Convention des Nations-Unies sur les contrats de vente

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Convention des Nations-Unies sur les contrats de vente
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3 QUESTIONS La Convention de Vienne du 11 avril 1980 sur la vente internationale
de marchandises - Veille par Pauline Le More
La Semaine Juridique Entreprise et Affaires n° 25, 21 Juin 2012, 392
3 QUESTIONS La Convention de Vienne du 11 avril 1980 sur la vente
internationale de marchandises
Veille par Pauline Le More avocate, LeMore Avocats
VENTE
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1. Quel avenir pour la Convention de Vienne face à la proposition de règlement consacrée à un droit
commun européen de la vente ?
Depuis fort longtemps, la Commission européenne souhaite instaurer un droit commun européen de la vente
(sur l'historique, V. not. G. Paisant, La proposition d'un droit commun de la vente ou l'espéranto contractuel
de la Commission européenne : JCP G 2012, 560). Ce projet connaît un certain aboutissement puisqu'a été
publiée, le 11 octobre 2011, la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à un
droit commun européen de la vente (COM(2011)635 final, ci-après « la proposition de Règlement »).
On peut dès lors se demander si la Convention des Nations Unies sur les contrats de vente internationale de
marchandises du 11 avril 1980 (ci-après « la Convention de Vienne » ou « CVIM »), qui traite également du
droit international de la vente, est encore d'actualité.
Or, la Convention de Vienne fait partie intrinsèquement du droit français. Elle a vocation à le rester, même si
le projet de droit européen commun de vente entrait en vigueur dans quelques mois. Comme la
jurisprudence de la Cour de cassation le rappelait (Cass. com., 13 sept. 2011 n° 09-70.305 : JurisData n°
2011-018775), la Convention de Vienne constitue « le droit substantiel français » et institue « un droit
uniforme sur les ventes internationales de marchandises ».
Par conséquent, la Convention de Vienne a encore un bel avenir devant elle, y compris pour les États
contractants qui sont par ailleurs membres de l'Union européenne et à l'égard desquels le futur règlement du
droit commun européen de la vente aura également vocation à s'appliquer directement.
L'actualité le laisse présager. Le 1er juin 2012, la Finlande, État membre de l'Union européenne depuis
1995, a retiré sa déclaration faite lors de la conclusion de la Convention de Vienne en 1981 de ne pas être
liée par les dispositions de la Convention consacrées à la formation du contrat (UNCITRAL, Communiqué
UNIS/L/162, 22 mai 2012).
2. En quoi la Convention de Vienne se distingue-t-elle de la proposition de règlement ?
La Convention de Vienne diffère de la proposition de règlement par de nombreux aspects et notamment en
ce qui concerne :
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son champ ratione loci, d'une part. La Convention de Vienne ne se limite pas à l'espace
européen. À l'heure actuelle, la Convention compte 78 États parties. La dernière adhésion date
du 24 février 2012. Il s'agit de Saint Marin (UNCITRAL, Communiqué UNIS/L/160, 24 févr.
2012) ;
son champ ratione materiae, d'autre part. La Convention de Vienne et le futur droit commun
européen de la vente ne traitent pas nécessairement des mêmes domaines juridiques du droit
la vente de marchandises. À titre d'exemple, le projet de règlement traite de la vente à la fois
entre professionnels, pour autant que l'une des parties au moins soit une petite ou moyenne
entreprise, et entre professionnels et consommateurs (Projet règlement, art. 7). La Convention
de Vienne, quant à elle, « ne régit pas les ventes de marchandises achetées pour un usage
personnel, familial ou domestique » (CVIM, art. 4, al. 1).
Mais on aurait tort d'appréhender uniquement la Convention et la proposition de règlement en les opposant
l'une à l'autre. Outre le fait que la Convention de Vienne est une source incontestable d'inspiration de la
proposition de règlement, on peut penser que l'interprétation de cette dernière sera également influencée par
celle actuellement mise en uvre par les juridictions nationales et les arbitres confrontés à l'application
concrète des dispositions de la Convention de Vienne.
3. Existe-t-il des modalités de règlement des différends particulièrement adaptées à l'application des
dispositions de la Convention de Vienne ?
Tant le juge national que l'arbitre sont susceptibles d'être confrontés aux questions d'applicabilité et/ou
d'application des dispositions de la Convention de Vienne à un différend (par ex. Cass. com, 7 févr. 2012, n°
10-30.912).
Il est vrai cependant que la Convention de Vienne jouit d'un succès indéniable auprès des arbitres
internationaux. Clause de droit applicable visant expressément la Convention de Vienne et clause
compromissoire font bon ménage dans un contrat international.
Et de fait, praticiens et théoriciens louent la complémentarité entre Convention de Vienne, d'une part, et
arbitrage, d'autre part. Les statistiques mentionnées par le Professeur Draetta soulignent cet engouement
(U. Draetta, La convention des Nations Unies de 1980 sur les contrats de vente internationale de
marchandises et l'arbitrage : RDAI/IBLJ, n° 2, 2012, pp. 193-205].
Sur 512 sentences arbitrales résultant de la base Pace CISG, il indique que :
57 % des cas appliquent la Convention de Vienne de manière autonome ;
22 % des cas appliquent la Convention de Vienne sur le fondement du droit international privé ;
11 % des cas appliquent la Convention de Vienne en raison de son invocation expresse par les
parties ;
2 % des cas fondent l'application de la Convention de Vienne sur le principe général du droit du
commerce international ; et
8 % des cas ne justifient pas son application au litige.
En pratique cependant, l'application de la seule Convention de Vienne ne suffit pas. En raison de ses
lacunes (la question du transfert de propriété n'est, par exemple, pas traitée), il est recommandé de prévoir
un droit national « subsidiaire ».
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De façon complémentaire ou autonome, qu'il s'agisse du contentieux arbitral ou judiciaire, la Convention de
Vienne constitue et demeure un instrument juridique supranational incontournable.
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