Pic vert, Picus viridis (Linné, 1758)

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Pic vert, Picus viridis (Linné, 1758)
Cahiers d’Habitat « Oiseaux » - MEEDDAT- MNHN – Fiche projet
Pic vert, Picus viridis (Linné, 1758)
Synonyme : Pivert
Classification (Ordre, Famille) : Piciforme, Picidés.
Description de l'espèce
Le manteau, les cotés du cou, ainsi que les couvertures et rémiges secondaires sont verts. Le croupion est jaune, la
poitrine et le ventre jaunâtres. Le bord de l'aile (rémiges primaires) est bordé de noir et de blanc. Les lores et le
pourtour de l'œil sont noirs. Enfin, la calotte est rouge. Il n’y a aucune variation saisonnière.
Le mâle arbore une moustache rouge, entourée d'une bordure noire, tandis que la moustache de la femelle est
entièrement noire. Le jeune ressemble à l'adulte, mais son plumage est presque entièrement tacheté de noir. La
distinction mâle/femelle est déjà visible [5].
En plus de la sous-espèce nominale, une sous-espèce peut être observée en France : Picus viridis sharpei (Saunders,
1872), parfois appelé Pic de Sharpe. Sa face est plus grise (notamment en raison de l'absence de noir autour de l'œil)
et le bec plus court. Le mâle possède une moustache rouge seulement soulignée de noir et la femelle une moustache
noire.
L'adulte débute une mue prénuptiale de fin mai à mi-juillet (ailes) ou dès juillet (tectrices). Cette mue se complète
jusqu'à mi-octobre, et parfois jusqu'à fin novembre [1]. Une seconde mue, partielle, a lieu entre janvier et mars. Le
jeune effectue une mue complète de juin/juillet à novembre.
Le vol est onduleux, à l'instar des autres pics. Lancé toute l'année (sauf de fin juin à début août), son chant est
constitué d'un "rire" long et sonore (JCR, CD3/pl.27). Bien qu'émis par les deux sexes, celui de la femelle est moins
long et moins mélodieux [5]. Son tambour, rarement utilisé, est long et peu sonore. Le plus souvent, il fait entendre
une série rapide de notes dures et brèves. Près du nid, il pousse aussi un cri peu sonore, rappelant le chant. D'autres
cris sont décrits, comme les cris de menace (roulement doux, accompagné d'un balancement de la tête de gauche à
droite, bec dressé vers le ciel) ou les cris "de défi" ou d'alarme (cri bref, ressemblant à celui du Pic épeiche
Dendrocopos major). Chez le Pic de Sharpe, le chant est plus flutté, avec des notes plus hautes et un rythme plus
rapide [5].
Longueur totale du corps : 30 à 36 cm, Poids : 150 à 210 g.
Difficultés d’identification (similitudes)
Le pic vert et plus particulièrement la sous-espèce Sharpei ressemble au Pic cendré (Picus canus), mais celui-ci ne
possède qu'une petite tache rouge sur le front (pour le mâle) ou pas de rouge du tout (pour la femelle).
Répartition géographique
Il est présent dans les zones boréales, tempérées et méditerranéennes du paléarctique occidental, c'est-à-dire dans la
majeure partie de l'Europe, mais il manque en Islande, Irlande, Finlande, comme au nord de la Scandinavie et de la
Russie et sur les grandes îles de la Méditerranée [bg72].
L'espèce nominale viridis s'observe de l'Europe du sud jusqu'à la France, ainsi que dans les Alpes, le nord de la
Yougoslavie et en Roumanie.
Il est remplacé par la sous-espèce sharpei du nord de la péninsule ibérique, au coté espagnol du centre et de l'ouest
des Pyrénées et jusque dans le Roussillon.
En France, on retrouve l’espèce nominale sur l’ensemble du territoire, à l’exception du sud du Roussillon et de l'est
des Pyrénées où vit la sous-espèce P. v. sharpei, et de la Corse, où il n'est que visiteur occasionnel.
Biologie
Écologie
Le Pic vert est un oiseau des lisières boisées. En hiver comme au printemps, il recherche les alternances de zones
boisées et d'espaces dégagés. On le trouve dans les bocages, les vieux vergers, les anciennes haies, les peupleraies,
les ripisylves et les parcs. Dans les forêts, il s'installe dans les vieilles parcelles de feuillus âgées d'au moins 150 à
200 ans, près des lisières ou des clairières, des anciennes coupes de régénération (au stade fourré) ou des chemins
herbeux. Le Pic vert passe aussi beaucoup de temps au sol, dans un pré à l'herbe courte ou le bord d'un chemin, où il
collecte une partie de sa nourriture. Il est donc sensible aux changements dans les pâturages, résultant, par exemple,
de la variation dans les effectifs de moutons ou de lapins susceptibles de maintenir une strate herbacée basse.
Il occupe la plaine comme la montagne, où sa reproduction a été constatée jusqu'à plus de 2000 m d'altitude, [4 ;
bg6], voire même 2700 m [3].
Comportement
Le Pic vert est une espèce solitaire et diurne (hors période de reproduction, il se gîte, la nuit, dans d'anciennes loges,
souvent réutilisées années après année). Bien que des mouvements soient parfois signalés, comme dans le Finistère
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nord, il s’agit d’un oiseau sédentaire, qui ne s'éloigne guère à plus de quelques kilomètres de son territoire au fil des
années [bg71].
Solitaire en période internuptiale, les couples se forment de février à mi avril, voire début mai et demeurent ensemble
jusqu'en août. Sa présence a un impact indéniable sur la biodiversité, en raison de la réutilisation de ses cavités par
d'autres espèces cavicoles secondaires, tant d'oiseaux (mésanges, Étourneau sansonnet…) que de mammifères
(chauves-souris). Se nourrissant principalement au sol et ne s’attaquant qu’à des arbres affaiblis, il interfère très peu
dans la sylviculture.
Reproduction et dynamique de population
Le Pic vert se reproduit dés l’âge d’un an [6], avec une densité variant en France entre 0,6 et 5 couples pour 100 ha
[bg72]. Le chant du mâle se fait entendre dés janvier ou février, amenant les partenaires à se rapprocher
progressivement. Le couple formé, et le site de nidification choisit, le forage de la loge débute. Ce forage peut durer
28 jours. Principalement réalisé par le mâle, dans une grande variété d’essences (chêne, hêtre, peuplier, marronnier
d’Inde, pommier, tremble, érable…), il bat son plein en mars-avril. Cette loge est généralement située entre 1,5 et 10
mètres au-dessus du sol, et possède un trou d’envol d’au moins six centimètres. Sa profondeur est d’environ 30 cm,
pour un diamètre interne de 15 à 18 cm. Les œufs (cinq à sept) sont pondus en avril ou mai, sur un « matelas » de
copeaux et sont couvés par les deux adultes (le mâle durant la nuit) durant 15 à 17 jours (l’incubation commence dés
le dernier œuf pondu). Une fois éclos, les jeunes demeurent au nid durant 23 à 27 jours où ils sont nourris tant par le
mâle que par la femelle. Après l’envol définitif, les jeunes restent groupés par deux ou trois et ne seront indépendants
qu’après une période de trois à sept semaines (dispersion en août). Chacun des parents continue à les nourrir durant
quelque temps encore, les contacts sont maintenus entre adultes et jeunes jusqu'en automne (parfois jusqu'en
novembre). Le succès de reproduction de cette espèce est mal connu.
L’espèce n’assure qu’une seule nichée par an.
On note une hybridation possible avec le Pic cendré.
La longévité maximale observée grâce aux données de baguage est d’environ 11 ans [bg59].
Régime alimentaire
Le Pic vert est essentiellement insectivore et parfois phytophage. Il se nourrit principalement de larves et d'adultes de
fourmis du genre Lasius, Formica, myrmica, Tetramorium, Serviformica et Camponotus. Il capture aussi certains
coléoptères, notamment xylophage (Curculionidae, Scolytidae, Cerambycidae, Lucanidae, Coccinellidae), ainsi que
des diptères (principalement adultes), des chenilles et des perces-oreilles et, plus rarement, des cloportes, des
araignées, des myriapodes, des larves d'abeilles, des frelons, des guêpes, des courtilières et des punaises. A
l'occasion, il ne dédaigne pas les limaces, les escargots et les vers de terre.
Il lui arrive aussi de manger des végétaux, tels que les graines de céréales, de conifères (pins et thuyas) ou de feuillus
(chênes), ainsi que des fruits (baies de sorbiers, d'ifs ou de pyracanthas, cerises, raisins, poires et pommes) et des
bourgeons d'une grande variété d'espèces [bg7].
Les fourmilières sont visitées principalement entre la fin octobre (elles peuvent être localisées sous la neige) et mai.
Durant l'été, les fourmis sont capturées lors de leur passage sur le sol ou sur les arbres et les buissons. Certains sites
peuvent être exploités durant plusieurs semaines. En hiver, d'autres insectes peuvent être recherchés sur les pierres,
les fissures des murs, les planches, les toitures en bardeau et les poteaux télégraphiques. Ils peuvent être capturés en
vol.
Il lui arrive de lécher la sève des arbres, mais ce comportement est moins fréquent que chez le Pic épeiche.
Habitats de l'annexe I de la directive habitat susceptibles d'être concernés
Le Pic vert est une espèce encore largement répandue dans notre pays, qui se satisfait de nombreux types d'habitats,
dès lors qu'il y trouve des bosquets de feuillus âgés et des strates herbacées basses. On le trouve principalement dans
les différents types de forêts de l'Europe (91 à 95, Cor 4).
Néanmoins, il peut aussi être observé dans d'autres habitats :
6 - Formations herbeuses naturelles et semi-naturelles (Cor 34 à 38)
7 - Tourbières hautes, tourbières basse et bas-marais (Cor 51 à 54)
Statut juridique de l’espèce
Espèce protégée en France (Arrêté du 17 avril 1981) et inscrite à l’Annexe II de la convention de Berne.
Présence de l’espèce dans les espaces protéges
Compte tenu de la répartition et de l'adaptabilité de l'espèce, on peut la considérer comme présente dans la plupart
des espaces protégés.
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État des populations et tendances d'évolution des effectifs
Le statut de conservation du Pic vert est défavorable en Europe [bg2]. Sa population nicheuse européenne est
importante (>590 000 couples), mais a subit un déclin modéré entre 1970 et 1990. Entre 1990 et 2000, la plupart des
effectifs, y compris ceux des populations principales de France et de Roumanie, étaient stables ou en augmentation et
l'espèce était probablement stable partout.
Néanmoins, cette population n'a pas encore retrouvé ses effectifs antérieurs au déclin, et, par conséquent, l'espèce est
provisoirement considérée comme affaiblie.
La France accueille entre 34 et 46% de l'effectif nicheur européen [bg2]. Ses effectifs y sont stables [bg33], mais son
statut est encore considéré comme à surveiller [bg53]. Le Pic de Sharpe est aussi classé "A surveiller" sur la liste
rouge des oiseaux nicheurs du Languedoc-Roussillon [2].
Menaces potentielles
Le Pic vert est particulièrement sensible à l'uniformisation des paysages agricoles induisant une extension des
surfaces cultivées au détriment des surfaces toujours en herbe. Il pâtit de la disparition progressive de ses zones de
reproduction et de nourrissage : haies, bosquets, prairies naturelles ou semi-naturelles et vergers de plein vent, où les
vieux arbres sont éliminés et les herbages supplantés par les cultures. On peut y ajouter deux phénomènes concourant
à réduire encore ses ressources en nourriture : l'utilisation de produits phytosanitaires (insecticides, herbicides…)
ainsi que l'emploi d'engrais azotés ou de fortes doses de lisiers favorisant la croissance de l'herbe et, de ce fait,
l'élimination des fourmilières par excès d'ombrage et d'humidité [bg53].
Propositions de gestion
La stabilité des effectifs français de Pic vert est en partie due à la croissance des zones boisées sur le territoire
national, la situation variant selon les régions (boisements spontanés dans des régions touchées par la déprise
agricole ou autre).
En milieu agricole, ses secteurs d'alimentation doivent être conservés en maintenant des prairies naturelles, des haies,
des vergers avec des vieux arbres et des bocages au moyen de mesures agro-environnementales. L’entretien de
parcelles en jachère par fauche permet de maintenir des zones d’alimentation riches en invertébrés, dont les fourmis.
Pour les forêts de production, il est souhaitable que les méthodes sylvicoles intègrent les préoccupations de
conservation de la biodiversité, en conservant des vieux arbres, des arbres avec des loges, des arbres morts soit isolés
soit en bouquets.
À proximité des zones ouvertes à l’intérieur des massifs mais aussi sur les lisières, il est nécessaire de mettre en place
des îlots de vieux bois (vieillissement ou sénescence) en nombre suffisant.
De manière générale, il convient d'éviter les traitements phytosanitaires et le broyage notamment sur les parcs et les
talus routiers.
Études et recherches à développer
En raison de son caractère encore commun dans notre pays, le Pic vert suscite peu d'intérêt de la part des
observateurs. De ce fait, les données quantitatives sont peu nombreuses et sont souvent imprécises [bg53]. Bien que
classé "A surveiller" sur la liste rouge nationale, l'espèce ne bénéficie d'aucune enquête. La France, accueillant une
part importante de l'effectif européen (souvent en déclin hors de nos frontières), a donc un rôle important à jouer dans
la conservation de l'espèce. Il serait souhaitable d'établir au moins un programme de suivi à l'échelon national.
Bibliographie
1. BACKER, K. (1993).- Identification Guide to European Non-Passerines. BTO Guide 24. British Trust for Ornithology. 332 p.
2. COMITE MERIDIONALIS (2004).- Liste rouge des oiseaux nicheurs en Languedoc-Roussillon, juin 2003. Meridionalis 5: 1824.
3. DEJONGHE, J.F. (1984).- Les oiseaux de montagne. Éditions du Point vétérinaire. 310 p.
4. DEL HOYO, J., ELLIOTT, A. & SARGATAL, J. (2002).- Handbook of the birds of the world : jacamars to woodpeckers. Vol.
7. Birdlife International. Lynx Edicions. 600 p.
5. GEROUDET, P. (1980).- Les passereaux : du coucou aux corvidés. Vol. 1. Delachaux et Niestlé. 235 p.
6. PERRINS, C. & CUISIN, M. (1987).- Les oiseaux d’Europe. Delachaux & Niestlé, Neuchâtel, Paris. 320 p.
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