Introduction et analyse interprétative - méthode thématique

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Introduction et analyse interprétative - méthode thématique
Université Rennes 2
Un exemple d’analyse clinique projective
LES ÉPREUVES PROJECTIVES THÉMATIQUES1
Plan
V. UNE MÉTHODE D'ANALYSE DES RÉCITS T.A.T.
1. Principes généraux et critères d'analyse
I. QU'EST-CE QUE LES ÉPREUVES PROJECTIVES
THÉMATIQUES ?
2. Aperception - Résumé de l'histoire
1. Le T.A.T. de Morgan & Murray
3. Langage
2. Les autres épreuves thématiques
4. Structure temporelle - Structure dramatique
5. Analyse thématique
II. PLACE ET FONCTION DES ÉPREUVES
THÉMATIQUES DANS L'EXAMEN PSYCHOLOGIQUE
1. Les prérequis qu'elles supposent
5.1. Le concept de thème
5.2. Comment dégager le thème d'un récit
ou d'une suite de récits T.A.T. ?
2. Aspects développementaux : le récit enfantin
6. Mécanismes de défense
3. Comment introduire les méthodes thématiques
dans l'examen psychologique
7. Commentaires diagnostiques
7.1. Qu'est-ce que diagnostiquer ?
7.2. Construction diagnostique
III. L'UTILISATION DU T.A.T.
EN EXAMEN PSYCHOLOGIQUE
Références bibliographiques
1. Consignes spatiales et verbales

2. Consignes instrumentales : les planches
3. Conduite de l'observation
I. QU'EST-CE QUE LES ÉPREUVES PROJECTIVES
THÉMATIQUES ?
IV. BREF APERÇU DES MODÈLES INTERPRÉTATIFS
EXISTANTS
1. Le T.A.T. de Morgan & Murray
1. David Rapaport
2. Leopold Bellak
3. Zygmunt Piotrowski
4. Robert Holt
5. Vica Shentoub et l'école de Paris
6. Le groupe de Lausanne
7. La référence à l’Intrigue
1
En méthodologie projective, on appelle épreuves
thématiques un ensemble de méthodes de tests qui ont
pour point commun de demander au sujet testé de raconter
des histoires imaginaires à propos d'images montrant des
scènes dont la signification est plus ou moins ambiguë. La
première méthode du genre est le Thematic Apperception
Test (ou T.A.T.), inventé en 1935 par les psychologues
américains Christiana D. Morgan et Henry A. Murray
(édition définitive : 1943).
Dans l'histoire de la psychologie clinique, le T.A.T. est
un essai original et fondateur pour créer un mode
d'exploration de la personnalité, qui puisse en saisir les
caractéristiques singulières dans le cadre conceptuel d'une
psychologie dynamique. L'hypothèse méthodologique à la
base du travail de Morgan & Murray est que les
particularités aperceptives de la réponse du sujet nous
révèlent les principales caractéristiques de son univers
psychique. A la même époque, d'autres psychologues
américains, inspirés par la psychanalyse, préfèrent parler de
projection pour rendre compte du fonctionnement supposé
- Enseignant : Claude Bouchard, MC Psychologie clinique, Université Rennes 2 – mise à jour : février 2011.
Les épreuves projectives thématiques / 1
et de l'intérêt méthodologique de telles méthodes de tests
(notion de méthodes projectives : Lawrence K. Frank,
1939).
« ... nous considérons l'histoire racontée pour chaque
image du T.A.T. comme une projection, c'est-à-dire
l'attribution par le malade de ses sentiments, besoins et
tendances à des sujets (ou à des objets) du monde
extérieur qui, en l'occurrence, sont les images. » - (Bellak,
1947, p. 5)
découverte d'un dénominateur commun aux structures de
comportement actuel d'une personne, et à la genèse de ces
structures. Interprétation du T.A.T. signifie donc découverte
de dénominateurs et de structures communs aux récits
obtenus. » (Bellak, 1947, p. 7-8)
Nous reviendrons plus loin sur les principes de l'analyse
thématique et sur sa mise en œuvre.
2. Les autres épreuves thématiques
Psychologie dynamique : On appelle psychologie
dynamique une psychologie qui considère les faits
psychiques comme étant la résultante de forces et de
tensions en interactions (dynamis, en grec : force). La
psychanalyse est un exemple de psychologie dynamique
(notion de conflit intrapsychique), mais aussi la systémique
ou encore la dynamique des groupes (K. Lewin).
Aperception : « Appréhension d’informations par les voies
perceptives. Le terme, peu usité aujourd’hui, évoque une
saisie globale des stimulations perçues, voire une saisie
consciente. C’est avec cette dernière connotation qu’il avait
été repris par W. Wundt au vocabulaire de la philosophie. »
(M. Richelle, in : R. Doron & F. Parot, dir., Dictionnaire de la
psychologie, 1991, Paris, PUF, p. 46).
L'originalité du T.A.T. est cependant que la réponse aux
images composant le stimulus du test doit être « une
histoire aussi vivante que possible » (manuel de Murray,
trad. fr., p. 4), et que l'analyse psychologique qui va en être
dégagée, va se faire par l'intermédiaire d'une analyse
thématique des récits ainsi produits.
On a souvent dit que la méthode de Morgan & Murray
restait trop dépendante du contenu des histoires T.A.T.
en privilégiant le « quoi » (contenu) de la réponse au
détriment de son « comment » (forme), tout aussi riche en
indices psychologiques significatifs. Ce reproche est
cependant inexact et repose en grande partie sur une
mauvaise compréhension de l'analyse thématique
préconisée.
En fait, on peut dire que Morgan & Murray ne
s'intéressent au contenu des récits T.A.T. que dans la
mesure où il permet de faire apparaître et de dégager des
constantes formelles dans un ensemble de récits produits
par un même sujet. Les thèmes extraits d'une série
d'histoires ne sont pas réductibles aux situations que
celles-ci mettent en scène et développent, mais
correspondent à des formes (ou structures) abstraites
organisatrices de sens-pour-le-sujet. On peut donc dire que
l'analyse thématique telle que l'introduisent Morgan &
Murray est une analyse psychologique de type structuraliste
– ce qu'a très bien exprimé dès 1947 Leopold Bellak,
disciple et collaborateur de Murray :
« ... avant tout les images sont considérées, psychologiquement, comme une série de situations sociales et de
rapports interpersonnels. Au lieu de réagir à des personnes
réelles dans des situations réelles le client ou le malade
réagit à des personnes représentées par les images, qu'il
considère comme des situations sociales déterminées. [...]
De cette façon, nous prenons connaissance des structures
actuelles de son comportement social, et nous pouvons en
déduire la genèse de ces structures. Interprétation signifie
De nombreuses méthodes ont été créées dans la suite
du T.A.T., dérivées de son modèle.
2.1. La plupart d'entre elles sont nées d'un souci
d'adaptation des principes méthodologiques du T.A.T. à des
populations spécifiques :
 Le Children’s Apperception Test (ou C.A.T.) a été
conçu par Sonia Bellak et Leopold Bellak (1948, 1952) pour
les jeunes enfants. Les figures humaines montrées par les
planches du T.A.T. y sont remplacées par des figures
animales anthropomorphiques.
La même idée a été reprise par Gerald Blum pour ses
Blacky Pictures (1950), dont l'originalité est surtout dans le
choix de figurer toujours les mêmes personnages d'une
planche à l'autre, en favorisant ainsi une production
d'histoires à épisodes. (On peut remarquer que cet appareil
donne un étayage dramatique plus sûr aux jeunes enfants,
spontanément portés à une construction dramatique assez
sommaire.) En France, Louis Corman a repris le principe de
l’épreuve de Blum et l’a perfectionné avec son épreuve
des Aventures de Patte-Noire (1961).
Pour les écoliers, R. Nathan et G. Mauco ont créé en
1966 les Planches de situation scolaire complémentaires au
T.A.T.
 Du côté des adolescents, citons principalement le test
de Symonds (1948), et l'épreuve Dynamique Personnelle &
Images (ou D.P.I) de Roger Perron (1969). Bien que conçu
pour tous les âges, comme le T.A.T., le D.P.I. s'avère
particulièrement adapté pour les enfants d'âge scolaire et
les jeunes adolescents.
 Pour les personnes âgées, existent le Senior
Apperception Test (ou S.A.T.) de Leopold Bellak (1990), et
en France le Test Projectif pour Personnes Agées de
Laforestrie-Missoum (publié dans les années 80).
 De très nombreuses variantes du T.A.T. ont également
été créées pour s'adresser à des groupes ethniques
spécifiques, tel par exemple le Congo-T.A.T. d'André
Ombredane (1954), ou plus récemment les travaux de
George De Vos (1990). (Voir aussi : Henry, 1951.)
2.2. D'autres épreuves thématiques se sont centrées sur
des champs relationnels ou psychosociaux particuliers.
Par exemple : le Family Attitudes Test de Lydia Jackson
(1952), connu en France sous le nom de « Test des
Attitudes familiales ».
2.3. Enfin, certaines épreuves thématiques se sont
construites sur une transformation de l'instrument T.A.T.
lui-même. Citons notamment :
 le Four Pictures Test (ou F.P.T.) de Van Lennep
(1939, 1947), qui ne propose que quatre images, en
couleurs, à combiner par le sujet pour une histoire unique, à
produire par écrit ;
 le M.A.P.S. (Make-A-Picture-Story) d'Edwin S.
Shneidman (1947), qui propose un appareil permettant de
Les épreuves projectives thématiques / 2
dissocier personnages et décors dans un espace à trois
dimensions ;
 l'O.R.T. (Object Relation Test) de Herbert Phillipson
(1955), dont les planches intègrent les qualités d'indétermination formelle de l'épreuve de Rorschach, selon divers
degrés de clarté perceptive et de coloration des images
présentées ;
 les Pickford Projective Pictures de R.W. Pickford
(1960) qui, en réduisant le format des planches proposées
et en multipliant leur nombre (jusqu'à 120 !), permettent de
disposer d'un matériel d'images abondant, utilisable avec
souplesse en situation diagnostique et en psychothérapie.
Il. PLACE ET FONCTION DES ÉPREUVE THÉMATIQUES
DANS L'EXAMEN PSYCHOLOGIQUE
1. Les prérequis nécessaires
Même si le principe de tout test est de mettre à
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l'épreuve un sujet de façon à valider des hypothèses
cliniques, cette mise à l'épreuve ne peut être tentée sans
quelques prérequis nécessaires minimaux.
En l'occurrence, la plupart des épreuves thématiques
étant des épreuves verbales, elles ne peuvent être utilisées
avec les sujets présentant des troubles importants du
langage et/ou de la parole. Seuls le M.A.P.S. et le
Scénotest, qui obligent une manipulation de matériel dans
un espace à trois dimensions, peuvent éventuellement se
passer d'une production verbale élaborée, pour limiter
l'observation et l'analyse à des données de productions
gestuelles et spatiales.
Pour les mêmes raisons, les problèmes de langue
peuvent être un obstacle important voire radical à l'usage
de telles méthodes, sans compter que certains jeux
d'images thématiques
sont
saturés
de
facteurs
socioculturels qui supposent une familiarité avec le contexte
de référence (d'où l'adaptation de certains tests : Congo
T.A.T., Patte-Noire version « Mouton » pour les sujets
musulmans, etc.).
Toujours sur le plan verbal, les épreuves thématiques
exigent chez le sujet un discours plus élaboré que, par
exemple, dans les épreuves uniquement aperceptives de
type Rorschach. Dans ces dernières, il peut suffire que le
sujet nomme ce qu'il perçoit ou qu'il le qualifie, alors qu'avec
les épreuves thématiques il lui faut décrire une scène et une
action, production discursive plus complexe.
Par ailleurs, il est parfois dit que le fait d'avoir connu une
histoire personnelle perturbée ou déstructurée peut rendre
difficile, pour certains sujets, de répondre à des épreuves
qui demandent précisément de raconter des histoires. Notre
expérience nous montre que cette difficulté éventuelle
n'est nullement liée au fait que l'histoire du sujet soit
« objectivement » complexe ou mouvementée, mais
beaucoup plus au retentissement de ces événements chez
le sujet et aux effets éventuels d'empêchement ou de
désorganisation de sa capacité à se donner de l'histoire et à
organiser de l'histoire. Certains enfants dont l'histoire vécue
a été fort tourmentée, restent capables de produire des
récits, et parfois même le font d'autant mieux que les récits
demandés en situation d'épreuve thématique doivent être
imaginaires et non réels.
2
- C’est le sens du mot test, qui signifie en anglais :
« essai ».
Enfin, la mise en scène plus ou moins nécessitée par les
épreuves thématiques (selon leur variété) renvoie à une
historicité (i.e. capacité à organiser historiquement le
monde) qui n'est pas d'emblée disponible du point de vue
du développement psychologique. D'où le fait que les
épreuves thématiques ne puissent aisément être employées
avec les jeunes enfants (de moins de 7 ans), à moins de
recourir à des appareils pré-construits du point de vue de la
mise en scène (par ex., dans le Patte-Noire chaque image
est un épisode des mêmes « Aventures de Patte Noire »,
les personnages ayant été identifiés au départ grâce à la
planche Frontispice), ou à moins de se contenter de
réponses uniquement aperceptives (interprétations des
images), sans véritables constructions et développements
scéniques.
Cette dernière remarque nécessite un développement
particulier, car il s'agit d'un aspect souvent négligé ou sousestimé, notamment lorsqu'on analyse les récits d'enfants
dans les épreuves thématiques.
2. Aspects développementaux : le récit enfantin
Roger Perron, l'inventeur du test D.P.I., est l'un des
rares auteurs, à notre connaissance, à avoir systématiquement étudié et repéré, d'un point de vue développemental,
ce qu'il a appelé la maîtrise des « lois de construction du
récit » (Perron, 1975). A partir d'une expérience portant sur
les protocoles de D.P.I. produits par 300 enfants âgés de 5
à 14 ans (soit 7.000 histoires au total !), Perron dégage trois
« stades » dans la mise en place évolutive de la
« thématique d'entreprise », prise comme scénario-type
(« un personnage engagé dans une action axée sur un
but », 1975, p. 15) :
 le récit statique : soit 36 à 50 % des récits des enfants
de 5-7 ans, mais fréquence importante et stable à tous les
âges (28-35 %).
« Simple énumération des éléments du dessin ; ou
description d'actions actuelles, peu significatives, immédiatement visibles sur la planche (“il parle, il marche, il met le
bras comme ça”, etc.) ; ou évocation d'une seule activité ou
situation, sans qu'on puisse y distinguer des étapes
distinctes : le héros joue, lit, rêve, etc., mais ceci est
évoqué globalement sans qu'il apparaisse une action
centrée sur un but, développée et aboutissant à une issue »
- (Perron, 1975, p. 18)
 le récit juxtaposé : très fréquent à 5-7 ans, de plus en
plus rare après 9 ans.
« Evocation de plusieurs activités ou situations sans
liens logiques nets ; c'est-à-dire qu'elles ne découlent pas
les unes des autres par voie de conséquence ou sous
l'effet d'un principe directeur commun. Il y a simple
succession temporelle aléatoire, de sorte qu'on pourrait
modifier l'ordre du discours sans en altérer le sens. […] De
tels “récits”, qui se bornent à une simple succession
temporelle d'activités banales, peuvent être commencés et
terminés en n'importe quel point, abrégés ou indéfiniment
allongés selon l’humeur du moment de l’enfant qui les
donne ; ils reviennent souvent, à peu près identiques, sur
des planches successives, l'enfant ne tenant que très peu
compte de ce que chaque planche représente. » - (ibid.,
p. 18)
 le récit coordonné ne représente que 25 % des récits à
7 ans, mais il est dominant à partir de 9 ans, jusqu'à 70 %
après 12 ans.
« En ce cas au contraire on peut distinguer des
moments successifs, correspondant à des étapes de l'action
Les épreuves projectives thématiques / 3
logiquement enchaînées, où se marquent des effets de
causalité et/ou un principe directeur commun. On ne peut
intervertir ces moments sans absurdité. » - (ibid., p. 18)
On remarquera que la structure « statique » est la
moins significative du point de vue développemental,
puisqu'elle apparaît à tous les âges dans une proportion
non négligeable. Les structures « juxtaposée » et
« coordonnée » sont beaucoup plus relatives à l'âge, et
donc plus significatives d'une organisation historique dont
les périodes-clés se situent aux alentours de 7 ans et de 12
ans. Ces constats rejoignent ceux des recherches (assez
rares, en fait) sur la genèse de la production de récits
(Fayol, 1985 - voir notamment p. 78-82).
3. Comment introduire les épreuves projectives
thématiques dans l'examen psychologique
Les méthodes projectives en général passent pour des
méthodes plus « ouvertes », moins contraignantes que les
épreuves psychométriques et leur place dans l'examen
psychologique est souvent conçue à partir de cette idée.
Dans la réalité, cet effet escompté de « libération » positive
est loin d'être toujours confirmé, ce qui peut amener le
clinicien à utiliser les épreuves projectives avec davantage
de précautions que les épreuves métriques.
Toutefois, il est tout aussi exagéré de penser que
les épreuves projectives sont plus « violentes » que les
épreuves psychométriques ou qu'une méthode d'entretien.
C'est vrai pour certains sujets et pas pour d'autres, et l'idée
que les tests « de personnalité » sont plus intrusifs que
les autres méthodes repose en grande partie sur une
idéalisation de ces tests comme pouvant explorer des
aspects plus « profonds » ou plus intimes du psychisme.
Les niveaux d'analyse impliqués par les épreuves
projectives ne sont a priori ni plus sensibles ni plus chargés
d'affects que ceux que l'on peut solliciter dans un entretien
ou par le moyen de tests dits « objectifs ». On pourrait dire
là encore que c'est vrai pour certains sujets et pas pour
d'autres, et que c'est bien parce que chaque sujet réagit
différemment à la diversité des sollicitations qu'on pourra lui
proposer, qu'il est intéressant et important de varier et de
moduler ces sollicitations en conséquence. C'est même à
prendre en compte cette nécessaire variation que notre
investigation sera clinique, i.e. qu'elle suivra le sujet au plus
près de ses particularités singulières.
De façon générale et comme pour tout test psychologique (fût-il même « psychométrique »), une épreuve
projective thématique est à employer en fonction des
interrogations préalablement dégagées par l'analyse
clinique d'une situation-problème faisant « demande ».
Le recours au test choisi correspondra ainsi à une triple
pertinence :
 choix de procéder à un testing (pertinence d'expérimentation) ;
 choix de le faire à ce moment-là de l'investigation et/ou
de l'intervention à mener (pertinence d'opportunité) ;
 choix de le faire avec cette méthode-là (pertinence
d'indication).
C'est en se posant ces trois questions et en y répondant,
que le clinicien peut optimalement se maintenir dans une
vigilance et une inventivité cliniques, loin de toute procédure
uniforme et/ou « sauvage ».
Place des épreuves thématiques
dans l'examen psychologique de l'enfant
« Par rapport aux épreuves d'efficience, la situation
projective peut favoriser un moment de détente étant
donné qu’il n'y a plus de performance à accomplir ; le
chronométrage devient discret ou inexistant, l'enfant est
libre de ses réponses. Certains enfants seront au contraire
inquiets de voir disparaître un cadre strict. Dans les faits, si
une approche clinique préside à l'ensemble de l'examen
psychologique, il n'y a pas un hiatus total entre les diverses
situations : toutes les réponses, “bonnes" ou pas, libres ou
cadrées, offrent toujours un reflet du fonctionnement
psychique ; certains subtests d'efficience sont même lourds
d'implications projectives, livrant parfois ouvertement les
problématiques en termes d'agressivité, de dépendance, de
fragilité identitaire ou de troubles identificatoires. Demander
à l'enfant de raconter les histoires correspondant à ses
“arrangements d'images” du WISC-R peut constituer une
excellente introduction aux épreuves thématiques
verbales. »
(M. Boekholt, Épreuves thématiques en clinique infantile.
Approche psychanalytique, Paris, Dunod, 1993, p. 14.)
III. L’UTILISATION DU T.A.T.
EN EXAMEN PSYCHOLOGIQUE
Nous envisagerons essentiellement l'exemple du T.A.T.
de Murray, mais les indications concernant cette méthode
peuvent être facilement transposées aux épreuves
thématiques qui lui sont proches (C.A.T., test de Symonds,
D.P.I.). D'autres méthodes, comme par exemple le
M.A.P.S., le Scéno-test, et les épreuves d'aventures en
série (type Blacky Pictures ou Patte-Noire), supposent des
procédures d'administration et d'analyse spécifiques, dont
nous ne parlerons pas ici.
1. Consignes spatiales et verbales
1.1. Les consignes spatiales et posturales correspondent à l'organisation et à la conduite de la séance
(setting).
Il conviendra de disposer d'un lieu et d'un temps
suffisants pour mener l'expérience aussi confortablement
que possible.
Le sujet sera installé assis devant une table de hauteur
normale et sur laquelle il pourra éventuellement poser les
planches qu'on va lui montrer.
Le psychologue sera installé assis sur un côté de cette
table, prêt à enregistrer par écrit les réponses du sujet. Il
dispose, à portée de la main, des « planches » qu'il va
présenter au sujet, préparées dans l'ordre de leur
présentation et face retournée vers le bas (le sujet ne doit
pas voir à l’avance les images qui lui seront proposées).
On peut user d'outils enregistreurs (magnétophone,
caméscope), après accord du sujet comme il se doit.
L'expérience montre toutefois qu'il est préférable, même en
cas d'enregistrement audio ou vidéo, de prendre des notes
en séance :
 afin de pouvoir éventuellement pallier les défaillances
des enregistrements audio ou vidéo ;
Les épreuves projectives thématiques / 4
 parce que la prise de notes en situation capte des
phénomènes plus directement perçus et ressentis, pas
toujours repérables à la lecture hors-situation d'un
enregistrement audio ou vidéo : un tel enregistrement peut
tout au plus permettre de vérifier si les réponses du sujet
ont été complètement notées, mais ne remplace jamais la
perception in vivo et en relation du climat transférentiel ou
émotionnel de la séance, ou de certains aspects posturaux,
mimiques, de ton de voix, de qualité du regard, etc. – (bien
qu'il s'agisse là d'éléments secondaires de l'analyse).
Après l'installation de la séance et l'énoncé des
consignes verbales, l'observateur donne la première
planche ; puis, lorsque le sujet a fini de répondre à celle-ci, il
introduit la planche suivante, et ainsi de suite jusqu'à la fin. Il
est intéressant de donner la planche au sujet de telle
manière qu'il puisse, à son choix, la prendre directement en
main, ou bien l'examiner posée sur la table par
l'examinateur, sans avoir à la toucher si telle est sa réaction
« spontanée ».
A la fin de l'épreuve, il pourra être également intéressant
de demander au sujet de choisir les planches qu'il a
préférées et celles qu'il a le moins aimées, et de justifier ces
choix (épreuve des choix) – ou au moins, de lui demander
son avis sur les images qu'il vient de voir et sur les histoires
qu'il a racontées.
1.2. Les consignes verbales :
Il en existe en fait un grand nombre, proposées par
divers auteurs. Nous n'en retiendrons ici que trois parmi les
plus classiques.
 Consigne de Murray (1935, 1938) :
« Voici un test d'imagination. Je vais vous montrer une
image, et je voudrais que vous inventiez un scénario ou une
histoire qu'elle pourrait illustrer Quelles sont les relations
entre les personnages ? Que leur arrive-t-il ? A quoi
pensent-ils et que ressentent-ils ? Comment cela finira-t-il ?
Je voudrais que vous fassiez de votre mieux. Il s'agit d'une
épreuve d'imagination littéraire, vous pouvez donc faire
votre histoire aussi longue et aussi détaillée que vous le
voulez. »
Dans son manuel de 1943, Murray propose un énoncé
plus complexe, dans un dispositif comprenant en fait
plusieurs consignes, avec des variantes. Pour la planche 16
(blanche), il spécifie la consigne suivante :
« Dites-moi ce que vous pouvez voir sur cette planche
blanche. Imaginez qu'il y a une image et décrivez-la moi en
détail. Maintenant, racontez-moi une histoire là-dessus. »
 Consigne de Bellak (1947) :
« Je vais vous montrer quelques images ; j'aimerais
que vous me racontiez des histoires sur ce qui se passe
dans chaque image, ce qui l'a précédé et ce que sera le
dénouement. Je vous demande de le faire de façon vivante,
pleine d'action, et de vous laisser aller à votre
imagination. » - (Bellak, 1947, p. 6)
Et comme variante de la consigne de Bellak :
 Consigne de Monique Morval (1977, 1982) :
« Je vais vous montrer des images. Pour chacune
d'elles, vous allez me raconter une histoire, c'est-à-dire
décrire ce qui se passe, ce que les gens pensent et font,
comment c'est arrivé et comment cela va finir. Avez-vous
bien compris ? il s'agit donc de dire ce qui s'est passé
avant, pendant, après. Voici la première image. » - (Morval,
1977, p. 19)
En résumé : Quelle que soit la formulation choisie, il
s'agit surtout de faire entendre que :
 on va montrer des images...
 avec des scènes (personnages)
 le sujet va avoir à dire ce que cela représente...
 et à le dire par une histoire (avec début, développement, fin).
Facultativement, on peut préciser :
 que le sujet peut prendre son temps
 qu'il doit dire une histoire différente pour chaque
image.
2. Consignes instrumentales : les planches
2.1. Dans le dispositif conçu par Murray, la séance de
T.A.T. se déroule en deux parties distinctes : la seconde
(planches 11 à 20) ayant pour objectif de favoriser des
histoires plus fantaisistes que la première (planches 1 à 10).
« Tâchez d'inventer [des histoires] plus passionnantes
encore que la dernière fois, comme un rêve ou un conte » (Murray, 1943, p. 6). Cet encouragement à « faire encore
mieux » est également indiqué par le choix de planches,
pour cette seconde partie, plus fantastiques ou plus
bizarres.
Au total, Murray proposait ainsi de montrer deux fois dix
planches (soit 20 planches), choisies parmi les 31 planches
disponibles selon l'âge et le sexe du sujet (symboles
indiqués au verso des planches, avec leur numéro : M :
male, F : female, B : boy, G : girl).
Exemples :
- la planche 3 existe en deux versions : 3BM (hommes et
garçons) et 3GF (femmes et filles) ;
- la planche 12 présente trois versions : 12M (hommes),
12F (femmes), 12BG (enfants des deux sexes) ;
- plusieurs planches n'existent qu'en une seule version :
1, 2, 4. 5, 10, 11, 14, 15, 16, 19, 20.
2.2. Ultérieurement, la procédure d'origine (conçue pour
des pratiques expérimentales de laboratoire) s'est avérée
trop lourde dans la pratique diagnostique courante, en
institution. D'où l'usage, établi dès les années 40,
d'administrer le T.A.T. en une seule séance, moyennant la
réduction du nombre des planches présentées (Bellak, par
exemple, suggère de n'en proposer qu'une dizaine). Mais
dès lors se pose la question de la sélection des planches à
proposer et de leur ordre de présentation.
Ce choix est d'autant plus difficile à faire que les
planches du T.A.T. sont nombreuses et qu'elles constituent
une collection tout à fait exceptionnelle par rapport au
matériel des autres épreuves thématiques, en raison de leur
grande diversité formelle et stylistique - (Henry, 1956 ;
Bouchard, 1989-b).
On peut s'aider, pour ce choix, des constats et
propositions recensés dans la littérature T.A.T. quant aux
effets respectifs des 31 planches de Murray, et en particulier
au moyen de notre Guide d'utilisation des planches du
T.A.T. (Bouchard, 1999).
Généralement, les praticiens contemporains adoptent
une série abrégée standard, immuable ; ou bien ils
retiennent quelques planches régulières, constantes,
auxquelles ils ajoutent, selon les besoins spécifiques de
l'investigation menée, d'autres planches spécialement
choisies.
Les épreuves projectives thématiques / 5
En 1970, Hartman demande à 90 psychologues
américains de classer les planches du T.A.T. par ordre
d'importance, et en dégage une série moyenne de huit
planches valables pour tout sujet : 1, 2, 3BM, 4, 6BM,
7BM, 13MF, 8BM. Mundy (1971) suggère d'y ajouter la
planche 12BG pour les sujets féminins.
Quelques auteurs ont défini des séries standards,
construites sur des bases à la fois empiriques et
théoriques (selon certaines options interprétatives).
C'est le cas par exemple de Bellak, qui indique :
- pour les sujets masculins : 1, 2, 3BM, 4, 6BM, 7BM, 11,
12M, 13MF
- pour les sujets féminins : 1, 2, 3BM, 4, 6GF, 7GF, 11,
13MF.
Dans ce même arrangement, Morval remplace la
planche 13MF par la 13B pour les enfants, et termine la
série en ajoutant la planche 16 (blanche) - (Morval,
1982).
Holt suggère les planches : 1, 2, 3BM, 4, 6BM, 7BM,
8BM, 12M, 13MF, 15, 18BM, et préconise l'usage de la
planche 16 (Holt, 1951).
En France, Vica Shentoub a défini un autre standard
- pour les adultes : 1, 2, 3BM, 4, 5, 6BM/6GF, 7BM/7GF,
8BM, 9GF (femmes), 10, 11, 12BG, 13B, 13MF, 19, 16
- pour les enfants : 1, 2, 3BM, 4, 5, 6BM/6GF, 7BM/7GF,
8BM, 9GF (filles), 10, 11, 12BG, 13B, 19, 16.
Le T.A.T peut être appliqué aux enfants de plus de 7 ans
(en-deçà de cet âge, les réponses sont généralement
descriptives) - (Perron, 1975). Plus spécialement pour
eux, Morval propose la série : 1, 2, 3BM, 5, 7GF, 8BM,
12M, 13B, 14, 17BM, 16.
Rotter signale que les planches suscitant le plus
d'interprétations chez les enfants sont, par ordre
décroissant : 7GF, 18GF, 3GF, 8GF ; et celles qui sont
les moins interprétées : 19, 18BM, 11, 12BG. Il en
conclut que les enfants répondent plus facilement à des
planches leur montrant des personnages ou des
situations pouvant susciter leur sympathie (Rotter,
1946).
Une autre possibilité est de se réserver une série de
base permettant des comparaisons entre plusieurs
sujets ou entre plusieurs examens, et d'y ajouter
occasionnellement d'autres planches en fonction de
problèmes particuliers à explorer. C'est ce que
préconise par exemple Bellak, dont la série standard est
conçue en fait comme une base minimale pouvant être
complétée par une ou plusieurs autres planches selon
les besoins de l'examen.
Une autre possibilité, enfin, est de laisser le sujet choisir
lui-même les planches et leur ordre de sériation. En ce cas,
on lui présentera l'ensemble des 31 planches, rangées en
tas dans l'ordre de leur numérotation, en lui demandant
de les examiner, puis d'en choisir une première, une
seconde, etc., dans l'ordre qu'il veut. Le choix des planches
pourra être soit préétabli en nombre : « Vous choisirez dix
planches » (ou tout autre nombre décidé par le psychologue), soit limité dans le temps : « Vous allez raconter
une histoire par image. Nous allons travailler ainsi pendant
une demi-heure » (ou toute autre durée choisie par le
psychologue).
Dans ce type de procédure, une dimension expérimentale nouvelle entre en jeu : le choix et l'ordre des
planches établis par le sujet, dont on peut supposer qu'ils ne
seront pas aléatoires.
3. Conduite de l'observation
3. 1. Le relevé de séance
Le psychologue notera, bien entendu, les histoires
produites par le sujet en réponse aux planches présentées.
Mais il notera aussi :
 toutes les caractéristiques de ces histoires telles
qu'elles ont été dites : avec leurs hésitations, leurs
répétitions, leurs temps de silence, leurs particularités
verbales (maladresses syntaxiques, erreurs grammaticales,
lapsus) ;
 tout ce que le sujet pourra dire en dehors des histoires
elles-mêmes (discours d’accompagnement) : commentaires,
hésitations, questions à l'observateur ;
 tout ce que le sujet pourra manifester comme attitudes
et comportements : postures, mimiques, commentaires
gestuels, tenue de la planche, manipulations de la planche ;
 toutes les questions et interventions, in extenso, que le
psychologue sera amené à poser.
3.2. En cours de séance, le psychologue veille à
respecter les réponses du sujet. Sa neutralité répond à la
fois à un principe de non-jugement et à un principe... de
prudence clinique selon l'exigence d'abord de « voir » avant
de « savoir », d' « écouter » avant d' « entendre ».
Toutefois, la rigueur de l'observation exige aussi qu'elle
soit pertinente, ce qui suppose que le psychologue ait aussi
à s'assurer d'une compréhension optimale et valide des
réponses produites par le sujet. A ce titre, et sans
contradiction aucune avec les principes ci-dessus de
3
« neutralité » , il se doit d'intervenir à bon escient afin
d'obtenir toutes les données expérimentales nécessaires à
son travail d'analyse interprétative. Ceci, bien entendu, dans
les limites que lui impartit son appréciation clinique et
éthique de la situation actuelle de testing.
De façon générale, le clinicien peut adopter quatre types
d'interventions :
 le rappel des consignes, notamment la demande d'une
histoire complète et, pour la planche 16, l'impératif de
décrire d'abord une image avant le récit ;
 l'aide, l'encouragement : en cas de doute, d'inhibition
exprimée parle sujet ;
 la demande de clarification : lorsqu'un aspect du récit
demeure ambigu ou qu'il prête à confusion ;
 l'enquête proprement dite (à l'instar de ce que l'on
pratique dans l'épreuve de Rorschach sous le nom de test
aux limites - Pignol & al., 1992).
Bien entendu, toutes ces interventions ne peuvent
insister au-delà des limites, non seulement de la tolérance
du sujet (selon les principes ci-dessus), mais aussi au-delà
des limites d'empêchement du sujet qui deviendront alors
significatives.
Exemple : Si malgré nos rappels d'avoir à produire une
histoire complète, le sujet se borne à seulement décrire
l'image ou une situation non développée ou non
terminée, il faudra supposer que se manifeste par là une
incapacité problématique, dont on aura à déterminer la
nature et la signification. Même dans le cas où l'on peut
3
- Afin d’éviter tout malentendu (par confusion avec la
psychanalyse) et toute illusion sur les effets de la présence
du psychologue, il nous paraît préférable et plus juste de
parler d’implication raisonnée du clinicien plutôt que de
« neutralité ».
Les épreuves projectives thématiques / 6
faire l'hypothèse d'une « résistance » de la part du sujet,
il reste à préciser de quel type de résistance il s'agit
(mécanismes défensifs employés) et la fonction de cette
résistance dans le contexte psychique du sujet (mode
de relation d'objet, angoisse de base, modalités transférentielles).
IV. BREF APERÇU DES MODÈLES INTERPRÉTATIFS
EXISTANTS
Il existe plusieurs méthodes d'analyse des récits T.A.T.
Nous ne retiendrons ici, pour un simple rappel, que celles
qui s'inspirent de références psychanalytiques.
1. David Rapaport est l'un des premiers (1946) à avoir
insisté sur l'importance des « indices formels » dans les
récits T.A.T., et à en avoir développé l'usage interprétatif en
termes de conformité aux consignes, de cohérence de la
réponse, et de caractéristiques de la verbalisation. Pour
Rapaport, le T.A.T. prend place dans une conception
générale du diagnostic psychologique, et serait plus
spécifiquement à renvoyer à l'étude de la structure du
« contenu idéationnel » (ideational content) et des
processus de pensée.
Avec ses élèves et collaborateurs (Roy Schafer, Merton
Gill), Rapaport est aussi l'un des premiers à avoir dressé,
dès la fin des années 40, un inventaire de signes
psychopathologiques au T.A.T.
2. Comme Rapaport, Leopold Bellak (1947, 1954)
accorde une importance toute particulière aux indices
formels au T.A.T., mais pas dans le même esprit. Pour lui,
ces indices s'inscrivent dans une approche essentiellement
attentive à la dynamique besoins/défenses et au « degré
d'adaptation » que permet cette dynamique. L'analyse en
sera menée, analogiquement, tant au niveau de l'histoire
elle-même (« adaptation du héros ») que du narrateur luimême (conduite de la tâche, caractéristiques formelles de la
réponse).
« ... on ne doit pas étudier le T.A.T. uniquement pour les
tendances qu'il révèle, mais aussi pour les réactions de
défense opposées à ces tendances. Très souvent, une telle
étude des réactions de défense fournit plus de
renseignements, en ce sens que les tendances peuvent,
d'une part apparaître moins clairement que les défenses qui
leur sont opposées, et d'autre part être en connexion plus
étroite avec la conduite “manifeste” Par cette étude des
tendances et des défenses, le T.A.T. conduit souvent à une
analyse bien nette de la structure du caractère du sujet. »
(Bellak, 1947, p. 17)
Les « mécanismes de défense » ainsi analysés sont
référés aux travaux d'Anna Freud (Le moi et les
mécanismes de défense, 1937) et, plus tard, à la
psychologie du Moi de Heinz Hartmann (La psychologie du
moi et le problème de l’adaptation, 1939). Le diagnostic
psychologique recherché se dira en effet en termes de
« force du Moi ».
Notons encore que Bellak est l'un des premiers
cliniciens à avoir introduit en psychologie projective la notion
d'image du corps, empruntée à Paul Schilder (L'image du
corps, 1935).
En langue française, la principale représentante
contemporaine de la méthode de Bellak est la psychologue
canadienne Monique Morval (1977, 1982).
3. Zygmunt Piotrowski transpose au T.A.T. les règles de
l'interprétation psychanalytique des rêves, en formulant neuf
règles d'interprétation applicables au maniement de
personnages fictifs, et en particulier au T.A.T. (1950).
Ces principes seront diffusés en France par Didier
Anzieu (1960) et par Louis Corman (1963). Ils influeront
d'ailleurs sur le développement des Aventures de PatteNoire par ce dernier auteur, conjointement à l'exemple des
Blacky Pictures de Blum.
4. En opposition à l'assimilation du récit T.A.T. à un rêve
ou à une rêverie, Robert Holt (1961) propose de considérer
la réponse T.A.T. comme un « produit cognitif » particulier,
et d'en rendre compte selon les conceptions de la
psychologie du Moi. Mais à la différence de Bellak qui
retient d'abord de l'Ego-psychology une dynamique
défensive et adaptative au niveau du Moi, Holt propose une
théorie de la réponse T.A.T. qui insiste davantage sur une
économique de « neutralisation des pulsions » par le Moi.
Holt introduit ainsi à propos du T.A.T. – et après
Rapaport déjà – une conception de la réponse T.A.T. qui
renvoie celle-ci à une théorie de la pensée, d'inspiration
psychanalytique. Son œuvre constituera l'une des sources
du travail de Vica Shentoub en France.
5. D'abord inspirée par les travaux américains (Bellak,
Dana, Schafer, Holt), Vica Shentoub publie ses premiers
travaux sur le T.A.T. à la fin des années 50. Elle propose
une première version de sa « feuille de dépouillement » des
histoires T.A.T. – maintes fois remaniée depuis – en 1958.
C'est en s'appuyant sur les travaux de Lagache sur la
fantaisie, que Vica Shentoub va pouvoir reprendre le
modèle psychanalytico-cognitif de Holt et le modifier pour y
réintroduire la dimension du fantasme. Ainsi, dans les
années 60, introduit-elle l'idée que la réponse T.A.T.
correspond d'abord à un mode d'investissement particulier
par rapport au fantasme :
« C'est un problème de distance à établir […] idéalement
égale entre les éléments objectifs de la réalité [de la
planche] et les fantaisies inconscientes empreintes de désir
et de défense (défense par la réalité, défense par la
fantaisie). Distance idéale : le sujet s'engage et peut se
dégager, conscience de la fantaisie que Lagache rattache à
“une autonomie relative impliquant la communication entre
les structures inconscientes et les activités adaptatives et
créatrices de l'esprit” » - (Shentoub, 1967, p. 57)
Un peu plus tard, et en collaboration avec Rosine
Debray, Vica Shentoub pourra finalement mettre au point
une théorie du « processus-T.A.T. », renforçant la référence
au fantasme (1971, 1973). Dans le même temps, s'introduit
la référence interprétative à la structure œdipienne. Dès
lors, la réponse T.A.T. est conçue comme la résultante
d'un conflit entre : les impératifs conscients représentés par
la planche et la situation de testing, et les impératifs
inconscients sollicités par le « contenu latent » de la
planche, globalement référé à l’œdipe.
Du point de vue de la cotation et de l'analyse des
histoires, l'interprète est invité à repérer les « procédés
d'élaboration du discours » (procédés formels et/ou
narratifs) et le « degré de lisibilité » des histoires (selon
l'effet des poussées contraires fantaisie versus défense),
en fonction de ce que chaque planche est supposée
évoquer du positionnement œdipien. Le diagnostic psychopathologique s'opère selon la distribution et le degré de
ces indices, répartis par la feuille de dépouillement
en quatre « séries » (Contrôle, Labilité, Evitement du
conflit, Emergence en processus primaires), elles-mêmes
Les épreuves projectives thématiques / 7
définies d'après les grandes catégories nosographiques
(Shentoub & al., 1990).
De nombreux travaux ont repris l'approche du T.A.T.
proposée par Vica Shentoub. Citons notamment ceux de :
Catherine Chabert, Rosine Debray, Nicole Jeammet,
Françoise Brelet. Une méthode d'analyse des épreuves
thématiques chez l'enfant inspirée des travaux de Vica
Shentoub a été publiée par Monika Boekholt (1993).
6. A Lausanne et à Genève s'est développée depuis
la fin des années 1970, autour de Colette Merceron et
Frieda Rossel, une pratique originale des méthodes
projectives (Rorschach, T.A.T.) et du test de Wechsler
(W.A.I.S.). Comme pour l'école de Paris, les références
interprétatives mises en avant sont psychanalytiques,
principalement empruntées à l’œuvre freudienne, mais
aussi aux travaux psychopathologiques de Jean Bergeret et
d'Otto Kernberg.
« Les recherches que nous menons s'inscrivent en
grande partie dans une perspective psychanalytique et
s'alignent [...] sur les vues des auteurs qui défendent la
notion de structure de personnalité dans le sens d'une
organisation de base permanente articulée autour de trois
axes, à savoir un mode de relation d'objet, un type
d'angoisse spécifique et des mécanismes de défense
particuliers. Ces auteurs s'accordent pour situer à l'échelon
inférieur de la psychopathologie, la structure psychotique
fixée au premier stade dit oral ; au sommet de l'échelle se
trouve la structure névrotique, organisée autour du
complexe d’Œdipe et considérée comme l'organisation de la
personnalité la plus évoluée et à l'échelon intermédiaire
figurent les états-limites, regroupent les aménagements
qualifiés d'inférieurs et de supérieurs autour de la fixation
anale. Dans notre optique, le but premier de l'examen
psychologique consistera à différencier ces trois niveaux
d'organisation, non pas au moyen de calculs de fréquence
statistique mais à l'aide d'une analyse qualitative des trois
axes cités plus haut (relation d'objet, angoisse, mécanismes
de défense)... » - (Rossel & al., 1986, p. 723)
D'un point de vue méthodologique, et concernant plus
spécifiquement le T.A.T., l'analyse des réponses reprend,
en les associant, trois « axes » principaux (Husain, 1992) :
- l'axe de la réalité : à l'encontre de certaines thèses
posant une équivalence entre histoires T.A.T. et réalité
vécue, il s'agit ici d'envisager plutôt que le T.A.T. révèle
« la position du sujet dans sa réalité psychique (articulation
de ses fantasmes avec le principe de réalité) et quant à son
rapport à la réalité » - (ibid., p. 23) ;
- l'axe de la forme du discours : il ne suffit pas
seulement de considérer le « fond » de la réponse,
mais aussi d'en étudier la « forme », ce point étant
particulièrement pertinent au T.A.T. dont les exigences
narratives sont complexes (règles de linéarité, de
progression irréversible vers un terme, de définition d'un
cadre spatio-temporel, de parole par un tiers) - (sur cet
axe d'analyse, les cliniciens de Lausanne ne négligent par
l'apport de la psychologie piagétienne - Rossel & al.,
1986, p. 726) ;
- l'axe de la liaison : par référence à la continuité du
discours, il s'agit de prendre en compte l'articulation entre
processus primaires et processus secondaires, perceptible
tant dans la structure du récit que dans la mise en scène
qu'il opère, et d'en dégager des repères de compréhension
psychogénétique.
Le groupe de Lausanne a surtout proposé des études
cliniques menées avec le Rorschach, mais aussi quelquesunes avec le T.A.T., essentiellement sur les psychoses et
sur les états-limites. On peut citer les travaux de : Odile
Husain, Ingrid Roussel Gay-Crozier, Ariane Dreyfus,
Christine Frédérick-Libon, Leslie Ponce, Elisabeth Maulaz,
Anne-Lise Gruffel Despland, Christine Cedraschi, etc.
7. Pour notre part, nous nous appuierons aussi sur des
références interprétatives de type psychanalytique. Nous n'y
réduirons cependant pas la théorie du T.A.T., que nous
centrons sur la notion d'Intrigue (Villerbu, 1993-b).
D'autre part, nous rétablirons dans notre analyse le
concept de thème et le principe d'une analyse thématique,
dont nous avons montré qu'ils constituent l'une des
principales originalités de l'épreuve de Murray (Bouchard,
1989-a). Nous donnerons au thème une définition
structuraliste, ce qui distinguera notre approche des
autres modèles contemporains puisque ce qu'ils
appellent « thème » est généralement lié à des aspects
anecdotiques de l'histoire T.A.T. : action manifeste,
ambiance générale de la scène racontée, affect ou
sentiment attribué à l'un des personnages, symbolisme
supposé d'un aspect de l'histoire (voir par ex. Perron qui
appelle « thème » au D.P.I. le résumé du scénario de
l'histoire). Nous verrons plus loin que le thème est selon
nous tout autre chose, et en particulier qu'il n'est jamais
directement accessible puisqu'il correspond à une
organisation signifiante implicite de l'histoire T.A.T.
IV. UNE MÉTHODE D'ANALYSE DES RÉCITS T.A.T.
1. Principes généraux et critères d’analyse
Toutes les méthodes d'analyse des épreuves thématiques
procèdent traditionnellement de la même manière, en trois
temps :
 Analyse des caractéristiques de chaque récit suivant
les critères que l'on aura retenus pour cette analyse.
Toutes les histoires recueillies auprès du sujet sont
analysées l'une après l'autre, de préférence dans l'ordre où
elles ont été racontées, afin de pouvoir repérer d'éventuels
effets de séquence (ou de halo) entre elles.
 Pour chaque critère d'analyse et une fois que toutes
les histoires ont été étudiées, recherche des constantes
et/ou des exceptions significatives.
Ce second temps de l'analyse revient à comparer entre
elles les données d'analyse dégagées de l'étude des
histoires (analyse transversale), et à en faire une synthèse
selon chacun des critères employés.
 Résumé des résultats ainsi dégagés et interprétation
de ces résultats, conjointement aux autres données
d'analyse disponibles dans le cadre général de l'observation
(entretiens, anamnèse, résultats d'autres tests).
Nous utiliserons, pour guider notre étude interprétative,
une grille d'analyse (voir tableau en Annexe), qui regroupe
les critères suivants :
 aperception - résumé de l'histoire
 structure temporelle - structure dramatique
 analyse thématique : héros - autrui - dynamique de
l'action - déroulement de l'action - structure thématique
 mécanismes de défense
 commentaires diagnostiques.
Pour la plupart d'entre eux, ces critères sont empruntés
à la méthode de Roger Perron pour le D.P.I. (1969), avec
cependant diverses modifications que nous y avons
apportées.
Les épreuves projectives thématiques / 8
2. Aperception - Résumé de l'histoire
L'aperception concerne l'interprétation de l'image que
montre la planche (Bouchard, 1989-b). On pourra d'abord
l'apprécier en fonction de repères fréquentiels de banalité.
Exemples:
- pour la planche 1, l'aperception banale est celle d'un
enfant (généralement un garçon) et d'un violon, avec
évocation fréquente de personnages parentaux (ou
équivalents), plutôt paternels ;
- pour la planche 4, l'aperception banale est un couple
homme-femme et, au fond, l'image d'une autre femme.
On trouvera de tels repères dans notre Guide
d'utilisation des planches du T.A.T. (Bouchard, 1999).
Mais il est intéressant de relever aussi, au titre de
l'aperception :
 comment le sujet a abordé la planche et le travail
interprétatif :
- d'emblée, ou après quelque hésitation ou préambule ?
- avec des commentaires (posturaux, mimiques,
verbaux) ?
- avec des manipulations de la planche ?...
 si le sujet a spécialement réagi à certaines
caractéristiques de la planche ou de l'image : place dans la
série, style et climat figuratifs, mention de détails...
Le résumé de l'histoire consiste à décrire l'essentiel de
l'action racontée, de façon aussi brève que possible. En
repérant ainsi le scénario de l'histoire, on prépare l'analyse
thématique qui va suivre et on évite de confondre l'action
mise en scène avec le thème de l'histoire.
3. Langage
Ce critère consiste à relever des caractéristiques
éventuelles du langage utilisé par le sujet :
 niveau d'élaboration (qualité du vocabulaire,
correction syntaxique) : adéquation des capacités verbales
du sujet avec les exigences de verbalisation du test ;
 particularités du vocabulaire : erreurs terminologiques,
néologismes, emploi de mots neutres ou passe-partout
(« il fait », « le truc », « les gens »... ) ;
 particularités narratives : recherche du « beau
langage », ton narratif (déclamation, récitatif scolaire... ), tics
verbaux (enchaînements par « et puis », « et alors ») ;
hésitations ; rythme du discours.
On remarquera aussi : les confusions de genre ou de
nombre (« le monsieur elle dit... », « le garçon et sa maman
a fait... »), et les lapsus.
Tous ces aspects, bien entendu, n'ont d'intérêt qu'à
permettre un repérage formel d'indices utiles pour l'analyse
interprétative recherchée, comme par exemple :
- l'effet d'éventuels processus défensifs ;
- la qualité transférentielle de l'échange ;
- des particularités des processus de pensée ;
- des troubles de l'identification.
4. Structure temporelle - Structure dramatique
4.1. Par le critère de la structure temporelle, il s'agit de
savoir si le présent du récit (« toute situation ou activité
directement référée à ce que représente la planche »,
Perron, ibid., p. 22) s'articule (ou non) à un « avant » et/ou
à un « après ». On peut assez facilement repérer la
temporalité du récit à partir des temps verbaux (présent,
passé, futur) employés par le sujet. Cependant il n'existe
pas toujours d'adéquation exacte entre temporalité du récit
et temps verbaux. On peut très bien, par exemple, évoquer
un « maintenant » par un imparfait narratif (« c'est un
garçon qui faisait ses devoirs... »), un « avant » par un futur
(« le papa le punira parce qu'il aura pas bien rangé sa
chambre »), ou un « après » en employant un verbe à
l'infinitif (« c'est pour savoir plus tard comment faire »).
Du point de vue clinique, la temporalité du récit nous
indique comment le sujet se positionne par rapport à du
projet, de l'avenir, de la conséquence ; ou au contraire par
rapport à du passé, de l'antériorité, ou du précédent.
Ce critère peut révéler des difficultés d'organisation dans
une durée, ou d'autres fois, faire apparaître des surinvestissements significatifs de la chronologie.
4.2. La structure dramatique concerne plus spécifiquement la construction d'une scène, impliquant un temps et un
espace d'action. Nous avons déjà évoqué, à propos des
prérequis caractérisant les épreuves thématiques, les trois
grands types d'événementialité dégagés par l'étude
psychogénétique de Perron (voir supra chap. II.3). La
structuration dramatique n'est cependant pas réductible à
cet aspect génétique, et ce critère a aussi l'intérêt de
repérer des faits cliniques significatifs, comme par exemple
une forte structuration dramatique par obsessionnalisation
de la pensée, ou l'adoption défensive d'une organisation
statique limitant la réponse à une interprétation de la
planche sans engagement dans une quelconque action, ou
encore un scénario structuré mais qui laisse l'action
racontée sans affirmation d'un dénouement clair.
La définition de personnages clairement identifiés et
articulés entre eux dans l'action qui les met en scène relève
également de la structuration dramatique. La clinique des
troubles psychotiques, en particulier, montre fréquemment
des difficultés à déterminer du protagoniste (rôles, attributs)
et des confusions diverses à ce niveau (de sexe, de
génération, de fonction, voire même parfois entre vivant et
non vivant) (Consoli, 1979 ; Husain, 1989).
On voit donc que, si la structure temporelle concerne le
rapport à la durée, la structure dramatique renvoie à
l'organisation à la fois spatiale, temporelle et interactive
d'une unité et d'une cohérence d'action.
Enfin, remarquons avec R. Perron qu'il n'y a pas
forcément coïncidence entre la référence à la durée
(structure temporelle) et l'organisation scénique de l'histoire
(structure dramatique) : « il peut y avoir déroulement
temporel et juxtaposition ou coordination ; un récit entièrement au présent peut être statique ou coordonné, etc. »
(ibid., p. 24).
5. Analyse thématique
La structure thématique de la réponse T.A.T. est peutêtre ce qui est le plus délicat à analyser, car on confond
souvent ce niveau d'analyse avec un simple résumé du récit
ou de ses aspects les plus saillants.
Or, le motif dramatique n'est pas la motivation
thématique, et l'épisode n'est pas l'intrigue.
5. 1. Le concept de thème
Une façon simple d'aborder la notion de thème est de
se rappeler ce qu'on appelle ainsi en musique : il s'agit
d'une structure mélodique, généralement assez simple, et
Les épreuves projectives thématiques / 9
à partir de laquelle de nombreuses variations sont
possibles, en nombre cependant limité. L'écoute d'une
seule « variation » ne permet pas d'emblée de repérer le
thème. Mais après en avoir entendu plusieurs, on peut
identifier ce qu'elles ont en commun : c'est le thème.
De la même manière, l’œuvre d'un même artiste
(peintre, écrivain, cinéaste ou autre) peut être résumée à
quelques données fondamentales simples caractérisant
l'ensemble des productions qui la composent. Ces données
peuvent être formelles (le « style », la « facture », la
« patte », la « griffe »... ), mais aussi thématiques.
5.2. Comment dégager la thème d'un récit
ou d'une suite de récits T.A.T. ?
Murray préconisait d'analyser chaque histoire selon un
schéma conflictuel supposé à l’œuvre dans tout récit. Chez
Murray, le thème est éminemment conflictuel. Murray en a
cité quelques-uns, qu'il caractérise par des titres les
résumant : l'Amour tragique, le Parent meilleur, le
Misanthrope, le thème de Timon (contre-rejet en réponse à
un rejet supposé, d'après le personnage shakespearien
Timon d'Athènes), etc. - (Murray, 1938).
Bellak proposait une démarche de raisonnement
analogique d'extraction progressive du sens thématique en
cinq étapes (Bellak, 1951, 1954).
Quelle que soit la technique employée, l'objectif est
d'instruire une analyse formelle des réponses, afin de
dégager la structure d'intentionnalité supposée (par
hypothèse) sous-jacente à l'ensemble des histoires
racontées par le sujet ou au moins à quelques-unes d'entre
elles. (Il existe généralement plusieurs thèmes dans un
même protocole de T.A.T.)
Nous emploierons ici une démarche proche de celle
préconisée par Roger Perron pour le D.P.I. Elle consiste à
analyser, pour chacune des histoires produites par le sujet,
la dynamique de l'action et son déroulement, afin de faire
apparaître la thématique de ces histoires, ou plutôt « d'en
trouver les constantes et la structure sur l'ensemble des
récits » (ibid., p. 25).
« En conduisant ce travail, le psychologue prend une
position analogue à celle du critique littéraire qui dégage les
caractéristiques de “l'univers” d'un autour (au sens où on
peut parler, par exemple, de “l'univers de Balzac”). Ce
travail peut être fait, et même selon nous doit être fait, dans
un premier temps, sans s'interroger sur la “personnalité” de
l'auteur. Ceci n'intervient que dans un deuxième temps
(juste comme, ayant décrit façon aussi cohérente que
possible l'univers des romans de Balzac, le critique littéraire
peut s'interroger sur les rapports entre cet univers et la
personnalité de Balzac). » - (Perron, ibid., p. 25)
Le travail d'extrapolation de la structure thématique
consiste ainsi à « construire “l'univers du protocole” »
(Perron), au moyen d'un ensemble de critères de cotation
dont on trouvera ci-après la description (voir en Annexes).
L'analyse suppose un schéma dramatique moyen,
mettant en scène un héros engagé dans une situation
donnée et tendant à la résolution de cette situation.
On commencera donc par déterminer le héros
(symbolisé par la lettre H) de chacune des histoires
étudiées, c'est-à-dire le personnage autour duquel est
centrée l'action (ce qui ne signifie pas forcément que c'est
le personnage auquel le narrateur s'identifie le plus). Il
peut arriver que le héros soit double (un couple, par
exemple, ou une mère et son enfant), ou qu'il soit collectif
(« des gens », « un groupe d'amis », « les Indiens », etc.),
ou encore qu'il soit anonyme et plus ou moins neutre
(« on », « il », « elle », « eux »). On décrira succinctement
les caractéristiques principales du héros, en utilisant
autant que possible les termes mêmes du narrateur.
De même, on définira autrui, c'est-à-dire les autres
personnages de l'histoire, et toujours en respectant au
mieux leur qualification par le sujet.
Après quoi, on étudiera la dynamique et le déroulement
de l'action.
Il restera, à partir de cette analyse schématique, à
formuler le (ou les) thème(s) caractérisant chacune des
histoires ainsi traitées. Une façon pratique de procéder est
de reformuler l'essentiel de l'action au conditionnel et
comme si l'on énonçait un principe général, en
commençant par l'expression « dans cette histoire tout se
passe comme si... » (Bellak, 1947, 1951).
Bien souvent, le thème principal, ou l'un des thèmes
principaux, est donné dès le premier récit.
Les variations sur un même thème nodal sont, de
plus, à envisager comme des tentatives, diverses et
répétées, pour donner issue à ce thème, par définition
problématique. D'où l'importance de ne pas perdre de vue
la suite des variations qui en sont données, dans une
lecture séquentielle du travail thématique ainsi opéré par le
sujet d'histoire en histoire.
6. Mécanismes de défense
Il est classique de compléter l'analyse thématique dans
une épreuve comme le T.A.T. par l'étude des mécanismes
de défense à l’œuvre dans l'élaboration de la réponse. En
fait, et comme l'a fait observer Perron pour le D.P.I., ces
attitudes défensives sont relatives à deux ordres différents
de faits :
- d'une part, la situation d'examen elle-même, et en ce
cas la réaction défensive doit être assimilée à une
résistance plutôt qu'à une défense, puisqu'il s'agit d'une
attitude d'auto-protection induite par le dispositif d'investigation lui-même et par la relation psychologue-sujet ;
- d'autre part, les représentations évoquées chez le sujet
par les images et les affects attachés à ces représentations,
ce qui correspond davantage à ce qu'on appelle des
mécanismes de défense, c'est-à-dire des procédés d'évitement optimal de l'angoisse liée aux enjeux pulsionnels ou
fantasmatiques réactivés par les planches du test et
susceptibles de menacer l'intégrité psychique du sujet.
Il est important de souligner, de plus, que les
mécanismes défensifs (fût-ce au titre d'une « résistance »)
ne sont pas toujours pathologiques.
Vica Shentoub (1990) a particulièrement insisté sur
le fait que toute réponse T.A.T. comporte une part
d'élaboration défensive, qui détermine le point d'équilibre
trouvé par le sujet entre les motions pulsionnelles
inconscientes réactivées par le stimulus et la fantaisie
consciente qu'il pourra produire et communiquer au
psychologue. Cette élaboration défensive n'est pathologique que si elle recourt à des procédés répétitifs,
rigides, et qui empêchent la prise en charge par le moi de
ces motions inconscientes, ou au contraire qui ne peuvent
les soumettre au travail des processus secondaires et
aboutissent alors à une production aberrante, « illisible ».
De son côté, Perron rappelle la difficulté de distinguer la
qualité des processus défensifs :
« ... il apparaît immédiatement que ces défenses sont
plus ou moins “réussies”, plus ou moins “adaptatives”.
Certains sujets parviennent à adopter, face à l'épreuve, une
distance et un style où les difficultés qu'elle suscite sont
Les épreuves projectives thématiques / 10
remarquablement bien aménagées et maîtrisées : d'où des
récits tout à la fois bien construits et riches, développés
avec liberté et plaisir ; d'autres au contraire bloquent,
dérivent, transposent, annulent, isolent, etc., donnant
l'impression de lutter contre une angoisse désadaptante. Le
praticien expérimenté peut assez aisément distinguer ces
deux types de sujets, et expliciter les critères qu'il utilise. Il y
faut, cependant, beaucoup de doigté et d'expérience ; et,
au delà du problème technique, se trouvent posées de
redoutables questions théoriques et cliniques sur la
distinction entre “défenses adaptatives”, “défenses névrotiques réussies”, “défenses névrotiques désadaptantes”,
“défenses psychotiques”, etc., qui, au delà des jugements
de valeur ainsi impliqués, constitue l'un des problèmes les
plus difficiles de la psychopathologie contemporaine. » (Perron, 1969, p. 40)
Perron préconise, de plus, d'user avec prudence de
la notion de « mécanisme de défense » telle que la
psychanalyse a pu la développer (Ionescu, Jacquet, Lhote,
1997), et invite le psychologue à reconnaître des modalités
défensives d'élaboration du récit, quitte à les rapporter
ensuite, dans une phase ultérieure de l'interprétation, à des
mécanismes de défense proprement dits.
« Il importe de rester très prudent dans les conclusions.
Comme toute technique utilisée par le psychologue, le
D.P.I. doit conduire à des conclusions dont la portée
dépasse les caractères étroitement contingents de la
situation créée par l'examen ; de même qu'après un BinetSimon on se hasarde à dire qu'un enfant “est intelligent”, on
pourra, après un D.P.I. se hasarder à dire qu'il présente,
par exemple, une structure névrotique de tel ou tel type.
On prend alors, en généralisant, un certain risque, mesuré
tout à la fois par le degré de validité de l'épreuve utilisée et
par la compétence clinique de celui qui l'utilise. Si donc on
relève dans un protocole – par exemple – cinq exemples
de “dénégation” (contraction en une seule phase d'une
évocation et de sa négation), il faut bien garder à l'esprit
qu'il s'agit là d'une modalité défensive d'élaboration du
récit, et, stricto sensu, de rien d'autre. Il se peut que chez
ce sujet l'usage de la “dénégation” soit réellement
permanent, et constitue un trait essentiel de sa
personnalité ; mais on ne peut conclure de l'un à l'autre
ipso facto et sans examen soigneux du problème. » (ibid., p. 41-42)
Pour notre part, nous adopterons au T.A.T. la
précaution proposée par Perron pour le D.P.I., en nous
obligeant d'abord à décrire les modalités défensives
d'élaboration du récit, puis à tenter, au titre de l'analyse
diagnostique, d'interpréter ces modalités en termes de
mécanismes de défense du moi (Bouchard, 1998). Dans
notre grille d'analyse, nous traiterons donc séparément les
« modalités défensives » et les mécanismes de défense,
ces derniers étant à étudier dans la rubrique « Commentaires diagnostiques ».
7. Commentaires diagnostiques
7. 1. Qu'est-ce que diagnostiquer ?
La critique des tests a avancé divers arguments à
l'encontre des pratiques de diagnostic auxquelles ces
méthodes participent fréquemment. Si ces arguments
sont tout à fait recevables d'un point de vue politique et
déontologique (et à reprendre comme tels sous la forme de
précautions dans les usages diagnostiques), ils ne le sont
par contre aucunement d'un point de vue méthodologique
et clinique. L'argument d'un diagnostic « étiquetage »,
notamment, témoigne d'une grave incompréhension (ou
méconnaissance ?) de ce qu'est réellement le travail
diagnostique.
Nous insisterons ici sur deux points :
a)
Diagnostiquer,
c'est
comprendre
comment
« fonctionne » une situation singulière impliquant un
individu, un couple ou un groupe. Cela signifie que
diagnostiquer implique d'analyser (i.e. de décomposer une
complexité en éléments simples) les différents aspects de
cette situation et sa dynamique propre.
Concrètement, c'est à la fois comprendre une situation
du point de vue d'un sujet (ou de plusieurs sujets dans
leurs interactions réciproques), et rapporter le fonctionnement de ce(s) sujet(s) au contexte qui lui (leur) est propre.
Seul cet aller-et-retour permanent entre contexte « interne
» et contexte « externe », supposés étroitement liés, peut
caractériser une approche diagnostique comme véritablement clinique.
Dans ce travail, le psychologue s'appuie bien
évidemment sur ses connaissances psychologiques et
psychopathologiques générales – au service cependant,
non d'une généralisation, mais au contraire d'une
singularisation aussi précise et complète que possible.
b) La référence à une nosographie, ou plus largement à
une herméneutique psychologique (c'est-à-dire à une
théorie du psychisme et à un système de différenciation
clinique), est en effet indispensable à toute élaboration
diagnostique. Il n'y a pas de diagnostic sans référence
interprétative. Toutefois, l'interprétation n'est ici qu'un
moyen et non une fin. Car diagnostiquer est avant tout un
acte tourné vers une pratique (qu'elle soit thérapeutique,
éducative ou pédagogique) ; c'est un acte d'anticipation et
d'organisation de cette pratique.
Diagnostiquer, c'est évaluer, pour une situation
singulière:
- s'il est possible d'engager une action (indications et
contre-indications, faisabilité d’une intervention) ;
- dans quelles conditions (moyens, stratégies,
précautions spécifiques) ;
- avec quels objectifs (buts, priorités).
Le diagnostic est donc guidé par l'action à entreprendre
et ne peut donc s'arrêter à un constat, aussi compréhensif
soit-il. Trop souvent, le travail diagnostique fait l'économie
d'une transposition et d'un investissement dans l'action,
alors qu'il consiste bien, non en un savoir-pour-connaître,
mais en un savoir-pour-agir. Autrement dit, le diagnostic
comporte, selon nous, une part de conception et d'impulsion
d'actes concrets, qui fait également partie du travail
diagnostique, en particulier lorsqu'il s'agit d'un diagnostic
psychologique (i.e. porté par un psychologue). Le travail du
psychologue, en tant qu'ingénieur (concepteur) de pratiques
d'intervention, y trouve un indispensable fondement
méthodologique et clinique.
En corollaire à cette conception, le travail diagnostique
apparaît comme étroitement dépendant des modalités
d'actions dont le psychologue dispose ou de celles qu'il
connaît. Autrement dit, tout diagnostic est relatif aux types
d'actions envisagés (ou envisageables) ; ou si l'on préfère :
on ne diagnostique jamais que ce que l'on est prêt à traiter
et comme on est prêt à le traiter (Villerbu, 1993-a).
En résumé : Ainsi entendu, le diagnostic psychologique
et psychopathologique n'a donc rien à voir avec le
rangement d'un individu dans une « case » nosographique,
typologique, ou psychométrique. Loin de catégoriser une
situation de façon fixée et globaliste, le travail diagnostique
Les épreuves projectives thématiques / 11
s'efforce au contraire d'en dégager la singularité actuelle, la
complexité dynamique, et les perspectives de modification.
7.2. Construction diagnostique :
de l'analyse thématique au diagnostic
Il reste à présent à spécifier les principes de
l'extrapolation interprétative par laquelle le psychologue va
pouvoir passer des données d'observation permises par le
T.A.T. et l'analyse thématique, à une formulation de
diagnostic psychologique. Ces principes sont de deux
ordres :
- un principe général d'équivalence « projective »
- un principe de référenciation nosographique.
7.2.1. Conformément à l'hypothèse projective
classique, nous supposerons une analogie entre le sujet et
ses réponses au T.A.T., et nous jouerons de cette analogie
pour traduire en termes psychologiques les particularités
des « histoires » produites. A ceci près que cette analogie
ne portera pas sur l'expression manifeste de ces histoires
(leurs caractéristiques verbales ou narratives, leurs motifs
anecdotiques), mais sur ce qui organise implicitement ces
aspects manifestes, et que nous aurons dégagé au moyen
de notre grille d'analyse et par la démarche structuraliste
préconisée.
C'est à ce niveau et seulement à ce niveau que nous
nous autoriserons à induire un rapport d'analogie avec le «
mode de fonctionnement » du sujet.
Exemple : Dans le T.A.T. de Stéphane (11 ans) on
repère, grâce à l'analyse thématique, la répétition
quasi-constante tout au long de son protocole, d'un
thème d'échec : échec à obtenir - comme à
(s')accorder - satisfaction et reconnaissance personnelles. Une sorte de « scène typique » se dégage de
l'ensemble des récits de T.A.T. de Stéphane, et qui se
donne avec quelques variations : celle d'un rapport
duel, sexué (masculin-féminin), qui ne peut s'établir et
se développer que sous le mode d'une frustration
mutuelle, mais dont la source est toujours renvoyée à
une instance tierce, anonyme et oppressive. Dans ce
schéma d'ensemble, la variante, en quelque sorte
inverse, de résistance (alors masculine) à deux contre
cette instance tierce, ou d'agression à son adresse,
constitue la seule initiative possible... mais chèrement
« payée » et radicalement vouée à l'échec (mort des
deux partenaires rebelles !).
Si nous faisons bien jouer ici des « équations
symboliques », nous ne nous autorisons à le faire qu'après
l'analyse et le repérage des particularités structurales de la
production de notre sujet, et seulement à propos de
celles-ci.
(On ne procède d'ailleurs pas autrement avec l'épreuve
de Rorschach par exemple - cf. notion de psychogramme.)
Insistons pour souligner la tentation, facile dans une
épreuve comme le T.A.T., de rapporter les récits à des
événements vécus par le narrateur. Si l'on peut considérer
que ces récits ne sont pas sans rapports, conscients et
inconscients, avec des choses connues par le sujet, on ne
peut cependant pas réduire le sens des récits T.A.T. à du
simple souvenir ou à de la simple répétition. Même dans ce
cas-là, un souvenir ne nous intéresse que dans la mesure
où sa remémoration et son récit dans la relation actuel au
clinicien ne sont a priori jamais anodins, jamais aléatoires
(hypothèse du déterminisme psychique). Il ne nous
intéresse, autrement dit, que par sa survenue et non par
son contenu.
Il faut se rappeler, de plus, qu'un récit de vie est
également un récit construit et travaillé par des mécanismes
de défense.
Au lieu de considérer l'histoire vécue comme une « clé »
interprétative des récits T.A.T. d'un sujet, il est donc plus
pertinent de considérer que ce sont, au contraire, les
éléments thématiques révélés par l'étude de quelques récits
T.A.T. qui vont nous permettre de mieux analyser l'histoire
personnelle du sujet. (C'est d'ailleurs ce que Murray
suggérait lorsqu'il déclarait que l'histoire de vie d'une
personne pouvait, tout comme une série d'histoires T.A.T.,
faire l'objet d'une analyse thématique - Murray, 1938).
Ce n'est donc pas l'anamnèse du narrateur qui va
pouvoir nous éclairer sur la logique thématique de ses
réponses au T.A.T. ; mais, au contraire, l'analyse
thématique de ses histoires T.A.T. qui pourra nous aider à
interpréter l'anamnèse
7.2.2. Enfin, le terme ultime de l'interprétation
diagnostique est de pouvoir caractériser le « fonctionnement » analysé grâce à l'expérience du T.A.T., au regard
d'une référence nosographique convenue et qui en permette
la discussion critique (diagnostic différentiel).
C'est un autre niveau et une autre étape de mise en
équivalences que l'on fait alors intervenir : non plus
entre les phénomènes analysés et un « fonctionnement »
particulier ; mais cette fois entre ce « fonctionnement » luimême, produit d'un premier travail d'induction interprétative, et les catégories typiques définies par le cadre
nosographique choisi (i.e. la théorie psychopathologique à
laquelle se réfère l'interprète).
Chez Stéphane (exemple déjà cité), la synthèse de
l'analyse thématique d'abord effectuée histoire par
histoire, et l'attention portée aussi à divers particularités
d'aperception, de vocabulaire, de structuration
dramatique, amènent à dégager un thème d'échec, dont
l'aspect d'auto-punition ou de refus du « succès »
(inhibition à jouir de ce qui est désiré et éventuellement
obtenu) et la coloration nettement morale peuvent être
considérés comme équivalents d'un fonctionnement
névrotique
(en
l’occurrence, plutôt
hystériquecaractériel).
Ce dernier temps de l'interprétation suppose chez le
psychologue une bonne connaissance de la psychopathologie et des choix clairs parmi les différents modèles
possibles. (En méthodologie projective, on se réfère
généralement
aux
modèles
psychanalytiques
et
phénoménologiques.)
On ne peut toutefois considérer que cette référence à la
psychopathologie constitue à elle seule, ni même
principalement, la théorie de l'interprétation dans l'épreuve
T.A.T.
Pour peu que l'on ne confonde point la théorie du
diagnostic à laquelle on se réfère, avec celle du dispositif
expérimental par lequel on le met en œuvre (en
l'occurrence, le T.A.T.), on peut répondre à la question de la
« théorie du T.A.T. » en affirmant qu'elle est à formuler
autour du concept d'Intrigue (dans une actualisation critique
de la pensée de Murray), et en proposant de considérer
l'analyse thématique (associée aux critères de l'aperception
et de la dramatisation) comme son opérationnalisation
clinique spécifique.
Les épreuves projectives thématiques / 12
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Les épreuves projectives thématiques / 13
Annexe
CRITÈRES DE COTATION DES RÉPONSES T.A.T.
(Analyse thématique)
I. CRITÈRES DE COTATION DES CARACTÉRISTIQUES
DU HÉROS ET D’AUTRUI


agit-il en fonction de son intérêt personnel ou dans
l'intérêt d'autrui ?
poursuit-il un but à court ou à long terme ?
Le Héros :
 désignation par le narrateur
(par ex. : quelqu'un, un enfant, un petit garçon,
un élève)
 caractérisation physique, intellectuelle, morale
(par ex. : combatif, faible, agressif. boudeur, rusé,
coléreux, revendicateur)
Valorisation morale des activités et des attitudes du
héros :



Autrui :



désignation par le narrateur
(par ex. : quelqu'un, un monsieur, le papa, son père,
les parents, les gens)
caractérisation physique, intellectuelle, morale
relations entre les personnages de l'entourage
du héros.
III. CRITÈRES DE COTATION DU DÉROULEMENT
DE L’ACTION
Difficultés et obstacles rencontrés par le héros :

Attitudes et conduites adressées au héros :










contrainte mineure : ordres, rappel d'obligations,
mécontentement...
contrainte justifiée par une faute du héros : gronderie,
punition...
hostilité non justifiée par une faute du héros : rejet,
indifférence
menace vague, agression, haine
aide (de quel type ?)
affection, indulgence, consolation, compréhension
satisfaction, félicitations, récompense
demande (de quel type ?)
rivalité, compétition.
II. CRITÈRES DE COTATION DE LA DYNAMIQUE
DE L’ACTION
Origine de la situation : qu'est-ce qui a amené le héros
dans cette situation ou cette activité ?




initiative du héros
situation imposée au héros en conséquence de ce qu'il
a fait auparavant
(par ex. : une punition après avoir fait une bêtise)
situation imposée au héros de façon anonyme
(par ex. : il doit rentrer chez lui à cause d'un orage)
situation imposée par autrui
(préciser si le héros est libre ou contraint, par quoi ou
par qui).
un jugement moral est-il exprimé à propos du héros ?
ce jugement est-il positif ou négatif : bien-mal, bonméchant, louable-blâmable... ?
est-il porté par le héros lui-même ? par son entourage ?
ou par le narrateur à propos du héros ?

obstacles anonymes
(par ex. : accident, manque de moyens)
obstacles imputables à autrui
(par ex. : une interdiction de sortie par un maître
d'école)
obstacles imputables au héros lui-même
(par ex. : faiblesse, maladresse, ignorance, oubli)
Attitudes et réactions du héros face à ces obstacles :



renonciation, découragement
tentative de réaction, sans effet déterminant
réaction combative.
Issues :








issue banale, attendue et non valorisée
absence d'issue
réussite
réussite partielle (ou incomplète)
exploit (réussite exceptionnelle)
échec (issue négative)
issue ambivalente (à la fois échec et réussite)
issue double ou multiple (plusieurs issues différentes
sont proposées).
Dans tous les cas, noter :


si le héros prévoit ou non l'issue et laquelle
les sentiments du héros à l'égard de l'issue effective.
Nature et valeur des buts poursuivis par le héros :

le héros agit-il pour obtenir quelque chose d'agréable
ou pour éviter quelque chose de désagréable ?
Les épreuves projectives thématiques / 14
NOM et Prénom du sujet examiné : .................................................................................. Date de naissance: ............ .....................Age: .......................... Date de l'examen : .............................
T.A.T. de MURRAY - Grille d'analyse
CRITÈRES D'ANALYSE
Planche ........
Planche ........
Planche ........
Planche .........
Planche .........
Planche.........
Aperception
Résumé de l'histoire
Langage
Structure temporelle
Structure dramatique
Héros
Autrui
Dynamique de l'action
Déroulement de l'action
Structure thématique
Modalités défensives
d'élaboration
Commentaires
diagnostiques
L.C.P. / Université Rennes 2 – 1996
NOM et Prénom du sujet examiné : .................................................................................. Date de naissance: ........... .....................Age: ........................... Date de l'examen : .............................