Les Verticaux - Théâtre Massalia
Transcription
Les Verticaux - Théâtre Massalia
Dossier pédagogique Les Verticaux de Fabienne Mounier Compagnie Arkétal mise en scène Sylvie Osman conception visuelle Wozniak Marionnettes pour adultes et adolescents Les 13 et 14 mars 2007 Théâtre Massalia La Friche la Belle de Mai Tél. : 04 95 04 95 70 www.theatremassalia.com Fax : 04 95 04 95 67 e-mail : [email protected] Les Verticaux Marionnettes pour adultes et adolescents Les 13 et 14 mars 2007 à 20h Représentation scolaire: le 13 mars à 14h30 Sur votre demande, une rencontre peut avoir lieu après le spectacle entrée parking: 12 rue François Simon Tarifs de 5€ à 10€ Groupes scolaires et structure sociales: 4€ Pour tout renseignement, contactez Véra Maéro [email protected] - 04 95 04 95 70 Pour les collèges et lycées, contactez Isabelle Richomme [email protected] - 04 95 04 95 68 Pour contacter la compagnie: Compagnie Arketal 4, Impasse de la Chaumière BP 17 06401 CANNES CEDEX Tél. : 33 (0)4 93 68 92 00 Fax : 33 (0)4 92 99 25 07 E-mail : [email protected] site : www.arketal.com Informations pratiques Lieu de représentation Théâtre Massalia - Salle SEITA 41 rue Jobin 13003 Marseille Dans le texte de Fabienne Mounier Il y a de manière implicite une urgence, une aspiration, quelque chose gronde sous les mots. Une angoisse? Il y a de la cruauté, quelque chose qui tord les boyaux, mais aussi beaucoup d'humour. C'est drôle la vie. La famille, ça nous dépasse. J'aime ce fil fragile sur lequel danse la famille des Verticaux. J'ai dansé, je danse, tout le monde danse dans cet espace aussi petit qu'un nid d'oiseau aussi vaste que le monde. L'espace du « dit et du non-dit », du visible et de l'invisible. « ELLE. Etes-vous contents mes enfants d'avoir une nouvelle petite sœur, une jolie Guili-Guili ? GUY. Oh oui ! Elle a tout ce qui lui faut et bien en ordre. GUIGUI. Et elle est éveillée pour son âge. Elle a déjà des poils sous les bras. GUILLOU. Qu'est-ce qu'elle se ressemble! GUILLETTE. Est-ce qu'elle pense ? » Voici donc la famille Verticaux, avec ses rituels décalés en 19 dimanches exceptionnels, jouée par trois acteurs, et une vingtaine de marionnettes conçues par le peintre Wozniak. Dans le spectacle Les acteurs sont également les manipulateurs des marionnettes. Les personnages du père, de la mère et de Guillette sont joués alternativement par les acteurs ou en marionnettes. Les autres personnages sont des marionnettes. La dualité acteurs-marionnettes est fertile et donne à la pièce un univers burlesque. On perd ses repères Fabienne Mounier précise que chaque scène est jouée comme si les comédiens étaient vierges de la précédente. Comme s'il n'y avait pas de progression dans les humeurs, les rancoeurs, les sentiments. Car cette histoire peut durer 1000 ans. Le spectacle Monsieur et Madame Verticaux ont cinq enfants. Ils aiment leurs cinq enfants et sont conscients du grand rôle de parents qui est le leur. Ils savent guider les pas hésitants. Ils connaissent le sacrifice. Les enfants Verticaux, eux, ne sont pas toujours à la hauteur des espérances de leurs parents. Ou plutôt, disons qu'ils ont parfois de drôles d'idées, et surtout ils grandissent trop vite. C'est une famille, les Verticaux, surprise le temps de quelques instantanés avant la chute et un recommencement annoncé. Il y a des drames, des morts peut-être, on ne sait plus, on a eu peur, tous ces événements se réinscrivent dans une sorte de plaine éternelle, la famille. L'instantané et l'étemité sont alors la même chose. Forme imaginaire , simulacre de vie, être de chair et d'esprit, la marionnette est le symbole incarné de notre condition humaine. L'objet-marionnette est avant tout une forme plastique née de l'imagination et des mains d'un artisan-plasticien. La main du marionnettiste est à l'origine des mouvements. Elle dirige, mais elle reçoit en retour. Cet échange est capital, il crée le dialogue entre le corps vivant du marionnettiste et le corps de la marionnette. Il crée un rapport qui “dépasse la mort des choses”. Les Verticaux balancent entre ouverture et fermeture. Tout se joue entre l'infiniment grand et l'infiniment petit, la pesanteur et l'apesanteur, le centre de gravité et la chute. Il faut se dépasser pour teindre le monde à sa couleur. GRETA BRUGGEMAN Scénographe, constructrice de marionnettes « Matières à vivre », c'est ainsi que Greta Bruggeman nomme ses figures, qu'elle construit pour le théâtre de marionnettes, depuis 25 ans. Pour elle, la construction est une aventure, un voyage, à travers la matière, et si elle est consciente d'une déformation professionnelle, c'est d'avoir constamment à l'esprit, la préoccupation suivante : “Comment donner vie à la figure” ? Le plus grand plaisir de Greta réside dans ce travail de construction, quand elle fabrique la marionnette, quand cette dernière se matérialise. Le papier occupe une place privilégiée et ce, depuis son adolescence - elle est alors employée dans l'entreprise familiale, un dépôt de distribution de journaux. Ce papier journal, porté, réceptionné, empaqueté, empilé, livré, puis détourné et transformé en personnage de théâtre, est devenu source d'inspiration, un élément créateur essentiel. Le papier crépon coiffe les figures de « Pygmalion », la pâte à papier habille les chèvres de « l'œil du loup », le papier de soie se transforme en montagne Himalayenne dans « Des papillons sous les pas ». De ses voyages, elle rapporte le papier « espagnol » de Valence et le papier népalais de Katmandou. En s'installant sur la Côte d'Azur, d'autres matières vont l'attirer : les bois flottés, le sable, les pierres, le bambou et de nombreuses matières liées à sa rencontre avec des peintres tels que Thé Tobiasse, Fernand Léger, Marius Rech, Rolf Ball, Martin Jarrie. Ces rencontres vont enrichir sa créativité et intervenir de manière décisive dans les choix scénographiques des productions de la compagnie Arketal. Dans son travail de mise en volume, Greta démarre très souvent d'un personnage peint ou dessiné de face ou de profil. Cela nécessite tout d'abord de se faire une représentation plus complète de l'image initiale avec des vues sous tous les angles : photocopier un dessin, l'agrandir, ou le réduire pour obtenir la taille du personnage, créer des patrons en carton pour des éléments comme la tête, les pieds, qui vont servir à la recherche des possibilités du mouvement. Il est indispensable de dresser des schémas très précis de la mécanique interne de la marionnette, de rechercher les axes d'articulation, de rotation qui vont déterminer le mouvement et l'aspect visuel de la figure. Car penser au mouvement, c'est penser les possibilités et les contraintes de jeu qui vont de pair, c'est également penser à l'immobilité de l'objet. « Le travail, c'est une constante remise en question, une formation professionnelle de tous les instants. Le théâtre, c'est une équipe. Dans ce « vivre ensemble », on ne peut pas ne pas livrer un bout de soi, de son histoire, de ses convictions. » La marionnette et Arkétal La marionnette est notre moyen d'expression comme d'autres utilisent le pinceau, la glaise ou le stylo.Nous collaborons avec des peintres et des plasticiens, depuis la création de la compagnie, car nous sommes en constante recherche sur la figure-marionnette, sa forme, ses matériaux, ses propriétés plastiques, et sur l'espace de jeu. Depuis 1999, nous travaillons avec des auteurs contemporains qui sont a la recherche de formes nouvelles. Les plasticiens et les auteurs sont des artisans, les uns travaillant avec la matière des mots, les autres avec la matière plastique. Sylvie Osman Fabienne Mounier Comment nous avons rencontré l'auteur Fabienne Mounier En 1999, le CNES (Centre National des Ecritures du Spectacle) et THEMAA (Théâtres de Marionnettes et Arts Associés) organisent une rencontre entre les marionnettistes et les auteurs de théâtre, à La Chartreuse de Villeneuve-lesAvignon. C'est le désir, depuis longtemps, de travailler avec des auteurs contemporains qui se concrétisent. Suivront les textes : « Des papillons sous les pas », « Bout de Bois », « les gens légers », « La loi de l'oie » de Jean Cagnard Ensuite, le CNES organise régulièrement des rencontres entre les compagnies de marionnettes et les auteurs contemporains. C'est à l'une d'elles, que nous rencontrons Fabienne Mounier, en 2002. Fabienne Mounier est l'auteur de: Dictionnaire Jeanne Ponge (roman, éditions de l'Escarbille) Les Longues études, 50' de comédie picturale, (1997) qu'elle crée et joue accompagnée aux pinceaux par Daniel Hénon Les Verticaux, (1998) réalisé par France Culture en 2001 (« Perspectives contemporaines »). Camping (1999) créé en juillet 2002 par le Théâtre pour 2 mains (Nantes) à la Chartreuse de Villeneuve lez Avignon, Centre National des Ecritures du Spectacle, dans une mise en scène de l'auteur (+ interprétation) Noces d'encre (2000) écrit en résidence à la Chartreuse, commande de la Chartreuse et de la Caravane des auteurs. Bourse de la D.M.D.T.S. La peur des araignées et autres petites bêtes, (février 2001) commande de la Cie d'Urgence 2 de Nancy Un tout petit morceau du monde, (août 2001) pièce écrite après avoir interviewé une trentaine d'agriculteurs et autres habitants ruraux, autour de la vie aujourd'hui à la campagne, commande de la Communauté de communes de Bligny-surOuche et du Théâtre de l'Index. En 2004, elle écrit et crée Oui ! Oui !!! Chou amer et tristesse pour le Festival Frictions, avec Daniel Hénon, spectacle avec 2 autoportraits parallèles, l'un dessiné, l'autre dit. En 2005 avec Daniel Hénon, Nature morte au coucou dans un box à chevaux, commande des 26000 couverts pour le Jour le plus bon. Edition : Dictionnaire Jeanne Ponge, éditions de l'Escarbille (sept. 2001) Histoire du petit tabouret, créé en collaboration avec Daniel Hénon, L'Ecole des Loisirs (sept. 2002) Esméralda, la vache qui parle, éditions MeMo (automne 2003) La forêt des grands (Ecole des Loisirs, septembre 2005) L'effraction dans Ecritures contemporaines (CRDP de Bourgogne, coll. Documents, actes et rapports pour l'Education - Ouvrage collectif) L’auteur Après avoir lu le texte « les verticaux », nous avons adopté la famille Verticaux et l'écriture de Fabienne Mounier à l'humour grinçant. Fabienne Mounier va à l'essentiel, elle a des fulgurances, elle transgresse. La famille Verticaux est telle une balançoire, tantôt aspirée en l'air vers le vaste monde, tantôt basculée en bas avec le mal aux fesses LE COUP DE FOUDRE ELLE. Ce qui m'a plu chez votre père ?... Oh ! oui ! oui ! quelque chose, mes enfants, quelque chose m'a plu. Si plu si plu, tant et si, si et tellement plu que je me suis unie à lui, et que, lui et moi, tous les deux, nous vous avons tirés des ténèbres d'outre-monde, un à un, et pétris, façonnés, ni trop cuits, ni pas assez, juste ce qu'il faut, parfaits, toi Guy, le coup d'essai, toi Guigui, pour peaufiner, toi Guillou, Guillette, pendant qu'on y était, et toi ma jolie Guili-Guili... le four était encore si chaud... Quelque chose m'a plu chez votre père, oui. Mais qu'est-ce que ça pouvait bien être ? Qu'est-ce que ça pouvait bien être ?... GUILLETTE. (Elle porte la même robe qu'avant mais teinte en orange.) C'étaient ses yeux. GUIGUI. Ses muscles ? Tous rient. ELLE. Oh ! ses muscles !... (Elle rit.) Mais alors quoi ? Je ne vois pas, je ne vois pas... Moi, j'ai toujours aimé l'amour. Avec votre père, fût un temps où nous nous valentinions toute l'année. Fût un temps où aussitôt lit, aussitôt fesses, deux brutes en rut, la peau à l'air, le trou de balles aux étoiles ! GUILLETTE. (émerveillée.) C'est beau ! (A Guili-Guili dans le giron de la mère.) Ecoute, Guili-Guili, la jolie histoire que nous raconte Maman. ELLE. Oui, c'est beau... Mais ce qui m'a plu chez votre père, ça, je ne m'en souviens plus. Les yeux, non, l'humour, non, les muscles... (rires.) Qu'est-ce qu'il reste ? GUY. Ses talents ? ELLE. En quoi ? GUY. Sa fortune ? GUIGUI. Son vocabulaire ? ELLE. Voui... GUILLOU. Je sais. La mobylette. ELLE. Ah ! la mobylette ! C'est vrai. Blanche, fougueuse, racée, sauvage ! Quelle allure, votre père sur la mobylette ! Si fier, invincible, comme un cavalier des steppes. Mais non, ce n'est pas ça non plus. GUILLETTE. Mais alors Maman, on ne voit pas du tout ce qui t'a plu chez Papa. On sèche ! ELLE. Moi aussi... Ah ! Attendez ! Ca me revient. Je sais. Je sais ce qui m'a plu chez votre père... C'est quand... C'est quand je l'ai vu la première fois. Un dimanche. Il était assis sur un sofa en peluche rouge. C'était l'heure du café. Il faisait beau. Les rideaux étaient tirés. Un oiseau est entré, minuscule, s'est posé sur un rai de soleil piqué de poussières dorées, sur un fil de la Vierge, sur l'épaule de votre père. Comme si de rien n'était, tranquillement, votre père a pris un morceau de chocolat. Il l'a placé dans sa cuillère. Il a plongé délicatement la cuillère dans sa tasse de café. De façon à ce que un peu de café chaud passe dans la cuillère. Ramollisse le chocolat. Il a introduit la cuillère de café et de chocolat mélangés dans sa bouche. Sans déranger l'oiseau sur son épaule. Et je me suis dit... Et je me suis dit... cet homme-là, il est d'une raffinerie ! Oui, c'est ça qui m'a plu chez Monsieur Verticaux. extraits ELLE. Ses yeux ? Pourquoi ses yeux ? GUILLETTE. Parce que j'ai les yeux de Papa et que tout le monde me dit que mes yeux, c'est ce que j'ai de plus beau. ELLE. Non, ce n'est sûrement pas ses yeux. Je m'en souviendrais. GUILLETTE. Ah !... GUILLOU. C'était son humour. ELLE. Oh ! doux monde ! son humour, quelle horreur ! Non, encore moins. L'humour de votre père a toujours pris l'eau comme les vieilles bottes de pluie. GUILLOU. C'était de l'humour. GUY. Ses dents ? Jacek Wozniak Conception visuelle, personnages et décors du spectacle les Verticaux Dessinateur de presse et affichiste (de jazz), Jacek Wozniak s'est surtout fait connaître en s'associant à l'édition de Sibérie m'était contéee, le dernier opus de Manu Chao vendu par dizaines de milliers de copies en librairie. Il a par ailleurs illustré l'Abécédaire partial et partiel de la mondialisation d'Ignacio Ramonet et Ramon Chao (Plon). Ce collaborateur du Monde et du Canard Enchaîné a réuni son "panthéon" génial en un volume mirifiquement coloré qui se moque de la chronologie mais pas des artistes y compris déviants. Quelques illustrations Wozniak On y retrouve à l'encre de chine et à la gouache, aux crayons de couleur et à l'écoline, les traits et flèches de Miles Davis et d'Archie Shepp, de Samuel Beckett et de Janis Joplin, de Balzac et de Tolstoï, de Kafka et de Bob Dylan, de Jimi Hendrix et de Frank Zappa. Ils sont cent (peintres, écrivains, musiciens) à se serrer au coude à coude dans cet album virevoltant, érudit, joyeux qui témoigne de la pétulante culture de cet artiste dont le propos n'est pas étranger, dans la forme, dans l'insolence, aux saillies des grands Willem le Provo, Roland Topor la Panique et Jacques Sternberg le bicycliste à moteur Solex et bonnet de marin.