LES INDUSTRIES AGRO-ALIMENTAIRES FRANCAISES
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LES INDUSTRIES AGRO-ALIMENTAIRES FRANCAISES
MEDIT N ° 1/93 LES INDUSTRIES AGRO-ALIMENTAIRES FRANCAISES CHRISTIAN RENAULT (*) L a population a connu un fort mouvement de concentration urbaine . L'évolution générale de l'économie est caractérisée depuis 1983 par une politique de désinflation, marquée par la désindexation des salaires, des taux de crédit élevés, une volonté de maîtrise des dépenses publiques et des budgets sociaux. Les industries alimentaires ont participé à ce mouvement en alimentant peu l'inflation et en maintenant une croissance régulière. La prise en charge par l'industrie d'une partie importante de la préparation des repas a facilité l'évolution de la société, en y trouvant une marge de développement, de nouveaux marchés, de nouvelles fonctions. Population (1990) • Population Française Métropolitaine: 56,45 Millions d'habitants • Part des plus de 60 ans: 18,7%; moins de 15 ans: 20,5% • Régions Méditerranéennes (P ACA + Languedoc): 6,5 Mios soit 11 ,5% • Sud de la France: 19,5 Millions soit 34,5% • Population urbaine: 80% PNB 90: 1099,79 Milliards US $ Valeur ajoutée agricole (1990): 195 ,6 Milliards de F Valeur ajoutée IAA (1990): 115,6 Milliards de F Superficie: 543 .964 km 2 SAU (88): 28.596 Ha Généralités agricoles et agro-alimentaires 1 Abstract Agro-food industries are the first sector in French economy. They have a turnover of 614 billions of French Francs, including foreign sales for FF 125,5 billions Among the main characteristics we notice the diversity of activities (France is the leading country in Europe and in the world for several main sectors) and also the diversity of capital sources (multinational firms, small and medium size industries, cooperatives). The success of French agro-food industries is based on the modernization of the agriculture, the development of consumption, the growth of mass retailing, and the ability of industrial firms to gain market shares on both internal and international markets. On a middle term, French agro-food industries will have to face three major challenges: Common Agriculture Policy reform, increasing internationalization of markets and capital, development of research capacities. 1 Résumé Les IAA constituent le premier secteur d'activité national avec un cbiffre d'affaires de 614 mUiards defrancs en 1990, dont 125, 5 mrds à l'export (1er) rang mondial). Les IAAfrançaises se caractérisent par leur diversité sectorielle (elles occupent le 1er rang européen, voire mondial dans plusieurs domaines clès), capitalistique et organisational (multinationales, entreprises petites et moyennes, coopératives). La réussite des IAAfrançaises s'appuie simultanément sur le processus de modernisation de son agriculture, sur une consommation soutenue, une industrie innovante et dynamique aussi bien sur les marcbés européen et mondial que sur le marcbé intérieur, où la distribution ajoué un rIJle d'entrainement et de stimulation. A moyen terme, les IAAfrançaises devront affronter trois défis majeurs: la modification des rèfles de soutien de l'agriculture, l'internationalisation accrue des marcbés e des capitaux, le développement des capacités de recbercbe. rythme plus rapide que celui de l'industrie en général. La quasi totalité des branches se sont développées (cfr. tableau 3). Les régions méditerranéennes ont participé moyennement à cette croissance, en raison de leur poids secondaire et d'un dynamisme moins marqué . Des analyses régionales on notamment montré que les régions Provence-Alpes-Côte-d 'Azur (PACA) et Languedoc-Roussillon étaient plus souvent dépendantes que rayonnantes : elles comportent plus d'établissements relevant d'un siège situé dans une autre région, que l'inverse (cfe. tableau 4). Evolution de la production agricole La production agricole se caractérise à la fois par son importance et sa diversité (cfe. tableaux 1 et 2). Les productions végétales se sont développées plus rapidement que les productions animales, alors que les prix étaient en constante réduction. Parmi les principales productions agricoles, on retiendra: les céréales (20 Mrds FF), les fruits et légumes (19 Mrds FF), le vin (15 Mrds FF), le lait (23 Mrds FF), la viande bovine (23 Mrds FF), l'élevage hors sol (20,2 Mrds FF). Tableau 1 Livraisons agricoles. En Mrds de FF 1977 1980 1990 (') Agriculture Nutrition Développement, Paris . 24 dont végétaux dont animaux 132,0 187,8 329,9 65,5 90,5 180,2 72,5 97,3 149,8 Tableau 2 Structures agricoles. Evolution des lAA Malgré des effectifs en diminution, les IAA ont poursuivi leur développement à un Produits agricoles 1977 1979 1988 Commerce extérieur agro-alimentaire A une balance des produits agricoles traditionnellement excédentaire vient s'ajouter depuis 1977 une balance agro-alimentaire dont l'excédent croit régulièrement. Au total, les secteurs agricoles et alimentaires contribuent positivement au commerce extérieur français pour environ 50 milliards de francs par an (cfe. tableau 5). Pour résumer on indiquera les postes, destinations et origines marquantes: Produits excédentaires: céréales, boissons et alcools, produits laitiers , sucres et dérivés, farine, bovins vifs, oléagineux,viandes de volaille. Produits déficitaires: café et cacao, viande porcine, produits tropicaux, poisson, alimentation animale, légumes. Principaux clients: Italie, Allemagne, PaysBas, UEBL, Royaume-Uni. Principaux fournisseurs : Pays-Bas, UEBL, Allemagne, Royaume-Uni, Italie. Le système agro-alimentaire Principes généraux d'organisation Nombre d'exploitants Superficie moyenne (ha) 1588 1263 1017 12 22 28,11 • Le marché avant tout! Comparées à certaines filières nordeuropéennes (Danemark, Pays-Bas), les IAA françaises relèvent d'abord du libéralisme. Branche après branche, l'essor des industries alimentaires repose sur un capitalisme rural , marchand et industriel. Les mécanis- MEDIT W 1/93 mes de soutien, de contrôle, d 'encadrement de la production agissent avant tout au niveau de la production agricole . Depuis la fin du contrôle des prix, dans le milieu des années 1980, le libéralisme régit l'économie de la plupart des marchés finaux et s'accommode des contraintes et conséquences du soutien des marchés agricoles. • Des principes réglementaires en évolution Le rôle de l'Etat est d'abord réglementaire. La loi définit les normes, appellations, conditions commerciales, conditions de production dans la totalité des branches. L'achèvement du marché unique remet en cause un certain nombre de ces règlements - facteurs d'égalisation des conditions de la concurrence - dans le sens d'une plus grande liberté - se cantonnant à la sécurité alimentaire et à l'information du consommateur. Les produits «de qualité spécifique ou particulière» (AOP et IGP) bénéficient toutefois d'une protection spécifique . Cet aspect de la certification a fait l'objet d'une attention particulière des pouvoirs publics français qui ont beaucoup travaillé pour que les spécificités soient reconnues par la Commission européenne, et qui avaient auparavant développé un large arsenal de «signes de qualité» officiels dont le fleuron est le «Label Rouge». • Des structures d 'encadrement en déclin Malgré de fortes tentations et impressions , l'intervention de l'Etat demeure limitée. L'aide à l'investissement se limite désormais à quelques secteurs déficitaires (viande, fruits et légumes) même si l'aménagement du territoire et la volonté de développement de régions agricoles compensent cette modestie nationale. Les offices relais national du FOEGAGarantie dans l'octroi des aides européennes,se concentrent sur le développement agricole, la supervision de la «production organisée» et la diffusion d'information. Les interprofessions «privées» - syndicats de filière regroupant producteurs agricoles et industriels - gèrent également l'information, les relations internes, certains aspects de la normalisation, de la recherche et les relations avec l'Etat ou la CEE . Leur rôle dans la fixation des prix se réduit. Politiques et régulation Il n 'existe plus d 'encadrement des prix en France. Le seul vestige public reste le prix du pain, au stade de détail, qui reste une limitation symbolique (sur quelques produits) , dont la tradition est plus que séculaire. Les prix agricoles sont, eux, soutenus par la CEE : nous ne reviendrons pas sur la réforme de la PAC. Parmi ses implications , la fin de la «gestion interprofessionnelle» du prix de certaines productions (raisin champenois, légume de conserve, bigarreaux, .. .) pourrait s'accélérer. Ainsi, le marché régule les prix industriels. On retiendra que certainesfilières ne bénéficient d'aucune mesure de soutien agricole : élevage hors sol, légu- Tableau 3 Evolution des IAA. Emplois (milliers) CA VA CAl exportation Nbre d'entreprises Investissement corporel 1977 1980 1990 403,8 391 ,1 387,3 181 ,1 260,5 614,4 32,9 50,9 116,1 19,2 31,9 92,7 3757 3892 4071 5,4 8,0 21 ,7 Source SCEES. En Milliards de Francs courants. Tableau 4 Evolution des effectifs et du nombre d'établissements. Régions du Sud (') PACA+Languedoc+Corse Années 1977 1980 1989 Effectif Salarié % France Nombre d'établis % France Effectif Salarié 0/0 France Nombre d'établis 24.048 23.806 22.030 6,7% 6,5% 6,3% 382 407 428 7,9% 8,1% 7,9% 98.319 101.559 96.798 26,0% 28 ,1% 27,8% 1752 1853 2015 % France. 36,4% 36,8% 37,3% (') PACA + Languedoc-Roussillon + Corse + Auvergne+ Rhone-Alpes + Midi-Pyrénées + Aquitaine + Poitou-Charentes. Tableau 5 Commerce extérieur agro-alimentaire. 1990 1991 Import Export Solde Taux de couverture 138.957 143.600 190.138 189.000 51.181 45.400 136,8% 131 ,6% mes d'industrie, alcools, et surtout que la plupart des lAA ne bénéficient d 'aucun soutien. Le maintien de la baisse des prix des produits alimentaires (en francs constants), fait office de politique des prix; menée d'abord par la pression du commerce de détail de masse et donc par le marché. La saturation en volume de ce dernier contraint les industriels à maintenir des prix stables voire en baisse dans de nombreux cas. Face à ce mécanisme presque naturel, les efforts publics se sont orientés vers des actions structurelles. Favoriser la concentration L'histoire alimentaire montre que les grands courants d'exportation procèdent souvent d 'une forte concentration de l'offre sur les marchés extérieurs . Le modèle des Board, souvent rencontré, n 'a pas réellement fait florès en France. Les grands exportateurs de produits français sont des sociétés privées: Doux, Soufflet, Besnier, Perrier, BSN , Martell, Pernord-Ricard, Sucden, Cargill agissant sans coordination professionnelle. (Lorsqu'il s'agit de groupes coopératifs comme dans le bétail et la viande bovine, ils suivent la même logique). Face à la saturation du marché intérieur et dans la perspective d'ouverture du marché de 93, les pouvoirs publics ont cherché à favoriser l'émergence d 'un plus grand nombre de pôles privés, capables de jouer un rôle dans un marché élargi. Ces objectifs structurels étaient du reste conformes à une évolution naturelle (les opérateurs faisaient la même analyse) qui fut encouragée par des mesures d'attribution très sélective des aides publiques (renforcement des entreprises de taille nationale ou en voie d'européanisation) et par l'intervention publique lors de certaines opérations de restructuration (cf ULN). Consommation alimentaire une évolution plus qualitative que quantitative Moins d 'importance dans la consommation des ménages Entre 1970 et 1990 la consommation agricole et alimentaire est passée de 26,0% de la consommation des ménages , à 19,3%. Cette évolution est naturellement dûe à l'élévation du revenu disponible mais aussi à une diminution des prix relatifs de l'alimentation. En volume, la consommation augmente légèrement chaque année (1 à 2%) si l'on se réfère aux données de l'INSEE . Les évolutions à long terme sont connues : diminution des féculents, du pain, des pommes de terre (ex «aliments de base) augmentation désormais modérée de produits carnés, et développement rapide des plats cuisinés, des produits diététiques et produits laitiers frais. Libre-service, restauration horsfoyer, réduction des particularités régionales Quelques chiffres sont à méditer: entre 1975 et 1990, le nombre de super et hypermarchés a plus que doublé . Le commerce moderne représente aujourd'hui 70% de la distribution alimentaire . De même, le déve- 25 MEDIT W 1/93 loppement de la restauration hors-foyer a t-elle été considérable ainsi le nombre de repas est-il passé de 3,1 à 4,6 milliards entre 1975 et 1991. La dynamique provient naturellement de l'évolution des modes de vie. Le temps consacré à la préparation des repas a considérablement diminué . Ces évolutions ont entraîné une réduction des particularités locales de consommation. Celles-ci demeurent néanmoins, tant dans la structure générale (part des produits carnés par exemple) que par des particularismes notoires (huile d'olive dans les régions méridionales, etc). Les caractéristiques d 'un modèle méditerranéen restent ainsi assez fortes : plus de légumes frais , plus de viande de boucherie , plus d 'huile, plus de poisson, moins de beurre et moins de boisson (sauf le vin) que pour la moyenne de l'ensemble des régions françaises (cfr. tableau 6 ). Eléments prospectifs Les grandes tendances devraient se maintenir à moyen terme: diminution du temps consacré à la préparation des repas et donc développement des produits préparés, sous toutes leurs formes. Les courants de pensée vont à la protection de l'environnement, entraînant des conséquences en ce qui concerne le conditionnement (consigne; emballages biodégradables, moins d 'emballage), le développement des produits issus de l 'agriculture biologique ou naturels (modéré toutefois) et la relance des produits traditionnels (AOC et consorts). Le marché intérieur Hégémonie nationale? L'industrie française verrouille assez fermement son marché intérieur. Si le pays est déficitaire sur quelques produits bruts (viande de porc, conserves de fruits, produits de la mer, produits tropicaux), l'essentiel des produits consommés en France y sont transformés . Cet état de fait tient a plu- Tableau 6 Consommation de certains produits alimentaires dans les régions méditerranéennes (Insee, 1985). En kg/hab/an ou I/hab/an Légumes frais Viande Huiles Pâtes Bière Eau Minérale Boisson, alcool Méditerranée France 68,66 27,11 13,28 7,12 7,3 33,57 46,87 59,7 21,68 8,87 5,5 11 ,86 50,46 68,92 sieurs facteurs . Au modèle de consommation particulier qui perdure en France, à la tactique jusqu'ici menée par les multinationales (1 usine par pays), et à la puissance des IAA Françaises. L'achèvement du Marché Unique va entraîner une européanisation des fabrications, une spécialisation des usines et une interpénétration des modèles de consommation, réduisant ainsi la prépondérance des fabricants français sur leur marché intérieur. Une distribution et une demande difficiles et bénéfiques Parmi les freins à l'importation, la grande distribution a joué un rôle clé. La distribution française - dont on a pu dire qu'elle était la plus bête du monde - est connue pour son agressivité sur les prix, pour sa demande de services aux industriels et la difficulté qu'il y a à lui faire introduire des innovations radicales. Mais cette distribution a été bénéfique à l'industrie: elle a entraîné un processus de sélection drastique des entreprises industrielles, stimulant la croissance des plus performantes, enterrant les autres. La lutte incessante pour les prix a également stimulé la consommation. De fortes dynamiques s'expliquent par un effetprix, largem(>nt motivé par l'attitude intran- Milliards de Francs.CEE à 12 à partir de 1985 +40~---- CFCE _________________________________ j~ ______ +20r------------------------,~------------------ ~ .§- ge ~ 0 '" ~ ~ ~ "' -2q970 1980 Grafico 1 - Solde agro-alimentaire par destinations (CFCE-APCA). 26 1991 sigeante de la distribution: saumon fumé, produits laitiers frais, viande de volaille etc. la distribution est, à certains égards, transparente; ses exigences traduisent celles du consommateur pour une offre variée et de bonne qualité. La notion de qualité se décline selon de nombreux axes: hygiène , salubrité du produit, information du consommateur, authenticité, gastronomie, provenance ..... La demande française se caractérise notamment par l'importance des produits frais (viande , primeurs, produits traiteurs, fromages, produits laitiers). Les échanges internationaux Des positions très fortes: Eaux de vie, Boissons alcoolisées, Produits laitiers Avec 125,5 milliards de francs de CA réalisés à l'exportation, la France était le premier exportateur mondial de produits alimentaires en 1991. Avec un solde positif depuis dix ans, un taux d'autosuffisance de 130, la France possède une situation solide. Celleci est d'abord dû développement des échanges intra-communautaires: l'Italie et l'Allemagne sont les meilleurs clients de la France. En terme de produits, la France détient des points forts très enviables avec les alcools (Cognac et autres) ou le Champagne, les produits laitiers, la viande de volaille, le sucre. Ces secteurs dégagent un excédent structurel tout comme le secteur des céréales, dont l'excédent repose sur les matières premières et non sur des produits transformés et risque d'être remis en cause - au moins partiellement - pour la réforme de la PAC. Des faiblesses rédhibitoires Les faiblesses sont dûes à des produits bruts dont la culture est impossible en France (agrumes, café, cacao, etc) soit à des filières mal organisées et moins performantes que leurs voisines européennes (viande de porc, viande ovine, fruits et légumes, produits de la mer). Malgré des efforts importants visant à moderniser, restructures ou relancer, ces déficits s'accroissent ou se stabilisent. Il paraît difficile de contrebalancer des situations d 'infériorité nette (pêche , viande ovine) dûes à des écarts importants dans les facteurs de production (prix du foncier pour l'élevage , par exemple) ou une mauvaise organisation des filières (cas des fruits et légumes frais). L'internationalisation des IAA françaises Le phénomène d 'internationalisation procède de deux dynamiques . L'achèvement du Marché Unique provoque une intensification des échanges intracommunautaires dans toutes les filières . La conséquence logique en est une internationalisation (ou européanisation) des firmes qui doivent s'adapter à l'élargissement de leur niveau concurrentiel. Ce phénomène est l'un des plus . importants de la période. D'une part on peut espérer que de grands groupes français émergent à l'instar de BSN (on sait que la France ne dispose pas de beaucoup de grandes entreprises agro-alimentaires au plan mondial, malgré ses points forts); d'autre MEDIT W part quelques soient le sens des acquisitions et cessions, l'insertion de l'alimentaire français dans l'économie internationale renforce sa pérennité. Enfin le rôle grandissant de l'industrie agro-alimentaire dans l'orientation de l'agriculture fera des Groupes industriels les acteurs réels d'une nouvelle PAC empreinte de libéralisme, dans cette optique l'européanisation des firmes françaises est un point positif. Les relations Industrie-Agriculture Intégration technique Le développement des industries agroalimentaires s'est accompagné d 'une dynamique d 'intégration technique de plus en plus forte de la production agricole. On pourrait établir une relation inverse entre le poids de l'intervention européenne et le niveau d'intégration technique. Ainsi la plupart des produits non garantis par Bruxelles sont produits sous contrats avec les industriels : volaille, légume d'industrie , champignon, pomme-de-terre, etc. Mais l'intégration technique touche également des secteurs tels que le sucre, la viande bovine, le lait. Elle se traduit par un contrôle important de l'usine sur la production : calendrier, espèce , variété, méthodes de production, qui laissent peu d'initiative aux producteurs et les amènent à concentrer leurs efforts sur leur fonction. Intégration économique En conséquence , la prospérité d 'un bassin dépend de celle de ses usines et vice-versa. Les stratégies des firmes se définissent par rapport à cette contrainte de base. Ainsi opposera-t-on un BSN peu impliqué dans la 1ère transformation et donc indépendant des bassins et de la production agricole, à un Besnier qui quoique très avancé dans les produits élaborés (fromages) a fondé sa stratégie sur le contrôle des bassins de production . La conséquence de ces phénomènes d'intégration est l'essor des industries agro alimentaires bretonnes (la Bretagne représente environ 1/3 du potentiel agroindustriel français), basé sur la compétitivité et le dynamisme des productions horssol de cette région (lait, porc , aviculture), des productions légumières et de la pêche. A l'inverse, la moindre influence des industries du Sud-Est Méditerranéen est lié au déclin de l'agriculture locale , et à la perte de position du port de Marseille . Intégration financière Les cas d 'intégration de l'agriculture par les industriels sont assez rares . Ce type de démarche a toujours suscité l'opposition des syndicats agricoles et se justifie rarement du point de vue industriel en raison des résultats satisfaisants obtenus via la contractualisation (qui implique toujours une rémunération indexée sur la qualité ou le rendement. A l'inverse , l'intégration de l'industrie par les producteurs via leurs coopératives est un phénomène qui se développe pour deux motifs. D'une part, la production est obligée de s'impliquer dans des secteurs dont la rentabilité et les risques ne motivent 1/93 Tableau 7 Structure des principaux sous-secteurs des I.A.A. Sous secteurs Chiffre Investissement Concentration Export d'affaires ICA (') ICA Abattage du Bétail 78.592 1,5% 25,4 Charcuterie 37.958 3,8 25,0 Volaille 23.929 3,3 29,0 Viande 140.479 2,4 Industrie Laitière 147.203 2,4 26,0 Fab. Crêmes glacées 6.931 Lait 154.134 Conc. Fruits, Confitures 5.056 4,0 2,5 3,4 94,0 Cons. Légumes 15.617 4,8 40,2 Cons. Poissons Plats cuisinés 10.946 13.991 2,7 4,5 26,5 71,1 Conserves Pain Meunerie 45.610 9.121 Il .895 4,1 5,9 2,5 nd 17,8 Biscuiterie Pâtes alimentaires Nutrition Animale 14.971 5.565 47.414 4,3 4,9 2,6 51 ,5 55,7 25,1 Grain Fab. Huiles brut. Fab. Huiles raff. Sucrerie 94.1 52 3.301 9.365 21 .861 3,3 5,8 2,3 4,4 73,9 80,0 71,5 Chocolaterie 27.842 3,8 50,0 Café et Thé Vinaigre et sauces Diététique-Enfance 11 .307 3.563 3.675 2,8 4,2 3,2 63,6 71 ,2 80,0 Entremets-desserts Bouillons Alim. divers Divers Distil. Alcool Eau de vie C) Apéritif alcoolisé Apér. à base vin Champagne Brasserie Cidrerie Jus fruits 517 2.278 4.960 88.669 2.805 11 .060 8.281 1.913 16.274 11 .883 987 2.995 2,1 4,8 6,2 3,8 3,3 3,8 1,9 3,7 4,2 9,8 5,4 4,7 98,3 99,0 68,3 13.478 12.003 81.679 604.723 6,0 9,7 5,8 3,4 Bois. non alcool. Eaux minérales Boissons IAA 27,0 38,3 64,7 76,0 99,0 50,1 90,3 64,7 78,4 69,0 93,7 Commentaires 10,4% Les 2 principaux groupes sont coopératifs. Investisse· ments importantsNA 4,1 % Concentration accélérée depuis 3 ans. Investissements: nouveaux métiers 14,8% Concentration rapide. Investissements: modernisation et 3ème transformation 9,5% Faible concentration rapportée au marché des substi· tuables 13,2% Trés hétérogène (prOduits de base, ultra-frais, froma· ges, ... ) Coops, multinationales, PME 7,0% Concentration très importante (Nestlé, Ortiz, Unilever) 13,0% 14,6% Concentration forte sur chaque métier (conf. et cons.) Fortes importations 12,3% 3 groupes nationaux dont un leader européen, plus un spécialiste Pomme de terre 9,50/0 Principale activité Boulonnaise 3,5% Une firme dominante (Euralim), des multinationales et des entreprises de taille moyenne 9,2% 5,7% Recomposition et structuration en cours. 20,5% Secteur en voie de rationnalisation . Des fermetures, et entrée de coops 7,6% BNS contrôle plus de 50% du marché des biscuits secs 3,9% BSN contrôle plus de 50% du marché des pâtes séches 7,7% Encore atomisé variable selon régions d'élevage; Invests: restructuration 4,4% 18,0% Trés concentré au niveau européen et mondial 8,5% Trés concentré au niveau européen et mondial. 27,3% Oligopole stable, production stable. Européanisation et diversification 17,0% Forte concentration sur les produits de masse (barres et tablettes) 10,7% Forte concentration internationale 6,9% BSN dominant, existence de petites sociétés 13,5% Aliments pour bébés: très concentré. Produits diététi· ques: plus atomisé 6,0% Trés forte concentration et produits parfois viellissant 4,2% Trés forte concentration et produits parfois viellissant 32,4% 17,8% 31,2% Fort secteur coopératif à marché CEE 80,2% Forte internationnalisation des capitaux 13,3% Pernod Ricard 5,5% Sans commentaire 41,3% Sans commentaire 5,3% BSN leader Point fort de la région 22,3% Pernod Ricard Leader + Artisans 8,9% Oligopole évolutif (Pernod-Ricard/BSN/Sea· gram/Nestié/et quelques autres) 24,9% Oligopole stable 18,6% Nestlé-BSN-Distributeurs 30,1% 15,3% Sources: SCCES EAE Champ courant Elaboration AND. ') Part des quadre premiers (Insee, 1985). plus de capitaux privés classiques. D'autre part l'idéologie coopérative pousse les structures les plus solides à contrôler l'industrie pour «garantir les débouchés». Ces initiatives qui touchent en priorité la première transformation connaissent et connaîtront des fortunes diverses. les structures coopératives, malgré des avantages fiscaux indiscutables, sont rarement adaptées aux impératifs de la gestion industrielle , notamment dans les produits frais. Technologie et equipement Une industrie souvent au meilleur niveau mondial (taille, hygiène, productivité) La France abrite l'usine de produits laitiers la plus moderne d'Europe , le plus grand abattoir de volailles , le plus grand marché alimentaire du Monde (Rungis) etc. .. Malgré l'absence - ou presque - d 'industrie du matériel, la France peut, grâce à la taille de son marché, payer des équipements modernes . Si depuis quelques années les grands groupes ont réalisé peu de nouvelles implantations (concentration oblige), la modernisation, impliquant une plus grande intervention de l'informatique à tous les stades de la production, a été toutefois importante. Elle a pour effet d 'augmenter la productivité eu personnel, de diminuer les pertes et erreurs et donc de mieux maîtriser les process de fabrication. Ces progrès sont souvent obtenus grâce à une plus grande spécialisation des usines. La faiblesse des équipements nationaux L'industrie de l'équipement n'est pas très 27 MEDIT N" 1/93 Tableau 8 Poids des principaux sous-secteurs des I.A.A. APE Sous secteurs 3501 Abattage du Bétail 8,8% 1,8% 3504 3505 Charcuterie Volaille 22,1% 15,9% 5,5% 6,0% 35 3610 Viande Industrie Laitière 13,6% 10,3% 3,4% 0,6% 3620 Crèmes glacées 36 Lait 3701 Conc. Fruits, Confitures 3702 Cons. Légumes (') 25,1% 11,0% 21,8% 22,1% 11,4% 1,0% 5,5% - 3703 Cons. Poissons (') 3704 Plats cuisinés 18,6% 26,7% 14,5% 37 Conserves 3810 Pain 22,6% 37,6% 9,8% 6,5% 3901 Meunerie 3902 Biscuiterie 15,5% 31 ,6% -5,5% 4,9% 3904 Pâtes alimentaires 3908 Nutrition Animale 24,7% 13,3% 6,9% -5,2% 18,8% - 13,4% 17,6% 30,0% 27,0% 5,9% 5,l oAl 2,5% 8,4% 1,9% 3,0% 11,8% 5,7% - 5,3% -9,8% 13,8% 5,70Al 5,4% 7,9% 4,8% 5,0% 8,6% 7,0% 8,0% 9,4% 4,1% 12,2% 10,6% 6,0% 6,6% 9,2% - 2,2% 8,7% 4,1% 38-39 4011 4012 4021 4031 Grain Fab. Huiles brut. Fab. Huiles raff. Sucrerie Chocolaterie 4032 4033 4034 4035 4036 4037 40 4101 4102 4103 4104 4105 4106 4107 4108 4109 4110 41 IAA Café et Thé Vinaigre et sauces Diététique-Enfance Entremets, desserts (') Bouillons (') Alim . divers Divers Distil. Alcool Eau de vie (') Apéritif alcoolisé Apér. à base vin Champagne Brasserie Cidrerie Jus fruits Bois. non alcool. Eaux minérales Boissons IAA VAHT/CAHT 20,7% 26,8°Al 32,8% 22,1% 28,6% 25,8% 24,6% 21,4% 33,0% 45 ,5% 29,6% 37,2% 37,9% 31,3% 20,2% 24,2% 40,8% 34,5% 19,0% CA CAF/CA Commentaires - 7,2oAl 3,8% - 0,9% -4,7% 3,3% 10,4% 7,5% 2,3% 13,6% 53,0% 8,5% 13,3% 4,0% 1,0% La baisse des prix explique la faible croissance du CA. La valeur ajoutée réell est plus élévée 2,5% Situation très différentes selon les entreprises 3,8% En 1991 , crise de surproduction, baisse des prix, et difficultés des entreprises 1,9% 2,0% Variable selon les métiers: collecte ou produits frais. Importance coopératives et multinationales 4,2% Croissance continue de la consommation . Secteur porteur 2,1% 6,7% Trés localisé au sud de la Loire 3,9% Point fort de Nord-Pas-de-Calais (Bonduelle MacCain Valfray) Peu de créations 1,2% Croissance ralentie, rentabilité trés variable selon les métiers 4,8% Secteur très porteur, à la limite de nombreuses activités, risque élevé 3,8% 3,7% Secteur encore trés mouvementé: croissance, innovation, nouveaux positionnements 2,7% Secteur en concentration, devenir lié à la réforme de la PAC 5,4% Grande diversité des produits, des gammes et des métiers, industrie légère 4,6% Multinationales ou artisanat; assez localisés 3,3% Les pet foods sont dynamiques et rentables. L'ali mentation du bétail est tributaire de la région Secteur trés concentré Idem Industrie lourde, liée au terroir Industrie légère, point fort du Nord. Croissance continue des volumes Industrie trés localisée (Ports). Les sauces sont toujours en croissance, secteur très concentré. Fort potentiel en diététique. Forte croissance des céréales pour déjeuner (cf USA) Stagnation des volumes Dvo-produits en croissance. Industrie lourde. Stagnation Trés localisé (Cognac ...) Développement de l'alcool de grain. Trés concentré. Croissance faible, localisation en région viticole . Sans commentaire. Point fort du Nord. Secteur très concentré. Sans commentaire Croissance rapide de la consommation et des importations. Croissance très rapide du marché. Sans commentaire. Sources: SCCES EAE Champ courant Elaboration AND. ') Croissance non significative (mouvements statistiques). importante en France: la technologie est donc en partie importée. cet état de fait est lié d 'une part à la faiblesse générale du secteur des biens d'équipements en France et d'autre part au développement tardif des lAA . Si ce n 'est pour l'orgueil nationale et la balance commerciale, cette situation n'est pas très alarmante. En effet, la technologie est souvent le fait de quelques offreurs mondiaux, ce qui égalise les conditions de concurrence. La différence se joue au niveau des firmes et de leur capacité à définir leurs besoins , à exploiter les innovations et les savoir-faire proposés par les offreurs de matériel. Par ailleurs, le secteur de l'ingénierie se porte mieux. 28 Qualifications-formation Un système de formation avant tout agricole Le système de formation agricole et alimentaire dépend en large partie de l'administration agricole. Près de 3000 ingénieurs agricoles et agro-alimentaires sortent chaque année des écoles spécialisées . La part des formations spécifiques à l'industrie alimentaire est toutefois assez faible (400 diplômés) mais Une partie toujours plus importante des ingénieurs agronomes ou agricoles et de vétérinaires s'orientent vers les lAA . De même, sont formés un grand nombre de techniciens supérieurs, agricoles, techniques ou commerciaux, dans divers établissements agricoles ou professionnels ou universitaires , ainsi que des employés du commerce spécialisé (boucherie, boulangerie). Certaines limites sont perceptibles, notamment en ce qui concerne la technologie, l'entretien et la conduite de matériels toujours plus sophistiqués. Le personnel d 'exécution est bien souvent sans qualification dans de nombreuses industries dont l'approche industrielle est encore proche du fordisme. La situation actuelle du marché du travail en France est telle que les employeurs ne connaissent pas de problèmes de recru tement à ce niveau. Une ressource humaine jeune, mais des dirigeants âgés L'essor récent des IAA (depuis 20 ans) fait que la ressource humaine - et notamment l'encadrement - est encore assez jeune. Les problèmes de succession dans certaines branches se posent toutefois: la génération des dirigeants qui ont crée et/ou développés les principaux groupes français arrivent à l'âge de la retraite, ou y seront d 'ici à dix ans. Ainsi, si l'encadrement se renouvelle ou s'est étoffé au fur et à mesure du développement, les leaders historiques sont désormais plus âgés: c'est une source de fragilité pour un système d'abord entrepreneurial. Le poids des differents soussecteurs des lAA Les tableaux 7 et 8 synthétisent le poids et·la structure des principaux sous secteurs retenus par la nomenclature officielle. Les structures industrielles Six catégories d'entreprises Le secteur alimentaire est un enjeu de plus de 624 milliards de francs. Des intérêts très divers, parfois divergents se disputent ce marché. On peut estimer que le chiffre d'affaires se répartit comme suit, entre six catégories d 'entreprises (cff. tableau 9 ). Malgré les imprécisions de notre estimation on retiendra quelques points clés: • Le poids prépondérant des firmes multinationales qui contrôlent 40% de l'activité totale, mais réalisent sans doute plus de la moitié de la valeur ajoutée et des profits en raison de leur positionnement stratégique (marques, oligopoles, produits transformés); • Les grandes multinationales et principalement BSN et NESTLE sont impliquées dans la plupart des secteurs les plus dégagés de «l'agricole". Le poids des marques, de la communication, de l'innovation-produit y est prédominant et constitue pour ces firmes dominantes l'un des meilleurs verrous. Ce modèle est d 'ailleurs recherché par la quasi totalité des entreprises, dont certaines constituent des cibles pour les grandes firmes, pour qu'elles défrichent de nouveaux segments ou technologie . En effet, la plupart des grandes firmes alimentaires ne sont pas des blocs unitaires, mais plutôt des confédérations de PME , qui partagent une res- MEDIT W 1/93 source financière , une puissance commerciale, une capacité de communication et une ressource humaine mais restent autonomes sur leur marché, leur produit et leur technologie . • L'émergence d'entreprises européennes constituées par extension des marchés et croissance externe dans l'espace européen. Ces firmes sont issues du développement récent des lAA (contrairement à des groupes anciens comme Nestlé). Elles sont souvent spécialisées sur un produit/secteur et n 'ont pas toujours une forme conglomérale; • Le secteur coopératif est important dans le lait, la viande (porc et bovin), l'alimentation animale, la conserverie de légumes , la meunerie. Ses stratégies de conquête de l'aval rencontrent des obstacles liés à la fois aux modes de gestion et de financement des coopératives. Les tendances à l'externalisation sont fortes et prennent plusieurs formes: accord de sous traitance avec des firmes privées qui se chargent de la fonction commerciales, ou, plus fréquemment, filialisation des activités industrielles dans le but de donner au management une souplesse comparable à celle du secteur privé . • Les firmes nationales sont celles qui contrôlent bien le marché français, ont pas encore franchi le pas d 'une implantation à l'étranger. cet état de fait est souvent lié à la situation sectorielle (viande , alimentation animale). Leur situation est vulnérable surtout pour les firmes travaillant majoritairement avec la distribution moderne qui est très concentrée. • Les firmes familiales à marché local et régional qui constituèrent naguère le vivier dont sont issues les entreprises européennes ou nationales sont nettement en perte de vitesse, handicapées par l'évolution technique, la moitié de la grande distribution, la globalisation des marchés . Ces firmes ont des possibilités stratégiques limitées. Dans le meilleur des cas (c 'est-à-dire lorsqu 'elles ne sont pas trop décalées techniquement) elles peuvent se positionner soit en tant que spécialistes (d'un produit, d'une gamme) soit en tant que sous traitant de la distribution moderne. Bien souvent les firmes familiales de petite taille qui contrôlent un savoir faire, une recette, un produit intéressant par sa technologie ou sa typicité ont été racheté par des groupes nationaux ou multi-nationaux. Le troisième cas est le plus fréquent: ces affaires familiales ne sont ni capables d 'êtres de bons sous traitants ni des proies pour les groupes, il leur reste à défendre pied-à-pied leur fond de commerce, ce qui ne réussit pas toujours et explique la disparition de nombreuses petites firmes, à l'occasion de chocs conjoncturels (crises sectorielles, succession). Bilan et perspectives Nous concIuerons sur quelques interrogations L 'industrie agro-alimentaire française vitelle son apogée? Les excédents extérieurs plafonnent quelque peu ; la PAC qui fut un élément très positif du développement des lAA, change et se réduit; la construction européenne modifie les données de la concurrence; le phénomène de décollage et d'expansion lié à une génération d'hommes INSEE Milliards de Francs +100r-------------------------~~~------------ 0 \1) <II ::l ·sr ] -100 \1) ~ ~ -200 ~ 1980 1970 1991 Grafico 2 - Solde commercial de l 'énergie, de l'industrie et de l 'agro-alimentaire (CFCE-APCA). et à l'essor du grand commerce donne des signes d 'essoufflement. Cet ensemble de faits indiquent que le système vit une époque charnière: la fin d 'un mode de croissance , lié à la fois à une philosophie agricole productiviste et à la mise en place de la civilisation suburbaine, et donc de substitution de l'artisanat alimentaire et du travail domestique par l'industrie. Quels seraient les nouvelles justifications sociales du développement agro-industriels? La recherchedéveloppement (notoirement insuffisante); l'européanisation, l'appel des Pays de l'Est; de nouveaux défis techniques (tels que l'environnement) seront-ils de nouveaux moteurs suffisants pour offrir aux lAA Françaises de nouveaux champs de développement? La diversité de ses métiers, de ses capitaux, de ses régions , de ses marchés est un gage d'une prospérité future: la liaison entre les branches est faible et la perspective d'une conjoncture désastreuse en tout point est peu crédible. C'est pourquoi l'alimentaire attire . Les récentes batailles autour de Perrier en sont un symptôme et la légendaire fragilité financière des lAA Françaises prête le flanc à de telles avancées. Ainsi ; au Tableau 9 Catégories d'entreprises. Mrs Francs % Multinationales (') Européennes (2) Nationales (3) Régionales et locales Coopératives Distribution 170 80 60 170 130 15 27,2% t2,8% 9,6% 27,2% 20,8% 2,4% Totaux 625 100,0% Source: Estimations AND d'après SCEES. (') par exemple: Nestlé, BSN, Unilever, Pemod-Ricard, LVMH, Seagram, CPC, Ferruzzi, Mac Cain, Roquette, AVB, Pilstriall, General MiIIs, Campbell Soup , Roquefort, Heineken, Purina, Unisabi, Quaker, Kellogs, General Foods, Cadbury,... (') ~ar exemple: Doux, Bonduelle, Besnier, Gardini, Unichips, Andros, Mane-Bnzard , Jacquet, Balhsen, Hendrix, Vamo, Royal Canin , Cantalou, Saupiquet, Soufflet, Grands Moulins de Paris, Euralim, COintreau,... (') par exemple: Reybier-Aoste, Fleury-Michon , Bourgoin , Ortiz, Générale de conserve, LOC, Arrivée, Guyomarch ', Réa, Tipiak, Lustucru-R&C, Senoble, Prédault... plan financier , comme au plan commercial, un cycle parait s'achever. La fin du modèle entrepreneurial issu du capitalisme rural est annoncée . Différentes questions se posent: les firmes auront-elles le même dynamisme si elles sont gérées selon un modèle plus bureaucratique? L'innovation résultera+ elle de processus mieux maîtrisés et moins aléatoires? Au-delà des industries, l'européanisation se jouera via la distribution. Les mouvements e~core timide d'internationalisation, de developpement des enseignes au-delà des frontières nationales vont très certainement s'amplifier. Dès lors il apparaîtra plus clairement qu 'agriculture, industrie, et distribution sont - pour leurs composantes échappant au contrôle transnational les différentes parties d'un même système, dont la compétitivité réelle sera mesurée à l'aune des échanges transfrontaliers. La France profitera-t-elle d 'une distribution expansive et porteuse d 'un modèle alimentaire français, comme la Bretagne a profité des chaînes commerciales d'inspiration bretonne? Enfin, on s'interrogera sur le devenir des régions méditerranéennes. Faibles dans le système agricoles , faibles dans le système alimentaire, les zones méditerranéennes Provence et Languedoc sont des marchés importants. Il y a peu de chance de voir se re-développer des IAA importantes dans cette région en raison du déclin de l'agriculture (dont les plus beaux fleurons - vins et fruits - participent d 'ailleurs peu à l'industrie) et de l'effet négatif qu'implique la relative absence d 'IAA . Cependant la France - le plus nordique des pays latins et réciproquement-, propose un modèle d 'industrialisation de la production alimentaire respectant les diversités et spécificités (régionales , sectorielles, culturelles, techniques ... ) au sein duquel l'aliment est un bien culturel avant d 'être un nutriment et ou la recherche de la compétitivité va de pair avec le respect du plaisir du consommateur. C'est assurément daris cette voie qu'il faut trouver un modèle méditerranéen d 'industrialisation. • 29