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SAMEDI 24 JANVIER 2015 ASHLEY FRIPP MICHAEL PETROV PROGRAMME SAMEDI 24 JANVIER 2015 20H30 AMPHITHÉÂTRE Franz Schubert Sonate en la mineur « Arpeggione » D. 821 Johannes Brahms Klavierstücke op. 119 ENTRACTE Henri Dutilleux Trois Strophes sur le nom de Sacher César Franck Sonate pour violoncelle et piano en la majeur ASHLEY FRIPP, PIANO MICHAEL PETROV, VIOLONCELLE Ces artistes sont présentés par le Barbican Centre London. FIN DU CONCERT VERS 22H30. 2 FRANZ SCHUBERT (1797-1828) Sonate pour arpeggione et piano en la mineur D. 821 I. Allegro moderato II. Adagio – Allegretto Composition : novembre 1824. Durée : environ 25 minutes. L’on oublie souvent, tant elle sonne bien, que la Sonate D. 821 fut à l’origine composée par Schubert pour un instrument curieux, né l’année précédente : l’arpeggione, parfois appelé également guitare d’amour. Mélange de violoncelle (dans sa forme) et de guitare (par ses six cordes et ses frettes), celui-ci, inventé en 1823 par le luthier Johann Georg Stauffer, ne connut qu’une durée de vie très limitée, et la Sonate de Schubert reste la seule œuvre composée durant cette décennie à nous être parvenue. Dès son édition, en 1871, elle fut proposée dans une version avec violoncelle – comblant ainsi un vide, puisque Schubert n’a rien écrit pour cet instrument. Du désir originel de mettre en valeur les possibilités musicales de l’arpeggione, la Sonate garde des allures rhapsodiques et un éclat sonore séducteur ; Schubert se détourne de la sérieuse forme en quatre mouvements qu’il utilisera notamment dans les quatuors de la maturité ou les dernières sonates de piano et choisit une architecture ternaire qui rappelle celle des concertos (un genre que le compositeur n’a jamais abordé). C’est un ample Allegro moderato qui ouvre l’œuvre ; le premier thème, en la mineur, est d’abord présenté par le piano solo mais l’instrument à cordes le reprend presque aussitôt, lui conférant des teintes chaudes et lyriques. Un second thème vient bientôt apporter une touche de gaieté et de légèreté, avec ses doubles-croches, ses accents et ses notes répétées : voici exposé tout le matériau dont jouera avec gourmandise le développement et que reprendra la réexposition. Un Adagio central, 3 qui met en valeur le son de l’arpeggione/violoncelle dans un chant sans paroles (ou Lied ohne Worte, comme l’appellent nos voisins d’outreRhin) plein d’émotion, joue le rôle d’introduction à un finale d’une grande richesse thématique, dont la forme rondo – refrains et couplets – voyage d’une tonalité à l’autre (la majeur ou mineur, mi majeur, ré mineur…). ANGÈLE LEROY JOHANNES BRAHMS (1833-1897) Klavierstücke op. 119 I. Intermezzo. Adagio II. Intermezzo. Andantino un poco agitato III. Intermezzo. Grazioso e giocoso IV. Rhapsodie. Allegro risoluto Composition : mai-juin 1893. Durée : environ 16 minutes. Lorsqu’il inscrit, à l’été 1890, le point final de son second Quintette à cordes op. 111, Brahms estime avoir achevé sa carrière de créateur. À ses proches, il confie vouloir cesser la composition et se consacrer désormais à ses amis, à la lecture, aux voyages et aux promenades solitaires. L’année suivante, après avoir détruit des manuscrits considérés comme inaptes à la publication, il rédige à Ischl son testament. Il n’a alors que cinquante-sept ans. Son quotidien est endeuillé par la perte de nombreux proches : sa sœur Elise, ses amis Elizabeth von Herzogenberg et Theodore Billroth, la cantatrice Hermine Spies, le musicologue Philipp Spitta ou le chef d’orchestre Hans von Bülow. Il ne se produit plus ou peu en public et délaisse quelque peu la pratique de l’instrument, comme s’il se désinvestissait progressivement de tous les domaines où il avait excellé : « Il avait alors renoncé à tout concert et donc à tout travail régulier », rappelle Richard Specht, 4 son biographe, qui ajoute : « Sa technique était à la hauteur de toutes les difficultés rencontrées dans ses propres œuvres, mais elle n’était pas éblouissante ; il jouait souvent comme pour lui-même et était alors capable de marmonner dans sa barbe des choses raffinées sans y prêter la moindre attention. Son toucher était parfois dur lorsqu’il jouait fort, mais magiquement parfumé, mélodieux et riche de lumière et d’ombre dans les passages délicats. Il est certain que je n’ai jamais entendu jouer la musique de Brahms comme le créateur la jouait lui-même… Tout l’homme était dans l’exécution ». S’il revient heureusement sur sa décision et compose à nouveau, les œuvres conçues alors laissent entrevoir des teintes plus sombres. Les coups de théâtre et les revirements brusques sont bannis, les sommets intempestifs prohibés, les éclats condamnés. Les grandes formes sont abandonnées au profit de pièces miniatures au caractère intimiste. Brahms en publie plusieurs séries sous le titre neutre de Klavierstück (« Pièce pour piano »), comme s’il entendait se dégager de toute tradition, de toute référence à des genres chargés du poids de l’histoire. Les Klavierstücke op. 119 sont ainsi achevés à l’été 1893, alors que Brahms est en villégiature à Ischl. Ils ne sont pas groupés en cycle et ne bénéficient d’aucune ordonnance particulière, pas plus qu’ils ne révèlent d’unité tonale ou thématique. Ils bénéficient toutefois d’une étonnante unité expressive qui semble défendre leur interprétation séparée. Trois d’entre eux portent le titre d’Intermezzo, une dénomination singulière qui ne renvoie à aucune forme préétablie et dont la signification peut engendrer différentes interprétations, le mot désignant à la fois un divertissement mais aussi un élément qui se trouve « au milieu » ou dans un état de transition. La succession des pièces rappelle les formes mosaïques du romantisme, fondées sur une suite d’humeurs distinctes et dont le modèle est le Carnaval de Schumann ou les Variations en do mineur de Beethoven. Si le ton est adouci, l’ordonnance des pages montre une évolution menant de la rêverie vers une agitation croissante, qui vire à l’héroïsme dans la Rhapsodie finale. 5 Le recueil commence par une pièce en mineur fondée sur une succession de tierces doucement descendantes – « une page merveilleuse, si doucement triste en dépit de ses dissonances », selon Clara Schumann. En quelques mesures, le style du dernier Brahms est parfaitement défini : des dissonances raffinées qui instaurent une atmosphère nostalgique ; un ton intime fondé sur un refus du brio et une absence de contrastes ; des sommets brefs suivis de retombées immédiates dans les nuances douces ; une forme conçue sur le retour mais au sein de laquelle l’évolution permanente des idées donne le sentiment d’une avancée inéluctable du temps et d’une fin ainsi annoncée. Le deuxième intermède est une page inquiète et tourmentée, où le même thème est montré sous des éclairages continuellement changeants, allant jusqu’à prendre l’aspect d’une valse élégante et en majeur dans la partie centrale. Le retour au mineur, les vaines tentatives de moduler et l’absence de sommet emphatique laissent de nouveau la mélancolie dominer. Le troisième Intermezzo contraste par sa brièveté et son ton léger, au point de faire songer à un scherzo miniature. L’aspect gracieux laisse néanmoins deviner quelque blessure irréparable, comme si le sourire n’était qu’une façade. La dernière page renoue avec le ton héroïque des premiers opus, telles les sonates en do majeur et en fa mineur. La forme donne l’impression d’un rondo mais est en réalité beaucoup plus soignée, suggérant une structure en arche. Les épisodes sont enchaînés et semblent s’opposer par leur nature contradictoire, le premier sombre et désespéré, le second gracieux. Le refrain revient pour couronner l’ensemble, mais se pare d’harmonies mineures. Une coda au style orchestral préserve le sentiment de triomphe mais ajoute une dimension pathétique en insérant quelques chromatismes et en abandonnant définitivement le mode majeur. JEAN-FRANÇOIS BOUKOBZA 6 HENRI DUTILLEUX (1916-2013) Trois Strophes sur le nom de Sacher Composition : 1976-1982. Création : 28 avril 1982 à Bâle. Commande de Mstislav Rostropovitch, dédicataire de l’œuvre. Durée : environ 9 minutes. Personnalité dominante dans le contexte musical du XXe siècle, Paul Sacher anima pendant plus de cinquante ans l’Orchestre de Chambre de Bâle, faisant connaître et créant de nombreuses œuvres de musique contemporaine. Pour son soixante-dixième anniversaire, célébré le 2 mai 1976 à la Tonhalle de Zurich, Mstislav Rostropovitch demanda à douze compositeurs, dont Henri Dutilleux, d’écrire chacun une pièce pour violoncelle sur le nom de Sacher, c’est-à-dire sur les notes correspondant aux lettres de son nom dans la nomenclature germanique : mi bémol-la-do, si-mi-ré. En 1982, Henri Dutilleux donna un prolongement à son hommage en y ajoutant deux autres pièces : « Ces trois strophes sont nées d’un besoin et non d’une véritable commande. » Le violoncelle est un instrument privilégié dans l’œuvre de Dutilleux. Dans cette pièce, les deux dernières cordes sont accordées différemment de l’accord traditionnel, ce qui permet de prolonger le registre grave de l’instrument et d’agrandir l’espace sonore. Les trois strophes évoquent l’idée d’un poème, le retour des rimes étant assuré par le motif de six notes S-A-C-H-E-R. À la fin de la première strophe, on peut entendre une brève citation de la Musique pour cordes, percussion et célesta de Bartók, commandée et créée par Paul Sacher à Bâle en 1937. MICHEL RIGONI 7 CÉSAR FRANCK (1822-1890) Sonate pour violoncelle et piano – transcription de la Sonate pour violon et piano I. Allegretto ben moderato II. Allegro III. Recitativo-Fantasia. Ben moderato IV. Allegretto poco mosso Composition : 1886. Création : le 16 décembre 1886 à Bruxelles, par Mme Bordes-Pene au piano et Eugene Ysaye, son dédicataire, au violon. Durée : environ 30 minutes. La Sonate pour violon et piano fait partie, avec la Symphonie en ré mineur et Prélude, Choral et Fugue pour piano, des œuvres les plus connues de Franck ; elle illustre avec panache sa musique de chambre en poursuivant le chemin abordé avec le Quintette pour piano et cordes de 1879, avant l’ultime Quatuor à cordes de 1890. L’amour que portait le grand violoniste et compositeur Eugène Ysaÿe, dédicataire de l’œuvre, à cette partition n’est pas pour rien dans le succès qu’elle rencontra très vite. En effet, ce dernier, l’ayant reçue comme cadeau de mariage en 1886, ne cessa pas par la suite de l’interpréter. Cela valut à cette Sonate pour violon et piano une multitude de transcriptions : pour flûte, pour alto, pour tuba même, mais aussi pour violoncelle, et ce, dès avant la mort de Franck. L’arrangement du fameux violoncelliste Jules Delsart (qui fut suivi par bien d’autres pour le même instrument) reçut ainsi l’approbation du compositeur. Il donne à la Sonate une tonalité plus chaude encore et accentue ses contrastes par l’éventail des registres possibles. Le début de la sonate néglige le traditionnel tempo allegro pour un Allegretto ben moderato tout de douceur : texture aérée, balancements du violoncelle, soutien discret du piano et intervalle fondateur de tierce. Ces éléments et leurs variantes (voyez la belle reprise lors 8 de la réexposition, avec de délicats accords de piano parcourant le clavier) forment la plupart du matériau du mouvement, complétés d’un second thème en courbes déclives présenté par le piano seul. Le thème principal de l’Allegro suivant émerge peu à peu des grondements de piano, donné par les doigts intérieurs de la main droite. Cette torrentueuse virtuosité disparaît au détour d’une page pour une poignante mélancolie (pédale de fa, accords de piano quasi lento…), mais c’est pour mieux refaire surface, jusqu’à une coda électrique où les deux instruments se surpassent véritablement. Le Ben moderato qui suit porte bien son nom : Recitativo-Fantasia. Il retravaille des éléments motiviques déjà entendus dans une profonde émotion et une grande liberté, les complétant d’un très beau thème dramatico, ouvert sur une chute de sixte, que le finale nous donnera par deux fois à réentendre. Très imitatif, ce dernier Allegretto, fondé sur un refrain sans cesse transposé (la majeur, do dièse majeur, mi majeur, si bémol mineur…), présente un visage doucement souriant, dont l’apparente simplicité est rehaussée de cheminements harmoniques délicats où l’on reconnaît la patte de Franck. ANGÈLE LEROY 9 MICHAEL PETROV Gianandrea Noseda. Durant la saison 2014/2015, le violoncelliste est engagé pour des récitals dans huit grandes salles d’Europe suite à sa nomination comme « Rising Stars » par la European Concert Hall Organization (echo ). Ceci le mène à Amsterdam, Paris, Vienne, Athènes, Stockholm, Bruxelles, Budapest, Barcelone, Luxembourg, en Allemagne, au Portugal et en Grande-Bretagne. À Londres, il retrouve également la scène du Wigmore Hall et fait ses débuts avec le City of London Sinfonia au Cadogan Hall. Au cours de ses études, Michael Petrov a remporté divers prix et récompenses dont un 2e prix au Concours International Brahms en Autriche et un 1er prix en 2011 au Concours International Suggia de Porto, ce qui lui a valu le privilège de jouer le violoncelle de Montagnana ayant appartenu à Guilhermina Suggia. Passionné de musique de chambre, Michael Petrov a suivi le Séminaire International de Prussia Cove et, avec le Trio Isimsiz, été accueilli en résidence à Banff et Aldeburgh. Il a également participé à des master-classes au Mozarteum de Salzbourg. Michael Petrov joue un violoncelle de Testore (c. 1740) gracieusement prêté par un particulier. Né en Bulgarie en 1990, Michael Petrov s’est formé en GrandeBretagne à la Yehudi Menuhin School et, depuis 2009, à la Guildhall School of Music & Drama avec Louise Hopkins. Il a été sélectionné par la fondation Young Classical Artists Trust (ycat ) en 2013 et a remporté en 2014 la médaille d’or de la Guildhall suite à son interprétation du Concerto no 1 de Chostakovitch au Barbican Centre de Londres. Au cours de la dernière saison, Michael Petrov a fait ses débuts avec le Philharmonia Orchestra, le Royal Philharmonic Orchestra, l’English Chamber Orchestra et le Barbican Young Orchestra (dirigé par Edward Gardner), interprétant des concertos de Dvořák, Elgar, Haydn et Walton. On rappellera également le succès de ses récitals à Londres (Wigmore Hall, Purcell Room), aux festivals de violoncelle de Kronberg et de Los Angeles, ainsi qu’au Weill Hall du Carnegie Hall de New York. Il s’est produit en soliste avec des formations telles que l’Orchestre de Chambre de Munich ou les London Mozart Players et a interprété la Symphonie concertante de Prokofiev en 2013 au Barbican sous la baguette de 10 ASHLEY FRIPP cepor . Il s’est également produit dans les festivals d’Édimbourg, de Brighton, de Chipping Campden et au City of London Festival. Par ailleurs, il a été diffusé en direct sur des réseaux télévisés et radiophoniques comme la BBC, Euroclassical et Eurovision. Il a collaboré avec de nombreux chefs d’orchestre de renom dont Semyon Bychkov, Vasily Petrenko, James Judd, Robertas Šervenikas et Peter Stark. Ashley Fripp a étudié à la Purcell School et au Royal College of Music dans le département junior avec Emily Jeffrey. Il a récemment obtenu son master avec les honneurs à la Guildhall School of Music & Drama, où il s’est également vu attribuer un premier prix ainsi que le Prix Lord Mayor ; il prépare actuellement l’Artist Diploma avec Ronan O’Hora. Son enregistrement des Concertos pour piano no 1 et no 2 de Chopin vient de paraître chez Spektral Records. L’artiste tient à remercier les pianos Kawai pour leur généreux soutien. Le pianiste britannique Ashley Fripp s’est produit en récital, pour des concertos ou en musique de chambre dans de nombreuses salles prestigieuses de Grande-Bretagne. On a notamment pu l’applaudir à Londres (Royal Festival Hall, Queen Elizabeth Hall, Barbican, Wigmore Hall, Cadogan Hall), à Manchester (Bridgewater Hall) et à Birmingham (Symphony Hall). Ses derniers engagements l’ont également mené en Pologne, en France, en Allemagne, aux PaysBas, en Norvège, en Chine, au Japon, en Australie et aux ÉtatsUnis, comme au Carnegie Hall de New York et à l’Audimax de l’Université de Ratisbonne. Il s’est distingué dans plus d’une douzaine de concours nationaux et internationaux, remportant la médaille d’or de la Guildhall School of Music & Drama, le Diploma of Outstanding Merit au 8e Concours International de Piano d’Hamamatsu, le 1er prix au Concours International de Piano Brant de Birmingham, le Prince’s Price et la médaille d’argent de la Worshipful Company of Musicians, le 1er prix au Concours de Piano de la Royal Over-Seas League et le 3e prix au Concours européen 11 01 4 4 8 4 4 4 8 4 2 21 , AV E N U E J E A N - J A U R È S 7 5 019 PA R I S P O R T E D E PA N T I N P H I L H A R M O N I E D E PA R I S . F R