Relevé des coûts socio-économiques du génie

Transcription

Relevé des coûts socio-économiques du génie
Relevé des coûts socio-économiques du génie génétique
Traduction partielle du rapport « Counting the cost of Genetic Engineering »
rédaction du rapport initial : Edward Hammond - 2010
Aux yeux des inconditionnels de l’industrie biotechnologique, le génie génétique est la
solution à tous les problèmes. En réalité, la dure réalité se dévoile peu à peu dans nos
champs et sur les marchés. Le dossier qui suit présente les échecs - agronomiques et
économiques – du génie géntique et propose des exemples de solutions susceptibles
d’assurer un avenir agricole plus durable à notre planète.
Échecs agricoles
Les cultures génétiquement modifiées ont échoué à de multiples reprises sur le
terrain agricole. Certains échecs sont directement liés à la modification génétique
elle-même. C’est le cas, par exemple, des plantes qui étaient censées résister aux
insectes et qui, en réalité, restent la proie de ces derniers.
D’autres échecs étaient moins prévisibles. Certaines cultures génétiquement
modifiées se sont révélées fragilisées, par exemple, par les hautes températures.
On a également observé l’impact croissant de la dépendance des agriculteurs à
certains intrants indispensables à la plupart des cultures OGM. Ainsi, des fermiers
américains sont aujourd’hui contraints de désherber à la main des mauvaises
herbes devenues résistantes aux herbicides.
On peut également relever d’autres échecs du génie génétique, comme les prix
élevés que les fermiers doivent payer pour les semences génétiquement modifiées
et la nécessité d’avoir recours à des intrants pour faire pousser des cultures
génétiquement modifiées. Ces exemples d’échec sont inacceptables pour les
agriculteurs.
Échecs économiques
Economiquement, les agriculteurs souffrent du prix élevé des cultures
génétiquement modifiées et des rendements réduits liés aux échecs rencontrés sur
le terrain. Mais le reste du marché agricole n’en sort pas indemne pour autant.
Etant donné le rejet massif du génie génétique par le grand public, les coûts
supplémentaires engendrés par les opérations de ségrégation des cultures
génétiquement modifiées et des cultures conventionnelles sont inévitables. Même
avec un tri plus attentif, on ne peut éviter des contaminations. Un seul cas de
contamination coûte, à lui seul, des millions de dollars à l’industrie agricole.
Solutions
Une forme d’agriculture plus écologique est de plus en plus considérée comme la solution
1
aux problèmes rencontrés par l’agriculture mondiale.
Selon l’évaluation la plus approfondie de l’agriculture mondiale réalisée à ce jour –
l’« Evaluation internationale des sciences et technologies agricoles pour le développement
(EICSTAD) »-, l’agriculture écologique est essentielle pour aider les petits agriculteurs
(ceux-ci produisent la plupart des aliments consommés sur la planète) et pour nourrir les
générations futures.
Greenpeace mène campagne en faveur de l’agriculture écologique, c’est-à-dire une
agriculture saine produisant des aliments sains, aujourd’hui et demain. L’agriculture
écologique protège le sol, l’eau et le climat. Elle favorise la biodiversité et ne contamine
pas l’environnement avec des produits chimiques ou l’ingénierie génétique.
2
Problèmes posés par les cultures génétiquement modifies
dans les champs
A de multiples reprises, les cultures génétiquement modifiées n’ont pas produit les
résultats escomptés dans les champs et ont donné lieu à de nouveaux problèmes
agronomiques. Les cultures génétiquement modifiées dépendent de l’expression
cohérente des gènes et/ou toxines de résistance aux herbicides qui y sont insérés.
Si ces gènes ne fonctionnent pas comme prévu, des cultures entières peuvent être
perdues. Pour des raisons inconnues, les variétés génétiquement modifiées ont
également manifesté une nouvelle sensibilité aux ravageurs et aux maladies. Les
plantes génétiquement manipulées pour résister aux insectes exercent également
un impact sur les populations de ravageurs. En effet, de nouveaux ravageurs
particulièrement néfastes – nécessitant un usage intensif de pesticides – peuvent
faire leur apparition.
Le coton Bt très sensible à la chaleur
En Chine, les scientifiques ont démontré que les températures élevées pouvaient entraver
la production par le coton génétiquement modifié des toxines Bt (Bacillus thuringiensis).
En étudiant des rapports d’études relatifs à l’impossibilité pour le coton Bt de contrôler les
noctuelles de la tomate, les scientifiques ont découvert que le problème était lié aux
périodes de haute température. Ils ont supposé que la chaleur pouvait réduire la
résistance aux insectes des plantes génétiquement modifiées.
Pour tester la théorie, un groupe de scientifiques basé à l’université de Yangzhou a fait
pousser du coton génétiquement modifié dans des conditions contrôlées. Aux étapes
importantes, comme la floraison, les chercheurs ont exposé les plantes aux températures
élevées (37°C) qui sont celles des champs de coton en Chine. Les plantes exposées à la
chaleur ont produit 30 à 63% de toxine Bt en moins, les rendant moins résistantes aux
attaques des chenilles. Les plantes de contrôle non exposées à la chaleur n’ont pas
rencontré ce problème. A l’issue d’une seconde année d’expérimentations, les mêmes
résultats ont été obtenus (Chen et al, 2005).
Les scientifiques ne peuvent se prononcer avec certitude sur les motifs pour lesquels le
coton génétiquement modifié réagit de cette façon aux hautes températures. Ceci prouve
bien, une nouvelle fois, que les conséquences de génie génétique ne sont pas totalement
maîtrisées.
Les cultures Roundup Ready pas si ‘Ready’ que ça...
Dans les cultures ’Roundup Ready‘ résistantes au glyphosate, on a observé que le stress
induit par la chaleur et l’eau peut réduire la résistance aux herbicides (Cerdeira & Duke
2006). Lorsque la résistance de ces cultures est réduite, la pulvérisation de Roundup pour
contrôler les mauvaises herbes endommage les plantes et détruit les récoltes en
conséquence.
Les cultivateurs de coton texans ont été confrontés à ce problème, dont Monsanto ne les
avait pas prévenus. Accusant l’entreprise d’une ‘longue campagne de déception’, 82
cultivateurs texans ont poursuivi Monsanto en justice, l’accusant de pratiques
commerciales trompeuses (Musick v. Monsanto Co. 2006).
3
Selon la plainte des cultivateurs texans, le coton génétiquement modifié planté en 2004 et
2005 était endommagé par le glyphosate: “En réalité, même les applications [de
glyphosate] effectuées strictement selon les instructions de Monsanto peuvent provoquer
d’importants dommages au niveau des tissus reproducteurs des plants de coton. Ces
dégâts réduisent considérablement les récoltes de coton en comparaison avec ce que
peuvent produire des plants sains …” (Musick v. Monsanto Co. 2006).
De plus, selon les cultivateurs texans, Monsanto savait que le coton serait endommagé
par le glyphosate, mais la firme n’a pas voulu révéler ce problème.”Nous pensons que
Monsanto nous a toujours menti,” a expliqué un fermier à l’agence Reuters. Selon un autre
agriculteur, les dommages occasionnés à son coton Roundup Ready ont réduit sa récolte
de près de 40% (Gillam, 2006).
L’affaire est toujours en cours devant le tribunal fédéral américain au Texas.
Sensibilité imprévue aux maladies et aux insectes
Des scientifiques chinois et norvégiens ont comparé la sensibilité des cotons
génétiquement modifié et non modifié aux infections par le champignon ravageur
Fusarium oxysporum. Ils ont découvert que les variétés conventionnelles de soja chinois
résistaient mieux au F. oxysporum que les mêmes variétés génétiquement modifiées (Li,
2009). De la même façon, des scientifiques suisses et britanniques ont découvert que les
variétés de maïs génétiquement modifiées résistantes aux insectes étaient plus sensibles
au puceron du maïs que les plantes conventionnelles équivalentes (Faria, 2007).
Les mécanismes génétiques de ces sensibilités aux maladies et aux insectes restent non
élucidés. Il est clair, cependant, qu’ils sont liés au génie génétique. En effet, dans les deux
cas, les variétés conventionnelles équivalentes des plantes génétiquement modifiées ne
présentaient pas la même sensibilité que les variétés génétiquement modifiées.
Apparition de parasites secondaires
Toutes les grandes espèces cultivables sont menacées par divers types de parasites. Ces
menaces sont inégalement réparties : un parasite majeur dans une région peut être
quasiment inexistant dans une autre, et vice versa.
Les cultures génétiquement modifiées ne comportent pas de caractéristiques
transgéniques suffisamment complexes pour permettre aux plantes de répondre aux
changements de parasites et de résister à une grande variété d’ennemis. Par exemple, le
coton Bt, qui tue la noctuelle de la tomate (Helicoverpa), a succombé en Colombie à une
espèce proche, la chenille légionnaire (Spodoptera) (Lopez Gonzales, 2008).
Il en résulte que, même si le génie génétique parvient à contrôler une espèce spécifique
de parasite, d’autres parasites (dits ‘secondaires’) peuvent apparaître et menacer
davantage les plantes. Ce phénomène entraîne des pertes au niveau des récoltes et la
nécessité d’appliquer des pesticides additionnels.
4
Par exemple, le coton Bt est conçu pour résister aux noctuelles de la tomate et, de là,
réduire l’usage des pesticides. Mais des chercheurs ont observé que les cultivateurs
chinois utilisaient autant de pesticides sur les variétés Bt que sur les variétés
conventionnelles à cause de la prévalence accrue de parasites secondaires, que la toxine
Bt ne contrôle pas. Le coût des applications complémentaires a rendu le coton Bt moins
rentable que son équivalent conventionnel, étudié dans cinq provinces: “Les bénéfices
économiques des utilisateurs des semences de coton Bt en 1999-2001 se sont évaporés
en 2004 suite à l’accroissement rapide des menaces par des parasites secondaires.”
(Wang, 2008).
Sources:
Cerdeira AL and Duke SO (2006). The Current Status and Environmental Impacts of Glyphosate-Resistant
Crops: A Review. J. Environ. Qual. 35:1633–1658.
Chen D, Ye G, Yang C, Chen Y and Wu Y. (2005). The effect of high temperature on the insecticidal
properties of Bt cotton. Environmental and Experimental Botany 53: 333–342.
Faria C et al. (2007). High Susceptibility of Bt Maize to Aphids Enhances the Performance of Parasitoids of
Leptidopteran Pests. PLoS ONE (2)7: e600, July 2007.
Gilliam, C (2006). US: Cotton Farmers sue Monsanto, Bayer, and Delta & Pine for crop loss. Reuters, 24
February 2006.
Khan M, Quade P and Murray D (2007). Reduced rate of chemical plus additive - an effective IPM tool for
managing mirids, Creontiades spp. in Australian cotton in Goodell PB and Ellsworth PC (2008). Second
International Lygus Symposium. Journal of Insect Science 8:49.
Li X (2009). The effect of root exudates from two transgenic insect-resistant cotton lines on the growth of
Fusarium oxysporum. Transgenic Res. Epub 25 April 2009.
Lopez Gonzales E (2008). El fracaso del algodón tansgénico en el campo Colombiano, Grupo Semillas.
http://www.semillas.org.co/sitio.shtml?apc=c1a1--&x=20155139g
Monsanto (2009). Update on Pollination Variations in Three White Maize Hybrids in South Africa (news
release), 7 May 2009.
Musick v. Monsanto Co. (2006). Plaintiff’s Original Class Action Complaint. US District Court for the Eastern
District of Texas.
Wang S, Just D and Pinstrup-Andersen P (2008). Bt-cotton and secondary pests, Int. J. Biotechnology 10:
113-121.
5
La résistance aux herbicides force les fermiers à désherber à la main
Après des années d’utilisation intensive de l’herbicide glyphosate dans les cultures
génétiquement modifiées ‘Roundup Ready‘ aux Etat-Unis, les mauvaises herbes ont
développé une résistance à ce produit chimique. Le problème se répand très rapidement
et prouve que la technique consistant à rendre les plantes résistantes aux herbicides par
géniegénétique est une stratégie à court terme, qui augmente la difficulté de contrôler les
mauvaises herbes.
“Je pense qu’elle menace nos méthodes agricoles davantage que tout ce
que j’ai pu voir durant les 30 années pendant lesquelles j’ai travaillé dans
l’agriculture."
- Ken Smith, scientifique spécialiste des mauvaises herbes, Université de l’Arkansas, 2009
’La mauvaise herbe la plus problématique dans toutes les variétés de coton ‘
L’amarante de Palmer (Amaranthus palmeri) est une mauvaise herbe très tenace. Elle a
développé récemment une résistance au glyphosate et se répand rapidement dans le Sud
et le Midwest américains, infestant les champs de coton, de soja et de maïs Roundup
Ready. Les spécialistes des mauvaises herbes sont inquiets car cette amarante pourrait
ruiner de nombreux exploitants. Il n’existe pas de moyen efficace pour contrôler l’amarante
de Palmer résistante, à part augmenter l’utilisation d’herbicides persistants, le désherbage
des cultures à la main ou l’intensification du labourage, ce qui a pour effet de détruire la
couche arable.
L’amarante de Palmer résistante au glyphosate a d’abord été signalée dans l’Etat de
Géorgie en 2005 (Culpepper, 2006). La pollinisation de l’amarante s’effectue par le vent et
la propriété de résistance se répand très vite par le biais du pollen (très mobile) de la
plante (Sosnoski, 2007). Transportées par le vent, les populations résistantes se déplacent
tellement vite qu’il n’existe aucune estimation nationale fiable des champs actuellement
contaminés. En 2009, rien que dans les Etats d’Arkansas et du Tennessee, on estime
qu’elles ont contaminé plus de 500.000 hectares de champs (Charlier, 2009).
“Aujourd’hui, on voit se développer une [amarante de Palmer] qui résiste au
glyphosate… Cela va poser un problème majeur. Nous pouvons revenir au
labourage et essayer de contrôler ce que nous pouvons de cette façon,
mais jusqu’à présent, aucun produit chimique ne fonctionne.”
- Ronnie Qualls, cultivateur de coton en Arkansas, 2009.
Stanley Culpepper, de l’Université de Géorgie, est le premier spécialiste à avoir confirmé
la présence de l’amarante de Palmer résistante. Pour lui, il s’agit dorénavant de la
mauvaise herbe la plus problématique pour toutes les variétés de coton. Pour la contrôler,
Culpepper recommande d’utiliser des herbicides supplémentaires et de désherber les
champs avec une binette : une méthode très laborieuse et anachronique dans le paysage
américain, où prédominent les grandes fermes mécanisées.
Retour au désherbage à la main et à la binette
Le glyphosate étant inefficace contre les mauvaises herbes, les commerçants d’outils
agricoles du Delta du Mississippi expliquent que les binettes de jardin sont à nouveau
6
demandées : c’est actuellement l’un des outils les plus vendus (Charlier, 2009).
“Nous n’avons pas coupé le coton [infesté de mauvaises herbes] depuis longtemps,”
explique un cultivateur de coton de l’Arkansas. Le désherbage à la main de plantations
gravement infestées coûte 240 dollars américains par hectare aux cultivateurs de coton de
Géorgie (Hollis, 2009). Selon les scientifiques spécialisés dans ce domaine, les fermiers
qui ne désherbent pas à la main ou qui appliquent des herbicides supplémentaires
risquent la catastrophe.
“Je continue de voir des cultivateurs qui pulvérisent le coton Roundup Ready
avec du Roundup. Si vous continuez ainsi, vous ne survivrez pas. Même si
vous avez survécu jusqu’à présent, vous ne survivrez pas à l’avenir.”
– Stanley Culpepper, spécialiste en mauvaises herbes de l’Université de
Géorgie, 2009.
Renforcer la résistance
La résistance au glyphosate se répand dans les champs, mais elle devient de plus en plus
forte également: “Dans le passé, lorsque l’on appliquait 22 onces de Roundup
WeatherMax sur une amarante résistante, on pouvait au moins observer des symptômes”,
explique Larry Steckel, spécialiste des mauvaises herbes à l’Université du Tennessee. “A
présent, dans certains cas, on peut vaporiser 152 onces et n’en observer aucun. La
vitesse à laquelle la résistance s’est répandue et intensifiée est incroyable.” (Bennett,
2008b).
Les spécialistes des mauvaises herbes conseillent aux fermiers d’utiliser des ‘herbicides
résiduels‘ à base de différents produits chimiques pour compenser l’impossibilité pour le
système Roundup Ready de contrôler l’amarante dans les champs de maïs, de soja et de
coton. Les herbicides résiduels s’appliquent tôt dans la saison et sont conçus pour
persister dans le sol, tuant les nouvelles pousses de mauvaises herbes des semaines
après l’application.
L’amarante de Palmer continue de se répandre. Les fermiers et les scientifiques peinent à
trouver une solution. A cause d’un recours massif au glyphosate, aucune option
satisfaisante de contrôle n’est disponible. Celles qui existent sont lourdes en termes de
travail et de produits chimiques. Elles coûtent cher aux cultivateurs et à l’environnement.
Les bénéfices à court terme, qui avaient poussé les fermiers américains à opter pour les
cultures Roundup Ready, ont rapidement été perdus par la réponse - prévisible - de la
nature à l’usage trop intensif d’un seul herbicide.
7
Sources
Baldwin F (2009a) Pigweed in Conventional Soybeans. Delta Farm Press, 2 September 2009.
Baldwin F (2009b) Pigweed predictions becoming reality. Delta Farm Press, 4 August 2009.
Baldwin F (2009c). Residuals showed value this year. Delta Farm Press, 23 September 2009.
Bennett D (2008a). High incidence Arkansas’ resistant pigweeds. Delta Farm Press, 11 April 2008.
Bennett D (2008b). Resistant pigweed ‘blowing up’ in Mid-South. Delta Farm Press, 30 July 2008.
Charlier T (2009). 'The perfect weed': An old botanical nemesis refuses to be rounded up. Memphis Commercial Appeal, 9 August 2009.
Culpepper AS, Grey TL, Vencill WK, Kichler JM, Webster TM, Brown SM, York AC, Davis JW and Hanna WW (2006). Glyphosateresistant Palmer amaranth (Amaranthus palmeri) confirmed in Georgia. Weed Science 54:620-626.
Hollis P (2009). Resistant Pigweed: Reduce Seed Bank. Southeast Farm Press, 18 September 2009.
Robinson E (2009a). Triple G pushes yields, efficiency. Delta Farm Press, 22 September 2009.
Robinson E (2009b). Land, labor, water – cotton keys. Delta Farm Press, 3 September 2009.
Scott R and Smith K (2007). Prevention and Control of Glyphosate-Resistant Pigweed in Roundup Ready Soybean and Cotton.
University of Arkansas Cooperative Extension Service, n.d. (c. 2007). http://www.uaex.edu/Other_Areas/publications/PDF/FSA-2152.pdf
Sosnoski LM, Webster TM, Kichler JM, MacRae AW and Culpepper AS (2007). An estimation of pollen flight time and dispersal distance
for glyphosate-resistant Palmer amaranth (Amaranthus palmeri). Proc. South. Weed Sci. Soc 60:229.
8
Le coton génétiquement modifié ne produit pas les résultats escomptés
en Colombie
L’échec du coton génétiquement modifié en Colombie a aggravé la situation, déjà très
difficile, de nombreux fermiers durant la saison de croissance 2008/2009. Dans les
champs de la province de Cordoba, la principale région cotonnière de Colombie, deux
nouvelles variétés de coton génétiquement modifié se sont avérées désastreuses. Les
fermiers colombiens ont attaqué Monsanto en justice, l’accusant de les avoir trompés à
propos des variétés. Ces dernières ont été attaquées par des chenilles et endommagées
par les herbicides auxquelles elles étaient supposées résister.
Economiquement, les semences génétiquement modifiées et les herbicides (qui vont de
pair) entraînent des coûts élevés pour les fermiers. Ainsi, malgré les subsides
gouvernementaux, plus de la moitié des plantations de coton colombiennes sont
déficitaires. D’une façon générale, l’ensemble de la récolte colombienne et sa rentabilité
ont baissé après la dernière saison de plantation au moyen de semences génétiquement
modifiées. Et cela, alors que la surface plantée en coton avait récemment été augmentée.
Le président de la fédération des cultivateurs de coton CONALGODON explique que, pour
la saison 2008, il avait placé beaucoup d’espoir dans les nouvelles variétés génétiquement
modifiées ’empilées avec de multiples transgènes. Celles-ci avaient été semées pour la
première fois en Colombie. Mais cet espoir a été déçu. Les cultivateurs de coton ont
observé que les variétés n’avaient pas produit autant que prévu, voire rien du tout.
CONALGODON a conclu d’une façon amère : “Les résultats finaux de la récolte, mesurés
par le rendement dans le champ et à l’égreneuse, confirment que les espoirs étaient plus
grands que la réalité.”
Que s’est-il passé ?
Échec du coton génétiquement modifié
Dans la province de Cordoba, qui produit normalement près de 50% du coton colombien,
les deux nouvelles variétés de coton génétiquement modifié ont échoué. Toutes deux
contenaient plusieurs gènes : un gène de tolérance à un herbicide (glyphosate) et un gène
de résistance à un insecte (Bt (Bacillus thuringiensis)) Les fermiers ont expliqué que,
contrairement aux affirmations de l’entreprise, le coton était très sensible à la chenille
légionnaire1 et a été endommagé par l’herbicide glyphosate, ce qui est anormal.
CONALGODON estime que les cultivateurs de Cordoba ont perdu, au total, 12.8% de leur
récolte (Fonseca Prada 2009a).
Les cultivateurs de coton de la province de Tolima, dans le centre de la Colombie, ont
rapporté le même problème : la nouvelle variété génétiquement modifiée de Monsanto a
entraîné des récoltes moindres en fibres (CONALGODON 2008).
1
Alors que les variétés de coton Bt ont été développées pour résister aux chenilles du genre Leptidoptera, Monsanto a affirmé que
les gènes Bt réduiraient également les infestations de chenilles légionnaires (Spodoptera) de 50 à 70%. Les fermiers affirment que
c’est faux. (Voir: Lopez Gonzales E (2008). El fracaso del algodón tansgénico en el campo Colombiano, Grupo Semillas.
http://www.semillas.org.co/sitio.shtml?apc=c1a1--&x=20155139g
9
La variété qui a été la plus performante dans la province de Cordoba, en 2008/09, a été la
variété conventionnelle Delta Opal. Elle a produit beaucoup plus que les espèces résistant
à l’herbicide et les espèces Bt.
Graphique illustrant le choix limité de semences : cf. rapport initial
Rendement des variétés de coton, Cordoba, Colombie, saison de croissance 2008/2009
VARIETE
TRANSGENES
Delta Opal
(conventionnel)
NuOpal
NuOpal BG RR
-
Gène Bt
Résistance Herbicide
Gène Bt (‘Bollgard’)
DP 164 BG2 RR FLEX
Résistance Herbicide
Gène Bt (‘Bollgard2’)
DP 455 BG RR
Résistance Herbicide
Gène Bt (‘Bollgard’)
(Source: Fonseca Prada 2009)
RENDEMENT/HECTARE (Observé,
Province de Cordoba, 2008/2009)
2,027kg
1,905 kg
1,883 kg
1,762 kg
956 kg
Les fermiers dont le coton n’a pas produit le rendement escompté ont acheté des
semences génétiquement modifiées parce que c’était la seule variété disponible. Selon
CONALGODON, c’est la carence en semences conventionnelles qui a contraint des
fermiers à acheter la variété génétiquement modifiée de Monsanto. Celle-ci coûte
pratiquement trois fois plus que la variété conventionnelle Delta Opal.
“Ce qui s’est passé est une catastrophe. En l’absence d’un large gamme de
variétés disponibles, les fermiers n’ont aucune alternative pour les plantations.”
- Jorge Patiño, porte-parole de Remolino, la fédération des cultivateurs de coton
à Tolima, Colombie, 2009 (CONALGODON 2008).
Le fait que certains fermiers n’aient pas eu d’autre choix que les variétés génétiquement
modifiées n’est pas surprenant si on connaît la dominance de Monsanto sur le marché des
semences de coton en Colombie. CONALGODON a critiqué les offres, les jugeant
“insuffisantes, inadéquates, et inopportunes”. Les cultivateurs estiment que la gamme de
Monsanto est trop peu étoffée. Ils notent “des prix élevés pour les semences, au vu des
bénéfices nets obtenus.” (Fonseca Prada 2008).
GRAPHIQUE:
Choix limité: disponibilité de semences de coton certifiées, Zone de la production côtière
colombienne, saison 2009/2010 (Source: CONALGODON)
Producteur
Variétés offertes
Monsanto (transgénique)
7
Monsanto (conventionnel)
1
Secteur public (conventionnel)
1
Bayer (transgénique, essais “semi-commerciaux”)
Tonnes (M) disponibles
308
250
70
1
4
Graphique : Prix des semences de coton Monsanto et contributions technologiques, Colombie, 2009
(Source: Monsanto, conversion en US dollars à 1900 pesos colombiens = $1, arrondi au dollar le plus
10
proche)
Variété
sac)
Delta Opal (conventionnel)
NuOpal (Bt)
DP 455 (Bt/RR)*
DP 164 (Bt 2/RR/“flex”)*
Coût semence “Contribution technologique” Cost (25kg par
$179
$179
$187
$168
$0
$176
$234
$329
$179
$355
$421
$497
*Échec observé dans les champs dans une ou plusieurs région(s) de Colombie en 2008/2009.
Une industrie en crise
Le coton colombien est subsidié par une garantie de prix minimum du gouvernement. Ces
dernières années, le subside a fluctué autour de 0.09 US dollar le kilo (ICAC 2006), soit
près du tiers du prix international du coton, qui était de 0.281 US dollar le kilo à la fin août
2009.
Malgré ces subsides, les coûts de production, plus élevés, ont entraîné le déficit de plus
de la moitié des plantations de coton colombiennes (CONALGODON 2008). En
2008/2009, les coûts moyens de production ont oscillé entre 13% et 30% selon la province
envisagée. Les cultures génétiquement modifiées expliquent en bonne partie la hausse
des coûts. Dans certaines régions, récemment, le prix du glyphosate de Monsanto
(Roundup) a doublé (Mejia 2009) et le prix des semences génétiquement modifiées y est
deux à trois fois plus élevé que celui des semences conventionnelles (voir graphique).
Dans les principales régions cotonnières de la province de Cordoba et Bolivar, les
semences génétiquement modifiées font augmenter le coût des plantations, alors que le
coût des herbicides et des pesticides est également parti à la hausse et n’a pas réussi à
compenser le prix plus élevé des semences (Fonseca Prada 2009b, 2009c).
En conclusion : le coton génétiquement modifié, manifestement, ne protège pas les
fermiers colombiens de la faillite. Ajoutons que, pour répondre aux problèmes croissants
du secteur, le gouvernement colombien a augmenté ses subsides en 2010
(CONALGODON 2009).
Monsanto trainé en justice
Suite à l’échec des variétés génétiquement modifiées de Monsanto dans la province de
Cordoba et ailleurs, le gouvernement colombien a imposé une nouvelle règlementation à
Monsanto (Résolution 682/09, février 2009) imposant davantage d’assistance technique
aux fermiers.
Les fermiers de la province de Cordoba ont trainé Monsanto en justice, lui réclamant des
dédommagements pour leurs pertes. Reconnaissant tacitement leur échec, les
représentants Monsanto ont d’abord proposé une compensation en liquide. Mais les
négociations se sont arrêtées au milieu de l’année 2009, lorsque les fermiers ont refusé de
signer les documents légaux imposés par Monsanto en échange des paiements (Arroyo
Muñoz 2009). L’affaire est en cours devant les tribunaux.
11
Sources
Arroyo Muñoz J (2009). Conalgodón vs. Monsanto. El Meridiano de Córdoba (Monteria, Colombia), 10 June 2009.
CONALGODON (2008). Cosecha del interior 2008: las cifras se mantienen. Revista CONALGODON, October - December 2008.
CONALGODON (2009). Ministro de Agricultura anunció Nuevo Precio Mínimo de Garantía para 2010: $5 millones por tonelada de fibra (news release),
n.d. (c. June 2009). http://www.conalgodon.com/portal/index.php
Fonseca Prada LA (2008). Los transgénico exigen ajustes en las prácticas agrícolas in Revista CONALGODON, October-December 2008.
Fonseca Prada LA (2009a). Balance y perspectivas del cultivo, Evaluación Valledupar (CONALGODON harvest evaluation conference presentation), 5
June 2009. http://www.conalgodon.com/portal/index.php?option=com_content&task=view&id=58&Itemid=9
Fonseca Prada LA (2009b). Apertura temporada algodonera César y Bolívar Sur 2009/10. CONALGODON. September 2009.
http://www.conalgodon.com.co/02estadisticas/reportes/Aperturas/Bolivar%202009%2010.pdf
Fonseca Prada LA (2009c). Apertura temporada algodonera Córdoba 2009/10. CONALGODON. September 2009.
http://www.conalgodon.com.co/02estadisticas/reportes/Aperturas/Cordoba%202009%2010.pdf
International Cotton Advisory Committee (ICAC) (2006). Production and Trade Policies Affecting the Cotton Industry, Washington, 2006. URL:
http://www.icac.org/govt_measures/documents/govt_measures06.pdf
Mejia J (2009). Resultados y propuestas cosecha algodonera Sucre y Bolívar, Evaluación Valledupar, 5 June 2009.
Ruiz Moreno L (2009). Indicadores cosecha Costa 2008/09, Evaluación Valledupar, 5 June 2009.
Vargas C (2009). Presentation by Monsanto (no title). Evaluación Valledupar. 5 June 2009.
12
Le soja transgénique produit moins
Des études ont démontré que le soja ‘Roundup Ready’ (tolérant au glyphosate) de
Monsanto produit 5 à 10% en moins que les variétés conventionnelles modernes de soja.
Chaque année, ces variétés de soja transgénique à faible rendement coûtent des milliards
de dollars aux cultivateurs.
La preuve de la baisse des récoltes, le « yield drag » (littéralement : le boulet du
rendement, ceci étant une allusion à ce qui vient freiner le rendement et peut être compris
comme une 'baisse de rendement'), démontre l’imprévisibilité de génie génétique. Celle-ci
entraîne des effets non-voulus. Les pertes dues au « yield drag » étaient et restent
évitables : il suffirait d’utiliser des variétés conventionnelles modernes.
Le « yield drag » documenté
Le « yield drag » a fait assez vite son apparition lorsque le soja génétiquement modifié a
été adopté aux Etats-Unis, à la fin des années 1990. Le problème avait été bien cerné lors
des études de Charles Benbrook, un ancien conseiller scientifique du gouvernement
américain et de Roger Elmore de l’Université du Nebraska.
Après avoir analysé de multiples essais de terrain aux Etats-Unis en 1999, Benbrook a
mis à jour un yield drag moyen de 5.3% pour le soja Roundup Ready. Il a également
découvert qu’aux mêmes endroits, les variétés conventionnelles surpassaient les
rendements du Roundup Ready de plus de 10% (Benbrook 1999).
En 2001, Elmore et ses collègues ont comparé directement des versions
'conventionnelles' et 'transgéniques' d'une même variété de soja et ce, dans le
cadre d'essais en champ. Ils ont démontré que le yield drag était dû au génie
génétique et non à d’autres facteurs (Elmore 2001a). Elmore a également estimé
que le yield drag du soja Roundup Ready était de 5% à 10%, selon la variété et les
conditions (Elmore 2001b)
Le coût du « yield drag »
Aux Etats-Unis, où 95% du soja est du Roundup Ready, les fermiers ont planté
30.6 millions d’hectares en 2008 et récolté 80.54 millions de tonnes métriques
(USDA 2009). Le yield drag a donc grignoté entre 4 et 8 millions de tonnes
métriques (Mt) de la récolte américaine de soja en 2008. Cette perte est plus
importante que l’exportation annuelle de soja américain en Union européenne (3.7
Mt) ou au Mexique (3.6 Mt). Elle pourrait être supérieure aux deux réunies.
Cumulée, la perte est stupéfiante. En optant pour la formule (simpliste et décevante) du
contrôle des mauvaises herbes du soja Roundup Ready plutôt qu’en utilisant les
meilleures variétés conventionnelles, les agriculteurs américains ont produit 31 millions de
tonnes métriques de soja en moins, de 2006 à 2009, qu’ils ne l’auraient fait autrement.
Lors des quatre dernières années, le coût cumulé de cette perte a dépassé 11 milliards de
dollars US (au prix à la ferme de 9.65 dollars par boisseau).
13
Les pertes sont du même ordre dans les autres pays producteurs de soja Roundup Ready.
C’est le cas du Brésil, notamment, qui devrait normalement se placer, d’ici à quelques
années, devant les Etats-Unis sur la liste des plus grands producteurs mondiaux de soja.
C’est également le cas de l’Argentine. L’industrie admet tardivement le problème
Ce n’est que récemment que Monsanto a admis que le soja Roundup Ready produisait
moins. L’entreprise l’a reconnu tacitement en commercialisant le ’Roundup-Ready 2‘, une
nouvelle variété de plante résistante au glyphosate. Monsanto prétend que le Roundup
Ready 2, qui a été planté en 2009 sur une superficie limitée aux Etats-Unis, a un
rendement de 7 à 11% plus élevé que son prédécesseur (Monsanto 2009).
Mais, bien qu’il se prétende plus rentable que les prédécesseurs à moindre rendement du
Roundup Ready 2, le Roundup Ready 2 ne produit pas davantage que les variétés
conventionnelles appropriées de soja. Après tout, les gènes Roundup Ready confèrent
une résistance chimique aux herbicides, mais pas des caractéristiques de productivité.
Selon Monsanto, le Roundup Ready 2 a été produit en insérant le gène de la résistance à
l’herbicide à un autre endroit du génome du soja, supposé réduire le yield drag (Meyer
2006).
“Il y a deux ans, je me suis rendu à une réunion concernant une nouvelle
technologie pour le soja. L’entreprise concernée prétendait qu’il n’y avait
pas de yield drag avec celle-ci. Lorsque la technologie originale a été
commercialisée, elle a été annoncée sans yield drag. Que devons-nous
croire des nouvelles technologie du soja ?”
- Chris Jeffries dans The Seed Consultant (newsletter), Mai 2009
Pourtant, tout comme la première génération de soja résistant au glyphosate de
Monsanto, il s’avère que génie génétique du Roundup Ready 2 a également des
conséquences inattendues. Les plants de Roundup Ready 2 sont plus courts de 5% que
les plantes conventionnelles du même type (Meyer 2006). Personne ne sait pourquoi.
Sources
Benbrook C (1999) Evidence of the Magnitude and Consequences of the Roundup Ready Soybean Yield Drag from University-Based Varietal Trials in
1998, AgBioTech InfoNet Technical Paper #1, 13 July 1999.
Elmore RW, Roeth FW, Klein RN, Knezevic SZ, Martin A, Nelson LA and Shapiro CA (2001a). Glyphosate-Resistant Soybean Cultivar Response to
Glyphosate. Agron J. 93:404-407.
Elmore RW, Roeth FW, Nelson LA, Shapiro CA, Klein RN, Knezevic SZ and Martin A (2001b). Glyphosate-Resistant Soybean Cultivar Yields Compared
with Sister Lines. Agron J. 93: 408-412.
Meyer J, Horak M, Rosenbaum E and Schneider R (2006). Petition for the Determination of Nonregulated Status for Roundup Ready2Yield Soybean MON
89788, Monsanto Company (Submission to the US Animal and Plant Health Inspection Service).
Monsanto (2009). Roundup Ready 2 Yield. November 2009. http://www.monsanto.com/rr2y/
United States Department of Agriculture (USDA). 2009. U.S. Soybean Industry: Background Statistics and Information, May 2009.
http://www.ers.usda.gov/News/SoyBeanCoverage.htm
14
Les producteurs de riz paient la note de la dissémination
accidentelle du riz transgénique de Bayer
En août 2006, les marchés mondiaux du riz ont été secoués par l’annonce faite par l’US
Department of Agriculture (USDA) ,selon laquelle les cultures de riz américain avaient été
contaminées par un riz transgénique de Bayer, non approuvé et résistant à l’herbicide.
Cette contamination a entrainé une kyrielle de coûts. Au final, elle a coûté 741 millions à
1,29 milliard de dollars américains à l’industrie américaine du riz. Il faut y ajouter les coûts
pour les entreprises étrangères et les dédommagements à payer par Bayer (ceux-ci
restent actuellement à déterminer). L’origine de la contamination demeure inexpliquée à
ce jour.
Une contamination coûteuse
La contamination par du riz génétiquement modifié a été mise à jour en 2006, dans les
cultures de riz à grain long de l’Arkansas et des états voisins. Une série de déboires s’est
ensuite abattue non seulement sur les agriculteurs et les transformateurs américains, mais
aussi sur les transporteurs, les importateurs et les distributeurs du monde entier.
Dans les jours qui ont suivi l’annonce, le Japon, les Etats-Unis et d’autres pays ont interdit
l’importation de riz américain. Pourtant, dans les mois qui ont suivi, du riz contaminé a bel
et bien été détecté en Europe, en Afrique et ailleurs, entraînant des rappels de produits
aux Philippines et jusqu’au Ghana, de même que la mise en œuvre d’un régime de tests
très stricts dans l’Union européenne.
Quasi immédiate, la perte de valeur de la récolte américaine enregistrée sur les marchés à
terme américains s’est chiffrée à 168 millions de dollars (Raun 2007). A l’issue des ventes
2006-2007, le recul du marché à terme, auquel il faut ajouter les pertes d’exportations,
avaient coûté, en moyenne, 70.000 dollars à chacun des 6.085 cultivateurs de riz
américains (USDA 2009).
En octobre 2006, la France a annoncé avoir trouvé un second transgène Bayer illégal
dans du riz importé des Etats-Unis. Cette découverte n’a pas manqué de miner davantage
la réputation du riz américain (EU RAS 2006).
Au vu des pertes encaissées, les fermiers et les transformateurs américains ont dépensé
pratiquement 100 millions de dollars pour éliminer la contamination transgénique des
fermes, des silos et des outils d’ensemencement. Mais, à cause de la paralysie des
transports et de l’impossibilité de vendre les récoltes de riz, les transporteurs, les
détaillants et d’autres intermédiaires ont également subi des pertes.
Au total, on estime que ce scandale a coûté à l’industrie du riz américain entre 741
millions et 1,29 milliard de dollars. Cette estimation n’inclut pas les coûts supportés par les
entreprises installées en Europe ou ailleurs (celles-ci ont été obligées de vérifier la
présence de la contamination LL601 et de l’éliminer) ni le versement de
dédommagements et d’amendes par Bayer (voir ci-dessous).
15
TABLEAU:
Estimation du coût de la contamination du riz par LL601
Elément
Estimation faible
Estimation élevée
Assainissement (2006-07)
Assainissement des fermes et test semences
Assainissement des transformateurs et silos
4.3
87.6
5.4
91.0
Pertes agricoles et revenus
Perte du revenu agricole (06-07)
Pertes d’exportation
(06-07)
Pertes d’exportation après 2007
27.4
254.0
89.0
27.4
254.0
445.0
Marchés des produits de base
Perte du marché à terme américain (2006)
168.0
168.0
Autres pertes (transporteurs, détaillants, etc.)
50.9
112.8
Perte totale (millions de dollars américains)
741.2
1,284.6
Source: Adapté de Greenpeace (2007).
Origine toujours inexpliquée de la contamination
Le manque d’explication quant à la façon dont la contamination s’est produite –
aujourd’hui encore, on n’a pas d’explication à ce sujet – soulève des questions sur
la sécurité des essais d’ingénierie génétique dans les champs et la négligence des
concepteurs de cultures transgéniques.
Le LL601 a été mis au point à la fin des années 1990 par Bayer Cropscience (alors
Aventis). Il a été cultivé expérimentalement en Louisiane. Son développement
commercial s’est achevé en 2001.
Après la détection de la contamination en 2006, le United States Department of
Agriculture (USDA) a passé 14 mois et a consacré 8.500 heures de travail à tenter
d’expliquer ce qui s’était passé. Malgré tous les efforts fournis, ses enquêteurs ont
conclu, en octobre 2007, que la documentation concernant les manipulations du
LL601 était insuffisante. Et, de là, que “le mécanisme exact de l’introduction [dans
le riz conventionnel] ne pouvait pas être déterminé ” (USDA 2007).
Demandes de dédommagements
Bayer et les cultivateurs de riz américains doivent faire face à plus de 1.200
poursuites en justice. Celles-ci ont été lancées par ceux qui ont subi des pertes
liées à l’incapacité d’isoler le riz transgénique. Les plaintes ont été déposées par
des fermiers, des marchands de riz et des transformateurs alimentaires européens
qui avaient importé du riz transgénique illégal à leur insu.
Bayer refuse d’assumer la pleine responsabilité financière de la dissémination de
son riz transgénique non approuvé. En août 2008, la firme a empêché les
agriculteurs américains de la poursuivre en tant que groupe (‘action collective’)
devant un tribunal américain.
16
Les fermiers ont donc été obligés de porter plainte individuellement. En août 2009,
près de 1.500 d’entre eux ont à nouveau déposé plainte dans l’Arkansas. Ces
initiatives s’ajoutent à des centaines de poursuites individuelles lancées
précédemment dans différentes juridictions américaines.
En décembre 2009, un premier verdict a été prononcé à la suite de la plainte de
deux fermiers du Missouri. Ceux-ci ont obtenu 2 millions de dollars pour les
dommages subis suite à la contamination. En prononçant son verdict, le jury à
reconnu que Bayer avait traité les semences d’une manière légère. Dans sa
réplique, Bayer a rétorqué être allé au-delà des normes industrielles régissant
l’évitement des contaminations. La firme est même allée jusqu’à dire que “[m]ême
les meilleures pratiques ne peuvent pas garantir la perfection” (Harris 2009). Cet
aveu indique clairement que la contamination transgénique et ses conséquences
coûteuses constitueront une menace aussi longtemps qu’il existera des cultures
transgéniques.
Chronologie des contaminations : cf. rapport original
Sources
European Union Rapid Alert System for Food and Feed (EU RAS) (2006). Report of Week 41.
http://ec.europa.eu/food/food/rapidalert/reports/week41-2006_en.pdf
Greenpeace (2007). Risky Business -Economic and Regulatory Impacts from the Unintended Release of Genetically Engineered Rice
Varieties into the Rice Merchandising System of the US (Report by Neal Blue Consulting).
http://www.greenpeace.org/international/press/reports/risky-business
Harris, A. 2009. Bayer Blamed at Trial for Crops ‘Contaminated’ by Modified Rice. Bloomberg News, November 4th 2009.
http://www.bloomberg.com/apps/news?pid=email_en&sid=aT1kD1GOt0N0
Smith D and Manthey T (2009). Rice farmers in state, elsewhere file lawsuit on engineered strain. Arkansas Democrat-Gazette, 20
August 2009.
United States District Court for the Eastern District of Missouri. Genetically Modified Rice Litigation.
http://www.moed.uscourts.gov/mdl/06-1811.asp
USDA (2009). US Census of Agriculture 2007. http://www.agcensus.usda.gov/
USDA (2007). USDA Concludes Genetically Engineered Rice Investigation (Release No. 0284.07).
17
http://www.usda.gov/wps/portal/usdahome?contentidonly=true&contentid=2007/10/0284.x
ml
Ce qu’il en coûte d'organiser la filière non OGM
Selon divers sondages d’opinion menés régulièrement à travers le monde, la majorité des
consommateurs se posent des questions sur la sécurité des aliments génétiquement
modifiés (OGM). Ils estiment que, s’ils sont commercialisés, ils doivent être étiquetés et
séparés (Harris Poll (2004), Commission européenne (2001), Yomiyuri Shimbum (1997)
etc.). En général, tant le marché que les exigences de sécurité et les directives politiques
exigent que les cultures et les récoltes transgéniques soient séparées des cultures
conventionnelles.
Le poids des cultures transgéniques sur les systèmes de production alimentaire impose
des coûts économiques aux agriculteurs, aux tradeurs, à l’industrie alimentaire et, au bout
du compte, au public. Analysés dans une perspective très large, les coûts générés par les
cultures transgéniques se répercutent sur les principaux marchés de grains.
Depuis 2000, le Tokyo Grain Exchange opère pour le soja non OGM un marché à terme.
Les opérations à terme sur le soja non génétiquement modifié ont toujours un prix plus
élevé que les autres contrats pour le soja (TGE, 2009). Ceci illustre le fait que les
consommateurs sont en demande d’aliments non transgénique. Ceci révèle également
l’existence de coûts additionnels pour les fermiers conventionnels qui veulent empêcher la
contamination transgénique.
Coûts accrus pour le producteur de semences
Le coût des aliments transgéniques commence au niveau de la production de semences
en vue de leur vente. On sait que les semences transgéniques sont plus chères que les
semences conventionnelles. On sait moins, en revanche, que les semences
transgéniques peuvent faire augmenter le coût des semences conventionnelles.
A cause du risque de pollinisation croisée entre les variétés transgéniques et les variétés
conventionnelles, les producteurs de ces dernières doivent prendre des précautions pour
éviter la contamination. Ces précautions doivent être mises en œuvre très rigoureusement
pour éviter la contamination par les semences transgéniques, comme cela s’est passé au
Chili. Dans ce pays, le maïs génétiquement modifié, semé pour produire des semences
destinées à l’exportation, a contaminé des semences utilisées localement (INTA, 2008).
Les scientifiques de la Commission européenne estiment que, si le colza transgénique
devait être introduit en Europe, l’empêchement de la contamination du colza conventionnel
au stade de la production de semences majorerait de 10% le coût de la duplication des
semences (Bock, 2002).
Coûts accrus pour l’agriculteur
Au stade de l’exploitation agricole, les variétés transgéniques imposent également
d’autres coûts, notamment celui de la ségrégation physique et/ou temporelle entre les
cultures transgéniques et les cultures conventionnelles dans les champs, pendant et après
la récolte. Par exemple, lorsqu’un semoir (machine à planter) passe d’un type de culture à
l’autre, il doit être totalement nettoyé, ce qui impose à l’exploitant des coûts de main
d’œuvre supplémentaires. Dans certains cas, les fermiers peuvent « rincer » (càd
organiser une transition entre des variétés OGM et non OGM.
18
Les restes d'OGM sont éliminés au départ d'une cargaison non OGM, vendue comme
OGM en raison du risque de contamination) leurs équipements en plantant des espèces
conventionnelles après les transgéniques. Mais cette pratique nécessite alors que le
fermier vende une partie de sa récolte non transgénique au prix transgénique, en raison
de la contamination potentielle. Empêcher la contamination transgénique au stade de
l’exploitation requiert également de nettoyer d’autres équipements : moissonneuses,
camions, silos et séchoirs.
Un autre coût supplémentaire pour l’exploitation, lié aux semences génétiquement
modifiées, réside dans le contrôle des resemis Lorsque les variétés conventionnelles sont
semées dans le même champ que celui où des cultures transgéniques ont poussé, ou
lorsque des semences conventionnelles sont tombées ou ont été emportées par le vent,
des semences transgéniques liées aux saisons précédentes peuvent germer. Une fois que
celles-ci ont germé, les plantes doivent être éliminées avec des herbicides ou être
coupées avant la floraison afin de ne pas contaminer la culture conventionnelle.
L’élimination des resemis peut être très coûteuse pour les agriculteurs. Selon une étude
canadienne portant sur les coûts de l’introduction (en projet) de blé transgénique, le
contrôle des resemis constituerait la plus grosse dépense de l’exploitation agricole. Elle
s’élèverait en effet à 5,15 dollars canadiens part tonne (avec un seuil de contamination de
0.1%) (Huygen 2003). Ce coût s’élève, pour l’année envisagée, à 3.96% du prix du blé à
la ferme du Canadian Wheat Board (variété: blé roux vitreux de printemps).
Coûts accrus pour le stockage et la distribution
Les récoltes doivent rester séparées tout au long du chemin qui sépare le champ des silos
et des silos élévateurs. La même exigence s’impose depuis les canaux de transport
jusqu’aux transformateurs alimentaires. Ici encore, les cultures transgéniques entraînent
des
pénalités financières aux cultures conventionnelles, à cause de la nécessité de les séparer
spatialement ou temporellement.
Le total des pénalités au stade de l’exploitation et du transport varie selon la culture et le
lieu. De la ferme jusqu’au transformateur, le coût projeté total pour maintenir le blé
canadien conventionnel exempt de contamination transgénique s’élève à 5.4% - 6%
(Huygen et al 2003).
Selon d’autres études récentes, l’estimation pour 2006 du coût de la prévention de la
contamination transgénique dans les exportations de colza d’Australie occidentale se
chiffre à 5 à 9% du coût fermier (Crowe 2006) Selon une projection pour 2009 des coûts
d’introduction en Europe du colza transgénique, ceux-ci s’élèveraient, au total, à 21 % du
prix fermier pour les producteurs de semences, les fermiers et les silos élévateurs
(Menrad et al, 2009).
Coûts accrus pour les transformateurs alimentaires
Enfin, d’autres coûts sont générés lorsque les transformateurs alimentaires doivent
manipuler séparément les récoltes transgéniques et conventionnelles, conformément aux
souhaits des consommateurs et aux prescriptions des directives d’étiquetage. Selon une
étude menée en Allemagne en 2009, le supplément pour l’industrie grimperait jusqu’à
19
12.8% pour le colza, 4.9% pour la betterave sucrière et 10.7% pour le blé (Menrad el at,
2009). Ces coûts s’ajoutent aux coûts fermiers et des traders en grains.
Coûts pour éviter la contamination transgénique
Plutôt que de séparer les grains et les céréales transgéniques des variétés
conventionnelles, certains transformateurs alimentaires (particulièrement en Europe)
n’achètent tout simplement pas d’ingrédients transgéniques. Mais cela engendre
également des coûts, car les entreprises doivent vérifier leur conformité aux règles
d’évitement des transgéniques.
En 2007, une étude s’est penchée sur les dépenses engagées par les transformateurs
alimentaires allemands pour éviter le colza et le maïs transgéniques. Les entreprises ont
identifié une catégorie de coûts liés à l’évitement de la contamination transgénique. Les
coûts cités le plus souvent concernaient l’échantillonnage et le test en laboratoire des
marchandises entrantes, la documentation et la main-d’œuvre supplémentaires. Les
transformateurs alimentaires ont fait état de coûts très variés pour éviter le maïs et le colza
transgéniques. En moyenne, ils les chiffrent entre 2.46 et 23.70 euros par tonne métrique.
(Gawrun 2007).
Calculés en différents endroits de la planète, les coûts supplémentaires imposés par les
semences transgéniques aux agriculteurs, aux traders en grains et à l’industrie
alimentaire sont importants. Ils surviennent à chaque étape du processus de production :
de la multiplication des semences à la transformation alimentaire. Ce problème concerne
d’importants marchés internationaux d’aliments en vrac (maïs, soja et colza). Il pourrait
s’aggraver si de nouvelles cultures transgéniques devaient être approuvées.
Sources
Anonymous (1997). Survey on Genetically Engineered Agricultural Products, Yomiyuri Shimbum, 26 April
1997. Results available in English at the Roper Center Japanese Public Opinion Database.
http://www.ropercenter.uconn.edu/jpoll/JPOLL.html
Bock A-K, Lheureux K, Libeau-Dulos M, Nilsagard H and Rodriguez-Cerezo E (2002). Scenarios for coexistence of genetically modified, conventional and organic crops in European agriculture. European
Commission Joint Research Centre, May 2002.
Crowe B and Pluske J (2006). Is it Cost Effective to Segregate Canola in WA? Australasian Agribusiness
Review, V. 14. 2006.
European Commission (2001). Europeans, Science, and Technology. Eurobarometer 55.2.
Gawron J-C and Theuvsen L (2007). Costs of Processing Genetically Modified Organisms: Analysis of the
th
Rapeseed and Corn Industries. 47 Annual Conference of the German Association of Agricultural
Economists. September 2007. http://purl.umn.edu/7601
Harris Interactive (2004). Harris Poll #49: Genetically Modified Foods and Crops: Public Still Divided on
Benefits and Risks. 2 July 2004.
Huygen I, Veeman M and Lerohl M (2004). Cost Implications of Alternative GM Tolerance Levels: NonGenetically Modified Wheat in Western Canada. AgBioForum 6, pp. s169-177.
Menrad K, Gabriel A and Zapilko M (2009). Cost of GMO-related co-existence and traceability systems in
food production in Germany. International Association of Agricultural Economists Conference Paper, Beijing,
20
16-22 August 2009.
Tokyo Grain Exchange (TGE) (2009). Monthly Trading Data.
http://www.tge.or.jp/english/trading/tra_m01.shtml
La contamination transgénique dévaste l’industrie du lin canadien
Le lin est une espèce adaptée aux latitudes septentrionales, cultivée surtout pour ses
semences riches en huile. Ces dernières sont utilisées dans l’alimentation humaine et
animale et à des fins industrielles. En 2009, une contamination par un lin transgénique a
été détectée dans les exportations canadiennes vers l’Europe et le Japon, entraînant un
effondrement du marché qui a causé d’énormes pertes pour les agriculteurs canadiens.
Les transformateurs et les détaillants européens en ont également subi les répercussions
économiques, les produits ayant dû être rappelés dans différents pays.
En septembre 2009, la contamination transgénique a d’abord été confirmée dans du lin
canadien exporté en Allemagne. Le marché a réagi rapidement. A peine quelques jours
plus tard, le Président de la Saskatchewan Flax Development Commission a conclu non
sans amertume que ‘le marché du lin s’était totalement effondré’. (Kuhlmann, 2009).
A la fin de l’année, la situation ne s’était pas améliorée. Faute d’acheteurs, la majorité de
la récolte canadienne de 2009 est restée en stock. A la question de savoir si les
exportations en Europe – la destination traditionnelle de 70% du lin canadien – avaient
augmenté, le Président du Canadian Flax Council (une organisation nationale de
cultivateurs de lin) a répondu à Reuters, en décembre dernier : “Je ne pense pas qu’il y ait
eu une seule expédition.” (Nickel, 2009)
Contamination par une variété de lin transgénique ayant perdu son enregistrement.
Le lin était autrefois une culture rentable. Il est devenu un désastre économique à cause
de la présence inexpliquée de ‘Triffid’, une variété transgénique conçue pour résister à
l’herbicide dans les exportations canadiennes.
Le Triffid a été développé à l’University of Saskatchewan Crop Development Centre
(CDC). Il a reçu l’agrément final des autorités canadiennes en 1998 et a été inscrit au
registre des variétés approuvées pour la production commerciale.
Mais les cultivateurs de lin se sont opposés au Triffid, craignant le rejet du marché du lin
transgénique, et ils ont empêché sa vente pour la production commerciale. Ils ont
convaincu le CDC d’annuler l’enregistrement de la variété en 2001, seulement trois ans
après son approbation (CGC 2009).
Le CDC a permis la distribution de petits paquets de semences transgéniques par les
scientifiques ayant créé la variété, jusqu’à ce que le Canadian Flax Council y fasse
objection en 2000. Cette année, le Président du Flax Council a affirmé, comme mû par un
pressentiment, que si du Triffid était détecté en Europe, ‘il pourrait littéralement tuer notre
marché’. (Warick, 2000 & Pratt, 2009).
Bien que la source de l’importante contamination identifiée dans le lin canadien en 2009
n’ait pas été identifiée d’une manière concluante, il a été suggéré que les échantillons
distribués il y a près de dix ans pourraient en être l’origine.
21
En essayant de comprendre comment la contamination s’était produite, le Canada’s Flax
Council a demandé aux cultivateurs de présenter des échantillons de leur récolte de 2009
à des fins de test.
“La découverte de Triffid dans les cultures de lin canadiennes, l’été dernier, a
été très dommageable pour l’industrie canadienne et pour nos fidèles clients
en UE. Pour que l’industrie du lin canadien survive et redevienne prospère un
jour, il faudra faire tous les efforts possibles pour localiser et éliminer toutes
les sources de cette contamination.”
– Flax Council of Canada, Message aux producteurs, 30 octobre 2009.
Les marchés du lin paralysés
Le premier rapport confirmé de contamination par le Triffid date du 15 septembre 2009,
lorsqu’un producteur alimentaire allemand a détecté (en août) du matériel transgénique
dans un lot de lin canadien échantillonné. Un test plus approfondi du lin a très rapidement
suivi dans l’UE et, le 10 décembre 2009, 86 cas supplémentaires de contamination au
Triffid avaient été confirmés (EC RASFF, 2009). En novembre, une contamination au Triffid
a été décelée dans du lin exporté au Japon, le troisième plus grand acheteur de lin du
Canada (Yoshikawa & Maeda, 2009).
A la fin 2009, des douzaines d’incidents de contamination ont paralysé les exportations de
lin canadien. Etant donné que la majorité du lin canadien est exportée via le fleuve Saint
Laurent, qui gèle en hiver, celui-ci restera stocké probablement jusqu’en 2010, lorsque
l’industrie cherchera à nouveau des acheteurs pour la récolte.
Conséquences économiques
La révélation de la contamination par le Triffid a entraîné une chute immédiate du prix du
lin payé aux fermiers canadiens. De plus de 12,50 dollars canadiens par boisseau au
début de l’été, le prix a chuté, à la fin du mois de septembre (prix au port), à 7,87 dollars
canadiens en Ontario et 6,80 dollars canadiens dans le Saskatchewan. Au début octobre,
un transformateur du Manitoba a cessé de faire des offres pour les récoltes de lin (SFDC,
2009), ce qui révèle à quel point la contamination par le Triffid a affaibli la demande pour
ce produit.
Depuis lors, les prix canadiens sont remontés à 9 dollars le boisseau. Mais ils demeurent
bas et la récolte reste à l’état de stock. Les optimistes, au Canada, évoquent une
restauration du prix du lin sur les marchés européens (SFDC, 2009). Mais cette
‘restauration’ est illusoire parce que les volumes expédiés sont quasiment nuls. C’est la
preuve qu’à cause de la contamination au Triffid, le Canada ne peut répondre aux critères
de biosécurité pour les nouveaux contrats. Agriculture Canada prévoit qu’en 2009, la
récolte de lin sera de 965.000 tonnes métriques soit plus de 35 millions de boisseaux
(Agriculture Canada, 2009). Alors que les prix payés aux agriculteurs ont chuté à une
moyenne de 3 dollars canadiens par boisseau, ceux-ci ont perdu plus de 106 millions de
dollars canadiens, soit plus que la valeur de leur récolte. La situation pourrait toutefois
empirer : les fermiers qui ont conservé leur récolte et les transformateurs qui ont du lin en
stock font face à une grande incertitude quant aux prix futurs.
22
Un avenir loin d’être radieux
Le coût du Triffid pour l’industrie du lin canadien sera certainement encore plus élevé, bien
qu’il soit trop tôt pour le calculer avec précision. En 2010, on prévoit une diminution de
24% des plantations (SFDC, 2009). De plus, ‘les niveaux de stock onéreux’ impliquent que
la restauration pourrait ne pas se produire avant plusieurs mois en 2010 (Agriculture
Canada 2009). Avant cela, les cultivateurs de lin canadiens doivent tester leurs récoltes
pour identifier le Triffid et tenter d’éliminer toute la contamination : une tâche complexe et
coûteuse que le Canadian Flax Council estime indispensable pour la survie de l’industrie.
Le lin est présenté comme un choix sain dans les produits de boulangerie et d’autres
produits destinés à la consommation humaine. Cela s’explique notamment par sa
concentration élevée en graisses insaturées et en protéines. La contamination par le Triffid
va soulever des questions de sécurité dans l’esprit des consommateurs. Le tort causé à la
réputation du lin et de l’huile de lin pourrait s’avérer encore plus dommageable que les
dommages directs subis par le marché.
Chronologie des contaminations : cf. rapport original
Sources
Agriculture Canada (2009). Canada: Grains and Oilseeds Outlook, 8 October 2009.
CGC (Canadian Grains Commission) (2009). Background information on geneticall
y modified material found in Canadian flaxseed. http://www.grainscanada.gc.ca/gmflax-lingm/pfsb-plcc-eng.htm
EC RASFF (European Commission Rapid Alert System for Food and Feed) (2009).
http://ec.europa.eu/food/food/rapidalert/rasff_portal_database_en.htm
Flax Council of Canada (2009). Message to Producers: Flax Sampling. 30 October 2009.
Kuhlmann A (2009). Chair’s Report. In Saskatchewan Flax Grower (newsletter of the Saskatchewan Flax Development Commission),
September 2009.
Nikel R (2009). Canada Flax Not Shipping to EU; Key Port to Close. Reuters, 9 December 2009.
Pratt S (2009). GM flax breeder deflects criticism. Western Producer, 22 October 2009.
SFDC (Saskatchewan Flax Development Commission) (2009). Market Support Program, November 2009.
Warick J (2000). Flax farmers fear EU wrath: GMO samples could scare away biggest consumer group. Saskatoon StarPhoenix, 19 July
23
2000.
Yoshikawa M and Maeda R (2009). Japan finds GMO in Canadian flaxseed shipments. Reuters, 16 November 2009.
L’Evaluation Internationale conclut que l’ingénierie génétique n’est pas prioritaire pour l’agriculture
Attention: à partir d'ici je n'ai pas relu ou vérifié la traduction!
Selon la toute première évaluation globale détaillée du développement agricole (lire ci-dessous), le scénario
‘business-as-usual’ n’est pas une option pour l’avenir de l’agriculture. Les 400 scientifiques qui ont participé
à cette évaluation ont conclu que les cultures génétiquement modifiées ne constituent pas une priorité pour
nourrir le monde en 2050.
Pour que le monde soit sain et habitable dans les prochaines décennies, l’évaluation préconise une
approche orientée sur les systèmes, adaptée aux conditions et aux cultures locales. Une telle approche est
plus susceptible de répondre aux besoins agricoles des prochaines décennies que les nouvelles
technologies, exclusivement axées sur la productivité du marché:
“Historiquement, la voie du développement agricole était axée sur la productivité accrue plutôt
que sur l’intégration holistique de la gestion des ressources naturelles (GRN) couplée avec la
sécurité alimentaire et nutritionnelle. Une approche holistique ou orientée sur les systèmes est
préférable. En effet, elle peut faire face à la complexité des systèmes de production alimentaire
(notamment) dans les différents lieux, cultures et écologies.” - EICSTAD, 2009.
L'Evaluation internationale des sciences et technologies agricoles pour le développement (EICSTAD) a vu le
jour en 2002. L’Evaluation a été créée, entre autres, par des agences internationales comme l’Organisation
des Nations-Unies pour l’alimentation et l’agriculture (Food and Agriculture Organisation), l’Organisation
Mondiale de la Santé (World Health Organisation) et le Programme des Nations-Unies pour le
développement (UN Development Programme). Toutes ces organisations se sont impliquées dans
l’EICSTAD. Des gouvernements nationaux, ainsi que des organisations non-gouvernementales et
scientifiques du monde entier, ont également participé à cette Evaluation.
A l’issue d’une série de réunions régionales et mondiales, l’EICSTAD a présenté ses conclusions en Afrique
du Sud, en 2008, dans un volumineux rapport intitulé Agriculture at a Crossroads. Ce document reflète le fait
que les participants ont des visions différentes du potentiel des cultures génétiquement modifiées.
L’approche de l’EICSTAD consistait à définir les problèmes agricoles dans un esprit de concertation mutuelle
et, ensuite, à chercher à identifier les meilleures méthodes pour les résoudre. Dans ce cadre, il a été décidé
de se concentrer sur la réalité actuelle plutôt que sur des scénarios du futur, imaginés par un groupe varié de
participants ou d’hypothèses élaborées a priori sur les meilleures approches technologiques.
Finalement, au grand dam des ingénieurs génétiques du secteur privé (qui ont quitté le programme),
l’EICSTAD a produit des résultats beaucoup moins enthousiasmants pour l’utilisation future de l’ingénierie
génétique que ce que les promoteurs de cette technologie espéraient. Parmi les problèmes d’ingénierie
génétique relevés par l’EICSTAD, on compte les problèmes rencontrés à la fois par les paysans et les
scientifiques (contrecarrés par les barrières légales imposées par les brevets biotechnologiques), les
préoccupations écologiques liés à la dissémination des gènes au départ des cultures transgéniques, la
désorganisation du marché causée par les objections politiques et éthiques, et le manque de suivi médical et
environnemental dans les quelques pays qui cultivent actuellement des espèces génétiquement modifiées à
grande échelle.
L’EICSTAD a estimé que d’autres approches s’avéraient plus prometteuses pour le futur de l’agriculture:
“Etant donné les défis auxquels nous faisons face aujourd’hui, les organisations formelles
[science et technologie] reconnaissent que le modèle actuel [connaissances agricoles, science
et technologie] doit être revu et corrigé. Le scénario ‘business as usual’ n’est pas une option.
Une possibilité d’adaptation serait de passer de la concentration exclusive sur la recherche
publique et privée comme le site de la R&D vers la démocratisation de la production de savoir
(cette phrase ne signifie rien en francais, mais je ne la comprends pas non plus en anglais…)
Une fois que [les connaissances, sciences et technologies agricoles] sont concentrées
simultanément sur la production, la profitabilité, les services à l’écosystème et les systèmes
alimentaires spécifiques aux sites envisagés, alors, le savoir formel, traditionnel et local doit
être intégré (idem). Les savoirs traditionnels et locaux constituent une somme de savoirs
24
pratiques, nécessaires pour réaliser les objectifs de durabilité et de développement.”
Aujourd’hui, une des priorités internationales consiste à accélérer le changement des politiques agricoles
nationales et internationales en se conformant aux conclusions de l’EICSTAD. Celles-ci comprennent des
mesures pour la promotion du rôle et des connaissances des petits cultivateurs, de même qu’un
accroissement de l’investissement public dans la recherche agricole. Les cultures génétiquement modifiées,
en tout cas, ne sont pas une option prometteuse pour résoudre les problèmes auxquels l’agriculture doit faire
face.
Sources
Cet article est un résume du récent rapport de Greenpeace, intitulé Agriculture at a Crossroads: Food for
Survival, publié en octobre 2009 et disponible sur:
http://www.greenpeace.org/international/agriculture-at-a-crossroads
IAASTD (2009). International Assessment of Agricultural Knowledge, Science and Technology for
Development - Executive Summary of the Synthesis Report. Island Press. p. 3, 9 et 10.
L’agriculture diversifiée protège contre le changement climatique
Répondre au changement climatique est un défi pour l’agriculture mondiale. Au cours des prochaines
décennies, celle-ci devra répondre à des évolutions dans le domaine des précipitations, des températures et
des variétés de plantes et de parasites. Les pays en développement subiront des impacts plus importants
que les autres. Par exemple, à l’horizon 2050, les deltas des rivières occupés par des populations
démographiquement denses, comme celles du Sud et du Sud-Est asiatique, seront inondés par l’eau de
mer. L’alimentation en eau douce va diminuer dans ces zones (IPCC 2007).
Alors que l’ingénierie génétique continue de promettre des solutions, l’agriculture écologique produit, elle,
des résultats.
Cultures génétiquement modifiées et changement climatique: le battage publicitaire contre la réalité
Les cultures commerciales génétiquement modifiées restent concentrées sur des espèces résistantes aux
herbicides ou produisant un insecticide. Ces caractéristiques ne répondent pas aux nouvelles contraintes
imposées par le changement climatique.
L’ingénierie génétique (IG) ne convient pas pour rendre les cultivars (le mot anglais est « cultivar »… ???Je
traduirais personnellement par cultures…. ????) plus résistants aux problèmes consécutifs au changement
climatique, comme la chaleur et la sècheresse. Cela s’explique par le fait que la gestion de tels stress chez
les plantes est généralement contrôlée par des systèmes génétiques complexes, qui impliquent l’interaction
entre de grandes séries de gènes et entre la plante et son environnement. En comparaison, l’IG se limite à
l’insertion d’un (ou de plusieurs) gène(s) sans que le contrôle sur le timing et l’ampleur de l’expression du
gène soit très élaboré. Cela rend l’IG nettement plus inapte à l’expression du gène que les systèmes de
régulation complexes développés d’une façon naturelle par les plantes.
Selon la littérature scientifique qui inclut la récente Evaluation internationale des sciences et technologies
2
agricoles pour le développement (EICSTAD), la stratégie la plus efficace pour adapter l’agriculture au
changement climatique consiste à cultiver une plus grande diversité de variétés et à élargir la diversité
génétique de celles que nous cultivons aujourd’hui.
2
L’Evaluation internationale des sciences et technologies agricoles pour le développement, réalisée en 2008, est une revue
international très importante dans le domaine de l’agriculture. Elle est sponsorisée par les Nations-Unies et divers gouvernements.
Le rapport final, Agriculture at a Crossroads est disponible en ligne sur http://www.agassessment.org/
25
La diversité s’adapte au changement
Différentes études ont souligné l’importance d’avoir recours à plusieurs types d’agriculture écologique dans
les systèmes agricoles modernes. Parmi les bénéfices constatés, on relève la résistance accrue à la maladie
et à la sècheresse, ainsi que l’accroissement des rendements.
Face aux pertes de culture dues à la piryculariose du riz, les fermiers de la province du Yunnan (Chine) ont
adopté un système basé sur la culture de différentes variétés de riz. Ils ont ainsi augmenté leurs rendements
de 89%. En même temps, ils ont conservé la diversité génétique des variétés locales de riz et réduit l’usage
des fongicides (Zhu 2000, 2003). On a également constaté, en Italie, qu’une plus grande diversité génétique
protège les récoltes de blé de la sècheresse (DiFalco 2006, 2008).
De même, la plantation régulière de différentes espèces est également bénéfique. Aux Etats-Unis, les
chercheurs ont récemment comparé les récoltes de maïs de différents systèmes agricoles. Ils ont découvert
que les fermiers qui pratiquent plus souvent la rotation des cultures et qui plantent des cultures de
couverture avaient des récoltes 100% plus importantes que les monocultures de maïs (Smith 2008).
La technique de culture (le mot exact anglais est « breeding » faut il laisser culture en francais ou lui préférer
sélection ???) écologique implique une meilleure performance des cultures
Outre la culture d’espèces plus nombreuses et de variétés plus diverses, l’adaptation au changement
climatique pourrait aussi passer par le développement de nouvelles variétés impliquant des caractéristiques
de résistance au stress. Si les espèces communément cultivées avaient une meilleure tolérance aux
multiples stress – la chaleur, la sècheresse, la maladie, etc. – elles seraient plus résistantes à des formes
extrêmes ou imprévisibles de changement climatique. Pour ce faire, il faut conserver le patrimoine génétique
local et la sélection des plantes (idem : il est écrit plant breeding….), en utilisant une nouvelle technique.
Celle-ci s’intitule « sélection assistée par marqueur » (SAM).
La SAM est une technique génétique qui permet d’intégrer des traits complexes plus rapidement, en
tirant profit de la cartographie génétique dans la sélection des plantes. En détectant des fragments
spécifiques d’ADN (marqueurs) dans le processus de sélection, les phytogénéticiens peuvent ‘voir’ plus
facilement le résultat de leur travail et intégrer plus précisément les gènes intéressants dans de nouvelles
variétés que la sélection conventionnelle. La SAM tire profit des marqueurs génétiques, mais elle ne
produit pas de plantes transgéniques.
Les succès de la SAM, ces dernières années, ont permis de produire des variétés de riz capables de résister
à une immersion de deux semaines. Les scientifiques ont identité le trait (ce mot me pose problème mais je
n’ai pas trouvé le chapitre équivalent en anglais !!?? Je propose : caractéristique) de tolérance à l’inondation
d’une variété de riz et, au moyen de la SAM, ils l’ont transféré dans des variétés de riz locales adaptées
d’Inde, de Thaïlande, du Laos et du Bengladesh (Xu 2006, Sasaki 2006). La SAM est également utilisée
pour développer du blé résistant à une nouvelle espèce de rouille qui se répand en Afrique et au MoyenOrient. Les scientifiques ont préféré la SAM à l’ingénierie génétique parce que la première est plus à même
d’opérer une sélection impliquant des traits complexes. (DRRW, 2008)
L’agriculture écologique diversifiée et la sélection conventionnelle moderne des végétaux constituent des
méthodes adéquates pour répondre au problème du changement climatique dans l’agriculture. L’ingénierie
génétique ne fournit pas la complexité et le contrôle sophistiqué requis pour mettre au point des variétés
conçues pour résister au changement climatique. La meilleure option agricole pour assurer la sécurité
alimentaire dans notre monde en plein bouleversement consiste à investir dans le maintien et le
développement de la diversité au stade de la ferme et dans la sélection des plantes.
Sources
Chapin FS et al (2000). Consequences of changing biodiversity. Nature 405: 234-242.
26
DiFalco S and Chavas J-P (2006). Crop genetic diversity, farm productivity, and the management of
environmental risk in rain fed agriculture. European Review of Agricultural Economics 33:289-314.
DiFalco S and Chavas J-P (2008). Rainfall shocks, resilience, and the effects of crop biodiversity on
agroecosystem productivity. Land Economics 84: 83-96.
Durable Rust Resistance in Wheat (DRRW) (2008). Project Objectives.
http://www.wheatrust.cornell.edu/about/
Intergovernmental Panel on Climate Change (IPCC) (2007). Climate Change 2007: Synthesis Report.
http://www.ipcc.ch/publications_and_data/publications_ipcc_fourth_assessment_report_synthesis_report.htm
Monsanto (2007). Agriculture Can Help Keep Carbon in Balance.
http://www.monsanto.com/responsibility/our_pledge/healthier_environment/climate_change.asp
Sasaki T (2006). Rice in Deep Water. Nature 442:635-36.
Smith R, Gross K and Robertson G (2008). Effects of Crop Diversity on Agroecosystem Function: Crop Yield
Response. Ecosystems 11:355-66.
Xu K, Xu X, Fukao T, Canlas P, Maghirang-Rodriguez R, Heuer S, Ismail AM, Bailey-Serres J, Ronald PC
and Mackill DJ (2006). Sub1A is an ethylene-response-factor-like gene that confers submergence tolerance
to rice. Nature 442: 705-08.
Zhu Y, Chen H, Fan J, Yang Y, Li Y, Chen J, Fan JX, Yang S, Hu L, Leung H, Mew TW, Tang PS, Wang Z and
Mundt CC (2000). Genetic diversity and disease control in rice. Nature 406: 718-722.
Zhu Y, Wang Y, Chen H and Lu B (2003). Conserving traditional rice varieties through management for crop
diversity. Bioscience 53: 158-162.
Le Kenya combat les parasites et les mauvaises herbes avec des solutions écologiques
En Afrique de l’Est, les cultivateurs de maïs combattent les insectes les plus destructeurs et les mauvaises
herbes les plus gênantes d’une manière écologique durable. Une approche qui a porté ses fruits, appelée
’système pousser-tirer’, fait appel à l’écologie pour arrêter le développement des plantes et des insectes.
Une étude menée sur plusieurs années dans six districts du Kenya a démontré que le système « poussertirer » entraînait des surplus constants de récoltes (parfois jusque 350 %) par rapport aux monocultures
(Khan 2008). Cette approche intégrée repose sur des connaissances écologiques et différentes méthodes
agricoles plutôt que sur le recours à des produits chimiques ou à l’ingénierie génétique.
Problèmes de parasites et de mauvaises herbes en Afrique de l’Est
Le maïs est la principale céréale cultivée en Afrique, en particulier dans l’Est et le Sud du pays. Mais de
nombreux champs de maïs sont infestés par la striga (Striga spp.), une plante parasite qui se fixe aux
racines du maïs, privant son hôte de nutriments. Ce problème touche 40% des terres arables dans les
savanes africaine. On estime qu’il coûte de 7 à 13 milliards de dollars américains annuels aux cultivateurs
(Khan 2007).
Les chenilles perce-tiges posent également un sérieux problème dans les champs de maïs africains. Le
Chilo partellus et, à des altitudes supérieures, le Busseola fusca, dont les larves pratiquent des trous dans
les tiges de maïs et consomment les plantes de l’intérieur, sont particulièrement destructeurs. Les percetiges détruisent, en moyenne, de 20 à 40% de la récolte et jusque 80% dans le cas d’infestations graves
(Gatsby 2005).
En collaboration avec les fermiers kenyans, des scientifiques de l’International Centre of Insect Physiology
and Ecology (ICIPE) (Nairobi) ont développé une approche écologique intégrée. Celle-ci permet de contrôler
la striga et les perce-tiges dans le maïs sans produits chimiques ni autres moyens onéreux, ce qui la rend
27
particulièrement appropriée pour les nombreux fermiers africains disposant de peu de ressources.
Le système pousser-tirer
[Insert Graphic of Push Pull system here]
Le nom scientifique du système est ‘détournement par dissuasion stimulation’. On l’appelle populairement
‘pousser-tirer’, car ce nom décrit bien comment le système fonctionne pour éloigner les parasites du maïs.
Les fermiers qui appliquent ce système plantent deux espèces en plus du maïs. L’une éloigne les parasites
des plants de maïs (‘pousser’) et l’autre attire les parasites loin de celui-ci ( ‘tirer’). Il s’agit de la ‘culture
piège’.
Le mouvement de poussée est assuré par une plante africaine appelée desmodium, ou trèfle espagnol
(Desmodium uncinatum). Celui-ci est planté en rangées à côté du maïs et produit naturellement des
composés qui exercent un effet répulsif sur les perce-tiges. Le trèfle espagnol fait « croire » aux perce-tiges
que la zone est infestée de chenilles parentes et qu’elle a donc été lourdement exploitée. En conséquence,
les femelles perce-tiges évitent le desmodium (et le maïs qui se trouve à côté) et partent à la recherche d’un
autre endroit pour pondre leurs œufs (Khan 2007).
Le mouvement de traction du système est assuré par l’herbe aux éléphants (Pennisetum purpureum), que
l’on plante le long du périmètre occupé par les champs de maïs. Les perce-tiges sont attirés par l’herbe aux
éléphants et préfèrent y déposer leurs œufs plutôt que dans le maïs. Outre sa capacité à attirer les percetiges, l’herbe aux éléphants constitue souvent une impasse reproductive pour les chenilles du fait qu’elle
fournit une réponse particulièrement efficace à l’infestation par les perce-tiges. Lorsque les œufs éclosent et
que les larves tentent de perforer les plantes, celles-ci sécrètent une substance gluante qui immobilise les
larves, réduisant les dommages et augmentant les chances que les larves soient mangées par un prédateur,
comme un oiseau.
Contrôle de la striga et autres avantages de l’agriculture écologique
Outre le contrôle des perce-tiges, les deux plantes exercent d’autres fonctions importantes.
Le trèfle espagnol contrôle la striga en agissant comme un ‘faux hôte’ pour le parasite. Il pousse les
semences de triga à germer. Celles-ci cherchent à se fixer au trèfle espagnol, mais comme celui-ci ne
supporte pas sa croissance continue, la triga finit par mourir.
D’autres plantes sont également des faux hôtes pour la triga mais, sans que l’on sache exactement
pourquoi, le desmodium se révèle particulièrement efficace quand il s’agit de réduire et même d’éliminer la
triga dans les champs de maïs. Les scientifiques de l’ICIPE étudient actuellement la plante pour en savoir
plus.
Le trèfle espagnol et l’herbe aux éléphants sont également utilisés dans l’alimentation animale. Ils peuvent
être récoltés par les fermiers appliquant le système pousser-tirer pour la vente ou nourrir leur propre bétail.
Une fois en place, les deux plantes repoussent pour protéger la récolte de maïs suivante. En fin de compte,
le trèfle espagnol est une plante qui fixe l’azote et améliore la fertilité du sol, augmentant les récoltes de
maïs.
Le système pousser-tirer peut être appliqué à d’autres espèces, notamment le sorgho et le millet, deux
sources alimentaires importantes en Afrique. La recherche est en cours pour adapter ce système aux autres
cultures.
Le système pousser-tirer permet aux fermiers africains de surmonter l’impact des insectes et des plantes les
plus destructeurs d’une manière écologique et durable. Celle-ci repose sur la diversité plutôt que sur les
pesticides et les herbicides. Elle réduit l’usage des produits chimiques et comprime les coûts des fermiers
par rapport aux méthodes traditionnelles de culture du maïs.
Sources
28
Gatsby Charitable Foundation (2005). The Quiet Revolution: Push-Pull Technology and the African Farmer.
Gatsby Occasional Paper, April 2005.
Midega CAO, Khan ZR, Van den Berg J, Ogol CKPO, Bruce TJ and Pickett JA (2009). Non-target effects of
the ‘push-pull’ habitat management strategy: parasitoid activity and soil fauna abundance. Crop Protection,
doi:10.1016/j.cropro.2009.08.005.
Khan ZR, Midega CAO, Njuguna EM, Amudavi DM, Wanyama JM and Pickett JA (2008). Economic
performance of the 'push-pull' technology for stem borer and Striga control in smallholder farming systems in
western Kenya. Crop Protection 27: 1084-1097.
Khan ZR, Pickett JA, Hassanali A, Hooper A and Midega CAO (2008). Desmodium for controlling African
witchweed: present and future prospects. Weed Research 48: 302-306.
Khan ZR, Muyekho FN, Njuguna E, Pickett JA, Wadhams LJ, Pittchar J, Ndiege A, Genga G, Nyagol D and
Luswet C (2007). A Primer on Planting and Managing ‘Push-Pull’ Fields for Stem borer and Striga Weed
nd
Control in Maize (2 Ed.). ICIPE, Nairobi.
29