Renouvellement de la licence de télévision de Télétoon

Transcription

Renouvellement de la licence de télévision de Télétoon
Avis de consultation de radiodiffusion CRTC 2016-225
Renouvellement de la licence de télévision
de Télétoon
PRÉSENTATION ORALE
(La livraison fait foi)
Le 30 novembre 2016
2
INTRODUCTION
[Caroline]
Bonjour, monsieur le président, et membres du panel. Je m’appelle
Caroline Fortier et je suis la directrice générale de l’Association des
réalisateurs et réalisatrices du Québec (ARRQ). Je suis accompagnée de
Yves Légaré, directeur général de la Société des auteurs de radio,
télévision et cinéma (SARTEC).
L’univers
de
la
télévision
francophone
possède
ses
propres
caractéristiques. C’est un secteur nécessitant des mesures qui prennent en
considération son caractère distinctif.
NOUS SOMMES D’ACCORD AVEC UNE APPROCHE PAR GROUPE
Nous sommes d’accord avec le principe d’une approche par groupe au
renouvellement des licences des grands groupes de télévision du secteur
privé. Elle permet au Conseil et au public d’examiner l’ensemble des
services d’un groupe au même moment, et au Conseil d’harmoniser ses
exigences en matière de contenu canadien et d’émissions d’intérêt national
entre ces différents groupes. Cela dit, l’approche par groupe proposée
dans la politique réglementaire CRTC 2010-167 pour le milieu anglophone
doit être adaptée aux caractéristiques particulières de la télévision
francophone qui diffèrent de celles du milieu anglophone.
3
Considérant, entre autres, la variabilité dans les dépenses sur les
émissions canadiennes (DÉC) et dans les émissions d’intérêt national
(ÉIN) diffusées par les services francophones de chaque groupe, nous
proposons des exigences au cas par cas. Ainsi, nous nous opposons aux
transferts de crédits de chaîne en chaîne comme prévus dans la politique
réglementaire 2010-167 et nous recommandons une approche distincte
pour l’ensemble des services de langue française.1
Aujourd’hui, notre intervention ne concerne que le renouvellement de la
licence en lien avec le service facultatif de langue française, Télétoon.
Dans ses demandes de renouvellement, Corus Entertainment propose de
regrouper les services facultatifs de langue française Historia et Série+
dans un groupe désigné comprenant uniquement ces deux services. Les
deux services anglais et français de Télétoon conserveraient une seule
licence et demeureraient dans le groupe désigné de langue anglaise de
Corus. En fait, dans sa présentation, Corus ne fait aucune distinction entre
Teletoon anglais et Télétoon français tout en maintenant que les deux
chaînes devraient demeurer sous la rubrique d’un seul service « bilingue ».
Selon la proposition de Corus, 91 % des obligations en matière de DÉC
concernant Télétoon français pourrait être transférée à Télétoon anglais, à
tout autre service de langue anglaise de Corus (Cartoon Network,
Nickelodeon, YTV, Disney Channel, Disney Junior, Disney XD, etc.), ou
même aux stations de télévision Global!2 C’est pourquoi nous nous
1
Selon l’approche par groupe publiée dans la politique 2010-167, entre autres, un maximum de 25 %
des DÉC exigées des services de télévision généraliste peut être alloué à un service spécialisé faisant
partie du même groupe désigné. Nous serions plus ouverts au concept de transferts de crédits si cet
élément de la politique était supprimé et le Conseil ne permettait aucun transfert de TVA ou des stations
V vers leurs stations privées.
2
Toute obligation à l’exception du 9 % que nous mentionnons plus loin dans cette présentation.
4
opposons aux transferts de crédits de chaîne en chaîne dans le cas de
Télétoon.
TÉLÉTOON/TELETOON DEVRAIENT ÊTRE SCINDÉ EN DEUX
L’ARRQ, la SARTEC et l’UDA considèrent que Télétoon français et
Teletoon anglais devraient être scindés en deux services et que le
Télétoon de langue française devrait être assujetti à des exigences
réglementaires comparables à celles présentement en vigueur pour les
deux ensembles.
D’après le paragraphe 56 de la décision CRTC 2013-737 approuvant la
prise de contrôle des deux services de Télétoon par Corus, Corus s’est
engagée à accepter l’imposition d’une condition de licence exigeant le
maintien de la séparation entre le personnel décisionnel responsable de la
programmation de Télétoon et de ses autres services, en plus de garder
son bureau de Montréal responsable du signal de langue française de la
programmation originale de Télétoon. Corus n’a pas respecté cet
engagement. Aujourd’hui, la programmation de Télétoon français est
établie dans les bureaux de Corus à Toronto et, par conséquent, tous les
documents en rapport avec le renouvellement de sa licence ont été
disponibles uniquement en version anglaise. Corus affirme que « The
maintenance of separate decision-making personnel is not required in an
environment where genre exclusivity has been eliminated. » En fait, il n’y a
aucun lien entre le maintien d’un personnel décisionnel responsable de la
programmation de langue française à Montréal et l’abolition de l’exclusivité
de genres par le Conseil.
5
[Yves]
À l’heure actuelle, les deux chaînes de Télétoon continuent à être très
rentables, leur marge BAII dépassant de façon importante la moyenne des
services spécialisés et payants anglophones et bilingues.3 Et la part de
marché de Télétoon français dans l’ensemble des services francophones
tourne autour de 2,3 à 2,5 % ce qui témoigne de l’excellente écoute dont
elle jouit. Par le passé, Télétoon a souvent prétendu qu’il n’était pas un
service pour enfants et la démographie de son auditoire le confirme. Rien
dans l’actuelle définition de sa nature de service n’indique que Télétoon
soit orienté vers les enfants ou la jeunesse (voir la condition 1 de l’annexe
3 de la décision CRTC 2013-737). Depuis ses origines dans la décision
CRTC 96-598, Teletoon/Télétoon se définit comme un service pour tous.
Selon la réplique aux interventions de Corus, ce n’est pas la rentabilité des
services francophone et anglophone qui constitue un obstacle à leur
séparation, mais les défis associés à la production et à la création du
contenu animé en français. Or, advenant la séparation de ces deux
services, rien n’empêche la mise en commun de ressources en ce qui
concerne le financement d’émissions et de frais partagés. Les producteurs
pourraient continuer à vendre leurs projets aux deux services comme ils le
font aujourd’hui. Ce que Corus semble vouloir éviter, c’est de se départir
des économies d’échelle et des coûts moindres inhérents à l’offre de deux
services spécialisés intégrés et basés à Toronto, diffusant presque
uniquement de la production originale anglaise aux dépens d’un service
3
Voir le graphique 1 à la fin du présent document.
6
distinct en français. Pourtant, elle a les moyens de mettre sur pied un
véritable service francophone autonome de qualité qui fonctionne bien pour
les créateurs de langue française. Ce n’est pas le cas à l’heure actuelle.
Lors de l’instance menant à la décision CRTC 2013-737 (Astral-Corus),
Corus a proposé une exigence en DÉC de 31 % pour Télétoon qui
correspondait, selon elle, aux exigences en DÉC harmonisées pour les
autres services spécialisés de catégorie A au sein de son groupe désigné.
Dans la décision ultime, le Conseil a imposé une condition de licence
exigeant 34 % de DÉC. Or, à l’heure actuelle, Corus propose de fixer à
26 % l’exigence moyenne de groupe en matière de DÉC, ainsi qu’à 27 %
les exigences individuelles en matière de DÉC pour ses stations de
télévision et ses services facultatifs de langue anglaise, dont Télétoon.
Parallèlement, en 2013 Corus proposait que le Conseil établisse pour
Télétoon une exigence de dépenses en ÉIN de 26 % et dans la décision
2013-737, le Conseil a imposé cette exigence. Aujourd’hui, Corus propose
de fixer l’exigence minimale du groupe à seulement 5 %, sans aucune
obligation particulière pour Télétoon.
Considérant la rentabilité de Télétoon et l’importance de la production
originale de langue française pour la télévision francophone, l’ARRQ, la
SARTEC et l’UDA recommandent un seuil de DÉC de 34 % et un seuil de
dépenses sur les ÉIN de 26 % comme le Conseil les a imposés dans la
7
décision 2013-737, ces exigences devant s’appliquer à la chaîne Télétoon
de langue française à elle seule.4
Nous proposons également de retenir au cours de la prochaine période de
licence, à tout le moins les conditions actuelles de la décision 2013-737
telles qu’amendées et présentées dans notre intervention écrite du 15 août
dernier. Cela comprendrait une condition voulant que le titulaire consacre à
l’investissement dans des émissions canadiennes (DÉC) de langue
française ou à leur acquisition au moins 9 % des revenus bruts de l’année
précédente de l’entreprise.5 À l’heure actuelle, les émissions d’animation
diffusées à Télétoon français sont produites presque uniquement en
anglais.6 Pour les services francophones, une obligation en matière de
dépenses sur les émissions canadiennes ne signifie pas grand-chose, à
moins qu’elle soit assortie d’une obligation minimale de diffuser
d’émissions originales en langue française.
[Caroline]
L’ARRQ, la SARTEC et l’UDA visent à assurer une transition favorable à la
pérennité de notre télévision. Si le Conseil croit que le paysage audiovisuel
se transforme aussi rapidement que les requérants le prétendent, il devrait
renouveler la licence des deux Télétoon pour une période n’excédant pas
trois ans.
4
Voir le tableau 1 en annexe qui résume les propositions de Corus et de l’ARRQ-SARTEC-UDA (ASU).
Selon le libellé de l’actuelle condition de licence, ces dépenses (le 9 %) ne peuvent être comptabilisées
afin de satisfaire aux obligations de tout autre service du groupe Corus.
6
« L’enregistrement se fait toujours en anglais. » Voir le témoignage de Corus au paragraphe 2318 de la
transcription de l’audience publique du Conseil du 23 novembre 2016.
5
8
Monsieur le président, cela complète notre présentation. C'est avec plaisir
que nous répondrons à toute question que vous voudriez nous poser.
ANNEXE
Graphique 1
Télétoon-Teletoon, marge B.A.I.I., 2011-2015 (%)
pourcentage (%)
50
46,7
41,8
45,6
40
30,2
24,8
30
24,8
23,7
25,8
2011
2012
2013
20
24,6
22,9
10
0
Télétoon-Teletoon
2014
2015
spécialisés et payants anglais/bilingues
Source : CRTC Relevés statistiques et financiers 2015
Tableau 1
Seuil de
DÉC
actuel (%)
Télétoon
34
Seuil de
Seuil de DÉC
DÉC
proposé par
proposé ARRQ/SARTEC/
par Corus UDA (ASU) (%)
(%)
27
34
Seuil de
Seuil de
Seuil de
dépenses
dépenses
dépenses
sur ÉIN
sur ÉIN
sur ÉIN
actuel (%) proposé par proposé par
Corus (%)
ASU (%)
26
5
26