Le Courrier de l Ouest - Rousseau

Transcription

Le Courrier de l Ouest - Rousseau
PQR
Anthony Pasco
Le Courrier de L’Ouest
13/02/12
Angers
L’InTerVIeW DU LUnDI
f Initiative. Un trail po
« L’enfance malmenée est ignorée »
Daniel Rousseau accompagne les parents et les enfants que la justice a séparés. Ce pédopsychiatre
raconte dans un livre ses rencontres les plus marquantes à la pouponnière du Village Saint-Exupéry.
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V
ous publiez un livre qui raconte votre expérience auprès des bébés du Village
Saint-Exupéry. A qui s’adresse-til ?
Daniel Rousseau : « D’abord aux
stagiaires de ce foyer de l’enfance. Il
est parfois difficile de leur expliquer
la variété et l’inimaginable des situations qu’ont vécu les enfants qui sont
accueillis dans cette structure. »
Peut-il aussi interpeller les
parents ?
« Oui. Car ces histoires qui nous paraissaient inouïes nous donnent aussi des indications sur les enfants ordinaires. Les processus d’attachement,
d’identité ou ceux qui conduisent à
la violence prennent corps ou s’estompent selon que la réponse des
parents est angoissée ou apaisée. »
Pourquoi avoir choisi quinze cas
concrets ?
« Parce qu’ils illustrent autant de
thèmes. Le premier texte parle
des traumatismes gravissimes, le
deuxième évoque les enfants sauvages, etc. Je voulais aussi donner
une perspective dans le temps, ne
pas rester focalisé sur le traumatisme
et les difficultés de départ mais montrer comment l’enfant peut évoluer
malgré ses blessures. »
Expliquez-nous par exemple
le concept du «placenta
psychique» ?
« Les bébés séparés de leurs parents
ont besoin en permanence, jusqu’à
leur deux ou trois ans, d’être connectés à un adulte. Je les appelle les
bébés «wifi». Tous les enfants sont
comme ça. Généralement, on ne le
remarque pas, parce qu’ils sont avec
leurs parents ou leurs proches. C’est
plus flagrant chez ceux qui ne vivent
pas dans leur milieu naturel. Ils
cherchent à accrocher l’adulte par le
regard, l’attitude, parfois la voix. Un
enfant peut très bien ignorer sa mère
qui vient lui rendre visite au foyer
et fixer son regard sur n’importe qui
d’autre. Il a très vite compris qui lui
porte l’attention la plus sécuritaire.
Ça peut être lié au passé mais aussi
à l’attention du moment, si la mère
est angoissée alors que l’étranger est
plus accueillant et posé, présent sans
être envahissant. Ce phénomène est
assez extraordinaire. »
Que doit-on en retenir ?
« Que le plus important est de sauvegarder chez l’enfant sa capacité
d’attachement, sa capacité à faire
confiance à l’adulte. Boris Cyrulnik,
le pape de la «résilience», disait qu’un
enfant doit avoir connu un environnement aimant durant au moins
toute sa première année. Les bébés
qui arrivent à la pouponnière à trois
ou quatre mois sont insaisissables. Ils
sont dans une telle détresse relationnelle que même une intervention
bienveillante à leur égard est vécue
de façon persécutive. D’où l’importance de mettre très tôt en place un
accompagnement socio-éducatif. »
Angers, 5 février. Au K9, David Mailloc
Ent’raid ont remis un chèque aux Copain
L’ a s s o c i a t i o n a n g e v i n e
Ent’raid court pour soutenir les
enfants handicapés.
L’idée a pris corps en 2002, sur
l’île de la Réunion, à l’occasion de
la « Diagonale des fous » (traversée intégrale de La Réunion du
sud au nord, soit 163 km). David
Maillochon, président de l’association Ent’raid, s’en souvient comme
si c’était hier : « Là-bas, j’ai fait la
connaissance d’un coureur à pied
qui vendait ses kilomètres parcourus et reversait ses dons au Téléthon.
Et je me suis demandé pourquoi ne
referait-on pas la même chose… ».
Ent’raid, qui compte huit membres
aujourd’hui, voit ainsi le jour. Un
temps mise en sommeil, l’association a repris son élan l’année
f C’était il y a 50 ans.
de l’Ouest du 13 févrie
Angers, rue de Frémur, 9 février. Le Dr Daniel Rousseau, pédopsychiatre, intervient aussi depuis 20 ans au foyer
de l’enfance du Maine-et-Loire, baptisé « Village Saint-Exupéry ». Il raconte cette expérience dans un ouvrage intitulé
« Les grandes personnes sont vraiment stupides », disponible depuis jeudi en librairie. Photo CO - Jérôme HURSTEL.
Qu’essayez-vous d’apporter à ces
enfants ?
« Une grande qualité d’accueil et d’attention. Les enfants ne sont la propriété de personne même s’il subsiste, chez nous occidentaux, cette
idée curieuse selon laquelle l’enfant
est la seule propriété de ses parents.
On voit bien que la réalité a beaucoup changé avec les familles recomposées, l’adoption, les couples
homosexuels, la procréation médicale assistée, etc.. »
Que voulez-vous dire ?
« Il faut avoir beaucoup de respect
pour tous les parents que l’enfant a
en lui. Quelle que soit leur histoire. Ils
ont pu être indignes pour certaines
choses, pas forcément pour tout. Les
enfants confiés ont des parents qui
n’ont pas du tout conscience des
difficultés qu’ils ont infligées. On ne
peut pas demander à des gens qui
n’ont jamais connu le langage de
la tendresse et de l’attention d’apprendre à parler cette langue à leur
enfant. »
A quoi est dû « l’état calamiteux
de la protection de l’enfance en
France » que vous dénoncez ?
« La départementalisation a entraîné une désorganisation complète du
système. Il n’y a par exemple aucuns
travaux de recherche. Je suis un médecin libéral et c’est moi qui prends
l’initiative de mener une étude ! On
reprend les dossiers de 300 enfants
qui sont passés à la pouponnière il
y a 20 ans pour savoir ce qu’ils sont
devenus et établir des corrélations
entre le type des mesures auxquelles
ils ont été soumis et leur réinsertion.
Cette étude longitidunale est une
première en France. Mais ce sont des
équipes publiques qui devraient faire
ça ! Pour dire les choses crûment,
on ne sait pas trop ce qu’on fait
dans notre pays… En même temps,
comment voulez-vous qu’une administration soit à la fois prescripteur,
payeur et évaluateur ? »
Se désintéresse-t-on du sujet ?
« L’enfance malmenée est trop ignorée. Alors que ça devrait être
une priorité de santé publique. En
France, on chiffre la maltraitance à
un cas pour 1 000. Dans les autres
pays occidentaux, 10 cas pour 1 000.
Pourquoi nos statistiques sont-elles
dix fois moindres que celles des
Du 3 février au 31 mars 2012
Avant
travaux
autres pays ? Il y a quand même
300 000 enfants placés en France.
Dans notre département, 3 800 enfants sont suivis, dont la moitié sont
placés. C’est considérable. Notre
pays sous-estime complètement ce
sujet depuis qu’il est sorti du champ
sanitaire pour être traité uniquement
sous l’angle social qui ne représente
pourtant que la partie visible de ce
fléau. »
REPÈRES
Daniel Rousseau est né le 8 octobre
1956 au Mans. Il a 55 ans. Il est marié et père de trois enfants.
1973 : baccalauréat C au lycée
Sainte-Croix au Mans.
1986 : thèse de médecine à la faculté d’Angers. Thème : « Réflexions
sur le devenir psychologique des enfants de mères psychotiques ».
1986 : il ouvre en octobre son cabinet de psychiatre libéral, rue de la
Préfecture à Angers. Il exerce parallèlement dans le service de pédopsychiatrie du CHU d’Angers.
1988 : il intervient à la pouponnière
(enfants jusqu’à 4 ans) du Village
Saint-Exupéry, situé rue de Frémur à
Angers. Ce foyer géré par le Conseil
Général emploie 150 professionnels.
Il accueille 107 enfants de 0 à 14 ans
séparés de leurs parents, la plupart
du temps sur décision de justice.
2012 : il écrit « Les Grandes Personnes
sont vraiment stupides », un livre publié aux éditions Max Milo.
Dans la nuit de samedi à dimanche à 2 h
a eu lieu devant la permanence du Parti
Ce sont surtout les magasins voisins qui o
des vitres et des fenêtres ont volé en écla
sont venus dès le lendemain constater le
f En bref
Déchetterie. La Baumette, allée
du Seuil-en-Maine, et Villechien,
chemin de la Paperie sont
ouvertes de 9 heures à midi et de
14 heures à 17 heures.
Usagers de la Maine, la Sarthe
et la Mayenne. Le directeur
départemental des territoires
de Maine-et-Loire informe les
usagers qu’au vu du niveau
d’eau dans la Maine, le mouillage