2e partie
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2e partie
Partie 2 : L’énergie nucléaire I La structure de l’atome 1. Le modèle de Rutherford 2 2. Les particules élémentaires 6 3. Principe de structuration des atomes 7 3.1 Les nucléides 3.2 Eléments chimiques 3.3 Isotopes Exercices 7 8 11 12 II La radioactivité 1. Généralités 14 1.1 Historique 1.2 Définition 1.3 Origine de la radioactivité 1.4 Mise en évidence de la radioactivité 2 Les différentes formes de désintégration 2.1 Désintégration alpha(α) 2.2 Désintégration bêta moins (β-) 2.3 Emission gamma (γ) Exercices 2.4 Le temps de demi-vie ou période Exercice 14 15 15 16 17 17 18 19 20 21 22 POUR EN SAVOIR PLUS : 1. Désintégrations «capture d’électrons» et «bêta plus»23 2. Les règles de stabilité des nucléides 24 III La fission nucléaire La réaction de fission de l’uranium 235 26 La réaction en chaîne 28 La centrale nucléaire 30 POUR EN SAVOIR PLUS : L’enrichissement de l’uranium POUR EN SAVOIR PLUS : La tour de refroidissement POUR EN SAVOIR PLUS : Les déchets radioactifs Recherche 31 32 33 35 Énergie nucléaire I. La structure de l’atome Comme les carburants fossiles, la technologie nucléaire joue un rôle important dans la production d’énergie. Contrairement à l’exploitation des ressources fossiles, l’énergie nucléaire a toujours constitué un des sujets de discussion les plus controversés, vu le danger de la contamination radioactive. Le chapitre ci-contre propose une étude détaillée qui vous permettra de comprendre les notions en relation avec cette forme d’énergie. 1. Le modèle atomique de Rutherford En classe de cinquième, on vous a présenté le modèle particulaire de l’atome. Ce modèle a permis d’expliquer différentes observations comme par exemple celle des propriétés des états de la matière. La découverte de la radioactivité par Becquerel en 1896 a préparé le terrain pour des investigations plus poussées dans le domaine des modèles atomiques. La plus célèbre de ces expériences a été effectuée par le physicien anglais Ernest Rutherford. 1.1 L’expérience de Rutherford Une source radioactive émettant des particules α est placée dans un bloc en plomb doté d’un étroit canal de sortie. Les particules α émises par la source radioactive ne peuvent pas traverser le plomb : elles sortent donc en mince faisceau par ce canal. Une feuille en or très mince (0,004mm, ce qui correspond à environ 1000 couches d’atomes) est placée dans le faisceau de particules α. Autour de la feuille en or est disposé un film photographique. Ce dernier permet de déterminer la trajectoire des particules α, car celles-ci noircissent le film photographique à l’endroit de leur impact. Feuille en or Bloc en plomb avec source radioactive Trajectoire des particules α renvoyées Vide Trajectoire des particules α non-déviées Trajectoire des particules α déviées Film photographique 2 Énergie nucléaire I. La structure de l’atome Le montage expérimental est hermétiquement fermé et mis sous vide (pour minimiser les collisions des particules α avec les molécules de l’air). Après quelques semaines, le film photographique est développé. Il se présente de la façon suivante : Nous observons : • une tache foncée au milieu du film, directement vis-à-vis de l’ouverture du bloc en plomb. Un très grand nombre de particules α ont heurté le film photographique à cet endroit. Nous pouvons donc conclure que la plupart des particules α ont traversé la feuille en or en ligne droite. • des points noirs répartis sur l’ensemble du film photographique. Une petite partie des particules α a donc été fortement déviée, voire reflétée en arrière au contact de la feuille en or. Au vu de ces résultats, Ernest Rutherford a constaté : « It is like shooting against a ghost... » 1.2 Interprétation et modèle Comment interpréter les observations faites ? • La plupart des particules α traversent la feuille en or en ligne droite. Ainsi, nous pouvons conclure que ces particules n’ont pas rencontré d’obstacle au passage à travers l’atome. Ceci est en désaccord avec les modèles atomiques de Dalton et de Thomson qui imaginaient l’atome comme une sphère de matière compacte. Or tel ne peut pas être le cas, comme la plupart des particules α ont traversé les atomes en ligne droite. Ainsi, ces modèles atomiques ne sont plus valables et le développement d’un nouveau modèle sur base des observations citées devient une nécessité. Comme la plupart des particules α n’ont pas rencontré d’obstacle lors du passage à travers les atomes, il faut conclure que l’atome n’est pas compact, mais essentiellement constitué de vide. 3 Énergie nucléaire I. La structure de l’atome Modèles atomiques: Modèle de Dalton Sphère compacte Modèle de Thomson Sphère compacte chargée positivement contenant des électrons Modèle de Rutherford Noyau minuscule chargé positivement entouré d’un cortège électronique Quelques particules α (chargées positivement) ont été fortement déviées voire renvoyées en arrière à la rencontre des atomes d’or. Il faut donc qu’ils aient rencontré un obstacle se trouvant à l’intérieur de l’atome. Quant à la nature de cet obstacle on peut tirer trois conclusions: Premièrement, il est très petit car seule une petite partie des particules α l’ont heurté. Deuxièmement, il doit être chargé positivement car il dévie voire renvoie les particules α, qui sont eux aussi chargées positivement. Finalement, il est très massif, comme il est capable de dévier les particules α sans pour autant être délocalisé lui-même. Rutherford en conclut que : L’atome est constitué essentiellement de vide, mais il existe à l’intérieur de l’atome un obstacle massif, de très petite taille qui est chargé positivement. Cet obstacle est appelé le « noyau atomique ». La charge positive du noyau est neutralisée par la charge négative des électrons. Les électrons constituent le cortège électronique autour du noyau. Noyau Cortège électronique Ce modèle permet d’expliquer les résultats de l’expérience : Feuille en or 4 Énergie nucléaire I. La structure de l’atome La majeure partie des particules α traverse la feuille en or sans rencontrer de noyau atomique : elles traversent la feuille en ligne droite. • Certaines particules α passent à proximité d’un noyau atomique. Comme les particules α et le noyau atomique sont chargés positivement, des forces de répulsion s’exercent entre elles : les particules α sont déviées. • Quelques particules α heurtent directement un noyau atomique : elles sont renvoyées en arrière à cause des forces de répulsion. En déterminant le rapport entre les particules α déviées et les particules α qui passent en ligne droite, on peut estimer la taille du noyau : le diamètre du noyau atomique est environ 100000 fois inférieur au diamètre de l’atome. Pour bien nous rendre compte de cette différence de taille, imaginons que nous pouvons agrandir un atome à la taille de la Tour Eiffel : le noyau atomique aurait alors la taille d’un noyau de cerise, et il serait situé au niveau du deuxième étage. La taille d’un atome est de l’ordre de 10-10m. Pourquoi les électrons chargés négativement ne tombent-ils pas sur le noyau chargé positivement? Pour expliquer ceci, on admet que les électrons tournent à grande vitesse autour du noyau. Ainsi, ils sont soumis à une force centrifuge qui s’oppose à la force d’attraction du noyau : les électrons sont en équilibre sur leur orbite, ils restent en mouvement à une certaine distance du noyau. F attraction F centrifuge 5 Énergie nucléaire I. La structure de l’atome 2. Les particules élémentaires Nous savons que les électrons sont les porteurs de la charge élémentaire négative. Mais quels sont maintenant les porteurs de la charge positive? En 1919, Rutherford a découvert un des constituants du noyau atomique : le proton, porteur de la charge élémentaire positive (analogue à l’électron, porteur de la charge élémentaire négative). Or, un noyau ne peut pas être constitué uniquement de protons. En effet, deux ou plusieurs protons se repoussent à cause des forces de répulsion entre charges positives. Ainsi, il faut qu’il y ait dans le noyau atomique un deuxième type de particules qui séparent les protons, garantissant ainsi la stabilité du noyau. Cette particule, dont l’existence a été prouvée expérimentalement en 1932, est appelée le neutron. Le neutron n’a pas de charge électrique. Représentation d’un atome selon le modèle de Rutherford. Le noyau, composé de protons (rouge) et de neutrons (blanc), est représenté de façon agrandie à droite Nous connaissons maintenant les 3 particules qui constituent l’atome : l’électron, le proton et le neutron. Ces particules sont encore appelées « particules élémentaires ». On appelle particules élémentaires les particules les plus simples qui interviennent dans la structure de l’atome. Tableau récapitulatif indiquant les caractéristiques des particules élémentaires : électron neutron proton symbole e- n0 p+ charge relative -1 0 +1 charge absolue - 1,6 10-19 C 0 + 1,6 10-19 C masse relative 0 1 1 masse absolue 9,1 10-31 kg 1,67 10-27 kg 1,67 10-27 kg Les protons et les neutrons forment le noyau, voilà pourquoi on les appelle encore nucléons. 6 Énergie nucléaire I. La structure de l’atome 3. Le principe de structuration des atomes Le principe de structuration des atomes est basé sur le nombre de particules élémentaires. Tous les atomes sont composés des mêmes particules élémentaires. La différence entre atomes distincts est uniquement due au nombre de ces particules. L’atome le plus simple est constitué d’un proton et d’un électron (atome 1). Exemples d’atomes : (rouge : proton ; blanc : neutron ; bleu : électron) Remarque : Pour des atomes neutres, le nombre d’électrons est toujours égal au nombre de protons. 3.1 Les nucléides La masse d’un nucléide est déterminée par le nombre de particules élémentaires constitutives. Un nucléide est un type d’atomes défini à la fois par le nombre de protons et le nombre de neutrons. 7 Énergie nucléaire I. La structure de l’atome Masse des nucléides représentés : Nombre nucléons Nucléide Masse relative protons neutrons « atome 1 » 1 0 1 « atome 2 » 1 1 2 « atome 3 » 2 1 3 « atome 4 » 2 2 4 « atome 5 » 3 3 6 « atome 6 » 4 5 9 La masse relative d’un nucléide est appelée nombre de masse A. Le nombre de masse A exprime la masse relative d’un nucléide. Comme pour les particules élémentaires, c’est une valeur de comparaison sans unité. Remarque: Il y a une légère différence entre le terme «nucléide » et « atome ». Le mot « nucléide » se réfère surtout au noyau (utilisé en physique nucléaire) alors que le mot « atome » (utilisée en chimie) englobe aussi les électrons. La masse des deux est identique puisqu’on attribue la masse zéro aux électrons. 3.2 Éléments chimiques Tous les atomes ayant le même nombre de protons font partie du même élément chimique. Le nombre de protons, aussi appelé nombre atomique, est indiqué par le symbole Z. Exemples : Atome Z neutrons A Élément chimique Atome 1 1 0 1 hydrogène (H) Atome 2 1 1 2 hydrogène (H) Atome 3 2 1 3 hélium (He) Atome 4 2 2 4 hélium (He) Atome 5 3 3 6 lithium (Li) Atome 6 4 5 9 béryllium (Be) 8 Énergie nucléaire I. La structure de l’atome On représente les atomes par le symbole chimique de l’élément en indiquant Z en bas à gauche et A en haut à gauche. Remarque : - Le nombre de neutrons peut être facilement déduit de la différence du nombre de masse et du nombre de protons. (N=A-Z) - Le numéro atomique Z peut être omis, puisqu’il est lié à la nature de l’élément qui est déjà indiqué par le symbole. Le numéro atomique Z correspond au numéro de la case du tableau périodique des éléments. Z augmente d’une unité en passant d’une case à l’autre, ce numéro est aussi appelé numéro d’ordre. Souvent, ce nombre est indiqué en bas de la case. Exemple : Le numéro atomique Z du fer (Fe) vaut 26. Tableau périodique des éléments: violet: métaux; bleu: métaux de transition; vert; lanthanides et actinides; rouge: semi-métaux; orange clair: non-métaux; orange foncé: gaz rares 9 Énergie nucléaire I. La structure de l’atome Liste des éléments importants pour chimistes débutants Nom français Nom allemand symbole Exemple aluminium Aluminium Al utilisé comme papier aluminium argent Silber Ag utilisé en joaillerie azote Stickstoff N gaz formant 80% de l’atmosphère brome Brom Br contenu dans gaz lacrymogène calcium Kalzium Ca élément essentiel dans les os carbone Kohlenstoff C élément principal du charbon chlore Chlor Cl utilisé comme désinfectant chrome Chrom Cr utilisé pour armatures sanitaires cuivre Kupfer Cu utilisé pour câbles électriques étain Zinn Sn utilisé comme métal de soudure fer Eisen Fe métal important en construction fluor Fluor F constituant des dentifrices hélium Helium He utilisé comme gaz pour ballons hydrogène Wasserstoff H utilisé dans piles à combustible iode Iod I utilisé pour la prévention du goitre manganèse Mangan Mn métal utilisé dans alliages durs magnésium Magnesium Mg élément essentiel pour la musculation mercure Quecksilber Hg contenu dans des ampoules lumineuses nickel Nickel Ni utilisé dans pièces de monnaie néon Neon Ne utilisé dans des tubes lumineux or Gold Au utilisé en joaillerie oxygène Sauerstoff O gaz respiratoire phosphore Phosphor P utilisé dans les engrais platine Platin Pt utilisé en thérapie anti-tumorale plomb Blei Pb présent dans accumulateur des voitures plutonium Plutonium Pu fabrication de la bombe atomique potassium Kalium K utilisé dans les engrais silicium Silizium Si utilisé dans des circuits intégrés sodium Natrium Na contenu dans le sel de cuisine soufre Schwefel S utilisé pour la fabrication de pneus uranium Uran U production d’énergie zinc Zink Zn utilisé pour la fabrication de gouttières 10 Énergie nucléaire I. La structure de l’atome 3.3 Isotopes La nature d’un élément chimique est définie par le nombre de protons. Cependant le nombre de neutrons peut varier dans certaines limites. Exemple : L’élément chlore est composé des atomes suivants : 35 Cl (75%) ; 37 Cl (25%) On appelle isotopes tous les atomes qui font partie du même élément chimique et qui se distinguent uniquement par le nombre de neutrons. Dans un échantillon de 100 atomes de chlore, 75 contiennent 18 neutrons (35-17) et 25 atomes en contiennent 20 (37-17). Ces atomes sont appelés isotopes (du grec « iso », même ; « topos », endroit). Les isotopes d’un élément sont tous regroupés dans la même case du tableau périodique des éléments puisqu’ils font partie du même élément chimique. La masse de l’élément chimique, indiquée dans le TPE, est ainsi la moyenne pondérée des masses des isotopes : (P1 · A1) + (P2 · A2) + … + (Pn· An) Masse atomique de l’élément = 100 35,5 Cl = (75 ∙ 35) + (25 ∙ 37) = 35,5 100 17 D’un point de vue chimique, il n’y a guère de différence entre les isotopes d’un même élément. L’étude du rapport entre les deux isotopes du carbone 12C et 13 C permet de déterminer l’origine naturelle ou synthétique de différents arômes, comme par exemple celui de la vanilline. 11 Énergie nucléaire I. La structure de l’atome Schéma récapitulatif : Extrait du tableau périodique indiquant les isotopes du silicium et du soufre Exercices 1. Calcul du nombre de particules 1.1. Indiquez le nombre de particules élémentaires pour les atomes suivants. Indiquez aussi le nom de l’élément. 24 Mg ; 108Ag ; 12C ; 37Cl ; 127I ; 39K ; 2H ; 28Al 1.2. Trouvez le nombre de neutrons pour les isotopes du silicium et du soufre indiqués dans le tableau récapitulatif ci-dessus. 1.3. Indiquez le nombre de particules élémentaires de l’atome et le nom de l’élément à l’aide des informations suivantes: a. A = 31 ; Z = 15c. c. A = 60 ; 32 n0 b. d. Z = 26 ; 31 n0 atome neutre ; 53 e- ; 74 n0 2. Composition isotopique Calculez la masse des éléments suivants en connaissant leur composition isotopique. a. 28 Si : 92,23% 29 Si : 4,67% 30 Si : 3,10% b. 46 Ti : 8,0% Ti : 7,3% 48 Ti : 73,8% 49 Ti : 5,5% 50 Ti : 5,4% 47 12 Énergie nucléaire I. La structure de l’atome Exercices 3. Atomes, nucléides et isotopes Ce sont des … Donnez à chaque série de symboles l’un des noms suivants : atomes, nucléides, isotopes ou éléments (plusieurs noms par série possibles) 24 Mg ; 25Mg ; 26Mg 6,9 Li ; 32,1S ; 40,1Ca 118 Sn ; 40K ; 19F 4. Mots croisés Mots croisés à résoudre à l’aide du T.P.E. 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. élément dont le nombre atomique est 29 élément du 6e groupe principal et de la 3e période élément du 7e groupe principal et de la 5e période élément dont les atomes renferment 12 protons dans leur noyau élément du 4e groupe principal et de la 6e période élément de la 4e période dont le corps simple est un liquide élément dont un atome neutre renferme 25 électrons élément dont les atomes renferment 15 protons dans leur noyau 9. élément dont le nombre atomique est 47 10. élément dont un atome neutre renferme 13 électrons 11. gaz rare de la 2e période 12. métal alcalino-terreux de la 4e période 13. halogène de la 2e période 14. élément du 5e groupe principal et de la 2e période 15. métal alcalin de la 3e période 16. élément dont les atomes renferment 78 protons dans leur noyau 17. élément dont le nombre atomique est 6 18. métalloïde de la 3e période 19. non-métal du 1er groupe 20. élément dont un atome neutre ferme 80 électrons 13 Énergie nucléaire II. La radioactivité Remarque: la partie suivante ne figure pas au programme de la classe de 4ème. Veuillez noter que certaines photos sont soumises à des droits d’auteurs. Une publication de cette partie nécessite donc la permission de l’auteur en question. 1. Généralités 1.1 Historique En 1896 Henri BECQUEREL, physicien français, a découvert la radioactivité. Dans un tiroir, Becquerel a posé par hasard des plaques photographiques emballées à côté d’un échantillon de sel d’uranium. Bien que les plaques aient été à l’abri de toute source lumineuse, elles avaient légèrement noirci. Becquerel a conclu que le sel d’uranium émettait des radiations capables de traverser l’emballage et d’impressionner la couche photographique. Après cette découverte, la chimiste polonaise Marie SKLODOWSKA et son époux français, le physicien Pierre CURIE, ont découvert deux éléments inconnus jusque-là, le radium et le polonium, émettant des radiations plus fortes que celles émises par l’uranium. Ils ont appelé cette propriété d’émettre des radiations, la radioactivité (du latin : radius, le rayon). polonium (d’après la Pologne, le pays natal de Marie Curie) radium (de radioactivité) Deux ans plus tard, Ernest RUTHERFORD a découvert que le rayonnement émis par les corps radioactifs pouvait être subdivisé en trois différents types de radiations. En exposant le rayonnement à un champ électrique, Rutherford a identifié les radiations suivantes: - les rayons alpha α chargés positivement les rayons bêta β chargés négativement les rayons gamma γ de charge nulle Déviation des rayons α, β et γ dans un champ électrique 14 Énergie nucléaire II. La radioactivité 1.2 Définition La radioactivité est un phénomène spontané lors duquel les nucléides instables se transforment par diverses formes de désintégrations en nucléides plus stables en émettant des radiations. 1.3 Origine de la radioactivité Il y a 13,7 milliards années, l’Univers est né. D’après les théories récentes, une énorme explosion, appelée « Big Bang », était à l’origine de la création de la matière. Au fur et à mesure, les particules élémentaires ont apparu. Les protons et les neutrons se sont associés pour former les premiers nucléides. Il s’agissait essentiellement des éléments les plus légers, l’hydrogène et l’hélium. Ce n’est que des millions d’années après le Big Bang, que les nucléides d’éléments plus lourds ont pu être formés. On distingue 2 types de nucléides : - les nucléides stables : les noyaux de ces nucléides sont stables et n’ont pas subi de transformation depuis leur création. Il s’agit de la plupart des nucléides d’éléments non radioactifs. - les nucléides instables : certains nucléides formés n’étaient pas stables. Depuis le moment de leur formation, ils se désintègrent plus ou moins vite, ce qui conduit tôt ou tard à leur disparition. (voir temps de demi-vie) Ainsi dans les 13,7 milliards années suivant le Big Bang, différents nucléides instables ont déjà disparu. Néanmoins, les scientifiques ont réussi à « recréer » certains de ces nucléides de façon artificielle. Il s’agit entre autres de tous les nucléides des éléments transuraniens (Z>92). La radioactivité liée à leur désintégration est appelée radioactivité artificielle. De l’autre côté, certains nucléides se sont désintégrés si lentement, qu’on les retrouve encore à notre époque. Les exemples les plus connus sont, sans doute, les nucléides de l’élément uranium. Dans ce cas on parle de la radioactivité naturelle. 15 Énergie nucléaire II. La radioactivité Tableau périodique des éléments indiquant la stabilité et la nature des nucléides principaux 1.4 Mise en évidence de la radioactivité La chambre de Wilson La chambre de Wilson, aussi appelée chambre à brouillard, est constituée d'un récipient contenant de l'air saturé en vapeur d'alcool refroidi. Lorsqu'une source radioactive est placée à l'intérieur de la chambre, on voit apparaître dans la vapeur des traits de gouttelettes d'alcool sur la trajectoire des radiations. La chambre de Wilson permet donc de « visualiser » les rayonnements. image obtenue dans la chambre de Wilson Le compteur Geiger-Müller Le compteur Geiger-Müller est un instrument de mesure qui permet de mettre en évidence un grand nombre de rayonnements (alpha, bêta, gamma). L’appareil compte les désintégrations dont le nombre est affiché sur un écran digital et souvent signalé par des bips sonores caractéristiques. 16 Énergie nucléaire II. La radioactivité 2. Les différentes formes de désintégration 2.1 Désintégration alpha(α) Cette désintégration est réservée aux nucléides lourds et est due à un excès de nucléons. Pour y remédier, le nucléide éjecte un noyau d’hélium qui constitue la particule alpha. Exemple : Le polonium 210 (Z=84) se désintègre par perte d’une particule alpha. Il se transforme en plomb 206 (Z=82). 4 2 210 84 He Po 206 82 On note : 210 84 Po 206 82 Pb 4 2 Pb He Au cours de chaque désintégration alpha: - le nombre de masse diminue de 4 unités pour le nucléide formé - le nombre de protons diminue de deux unités, la nature de l’élément change Remarque : • la somme des nombres de masse et des numéros atomiques du nucléide formé et de la particule alpha est identique au nombre de masse du nucléide instable initial. (206+4=210 ; 82+2=84) • il ne faut pas confondre une désintégration nucléaire avec une réaction chimique ! Une désintégration nucléaire touche la structure du noyau ce qui change la nature de l’élément. Par contre, une réaction chimique conduit uniquement à un réarrangement d’atomes pour former des corps chimiques différents. La structure des noyaux n’est pas modifiée. 17 Énergie nucléaire II. La radioactivité Caractéristiques des particules alpha : Les particules alpha ont un pouvoir faiblement pénétrant. Une feuille en papier peut arrêter ces particules. Par contre, il existe un grand risque d’irradiation en cas d’ingestion de nucléides émettant des particules alpha. Ceux-ci peuvent endommager de façon définitive les tissus avoisinants. Le rayonnement alpha des éléments naturels (p.ex. uranium) contribue à la production de chaleur dans l’écorce terrestre. Le nucléide 241Am qui émet des particules alpha est utilisé dans les détecteurs de fumée. 2.2 Désintégration bêta moins (β-) Ce mode de désintégration se produit lors d’un excès de neutrons. Un neutron se transforme en proton et en électron. Le nombre de neutrons dans le noyau du nucléide instable est réduit d’une unité, le nombre total de nucléons reste constant. L’électron éjecté constitue la particule bêta. n0 → p+ + eneutron électron 14 6 proton C 14 7 N On note : 14 6 C 14 7 N 0 -1 e Au cours de chaque désintégration bêta moins: • • le numéro atomique augmente d’une unité, la nature de l’élément change le nombre de masse reste inchangé 18 Énergie nucléaire II. La radioactivité Caractéristiques des particules bêta Le pouvoir pénétrant des particules β- est plus grand que celui des particules α. Les particules bêta peuvent parcourir quelques mètres dans l’air. Alors que les particules alpha sont arrêtées par une feuille en papier, il faut une feuille en aluminium ou une pièce de bois de quelques centimètres d’épaisseur pour bloquer les particules bêta. Les nucléides émettant des particules bêta sont utilisés en imagerie médicale et en radiothérapie. Scintigraphie thyroïdienne. L’image est obtenue grâce aux particules β émises par le nucléide 131I. 2.3 Émission gamma (γ) Les désintégrations α et β- sont très souvent accompagnées d’émissions gamma (γ). Les rayons gamma ne sont pas des particules, mais des ondes électromagnétiques, de même nature que les ondes radio, microondes, les rayons X et la lumière visible. En général, les radiations gamma possèdent une énergie beaucoup plus élevée que toutes les autres formes d’ondes. Ondes électromagnétiques L’énergie transportée par une onde est inversement proportionnelle à la longueur d’onde : plus la longueur d’onde est petite, plus les ondes sont énergétiques. Les rayons gamma sont très pénétrants. Il faut une protection en plomb ou un mur en béton de quelques mètres d’épaisseur pour les arrêter. Cette propriété est utilisée dans de nombreuses applications médicales (scanners, scintigraphie, radiothérapie) ou industrielles (détection de fissures). Le pouvoir pénétrant et l’énergie élevée des radiations présentent aussi un danger pour les êtres vivants. Déjà une courte exposition à une source gamma puissante peut être à l’origine de mutations cellulaires qui peuvent conduire à la formation de cancers. 19 Énergie nucléaire II. La radioactivité Tableau récapitulant les caractéristiques des rayons α, β et γ alpha bêta gamma nature particule particule onde pouvoir pénétrant faible moyen fort charge positive négative aucune risque pour la santé contact direct (contamination) contact direct (contamination) Irradiation à distance Exercices 4. Désintégration alpha Après une désintégration alpha, le nouveau noyau formé a … : a. un proton de moins c. un neutron de plus b. deux protons de moins d. le même nombre de nucléons 5. Désintégration bêta Après une désintégration bêta moins, le nouveau noyau formé a… : a. un proton de plus c. deux neutrons de plus b. deux protons de moins d. le même nombre de nucléons 6. Équations nucléaires Donnez l’équation de désintégration des nucléides suivants : a. désintégration β- du cobalt 60 c. désintégration α du radon 222 e. désintégration α du plutonium 242 b. désintégration α du radium 226 d. désintégration β- du phosphore 32 f. désintégration β- de l’or 198 7. Désintégration alpha ou bêta? Indiquez les modes de désintégration pour les transformations suivantes : a. b. c. d. 131 I → 131Xe U → 230Th 3 H → 3He 249 Cf → 245Cm 234 20 Énergie nucléaire II. La radioactivité 2.4 Le temps de demi-vie ou période Les désintégrations étudiées dans le dernier paragraphe ne se déroulent pas au même rythme pour différents nucléides. Ce rythme peut varier entre des nanosecondes et des millions d’années. On parle du temps de demi-vie ou période. Le temps de demi-vie ou période T1/2 est le temps qui s’écoule, jusqu’à ce que la moitié de la substance radioactive se soit désintégrée. Exemple : Le plutonium 239 a une période de T1/2 = 24 000 ans. En partant de 1000 nucléides, la moitié s’est désintégrée après 24 000 ans: il en reste 500 nucléides. En attendant de nouveau 24 000 ans, le nombre de nucléides de plutonium vaut encore 250, soit la moitié de 500. Cette évolution est représentée par une courbe exponentielle décroissante : No : nombre initial de nucléides T1/2 : période t : temps Remarque : le nombre initial de nucléides N0 peut aussi être remplacé par la masse initiale m0. 21 Énergie nucléaire II. La radioactivité Exemple du plutonium 239 (239Pu) ; T1/2 = 24000 ans : t=0 t = 24 000 ans t = 48 000 ans t = 72 000 ans t = 96 000 ans ; m0 = 1g ; m = 0,5g ; m = 0,25g ; m = 0,13g ; m = 0,06g Exemple du césium 137 (137Cs) ; T1/2 = 30,2 ans Exercice 8. Iode 131 Lors d’un accident grave dans une centrale nucléaire, 2000 g de l’iode 131 radioactif (T1/2 = 8j) a été relâché dans l’atmosphère. Déterminez le temps qu’il faut pour qu’il ne reste plus que la quantité négligeable d’environ 1g. Réalisez également un diagramme. 22 POUR EN SAVOIR PLUS 1. Désintégrations « capture d’électrons (CE) » et « bêta plus (β+) » Dans ce cas, l’instabilité est due à un excès de protons. Pour y remédier, le nombre de protons est réduit dans le noyau du nucléide instable. A l’inverse de la désintégration bêta moins, un proton est transformé en neutron. Deux cas sont à distinguer : Capture d’électrons : Le noyau capture un électron du cortège électronique. Il y a formation d’un neutron à partir d’un proton et de l’électron capturé. p+ + eélectron → n0 proton neutron 53 24 53 Mn 25 Cr Désintégration bêta plus L’autre phénomène existant est celui de la désintégration bêta plus (β+). Un proton se désintègre en neutron et en électron positif (positron). p+ → proton n0 + e+ positron neutron 11 C 6 11B 5 Remarques : • L’existence de positrons ne devrait pas choquer ; des études récentes ont montré qu’il existe des « antiparticules » pour un grand nombre de particules. • Les désintégrations β+ ou CE sont rares et uniquement observées pour les nucléides artificiels. Même parmi ces nucléides la plupart se désintègre par α et β-. C’est ainsi qu’on parle souvent de désintégration α et β tout court. 23 2. Les règles de stabilité des nucléides Sur Terre on connaît 256 nucléides stables. On peut les représenter dans un diagramme indiquant le nombre de neutrons en fonction du nombre de protons. Le diagramme des nucléides L’analyse du diagramme permet d’établir certaines règles qui nous permettent de comprendre la stabilité/instabilité de différents nucléides. Les nucléides ne sont pas dispersés de façon aléatoire sur le diagramme, mais on distingue une sorte de ligne légèrement incurvée, qu’on appelle courbe de stabilité. 1ère règle : le désir de symétrie protons-neutrons On observe une tendance naturelle pour un nucléide de regrouper autant de protons que de neutrons, donc d’obtenir une symétrie protons-neutrons aussi parfaite que possible. Ceci est surtout le cas pour les nucléides plus légers (Z<20). Exemples : 3 protons et 3 neutrons : 6Li 6 protons et 6 neutrons : 12C 8 protons et 8 neutrons : 16O 2ème règle : la répulsion des protons Comme on l’a déjà mentionné auparavant, les protons chargés positivement se repoussent. Ce sont les neutrons qui garantissent la cohésion des protons. Plus le nombre de protons augmente, plus il faudra de neutrons pour garantir cette cohésion. C’est ainsi que la courbe de stabilité s’incurve vers le haut. Exemple : D’après la règle 1, un atome ayant 100 protons et 100 neutrons serait parfaitement stable. Or, il n’existe pas de tel nucléide stable. Le nombre de protons est trop important. Par contre, on connaît un nucléide ayant 80 protons et 120 neutrons. La règle 2 l’emporte sur la règle 1. 24 3ème règle : les groupements par paires On observe une nette tendance vers des nucléides stables composés d’un nombre pair de neutrons et de protons. Effectivement 60 % des nucléides stables confirment cette règle. Par contre, il n’existe que 4 nucléides stables ayant un nombre impair de neutrons et de protons. 4ème règle : les nombres magiques Si le nombre de protons ou le nombre de neutrons d’un nucléide est égal à certaines valeurs particulières, le noyau est doté d’une stabilité hors du commun. Ces valeurs, appelées nombres magiques, sont les suivantes : 2 8 20 28 Exemples : 50 82 126 4 2 He ; 168 O ; 4020 Ca ; 20882 Pb Exercices 1. Voici des séries d’isotopes : a. 63Cu ; 64Cu ; 65Cu b. 35Cl ; 36Cl ; 37Cl c. 27Si ; 28Si; 30Si d. 136Ba ; 138Ba ; 139Ba Indiquez l’isotope qui est instable. Expliquez. Déterminez lequel des deux isotopes stables est le plus abondant. 2. Voici le nombre d’isotopes stables pour les éléments de Sc à Zn. Commentez ! 3. A l’aide de l’extrait du diagramme de stabilité ci -contre : a. Indiquez le nombre d’isotopes pour les éléments Nb, Mo, Tc, Ru, Rh, Pd, Ag, Cd b. Indiquez les nucléides ayant 42 neutrons. Donnez le nom des éléments respectifs. 25 Énergie nucléaire III. La fission nucléaire Bien que toutes les désintégrations nucléaires soient accompagnées d’une libération d’énergie, ces processus ne sont pas à l’origine de la génération d’énergie électrique dans les centrales nucléaires. En 1938, les chimistes allemands Otto HAHN (photo à gauche) et Fritz STRASSMANN ont découvert la fission nucléaire. En bombardant le nucléide 235U par des neutrons, ils ont réussi à le diviser en deux nucléides plus légers. La fission de l’uranium émettait une quantité d’énergie d’un ordre de grandeur inconnu jusqu’alors. Cette découverte était à l’origine de la production d’énergie électrique dans les centrales nucléaires, mais aussi de la fabrication d’armes dévastatrices. En 1944, HAHN a reçu le prix Nobel pour ses travaux. Pendant toute sa vie, il s’est investi dans une politique d’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire. La réaction de fission de l’uranium 235 Une réaction de fission est un phénomène lors duquel un nucléide lourd est divisé en deux nucléides plus légers en émettant de l’énergie. La fission du nucléide est provoquée par l’impact d’un neutron. Le nombre de nucléides fissiles est très petit. Il n’en existe qu’une dizaine dont l’uranium 235 est le seul qu’on trouve dans la nature. L’uranium est un élément chimique naturel qui est exploité dans de nombreux gisements à travers la planète. L’Australie détient la majorité des réserves mondiales (36%), suivi du Canada (15%) et du Kazakhstan (14%). L’uranium est 20 000 fois moins abondant que le fer, 30 fois plus abondant que l’argent et 500 fois plus abondant que l’or ou le platine. En moyenne on trouve 3 g d’uranium par tonne d’écorce terrestre. La plupart des ressources de l’uranium ne sont pas exploitables du point de vue technologique et économique. Dans les mines d’uranium on trouve 1-3 kg par tonne de minerais. La composition isotopique de l’uranium naturel est la suivante : 234 U : 0,0055 % 235 U : 0,72 % 238 U : 99,27 % Mine d’uranium en Australie Minerai d’uranium 26 Énergie nucléaire III. La fission nucléaire Parmi les 3 isotopes, 235U est le seul isotope fissile. Le nucléide est bombardé par un neutron et se divise en deux nucléides plus légers (la masse des nucléides formés est rarement identique). Cette séparation est accompagnée d’une forte libération d’énergie. 235 92 U Exemple de réaction de fission possible : 1 n + 235 U → 95 Sr + 139 Xe + 2 1n L’uranium exploité dans les mines ne contient que très peu de l’isotope fissile 235 (0,72%). Cette quantité ne suffit pas pour l’entretien de la réaction de fission; il faut enrichir l’uranium naturel à au moins 3,5% de 235U. L’enrichissement de l’uranium consiste en une augmentation de la teneur de l’isotope 235 fissile par rapport à l’isotope 238. A cette fin, on utilise des centrifugeuses. Isotopes Uranium naturel Uranium enrichi 234 0,0055 % 0,0055% 235 0,72 % 3,7% 238 99,3 % 96,3% U U U Remarque : toute tentative d’enrichir de 235U au-dessus de 5% n’est probablement plus destinée à une utilisation pacifique dans les centrales nucléaires. Ce n’est que pour la fabrication d’une bombe atomique, qu’on nécessite un pourcentage d’uranium fissile supérieur. 27 Énergie nucléaire III. La fission nucléaire La réaction en chaîne En se séparant, les deux nucléides formés émettent à leur tour un ou plusieurs neutrons. Ces neutrons peuvent entraîner à nouveau la fission d’un autre nucléide d’uranium. De cette façon une réaction en chaîne est amorcée. On considère deux cas : Réaction non-contrôlée (bombe atomique) A partir d’une certaine quantité d’uranium fissile (masse critique), la réaction en chaîne peut mener à une libération explosive d’énergie. La réaction n’est plus contrôlable. Il s’agit du principe d’une bombe atomique. 28 Énergie nucléaire III. La fission nucléaire Réaction contrôlée (centrale nucléaire) Afin d’obtenir un flux continu en énergie, la réaction doit être contrôlée. Dans les réacteurs des centrales nucléaires, le nombre de neutrons est constamment ajusté. On utilise des barres de contrôle contenant des éléments chimiques (cadmium, bore) qui absorbent les neutrons. L’uranium, sous forme d’oxyde d’uranium (UO2), est contenu dans des gaines en zirconium (gris) qui plongent dans de l’eau (bleu vert). Les barres de contrôle (jaune) absorbent un certain nombre de neutrons ; ceux-ci ne peuvent plus provoquer de réaction de fission. De cette façon, on peut contrôler le déroulement de la réaction en réglant la hauteur des barres. 29 Énergie nucléaire III. La fission nucléaire La centrale nucléaire Le principe de fonctionnement d’une centrale nucléaire est similaire à celui d’une centrale thermique à charbon. Circuit primaire (1) : La réaction de fission de l’uranium a lieu dans le réacteur (2). Celui-ci contient de l’eau sous pression qui est chauffée par l’énergie libérée. L’eau chaude pressurisée fait bouillir de l’eau dans un générateur de vapeur (3). Pour éviter que des particules ou des émissions radioactives ne soient libérées dans l’atmosphère, le réacteur est confiné par des murs très épais en béton (4). Circuit secondaire (5) : La vapeur d’eau formée dans le générateur de vapeur entraîne la rotation d’une turbine (6) reliée à un générateur d’électricité (7). Circuit tertiaire (9) : Ce circuit de refroidissement, alimenté par un fleuve(10), contient de l’eau qui fait condenser à nouveau la vapeur du circuit secondaire dans un condensateur (8). L’eau ainsi formée est de nouveau transportée dans le générateur de vapeur. L’eau de refroidissement, chauffée ainsi, est refroidie dans une tour de refroidissement (11). Une partie de l’eau (~3%) est dégagée sous forme de vapeur. Cette eau perdue est remplacée par l’eau du fleuve. Le rendement d’une centrale nucléaire peut être comparé à celui d’une centrale thermique à charbon. Environ 40 % de la chaleur émise par la réaction nucléaire sont transformés en énergie électrique. A titre de comparaison, 1 g d’uranium fournit la même quantité d’énergie que la combustion de 2 tonnes de charbon. 30 POUR EN SAVOIR PLUS L’enrichissement de l’uranium Bien que le principe de fonctionnement d’une centrale nucléaire soit relativement simple, l’obtention de l’uranium fissile constitue une étape laborieuse qui nécessite une technologie avancée. Le fait que la teneur en uranium du minerai est en général assez faible, de l’ordre de 0,1 à 0,3 %, implique qu’une grande quantité de matériaux doit être extraite du sol. Le minerai est alors traité chimiquement et physiquement afin d’obtenir un concentré d’uranium appelé « yellow cake ». Puis il faut procéder à l’enrichissement de l’uranium 235 par rapport à l’uranium 238. Sous forme solide, il est impossible de séparer les deux isotopes de l’uranium. Ainsi en plusieurs étapes, l’uranium est transformé en gaz hexafluorure d’uranium UF6. Dans des centrifugeuses à gaz, les molécules plus lourdes d’hexafluorure d’uranium 238 sont séparées des molécules plus légères d’hexafluorure d’uranium 235. Les molécules plus lourdes sont projetées vers la périphérie de la centrifugeuse, alors que les plus légères migrent vers le milieu. Pour obtenir un enrichissement suffisant, le traitement est répété de nombreuses fois. Le gaz passe d’une centrifugeuse à l’autre, en augmentant au fur et à mesure la teneur en uranium 235. Schéma d’une centrifugeuse Centrifugeuses en cascade 31 POUR EN SAVOIR PLUS La tour de refroidissement La tour de refroidissement représente incontestablement la partie la plus visible d’une centrale thermique à charbon ou nucléaire. Une tour de refroidissement a une hauteur d’environ 150 mètres. Elle sert à refroidir l’eau issue du condensateur. L’eau chaude (40°C) du condensateur de vapeur est c onduite dans la tour et pompée à une hauteur d’environ 15 m. Pulvérisée en fines gouttelettes, l’eau tombe sur des plaques. Une partie de l’eau (~3%) s’évapore et est dégagée dans l’atmosphère. La partie majeure est refroidie au contact des plaques et de l’air qui entre en bas de la tour. L’eau froide tombe dans le bassin de récupération, à partir duquel, l’eau est de nouveau conduite dans le condensateur. La quantité d’eau perdue lors de l’évaporation est remplacée par de l’eau issue d’un fleuve. 32 POUR EN SAVOIR PLUS Les déchets radioactifs Origine Les déchets issus des réactions nucléaires dans un réacteur représentent le problème majeur de cette forme de production d’énergie. Dans le réacteur, l’uranium est bombardé pendant 3 à 4 ans par des neutrons. Ces réactions de fission conduisent à la formation d’un nombre énorme de différents nucléides radioactifs. Voici un schéma indiquant la masse des nucléides formés à partir d’une tonne d’uranium : Uranium Apres l’arrêt du réacteur, il reste principalement de l’uranium, dont la composition isotopique a changé : On remarque que la composition isotopique de l’uranium irradié est similaire à celle de l’uranium naturel, sauf que le nucléide 236U s’est ajouté. Les transuraniens Parmi les déchets on trouve 1,2 % de transuraniens. Il s’agit principalement d’isotopes des éléments neptunium Np, plutonium Pu, américium Am, curium Cm, berkélium Bk, et californium Cf. Le plutonium est de loin le plus abondant (80%). Puisque celui-ci est fissile, on l’utilise dans les centrales nucléaires ou même pour la fabrication de bombes nucléaires. 33 Les produits de fission radioactifs On compte plus de 550 nucléides radioactifs parmi les produits de fission. La période de certains de ces nucléides est tellement petite, qu’ils se sont presque totalement désintégrés deux ans après l’arrêt du réacteur. Néanmoins le nombre de nucléides hautement radioactifs à périodes longues reste élevé. Exemples : 90Sr ; 129 I ; 137Cs Les produits de fission stables On compte environ 120 nucléides stables parmi les produits de fission. Puisque ceux-ci ne sont pas radioactifs, ils ne représentent pas de danger de contamination. Traitement Après un stockage provisoire de deux ans dans la centrale nucléaire, les déchets sont transportés dans des usines de retraitement spéciales, comme par exemple l’usine Cogéma à la Hague en France. Des mesures de sécurité strictes doivent être prises pour le transport des déchets hautement radioactifs. On utilise des récipients CASTOR (cask for storage and transport of radioactive material) qui sont souvent transportés par train. En usine, l’uranium et le plutonium sont séparés des autres produits afin de pouvoir être réutilisés dans des centrales nucléaires. Les autres déchets, les produits de fission radioactifs et les transuraniens, ne peuvent pas être recyclés. En général, les déchets sont « vitrifiés », c.à.d. on les mélange avec du verre liquide qu’on fait couler dans des conteneurs en acier inoxydable. Le verre se solidifie et le couvercle est soudé pour garantir l’étanchéité. Les conteneurs sont stockés très souvent dans des galeries souterraines à une profondeur de 300 à 1000m. 34 Énergie nucléaire III. La fission nucléaire Recherche D’après les connaissances acquises au sujet de l’énergie fossile et de l’énergie nucléaire et en vous informant à l’aide d’Internet ou de livres spécialisés, évaluez les avantages et les désavantages liés à l’exploitation des deux formes d’énergie. a. Considérez dans votre analyse les mots-clés suivants : - coûts de production et d’exploitation ressources/réserves pollution risques/accidents aspects politiques b. Répondez aux questions suivantes : - peut-on préférer une technologie à l’autre ? est-ce que les énergies renouvelables pourront représenter de bonnes alternatives à long terme ? 35 Énergie nucléaire OBJECTIFS Après l’étude de ce chapitre, il faut être en mesure de: • d’expliquer de façon détaillée le modèle de Rutherford • citer les caractéristiques des particules élémentaires • définir « nucléide » • définir « nombre de masse » • définir « nombre atomique » • définir « isotopes » • calculer la masse d’un élément chimique à partir de la composition isotopique • donner le nombre de particules élémentaires d’un nucléide donné • connaître le nom et le symbole des éléments chimiques de la page 44 • définir « radioactivité » • expliquer l’origine de la radioactivité • faire la différence entre la radioactivité naturelle et artificielle • expliquer la désintégration alpha • expliquer la désintégration bêta • expliquer l’émission gamma • donner les équations de désintégration de nucléides donnés • reconnaître la forme de désintégration pour des transformations données • définir et expliquer « temps de demi-vie » • définir « réaction de fission » • représenter schématiquement une réaction de fission de l’uranium • expliquer la différence entre réaction contrôlée et réaction non-contrôlée • expliquer le fonctionnement d’une centrale nucléaire 36