Les ultrasons - Revue de Médecine Vétérinaire

Transcription

Les ultrasons - Revue de Médecine Vétérinaire
ARTICLE ORIGINAL
Nouveaux traitements physiques
de conservation des aliments :
revue bibliographique
2ème Partie : ultrasons, ultraviolets et lumière pulsée
B. PETIT, ° M. RITZ et M. FEDERIGHI
° Ecole Nationale Vétérinaire de Nantes, UMR 1014 d’Hygiène des Aliments INRA/ENVN, B.P. 40706, F-44307 Nantes
RÉSUMÉ
SUMMARY
Cet article propose une synthèse bibliographique de nouveaux procédés
physiques de préservation des aliments. Dans cette seconde partie, l’accent
est porté sur les ultrasons, les ultraviolets et la lumière pulsée. Les modifications physiques et biologiques induites par le traitement sont développées,
et particulièrement l’effet des traitements sur les micro-organismes. En
dernière partie, les applications potentielles de ces traitements dans l’industrie agro-alimentaire sont abordées.
New physical food preservation treatments : an overview. Second part :
ultrasounds, ultraviolet and light pulses. By B. PETIT, M. RITZ and M.
FEDERIGHI.
MOTS-CLÉS : ultrasons - ultraviolet - lumière pulsée qualité - micro-organismes.
KEY-WORDS : ultrasounds - ultraviolet - pulsed light quality - microorganisms.
Les ultrasons
A) DÉFINITIONS ET PRINCIPES PHYSIQUES DES
ULTRASONS
L’utilisation des ultrasons n’est pas un thème de recherche
récent, puisque le premier modèle mathématique date de
1917, par Lord Raleigh. Les premières applications industrielles datent, quant à elles, de 1930, dans le domaine de la
chimie. L’effet létal des ultrasons a été rapporté pour la première fois, par HARVEY et LOOMIS, en 1929. Depuis,
même si la recherche a fait de gros progrès et a permis l’utilisation industrielle des ultrasons dans de nombreux
domaines d’application, son étude, comme éventuel moyen
de conservation des aliments, ne remonte qu’à une dizaine
d’années.
Revue Méd. Vét., 2002, 153, 10, 653-664
This review proposes an overview of some new physical food preservation treatments. In this second part ultrasounds, ultraviolet and pulsed light
are described. Physical and biological aspects of these treatments are taken
into consideration, principally effects on food components and on microorganisms. At last, before a conclusion, potential uses for both treatment in
food industry are evocated.
1) Définitions et classification
Un son est une onde mécanique de pression qui se propage
dans un milieu et qui se traduit au sein de celui-ci, par une
succession de cycles de dépression et de compression. Cette
onde est caractérisée par :
- sa fréquence, c’est-à-dire le nombre de cycles passant en
un point fixe par unité de temps, son unité est le Hertz (Hz)
- son amplitude, qui correspond à la différence maximale
entre la dépression et la compression, son unité est le mètre
(m).
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PETIT (B.) ET COLLABORATEURS
FIGURE 1. — Classification des sons [3].
On classe les sons en fonction de leur fréquence et de leur
intensité acoustique (figure 1).
L’intensité acoustique (J), exprimée en Watt (W) par mètre
carré (m2), est donnée par la formule :
J = 1/2.P2/ρν
- P est l’amplitude de la pression acoustique
- ρ est la densité du milieu
- ν est la vitesse de propagation de l’onde dans le milieu
[3].
Les ultrasons utilisés pour leur effet bactéricide, sont situés
dans une plage de fréquence allant de 20 à 100 kHz, et ayant
des intensités acoustiques supérieures à 104 W/m2.
2) La cavitation
a) Définition
C’est la formation de microbulles dans un liquide. Elle
apparaît quand une forte pression négative est appliquée au
liquide et que, la pression tombe plus bas que la pression de
vapeur du liquide.
Ces bulles sont remplies par la forme vapeur des gaz dissous dans le liquide, ou par la vapeur du liquide.
Elles subissent au même titre que le liquide, les alternances
de compressions et de dépressions, modifiant ainsi leur
volume.
Lorsque les variations de volume s’effectuent de manière
stable, après des milliers de cycles, il se crée une circulation
autour de ces bulles (microcourant), c’est la cavitation stable.
Elle se produit sous des pressions de 1 à 100 kPa.
Sous certaines conditions, les bulles atteignent une taille
telle que la vapeur contenue dans ces bulles se condense brutalement, engendrant des chocs très violents entre les molécules. C’est la cavitation transitoire, elle a lieu après très peu
de cycles. Les chocs, ainsi créés, s’accompagnent très localement d’une augmentation très importante de la température
instantanée (5500°C), et de la pression (5.104 kPa) en très
peu de temps (de l’ordre de la microseconde), ainsi que de la
formation de radicaux libres, tels que le peroxyde d’hydrogène [29].
b) Facteurs de variation
Différents paramètres peuvent intervenir, soit en modifiant
la formation des bulles (seuil de cavitation), soit en modifiant
l’énergie libérée lors de l’implosion des bulles.
Lorsque la fréquence augmente le seuil de cavitation est
diminué, ainsi que l’énergie libérée lors de l’implosion.
L’intensité acoustique, et donc l’amplitude acoustique, influe
de manière très importante sur l’énergie de l’implosion. Plus
elle est élevée, plus l’énergie libérée sera importante [29].
Lorsque la quantité de gaz dissous augmente, les échanges
de gaz au travers de la bulle sont favorisés, et la cavitation
augmente. Par contre, l’intensité de l’implosion diminue.
L’augmentation de la viscosité du milieu diminue le seuil de
cavitation, mais augmente l’énergie libérée lors de l’implosion [3].
La température est un paramètre essentiel. Lorsque la température augmente, la tension de surface du liquide diminue,
et la pression de vapeur augmente, ce qui favorise la formation des bulles, mais diminue l’énergie de l’implosion.
Une augmentation de la pression ambiante diminue la cavitation, mais augmente fortement l’intensité de l’implosion.
c) Les générateurs à ultrason
Ils sont généralement formés par un générateur piézo-électrique, constitué d’un cristal, dont la forme change lorsqu’on
le soumet à un champ électrique intense (de l’ordre de 1000
Volts), à une fréquence de l’ordre de 20 kHz ; les vibrations
ainsi obtenues, sont transmises à une corne qui amplifie la
vibration, et dont la pointe est plongée dans le liquide à traiter [29].
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NOUVEAUX TRAITEMENTS PHYSIQUES DE CONSERVATION DES ALIMENTS : REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
B) EFFETS DES ULTRASONS SUR LES MICRO-ORGANISMES
1) Mode d’action
La majeure partie des auteurs s’accorde à dire que l’effet
létal des ultrasons est d˚ à la cavitation [25]. Les extrêmes
pressions atteintes lors de l’implosion des bulles, entraîneraient une rupture des structures cellulaires, et conduiraient à
la mort de la cellule [26]. Ces auteurs ont observé au microscope des cellules de Yersinia enterocolitica, après un traitement par les ultrasons (20 kHz, 117 µm, 200 kPa, 30°C, 3
min), la totalité des cellules observables présentait des ruptures des structures cellulaires.
Les fortes températures atteintes ne semblent pas être à
l’origine de l’effet létal des ultrasons sur les micro-organismes, car cette élévation de température ne concerne qu’un
très petit nombre de cellules [29, 30].
Le microcourant généré par la cavitation stable n’apparaît
pas, non plus, être à l’origine d’un effet létal, tout du moins
dans les conditions dans lesquelles, sont effectuées la plupart
des recherches [30]. Pour SALA et coll. (1995) les radicaux
libres, formés suite à l’implosion, ne sont pas la cause des
effets sur les micro-organismes [29].
2) Facteurs de variation
L’effet létal des ultrasons étant dû au phénomène de cavitation, et plus particulièrement aux conséquences de l’implosion, tout paramètre entraînant des modifications de la cavitation, aura des conséquences sur l’inactivation des microorganismes. Toutefois, il est difficile de savoir si des changements dans les caractéristiques du milieu, entraînent des différences de sensibilité aux traitements par les ultrasons, ou
bien des différences dans l’intensité de la cavitation [29].
a) Facteurs intrinsèques aux micro-organismes
Il est généralement admis que la sensibilité des micro-organismes augmente avec la taille de la cellule, que les bacilles
sont plus sensibles que les cocci, les bactéries à Gram positif
sont plus résistantes que les bactéries à Gram négatif, et les
bactéries aérobies sont plus résistantes que les bactéries anaérobies [29]. Toutefois SCHERBA et coll. (1991), ne consta-
tent pas de différence dans l’effet des ultrasons (26 kHz, à
39°C) sur les taux de survie de Staphylococcus aureus et
Bacillus subtilis (bactéries à Gram positif), et de Escherichia
coli et Pseudomonas aeruginosa (bactéries à Gram négatif)
[30].
Comme souvent, les spores bactériennes apparaissent
beaucoup plus résistantes que les formes végétatives aux
ultrasons [12].
WRIGLEY et LLORCA (1992) ont étudié l’inactivation de
Salmonella typhimurium par les ultrasons. Ils constatent une
légère différence entre les populations âgées de 3 heures et
les populations âgées de 18 heures, pour un temps de traitement inférieur à 15 minutes. Cette différence n’existe plus
pour 30 minutes de traitement [35].
b) Composition du milieu
PAGAN et coll.(1999) ont comparé les effets d’un traitement par les ultrasons (20 kHz, 200 kPa, 117 µm, 40°C) sur
Listeria monocytogenes dans différents milieux. Ils constatent que le lait a un effet protecteur et qu’un pH acide augmente l’inactivation microbienne (figure 2) [21].
De même le taux d’inactivation d’un traitement par les
ultrasons de Salmonella typhimurium en milieu modèle est de
4 log, alors qu’il n’est que de 2 log dans du lait, et inférieur à
1 log dans de l’œuf [35].
c) Durée du traitement
A l’instar d’autres traitements physiques, le nombre de survivants après un traitement par les ultrasons décroît de
manière exponentielle avec le temps d’application.
LOPEZ-MALO et coll. (1999) ont étudié l’effet d’un traitement par les ultrasons (20 kHz, 90 µm) sur une population
de Saccharomyces cerevisiae, en milieu de Sabouraud et à
différentes températures (45 à 55°C) [16]. L’effet de la durée
du traitement est représenté sur la figure 3.
PAGAN et coll. (1999) obtiennent une réduction de 1,5 log
de la population de Streptococcus faecium, après 2 minutes
d’un traitement à 117 µm, sous une pression de 200 kPa, et à
62°C, et de 2,5 log après 4 minutes [20].
FIGURE 2. — Influence du milieu sur l’inactivation de Listeria monocytogenes par les ultrasons
[20].
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PETIT (B.) ET COLLABORATEURS
Une augmentation de l’amplitude de 10 µm entraîne une
diminution de 20 % de la valeur du temps de réduction décimale d’un traitement par les ultrasons (20 kHz, 200 kPa,
30°C) sur Yersinia enterocolitica [26].
L’effet de l’amplitude sur l’intensité de l’inactivation par
les ultrasons est représenté sur la figure 4.
L’augmentation de l’efficacité des ultrasons, suite à une
augmentation de l’amplitude, serait due à une plus forte
intensité d’implosion des bulles de gaz [21].
LOPEZ-MALO et coll. (1999) ont comparé les temps de
réduction décimale de Saccharomyces cerevisiae avec un
traitement par les ultrasons (20 kHz, 90 µm) et sans ce traitement (figure 5). Ils constatent qu’une augmentation de la
température de 10°C réduit le temps de réduction décimale
d’un facteur 30. Toutefois l’effet bénéfique des ultrasons,
comparé à un traitement thermique diminue quand la température augmente, ils considèrent que l’intensité de la cavitation, réduite par une augmentation de la température, est à
l’origine de cette différence [16].
GARCIA et coll. (1989) ont étudié les mêmes effets sur des
spores de Bacillus subtilis, dans de l’eau, mais à des températures plus importantes (70 à 100°C) (figure 6), on parle parfois de thermo-ultrasonication, ou de thermosonication. Ils
constatent, eux aussi, que l’effet bénéfique apporté par une
augmentation de la température, diminue à des températures
plus élevées. Ils considèrent également que la température
réduit l’intensité de la cavitation, en diminuant fortement la
tension superficielle. Par contre, dans le lait l’augmentation
de température nécessaire pour réduire d’un facteur 10 le
temps de réduction décimal, est la même, que ce soit sous
l’effet d’un traitement par les ultrasons ou non [12]. Ceci
pourrait être dû à la présence de particules solides, affectant
directement l’intensité de la cavitation.
Une étude, citée par RASO et coll. (1994), a montré que,
même à des températures élevées (90-110°C), l’effet bénéfique apporté par une augmentation de température restait
important, si le traitement par les ultrasons était effectué sous
pression (figure 7).
e) Température
La température est un paramètre important, qui modifie de
manière très conséquente, les effets des ultrasons sur les
micro-organismes.
L’augmentation de la température d’un traitement de
30 minutes par les ultrasons, de 0 à 40°C, diminue la population de Salmonella typhimurium, de 4 log en milieu modèle,
et de 3 log dans du lait [35].
f) Pression
Lorsque le traitement par les ultrasons est effectué sous
l’influence de la pression, on parle alors de mano-sonication,
pour des températures faibles à modérées, et de manothermo-sonication, pour des températures élevées. Il faut rappeler toutefois, que les pressions employées pendant ce type
de traitement (100 à 600 kPa), sont nettement inférieures aux
pressions utilisées lors des traitements par les hautes pressions (100 à 1000 MPa) [10].
FIGURE 4. — Influence de l’amplitude sur le temps de réduction décimale de
Listeria monocytogenes, d’un traitement par les ultrasons (20 kHz, 40°C)
à différentes pressions [20].
FIGURE 5. — Évolution du temps de réduction décimal de Saccharomyces
cerevisiae en fonction de la température et de l’application d’ultrasons
[12].
FIGURE 3. — Influence de la durée du traitement (20 kHz, 90 µm)
sur l’inactivation de Saccharomyces cerevisiae à 45°C [12].
d) Amplitude
L’effet létal des traitements par les ultrasons augmente de
manière exponentielle avec l’amplitude de l’onde [20, 21,
26].
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NOUVEAUX TRAITEMENTS PHYSIQUES DE CONSERVATION DES ALIMENTS : REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
FIGURE 6. — Effet de la température sur le temps de réduction décimal de
spores de Bacillus subtilis et de l’application d’ultrasons [12)].
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FIGURE 7. — Effet de la température sur le temps de réduction décimal de
spores de Bacillus subtilis, et de l’application d’ultrasons sous pression
[25].
FIGURE 8. — Influence de la pression sur le temps de réduction décimale de Listeria monocytogenes
(117 µm, 40°C) et de Yersinia enterocolitica (117 et 150 µm, 30°C) [20, 26].
La pression favorise les effets d’un traitement par les ultrasons.
L’augmentation de la pression de 0 à 200 kPa, entraîne une
diminution du temps de réduction décimale de Listeria
monocytogenes de 4,3 à 1,5 minutes, lors d’un traitement à
20 kHz, 117 µm et à 40°C. Cette diminution n’est que de 0,5
minute, lorsque la pression augmente de 200 à 400 kPa [20].
RASO et coll. (1998) obtiennent le même type de résultats,
avec un traitement à 20 kHz, 150 µm, et à 30°C, sur Yersinia
enterocolitica. Le temps de réduction décimale passe de 1,5 à
0,28 minutes, lorsque la pression varie de 0 à 300 kPa, et de
0,28 à 0,20 minute, lorsque la pression augmente encore de
300 kPa (figure 8) [26].
L’augmentation de pression favoriserait une intensité d’implosion plus élevée, mais le fait que l’effet bénéfique de la
pression diminue aux pressions les plus hautes, serait dû à la
diminution de nombre de bulles formées à ce niveau de pression [21].
C) EFFETS DES ULTRASONS SUR LES CONSTITUANTS ALIMENTAIRES
Même si les modifications induites par les ultrasons sont,
et ont été, très étudiées dans le domaine de la chimie, peu de
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données sont disponibles sur leurs effets sur les constituants
alimentaires. Quelques remarques générales peuvent toutefois être formulées.
Les ultrasons sont à l’origine de la dépolymérisation de
certaines macromolécules, telle l’amidon, et de la rupture de
certaines zones de l’ADN, ainsi que de la polymérisation de
molécules [29,33].
Les modifications constatées sur les protéines (rupture de
la structure quaternaire des protéines globulaires polymériques, délipidation de certaines lipoprotéines, dissociation
de l’hémoglobine, modifications de la structure de certains
acides aminés), sont fortement dépendantes de la concentration de ces protéines et de la nature des gaz dissous [29].
Les enzymes ont été étudiées de manière plus importante.
Les ultrasons entraînent l’inactivation du lysozyme, de la
lipase, de la protéase [33], des oxydases [3] ainsi que de la
lactate déshydrogénase [29]. Par contre les catalases et la
ribonucléase semblent être résistantes [29]. Le mode d’action
de l’inactivation des enzymes n’est pas connu. Les radicaux
libres pourraient en être la cause, d’autres auteurs considèrent que le microcourant pourrait être à l’origine de l’inactivation enzymatique [29, 33].
WRIGLEY et LLORCA (1992) ont mis en évidence qu’il
n’y avait pas de différence significative dans les concentra-
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tions en protéines solubles du lait et de l’oeuf liquide, après
un traitement par les ultrasons à 50°C, pendant 30 minutes
[35]. Le traitement de céréales, à 35 kHz, pendant 10
secondes à 200 minutes (brevet WO 9216116), ne modifie ni
leur goût, ni leur valeur nutritive [3].
L’homogénéisation des graisses et l’activité antioxydante
sont augmentées dans le lait après un traitement par les ultrasons [19]. Plusieurs autres modifications sont rapportées par
BOISTIER-MARQUIS et coll. (1999) : une odeur de brûlé
peut apparaître sur le lait, les qualités organoleptiques du jus
d’orange sont altérées [3].
D) APPLICATIONS DES ULTRASONS EN INDUSTRIES
ALIMENTAIRES
Actuellement plusieurs applications industrielles utilisant
les ultrasons existent. Ainsi, le phénomène de la cavitation
stable est utilisé, pour dégazer certaines boissons carbonatées
et la bière. L’extraction du contenu cellulaire du houblon est
utilisé en brasserie, et les ultrasons sont utilisés pour émulsionner certaines préparations, telles que la mayonnaise et le
ketchup. Mais l’application la plus répandue est le tranchage,
en effet les ultrasons permettent des épaisseurs de tranche
très petites (de l’ordre du millimètre), ainsi qu’une très bonne
finition. Ce type de technique est utilisé pour trancher des
produits fragiles (pâtisseries, entremets). Toutefois, aucune
application visant à augmenter la durée de conservation des
denrées alimentaires ou à pasteuriser les aliments, n’est à ce
jour utilisée dans le monde.
Plusieurs auteurs s’accordent à dire que l’utilisation des
ultrasons à la pression atmosphérique, ne trouvera probablement pas de débouchés à des fins de pasteurisation, en raison
des temps d’application trop longs, nécessaires pour parvenir
à une destruction suffisante des micro-organismes des aliments [25, 29].
L’utilisation des ultrasons, sous l’influence de pressions
modérées (mano-sonication) entraînant des réductions parfois spectaculaires de la résistance des micro-organismes à la
chaleur, permet d’envisager des traitements combinant la
chaleur et les ultrasons sous pressions (mano-thermo-sonication). Ce type de traitement en réduisant notablement, la température ou le temps d’application, permet de diminuer les
conséquences d’un traitement thermique sur les qualités
organoleptiques des aliments, et d’envisager leur utilisation à
des fins de pasteurisation [25, 29, 33].
De même, l’utilisation des ultrasons permet d’augmenter
nettement la sensibilité des spores bactériennes à la chaleur
[23], ainsi que l’élimination des pathogènes tels que Listeria
monocytogenes, connus pour développer une résistance très
élevée à la chaleur à la suite d’un traitement thermique [22].
PETIT (B.) ET COLLABORATEURS
activation microbienne satisfaisant, modifiant de ce fait de
manière trop importante les aliments. En revanche son utilisation combinée avec l’emploi de pressions modérées et de la
chaleur, augmentant parfois de manière spectaculaire la sensibilité des micro-organismes, permet d’entrevoir des applications potentielles intéressantes. Des études portant sur les
conséquences toxicologiques d’un tel traitement sont toutefois nécessaires.
Les ultraviolets et la lumière
pulsée
L’existence des rayons ultraviolets a été mise en évidence,
en 1801, par RITTER, grâce aux réactions chimiques qu’ils
induisent. En 1910, le premier appareil de production de
rayons ultraviolets est construit, en vue de désinfecter l’eau,
mais il est vite remplacé par l’utilisation du chlore. C’est
dans les années 40, avec l’apparition du quartz, que la
construction de lampes à UV devient intéressante. Depuis,
l’utilisation de ce type de rayonnement s’est répandue,
notamment en vue de désinfecter l’air, l’eau et différentes
surfaces.
A) PRÉSENTATION DES RAYONS ULTRAVIOLETS
1) Définition
Les rayons ultraviolets sont les rayonnements électromagnétiques, dont les longueurs d’onde s’étendent de 100 nm
(juste au dessus des rayons X) à 400 nm (juste en dessous du
spectre visible) (figure 9).
Au sein même des UV, on distingue trois classes qui ont
des propriétés différentes:
- les UV A (315 à 380 nm) qui ont un effet bronzant,
- les UV B (280 à 315 nm) qui ont un effet érythémateux,
- les UV C (100 à 280 nm) qui ont des propriétés photochimiques et germicides.
La particularité des UV C est de présenter des propriétés
germicides, avec un optimum vers 253,7 nm [1,27].
L’intensité des rayons UV est exprimée, en général, en
Watt par unité de surface, le plus souvent le centimètre carré
(cm2). Pour simplifier la compréhension, on exprimera l’intensité du rayonnement en W/cm2, ou en fonction des multiples du Watt [microwatt (µW), milliwatt (mW) ou megawatt (MW)].
La dose de rayonnement reçue (D), est égale au produit de
l’intensité (I) et de la durée (T) (en secondes), elle est exprimée en W.s/cm2 ou en Joule/cm2 (J/cm2).
D = I.t
1 J/cm2 = 1 W.s/cm2.
E) CONCLUSION
Les données rapportées sur les effets d’un traitement par
les ultrasons sur les micro-organismes laissent à penser que
son utilisation seule ne trouvera probablement pas de débouché en matière de conservation des aliments, en raison des
intensités trop élevées requises pour atteindre un seuil d’in-
2) Mode d’émission
L’émission des UV résulte du mouvement des électrons
orbitaux vers une couche externe, sous l’effet d’une tension
électrique, s’accompagnant de l’émission d’un photon, que
l’on a coutume d’associer aux rayonnements électromagnétiques.
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NOUVEAUX TRAITEMENTS PHYSIQUES DE CONSERVATION DES ALIMENTS : REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
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FIGURE 9. — Spectre électromagnétique [27].
En pratique, on soumet une lampe, à une tension électrique
alternative, qui produit entre les deux électrodes, une
décharge lumineuse [27]. Les caractéristiques de la lampe et
du circuit électrique permettent de classer les sources en plusieurs catégories.
a) Lampes à vapeurs de mercure
Ce type de lampe est utilisé depuis longtemps dans différents domaines d’application (désinfection de l’eau, de l’air
et de différentes surfaces, chimie analytique, physique
nucléaire).
Elles se composent en général :
- d’un tube en quartz, perméable aux UV,
- de vapeurs de mercure,
- d’un gaz rare, diminuant le seuil de tension nécessaire à
l’émission,
- d’halogénures métalliques, modifiant le spectre d’émission.
Selon la pression à l’intérieur du tube, on distingue deux
types de lampes à vapeurs de mercure. Les lampes à basse
pression (10-3 à 10-5 bars) émettent en presque totalité avec
une longueur d’onde de 254 nm. Elles consomment peu
d’énergie, et sont limitées aux applications nécessitant un
faible débit. Les lampes à hautes pressions (10-1 à 20 bars),
nécessitent un courant beaucoup plus élevé. Elles délivrent
une intensité plus importante, mais dans des longueurs
d’onde plus larges (240 à 290 nm). Elles sont adaptées aux
débits importants.
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Ces types de lampes sont utilisées, en général, dans les différentes études et propositions d’applications, selon un mode
continu, en étant couplé à un dispositif électrique classique.
Elles ont une puissance unitaire qui va de 100 W à quelques
kW.
b) Technique de l’énergie pulsée
L’utilisation de condensateurs sur le circuit électrique, permet l’accumulation de très hautes valeurs d’énergie, qui, une
fois déchargées dans la lampe, produisent un flash de lumière
intense (lumière pulsée). Ce système est similaire au système
électrique rencontré lors de l’utilisation des champs électriques pulsés. Le spectre d’émission est conditionné par la
composition de l’enveloppe de la lampe, contenant en général du xénon [17, 28]. Les flashs émis ont une puissance de
l’ordre du mégawatt et une durée très courte, de l’ordre de la
microseconde; leur consommation électrique globale est
similaire à celle des installations classiques [28].
La société Pure Pulse Technologies (San Diego,
Californie) possède un brevet concernant un tel équipement :
le procédé Pure Bright. Les flashs émis possèdent une puissance maximale de 10 MW pour une durée de 300 µs environ.
Toutefois, à la différence des lampes à vapeurs de mercure,
ces procédés émettent dans un spectre beaucoup plus large,
de 200 nm à 1 mm [6], contenant environ 8 % d’UV de longueur d’onde comprise entre 200 et 300 nm [17].
3) Interaction des UV et de la matière
A la différence des rayons γ, les rayons UV ont un pouvoir
de pénétration très limité.
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On peut calculer l’intensité de lumière pénétrant à l’intérieur d’un liquide selon la formule suivante :
I = I0.e-αx
où I est l’intensité à la profondeur x, I0 l’intensité incidente, ( le coefficient d’absorption [27].
DUNN et coll., (1988) proposent l’équation suivante pour
les différents matériaux:
I = (1-R). I0.e-z
où R est le coefficient de réflexion, z le coefficient d’extinction (déterminé par l’opacité du matériau). On voit donc
que à une profondeur donnée, l’intensité augmente avec l’intensité incidente, et que pour une intensité donnée, le pouvoir
de pénétration augmente avec l’intensité incidente [7].
ROSSET et ROSSET (1996) considèrent que le pouvoir de
pénétration des rayons UV est de l’ordre de 100 µm, pour un
liquide de densité égale à celle de l’eau ; alors que pour la
lumière pulsée, cette profondeur est de l’ordre de 0,25 cm
[2].
Quelque soit le type de source utilisée, la lumière émise par
ces équipements ne pourra traiter les matériaux qu’en surface.
B) ACTION DES RAYONS ULTRAVIOLETS SUR LES
MICRO-ORGANISMES
1) Mode d’action
Le site d’action principal des ultraviolets est l’acide
nucléique des cellules. En effet, lorsque l’on compare l’effet
bactéricide des rayons UV et le spectre d’absorption de
l’ADN, on constate que tous deux présentent un maximum
pour des longueurs d’onde de l’ordre de 250-260 nm [27]. La
majeure partie des protéines ont un maximum d’absorption
vers 280 nm.
Par activation des électrons, les UV dissocient les doubles
liaisons des acides nucléiques, entraînant la formation de
photoproduits, principalement des dimères de thymine, par
pontage intrabrin, responsables d’erreur de réplication
[14,27,28].
ROWAN et coll. (1999) ont étudié les effets de la lumière
pulsée produite par deux types de lampes, contenant beaucoup ou peu d’UV (dans les longueurs d’onde comprises
entre 200 et 400 nm). Ils constatent que l’inactivation de
Escherichia coli est supérieure pour les lampes contenant
beaucoup d’UV, et concluent que l’action létale de la lumière
pulsée est bien due aux rayons UV[28]. Dunn (1996) rapporte le même type d’action pour la lumière pulsée, obtenue
avec le procédé Pure Bright [8].
FIKSDAL et TRYLAND (1999) ont étudié la croissance
d’une souche de Escherichia coli, en milieu modèle, en fonction de la dose pour des intensités incidentes de 0,8 à
1,6 mW/cm2, ainsi que différents paramètres tels que la respiration cellulaire, l’intégrité membranaire, le potentiel transmembranaire et l’activité enzymatique de la βD galactosidase. Ils constatent que pour des doses inférieures à
48 mW.s/cm2, tous les paramètres sont intacts et la croissance
cellulaire est inhibée, que pour des doses supérieures à
PETIT (B.) ET COLLABORATEURS
940 mW.s/cm2 tous les paramètres sont altérés (proportionnellement à la dose) et que la croissance cellulaire est inhibée
[11]. Ils corroboreraient, ainsi, les résultats obtenus par
MORGAN (1989), qui considèrent que si l’action des UV est
suffisamment prolongée et/ou renforcée, les structures membranaires du noyau sont détruites [18].
DUNN et coll. (1995), ainsi que BARBOSA-CANOVAS
et coll. (1997), considèrent que les UV peuvent réagir avec
les doubles liaisons des protéines, KUO et coll. (1997) rapportent que les UV peuvent inhiber les phosphorylations oxydatives [2,6,15].
DUNN et coll. (1990) considèrent que les effets des UV
pourraient être liés à des processus thermiques très élevés et
de très courte durée, mais ROWAN et coll. (1999), ne constatant qu’une élévation de température de 1°C, à la surface du
substrat, suite à un traitement par une intensité proche de
35 MW, écartent un processus photothermique au profit d’effets photochimiques [9, 28].
En conclusion, le mode d’action de ces types de traitement
serait dû principalement aux modifications photochimiques
de l’ADN qu’induisent les UV.
2) Inactivation des micro-organismes
Le tableau I présente les doses nécessaires pour l’obtention
de réduction décimale de différents micro-organismes obtenues avec les rayons ultraviolets, dans des conditions de
laboratoire.
Elles varient de 2,6 mW.s/cm2 pour Staphylococcus aureus
à 130 mW.s/cm2 pour Aspergillus niger. Les virus, les coccis
et les formes végétatives des bactéries sont généralement
plus sensibles que les levures, les moisissures et les spores
bactériennes [4,27].
MORGAN (1989) rapporte que les UV ne sont pas, ou peu,
efficaces sur les levures, dès qu’elles ont commencé à se
développer [18].
SUMNER et coll. (1996) ont comparé les taux d’inactivation de Salmonella typhimurium par les UV, pour des doses
allant de 1,6 à 9,8 mW.s/cm2, sur des boîtes de Pétri et sur de
la peau de poulet. Alors que une réduction de 7 log et plus est
obtenue sur les boîtes de Pétri, seulement 80 % de la population est inactivée, sur la peau de poulet, pour les doses les
plus fortes [32]. De même, STERMER et coll. (1987) obtiennent une réduction de 3 log, de la population bactérienne sur
gélose, pour 4 mW.s/cm2, et seulement 1,5 log sur des steaks
de boeuf, pour 16,5 mW.s/cm2 [31].
Les courbes de survie des populations cellulaires soumises
aux rayons UV montrent classiquement un effet très marqué
au début, puis une diminution du taux d’inactivation (figure
10).
KUO et coll. (1997a) ont étudié les effets des UV d’une
intensité égale à 0,62 mW.s/cm2, sur Salmonella typhimurium inoculée sur gélose ou sur des coquilles d’oeufs. Ils
obtiennent le même type de courbe (figure 11), à savoir une
décroissance initiale marquée, suivie d’une atténuation de
l’effet létal des UV [14].
Le taux d’inactivation microbienne croît donc avec le
temps d’exposition, mais sur les coquilles d’oeuf, une petite
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TABLEAU I. — Dose nécessaires à l’obtention de réductions décimales de différents micro-organismes [27].
FIGURE 10 . — Inactivation de Escherichia coli par la lumière pulsée contenant
beaucoup (o) et peu d’UV (•) [28].
FIGURE 11. — Inactivation de Salmonella typhimurium, inoculée sur gélose et sur des
coquilles d’œufs, par un traitement UV (0,62 mW/cm2) [14].
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fraction de la population est résistante au traitement, probablement parce que la surface de la coquille n’est pas aussi
lisse que la gélose, et que la présence de pores peut empêcher
la totalité des bactéries d’être atteinte. STERMER et coll.
(1987) rapportent les mêmes conclusions, sur l’inactivation
bactérienne avec des doses de 16,5 mW.s/cm2, appliquées
sur des steaks [31].
DUNN et coll. (1995) comparent la cinétique d’inactivation de spores d’Aspergillus niger d’un traitement UV en
continu (dont la dose n’est pas rapportée) et du procédé Pure
Bright (figure 12).
Ils rapportent que l’utilisation de la lumière pulsée
engendre un taux d’inactivation supérieur (plus de 7 log) et
que ce procédé est plus efficace [6]. Toutefois, ROWAN et
coll. (1999), en étudiant l’effet d’un traitement par la lumière
pulsée (100 à 200 flashs de 100 ns et d’intensité nominale de
35 MW), sur différentes souches bactériennes, rapportent
l’efficacité d’un tel traitement; cependant l’inactivation obtenue n’est pas totale, les populations passant de 8-9 log à 3,45 log [28].
En conclusion, compte-tenu de la très grande variabilité
des résultats, il apparaît important d’étudier les effets des
rayons ultraviolets et de leurs différents procédés d’émission,
sur les micro-organismes cibles et dans les conditions réelles
d’utilisation.
C) APPLICATIONS ALIMENTAIRES
1) applications existantes
Historiquement, les premières applications industrielles
utilisant la lumière concernaient la désinfection de l’eau de
boisson, des sirops après dilutions ou bien encore de la sève
d’érable [27]. Actuellement l’utilisation des UV, en mode
continu, permet également la décontamination des eaux
potables et des eaux de process. La décontamination par UV
de l’air ambiant est très largement répandue dans de nombreuses industries, notamment en industries agro-alimentaires, en vue de prévenir la contamination du produit par des
germes aéroportés. Ce type d’application est répandu dans
les industries laitières, les industries de la viande, en boulangerie et en restauration collective [27].
2) Emballages
Les rayons ultraviolets sont utilisés, en industries agro-alimentaires, pour réduire la charge microbienne de différents
emballages plastiques et métalliques. Ainsi PATIL et coll.
(1988) ont montré que l’exposition à une lampe à vapeur de
mercure de 30 W, pendant 30 secondes, était suffisante pour
réduire de 3 log les populations de différentes bactéries inoculées (à un taux de 102-103 germes/cm2) sur un emballage
plastique [24].
L’utilisation de la lumière pulsée, en réduisant la durée
d’exposition nécessaire pour atteindre un même niveau de
décontamination, permet d’augmenter la cadence de traitement, puisque quelques flashs d’une durée de 100 µs sont
suffisants pour détruire la plupart des bactéries, levures et
moisissures [6]. Elle permet de surcroît d’éliminer un plus
grand nombre de spores (~5 log, pour 6 W.s/cm2) [5].
3) Applications potentielles
L’efficacité de ce type de procédé étant limité à la surface
des solides, on peut envisager son utilisation sur les denrées
alimentaires liquides, que dans un but d’augmentation de la
durée de conservation ou de prévention d’une contamination
lors de la fabrication des denrées.
Ainsi KUO et coll. (1997) ont montré qu’un traitement UV
(1720 µW/cm2, pendant 15 minutes) permettait de réduire le
nombre de bactéries aérobies, de 5 log à 2,7 log, et de moisissures, de 3,7 log à moins de 1,5 log, sur des coquilles
d’oeufs. La population de Salmonella typhimurium étant
réduite de 4,6 log à 620 µW/cm2, pour 7 minutes de traitement [14].
DUNN (1996) obtient une réduction de 8 log de la population de Salmonella enteritidis sur des coquilles d’oeufs, après
8 flashs de 0,5 W/cm2, en utilisant le procédé Pure Bright. Il
estime que, à la différence d’un traitement UV classique, la
lumière pulsée permet d’atteindre, en partie, les bactéries
présentes dans les pores des coquilles, et de ce fait d’augmenter l’efficacité globale du procédé [8].
WONG et coll. (1998) ont étudié l’effet d’un traitement
UV (1000 µW/cm2, pendant 32 minutes) sur de la peau et sur
des muscles de porc inoculés avec Escherichia coli et S.
Senftenberg. Ils obtiennent respectivement 1,9 et 2 log de
FIGURE 12. — Inactivation de spores d’Aspergillus niger, sur gélose, par un traitement UV continu et par la lumière pulsée [6].
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réduction, pour les muscles, et 3,3 et 4,6 log pour la peau et
proposent l’utilisation des UV pour décontaminer les carcasses avant leur transformation [34].
DUNN et coll. (1995) ont montré que la lumière pulsée
permettait d’obtenir une réduction de 2 log de la population
de différentes salmonelles sur des ailes de poulet, et de
Listeria innocua sur des saucisses de Francfort [6].
Lorsque que l’on traite par les UV, à la dose de
300 mW.s/cm2, du maquereau, la population microbienne
présente à la surface voit son nombre diminuer de 2 à 3 log,
et la durée de conservation du poisson réfrigéré à -1°C, augmenter d’au moins 7 jours, par rapport au témoin [13]. De
même, des crevettes exposées à la lumière pulsée et réfrigérées, ne présentent pas de dégradation microbienne, après 7
jours de stockage, à la différence des témoins non traités [6].
Il semble possible, en utilisant le procédé Pure Bright,
d’augmenter considérablement les dates limites de consommation (DLC) de différents produits :
- 16 W.s/cm2 font passer la DLC de pain de mie emballé, de
14 jours à 5 mois,
- 12 W.s/cm2 suffisent à allonger la DLC de mini cakes de
26 jours à 6 mois,
- 9 W.s/cm2 permettent une DLC de 26 jours, pour du jambon tranché [5].
4) considérations toxicologiques et nutritionnelles
Peu d’études ont porté sur les effets toxiques et nutritionnels que pourrait présenter ce type de traitement. Certains
auteurs, au cours de leurs études sur les effets microbiologiques, ont étudié quelques paramètres nutritionnels, que
l’on peut résumer ci-après.
L’utilisation des ultraviolets ne semble pas entraîner de
modifications importantes des qualités organoleptiques du
steak [31] et du maquereau [13].
DUNN et coll. (1995) n’ont pas constaté de différences
dans la composition en protéines, riboflavine, nitrosamine et
vitamine C, de saucisses de Francfort traitées par la lumière
pulsée, par rapport aux échantillons non traités [6].
MIMOUNI (1999) constate que la lumière pulsée n’a pas
entraîné de phénomènes de radiolyse, lors d’essais réalisés
sur différents aliments [17].
D) CONCLUSION
Les technologies utilisant les rayons ultraviolets représentent une technique alternative intéressante de décontamination des emballages et la sécurité des aliments, emballés ou
non. L’augmentation de température générée par ce type de
procédé est limitée à quelques degrés, la rapidité de traitement permise par les techniques pulsées, le prix de revient
limité, 1 à 3 centimes par m2 d’emballage [17] et le faible
encombrement de l’installation permettent, d’une part, une
intégration aisée sur la chaîne de fabrication et, d’autre part,
une adéquation avec les impératifs économiques et techniques des industries agro-alimentaires. Des études sur les
conséquences toxicologiques et nutritionnelles sont toutefois
nécessaires pour garantir au consommateur l’innocuité de ce
type de procédé.
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