Burkina Faso - African Economic Outlook
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Burkina Faso - African Economic Outlook
Burkina Faso 2016 Tankien Dayo / [email protected] Facinet Sylla / [email protected] Amata Sangho Diabate / [email protected] Hervé Marie Patrice Kouraogo / [email protected] www.africaneconomicoutlook.org Burkina Faso Burkina Faso • Une croissance d’au moins 5 % est attendue en 2016, puis de 5.9 % en 2017, grâce à la reprise du sous-secteur minier et au retour à des institutions démocratiques. • Le renforcement du dispositif sécuritaire en vue de faire face aux menaces djihadistes demeure un défi majeur pour la reprise économique, particulièrement après l’attaque terroriste de janvier 2016. • L’urbanisation s’est accélérée au cours des dix dernières années et pourrait atteindre 35 % en 2026, alors que les villes restent insuffisamment dotées pour assurer leur gestion durable. Vue d’ensemble Les perspectives économiques en 2016 sont favorables avec une croissance de 5.0 %, contre 4.8 % en 2015, grâce au retour à des institutions démocratiques issues des élections de 2015 et à la reprise des activités de production dans le sous-secteur de l’extraction. Les pressions inflationnistes devraient rester modérées, autour de 2 % en 2016 et 2017, conséquence d’une bonne campagne agricole et des faibles cours du pétrole sur le marché international. Ce taux de croissance reste loin du dynamisme économique de la période 2010 à 2013, lorsqu’il dépassait largement 6 % de moyenne annuelle. L’activité économique a été affectée par une série de facteurs défavorables datant de 2014, qui ont persisté tout au long de l’année 2015. On peut notamment citer le contexte de transition politique après l’insurrection populaire d’octobre 2014, la baisse des cours de l’or et du coton et la montée des dépenses sécuritaires au cours du dernier trimestre de l’année (ces deux derniers facteurs étant susceptibles de se maintenir en 2016). Les perspectives économiques restent également subordonnées à la capacité des nouvelles autorités démocratiquement élues à promouvoir un environnement politique apaisé pour garantir la stabilité des institutions. Le renforcement du dispositif sécuritaire en vue de faire face aux menaces djihadistes, reste également un défi majeur, particulièrement après l’attaque terroriste de janvier 2016. Malgré la baisse du taux de pauvreté, passé de 46.7 % en 2009 à 40.1 % en 2014, la situation sociale reste préoccupante, notamment avec des inégalités marquées. La pauvreté apparaît ainsi comme une source de fragilité potentielle. En outre, le chômage et le sous-emploi des jeunes et des femmes en milieu urbain constituent une préoccupation de plus en plus grande. Le Burkina Faso est l’un des pays les moins urbanisés au monde. Toutefois, la concentration des populations dans les villes s’est accélérée au cours des dix dernières années. De 22.7 % en 2014, on estime que le taux d’urbanisation pourrait atteindre 35 % en 2026. Les faiblesses enregistrées dans la gouvernance urbaine ont entrainé une prolifération des quartiers d’habitat spontané. Le pays fait donc face à un défi économique, écologique et infrastructurel. En outre, le régime dualiste de gestion de la terre tend à constituer une véritable menace pour la politique globale de développement du pays. Alors que les villes sont insuffisamment dotées pour assurer leur gestion durable, l’économie des agglomérations secondaires est dominée essentiellement par le secteur primaire, ce qui constitue une contrainte à une véritable transformation des villes en pôles de développement durable. 2 Perspectives économiques en Afrique © BAfD, OCDE, PNUD 2016 Taux de croissance du PIB réel (%) % Afrique de l'Ouest Afrique (%) Burkina Faso Graphique 1. Taux de croissance du PIB réel 10 9 8 7 6 5 4 3 2 1 0 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015(e) 2016(p) 2017(p) Source: BAfD, Département Statistique PEA. Estimations (e) ; prévisions (p). Tableau 1. Indicateurs macroéconomiques 2014 2015(e) 2016(p) Croissance du PIB réel 5.0 4.8 5.0 2017(p) 5.9 Croissance du PIB réel par habitant 2.1 1.8 2.1 3.0 Inflation -0.3 0.8 2.0 1.9 Solde budgétaire (% PIB) -1.8 -2.5 -3.1 -3.7 Compte courant (% PIB) -6.1 -4.5 -5.3 -6.9 Source : Données des administrations nationales; calculs des auteurs pour les estimations (e) et les prévisions (p). Développements récents et perspectives La performance économique de 2015 résulte de la vigueur de tous les secteurs économiques : primaire, secondaire et tertiaire. Les cinq principaux sous-secteurs de l’économie demeurent : l’agriculture (17.4 % du PIB), le commerce (14.9 % du PIB), l’extraction (11.3 % du PIB), l’élevage (10.6 % du PIB) et la construction (9.6 %). Le secteur primaire a enregistré une croissance de 3 % en 2015 contre 2 % en 2014. La croissance agricole a été portée par la production céréalière qui a augmenté de 3 % par rapport aux résultats de la campagne précédente. Cette bonne performance a été facilitée par la mise à disposition des producteurs de 4 242 tonnes de semences améliorées, d’intrants, d’équipements agricoles ainsi que de l’appui conseil et la vulgarisation des techniques axées sur les variétés à cycle court. Toutefois, le coton qui constitue la principale culture de rente, a quasiment stagné en 2015. Sa production s’est ainsi établie à 714 000 tonnes en 2015, soit une hausse de seulement 0.8 % comparativement à la production de l’année précédente. Quant au sous-secteur de l’élevage, il a enregistré une croissance de 3 % en 2015 contre 2.7 % en 2014. Ce dynamisme s’explique par les actions d’amélioration de la sécurité alimentaire du bétail et les campagnes de lutte contre les pathologies animales telles que la grippe aviaire survenue au cours de l’année 2015. Le secteur secondaire a enregistré une croissance ralentie à 3.4 % en 2015, soit près de la moitié de la performance atteinte en 2014, 6.2 %. Ce secteur reste dominé par l’égrenage du coton © BAfD, OCDE, PNUD 2016 Perspectives économiques en Afrique 3 Burkina Faso et l’extraction d’or et de manganèse, qui ont continué à absorber les chocs liés à la baisse des cours de ces matières premières sur le marché international. Si le sous-secteur de l’égrenage de coton a pu enregistrer une croissance de 6.1 % en 2015, celui de l’extraction a quasiment stagné. Celui-ci a particulièrement souffert de la transition politique, avec notamment l’interruption par les pouvoirs publics de la production de la mine de manganèse de Tambao mais également sous l’effet des mouvements sociaux et de revendications qui ont entrainé la destruction d’outils de production dans les mines de Bissa Gold et de True Gold. Sa croissance s’est ainsi établie à 0.8 % en 2015. Les perspectives économiques sont favorables à une reprise des activités dans le secteur minier grâce notamment à la reprise de la production du manganèse de Tambao et l’entrée en production de deux nouvelles mines d’or. Le secteur tertiaire demeure globalement dynamique avec une croissance de 5 %, soit le même niveau qu’en 2014. Il serait stimulé par les sous-secteurs du commerce, des télécommunications et des services financiers. Les branches du transport, du tourisme et de l’hôtellerie ayant de leur côté été négativement impactées par les soubresauts sociopolitiques enregistrés entre octobre 2014 et septembre 2015 (insurrection populaire, tentative de coup d’État). Du côté de la demande, la croissance du PIB réel en 2015 a été stimulée par la consommation grâce notamment la consommation publique qui a enregistré un accroissement de 13.8 % en 2015, du fait de la poursuite des mesures sociales, la mise en place des organes de la transition et l’organisation des élections présidentielle et législative. Compte tenu du contexte de transition politique, l’investissement a contribué faiblement à la croissance, 0.4 point du PIB en 2015 contre 0.6 point l’année précédente. La formation brute de capital fixe des secteurs public et privé a enregistré un accroissement respectif de 6.6 % et 0.9 %. La croissance des investissements publics est liée à l’appui des partenaires techniques et financiers au cours de l’année 2015 (infrastructures dans le cadre de la commémoration de la fête de l’indépendance, construction de barrages et de routes, investissements réalisés dans le cadre du programme socioéconomique d’urgence, etc.). Les échanges extérieurs ont contribué négativement au PIB, de 4 points en 2015, après une contribution positive de 0.9 points en 2014. Cette contribution négative est justifiée par la forte poussée des importations de biens et services qui enregistrent un accroissement de 7.6 %, notamment pour les biens d’équipement et les denrées alimentaires. Les perspectives économiques 2016/17 sont favorables avec une croissance forte de 5.0 % en 2016, puis attendue à 5.9 % en 2017, grâce au retour à des institutions démocratiques et à la reprise des activités dans le sous-secteur de l’extraction. Les pressions inflationnistes devraient rester modérées après la bonne campagne agricole de 2015 et du fait des faible cours du baril de pétrole sur le marché international. Tout comme en 2015, l’inflation devrait demeurer en dessous de la norme communautaire de l’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA) de 3 % maximum au cours de la période 2016 à 2017. Les principaux facteurs de vulnérabilité économique résident toujours dans les fluctuations défavorables des cours de l’or, du coton et du pétrole sur le marché international. Les perspectives économiques restent également subordonnées à la capacité des nouvelles autorités démocratiquement élues à promouvoir un environnement politique apaisé pour garantir la stabilité des institutions. Le renforcement du dispositif sécuritaire pour contenir les menaces djihadistes constitue aussi un défi majeur pour les années à venir. 4 Perspectives économiques en Afrique © BAfD, OCDE, PNUD 2016 Agriculture, foresterie, pêche et chasse 2010 2015 35.5 34.0 Dont pêche 0.3 0.2 Activités extractives 7.1 11.3 Dont extraction de pétrole brut et de gaz naturel … … Activités de fabrication 7.5 4.4 Production et distribution d'électricité, de gaz et d'eau 0.8 0.8 Construction 5.1 9.6 15.4 14.9 Commerce de gros et de détail; réparation de véhicules automobiles et hôtels et restaurants Dont hôtels et restaurants … … Transports, entreposage et communications 4.3 3.4 Intermédiation financière, immobilier, locations et activités de services aux entreprises 4.4 6.0 16.8 20.7 Administration publique et défense; sécurité sociale obligatoire Autres services Produit intérieur brut aux prix de base / au coût des facteurs 2.1 2.3 100.0 100.0 Burkina Faso Tableau 2. PIB par secteur (en pourcentage du PIB) Source : Données des administrations nationales. Politique macroéconomique Politique budgétaire La politique budgétaire axée sur les priorités de la Stratégie de croissance accélérée et de développement durable (SCADD) a été affectée en 2015 par la crise politique, les dépenses sécuritaires et par l’environnement économique défavorable (baisse des cours de l’or et du coton). En plus des priorités de la SCADD, la politique budgétaire a été contrainte par l’organisation des élections présidentielle et législative ainsi que le renforcement de la sécurité intérieure et de la défense nationale. Les finances publiques sont restées tendues tout au long de l’année en raison des déséquilibres budgétaires amorcés depuis 2014 et des résultats insuffisants des actions entreprises en 2015 pour accroître les recettes budgétaires. Ces actions portaient sur le recensement des entreprises afin d’élargir la base d’imposition, la mise en place de systèmes de suivi satellitaire et l’utilisation de scanners aux fins d’optimiser les recettes douanières. Mais en raison de la contre-performance des entreprises en 2014 et de la stagnation des recettes minières, les ressources fiscales devraient se stabiliser au même niveau qu’en 2014, soit 15.2 % du PIB. Cette tendance devrait se poursuivre au cours des années 2016 et 2017. Afin d’assurer la maîtrise des dépenses, les pouvoirs publics ont réduit leur fonctionnement courant ainsi qu’une partie des dépenses d’investissement. Toutefois, une légère hausse des dépenses courantes, passées de 14.4 % du PIB en 2014 à 14.5 % en 2015, est liée à l’organisation des élections présidentielle et législatives et à l’augmentation des dépenses sécuritaires suite à la tentative de coup d’État et pour faire face aux attaques terroristes. Les dépenses d’investissement public demeurent globalement faibles, 10.1 % du PIB, soit une augmentation d’un point par rapport à 2014. Elles devraient connaître une légère progression pour s’établir à 10.3 % en 2016 et 10.9 % en 2017. De façon générale, malgré le contexte difficile, les finances publiques sont stables en 2015. Le déficit budgétaire global, couvert par les tirages du Fonds monétaire international (FMI), les prêts programmes de la Banque mondiale et de la Banque africaine de développement (BAD) et les emprunts obligataires sur le marché financier régional de l’UEMOA, est resté globalement modéré, à 2.5 % du PIB contre 1.8 % en 2014. Au cours des deux années à venir, ce déficit devrait © BAfD, OCDE, PNUD 2016 Perspectives économiques en Afrique 5 Burkina Faso se creuser davantage pour s’établir à 5.3 % en 2016, en raison notamment des nouvelles dépenses sécuritaires. Tableau 3. Finances publiques (pourcentage du PIB aux prix actuels) 2007 2012 2013 2014 2015(e) 2016(p) 2017(p) Total recettes et dons 20.0 22.4 23.9 21.4 22.1 21.8 21.7 Recettes fiscales 12.5 15.6 16.5 15.2 15.2 15.1 15.0 6.5 4.9 5.4 4.2 4.9 4.7 4.7 Total dépenses et prêts nets (a) 25.7 25.5 27.4 23.2 24.6 24.9 25.4 Dépenses courantes 13.9 14.5 13.6 14.4 14.5 14.5 14.5 Sans intérêts 13.5 13.8 13.0 13.7 13.6 13.8 14.0 Salaires et rémunérations 5.8 5.8 5.9 7.1 6.8 6.8 6.9 Intérêt 0.4 0.7 0.6 0.7 0.9 0.7 0.5 Dépenses d’investissement 11.8 11.0 14.2 9.0 10.1 10.3 10.9 Solde primaire -5.3 -2.4 -2.9 -1.1 -1.6 -2.4 -3.2 Solde global -5.7 -3.1 -3.5 -1.8 -2.5 -3.1 -3.7 Dons Note : a. Seuls les principaux postes de recettes et de dépenses sont détaillés. Source : Données des administrations nationales; calculs des auteurs pour les estimations (e) et les prévisions (p). Politique monétaire Le Burkina Faso est un pays membre de l’UEMOA dont la politique monétaire, fondée sur le système de régime de change fixe, est coordonnée par la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO). Dans ce cadre, le pays a poursuivi la mise en œuvre d’une politique monétaire communautaire prudente fondée sur la stabilité des prix et le développement de l’activité économique. Ainsi, en matière d’inflation, le niveau général des prix à la consommation a connu une hausse relativement modérée en 2015, avec un taux d’inflation en moyenne annuelle de 0.7 % contre -0.3 % en 2014. Il est largement en dessous du seuil communautaire exigé par l’UEMOA (3 % maximum). Ce faible niveau d’inflation s’explique par la baisse des prix des produits alimentaires et du carburant à la pompe ainsi que par le repli de l’activité économique enregistré dans le pays. Par ailleurs, les pouvoirs publics ont maintenu le contrôle des prix des produits de grande consommation sur les marchés, tout au long de l’année. La politique monétaire mise en œuvre en 2015 a permis un accroissement de la masse monétaire de 14.3 %, pour se situer à 2 502 milliards XOF (Francs CFA) contre 2 189 milliards XOF en 2014. Cette forte augmentation est consécutive à celle des avoirs intérieurs nets, notamment le crédit au secteur privé mais aussi le crédit net à l’État qui est passé de 139 milliards XOF en 2014 à 253 milliards XOF en 2015. Même si le Gouvernement a recours aux emprunts obligataires sur le marché financier régional pour financer le déficit budgétaire, le crédit au secteur privé demeure florissant avec un accroissement de 15.1 % en 2015, tendance qui devrait se poursuivre en 2016. Compte tenu du contexte macroéconomique difficile et de la chute des cours de l’or et du coton, les avoirs extérieurs nets devraient poursuivre la tendance baissière observée depuis 2013, passant de 534.9 milliards XOF à 386 milliards XOF en 2015. Entre 2016 et 2017, la politique monétaire visera toujours à soutenir la relance économique, tout en veillant à la maitrise de l’inflation. Le niveau des avoirs extérieurs nets devrait connaître un accroissement dès 2016, grâce notamment à la reprise des activités du secteur minier. Coopération économique, intégration régionale et commerce Le Burkina Faso participe activement aux efforts d’intégration régionale en Afrique de l’Ouest notamment dans le cadre des zones économiques UEMOA et CEDEAO. Le pays reste toutefois déficitaire dans les échanges commerciaux au sein de ces deux organisations. Selon l’édition 6 Perspectives économiques en Afrique © BAfD, OCDE, PNUD 2016 Burkina Faso 2013 du rapport de surveillance commerciale dans l’espace UEMOA, le taux de couverture des exportations par les importations du pays, était de moins de 30 % en 2012 et sa part dans les échanges au sein de l’Union représentait 7.9 %. Le pays venait ainsi en quatrième position, après la Côte d’Ivoire, le Sénégal et le Mali. En 2015, l’or et le coton représentaient 87 % des exportations du Burkina Faso. Après une baisse de 4 % en 2014, elles ont connu en 2015 un léger accroissement de 2 %, grâce notamment à l’or. Quant aux importations, le Burkina Faso a tiré profit de la chute des prix du pétrole sur le marché international qui a fait baisser sa facture pétrolière de 18 % entre 2014 et 2015. Le déficit de la balance commerciale qui en résulte s’est amélioré en 2015, passant de 1.9 % du PIB en 2014 à 0.3 % en 2015. Il devrait demeurer en dessous de 1 % au cours de la période 2016 à 2017, en raison notamment de la reprise des activités dans le secteur minier. Les flux d’investissements directs étrangers (IDE) ont particulièrement diminué depuis l’insurrection populaire d’octobre 2014. Ils se concentrent essentiellement dans le secteur minier où ils ont connu une baisse drastique de 34 % en 2015. Le solde du compte courant s’est amélioré, passant d’un déficit de 6.1 % en 2014 à 4.5 % en 2015. Tableau 4. Comptes courants (en pourcentage du PIB) 2007 2012 2013 2014 2015(e) 2016(p) -8.8 -1.4 -3.3 -1.9 -0.3 -0.9 -0.9 Exportations de biens (f.o.b.) 9.2 22.4 20.5 19.1 19.1 18.8 20.2 Importations de biens (f.o.b.) 18.0 23.8 23.8 21.1 19.4 19.7 21.1 Services -5.4 -7.2 -6.7 -7.1 -7.8 -7.3 -9.0 0.0 0.1 -0.6 -0.5 -0.6 -0.6 -0.6 Balance commerciale Revenu des facteurs Transferts courants Solde des comptes courants 2017(p) 6.0 4.5 4.2 3.4 4.2 3.4 3.6 -8.3 -4.0 -6.3 -6.1 -4.5 -5.3 -6.9 Source : Données des administrations nationales; calculs des auteurs pour les estimations (e) et les prévisions (p). Politique de la dette Le stock de la dette publique du Burkina Faso représentait 28.5 % du PIB en 2015, contre 29.7 % fin 2011. Il est dominé par la dette extérieure, qui représente 21.7 % du PIB alors que la dette intérieure ne représente que 6.8 % du PIB. De façon générale, les pouvoirs publics poursuivent la mise en œuvre de la politique d’endettement adoptée en 2008 basée sur une approche prudente de gestion de la dette. Ainsi, la stratégie met l’accent sur le recours aux ressources hautement concessionnelles. Par ailleurs, dans le cadre du programme de la Facilité élargie de crédit (FEC) avec le FMI et pour une meilleure surveillance, les financements non concessionnels sont plafonnés à 200 milliards XOF, jusque fin 2015. Ces emprunts sont exclusivement réservés aux projets dont la rentabilité économique est très élevée (bitumage de routes, assainissement, etc.). La dette extérieure reste donc globalement concessionnelle et se concentre sur les bailleurs multilatéraux comme la Banque mondiale, la BAD et le FMI. Ces trois institutions détiennent la moitié de la dette publique du pays, par ailleurs libellée en droits de tirages spéciaux ou en dollars USD, ce qui constitue un risque notamment en cas de dépréciation de l’euro par rapport au dollar USD. La dette publique libellée en XOF et en euros représente respectivement 27 % et 17 % de la dette totale. En termes de perspectives, le pays présente un risque modéré de surendettement à long terme. Selon le rapport de la FEC du FMI de juin 2015, le ratio de la dette extérieure en pourcentage des exportations était de 65.2 % fin 2014, soit en dessous de la norme communautaire maximale de 70 % fixée par l’UEMOA dans le cadre de ses critères de convergence. Dans le contexte macroéconomique de chute des cours de l’or et du coton, il apparaît important d’améliorer et de moderniser la Direction générale du Trésor et de la Comptabilité © BAfD, OCDE, PNUD 2016 Perspectives économiques en Afrique 7 Burkina Faso publique (DGTCP), qui assure la coordination de la politique de gestion de la dette. À cet effet, un plan de réforme est en cours de préparation grâce à l’assistance technique du FMI et de la Banque mondiale. Ce plan repose sur une approche intégrée de réponses aux défis liés à la gestion macroéconomique, aux émissions d’obligations sur le marché régional de l’UEMOA et à la gestion de la trésorerie de l’État. Graphique 2. Part de l’encours de la dette extérieure dans le PIB et ratio du service de la dette sur les exportations Dette extérieure (publique et privée) /PIB % Service de la dette /Exportations 30 25 20 15 10 5 0 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 Source : FMI (WEO & Article IV). Gouvernance économique et politique Secteur privé Le Burkina Faso a fait des progrès remarquables en matière d’amélioration de l’environnement des affaires. Dans l’édition 2016 du rapport de la Banque mondiale Doing Business, le pays figurait au 78e rang mondial sur 189 – contre la 153e place dans le rapport précèdent. En 2015, il a obtenu le score de 86.69 points sur une échelle de 0 à 100 contre 69.06 l’année précédente, en matière de création d’entreprise. À cet effet, il faut désormais 3 procédures, 13 jours et un capital minimum versé en pourcentage du revenu par habitant de 28.5 %, contre 308.5 % en 2014, pour permettre à une entreprise de démarrer légalement ses activités. Le coût et les procédures de création d’une société à responsabilité limitée (SARL) ne constituent plus une entrave majeure à la création d’entreprises. Il n’est plus impératif de passer par un notaire pour l’établissement des statuts des SARL. Par ailleurs, le capital social minimum exigé est passé d’1 million à 100 000 XOF. Malgré cette avancée, le climat de l’investissement demeure difficile. Le pays dispose d’une politique d’ouverture en matière d’IDE, et d’un code des investissements prévoyant quatre régimes privilégiés au niveau fiscal, complété par un nouveau code minier adopté en 2015. Mais le contexte de transition politique engagé depuis octobre 2014 a contribué à renforcer l’attentisme des principaux investisseurs aussi bien nationaux qu’étrangers. Le taux d’investissement privé a ainsi connu une forte baisse entre 2014 et 2015. Selon le rapport du Comité national de politique économique du Burkina Faso de 2015, il s’est établi à 15.6 % du PIB en 2014, contre 18.7 % du PIB, une année plus tôt. 8 Perspectives économiques en Afrique © BAfD, OCDE, PNUD 2016 Le secteur financier du Burkina Faso, bien que faiblement diversifié, apparait relativement stable. Il compte 13 banques et 4 établissements financiers. Douze des banques sont généralistes tandis qu’une est spécialisée dans l’habitat. Par ailleurs, deux établissements sont sous capitalisés, sans toutefois présenter un risque systémique pour l’ensemble du secteur. Le poids des autres institutions financières (système financier décentralisé, assurance) reste globalement modeste et représente à peine un tiers des actifs totaux du pays. Burkina Faso Secteur financier S’agissant de la santé du système, le rapport de juin 2015 de la FEC mentionne une situation relativement solide des banques commerciales. Un an plus tôt, les fonds propres par rapport aux actifs pondérés par les risques étaient juste au niveau du minimum requis par la réglementation communautaire de l’UEMOA, soit 8 %. La proportion des créances douteuses brutes par rapport au total des prêts était relativement faible, à 9.4 % comparativement à la moyenne de l’UEMOA où les créances douteuses atteignaient 15.7 %. Le portefeuille de créances se concentre sur un nombre restreint de clients solvables, composé essentiellement d’entreprises à capitaux publics (SOFITEX, SONABHY). D’après le même rapport, le portefeuille de crédit des cinq plus gros clients par rapport au capital atteignait 216.5 % contre 130.1 % pour l’ensemble de l’UEMOA. L’accès des populations aux services financiers, encore globalement très limité, constitue l’une des principales faiblesses du secteur. Cependant, le contexte est en train d’évoluer progressivement avec le développement de services via la téléphonie mobile et celui de la microfinance. Le milieu rural est desservi essentiellement par le système financier décentralisé. Selon les données de la BCEAO de mars 2015, le pays enregistrait fin 2014, 82 institutions de microfinance disposant de 369 points de services fournis à 1.4 millions de clients. Au sein de l’UEMOA, le pays occupait ainsi la seconde position en termes de dépôts, après le Sénégal, avec 153.8 milliards XOF. Les services financiers via la téléphonie mobile ont également connu un développement remarquable au cours des dernières années. Selon un rapport de la BCEAO daté de 2014, le Burkina Faso a enregistré, en termes de valeur, des transactions s’élevant à 392 milliards XOF et ce montant devrait connaître une progression notable en 2015. Au sein de l’UEMOA, le Burkina Faso se situe en troisième position en termes de volume de transactions via le téléphone mobile, après la Côte d’Ivoire et le Mali. Gestion du secteur public, institutions et réformes Le Burkina Faso dispose d’un arsenal d’organes de contrôle et de textes juridiques devant contribuer à la promotion des principes de bonne gouvernance. Toutefois, leur faible efficacité, avérée depuis des années, constitue l’un des points faibles du pays en matière de transparence et de redevabilité. L’Autorité supérieure de contrôle de l’État (ASCE) assure le rôle d’organe supérieur du système de vérification interne. À ce titre, elle coordonne l’action des autres structures de contrôle relevant de l’ordre administratif : l’Inspection générale des finances et les inspections techniques des services. Malgré la mise en place d’un cadre de concertation, il y a un besoin de rationalisation de ces organes de contrôle interne qui souffrent, de façon générale, d’un manque de personnel qualifié. Par ailleurs, le manque de spécialisation des magistrats au niveau de la justice, notamment dans la lutte contre les crimes économiques et financiers, et les faiblesses des investigations menées par les corps de contrôle limitent les résultats en matière de sanction des fautes de gestion et des faits de corruption. Concernant le contrôle externe, la Cour des comptes a du mal à accomplir efficacement ses missions sur le terrain. Comme l’atteste le rapport 2013 du Cadre de mesure de la gestion des finances publiques (PEFA) de 2013, le Burkina Faso a récolté la note D+ concernant l’étendue, la nature et le suivi de la vérification externe. © BAfD, OCDE, PNUD 2016 Perspectives économiques en Afrique 9 Burkina Faso A l’issue de l’insurrection populaire d’octobre 2014, une grande avancée a été enregistrée en 2015 dans le pays, avec notamment l’adoption d’une loi pour prévenir et réprimer la corruption. Elle fait obligation aux personnalités relevant du pouvoir exécutif et du Parlement de déclarer leurs biens à l’ASCE. Leurs déclarations sont ensuite publiées dans le Journal Officiel du Faso. L’ASCE a également pour rôle de veiller à la réconciliation de ces biens à l’entrée et à la sortie de leur fonction. Gestion des ressources naturelles et environnement Le Burkina Faso dispose de ressources naturelles relativement abondantes, mais menacées par une dégradation accélérée sous les effets conjugués des facteurs climatiques et anthropiques. Afin de réglementer leur gestion et de répondre aux défis en matière de gouvernance environnementale, les pouvoirs publics ont élaboré des stratégies et un encadrement juridiques. Il s’agit notamment de la loi portant réorganisation agraire et foncière (1996), du Code de l’environnement (1997), du Code forestier (1997), du Code d’hygiène publique (2005), de la loi portant interdiction des emballages et sachets plastiques non biodégradables (2014). Ces textes viennent d’être complétés en 2015 par l’adoption d’un nouveau code minier qui prend en compte un fond de développement local ainsi que les préoccupations de gestion des impacts environnementaux et sociaux. Par ailleurs, bien que le pays ait atteint en 2012 la conformité à l’Initiative pour la transparence des industries extractives (ITIE), la gestion des revenus du secteur minier dans l’optique d’assurer une croissance plus inclusive demeure un grand défi. En effet, les recettes collectées par l’État sur l’activité d’extraction ont représenté seulement 2.4 % du PIB en 2015, ce qui semble sous-estimé. Au plan opérationnel, les pouvoirs publics se sont dotés notamment d’une politique nationale en matière d’environnement, d’une politique nationale de développement durable et d’un plan national d’adaptation aux changements climatiques. Il existe également un dispositif institutionnel de suivi des règles et de mise en œuvre des politiques. Cependant, ce dernier mérite d’être renforcé par davantage de ressources humaines et financières. Le budget alloué au ministère de l’Environnement reste très faible. Il ne représente que 1.2 % du budget de l’État, d’après les données de la loi de finances 2015. Contexte politique 2015 a été marquée par la conduite d’une transition politique jusqu’à l’organisation d’élections présidentielle et législatives, de manière libre et transparente. Affaibli par l’impact de l’insurrection populaire d’octobre 2014, l’État a dû faire face à diverses fragilités. On peut citer la question sécuritaire tant intérieure – avec la tentative de coup d’État – qu’extérieure avec notamment des attaques de mouvements terroristes. Le besoin de sécurisation du territoire face à la menace djihadiste a contribué à grever substantiellement le budget de l’État en 2015. Par ailleurs, la société civile, sans être un pouvoir établi, affiche, depuis l’insurrection populaire, une vigilance qui lui permet d’exercer un rôle de contre-pouvoir utile à la transparence des affaires publiques, mais qui peut constituer une source de vulnérabilité pour l’autorité de l’État. Ainsi, certains ministres de la transition ont été contraints à la démission sous la pression de la rue. En outre, on a assisté courant 2015, à d’importants mouvements sociaux, aussi bien dans le secteur public que dans les entreprises privées. Les principales revendications concernent l’emploi des jeunes et l’augmentation des salaires. Certaines revendications ont parfois entrainé la destruction des outils de production, comme dans le secteur minier (mines de Bissa Gold et de True Gold). L’ancien président Blaise Compaoré avait passé 27 ans au pouvoir. Avec l’élection d’un nouveau président démocratiquement élu fin 2015, le Burkina Faso devrait renouer avec une stabilité des institutions, même si le défi sécuritaire que pose la menace djihadiste dans le Sahel demeure. 10 Perspectives économiques en Afrique © BAfD, OCDE, PNUD 2016 Burkina Faso Contexte social et développement humain Développement des ressources humaines Les pouvoirs publics mettent en œuvre des politiques qui contribuent progressivement à l’amélioration des indicateurs sociaux (éducation, santé…). Toutefois, en plus de l’extension de l’offre, des efforts méritent d’être déployés pour améliorer la qualité et l’efficience des systèmes mis en place. En matière de santé, les politiques conçues dans le cadre du Programme national de développement sanitaire (PNDS) 2011-2020, ont permis une augmentation notable de la couverture sanitaire. Le personnel qualifié a significativement augmenté si bien que le pourcentage de centres de santé et de promotion sociale (CSPS) remplissant les normes minimales de personnel est passé de 83.2 % en 2009 à 89.8 % en 2014. En matière de nutrition, les stratégies mises en œuvre ont aussi permis de faire passer la prévalence de l’insuffisance pondérale de 26 % à 20.1 % entre 2009 et 2014. Malgré ces efforts, le taux de morbidité reste globalement élevé. Selon le rapport de l’Enquête multisectorielle continue (EMC) de l’Institut national de la statistique et de la démographie (INSD) daté de 2015, le taux de morbidité s’est situé à 10 % en 2014. Il diffère selon le groupe d’âge mais demeure très élevé chez les enfants de moins de 5 ans (13.4 %) et chez les personnes âgées de 65 ans et plus (20 %). Le paludisme est toujours la maladie la plus fréquente. Concernant l’éducation, de plus en plus d’enfants accèdent à l’école primaire. De 2.2 millions d’élèves en 2010, l’effectif atteignait 2.7 millions en 2014. On note une amélioration considérable du taux brut de scolarisation dans ce premier cycle, qui est passé de 48.7 % en 2003 à 83 % en 2014. Par ailleurs, sur 100 enfants, 87 sont désormais à moins de 3 kilomètres de l’école du fait de l’accroissement de l’offre éducative. La qualité du système demeure néanmoins une faiblesse. Malgré le recrutement continu de maîtres dans l’enseignement primaire depuis plus d’une dizaine d’années, le ratio élève-maître est resté stable, à 51.3 au cours de la période 2003-13. Le taux d’achèvement de ce cycle s’améliore progressivement, même si beaucoup d’enfants ne le terminent toujours pas. En 2014, il s’est situé à 57.7 %. L’autre défi du système éducatif du pays est le développement du post-primaire et sa forte concentration dans l’enseignement général au détriment de l’enseignement technique et professionnel (ETP). En 2014, les effectifs de l’ETP par rapport au total des effectifs du post-primaire et du secondaire étaient à peine de 3.4 %. Réduction de la pauvreté, protection sociale et travail Au Burkina Faso, la pauvreté et les inégalités persistent mais on note une tendance à l’amélioration ces dernières années. Selon les résultats de l’EMC, en 2014, l’incidence de la pauvreté monétaire dans le pays était estimée à 40.1 % contre 46.7 % en 2009. Elle reste essentiellement rurale. Hors des villes, son incidence est de 47.5 % de la population (en baisse de 5.3 points de pourcentage par rapport à 2009) contre 13.6 % en milieu urbain (et 25.2 % en 2009). On note aussi une persistance des disparités régionales. Tandis que les régions du Sahel, des Cascades, des Hauts-Bassins et du Centre-Est affichent une incidence de la pauvreté en dessous de la moyenne nationale, les régions de la Boucle du Mouhoun, du Centre-Nord, du Centre-Ouest et le Nord sont demeurées les plus pauvres et ont même vu leur incidence de pauvreté augmenter entre 2009 et 2014. La réglementation du marché du travail est globalement flexible. Cependant, une grande partie de la population active (85 %) évolue dans le segment du marché du travail non règlementé et non couvert par la sécurité sociale. Seuls 5 % des travailleurs sont salariés dans le secteur formel (public ou privé). Le chômage des jeunes et des femmes ainsi que le sous-emploi restent une préoccupation majeure dans le pays. Selon les résultats de l’EMC de 2015, la population en âge de travailler (15 ans et plus) du Burkina Faso est estimée à 9.3 millions, soit 52 % des Burkinabés. Le taux d’activité (au sens du Bureau international du travail) était de 35.4 % en 2014 et a baissé comparativement à son niveau de 2009 (43.6 %). Le taux de chômage est estimé à 6.6 %. © BAfD, OCDE, PNUD 2016 Perspectives économiques en Afrique 11 Burkina Faso Etre en recherche d’emploi reste un phénomène plus urbain, avec un taux de 7.1 % contre 6.4 % en milieu rural. Selon le même rapport, le chômage frappe les jeunes de 15 à 24 ans de façon disproportionnée, avec un taux de 8.6 %. Les jeunes filles sont trois fois plus concernées que les jeunes hommes. Face à cette situation, divers filets de sécurité sociale continuent à être déployés par les pouvoirs publics afin d’assister les ménages les plus défavorisés. Entre 2014 et 2015, les actions menées dans le cadre de ces programmes ont porté principalement sur les transferts (monétaires et en nature) vers les ménages pauvres et vulnérables particulièrement dans trois régions (Nord, Est et Centre-Est). Des actions ont également été déployées en 2015 pour contrôler les prix des denrées de premières nécessité notamment les produits importés de grande consommation. Par ailleurs, 50 nouvelles boutiques proposant des produits alimentaires à prix social ont été mises en place entre 2014 et 2015. En termes de perspectives, ces programmes doivent être davantage développés et leur efficacité améliorée pour protéger la plupart des groupes vulnérables. Égalité hommes-femmes Malgré les efforts consentis depuis dix années par les pouvoirs publics pour la promotion du genre dans le développement, les inégalités persistent surtout en matière d’accès à l’éducation à partir du secondaire et pour ce qui concerne l’autonomisation des femmes. Dans le domaine de l’enseignement, les politiques mises en œuvre ont permis une forte réduction des inégalités au niveau du primaire. Le Burkina Faso a ainsi atteint la parité filles et garçons en 2014. Ainsi, le taux brut de scolarisation des filles au primaire était de 83.2 % en 2014 contre 83 % pour le taux global. Les disparités apparaissent désormais au niveau du cycle post primaire et secondaire et au niveau du supérieur. Selon les données 2013 de l’INSD, le taux brut de scolarisation post-primaire et secondaire était de 24.9 % pour les filles contre 30.6 % pour les garçons. Au supérieur, le ratio filles/garçons était seulement de 48 % en 2013. En matière d’autonomisation, des disparités existent aussi entre les hommes et les femmes dans la propriété des entreprises et l’accès au foncier. L’accès aux services financiers fait également obstacle au développement de l’entrepreneuriat féminin. Pour répondre à ce défi, les pouvoirs publics ont poursuivi en 2015 l’opérationnalisation d’un guichet de financement spécifique doté d’une ligne de crédit de 5 milliards XOF qui devrait faciliter l’accès des femmes au crédit. Analyse thématique : villes durables et transformation structurelle Le Burkina Faso est l’un des pays les moins urbanisés au monde. En 2014, 22.7 % de ses habitants vivaient en ville, selon le rapport de l’EMC. Toutefois, l’urbanisation est assez rapide du fait de l’exode rural. Les projections prévoient un taux d’urbanisation de 35 % en 2026. Ce phénomène constitue un défi pour les pouvoirs publics du fait de l’accroissement de quartiers non planifiés et informels dans les zones urbaines et péri-urbaines, et du manque d’infrastructures économiques et sociales. Par ailleurs, le chômage et le sous-emploi des jeunes posent également problème avec un taux de chômage en milieu urbain de 7.1 % en 2014 contre 6.4 % en milieu rural. La majeure partie de la population urbaine évolue au sein de l’économie informelle, dans des activités faiblement productives (petit commerce, artisanat…). Si la pauvreté urbaine a connu une forte diminution ces dernières années la question de l’accès aux infrastructures économiques et de base (route, assainissement, eau, électricité) demeure une grande préoccupation pour les populations. Si la pratique des lotissements massifs a permis de faciliter l’accès au foncier pour un grand nombre de ménages, les quartiers créés n’ont pas été viabilisés. La spéculation incontrôlée due à l’absence d’une réglementation sur le foncier urbain a entrainé une prolifération des quartiers informels communément appelés « zones non loties » ou « zones d’habitat spontané » dans les principaux centres urbains du Burkina Faso, 12 Perspectives économiques en Afrique © BAfD, OCDE, PNUD 2016 L’évolution de la géographie économique du pays depuis les années 90 a contribué à une plus grande polarisation. La capitale, Ouagadougou, a ainsi connu une croissance démographique spectaculaire. Sa population, qui a triplé en 20 ans, représentait en 2006 près de la moitié de la population urbaine totale du pays. Le pays est également caractérisé par une forte disparité entre les villes primaires et secondaires d’une part, et entre les villes et les villages d’autre part. Cette situation se révèle surtout au niveau des opportunités économiques et en termes de dotations en infrastructures économiques et sociales de base. Hormis le secteur primaire (agriculture, élevage) et les mines, les opportunités économiques sont concentrées dans les deux principales villes du pays (Ouagadougou et Bobo-Dioulasso). Ces deux agglomérations concentrent presque toutes les grandes entreprises de tous les sous-secteurs économiques du pays. Elles abritent aussi les infrastructures économiques et sociales (industries, aéroports, universités, hôpitaux, zones commerciales et hôtels de références). Burkina Faso avec pour corollaire le développement de l’insécurité et de la pauvreté. Les tendances actuelles d’urbanisation posent ainsi trois grands défis économique, écologique et infrastructurel. Le financement de l’urbanisation constitue un problème réel, en raison de la faiblesse des investissements publics et de la croissance urbaine incontrôlée. Le budget de l’État alloué aux communes pour leur développement reste très limité, à moins de 5 % du budget total. Les ressources des villes proviennent essentiellement de leurs recettes, principalement les taxes directes sur les opérations commerciales et les taxes indirectes sur les opérations foncières. En dehors des deux principales agglomérations, les autres villes possèdent des ressources propres très limitées. Pour pallier cette insuffisance, les municipalités développent diverses initiatives dans le cadre de la coopération décentralisée (jumelage avec des villes occidentales). Le recours aux partenariats publics-privés pourrait leur permettre d’améliorer substantiellement leur capacité de mobilisation de ressources. Les pouvoirs publics ont adopté, en mai 2008, une politique nationale de l’habitat et du développement urbain et un plan d’action pour 2009-18. Les principaux piliers de cette politique consistent à transformer les villes du Burkina Faso en pôles de croissance économique et de développement, assurer l’accès au logement décent aux couches sociales défavorisées et enfin, contribuer à lutter contre la pauvreté urbaine. Par le passé, le développement urbain avait été seulement pris en charge par les pouvoirs publics à travers la mise en place de structures ponctuelles qui n’ont pas permis de faire véritablement face aux défis et enjeux du secteur. Il s’agit entre autres du Fonds de l’habitat transformé par la suite en Projet Ouaga 2000 puis enfin en Société nationale d’aménagement des terrains urbains (SONATUR), du Compte spécial du Trésor public pour les opérations de lotissements et du Fonds des aménagements urbains (FAU) mis en place avec l’appui de la coopération néerlandaise. En 2005, face à la problématique récurrente de l’accès au logement décent, les pouvoirs publics ont créé la banque de l’habitat du Burkina Faso qui participe également à la résolution du problème de financement du logement. L’aménagement urbain a également fait l’objet de la mise en place de grands programmes tels que la zone d’activités commerciales et administratives (ZACA), le nouveau quartier Ouaga 2000 et le programme 10 000 logements sociaux et économiques. Par ailleurs, un certain nombre de programmes et projets de développement partenariaux ont été mis en place pour accompagner les efforts du gouvernement. Sur le plan de la gouvernance urbaine, on note l’existence d’un ministère de l’Habitat et de l’Urbanisme, dont le code de l’urbanisme et de la construction de 2006 constitue le cadre règlementaire de référence. Il vient compléter le code général des collectivités territoriales (CGCT) de 2004. La décentralisation intégrale du territoire devrait permettre la mise en place d’une base de gestion urbaine, axée sur l’implication et l’appropriation par les populations du processus de développement urbain. Malheureusement, le régime dualiste de gestion de la terre – qui se traduit notamment par la persistance des règles coutumières de gestion de la terre face au cadre législatif et réglementaire existant – tend à constituer une véritable menace pour la politique globale de © BAfD, OCDE, PNUD 2016 Perspectives économiques en Afrique 13 Burkina Faso 14 développement du pays. Alors que la terre est devenue un moyen sûr d’accès à la richesse, la plupart des collectivités territoriales ne sont pas encore dotées de suffisamment de moyens et d’outils efficaces pour assurer une gestion durable des villes, ou ne disposent pas de capacités opérationnelles pour assurer la mise en œuvre cohérente des outils de planification urbaine. Par ailleurs, l’économie des villes secondaires est dominée essentiellement par le secteur primaire, ce qui constitue une contrainte à une véritable transformation des villes en pôles de développement durable. Dans ce contexte les pouvoirs publics ont engagé une approche expérimentale de développement d’un pôle de croissance du Sahel, notamment autour de la ville de Dori, chef-lieu de la région. Il s’agit surtout d’exploiter le plein potentiel de la zone (mines, élevage et tourisme) pour faire de cette ville, un nouveau pôle de compétitivité et de développement économique. Perspectives économiques en Afrique © BAfD, OCDE, PNUD 2016