musiques pour luth - Médiathèque de la Cité de la musique
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musiques pour luth - Médiathèque de la Cité de la musique
cité de la musique François Gautier, président Brigitte Marger, directeur général musiques pour luth Du luth médiéval au grand luth baroque à treize chœurs, nul autre instrument n’aura contribué de plus éloquente manière à l’expression des civilisations européennes de la Renaissance et du siècle des Lumières. Cette série de concerts tente d’en retrouver les principales essences : pour chaque époque, luth soliste, luth et voix, luth et ensemble instrumental évoquent les richesses de la virtuosité et de la contemplation à travers l’esthétique d’un monde humaniste. Un concert consacré au oud permet de se souvenir de la parenté du luth occidental avec le luth oriental, tout en évoquant les musiques du monde d’aujourd’hui. Le 16 mai, un forum musical invite le public à suivre le voyage du luth occidental du XIIe au XVIIIe siècle. Pour les spécialistes et les fervents amateurs, un colloque (13, 14 et 15 mai) vous convie à participer aux débats des toutes dernières recherches scientifiques - musicologie, esthétique, organologie, iconographie - sans oublier les techniques de l’interprétation, les réflexions sur l’enseignement et l’avenir du luth. Pascale Saint-André responsable du service culturel du musée de la musique samedi 9 mai 16h30 / amphithéâtre du musée le luth baroque Ennemond Gaultier dit le Vieux (ca. 1575-1651) Pièces en ré mineur prélude, courante, canaries, tombeau de Mesangeau, courante, gigue La Poste Jean-Sébastien Bach (1685-1750) Sonate en sol mineur (version pour luth d’après la sonate pour violon seul BWV 1001) adagio, fuga, siciliana, presto Sylvius-Leopold Weiss (1686-1750) Partita en sol majeur prélude, toccata, fuga, sarabande/un poco andante, allegro Hopkinson Smith, luth Joël van Lennep (1980) durée du concert : 1 heure musiques pour luth le luth baroque Le premier tiers du XVIIe siècle marque un tournant décisif dans l’histoire du luth en France. Au cours de cette époque de recherches, l’instrument, transformé dans sa facture, son accord et son style d’exécution, donna naissance à un langage idiomatique en parfaite harmonie avec la sensibilité précieuse du temps. La dévotion que suscita le luth chez nos compatriotes fut telle que l’école française exerça une sorte d’hégémonie sur l’Europe entière. Pourtant, vers la fin du siècle, l’évolution du goût aura raison de cet art qui demeurait hermétique au non initié. C’est donc dans un esprit bien différent que le luth dut poursuivre sa carrière lorsque les pays germaniques lui offrirent une nouvelle terre d’élection. Ennemond Gaultier dit le Vieux (ca. 1575-1651), pour le distinguer de son cousin Denis, peut être considéré comme le père fondateur et l’inspirateur de l’école française du luth du XVIIe siècle. Originaire du Dauphiné, il naquit vers 1575, et demeura pendant plus de trente ans au service de Marie de Medicis dont l’exil définitif, en 1631, mit un terme à sa carrière parisienne.Toutes les hyperboles ont été épuisées pour célébrer l’artiste et perpétuer le souvenir de ce personnage haut en couleurs. Il était, dit-on, fort chiche de ses pièces, mais on doit au soin de ses disciples et admirateurs d’en connaître aujourd’hui près de cent cinquante de sa façon. De par sa date de naissance, Gaultier fut à la fois le témoin et l’acteur d’une évolution dont son œuvre reflète toutes les étapes. Les pièces que l’on va entendre sont destinées à l’instrument à onze rangs de cordes adoptant le nouvel accord (ré mineur) introduit en France vers 1635. Le prélude non mesuré qui ouvre cette « suite », d’une harmonie riche et serrée, teintée de chromatismes, provient d’une source relativement tardive où il figure sans nom d’auteur. Certaines allusions fugitives au Tombeau qui va suivre semblent suggérer le nom de Gaultier : il n’en est pas indigne - et l’on ne prête qu’aux riches. Après une fluide courante et les canaries au rythme capricant, succède l’émouvant hommage que le luthiste rend à son confrère René Mesangeau († 1638), allemande grave « qu’on ne se lassait pas d’entendre », et dont le motif initial évoque celui de célèbres Lacrimae. La Poste, enfin, va entraîner l’auditeur sur les routes cahoteuses qui le conduiront hors de nos frontières. 2 |cité de la musique musiques pour luth Les prodiges par lesquels s’illustra Gaultier, Sylvius-Leopold Weiss (1686-1750) les égala, les surpassa même, si l’on en croit les récits de ses contemporains. Les quelque six cents pièces qu’il nous a laissées - non comprises les œuvres pour ensemble dont seule subsiste la partie de luth - justifient l’admiration que, longtemps après sa mort, on portait encore à « ses compositions écrites dans un style pur et dense, proche de celui des pièces pour clavier du défunt J. S. Bach ». Issu d’une famille de Breslau (Wroclaw),Weiss attira l’attention de plusieurs princes en raison de sa maîtrise instrumentale. Le long séjour qu’il fit à Rome, dans la suite du prince Aleksander Sobieski et de sa mère, l’extravagante « Regina di Polonia », côtoyant les Scarlatti, son compatriote Haendel et probablement Corelli, sera d’une influence décisive sur son évolution artistique. Lorsqu’en 1718 il accède au poste très convoité de Cammer Lautenist de la Chapelle d’Auguste le Fort, à Dresde, il appartient déjà au gotha musical de l’Empire. Les œuvres de cette époque, écrites pour luth à treize « chœurs », font voisiner les éléments de la suite classique française (allemande, courante, sarabande, gigue) et les mouvements abstraits issus de la sonate italienne auxquels Weiss accordera une importance croissante. Ici, un court Prélude d’allure improvisée sert d’introduction au diptyque Toccata e Fuga, d’autant plus évocateur de Bach que le thème de cette fugue fera immédiatement songer au « Gratias » de la Messe en si mineur. La Sarabande, portée par le mouvement régulier de la basse, est un long arioso défiant la nature même de l’instrument, rebelle au cantabile. L’œuvre s’achève par un morceau de bravoure digne des virtuoses de l’archet auxquels, dit-on,Weiss n’hésitait pas à se mesurer. Tout aura été dit à propos des Sei Solo à Violino senza Basso accompagnato composés par Bach en 1720. Ce monumental microcosme de science musicale qui épuise toutes les ressources théoriques et techniques jamais imaginées pour les quatre cordes d’un instrument à archet, dut cependant attendre la fin du siècle dernier pour que Joseph Joachim mette un terme au statut d’études d’exécution transcendante ou d’œuvre abstraite qui, pendant longtemps, avait été le sien. La richesse des compositions est telle que Bach lui-même les jouait souvent au clavicorde et réalisa une version pour clavier de certaines de ces pages. Dès lors, on comprendra le désir bien légitime des luthistes de considérer les œuvres pour violon ou pour vio- notes de programme |3 musiques pour luth loncelle seuls dans la perspective de leur instrument - d’autant que la voie avait déjà été tracée par leur lointain prédécesseur, Johann Christian Weyrauch, que Bach connut à Leipzig. Un exemple de sa main provient précisément de la première sonate du recueil, dont la fugue, en dépit des maladresses du transcripteur, figure au catalogue des œuvres originales de Bach (BWV 1000). Au terme d’une longue fréquentation de l’œuvre de Bach, Hopkinson Smith s’est penché à son tour sur le problème de l’adaptation au luth des compositions originellement destinées au violon ou au violoncelle. Les versions qu’il a réalisées jusqu’ici se caractérisent par leur fidélité au texte (fut-ce au prix de redoutables difficultés techniques) comme à l’esprit de l’œuvre. De telles versions sont de véritables recréations au cours desquelles la musique apparaît sous un nouvel éclairage : le contrepoint y gagne en clarté, l’harmonie en plénitude, les basses une présence qui n’était alors que virtuelle. En outre, l’expérience acquise au contact permanent des luthistes contemporains de Bach - et de Weiss en particulier - contribue pour une bonne part à l’aspect idiomatique du résultat, et donc à l’expression naturelle de la musique. Claude Chauvel 4 |cité de la musique dimanche 10 mai - 15h / amphithéâtre du musée le luth et la musique de chambre Carl Kohaut (1726-1784) Concerto en fa majeur pour luth, deux violons et violoncelle allegro, adagio, tempo di minuetto Johann-Friedrich Fasch (1688-1758) Concerto en ré mineur pour luth, deux violons, alto (et basse continue) [ allegro moderato ] , andante, un poco allegro Joseph Haydn (1732-1809) Cassation en ut majeur pour luth, violon et violoncelle, Hob. III : 6 presto, minuetto/trio, adagio, finale/presto Joachim-Bernhard Hagen (ca. 1720-1787) Concerto en la majeur pour luth, deux violons et violoncelle allegro moderato, largo, allegro Hopkinson Smith, luth Joël van Lennep (1980) Chiara Banchini, David Plantier, violons David Courvoisier, alto Roel Dieltiens, violoncelle durée du concert : 1 heure musiques pour luth le luth et la musique de chambre Alors que s’annonçait son propre déclin dans une France qui lui avait rendu un véritable culte pendant le XVIIe siècle, le luth connut une nouvelle existence dans les pays germaniques au cours des générations suivantes. D’abord héritiers des maîtres français, les luthistes succombèrent à l’engouement général pour l’italianità, puis aux charmes de ce que l’on a appelé le gemischter Stil : les derniers éléments de la « suite » cédèrent le pas aux sonates et la voix délicate du luth se mêla volontiers à celle d’autres instruments lors de conversations, voire de joutes concertantes souvent audacieuses. Qu’elles soient expressément écrites pour l’instrument ou adaptées d’œuvres contemporaines, les œuvres de ce programme constituent un panorama éloquent de ce que fut la musique de chambre avec luth jusqu’à l’aube du classicisme viennois. Tempérament inquiet et solitaire, Johann-Friedrich Fasch (16881758) fut reconnu de son vivant comme l’un des créateurs les plus originaux de son temps. Ses nombreuses pérégrinations le conduisirent en 1727 à la cour de Dresde, et c’est probablement au contact de S.-L.Weiss que naquit l’idée du présent concerto. Sans doute pressé par le temps, il choisit de remodeler très librement l’un de ses concertos pour hautbois de type vénitien. La partition autographe trahit l’urgence et permet de suivre presque pas à pas les étapes de cette transmutation. Le luth (dont la partie est rédigée en notation usuelle et non en tablature), tour à tour accompagnateur et soliste, joue de volubiles figurations qui ne sont pas sans rappeler, parfois, celles que confiait Vivaldi à ce même instrument. La biographie du luthiste hambourgeois Joachim-Bernhard Hagen (ca. 1720-1787) demeure d’une regrettable pauvreté. A Bayreuth où il se rendit afin d’étudier auprès du Capellmeister Johann Pfeiffer, il trouva un climat propice à l’épanouissement de son art au sein de la chapelle musicale dont l’âme était la margravine Wilhelmine, sœur de Frédéric II, elle-même compositrice de talent et fervente luthiste. La musique de Hagen est injustement négligée par la plupart des interprètes d’aujourd’hui. Pourtant, la vingtaine d’œuvres qu’il nous laisse, d’une grande virtuosité instrumentale, révèle un musicien à l’invention mobile, dont le lyrisme est annonciateur des subtilités du classicisme. Ces qualités se retrouvent dans le Concerto en la, daté 6 |cité de la musique musiques pour luth du 20 janvier 1759, où l’intérêt est constamment maintenu en éveil par la manière dont Hagen sait conduire le discours des quatres instrumentistes autour du personnage principal. Carl Kohaut (1726-1784), natif de Vienne, hérita par son père de la riche tradition des luthistes bohémiens groupés autour de la figure emblématique du comte Losy. Sa position de secrétaire à la chancellerie de la cour impériale lui ouvrit les portes de l’aristocratie mélomane et lui permit d’étudier les partitions de Bach et de Haendel grâce à la protection de Gottfried van Swieten - auquel Mozart devra plus tard une expérience analogue. Kohaut n’est pas seulement l’ultime et le plus célèbre des luthistes viennois : outres les œuvres écrites pour son instrument, il est l’auteur de symphonies, de cantates et de musique de chambre qui attendent encore leur résurrection. Parmi la dizaine de concertos pour luth de Kohaut, celui-ci, composé vers 1760, est très représentatif de son style élégant comme de l’esprit du divertimento qui animait ses contemporains viennois. Les triolets, dont les compositeurs font alors un ample usage, impriment ici un élan irrésistible aux syncopes de l’allegro et retiennent doucement la mélodie de l’adagio dans un climat de langueur pudique. Le Tempo di menuetto apporte une touche piquante à ce divertissement plus soucieux de vivacité que de virtuosité. En dépit d’un tableau fameux censé le représenter jouant du luth, tandis que Mozart compose à sa table, saurons-nous jamais quels rapports Haydn entretint avec l’instrument ? Quoi qu’il en soit, six œuvres (dont deux d’une authenticité problématique) viennent enrichir le catalogue de sa musique de chambre. A vrai dire, il s’agit d’adaptations qui ont pu voir le jour dans l’entourage du Baron van Swieten « chez lequel se réunissaient souvent le violoniste Starzer et le luthiste Kohaut pour jouer de la musique de Haydn ». La Cassation en ut, sans doute la plus réussie parmi ces nouvelles moutures, a pour modèle le Quatuor à cordes op 1, n° 6 (ca. 1757/59), de même tonalité, amputé du second menuet et de son trio. La sonorité claire de l’ensemble fait admirablement ressortir le caractère naturel et enjoué de cette brève sérénade, lui donne une délicate couleur nocturne dans l’adagio (violon con sordina sur fond de pizzicati) qui est l’une des plus belles pages du jeune Haydn. C. C. notes de programme |7 mercredi 13, jeudi 14 et vendredi 15 mai / amphithéâtre du musée colloque Les luths en Occident communications : Hommes et œuvres (mercredi 13 à 11h et 14h30) Les sociétés de luth (mercredi 13 à 17h45) Sources (jeudi 14 à 9h) L’interprétation (jeudi 14 à 11h45) Organologie (jeudi 14 à 14h30) La vihuela (jeudi 14 à 16h45) Iconographie musicale (vendredi 15 à 9h) Esthétiques, formes et styles (vendredi 15 à 11h30 et 14h30) L’avenir du luth et l’enseignement (vendredi 15 à 15h45) présidents de séances : Victor Coelho, Joël Dugot, Dinko Fabris, François Lesure jeudi 14 mai - 20h / amphithéâtre du musée la vihuela à la cour d’Espagne Luys Milan El Maestro (Valencia, 1535-36) (extraits) Fantasia 4 del segundo tono Fantasia 3 del primer tono Fantasia 13 de consonancias y redobles del primer tono Fantasia 12 de consonancias y redobles del tercero y quarto tono Pavana 2 del tercero y quarto tono Fantasia 18 de consonancias y redobles del septimo y octavo tono Pavana 4 del septimo y octavo tono Alonso Mudarra Tres Libros en Cifra para Vihuela (Sevilla, 1546) (extraits) Tiento del tercero tono Fantasia del tercero tono Glosa sobre el Kyrie postero de una Misa de Josquin que va sobre Pange Lingua, del tercero tono Fantasia que contrahaze la harpa en la manera de Ludovico Hopkinson Smith, vihuela (instrument de Joël van Lennep, 1975) l’archicistre improvisation sur La Spagnoletta Girolamo Frescobaldi Aria Claudio Monteverdi L’Orfeo (extrait) Anne Quentin, soprano Lucien Kandel, ténor Pascale Boquet, archicistre entracte chansons et danceries à la cour de François I er anonyme Ta bonne grace roquelay (1536) Basse danse Ta bonne grace et tourdion (1542) Gosse Je file quand Dieu me donne de quoi (1545) anonyme Gaillarde (1530) Dominique Phinot Si le mien cœur (1548) anonyme Pavane et gaillarde (1530) Du fond de ma pensée (Psaume 130, texte de Clément Marot) Didier Lupi Susanne un jour (1548) Jan-Pieterszoon Sweelinck Susanne un jour John Dowland Susanna gaillard Claudin de Sermisy Jouissance vous donneray (1528) Thoineau Arbeau Basse danse Jouissance Pierre Certon O Madame perds je mon temps Pierre Sandrin Puisque vivre en ser vitude (1550) Claude Ger vaise Allemande (1557) Jacotin Mary je songeois (1532) anonyme Branle gay Mary (1547) Tourdions (1547) Doulce Mémoire : Denis Raisin-Dadre, direction, flûtes à bec Anne Quentin, soprano Lucien Kandel, ténor Pascale Boquet, luth et guitare Renaissance Freddy Eichelberger, clavecin durée du concert : 1 heure 40 musiques pour luth vihuela L’année 1536 marque une étape importante dans l’histoire de la musique pour luth. Plusieurs éditions portent à la connaissance du public les œuvres de Francesco da Milano, Albert de Rippe, Pietro Paolo Borrono et Marco dall’Aquila en Italie, et d’Hans Newsidler à Nuremberg. A Valence, Luys Milan publie son Libro de musica de vihuela Intitulado El maestro. Premier ouvrage consacré à la vihuela, El maestro est singulier à maints égards. Milan y classe les pièces pour instrument seul en fonction de leur modalité. Il définit la fantaisie comme une production de l’imagination (contrairement à la transcription et à la glose ornementale absentes du Maestro). En ce sens, les pavanes et les tientos sont aussi des fantaisies. Milan fournit des indications de tempo et de rubato, particulièrement précieuses pour l’interprétation des fantaisies. Certaines reposent sur l’écriture en imitations, d’autres sur les enchaînements d’accords (consonancias). Dans les fantasias de redobles, les guirlandes de diminutions dominent. Un genre mixte oppose et combine consonancias et redobles, que Milan recommande de jouer respectivement lentement et rapidement. Par sa façon de construire les mélodies, de varier les textures, de répartir les voix, par sa couleur instrumentale, le vihueliste se distingue de ses contemporains européens et de ses successeurs espagnols. Son style témoigne d’une tradition disparue, dérivée de l’improvisation et de l’emploi du plectre. Dans le même temps, les techniques compositionnelles tendent à se rapprocher de celles du contrepoint savant, et le jeu de la main droite sur l’instrument gagne en habileté. L’œuvre de Milan participe aussi de cette évolution. Dix ans après El maestro, Alonso Mudarra publie à Séville Tres libros de musica en cifra para vihuela. Par rapport à Milan, il appartient à une seconde génération d’instrumentistes, s’inspirant davantage de l’écriture vocale dans leurs compositions. L’œuvre de Mudarra est considérable, tant par sa qualité que par sa variété. Les deux premiers des Tres libros contiennent des tientos, des fantaisies, des diferencias, des danses, des gloses et des transcriptions de polyphonies vocales, le troisième étant consacré aux pièces pour voix et vihuela comme l’était déjà une partie du Maestro. Dans le second 12 |cité de la musique musiques pour luth livre, les compositions sont groupées par mode. Au sein de chaque série, la succession tiento - fantaisie - glosa - éventuellement fantaisie finale suggère une exécution enchaînée. Le tiento, très court, prélude à la fantaisie, dans laquelle Mudarra provoque souvent la dissonance et fait preuve d’une certaine audace sur le plan modal.Tirée du premier livre, la fantasia que contrahaze la harpa en la manera de Ludovico est unique en son genre. Dans ces variations sur la folia, Mudarra rend hommage au harpiste de Ferdinand II, célèbre pour son jeu chromatique sur la harpe diatonique. Les Tres libros de musica en cifra para vihuela révèlent un compositeur complet, alliant la connaissance du contrepoint vocal et la maîtrise instrumentale, l’innovation et le raffinement. En 1555, Juan Bermudo le considère comme l’un des meilleurs vihuelistes de son temps. chansons et danceries au temps de François I er « Les Français connaissent seulement la noblesse des armes [...], ils n’apprécient pas les lettres », déplorait Castiglione dans son Livre du Courtisan. Mais « si la bonne fortune permet que Monseigneur d’Angoulême [...] succède à la couronne [...], de même que la gloire des armes fleurit et resplendit en France, de même celle des lettres devra y fleurir pareillement avec un éclat comparable ». Et en effet, le règne de François Ier (1515-1547) sera celui de la Renaissance française, née de la fusion entre les cultures de la France gothique et de l’Italie de la Renaissance. Le Roi exerce ainsi sur les Lettres, les Arts et les Sciences une influence légendaire. Il attire des artistes aussi grands que Léonard de Vinci et Benvenuto Cellini, forme l’Ecole de Fontainebleau ainsi que le Collège de France et la Bibliothèque Royale. C’est aussi à cette époque que des poètes tels que Clément Marot, Mellin de Saint-Gelais et Pierre de Ronsard témoignent d’un intérêt renouvelé pour les modèles classiques. La vie musicale est également florissante, en particulier dans la capitale. Les musiciens du Roi occupent une place considérable : membres de l’Ecurie, les Trompettes jouent surtout lors des grands rassemblements ; les Hautboys (joueurs de chalémies, italiens pour la plupart) accompagnent les danses de cour. La Chambre se compose d’un organiste, un luthiste, de chanteurs et éventuellement de violistes. notes de programme |13 musiques pour luth Sans doute exécutent-ils les chansons nouvelles de Sermisy, Janequin et leurs contemporains. La musique instrumentale de soliste connaît aussi un développement sans précédent, en particulier avec le luthiste Albert de Rippe. La Chapelle est l’institution royale la plus sollicitée. Les chanteurs assurent le service des messes quotidiennes et des autres cérémonies religieuses. De nombreux compositeurs de chansons, parmi les plus grands, occupent un poste à la Chapelle Royale à un moment de leur vie. On peut citer Sandrin, Certon et surtout Sermisy qui en obtient la direction en 1532. La carrière de ces deux derniers passe aussi par la Sainte-Chapelle, l’autre grande institution ecclésiastique de Paris. La renommée des « chansons nouvelles » doit beaucoup à Pierre Attaingnant, imprimeur du Roi et premier éditeur de musique en France. Les meilleures d’entre elles sont mises en tablatures de luth et de clavier (« orgues, espinettes et manicordions »). Elles inspirent des basses danses, des tourdions ou encore des branles. Grâce à Attaingnant, les premières mises en musique des psaumes traduits en français par Clément Marot sont portées à l’attention du public. Pendant le règne de François Ier, un second foyer musical d’importance se développe à Lyon, avec notamment Pierre Colin, Dominique Phinot, Pierre de Villiers et Didier Lupi. Œuvre de ce dernier, la chanson spirituelle Susanne un jour connaît une fortune exceptionnelle en Europe. Des compositeurs tels que Lassus ou Sweelinck utilisent son ténor (voix intermédiaire). A son tour, parmi d’autres, Dowland emprunte la chanson de Lassus. Cette façon de faire revivre un matériel en le transformant est une attitude musicale caractéristique de la Renaissance. Véronique Lafargue K 14 |cité de la musique samedi 16 mai - 15h / amphithéâtre du musée forum musical Petite histoire du luth des origines au XVIII e siècle Le luth semble descendre en filiation directe de l’instrument persan ou arabe appelé oud, introduit en Espagne aux XIIe et XIIIe siècles, à la faveur des Croisades puis des relations commerciales entre Venise et le Proche-Orient. Sa forme définitive fut adoptée à la fin du XIVe siècle. Nul autre instrument n’aura contribué de plus éloquente manière à l’expression des civilisations européennes de la Renaissance et du siècle des Lumières. Ce forum musical vous propose un voyage à travers le passage du luth en Occident, le luth médiéval, le luth de la Renaissance, le luth de l’école française baroque et le luth baroque allemand. Débats, commentaires, documents visuels et sonores et moments musicaux accompagneront ce voyage, tant organologique qu’historique. avec la participation de : Claude Chauvel, Dinko Fabris, Philippe Gonnaud, musicologues Joël Dugot, technicien de restauration du musée de la musique Bernard Revel, luth médiéval Eugène Ferré, luth Renaissance Hopkinson Smith, luth baroque Pascal Monteilhet, théorbe dimanche 17 mai - 15h / amphithéâtre du musée le luth médiéval « autour du Codex Faenza » Istampitta Ghaetta (anonyme italien XIVe siècle, Ms de Londres, British Museum) (instrumental) Non avrà ma’ pietà (Francesco Landini, ballata) (vocal) Non ara may pietà (anonyme, Codex Faenza) (instrumental) De toutes flours (Guillaume de Machaut, ballade) (vocal) De tout flors (anonyme, Codex Faenza) (instrumental) Che pena è quest’al cor (Francesco Landini, ballata) (vocal) Che pena questa (anonyme, Codex Faenza) (instrumental) Or sus, vous dormés trop (anonyme, Codex Faenza) (instrumental) [Or sus, vous dormés trop] (anonyme XIVe siècle) (vocal) Constantia (anonyme, Codex Faenza) (instrumental) Honte, paur (anonyme, Codex Faenza) (instrumental) Honte, paour, doubtance (Guillaume de Machaut, ballade) (vocal) [estampie] Isabella (anonyme italien XIVe siècle, Ms de Londres, British Museum) (instrumental) La plus belle (Nicolas Grenon) (vocal) Mit ganczem Willen (anonyme, Staatsbibl. de Berlin) (instrumental) Ensemble Faenza : Marcot Horvat, direction, chant, luth, citole, vièle Malcolm Bothwell, chant, vièle Raphaël Boulay, chant Marion Fourquier, harpe Magali Imbert, flûte à bec, percussions Bernard Revel, luth, guiterne Karl Heinz Schickhaus, dulcimer concert sans entracte, durée : 1 heure concert enregistré par France Musique (diffusion le 29 juin à 20h) musiques pour luth a utour du Codex Faenza Les manuscrits musicaux du Moyen-Age, du moins jusqu’au XIVe siècle inclus, nous ont transmis un répertoire essentiellement vocal, sacré ou profane, de sorte que l’on connaît très peu de sources de musique proprement instrumentale avant le début du XVe siècle. Le codex conservé en Italie à la Bibliothèque de Faenza peut être considéré comme le plus important de ces premiers témoignages de notation instrumentale, tant par le nombre de pièces que par la diversité des répertoires qui s’y trouvent représentés. En marge d’ajouts tardifs, il contient en effet à la fois quelques pièces liturgiques, parmi lesquelles les premiers fragments de messe pour orgue, mais surtout de nombreuses paraphrases de chansons polyphoniques françaises et italiennes du XIVe siècle, connues par d’autres sources dans leur version vocale. La reconstitution de l’ordre initial de ce corpus, qu’un mauvais assemblage des feuillets a rendue nécessaire, révèle d’ailleurs que les pièces étaient initialement regroupées selon une distinction de styles nationaux : la première partie était consacrée au répertoire français, la seconde au répertoire italien. Ces deux ensembles, comprenaient en outre chacun une messe incomplète sur le même cantus firmus emprunté au plain-chant grégorien, et se concluaient respectivement par un Benedicamus Domino, confirmant le projet d’une organisation précise du recueil. Les principales formes de la poésie lyrique du XIVe siècle y sont représentées, à commencer par la ballade, dans le groupe des chansons françaises : genre majeur de ce que les théoriciens de l’époque nommaient « Seconde Rhétorique » (pour désigner la poésie, par opposition à la prose), elle comporte généralement trois strophes, finissant chacune par le même vers, appelé refrain. Le sujet est presque toujours issu de la thématique de l’amour courtois, selon divers registres (plainte, louange, espérance...). Lorsqu’elle est « notée », c’est-à-dire mise en musique, la ballade, comme toute chanson polyphonique, comporte au moins deux voix : un cantus porteur du texte, et un ténor de tessiture généralement inférieure, dépourvu de texte. Ce dernier est inventé pour soutenir la première. Une ou deux voix peuvent s’ajouter aux précédentes : souvent un contratenor, dont la tessiture oscille entre cantus et ténor, plus rarement un triplum, plus aigu que le notes de programme |17 musiques pour luth cantus, mais, tout comme le ténor, elles sont dépourvues de texte, à de rares exceptions près. Les dispositifs les plus riches sont représentés ici dans les deux ballades de Machaut : Honte, paour, doubtance (à trois voix) et De toutes flours (à quatre voix). Précisons toutefois qu’une même chanson peut être conservée dans un effectif vocal différent selon les sources, et qu’en tout état de cause, la version polyphonique minimale est toujours le couple cantus-ténor. C’est précisément sur ce bicinium que se fonde chaque version du Codex Faenza, prétexte à une ornementation de la ligne mélodique. Dans les deux compositions de Machaut dont on pourra entendre la variation instrumentale, un premier niveau de changement voit le binaire du modèle vocal se muer en ternaire, ce qui contribue à provoquer une accélération du mouvement. Hormis son adaptation à ce nouveau cadre rythmique, la ligne du ténor est généralement reprise telle qu’elle apparaît dans l’original vocal, ou à peine modifiée. En revanche si les incises et certains segments de phrases de la partie supérieure sont parfois conservés, celle-ci est retravaillée : la ligne mélodique est ornée au point de s’affranchir du dessin qu’elle connaissait initialement. L’ambitus s’élargit, les cadences mélodiques surviennent plus tard que dans la version vocale, l’enchaînement des phrases musicales se resserre, et de longues arabesques se développent parfois qui ne boudent pas la virtuosité (diminutions rapides, notes répétées alertes...). Une dimension ludique peut même transparaître, par exemple dans le virelai Or sus vous dormés trop ma dame joliete, dont le texte humoristique jouait déjà sur des répétitions de mots, comme dans de nombreux virelais. La version instrumentale amplifie ici l’effet de ces répétitions par une ornementation en valeurs rapides et des déplacements rythmiques. Les œuvres italiennes sont représentées par des ballate de Landini, dont la forme se calque sur celle du virelai français où le refrain ne sert pas seulement de conclusion à chaque strophe, mais les encadre véritablement. Les pièces du compositeur florentin décédé en 1397, vingt ans après Machaut, côtoient dans le manuscrit celles d’autres auteurs italiens, et des œuvres anonymes. Ces variations instrumentales présentent une ornementation tout aussi prolixe que dans les pièces issues d’un modèle lyrique précédemment évoquées, en par- 18 |cité de la musique musiques pour luth ticulier Che pena è quest’al cor qui s’achève sur un effet d’accélération noté, usant de valeurs de plus en plus courtes. Après de nombreuses conjectures sur la destination instrumentale des pièces du Codex Faenza, on a proposé qu’il s’agissait plus vraisemblablement de l’orgue, tout particulièrement à cause de la disposition des voix en partition (c’est-à-dire superposées), ce qui le distingue radicalement des manuscrits de musique vocale dans lesquels les voix sont copiées séparément, les unes à la suite des autres. En tant que recueil pour clavier, il préfigure le Buxheimer Orgelbuch, le plus important manuscrit de musique pour orgue après celui de Faenza, qui contient lui aussi des pièces liturgiques et des arrangements de chansons profanes d’origines diverses. Cette destination au clavier ne doit pourtant pas occulter la possibilité d’interpréter ce répertoire selon des dispositifs vocaux et instrumentaux variables, dont on conserve des témoignages iconographiques mais aussi littéraires, comme on peut en lire chez Eustache Deschamps : « Et ainsi puet estre entendu des autres instrumens (...) comme rebecs, guiternes, vielles et psalterions, par la diversité des tailles, la nature des cordes et le touchement des doiz, et des fleutes et haulx instrumens semblables (...) ». En marge des pièces dérivées des chansons, le répertoire instrumental médiéval est constitué de danses, parmi lesquelles l’estampie occupe une place prépondérante. Elle pouvait ne pas être sans lien avec la poésie, le terme désignant à l’origine aussi bien un genre poétique appelant la danse qu’une pièce dansée dénuée de paroles. De caractère assez rythmé et virtuose, elle pouvait être accompagnée de frappement des pieds ou des mains, comme semble l’indiquer son étymologie, dérivée du germanique « stampjan », qui signifie « frapper ». Ici monodiques, constituées de plusieurs sections parfois reprises qui en font des pièces assez longues, ces estampies, animées d’une grande énergie rythmique par leur tempo, la variété des figures et les changements de métrique, témoignent aussi d’une remarquable richesse mélodique et ornementale. Gilles Dulong notes de programme |19 musiques pour luth De toutes flours Il n’y avait ni fleurs… De toutes flours n’avoit et de tous fruis En mon vergier fors une seule rose : Gastes estoit li seurplus et destruis Par Fortune qui durement s’oppose Contre ceste doulce flour Pour amatir sa colour et s’odour. Mais se cueillir la voy ou trebuchier, Autre apres li ja mais avoir ne quier. Il n’y avait ni fleurs ni fruits Dans mon verger, excepté une rose, Elle était toute abîmée et maltraitée Par la Fortune qui cruellement Attaque cette douce fleur Pour ternir sa couleur et nuire à son parfum. Mais si je la vois cueillir ou tomber à terre Nulle autre après elle je ne désirerai. Mais vraiement ymaginer ne puis Que la vertus, ou ma rose est enclose, Viengne par toy et par tes faus conduis, Ains est drois dons natureus ; si suppose Que tu n’avras ja vigour D’amanrir son pris et sa valour. Lay la moy donc, qu’ailleurs n’en mon vergier Autre apres li ja mais avoir ne quier. Non vraiment je ne puis imaginer Que la vertu, où ma rose est enclose, Vienne de toi et de tes chemins trompeurs, Mais plutôt de vrais dons de naissance ; je [suppose Que tu n’auras pas maintenant la force De détruire sa réputation et sa valeur. Laisse-la moi donc, car ailleurs qu’en monverger Nulle autre après elle je ne désirerai. He ! Fortune, qui es gouffres et puis Pour engloutir tout homme qui croire ose, Ta fausse loy, ou riens de biens ne truis Ne de seür, trop est decevans chose ; Ton ris, ta joie, t’onnour Ne sont que plour, tristesse et deshonnour. Se ty faus tour font ma rose sechier, Autre apres li ja mais avoir ne quier. Hé ! Fortune, toi qui es un gouffre Engloutissant tout homme qui ose croire, Ta fausse loi, où je ne trouve rien de bien Ni de sûr, est chose trop décevante, Ton rire, ta joie, ton honneur Ne sont que pleurs, tristesse et déshonneur. Si tes fallacieuses dispositions dessèchent [ma rose Nulle autre après elle je ne désirerai. Che pena è quest’al cor Quel tourment se cache dans mon cœur Che pen’è quest’al cor che si non posso Usar cortesemente Con questa mala gente, Ch’i’ non sia pur dalla’nvidia perchosso. Ma veramente ma’ non mi torranno Dal proposito mio quest’invidiosj. Quel tourment se cache dans mon cœur que je ne puisse Me montrer courtois Avec ces méchantes gens Et ni même par leur jalousie être atteint. Car vraiment jamais ces envieux Ne me détourneront de ma résolution. Ben potranno dir mal, se dir vorranno Ch’i’ non seguiti quel ch’io mi dispuosj. Ils pourront bien médire, s’ils prétendent Que je ne poursuivrais pas mon but. Già lungo tempo e faro gli dogliosi Non già con villania Longtemps encore je ferai des malheureux, Non par vilenie 20 |cité de la musique musiques pour luth Ma per tener tal via Che far non mi potran diventar rosso. Mais pour suivre mon chemin, Car ils ne pourront pas me faire rougir. Che pen’è... Quel tourment… Or sus, vous dormés trop Debout, vous dormez trop Or sus, vous dormés trop, ma dame joliete. Il est jours, levés sus, escotés l’aloete : Que dit Dieu, que dit Dieu, que dit Dieu, Que te dit Dieu, que te dit Dieu, que te dit Dieu, que te dit Dieu ? Il est jours, il est jours, jours est, si est. Il est jours, il est jours, jours est, jours est, Il est jours, il est jours, il est jours, jours [est, si est. Dame, sur tos en biauté souverayne, Pour vous, joli et gay, ou gentil mois de may, Suy et seray et vi vuil metre payne. Debout, vous dormez trop, ma gracieuse dame. Il est jour, levez-vous, écoutez l’alouette : Que dit Dieu, que dit Dieu, que dit Dieu, Que te dit Dieu, que te dit Dieu, que te dit Dieu, que te dit Dieu ? Il est jour, il est jour, jour est, il est. Il est jour, il est jour, jour est, jour est, Il est jour, il est jour, il est jour, jour est, il [est. Dame, beauté sur toute autre souveraine, Pour vous, joli et gai, au gentil mois de mai, Suis et serai et veux vous tourmenter. Or tost, naquaires, cornemuses, sonnés. Lire, lire, lire, liliron liliron, lire, Tititon, tititon, tititon, tititon. Compaignons, or alons et dansons liement. Tititon, tititon, tititon... ton. C’est pour vous, dame, a cuy Diex croisse [honnour. Allez, cymbales, cornemuses, jouez. Lire, lire, lire, liliron liliron, lire, Tititon, tititon, tititon, tititon. Compagnons, allons maintenant et dansons ensemble. Tititon, tititon, tititon… ton. C’est à vous, dame, que Dieu fait honneur. Si vous suplie qu’aveuc nous jouer venés. Lire, lire, lire, liliron liliron, lire, Tititon, tititon, tititon, tititon. Or sonnons et tutons et cornons gayament. Tititon, tititon... ton. C’est doulce vie, il n’est point de meillour. Je vous supplie de venir jouer avec nous. Lire, lire, lire, liliron liliron, lire. Tititon, tititon, tititon, tititon. Or sonnons et tutons et cornons gaiement. Tititon, tititon, tititon… ton. C’est douce vie, il n’en est point de meilleure. Car je vis en espoir d’avoyr joye par ser[vice. Chantés, melle et maulvis, aveuc la car [donnete : Chireli, chireli, chireli, Fait il chant, fait il chant... fant. Robin dort, il est mort, Robin dort, [endormi est : Or dansera seurement, coqu coquin. Allon lon de Paris, cha du lait, cha du lait. De vous, que j’aime sur créature humaine, Car je vis dans l’espoir d’avoir joie par mon [mérite. Chantez, mésange, coucou et chardonne [ret : Chireli, chireli, chireli, Ainsi le chant fait-il, il fait le chant… fant. Robin dort, il est mort, Robin dort, il est [endormi : Mais il dansera sûrement, le coquin. Allons loin de Paris, coule le lait, coule le lait. Pour vous, que j’aime plus que toute autre [créature humaine, J’ai composé ce virelai ; Dame, recevez ce lai, Ay fait ce virelay ; dame, ressevetz lay, notes de programme |21 musiques pour luth Car en cuer vray vous sers d’amour cer[tayne. Or sus, vous dormés trop, ma dame joliete... Car dans un cœur véritable il vous servira [d’amour certaine. Debout,vous dormez trop,ma gracieuse dame… Honte, paour, doubtance Honte, doute et peur… Honte, paour, doubtance de meffaire, Attemprance mettre en sa volente, Large en refus et lente d’octroy faire, Raison, mesure, honneur et honnesté Doit en son cuer figurer, Et mesdisans seur toutes riens doubter Et en tous fais estre amoureus couarde, Qui de s’onneur wet faire bonne garde. Honte, doute et peur de mal faire, Il faut tempérer son désir, Etre prodigue en refus et lente à accorder [ses faveurs, Raison, modération, honneur et honnêteté Doivent en son cœur figurer, Des médisants plus que tout se méfier Et toujours en amour se montrer prudente Pour qui de son honneur veut faire bonne garde. Etre sage dans sa conduite, prendre exemple [sur le bien, Bien cacher son amour et son secret, S’habiller simplement et ne pas vouloir [séduire Plusieurs personnes par une feinte amitié Faite pour étourdir ses amants : Garder la foi, la paix, l’amour et la loyauté, Ce sont là les points qu’une dame en son [cœur garde Pour qui de son honneur veut faire bonne garde. Car, quand l’amour siège dans un cœur noble, Jeune, vaillant, généreux, Empli de sentiments et de plaisantes pré[occupations, Ainsi que de désir par le plaisir engendré, Lesquels sagesse et modération font sou[vent dépasser, Il est fort difficile de s’y opposer. C’est pourquoi à ces points sans cesse doit penser Celle qui de son honneur veut faire bonne garde. Sage en maintieng, au bien penre exem[plaire, Celer a point s’amour et son secre, Simple d’atour et non vouloir attraire Pluseurs a li par samblant d’amitie, Car c’est pour amans tuer ; Foy, pais, amour et loyaute garder, Ce sont les poins que dame en son cuer [garde, Qui de s’onneur wet faire bonne garde. Quar quant amour maint en cuer debon[naire, Jone, gentil, de franchise paré, Plain de cuidier et de joieus afaire Et de desir par plaisence engenré, C’est trop fort à contrester, Qu’ils font souvent senz et mesure outrer ; Pour ce ades pense a ces poins et resgarde Qui de s’onneur wet faire bonne garde. La plus belle et doulce figure La plus belle et douce figure La plus belle et doulce figure, La plus noble, gente faiture, C’est ma chiere dame et mestresse : bon an, bon jour, joye et liesse Li doinst dieux, et bone aventure. La plus belle et douce figure, La plus noble et courtoise créature, C’est ma chère dame et maîtresse : Que Dieu lui donne bon an,bon jour,joie et liesse Et bonne aventure. C’est tout mon bien, c’est ma déesse C’est tout mon bien, c’est ma déesse, 22 |cité de la musique musiques pour luth Celle par qui ma dolour cesse En qui je preing ma noreture ; Celle par qui ma douleur cesse, En qui je puise ma nourriture ; Qui servir vueil sans nul destresse De cuer tant que voglie melesse, N’en ce monde d’autre en ay cure. Celle que je veux servir sans nulle défaillance De cœur si longtemps qu’elle m’en laisse le désir, Car d’autre en ce monde je n’ai cure. Former la sut dieux de nature, Blans, blond, belle, tout par mesure, Playsanment y jouta jesnesse, Largesse, honour, toute noblesse En fais, en dis et en parleure. La plus belle et doulce figure... Former là-haut par le dieu de nature, Blanche, blonde, belle, tout avec mesure, Plaisamment s’y rassembla jeunesse, Générosité, honneur, toute noblesse En actes, en dires et en paroles. La plus belle et douce figure… Non avrà ma’ pietà Ma dame n’aura jamais pitié Non avrà ma’ pietà questa mia donna, Se tu non faj, amore, Ch’ella sia certa del mio grande ardore Ma dame n’aura jamais pitié, Si tu ne fais en sorte, Amour, Qu’elle ne soit certaine de mon ardeur. S’el s’ella sapesse quanta pena i’ porto Per onestà celata nella mente Si elle savait toute la peine que je porte Par honnêteté cachée dans mon esprit Sol per la sua bellecça, chè conforto D’altro non prende l’anima dolente, Pour sa seule beauté, car nul autre réconfort Ne trouve l’âme souffrante, Forse da lej sarebbono in me spente Le fiam me che la pare Di giorno in giorno a crescono’l dolore. Peut-être par elle s’éteindrait La flamme qui semble-t-il De jour en jour fait croître ma douleur. Non avrà ma’ pietà questa mia donna... Ma dame n’aura jamais pitié... traduction Dominique Albrespy notes de programme |23 samedi 23 mai - 16h30 / amphithéâtre du musée le luth Renaissance Joanambrosio Dalza Pavana alla venetiana (1508) Saltarello Piva (durée : 7 minutes) Francesco Canova da Milano (1497-1543) O bone Jesu (d’après Antonio de Ribera, arr. Milano) Ricercari 3 et 51 Tu discois que je mourroye (d’après Claudin de Sermisy, arr. Milano) Ricercari 33 et 34 (durée : 14 minutes) Pietro-Paolo Borrono Fantasia (1548) Pavana chiamata la Gombertina (1536) Salterello della ditta Salterello chiamato el Mazolo Tocha tocha La Canella (durée : 10 minutes) John Dowland (1563-1626) Farewell Lady Hunsdons Puffe La Mia Barbara Queen Elizabeths Galliard Alo Fantaisie (durée : 20 minutes) Paul O’Dette, luth Paul Thomson d’après Magno Tieffenbrucker (c. 1550 collection Beare, Londres), luth Vendelio Venere (1582 Bologne), théorbe musiques pour luth le luth Renaissance Bien que le luth soit connu et pratiqué en Occident depuis le MoyenAge, il faut attendre la fin du XVe siècle pour connaître les premières musiques spécifiquement notées en tablature. En 1501, Ottaviano Petrucci ouvre l’histoire de l’édition musicale à Venise. L’Intabulatura de Joan Ambrosio Dalza, imprimée en 1508, est le quatrième volume que l’éditeur consacre au luth, après les deux livres de Francesco Spinacino et un de Giovan Maria, aujourd’hui disparu. A côté des ricercari et des tastar de corde, Dalza compose surtout des danses qu’il groupe par trois : pavane (pour la première fois), saltarello, piva. Au sein de chaque ensemble, l’unité modale, les similitudes harmoniques et mélodiques témoignent des schémas d’improvisation. En effet, au début du XVIe siècle, les musiciens prenaient rarement la peine de noter les danses qu’ils improvisaient couramment. Cela sera encore vrai dix-huit ans plus tard, lorsque Pietro Paolo Borrono publiera ses premières œuvres. Il écrit quelques fantaisies et toccatas, quelques mises en tablature de chansons et de motets, mais il accorde lui aussi une attention particulière à la danse. Si Dalza affichait une simplicité délibérée, Borrono développe un art privilégiant l’ornementation. Il élabore diversement ses compositions : Tocha tocha La Canella est construite sur une chanson populaire, mais La Gombertina et El Mazolo apparaissent comme des créations originales. Au contraire de Dalza et Borrono, Francesco Canova da Milano (1497-1543) ne laisse aucune danse à la postérité. Ses mises en tablature de motets, chansons et madrigaux, généralement peu ornées, restituent le contrepoint de leur modèle et en soulignent les reliefs. Ses ricercari constituent l’essentiel de son œuvre. Synthèse inspirée des techniques de la musique vocale contemporaine et des exigences de l’écriture pour luth, ils révèlent le contrapuntiste génial qu’est Milano. Surnommé « Il Divino » par ses contemporains, Francesco sera le maître de référence pour des générations de luthistes et le premier musicien italien de renommée internationale. A la charnière des XVIe et XVIIe siècles, John Dowland (1563-1626) laissera à son tour une empreinte profonde, en Angleterre et sur le continent. Formé dans son pays, il voyage en France, en Allemagne et en Italie. Sa musique se nourrit de ces expériences.Ainsi La Mia Barbara n’est pas sans notes de programme |25 musiques pour luth évoquer le style d’un Giovanni Terzi. Dowland hérite du goût anglais pour la variation, à partir de mélodies connues (Alœ) ou de danses telles que la pavane (La Mia Barbara), la gaillarde (Queen Elizabeths Galliard) ou l’allemande (Lady Hunsdons Puffe). De même que William Byrd au virginal, il porte cet art au sommet du raffinement. La richesse contrapuntique de ses fantaisies est également remarquable. Dans Farewell, les lignes chromatiques ascendantes et les dissonances poignantes expriment la mélancolie profonde du musicien. V. L. K 26 |cité de la musique dimanche 24 mai - 15h / amphithéâtre du musée « enfin la beauté » John Dowland In darkness let me dwell Far from triumphing court Lady, if you so spite me (durée : 10 minutes) Pierre Guédron Si le parler ou le silence (durée : 2 minutes) John Dowland The Right Honourable The Lord Viscount Lisle, his Galliard (durée : 3 minutes) anonyme es pagnol Passava amor su arco desarmelo Vuestros ojos tienen d’amor Sta notte mi sognava (durée : 5 minutes) Giulio Caccini Dovró, dunque, morire Amarilli mia bella (durée : 4 minutes) airs de cour français Pierre Guédron Cesses mortels de soupirer (texte de G. Bataille, 1613) Quel espoir de guarir (texte de G. Bataille, 1611) Amour est un plaisir si doux (texte de G. Bataille, 1608) (durée : 12 minutes) Nicolas Vallet Passemeze (durée : 3 minutes) Etienne Moulinié Airs à Uranie (3e livre, 1629) (durée : 6 minutes) Je suis ravi de mon Uranie Le sort me fait souffrir Quelle rigueur me sépare Airs espagnols (3e livre) (durée : 5 minutes) Quando borda el campo verde Repicavan las campanillas Por la verde orilla Airs à boire (durée : 4 minutes) Amis enivrons-nous (5e livre, 1635) Quelque mer veilleuse chose (3e livre) Enfin la beauté (1er livre, 1624) (durée : 6 minutes) Nigel Rogers, ténor Paul O’Dette, luth (instrument de Paul Thomson d’après Magno Tieffenbrucker (c. 1550 collection Beare, Londres), luth Vendelio Venere (1582 Bologne), théorbe concert sans entracte, durée : 1 heure musiques pour luth « Enfin la be auté » Fils du grand John Dowland, Robert Dowland (c.1586-1641) est également luthiste. En 1610, il édite deux anthologies de premier ordre : Varietie of Lute-Lessons consacrée à la musique pour luth seul, et A Musicall Banquet contenant, outre la gaillarde placée en ouverture, des airs accompagnés « des meilleurs auteurs en Anglais, Français, Espagnol et Italien ». Les trois ayres de John Dowland révèlent ses dons de mélodiste (Lady if you so spite me) et de rhétoriqueur (Far from triumphing court). In darkness let me dwell, longue plainte angoissée, est une merveille du répertoire pour voix et luth. D’entrée l’instrument y joue un rôle d’importance. En général, la richesse contrapuntique des tablatures chez Dowland contraste avec les accompagnements en accords des airs français tels que ceux de Guédron. Recréée par Robert Dowland, l’anthologie A Musicall Banquet offre les nouveautés et les succès du continent au public anglais. Sta notte mi sognava fournit un exemple d’ornementation vocale à l’italienne. Si le parler et le silence, Passava amor et Vuestros ojos sont empruntés aux deux premiers livres d’Airs de differents autheurs de Gabriel Bataille (1608 et 1609), et les arie de Caccini le sont aux Nuove Musiche de 1602. Ces dernières revêtent un intérêt particulier puisque Dowland remplace la basse continue initiale par un accompagnement écrit, dans un style plus anglais qu’italien comparé aux réalisations manuscrites de la péninsule. En France, la grande époque de l’air de cour pour voix et luth s’ouvre en 1608 avec le début des publications de Gabriel Bataille. Le premier grand compositeur en est assurément Pierre Guédron (c.1570/75c.1619/ 20). Il consacre toute sa carrière à la Cour de France, de la Chapelle Royale à la Chambre du Roy et de la Reyne Mère. En 1608, plusieurs de ses pièces portent encore l’empreinte de la musique mesurée à l’antique (Amour est un plaisir). Guédron en conservera une attention particulière pour la prosodie (Cesses mortels). Il affectionne les lignes vocales déclamatoires soutenues par un accompagnement sobre (Quel espoir de guarir). L’ensemble de son œuvre se caractérise par une extrême souplesse mélodique et rythmique. La période faste pour l’air de cour s’achève avec la génération d’Etienne Moulinié (1599-1676), maître de la musique du Duc notes de programme |29 musiques pour luth d’Orléans. Moulinié publie ses cinq livres pour voix et luth au début de sa carrière (1624-35). Le troisième, dédié à une mystérieuse Uranie (muse ou courtisane ?), se distingue par sa diversité. Il inclut les premiers airs à boire du compositeur, qui suggèrent une certaine joie de vivre à la cour de Gaston d’Orléans. Les airs italiens et espagnols comportent un accompagnement de guitare - ou luth - particulièrement original : leur écriture en accords, qui requiert la technique du rasgueado (arpègement rapide proche de l’actuel flamenco), témoigne d’une recherche stylistique (une certaine « couleur locale ») habituellement absente. V. L. K 30 |cité de la musique samedi 6 juin - 16h30 / amphithéâtre du musée le luth oriental Cinuçen Tanrıkorur Improvisation instrumentale d’introduction (dans le makam Mâhûr) Prélude instrumental (pesrev), op 143 (cycle rythmique : 28/4) Chant lyrique en forme large (besté), op 224 (cycle rythmique : 28/4 ; poème de Nesâtî, XVIIIe siècle) « Gittin ammâ ki kodun hasret ile cânı bile » (Tu es partie en laissant mon cœur en désespoir) Chanson lyrique (sarkı), op 215 (cycle rythmique 9/8 ; poème de Memduh Cumhur, XXe siècle) « Söyleyin, n’eyleycek halk-ı cihan yâdımızı » (Quel sera l’intérêt du monde de se rappeler de nous, dites-moi ?) Chant lyrique (yürüksemâî), op 128 (dans le makam zâvil-asîrân, créé par l’artiste, cycle rythmique 6/4 ; poème de Sabahaddin Ergi, XXe siècle) « Gel, gel, dil-i hasretzede dürdâneyi görsün » (Viens, viens que mon cœur ruiné par ton amour voie la perle de ton visage) Postlude instrumental, op 129 (dans le makam zâvil-asîrân, cycle rythmique 10/8 et 7/16) Improvisation de transition au makam Hüseynî Chant lyrique (sarkı), op 197 (cycle rythmique 9/4 ; poème de Mustafa Tahralı, XXe siècle) « Söyle bülbül güle, sevdâ-yı dilârâyı yine » (Va dire à la rose, o rossignol, l’amour qui décore les âmes) Chant folklorique (türkü), op 84 (cycle rythmique 2/4 ; poème de Re’fet Körüklü, XXe siècle) « Turnalar » (Aux oies sauvages) Hymne soufi (ilâhi), op 292 (cycle rythmique 10/16 ; poème de M. Turan Yarar, XXe siècle) « Nedir bülbül bu çıglıklar, bu ahlar ? » (Pourquoi tu pleures comme ça, o rossignol ?) Improvisation de transition au makam Hicazkâr Postlude instrumental, op 276 (cycle rythmique 10/8 et 10/16) « A mon petit pur sang cheval arabe » Chanson lyrique (sarkı), op 187 (dans le makam Kürdîli-hicazkâr, cycle rythmique 9/8 ; poème de M. Nafiz Irmak, XXe siècle) « Bana çok gördü felek külbe-i ahzânı bile » (Pour cet univers ruiné et malin, je ne mérite même une cave pour y pleurer) Elégie à la mémoire de Tanburî Cemil Bey (mersiye), op 269 (dans le makam Kürdîli-hicazkâr, cycle rythmique 10/16 ; poème de Nazım Hikmet, XXe siècle) « Elâ gözleri dalgın, genis alnı sarar mıs » (Deux yeux châtains qui rêvent, un large front tout pâle) Chanson lyrique, op 34 (dans le makam Kürdîli-hicazkâr, cycle rythmique 9/8 ; poème de Cenab Sahabeddin, XIXe siècle) « Yaz kusu » (A un oiseau d’été) Cinuçen Tanrıkorur, oud, chant, composition concert sans entracte : durée 1 heure concert enregistré par France Musique dimanche 7 juin - 15h / amphithéâtre du musée le luth oriental Improvisation introductive au ney Neyzen Yusuf Pasa (1821-1883) Prélude (dans le makam Segâh ; cycle rythmique 28/4) Sadi Isılay (1899-1969) Poslude (dans le makam Segâh ; cycle rythmique 10/8 et 6/4) Improvisation alternée de deux instruments en forme de « conversation musicale » (transition au makam Ferahfezâ) Tanburî Cemil Bey (1871-1916) Postlude (dans le makam Ferahzâ ; cycle rythmique 10/8 et 3/4) Cinuçen Tanrıkorur (1938- ) Improvisation introductive (dans le makam Hüzzam) Postlude (dans le makam Hüzzam ; cycle rythmique 10/8 et 9/8) Jardin de roses Postlude (cycle rythmique 10/8 et 3/4, Evç) Aux deux colombes Postlude (cycle rythmique 10/8 et 9/8, Arazbar-bûselik) Postlude (cycle rythmique 10/8 /4 et 9/8, Evcârâ) Etude de concert, n° 2 Air de danse (cycle rythmique 2/4, Kürdîlihicazkâr) Refik Fersan (1892-1965) Air de danse (cycle rythmique 2/4, Nikrîz) Cinuçen Tanrıkorur, oud Murat Salim Tokaç, tanbur, ney concert sans entracte, durée 1 heure concert enregistré par France Musique musiques pour luth m usiques turque et ottomane Le musicien interprète et compositeur Cinuçen Tanrıkorur (né en 1938), s’inscrit dans la grande tradition savante turque appelée ottomane. Cette tradition s’est développée dans le passé à la cour même des sultans d’Istanbul où elle a été appelée enderûn. C’est-à-dire une musique enseignée, pratiquée et faite à l’intérieur du palais et à l’intention de la noblesse. Cette école s’est caractérisée par son cosmopolitisme, puisque des musiciens de toutes origines, recrutés dès leur plus tendre enfance, suivaient auprès des maîtres du palais l’enseignement qui leur permettait d’obtenir cette transmission indispensable à la survie de l’art. Ces jeunes apprentis, devenus à leur tour maîtres émérites, iront enrichir l’art de créations pensées dans l’esprit des anciens, comme ils lui inoculeront des idées nouvelles. C’est ainsi que le répertoire du palais s’est étoffé pour constituer un corpus volumineux de pièces. L’on cite ainsi le fameux prince moldave, Kantemiroghlu, qui a laissé un très précieux traité de musique ottomane rédigé dans le premier quart du XVIIIe siècle, et qui consigne de façon précise les principales formes musicales qui se pratiquaient à l’époque. l’expression Si sur le plan de son expression cette musique s’est définie par sa lenteur, sa magnificence et sa majesté, eu égard au souverain, à qui elle était destinée, elle a véhiculé également une expression fortement liée au mysticisme. Ce stade atteint par l’âme, touchant à l’extase, interdisait ainsi les épanchements excessifs et désordonnés. Il faisait de son auditeur quelqu’un de très réservé, d’abord en raison de l’étiquette du palais à qui le liait de nombreuses contraintes, mais surtout en raison de la nature solennelle de cette musique qui en développait l’introspection : cet état a beaucoup frappé les voyageurs occidentaux tels qu’en témoignent leurs relations de voyage.Toujours est-il que cette atmosphère de retour à soi, d’intimité, reste la couleur dominante de la musique savante ottomane, et par delà, de la musique savante turque d’aujourd’hui. 34 |cité de la musique musiques pour luth De la musique aussi bien instrumentale que vocale (pour petit ensemble), tel était le mot d’ordre appliqué à la cour ottomane. La musique vocale recourait aux poèmes en langue osmanlı. Ils s’alimentaient très souvent d’une certaine préciosité et cultivaient surtout les images symboliques. Les pièces composées ont été aussi bien chantées que jouées instrumentalement, et l’art de l’improvisation, dénommé taksim, s’est considérablement étoffé. C’est à la cour ottomane que prend naissance et de façon saisissante, sans doute à partir du XVIIIe siècle, l’art de la modulation secondaire. Cette technique consistait à passer d’un mode à un autre dans le courant du discours musical, de manière très subtile, sans que jamais à aucun moment cette transition ne vienne entraver l’allure générale, faite de respect. Les modes qui se succédaient dans l’enchaînement étaient soigneusement choisis en fonction de leur comptabilité réciproque et jamais une modulation brusque, comme on la trouve souvent dans la musique populaire turque, ne venait se greffer sur ce cadre rigoureux. La subtilité de la modulation secondaire, comme sa complexité, a été telle que dans certains poèmes, les textes indiquent, comme ils les citent, le nom du mode vers lequel le musicien s’achemine. les genres musicaux Les pièces qui ont figuré au répertoire de la musique ottomane relèvent généralement de pechrev, de besté, de semâî ou de variantes de celle-ci, le yürük semâî. Le XIXe siècle assiste à l’apothéose des sharkı (lire « charkeu ») : pièce chantée où le lyrisme l’emporte et donnera naissance, au XXe siècle, à la chanson turque. Pechrev et besté sont des compositions lentes ou moyennement rapides, qui peuvent être aussi bien chantées qu’instrumentées, alors que le semâî frappe par sa vivacité. Traditionnellement transmises par la méthode directe orale du maître au disciple appelée mesk (lire « mechk »), ces pièces se compliquent par la suite dans leur organisation structurelle telles qu’elles sont parvenues jusqu’à nous. Comme les Ottomans avaient aussi inventé plusieurs systèmes de notation, la majorité des pièces du répertoire classique s’est donc conservée. En outre et fait rare pour une tradition qui relève essentiellement des règles de l’oralité, le nom des compositeurs ainsi que notes de programme |35 musiques pour luth celui des auteurs des poèmes est souvent connu et enregistré. D’où cette tradition du compositeur-interprète que perpétue de nos jours et avec panache Cinuçen Tanrıkorur. Ce dernier s’ouvre toutefois vers des horizons autres et intègre à son répertoire des pièces empruntées aux domaines sacré (âyin, ilâhi, mersiye) ou populaire (türkü). Par la suite la coutume a voulu que ces pièces différentes où alternaient des improvisations libres avec des pièces composées, se trouvent réunies sous un dénominateur commun : la modalité principale. Ces collections de pièces viendront former l’idée de « suite », dénommée en turc fasıl (lire fasseul). La suite constitue le fer de lance de la musique savante ottomane, et se maintiendra de la sorte jusqu’à nos jours où elle est devenue l’essence de la musique classique turque. Christian Poché 36 |cité de la musique musiques pour luth glossaire oud Les Turcs écrivent ud, mais au début de ce siècle la graphie ut s’est avérée courante. Ce luth à manche court et à corps volumineux piriforme, originaire du monde arabe d’où il détient son nom, n’a pas été très prisé sous l’empire ottoman où on lui connaît diverses éclipses. Il a surtout été concurrencé par la lauta, instrument similaire mais à frettes, et au manche beaucoup plus allongé. Ce n’est que dans la seconde moitié du XIXe siècle que les Turcs reviennent en force vers cet instrument monté en Turquie de 5 ou 6 cordes doubles. Ils se signalent également par la naissance d’une école de lutherie célèbre à Istanbul, qui donnera naissance au fameux Onnik (signataire du luth joué par Cinuçen Tanrıkorur), dont les modèles sont aussi recherchés de nos jours que les stradivarius crémonais. Ils se signalent aussi par l’émergence d’une école de solistes de grande classe qui, en développant le jeu de cet instrument, tend à en faire un instrument concertant. L’école du ud turc se caractérise par la recherche de la belle sonorité, sa rondeur, son volume. Cette école qui a tant essaimé se distingue éminement du jeu de oud picoré, autrefois très répandu dans le monde arabo-islamique. Les Turcs ont maintenu la présence de la voix chantée comme le montre Cinuçen Tanrıkorur, alors qu’il y a une nette tendance à l’heure actuelle à séparer le chanteur de l’accompagnateur. tanbur Ce luth à long manche et à caisse hémisphérique s’est essentiellement développé à Istanbul dans le cadre de la musique savante des XVIIe et XVIIIe siècle. Par la suite il a été intégré au répertoire des Mevlevi-s ou Derviches Tourneurs. Instrument typiquement istanbouliote, il n’a plus rien à voir avec la famille des luths à long manche dont il s’en distingue désormais. Son manche est reconnaissable au nombre de ligatures (de 48 à 54), permettant de jouer tous les makam (modes) possibles et inimaginables. Le tanbur est monté de 3 ou 4 paires de cordes en acier jouées au moyen d’un plectre. Son jeu est lent et grave. Il n’admet pas la virtuosité. C’est par excellence l’instrument des pechrev et semâî. ney Terme dérivé du persan, ney signifie roseau. C’est la flûte turque par excellence et à l’origine l’instrument des Mevlevi-s, ordre des Derviches Tourneurs. Jusqu’à une période récente, tous les grands notes de programme |37 musiques pour luth joueurs de ney, les neyzen, ont été des mevlevi-s ou de descendance mevlevi-s. Bien qu’instrument de la musique sacrée, le ney a rapidement été assimilé par la musique savante ottomane, où l’usage a voulu qu’à une certaine époque, on ait multiplié les joueurs de ney durant le concert, comme l’attestent bon nombre de miniatures ottomanes du XVIIIe siècle. Mais il n’empêche que l’instrument demeure foncièrement rattaché à l’idée de soliste. Si le ney turc est percé de six trous répartis trois par trois et d’un trou supplémentaire sur la partie antérieure du cylindre, il se différencie de ses confrères arabe et persan par la présence d’une embouchure spécifique, d’aspect tronçonique en corne de bœuf, appelée bashparé, fixée à l’intérieur du tube de roseau. Cette particularité permet au ney turc une plus grande exactitude dans la science des modes. Il existe toutefois une série de ney de différentes grandeurs, que l’interprète change durant sa prestation et selon la tessiture de l’œuvre exécutée. Ces différentes transactions sont là pour pallier la déficience instrumentale qui reste cependant d’une facture primitive. 38 |cité de la musique makam Mode, formule mélodique, trame modale ou mélodique fortement marquée par un état d’esprit relevant soit de la psychologie affective, soit du monde ambiant, et se traduisant par un développement improvisé ou par un embellissement d’une pièce composée. C. P. musiques pour luth biographies Hopkinson Smith Venu en Europe en 1973 après d’importantes études de musicologie à Harvard poussé par un vif intérêt pour les instruments d’époque, Hopkinson Smith étudie auprès des plus grands : Emilio Pujol, Eugen MullerDombois ou encore Jordi Savall avec qui il collaborera pendant plus de dix ans et qui lui permettra d’acquérir une très solide expérience de musique de chambre. Depuis le milieu des années 80, Hopkinson Smith se consacre tout particulièrement aux différents répertoires solistes des instruments anciens : vihuela, luth, luth Renaissance, théorbe, guitares baroque et Renaissance et surtout le luth baroque. Au travers de ses récitals dans le monde entier, il a ainsi contribué à redécouvrir et à mettre au jour des œuvres qui sont parmi les plus expressives et les plus personnelles de l’ensemble du répertoire de musique ancienne. Nous lui devons notamment la redécouverte des fantaisies de la Renaissance, des variations et danses des répertoires de vihuela (Milan, Narváez, Mudarra, de Rippe), des toccatas de la première période baroque (Kapsberger), des luthistes du XVIIe siècle français (Denis Gaultier,Vieux Gaultier, Mouton, Dufaut, Gallot, de Visée), de la musique espagnole pour guitare à 5 chœurs (Sanz), ou encore du luth d’Europe centrale à l’apogée de la période baroque (Sylvius Weiss). Parallèlement à ces découvertes majeures, la musique de J. S. Bach demeure au cœur de la démarche d’Hopkinson Smith et inspire ses projets les plus personnels. Ainsi, après avoir enregistré l’intégrale de la musique pour luth de J.S. Bach, a-t-il adapté pour le luth, les Suites pour violoncelle et des Sonates et partitas pour violon solo. Parallèlement à sa carrière d’instrumentiste, H. Smith joue en concert et dirige des master-classes à travers l’Europe et l’Amérique. Il vit actuellement à Bâle (Suisse) et enseigne à la Schola Cantorum. Parmi ses enregistrements les plus remarquables (chez Auvidis Astrée), citons l’œuvre de luth et les suites pour luth baroque, les pièces de luth d’Ennemond Gaultier et les partitas de Silvius Leopold Weiss. Le dernier disque édité, Portrait d’Hopkinson Smith, réunissait des œuvres de Milan, Narvaez, Galtier, Sanz, Gallot, Weiss et Bach. notes de programme |39 musiques pour luth Chiara Banchini est l’invitée des festivals importants de musique ancienne. Après un prix de virtuosité au Conservatoire de musique de Genève dans la classe de Corado Romano, elle se perfectionne chez Sandor Vegh et Sigiswald Kuijken, et obtient le diplôme de soliste au Conservatoire de La Haye. Chiara Banchini a enseigné au Centre de musique ancienne de Genève avant de devenir titulaire d’une chaire de violon baroque à la Schola Cantorum de Bâle. Des cours d’interprétation musicale dans toute l’Europe complètent son engagement pédagogique. En 1981, elle fonde son propre orchestre de chambre, l’Ensemble 415. David Plantier obtient son diplôme de fin d’études de violon avec félicitations 40 |cité de la musique au Conservatoire de Genève. Il se consacre ensuite au violon baroque et à son répertoire, à la Schola Cantorum de Bâle, où il obtient son diplôme de soliste dans la classe de Chiara Banchini. Au cours de stages et masterclasses, il a bénéficié de l’enseignement de S. Kuijken, J. Savall et E. Gatti. Il a donné de nombreux concerts dans toute l’Europe, et a participé à des enregistrements avec l’Ensemble 415, La Fenice, Elyma, Akademia et Arcadia. David Courvoisier Après avoir étudié le violon avec Mireille Mercanton et Thomas Füri, David Courvoisier choisit l’alto dont il préfère la sonorité chaleureuse. En 1987, il obtient un diplôme d’enseignement dans la classe de Nicolas Pache, puis une virtuosité avec Christoph Schiller au Conservatoire de Zürich en 1990. Parallèlement, David Courvoisier s’est intéressé puis initié au « style baroque » dont il apprécie la souplesse et la pureté. Il se produit actuellement dans différentes formations, en Suisse ainsi qu’à l’étranger. A côté de son activité musicale, il prépare l’ouverture d’un centre de rencontres musicales et culturelles dans une région magnifiquement préservée du Jura français appelée Petite Montagne. Roel Dieltiens A l’âge de quinze ans, il délaisse ses études de piano au profit du violoncelle. Il apparaît très vite comme un musicien expérimenté qui ne se laisse pas enfermer dans une catégorie quelconque. C’est en autodidacte qu’il apprend à jouer le violoncelle baroque. Il s’intéresse à toutes les musiques, sans pour autant se vouloir un généraliste dénué musiques pour luth de tout esprit critique. Il est tantôt soliste auprès d’un grand orchestre symphonique, tantôt membre de l’Orchestre du XVIIIe siècle auprès de Frans Brüggen. Il se produit régulièrement au Japon et aux EtatsUnis où il possède son propre ensemble (Context). Doulce Mémoire Fondé en 1990 par Denis Raisin-Dadre, l’ensemble Doulce mémoire se consacre aux musiques vocales et instrumentales de la Renaissance, telles que Léonard de Vinci Henri VIII d’Angleterre ont pu les entendre et les interpréter. Pour restituer l’image sonore multiple de la Renaissance, Doulce Mémoire a recréé les diverses formations impliquées dans la vie musicale des cours aux XVe et XVIe siècles, telles qu’elles existaient notamment à la cour de François Ier. La « Bande de hautbois », emblématique de la puissance princière ou municipale, rassemble les hauts instruments (cornet, chalémie, bombarde, sacqueboute et percussions) pour l’exécution des musiques solennelles de plein air, de bal ou de procession ; l’ensemble de bas instruments (flûtes à bec, luth, violes de gambe, épinette, lira da braccio) pour les pratiques plus intimistes de la musique d’intérieur. Enfin, l’ensemble des chanteurs, organisés en Chapelle autour du lutrin ou en « petite compagnie » autour de la table, permet la restitution, en collaboration avec l’une ou l’autre de ces formations instrumentales, des répertoires sacrés et profanes. Invité de plus grands festivals européens (Lyon, Beaune, Ambronay, Uzès, Montreux, Utrecht, Anvers, Genève, Dubrovnik, Liège), Doulce Mémoire partira en tournée à l’étranger en 1998 : USA, Pays-Bas et Europe centrale. L’ensemble est soutenu par la Fondation d’entreprise France Telecom. Ensemble Faenza L’ensemble tire son nom d’un célèbre manuscrit du XVe siècle contenant des transcriptions instrumentales de pièces vocales italiennes et françaises du siècle antérieur, ainsi que des arrangements sur des ténors liturgiques. Ce choix de nom n’est pas fortuit : comme les musiciens de l’ensemble, le compilateur de ce manuscrit se trouve entre deux mondes : la France et l’Italie, les XIVe et XVe siècles, le vocal et l’instrumental, le sacré et le profane. L’éventail sonore du Faenza est encore plus large puisqu’il s’étend à toute l’Europe, du Xe au XVIe notes de programme |41 musiques pour luth siècle. Sa situation est cependant comparable, ainsi que - plus modestement - son statut d’arrangeur en musique médiévale (un répertoire où la liberté d’interprétation reste plus grande que dans les répertoires ultérieurs). Par une pratique assidue de ce répertoire et son intériorisation, Faenza cherche à en dégager la vitalité afin de dépasser l’aspect documentaire, musicologique ou même anecdotique trop souvent attaché à la vogue grandissante de la musique médiévale. L’Ensemble Faenza regroupe, autour de Marco Horvat, des musiciens de tendances différentes mais complémentaires. Chanteurs et instrumentistes, certains sont expérimentés dans le domaine des musiques traditionnelles ou improvisées. La formation varie selon les répertoires et peut mobiliser de une à huit personnes. Les 42 |cité de la musique musiciens de l’ensemble se connaissent de longue date et travaillent ou ont travaillé ensemble dans d’autres formations. Créé en 1996, Faenza a enregistré la partie médiévale du cédérom Les châteaux de la Loire (ODA) et s’apprête à collaborer au projet Vasco de Gama du même éditeur. Il s’est déjà produit à Francfort, Munich et Paris. Paul O’Dette est considéré comme « le plus grand génie qui ait jamais touché cet instrument » (Toronto Globe and Mail). Ses concerts dans la plupart des festivals internationaux de musique ancienne sont considérés comme les moments forts de ces événements. Bien connu pour ses récitals et enregistrements de musique virtuose, Paul O’Dette poursuit également une carrière internationale en tant que continuiste sous les directions de Gustav Leonhardt, Nikolaus Harnoncourt, Jordi Savall,William Christie, Christopher Hogwood, Sylvia Mc Nair, Andrew Parrott, Nicholas McGegan, Nigel Rogers, Tragicomedia, Tafelmusik,The Parley of Instruments et The Harp Consort. Il est co-directeur de l’ensemble The Musicians of Swanne Alley, ensemble de musique elizabéthaine particulièrement apprécié dans le répertoire pour consort de cette époque. Paul O’Dette a participé à plus d’une centaine d’enregistrements, dont plusieurs ont été nominés au prix Record of the Year Award de Gramophone. Il participe à de nombreux programmes radiophoniques BBC, Radio France, RAI, Westdeutscher Rundfunk, Bayerischer Rundfunk... Parallèlement à son activité d’interprète, musiques pour luth Paul O’Dette est un chercheur passionné et a réalisé un travail considérable sur l’interprétation et les sources vocales du luth en Italie et en Angleterre au XVIIe siècle, sur l’art du continuo et sur la technique du luth, ce dernier sujet faisant l’objet d’un livre à paraître, co-signé par Patrick O’Brien. Il a également publié de nombreux articles sur l’interprétation historique. Paul O’Dette est directeur du département de musique ancienne de l’Eastman School of Music depuis 1976. Il est également directeur artistique du Festival de Musique Ancienne de Boston. L’année dernière, on l’a vu diriger des opéras baroques à Boston, Tanglewood et au Drottningholm Court Theater de Stockholm. Nigel Rogers a commencé à chanter dans la maîtrise du King’s College de Cambridge. Après sa formation, il part étudier en Italie, puis en Allemagne à la Hochschule de Munich. Il participe, à cette époque, à la fondation du Studio der frühen Musik et parcourt le monde avec cet ensemble. Il retourne ensuite en Grande-Bretagne où il se spécialise dans l’interprétation des œuvres de Monteverdi. Dans les années 1970, ses interprétations avec Harnoncourt à Vienne, avec Leonhardt à Amsterdam et avec Jurgens à Hambourg ont eu un impact énorme sur les différents courants baroques. La technique particulière qu’il a mise au point pour la musique baroque italienne s’inspire en effet des techniques vocales des chanteurs de l’Inde et du Moyen-Orient qu’il a pu découvrir au cours de ses nombreux voyages. Outre le fait d’avoir chanté comme soliste avec les principaux ensembles baroques, il s’est aussi consacré aux répertoires classique et romantique (Lieder de Schubert accompagnés au pianoforte par Richard Burnett). Nigel Rogers est actuellement professeur au Royal College of Music de Londres et professeur invité à la Schola Cantorum de Bâle. Cinuçen Tanrıkorur Joueur de oud (luth turc), chanteur et compositeur de musique classique turque de renommée mondiale, Cinuçen Tanrıkorur est né à Istanbul en 1938. Après avoir terminé ses études d’architecture, il s’est entièrement consacré à la musique qu’il avait déjà commencé à l’âge de quatre ans avec sa mère, d’abord avec le notes de programme |43 musiques pour luth chant, ensuite avec le oud et la composition. Après huit ans de travail comme architecteurbaniste auprès du ministère du Réétablissement à Ankara, il a été directeur du Département de musique pour la radio et télévision pendant neuf ans. Après avoir démissionné de son poste, il a continué sa carrière musicale comme professeur de musique à l’université de Konya, comme conférencier et surtout comme compositeur et artiste donnant des récitals de oud et chant dans 23 pays du monde, y compris la France, l’Allemagne et l’Italie. Cinuçen Tanrıkorur est l’auteur à l’heure actuelle de 412 compositions musicales dans des formes variées qui vont des petites chansons pour les enfants à de simples hymnes religieuses aux compositions de musique instrumentale soufie (pour les derviches 44 |cité de la musique tourneurs). Il est aussi l’auteur de nombreux articles sur la musique turque parus dans différentes revues de musicologie du monde entier. M.Tanrıkorur parle couramment cinq langues et est le seul artiste-compositeur de musique classique turque à figurer dans la collection Ocora de RadioFrance (C 580045, HM 80 ADD). Murat Salim Tokaç est né à Samsun, Turquie, en 1969. Il a commencé l’étude du ney (flûte de roseau turque) à l’âge de 7 ans sous la direction de son père qui est aussi un médecin musicien, et à l’étude du tanbur (luth turc à long manche pourvu de ligatures) à l’âge de 11 ans. Après avoir terminé ses études de médecine, en 1992, M.Tokaç s’est presqu’entièrement consacré au tanbur et au ney, donnant avec le maître Tanrıkorur, des concerts de grand succès non seulement en Turquie, mais aussi en Europe et aux EtatsUnis avec ses deux instruments. Murat Tokaç qui joue dans le même style du grand génie de Tanburî Cemil Bey (18711916), est considéré comme le meilleur joueur de tanbur de la nouvelle génération. Il est à présent membre de l’Ensemble d’Etat de musique classique turque du ministère de la Culture de Samsun. technique Olivier Fioravanti régie générale Eric Briault régie plateau Jean-Laurent Parisot régie lumières