guy créer « journal de bord » à l’école de cirque de Montréal avec laquelle il collabore depuis les années 2000. Le directeur de cette école, Howard Richard est aussi le chorégraphe de la compagnie HVDZ. Actuellement ils sont sur la création des « Atomics ». Ils appellent ça la Veillée des Veillées. Guy écrit à propos de ce travail sur leur site internet : Les Atomics, c'est réfléchir à sept ans de Veillées. Sept ans durant lesquels elle a parcouru les villes, ici, ailleurs, jusqu’au Brésil, à la rencontre des quartiers, des gens qui les habitent, à la quête d’une parole qui dit la vie, le monde, l’art, les regards sur l’art. Fabuleuse matière engrangée, richesse inouïe de l’expérience vécue : « qu’est-ce qu’on fait de tout ça ? » se sont interrogés les Veilleurs. La manière que Guy à de parler des Veillées est toujours très touchante et efficace. Afin de bien cerner ce travail il me parait important de lire ce que Guy Alloucherie dit de ces Veillées. « Le but du jeu est d’aller à la rencontre des gens. À un moment donné, je ne savais plus très bien le sens de ce qu’on faisait. On faisait des spectacles sur des scènes de théâtre et j’avais l’impression qu’ils s’adressaient toujours aux mêmes gens, alors qu’il y avait tout un public que je ne voyais jamais au théâtre. Comment ce fait-il que tous ces gens-là ne venaient pas ? J’ai donc pensé qu’il devait y avoir de bonnes raisons, que ce n’est pas uniquement parce qu’ils n’étaient pas informés. Apparemment, ils n’étaient pas sensibles à la forme de théâtre que nous proposions. L’idée de départ était d’aller voir les gens, les uns après les autres, avec comme point de départ de parler de culture. D’aller les rencontrer en se disant que de toute façon tout le monde a une définition de la culture. Et, je ne sais pas plus que les autres ce qu’est la culture. Il serait donc intéressant d’avoir l’avis de tout le monde, puisqu’il n’y a pas de vérité en ce qui concerne l’art et la culture. En plus, comme on est situé sur un ancien site minier, on est entouré de cités ouvrières et les ouvriers n’ont pas vraiment dans leurs pratiques 10 habituelles d’aller au théâtre ou d’aller voir de la danse. On s’est demandé : « Mais que doit-on faire, qu’est-ce qu’on peut faire pour trouver le lien, pour créer une œuvre qui intéresse, pour laquelle les gens se sentent concernés par ce qui se dit et ce qui se fait ? » On est donc allé à la rencontre des gens dans les quartiers, dans un premier temps ici tout autour, dans les quartiers populaires. Après, on est parti un peu partout, en France, au Brésil, et on va sans doute le faire au Canada l’année prochaine. Mais l’idée de départ était celle-là : puisque les gens ne viennent pas, allons vers eux. Personne ne détient de vérité sur le sujet de l’art et de la culture. Peut-être que la meilleure façon de faire, c’est d’inventer avec les gens… En étant au milieu des cités ouvrières, il était impossible de continuer à faire un théâtre qui soit complètement en dehors des réalités du quartier. Cela aurait été du cynisme de ma part. C’est pourquoi, on est allés à la rencontre de tout le monde. Les Veillées sont des spectacles faits pour rencontrer les gens, discuter avec eux et pour parler de la mémoire ouvrière et de la culture ouvrière. Mais, pas que de la mémoire : les gens nous racontent aussi le présent, comment on vit dans le quartier, comment on vit ensemble. Après une résidence de dix jours à trois semaines, on monte un spectacle, avec des acteurs et des acrobates, dont les gens et le quartier sont les acteurs principaux. Le but est de tout mettre au service de l’idée que l’œuvre d’art se construit ensemble. 2. Les Veillées 2.1. Qu'est ce qu'une Veillée ? Comment parler des Veillées qui ont déjà éclos dans trente villes depuis sept ans et qui, cependant, ont toutes leurs singularités à l'image des lieux dans lesquels elles naissent, puis s’éteignent une fois la représentation finie. Comme tout spectacle, il y a le temps de la création qui, pour les Veillées dure entre deux et trois semaines et celui de la représentation qui va de 1h15 à 1h40. La particularité des Veillées c'est que le temps de création qui est structuré autour d'un protocole est la partie pérenne du travail, tandis que les représentations théâtrales sont éphémères et ne se jouent qu'une seule fois. Les Veillées consistent à créer et à écrire à partir de ce que les gens leur racontent et à partir de ce que la compagnie a besoin de dire sur le monde. 11 Martine Cendre, me dit qu’il s’agit d’aller à la rencontre des habitants et en rendre compte à la manière d’artistes qui s’emparent du réel et qui prennent position politiquement et artistiquement. Au préalable ce sont soit des commandes des villes ou d’une scène nationale soit des propositions de la compagnie. Il y a toujours, ou du moins majoritairement un partenariat avec une scène nationale locale ou un théâtre. En effet, le contrat est que la représentation de la Veillée soit donnée dans un théâtre. En amont, la compagnie rencontre les différents protagonistes pour organiser leur résidence qui sont majoritairement les Maisons de Quartiers. Ainsi, le théâtre, la maison de quartier et les écoles préparent les habitants à leur venue. Les Veillées sont conçues en trois temps : donner, recevoir, restituer. Sur une période de deux à trois semaines, des rendez-vous sont proposés à la population sur leur lieu de vie, dans leur quartier, pendant lesquels la compagnie occupe l’espace, sans intrusion, en proposant des actions artistiques impromptues : des chorégraphies, des acrobaties sur une place publique, dans une allée du marché, sur un rond point, sous un arrêt de bus, dans la cour d’une école, d’un collège ou d’un lycée, dans une cage d’escalier… , en favorisant les échanges de paroles. « Nous sommes conscients que le risque est réel! » me dit Marie Lettelier, « Il nous faut trouver notre position, ce décalage, marque de l’art, qui doit susciter la réaction. » Cette notion du risque je la développe dans la partie 3. Les matériaux collectés : films de scènes de rue, interviews d’habitants… servent de substances à la Veillée, qui a lieu au terme de ces deux ou trois semaines. Chaque Veillée est différente. C'est un langage du présent de l'éphémère de l'instantané, il n'y a pas de moment plus important que d'autres. Le spectacle se tisse ainsi au fil de ces découvertes, de ces mises en jeu et se termine par une représentation témoignant de la cité, de l’art, avec, bien sûr, aux côtés des artistes la précieuse participation et création des habitants. « Des gens qui autrement ne se seraient jamais rencontrés. » Me dit Guy, « C’est ça l’histoire, c’est ça le risque ! Sinon à quoi bon ? » C'est le combat ordinaire de ces gens qui soudain prend toute son importance car ils s'expriment ensemble au cœur d'une même œuvre, réunis dans un théâtre. Dès lors 12 comme le dit Piscator «il n'y a plus une scène face au public, mais une salle de réunion commune et gigantesque, un gigantesque champ de bataille, une gigantesque manifestation». Je reviendrai sur cette idée de faire et vivre ensemble l’œuvre théâtrale, dans la partie suivante. Pour éclairer et comprendre cette démarche de travail, il m’a semblé plus intéressant de choisir une seule Veillée qui est celle de Dunkerque et de décortiquer le résultat. J'ai choisi cette Veillée pour sa particularité. Elle est un peu plus longue que les autres, elle a duré trois semaines et s'est intéressée à quatre quartiers de la ville. En général, les Veillées durent deux semaines et s’implantent dans un ou deux quartiers. Cette Veillée a été financée par des subventions d’état, de la région et du conseil général, par la ville de Dunkerque et la scène nationale de la ville le Bateau Feu, qui ont accompagné la compagnie tout le long du processus ainsi que Culture Commune qui soutient une partie des actions de la compagnie. Ils furent en résidence du 3 au 2 octobre 2011, en partenariat avec les Maisons de Quartier du Méridiens, de Rosendaël-centre, de la Tente Verte et de la Maison pour tous de Leffrinckoucke. 2.2. La Veillée de Dunkerque Le spectacle de la Veillée réunit : • Une sélection de vidéo prises pendant la présence de l'équipe sur le terrain selon une liste de protocoles énoncés en annexe. Elles sont projetées sur deux grands écrans disposés côte à côte en fond de scène. • Des lectures de textes aux micros, faites par les acteurs de la compagnie sur trois tabourets à cour, disposés les uns derrière les autres légèrement décalés. A leurs côtés, côté cour se trouve la régie qui est à vue et perpendiculaire au public. L'ensemble des acteurs de la compagnie sont présents à cet endroit (danseurs, comédiens, circassiens, dramaturge, techniciens). • Des danses et des acrobaties sont exécutées sur le reste de la scène, devant les écrans. 13 La Veillée de Dunkerque dure 1h38 et se compose de 42 séquences. Elles durent entre une et trois minutes et se structurent en fonction des différentes combinaisons présentes sur le plateau (lecture, danse ou acrobaties, vidéos). J'ai repéré quatre formes de combinaisons : 1. Deux vidéos différentes ou identiques sur chaque écran qui sont soit muettes avec un fond musical ou dont l'une d'entre elles est sonore (témoignages). 2. Lecture de textes au micro et deux vidéos différentes ou identiques muettes sur un fond musical. 3. Danse ou acrobatie sur le plateau avec la combinaison 1 (citée ci-dessus). 4. Danse ou acrobatie sur le plateau avec la combinaison 2 (citée ci-dessus). Je ne pense pas que la description des séquences soit nécessaire pour ce travail, néanmoins j'ai repéré huit thématiques qui permettent d'avoir une vision globale de la Veillée. 2.2.1. Les Interviews Elles consistent à rencontrer un habitant, un responsable associatif, un animateur, un dirigeant de structures culturelles ou sportives, etc. Les interviews sont menées selon trois axes de questions : rapport au lieu : ville, quartier (ce qu’implique : « habiter ici »), rapport au travail : conditions de travail (syndicalisme, structure de l’emploi localement, usines, chômage…), rapport à la culture : aux pratiques culturelles (quelle fréquentation des structures culturelles… ?). Dans la Veillée de Dunkerque, j'ai repéré deux genres d'interviews. • Interviews des salariés, des bénévoles et des adhérents des Maisons de Quartier. Ces témoignages sont présents dans quatorze séquences et abordent ces institutions selon différents points de vue. Il y a les interviews des salariés et des bénévoles qui occupent des responsabilités au sein des Maison de Quartier. Voici des extraits de leurs paroles : « Je suis présidente de la Maison de Quartier de La Tente Verte. Il fallait faire rouler la culture, ce n'était pas évident. Puis est arrivée l'offre du Bateau Feu avec le théâtre hors les murs, alors là ça été le point de 14 départ et ça a explosé [...]. Il y a tout un lien social qui se fait par l'intermédiaire des Maisons de Quartier. C'est une politique au sens premier du terme, on fait avec les gens. Les Maisons de Quartier ont vraiment fait beaucoup pour l'éducation populaire et la démocratie participative.» « J'ai travaillé toute ma vie dans l’industrie et maintenant je suis vice président de la Maison de quartier, bénévole, depuis le 1er juillet. Faut pas attendre que l'on vienne vous chercher, jamais ! C'est du socialisme mais pas politique. On donne une valeur à nos idées, on ne devient pas bénévole on est bénévole, car on a eu une famille qui nous l'a appris. Tout le monde n'a pas envie de faire du bénévolat, mais une Maison de Quartier c'est important, c'est un vivier, c'est la mixité sociale, la porte ouverte à tous. » « J'ai 25 ans et je suis animatrice à la petite enfance. Ma mission est de créer du lien entre les générations et favoriser la mixité sociale. On essaie de démocratiser au maximum la culture, elle peut aussi émerger d'ici. » Il y a celles qui sont récoltées parmi les adhérents participant à une activité, comme l'atelier couture ou le club de danse : «- Comme il y a des activités et que l'on a besoin de moi je viens ici. On a besoin de vous ? eh bien oui, on fait des soutien-gorge pour la ligue contre le cancer. Il y a de la solidarité dans notre quartier, il y en a toujours eu. « Je suis venue à l'atelier couture quand je suis devenue veuve. Il y a beaucoup de veuves dans notre quartier car nos époux ont tous été plus ou moins atteints par l'amiante, l'usine n'a pas été reconnue et ça n’a pas été reconnu comme maladie professionnelle. » « Une fois je suis allée faire un ourlet, j'ai trouvé que ça coûtait trop cher, alors je suis venu ici pour apprendre moi-même. Je travaillais à l'usine de charbon, dans le puits, j'ai arrêté car j'ai eu un accident [...]. Ce qui me plaît ici c'est les copines ! » « Je fais de la danse ici depuis que j'ai quatre ans, ça va faire dix ans que j'en fais. Ça me permet de me déstresser, de mettre en mouvement se que je pense. » « Quand je vais pas bien je viens ici et je danse ! » 15 Enfin, il y a les témoignages de bénévoles qui s’expriment sur la relation entre la Maison de Quartier et leur vie. Ces témoignages sont souvent réalisés chez les personnes et durent plus longtemps que les autres ; une forme plus intime et plus personnelle s'en échappe : « J'ai 91 ans, je suis une dame âgée, je ne suis pas une vieille femme ! Mon projet à la Maison de Quartier c'est l’inter-génération. Car on se connaît pas, on nous voit plus ! On n’apporte plus rien, on ne fait plus rien, on n'apporte plus rien à cette machine de la société ! C'est pas parce que l'on est âgé que l'on perd toutes ces possibilités mentales ! » « J'ai 45 ans, j'ai débarqué à la Maison de Quartier en 2007 à l'atelier cuisine puis, après, j'ai fait du théâtre et du chant, j'adore chanter ! Beaucoup de gens ne vont pas au théâtre, ils disent que ce n'est pas notre place. J'avais un copain qui disait :"Quand j’entends le mot culture, je sors mon revolver." [...]La Maison de Quartier m'a permis de tisser du lien et de rencontrer beaucoup de gens. Quelqu'un qui souffre de solitude peut venir à la Maison de Quartier pour parler. On peut parler c'est déjà pas mal [...] ! J'étais impressionné par les collectes alimentaires, tous ces gens qui viennent chercher de quoi vivre, produits de première nécessité. C'est du social à l'état pur ! » « J'ai eu une étape difficile dans ma vie alors je suis allée à la Maison de Quartier. Ça m’a permis de me ressourcer de voir les choses différemment. Ça évite l'isolement, ça évite de s’écarter de la vie sociale, alors je m'y investis [...]. J'ai envie que ce monde change. Je défends ces structures car c'est important pour les habitants. La Maison de Quartier m’a permis de faire des petits boulots. Je ne m’estime pas fainéante mais l'emploi ne vient pas ! Pour moi c'est un échec de ne pas travailler, pourtant je suis prête à prendre n'importe quel boulot [...]. Grâce à la maison de Quartier je vais au théâtre avec mes enfants. La culture c'est une ouverture sur le monde, si vous n'avez pas de culture vous n’existez pas quelque part. » 16 • Interviews des habitants des quartiers. Ces témoignages sont présents dans six séquences. Ils donnent une vision singulière de chaque personne : leur parcours de vie, leurs passions, leurs combats... En voici quelques extrais : « Je suis présidente de l'Association les Pirates de Rosendaël. J'aime le carnaval, évidemment ! Un jour on m'a demandé d'amener une personne handicapée en fauteuil au carnaval. L'année d’après plusieurs personnes m’ont sollicitée. Alors j'ai demandé à mon mari de me fabriquer un bateau qui pourrait les transporter et que l'on puisse tracter. Il fut nommé le Bateau Pirate. D'année en année nous avons eu tellement de monde que l'on a dû se monter en association et créer un géant de trois mètres quatre-vingt qui se nomme Léonard puis son épouse Victoria de trois mètres soixante-quinze, les deux en matériaux de récupération. [...]. C'est grâce à l'entraide des gens que cette aventure perdure. » « Je suis resté 38 ans à la NPE. A l'époque en 1973 on embauchait des anciens professeurs, instituteurs ou éducateurs, des gens qui venaient du social, je dirais entre guillemets des gens humains. Au fil des années, on s'est rendu compte qu'il fallait faire de moins en moins de social. On a embauché des gens qui venaient du commerce, de la comptabilité et même si il y avait des syndicats, le combat est devenu de plus en plus difficile. Comment appâter les gens ? Ben par l'argent. Ce fut de plus en plus difficile d'inscrire les gens, il fallait vérifier s’ils étaient, entre guillemets, rentables (leur projet, leur mobilité, leur diplôme...) et tout ça fonctionnait par un système de prime. Il nous a fallu adopter une mentalité que l'on n’avait pas, c'est-à-dire le côté financier. » « Je suis la championne du monde de décorticage de crevettes, membre du conseil de quartier et je préside le groupe de majorettes de Leffrinckoucke. Le concours consiste à éplucher le plus grand nombre de crevettes en dix minutes. Cette année et l'année passée, j'ai fait 186 grammes en dix minutes.[...] J'ai travaillé dans une usine de confection de vêtements, les patrons étaient des chinois, il fallait travailler très vite de ses mains, c'est comme ça que j'ai appris à travailler vite. » « Je suis son mari, je suis retraité. J'étais marin pêcheur, mais j'ai arrêté et je suis allé travailler dans le bâtiment. J'ai arrêté la pêche car je 17 n'ai pas vu mes enfants grandir. On pêchait la nuit on vendait le poisson le matin, je rentrais à dix heures du matin et je repartais à quatre heures de l’après midi, voilà ! » « Je suis présidente du club du jeu de bouchons. C'est un jeu fort populaire, il a plus de cent ans. N'importe qui peut venir jouer, vous passez, vous venez ! J'ai travaillé pendant 25 ans en usine [...]. En 1968 ça a fait énormément pour les femmes. Il faut se défendre dans la vie. Sans syndicats maintenant on est foutu ! Nous les femmes, on n'est toujours pas l’égale de l'homme. On fait le même travail, on n'est pas rémunéré pareil. Pendant un moi, un garçon et moi, on a fait la même chose et bien quant on a eu notre fiche de paie j'avais un quart de moins que lui. On a intérêt à continuer à se défendre. » Je suis né en 1945, j'ai commencé à faire carnaval depuis 1955. Je fais partie de l'Association Les Acharnés depuis 1963. Et puis de fil en aiguille je suis arrivé à la droite de Dieu depuis cette année, à la fonction de Tambour Major du carnaval de Dunkerque [...]. A Dunkerque on a pas un temps excellent, le boulot ne court pas les rues, les gens ont un tas de problèmes et puis y a carnaval, c'est carnaval, c'est la petite soupape, on vide le trop plein. Les interviews sont les formes les plus présentes dans cette Veillée. Ceux-ci montrent l'importance que la compagnie porte aux paroles des habitants qu'ils nomment les acteurs "principaux" de la Veillée. Les témoignages relatifs aux Maison de Quartier sont deux fois plus nombreux que ceux des habitants des quartiers. Cette disproportion peut donner l'impression que le sujet d'un quartier se résume à la vie et au fonctionnement des Maisons de Quartier. Je vais aborder ce constat dans la partie suivante. En effet, il pose un certain nombre de questions quant aux retours que j'ai eus des habitants de Dunkerque. Néanmoins, les interviews des Maisons de Quartier témoignent clairement des idéologies que la compagnie défend. Guy Alloucherie et son équipe font entendre ce théâtre du vivre ensemble à travers la parole de ces habitants engagés : « La Maison de Quartier m'a permis de tisser du lien et de rencontrer beaucoup de gens, quelqu'un qui souffre de solitude peut venir à la Maison de Quartier pour parler. On peut parler c'est déjà pas mal ! », « Ça évite l'isolement, ça évite de s’écarter de la vie sociale », « Il y a de la solidarité dans notre 18 quartier », « on fait avec les gens ». On retrouve des thèmes auparavant utilisés dans les pièces de théâtre où la révolution et les idéologies socialistes étaient centrales : « ici il y a du lien social », « les Maison de Quartier ont fait beaucoup pour l'éducation populaire et la démocratisation participative », « c'est du socialisme mais pas politique », « on cherche à démocratiser la culture, elle peut émerger ici », « c'est du social à l'état pur ». La différence avec les Veillée c'est que le sujet c'est le peuple et non la révolution ou le socialisme et que ces idées émergent de leur parole. On retrouve une autre idée importante pour la compagnie qui est de montrer la beauté singulière de chaque personne. Dans les interviews des habitants du quartier (je les prends comme exemple mais ce ne sont pas les seules) les plans durent un peu plus longtemps que les autres et sont filmés chez eux. On découvre leur passion insolite comme la championne du monde de décorticage de crevettes, la présidente du club du jeu de bouchon, le tambour major... Le tout est entremêlé de leur histoire ouvrière pour la plupart, mais aussi de leur lutte (le droit de la femme, exister en tant que personne âgée, ou encore cette employée de l'ANPE qui dénonce la dérive de ce service vers un fonctionnement capitaliste). Pendant la représentation de la Veillée, ces témoignages créent beaucoup de réactions et sont souvent suivis d’applaudissements. Pendant un temps, leur image et leurs paroles deviennent un événement théâtral qui leur donne de l’importance, qui les sublime. 2.2.2. Lecture sur scène Les lectures sont composées d'une partie du journal blog qui est créé par la compagnie tout au long de la Veillée, mêlées à des textes politiques très ouvertement engagés. Elles sont parsemées tout au long du spectacle et présentes dans sept séquences. Le journal blog est un journal de bord qui relate les rencontres faites par les Veilleurs : les anecdotes, l'histoire du quartier, l'itinéraire de l'équipe, leurs points de vue mais aussi les débats qui les animent inspirés par le quartier ou par l'actualité. Il y a aussi des photos. Il est écrit tous les jours. Plusieurs fois par jour, des Veilleurs 19 collectent les expériences de chacun et les retranscrivent. Ainsi, leur travail a une grande lisibilité et peut être vu et lu par tout le monde. Ces lectures sont toujours accompagnées de musique et sont exprimées de façon très rythmée avec une diction assez proche du slam. Guy Alloucherie me dit à propos de cette diction slamée, qu’elle leur permet de garder une distance et d'éviter de tomber dans le pathos. Aussi, me dit-il, elle permet de garder le rythme du spectacle. Ce style de lecture fait forcément écho au rap et au hip-hop qui est une culture populaire venant de la rue et fondée sur le thème de la révolte. Lors des lectures des textes politiques le rapprochement est flagrant, bien que les textes ne riment pas. Ils peuvent aussi rappeler les manifestations politiques des années soixante-dix. Ainsi, il semble que cette forme de lecture permet de toucher plusieurs générations. Cet exemple témoigne de l'importance pour la compagnie de toucher le plus grand nombre et de tendre vers une culture pour tous. Leurs textes politiques décrivent ouvertement leur engagement social, politique et culturel. En voici quelques extraits : On ne parle des ouvriers dans les médias que lorsque les usines ferment, délocalisent. Avec l'image que l'on donne d'eux, les ouvriers ont l’impression de faire partie d'une race en voie d’extinction. Donner cette idée là à la classe ouvrière permet au libéralisme de maintenir les gens dans la crainte de la disparition de leur métier, les maintenir dans la peur de réagir aux injustices dont ils font l'objet où dont ils sont témoins. Le néolibéralisme en précarisant le monde du travail et en privatisant l’espace public a considérablement asséché les poches de solidarité au sein des couches populaires. Malgré tout, les nouvelles couches du salariat ont appris à résister ensemble à la mondialisation capitaliste. Dans ce renouveau, des luttes internationales se profilent, autant d’expériences fondatrices qui permettent de croire à l'élaboration d'un projet de société crédible. Le socialisme et le communisme au XIXème siècle, sont nés de la dialectique entre la réflexion : Fournier, Marx, Enguel, et les expériences de luttes d'organisation d'opprimés. C'est d'en bas qu'est venu l’espoir, c'est d'en bas qu'il renaîtra ! L'éducation populaire, ils n'ont non pas voulu ! dit Christiane Fort. Une éducation politique et culturelle pour tous qui donne le pouvoir à 20 chacun, qui amoindri les injustices sociales, ils n'ont pas voulu ! La culture n'est plus le lien d'un peuple, elle est un outil d’ascension sociale donc exclusif et excluant. ça sous entend que la culture ne luttera pas contre les inégalités, elle ne fait que proposer de nouveaux critères pour une hiérarchie, un nouveau système de classe, non plus sur les bases du travail, mais sur celles du savoir : exit la conscience de classe. Si on veut l'égalité, c’est cette échelle sociale de classe qu'il faut revoir, c'est ce à quoi travaillait l'éducation populaire et c'est ce pourquoi ils n'ont n’on pas voulu. Alors maintenant on fait quoi ? Ces textes politiques, qui sont écrits par la compagnie ou extraits d'un livre, nous révèlent très clairement la position politique de Guy Alloucherie et de son équipe. Par ces lectures, ils annoncent des valeurs qui fondent leur travail artistique : défendre et représenter les classes ouvrières, les "gens d'en bas", promouvoir l'éducation populaire, informer les gens sur le fonctionnement politique et son histoire, défendre une culture qui relie les gens et non les hiérarchise. De nouveau, on retrouve ces sujets dans le théâtre politique des années soixante-dix mais cette fois-ci, ce sont les paroles des acteurs de la compagnie. Cependant, ces interventions sont les moins nombreuses dans l'ensemble du spectacle car comme je l'ai dis plus haut, le sujet c'est les habitants. Un autre point qui me paraît important, ce sont les extraits du journal blog. Il permet de montrer aux spectateurs où se trouvent les acteurs de la compagnie dans cette création. Afin de mieux éclairer mon propos je vais en extraire quelques passages : La mer. Les gens parlent peu de la mer. Pourtant il y a les maisons de pêcheurs. On a vu l'école des beaux Arts dans l'ancien Hôpital. On a vu un chœur de quatre-vingt dix personnes à la Maison de Quartier de Rosendaël. Impressionnant. On voit Dunkerque à travers le filtre de la maison de quartier. On n'a pas vu les dockers, les pêcheurs et les sidérurgies. Ni le carnaval. Les gens parlent encore avec nostalgie de la fermeture des chantiers navals en 1987. Dunkerque est une ville qui a souffert. Elle a été détruite à quatre-vingt pour cent pendant la guerre. Le 14 juillet les élus jouent au jeu du bouchon. Les gens n'ont rien à cacher. Beaucoup de fenêtres sans rideau. Pas de publicité. On voit souvent ça sur les boîtes aux lettres quand on fait du 21 porte à porte [...]. On dépose nos invitations dans toutes les boîtes. Pour un spectacle avec et pour les habitants du quartier. On entend les gens qui parlent chez eux par les fenêtres ouvertes. On imagine leur vie. Les noms des rues sont écrits en jaune sur rouge. Au coin de la rue de Roubaix et de la rue du Général Hoche il y a plein d’animaux en bois à la fenêtre d'une maison. Du cimetière, on entend les cris d'enfants de l'école. Rue des poètes. Rue de l'audace. Rue des souvenirs. Rue des soupirs. Rue des pélicans. Rue des martinets. Rue des mouettes. Rue des Courlis. Rue des goélands. Rue des hirondelles. On a marché dans Malo jusqu'au rond point des quatre vents. Il y a les matins à l’hôtel Borel. Il y a ce vent à dérider les plus obscurs. Il y a cet homme devant la maison de quartier de Rosendaël qui pleurait toutes les larmes de son corps. Il y a notre déménagement aujourd'hui à la maison de quartier du Méridien à Malo-les-Bains. Il y a les acrobates et danseurs qui vont danser sur le marché de Malo. Il y a des livres et des livres. Il y a une manifestation cet après midi à Dunkerque à 15 heure, contre la politique d'austérité et cette politique qui fait payer la crise aux plus pauvres. Il y a ce travail de co-construction de co-création artistique qu'on mène avec les habitants. Par ces textes les Veilleurs se mettent en scène. On les imagine dans leur travail d’investigation et de découverte de la ville. C'est comme si on ouvrait le rideau qui montre les ficelles du spectacle. Ainsi, les habitants redécouvrent leur ville à travers un regard étranger à ce lieu. Cette mise en abîme du spectacle participe à la volonté d’effacer les frontières entre le public, la scène et le temps de création. Comme ils le disent au-dessus, la Veillée est un travail construit et créé avec les habitants. Alors, le moment de la représentation est comme le dit Piscator, une grande manifestation. Il n'y a plus vraiment un public et une scène mais une réunion où l’on présente un travail collectif mis en scène par la compagnie. 22 2.2.3. Travail avec les scolaires Dans la Veillée, j'ai repéré trois sortes de travaux fait avec les élèves, ils sont présents dans trois séquences. Tout d’abord, le travail qu'ils ont mené avec les élèves des Beaux Arts sur Antigone. Je vais restituer le résumé qui est écrit dans le protocole, qui donne une idée très claire du résultat. Dans des classes de lycée, dans des groupes, il s'agit de parler de qui est Antigone, la rebelle, la révoltée. Parler de l’indiscipline. Imaginer qu’Antigone vient d’arriver dans le lycée ou le quartier. Qu’est-ce qu’elle fait ? Qui elle est ? A quoi ressemble-t-elle ? Par petits groupes, imaginer des petites saynètes auto mises en scène, qui racontent un bout de l’arrivée d’Antigone. Y ajouter des textes originaux d’Anouilh, Sophocle, Bauchau, Brecht... La séance est filmée. On travaille sur le rapport à la caméra, sur le cadrage et la gestion de l’espace-studio. Le tout donne lieu à un montage dynamique. Ensuite, ils ont travaillé avec des collégiens à partir de citations littéraires. Les élèves expliquent devant la caméra, ce que signifie pour eux la citation qu'ils ont choisie. Voici quelques exemples de ces citations : « Un jardin n’est jamais fini, comme la prose. », « Rien ne finit, tout commence. », « Il faut porter du chaos en soi pour accoucher d’une étoile qui danse. » « Et lui le révolté, qui cherche la tempête, comme si dans la tempête régnait la paix. » Enfin, ils ont réalisé un travail sur un extrait de En attendant Godo de Becket avec des élèves d’âges différents. Didier, l’un des veilleurs joue Vladimir, et les élèves, chacun à leur tour, jouent les mêmes répliques d’Estragon. C’est une scène de dispute. A mesure que le dialogue avance, le ton monte. Les répliques sont ensuite montées de sorte que Didier : Vladimir, donne la réplique à l’ensemble du groupe : Estragon. Ce sont les seuls moments dans la Veillée où des œuvres de théâtres sont abordées et jouées. Utiliser le théâtre pour aborder les jeunes générations, témoigne d'une volonté de transmettre ce savoir faire et de les sensibiliser à cet art. L'enseignement du théâtre est une idée que l'on retrouve dans l'éducation populaire. En entend la parole de ces 23 adolescents sur leur manière de percevoir le monde à travers l'explication des phrases littéraires qu'ils ont choisies. Voici un exemple : " Mon cœur est un piano précieux fermé à double tour dont on aurait perdu les clefs." C'est quelqu'un de réservé qui ne veut pas encore s'ouvrir à cause de quelque chose qui s’est passé dans sa vie. Il est vraiment difficile que l'on pénètre son cœur parce que c'est quelqu'un qui souffre. Il y a là aussi une volonté de positiver la jeunesse et de la rendre belle à travers la littérature. Ceux-ci participent à détruire ces murs invisibles qui se sont construits sur des préjugés, entre jeunes et anciens, chômeurs et salariés, autochtones et immigrés.... Enfin, on retrouve le thème de la révolution à travers le travail fait sur Antigone. Dans le journal blog Martine et Didier expliquent qu'ils ont raconté aux étudiants qu’Antigone, la célèbre héroïne du théâtre grec qui incarne la rébellion et la résistance au pouvoir tyrannique, est arrivée cette année aux Beaux Arts. A partir de cela ils ont travaillé sur ces thèmes et ce qu'ils en pensent. N'y aurait-il pas, pour la compagnie un petit désir de sensibiliser la jeunesse à l'idée de révolte et d'insoumission, quand nos dirigeants nous sensibilisent plutôt à une pensée individualiste fondée sur la peur et l'insécurité ? 2.2.4. Portait des gens du quartier Il y a trois sortes d'image : Les portraits chinois, les pas de porte et les panneaux citations qui sont tenus en silence ou adressés à la caméra (dans ce cas-là on ne voit pas le panneau). Ces portraits sont présents dans onze séquences. Le portrait chinois consiste à faire parler les gens sur leur quartier à travers leurs références culturelles en répondant à quelques une de ces questions: « Et si votre quartier était un livre ? un film ? une musique ? et s’il avait un prénom ? » Les réponses sont filmées et donnent lieu à des séquences en litanies. Les panneaux citations sont les mêmes que j'ai citées dans le travail avec les élèves. Ces portraits sont filmés dans la rue ou sur un marché. Ils jouent sur le décalage 24 entre l'image des habitants et la poésie écrite sur le panneau ou dite par eux. Cet écart ne crée pas du ridicule mais plutôt du sensible. Les pas de porte sont les vidéos des habitants posant devant leur porte, ils sont muets et accompagnés de musique. Ces portraits en pied durent trente secondes. C'est comme une photo mais vivante. Dans le protocole ils disent : « C'est l'occasion de faire du porte-à-porte pour rencontrer les habitants, sans préjugés, sans critères préalables, ou plutôt en mettant comme seul et unique critère le fait qu'ils habitent là ». 2.2.5. Images d'étudiants Ils ont utilisé trois techniques différentes pour filmer les étudiants. Ces images sont présentes dans neuf séquences. Il y a les photos de classes. Les élèves se mettent en place les uns après les autres dans une configuration de photo de classe, puis ils s'en vont comme ils sont venus, l'ensemble est filmé. L'autre version consiste à ne pas voir leurs déplacements. Ceci donne lieu à une multitude de photos qui construit une image puis qui se déconstruit. Ainsi, on voit chacun se préparer à donner son image à l'intérieur d'un groupe. On peut imaginer l'architecture du groupe et les rapports entre eux. Il y a les pas de couloir. C'est une installation qui est photographiée. Le principe est le même que les pas de porte mais dans un couloir avec une perspective fuyante. Le film est ensuite projeté sur un écran à l'endroit même où ils ont été filmés. Ce procédé crée une présence fantomatique, une illusion d'optique et donne à cette installation photographiée un caractère magique. Il y a les followings. Il s'agit de filmer un élève comme dans le filme Eléphant. C'est un long travelling à la main qui suit un élève de dos le long d'un couloir, comme si la personne ouvrait la voie à une caméra subjective. Je trouve que ces trois manières de filmer les étudiants apportent du mystère quant à leur devenir et à ce qu'ils sont. Cette présence de magie, d’illusion et de subjectivité, donne cette sensation que la jeunesse ne peut être ni résumée ni généralisé. Guy 25 Alloucherie et son équipe nous livrent donc un regard positif sur la jeunesse composé de mystère mais aussi d’espoir par ce système de followings où la personne ouvre une voie inconnue. 2.2.6. Image du quartier Pendant la représentation, des vidéos d’architectures, de rues, de bâtiments et des détails de la ville se succèdent... Ce sont des portraits des quartiers en mouvement. C'est Jérémie Bernaert qui réalise ces images. Il s'occupe de la création visuelle et audio dans la Veillée. Ces images sont esthétiques, c'est un travail de photographie. Jérémie me dit lors de notre entretien, qu'il essaie toujours d'avoir un regard neuf et en même temps réactif. Qu'il faut annuler tout a priori, être dans la rencontre, regarder pour la première fois. Il filme comme si c'était la plus belle image du monde, afin que les habitants ne sachent plus si le lieu qu'ils voient est le même que celui qu’ils connaissent. Ainsi ces images permettent aux habitants de redécouvrir leur quartier sous un autre regard : un regard artistique. 2.2.7. Vidéos des danses et acrobaties dans la ville Pendant leur résidence sur les quartiers, les danseurs et les acrobates arpentent la ville et évoluent dans des lieux. Certaines danses et acrobaties sont filmées, d'autres sont simplement offertes aux passants, ou aux personnels et clients d'un salon de coiffure, d'un super marché... Les vidéos que l'on retrouve pendant la représentation sont les images de Jérémie Bernaert. Elles sont présentes dans sept séquences. Il met en scène des lieux. C'est-àdire qu'il repère des endroits et en fonction de la luminosité et de l’ambiance qui s'en dégagent, quel que soit l'heure, il demande aux danseurs ou aux acrobates de prendre place sur la scène qu'il vient de choisir. Ainsi, pendant la représentation, on voit Mathieu Desseigne danser sur un bunker à l'oblique au milieu des dunes, Camille Blanc et Dorothée Lamy faire l'Adage (danse lente) au milieu d'un marché, Mathieu Renevret danser sur un banc où est assise une vieille dame, Mathieu Desseigne et Joris Frigerio 26 font des acrobaties dans une cour d'école... Il y a très peu d'improvisations, la majorité des danses et des acrobaties ont déjà été écrites et sont réutilisées dans chaque Veillée. Dorothée Lamy me dit que pour elle, offrir des danses chez les gens ou dans la rue représentent des actions concrètes. On sort de la tour d’ivoire des salles de théâtre pour se risquer au contacte d'un public "brut". Il faut accepter les refus et les réactions de tout genre, pour avoir ces moments de vertige où l'on se retrouve à danser dans le salon des gens. Pour elle ce genre d'actions est une démarche militante, amener l'art dans le quotidien des gens. Les vidéos mises en scène par Jérémie transforment l'histoire des lieux. La danse réalisée par Mathieu sur le bunker déplace l'histoire associée à ce lieu vers une autre représentation. 2.2.8. Danses et acrobaties sur le plateau. Pendant la représentation, des danses et des acrobaties sont réalisées sur scène, devant les écrans. Elles sont présentes dans onze séquences. Il y a toujours en simultané des vidéos sur les écrans et /ou des lectures aux micros. Vers la fin du spectacle, les Veilleurs invitent des élèves d'un club de danse, présents dans le public, à danser l'Adage avec eux pendant qu'un témoignage est projeté sur les écrans. Cette danse leur a été enseignée par la compagnie au préalable. De nouveau, on retrouve cette volonté de briser cette frontière entre la scène et le public et montrer que c'est une co-création entre les habitants et la compagnie. Cette co-présence permanente de l'art avec les témoignages et les lectures permet de solliciter les spectateurs par deux entrées : Ils touchent le public par les émotions grâce à la danse, au cirque, aux différentes images, et en même temps ils sollicitent la raison par les témoignages et les lectures. Ils opposent aussi le récit (les lectures), avec le témoignage. Ces différentes entrées permettent de toucher le plus grand nombre. 27 2.3. Les fondement de la Veillée En regroupant les thèmes et en comptabilisant leurs apparitions dans le spectacle, j'ai remarqué que l'on pouvait extraire un ordre de priorité qui fonde leur mission. Les images des quartiers et les portraits des habitants, que l'on pourrait nommer "Le cadre de vie et ces habitants", sont présents vingt et une fois. Les témoignages, vingt fois. Les actions artistiques sur le plateau et en vidéo sont présentes dix-huit fois. L'ensemble du travail réalisé avec des scolaires, douze fois et enfin les lectures sont présentes sept fois. Ceci donne une lisibilité sur les axes prioritaires qui construisent leurs démarches artistiques : le cadre géographique avec les portraits et les paroles de ces habitants est l'axe principal de leur travail. Nous sommes bien dans un théâtre où le sujet principal est le peuple. Ensuite, nous avons les actions artistiques. Cette présence permanente de la danse et du cirque permet, comme je l’ai dit plus haut, de stimuler l'émotion artistique chez les gens. Elle permet aussi une sensibilisation culturelle avec un art populaire qui est le cirque et un art plus abstrait qui est la danse contemporaine. S'en suit le travail fait avec des scolaires. La Veillée travaille sur le temps présent, le "ici et maintenant". Cependant cette préoccupation du travail avec les jeunes générations démontre l'importance qu'ils portent à la transmission. Comme me disait Guy, l'avenir c'est eux ! Pour finir nous avons les lectures. Ce sont les paroles de la compagnie, leurs révoltes, leurs réflexions, leurs points de vue. Ils parlent de co-production et de cocréation avec les habitants. De la même manière qu'ils le demandent aux habitants, il est important pour eux d'annoncer où ils sont, de donner leurs points de vue sur leur manière d'habiter le monde. 28 3. Un théâtre du vivre ensemble, mais à quel prix ? J’ai observé, dans ma première partie, que le travail de Guy Alloucherie s’inscrit dans une réémergence d’un théâtre militant qui met le peuple au centre de leur propos. L’analyse de la Veillée de Dunkerque me permet d’affirmer que leur sujet est les habitants et plus précisément les habitants des quartiers populaire. Voilà ce que Guy dit à ce propos : « Ca à du sens d’être dans les quartier populaire, quant on n’y est plus sa perd un peut de son sens. Les gens ne vivent pas de la même manière. Dans les quartier populaire ils on un vie commune, ils y à un investissement associatif, ils vivent ensembles et sa c’est intéressant pour nous. Dans des quartiers plus bourgeois, plus riches, les gens ils prennent leur voiture, ils bougent, il y a pas vraiment une vie de quartier. » Le travail de Guy Allouchrie fait écho fortement à la politique culturelle et les thèmes qui en découlent : Démocratie culturelle et médiation culturelle. Avant d’aborder ces propos je vais préciser ce que j’ai défini comme être un théâtre du vivre ensemble. 3.1. Un théâtre du vivre ensemble. Guy Alloucherie et sa compagnie ne nomme pas leur travail comme être un théâtre du vivre ensemble. J’ai choisi de le définir ainsi car c’est le cœur de leur recherche dans les Veillées. Ils résident majoritairement dans les Maisons de Quartiers, là où les habitants se rassemblent pour vivre ensemble des activités. Ils relatent leur paroles éclairant particulièrement les liens sociaux que chacun entretient avec le quartier. Ils cherchent à rendre compte que la solidarité existe encore dans les quartiers populaire et que c’est potentiellement une masse qui peut s’unir et qu’il faut donc lui donner la parole. Lors de mon entretient avec Jérémie Bernaert qui est le créateur audio et vidéo, je lui ai demandé de quoi la Veillé rend compte si celle ci n’est pas un documentaire sur une problématique précise ? Il m’a répondu, du vivre ensemble, de la manière qu’un quartier vie ensemble. 29 C’est aussi pour la compagnie de vivres avec les habitants la pratique de leur art. De les questionnaient sur leur propre place, celle de l’artiste. Guy Alloucherie dit à ce propos : C’est ensemble que l’on réfléchi. J’ai trop longtemps cru que au théâtre on savait et que les autres ne savaient pas. Quel drôle d’idée de croire ca quant on est artiste, de s’enfermer dans une tour d’ivoire et que l’on détient la vérité. Il y a un savoir faire qui fait de nous des artisans, mais on ne détient pas la vérité sur ce que c’est l’art et la culture. C’est une volonté d’aller vers les gens, de converser de vivre ensemble, c’est même un appel au secoure de notre côté, de dire aux gens aidé nous car nous on sait plus comment être artiste. C’est quoi pour vous être artiste ? C’est aussi un travail qui s’inscrit essentiellement dans le présent. Pour parler de comment les gens vivent ensemble, elle n’a un poids que si cette parole est inscrite dans un présent presque immédiat. Didier Cousin me dit à ce sujet : « il s’agit moins d’un travail sur la mémoire que d’un travail sur comment ca vie ensemble maintenant, car ce qui est maintenant est vrais. » Enfin ce partage d’expériences leur permet de construire ensemble le spectacle de la veillée. Ils font avec et pour les gens. C’est un peut comme la naissance des danses folkloriques m’explique Martine Cendre. Pour construire les fondations d’une maison, les propriétaires invitaient les gens du village pour danser sur la terre afin de créer une chape solide. C’est ainsi que sont nés certaines danses folkloriques. La Veillée c’est un peut ca. Ils vivent ensemble pendant trois semaines avec de la danse du cirque des échange de paroles, et à la fin les artisans construisent un spectacle. Camille Blanc me dit que de travailler sur le terrain de cette manière là est une démarche politique et que c’est devenu pour elle une nécessité. Ce théâtre du vivre ensemble semble répondre à une démarche de démocratisation culturelle. Cependant es ce que celui-ci répond aux différentes conditions qui définissent une démocratisation culturelle. 30 3.2. La Veillée, une forme de démocratisation culturelle ? A l’heure du rendu de ce premier jet, je n’ais pas put finir les deux dernières sous parties qu’il reste. Cependant je vous en livre un résumé. Dans cette partit il s’agira de montrer que la Veillée remplit tout les point qui permet de parler de démocratisation culturelle : • Que l’accès à l’offre culturelle ne peut pas être refusé à quelque citoyen que ce soit pour des raisons d’ordre économique, sociale, politique ou religieux. Les veillées sont gratuites et pour le reste vu qu’il travail sur l’ensemble du quartier il n’y à pas de discrimination. • Donner aux citoyens la possibilité de dominer la complexité des messages culturels qui lui sont données, et assimiler les codes sémantiques et symboliques. La compagnie créer avec les habitants et ainsi leur donnent les outils pour accéder aux différent contenu du spectacle. • Participer à une expérience sociale La démarche de résider pendant trois semaines dans le quartier créer une expérience sociale. • La fréquentation d’un espace culturel Les veillées sont toujours présentées à la fin dans un théâtre ou scène national si il en existe une. Sauf cette fois ci pour le Veillée de dunkerque ou la scène national était en travaux et du coup ca c’est fait dans la salle de spectacle d’une des maisons de quartier. Ceux ci à forcément entrainé des conséquences qui m’amène à ma partit suivante. 3.3. La Veillée, une médiation culturelle. Une Dérive ? Dans cette partie je vais retranscrire les interviews que j’ai récoltées aux prés des habitants, un moi après la Veillée. Le discour majoritaire qui en ressort est qu’ils ont 31 beaucoup apprécier les trois semaines de résidence mais que le spectacle faisait trop l’apologie des Maisons de Quartiers. Qu’il avaient l’impression que le quartier se résumé a ca. Un responsable d’une Maison de Quartier ma dit que c’était une superbe publicité pour les maison de quartiers, que la captation sera très apprécie par les politique. Ainsi les Veillées ne sont elle pas détournées comme médiation culturel au profit des communes, s’en servant pour justifier leur dynamisme culturel ? Es pour ca quelle on tant de succès (Il y a déjà deux année de Veillée programmées d’avance) ? Plusieurs points sont à analyser. Le fait que les gens se sont vu chez eux (maison de quartiers) plutôt que dans un théâtre, ne participe t’il pas à leur réactions ? Guy Alloucherie n’a t’il pas été fasciné par le dynamisme des ces maisons de quartier qui sont si représentatives de ce vivre ensemble ? Guy alloucherie parle de médiation dans son travail, ainsi c’est peut être tout à fait conscient chez eux, mais que ces Veillées servent aussi pour la compagnie de matière permanente pour les autres spectacle qu’ils font à côté. Enfin le dernier point est qu’il on jouer les Atomics en janvier qui était la Veillées des Veillées. Dans les interviews ils m’on dit que sa servirait de faire le point et de savoir si au bout de dix ans, sa à encore du sens de continuer ou nom. 32