Chapitre 6 : L`IdF du schéma directeur d`aménagement et d
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Chapitre 6 : L`IdF du schéma directeur d`aménagement et d
Une brève histoire de l'aménagement de Paris et sa région L’Ile-de-France du schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de 1975 au schéma de 1994 L’Ile-de-France du schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de 1975 au schéma de 1994 Le schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de la région d’Ile-de-France de 1976 Procédures d’élaboration du futur SDAU de la région Ile-de-France De 1970 à 1974, la procédure d’approbation du SDAU ne peut aboutir pour divers raisons. De son côté, le Conseil d’Etat refuse en février 1971 de donner un avis sur les SDAU locaux en l’absence de schéma directeur dûment approuvé. Pour pallier le vide juridique, le ministre de l’équipement annonce la reprise de la procédure le 2 avril 1974 devant le conseil d’administration du district. La parution de la loi d’orientation foncière du 30 décembre 1967 permet de reprendre le SDAU de 1965 dans un cadre réglementaire et de le mettre à jour. La mise au point des modifications à y apporter est établie en fonction des diverses critiques formulées sur le premier document lors de la consultation des assemblées et d’une prise en compte approfondie des problèmes d’infrastructures routières et ferrées. Par lettre du 24 mai 1974, le Gouvernement demande au ministre de l’aménagement du territoire et des transports d’entreprendre dans les meilleurs délais la mise à jour du schéma directeur en vue de son approbation. Le ministre signifie au préfet de région que « les conditions sont aujourd’hui réunies pour mettre en forme le schéma directeur de la région parisienne et procéder à son approbation par le Gouvernement ». En 1969, une modification du SDAU ramène le nombre des villes nouvelles de 8 à 5. Cette réduction voulue par le ministre de l’équipement et la DATAR (délégation à l’aménagement du territoire et de l’action régionale) est soutenue par le président de la République, Georges Pompidou, pour éviter les déséquilibres entre la région parisienne et la province. Elle simplifie également certaines prévisions d’infrastructures ferrées en utilisant mieux les réseaux existants. Par lettre du 8 janvier 1975 au premier ministre, le chef de l’Etat prescrit une charte d’aménagement claire et connue de tous1. Les travaux menés sous l’apparence d’une simple mise à jour consistent à l’élaboration d’un nouveau document réalisé conjointement par le SRERP et l’IAURIF. En 1970, le ministre de l’équipement définit les principes qu’il entend voir appliquer au schéma régional, notamment, l’élargissement des zones urbanisables et l’affirmation des zones de discontinuité. 1 Un rapport d’orientation sur le projet de schéma directeur est présenté aux assemblées régionales au printemps 1975 pour avis. FRANC, op. cit. 5 chapitre V p.76. 97 DREIF, Claude COTTOUR, septembre 2008 Une brève histoire de l'aménagement de Paris et sa région L’Ile-de-France du schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de 1975 au schéma de 1994 L’accueil réservé au document par les assemblées départementales est beaucoup plus favorable que celui fait en 1965. Les critiques de fond se sont considérablement estompées.2 Le contexte régional a beaucoup changé en dix ans. L’idée de solidarités nécessaires à l’intérieur de la région est acceptée avec des développements différents selon les secteurs. Les textes réglementaires ont également clarifié le statut des différents documents d’urbanisme rendant crédible le futur schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme. Le SDAU de la région Ile-de-France est approuvé par décret le 1 juillet 1976. Il prend en considération les nouvelles aspirations des citoyens en proposant un développement plus harmonieux du territoire régional. - une organisation urbaine polycentrique, rompant avec la tendance à l’éclatement en «tache d’huile», s’appuyant sur les pôles d’emplois et de services de Paris, des noyaux restructurateurs de banlieue d’une part et des villes nouvelles d’autre part. L’idée des deux axes d’urbanisation tangentiels à l’agglomération est abandonnée. - la protection et l’aménagement de l’espace rural, avec le développement des espaces verts et la création de cinq zones naturelles d’équilibre pour maintenir des discontinuités entre les axes de développement (plaine de Versailles à l’ouest, Vexin au nord-ouest, plaine de France au nord, plateau de Brie à l’est, Hurepoix au sud). - le développement modéré des villes petites et moyennes à la périphérie Principes d’aménagement du SDAU de 1976 - l’organisation des transports fondée sur la réalisation d’infrastructures radiales et de rocades ferrées et routières : - pour les transports en commun : - interconnexion des réseaux RATP et SNCF constituant le RER - prolongement de lignes de métro en banlieue - création d’une rocade de transports collectifs en site propre en proche banlieue, à 2 ou 3 kilomètres du boulevard périphérique. - pour les routes : - allégement du programme autoroutier en particulier dans le centre de Paris et en zone urbaine dense de banlieue - priorité à la création de rocades comme l’autoroute A86 - suppression de tronçons autoroutiers traversant les forêts Le nouveau document est l’héritier direct de celui de 1965, enrichi par dix années de mise en œuvre, en prenant en compte l’inflexion de l’évolution démographique et économique. Les perspectives de croissance sont nettement plus modérées que précédemment. Dans le SDAU, la population régionale est estimée à 12 millions en l’an 2000 au lieu de 14 millions3. Le nouveau document « fait preuve d’un réalisme beaucoup plus grand que la première version du schéma de 1965 [...] les objectifs retenus dix ans après apparaissent notablement plus raisonnables »4. Le document reprend les mêmes principes d’aménagement que ceux figurant dans le document de 1965 mais en les complétant pour tenir compte de l’évolution des faits et des idées.5 Il se fixe pour ambition d’améliorer le cadre de vie des habitants de la région, de protéger et mettre en valeur les ressources naturelles et le patrimoine bâti, d’assurer l’adaptation de l’appareil de production et de commandement et de maintenir le rôle international de Paris et sa région. Durant la décennie 1980, près de 2 000 hectares d’espaces naturels disparaissent chaque année au profit de l’urbanisation (en particulier pour la réalisation des villes nouvelles). Le schéma directeur tente d’assurer la protection et la mise en valeur des espaces ruraux et naturels notamment aux franges de l’agglomération où les pressions foncières fortes se manifestent. Une politique d’acquisition de forêts est entreprise par la Région en vue de leur ouverture au public et de leur protection. Le parti d’aménagement spatial se traduit en quatre options principales : 2 SDAU de la RIF, avis du conseil d’administration du district de la région parisienne, POIRIER, Jean-Marie, rapport sur la révision du schéma directeur de la région parisienne, juillet 1976. 3 RIPOCHE, M., Documents d’urbanisme et planification in Revue Travaux, juin 1977. 4 SDAU, op. cit. 2, p.7. 5 it. 2 98 DREIF, Claude COTTOUR, septembre 2008 SDAURIF carte de destination générale des sols (horizon 2000) Une brève histoire de l'aménagement de Paris et sa région L’Ile-de-France du schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de 1975 au schéma de 1994 99 DREIF, Claude COTTOUR, septembre 2008 Une brève histoire de l'aménagement de Paris et sa région L’Ile-de-France du schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de 1975 au schéma de 1994 De nouvelles institutions Création de la Région Ile-de-France versements du fonds social européen pour des opérations menées en matière de formation professionnelle. La loi du 5 juillet 1972 crée les actuelles régions françaises à l‘exception de la région parisienne dont l’organisation reste soumise aux dispositions des lois des 2 août 1961 et 10 juillet 1964 modifiées (article 21). Depuis 1986 les conseillers régionaux sont élus au suffrage universel direct tous les six ans. Ils sont élus sur des listes composées au sein de circonscriptions électorales de niveau départemental. Cependant, la loi du 6 mai 1976, mise en application le 1 juillet 1976, aligne le cadre institutionnel de la région parisienne sur celui des autres régions françaises. La Région d’Ile-de-France voit ses compétences élargies par sa contribution au développement économique, social et culturel de ses habitants. En outre elle reçoit, du fait de son caractère de grande agglomération, des attributions particulières en matière de circulation et de transports, de certains équipements collectifs et en matière d’espaces verts et de forêts. Dans le domaine de l’aménagement urbain, la gouvernance de la région Ile-de-France est un exercice délicat. Le pouvoir est partagé entre les communes, les départements et la région comme partout en France 6 . Mais l’Etat dispose de responsabilités propres dans l’élaboration du schéma directeur régional de l’Ile-de-France7 que lui donne la loi du 7 janvier 1983. L’Etat conserve également la tutelle du syndicat des transports parisiens dont le président est le préfet de région. La compétence de ce syndicat est étendue à l’ensemble de l’Ile-de-France en 1991. Les organes de la Région d’Île-de-France ressemblent en apparence à ceux qui constituaient la trilogie du District : un préfet, une assemblée d’élus (sinon élue), une assemblée socioprofessionnelle. L’innovation essentielle est le changement de dimension et de nature du conseil régional qui passe de 54 membres pour le conseil d’administration du District à 164 membres (50 parlementaires, 30 représentants de Paris, 6 conseillers généraux et 6 maires de chaque département). Paris a de nouveau un maire La Région Ile-de-France comme les autres régions françaises est transformée en collectivité territoriale à part entière par la loi du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions. La Région Ile-de-France dispose de ressources particulières s’ajoutant aux ressources normales des régions : taxes diverses (ex : redevance pour la création de bureaux), dotations de l’État, remboursements provenant de prêts accordés à certaines entreprises ou collectivités (ex : RATP, SNCF), recettes d’origines diverses telles que des La loi du 31 décembre 1975 rétablit la fonction de maire de Paris supprimée depuis 1871. Le 25 mars 1977 ont lieu les premières élections municipales parisiennes. Comme toutes les communes de France, Paris est administrée par un maire et par le conseil de Paris composé d’élus au nombre de 109. La loi du 31 décembre 1982 relative à l’organisation administrative de Paris constitue une seconde étape vers une déconcentration au niveau de l’arrondissement, sans aller toutefois jusqu’à la décentralisation et à l’éclatement de Paris en plusieurs communes. Le statut de 1982 confirme que Paris demeure à la fois une commune et un département et que Paris reste la seule ville de France où les attributions de police municipale (circulation, tranquillité et salubrité publiques) ne sont pas entièrement exercées par un maire élu, mais par le Préfet de Police. 6 loi n°83-08 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les Régions et l’Etat modifiée par la loi n°83-663 du 22 juillet 1983 et la loi n°85-729 du 18 juillet 1985 relative à la définition des principes d’aménagement. 7 Préfecture de la région Ile-de-France, in Schéma directeur de l’Ile de France, Avertissement, le contexte institutionnel, avril 1994. 100 DREIF, Claude COTTOUR, septembre 2008 Une brève histoire de l'aménagement de Paris et sa région L’Ile-de-France du schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de 1975 au schéma de 1994 Aménagement : des réalisations considérables Des opérations plus respectueuses du cadre urbain parisien Deux documents concernant l’aménagement parisien, prévus par la loi d’orientation foncière de 1967, sont approuvés par décret : - le plan d’occupation des sols de Paris le 28 février 1977 - le schéma directeur d’urbanisme et d’aménagement de Paris le 17 mars 1977. Paris se trouve ainsi parmi les premières grandes villes françaises à disposer de ses deux documents d’urbanisme majeurs. La nouvelle municipalité élue s’est fixé des objectifs plus réalistes que ceux figurant dans l’ancien document et mieux adaptés à l’environnement parisien et aux attentes des citadins8 : - en procédant à une révision des opérations de rénovation en cours : les opérations de démolition reconstruction ne tenant pas compte de l’alignement des rues ou des volumes des immeubles sont abandonnées - en lançant de nouvelles opérations d’aménagement sur des friches industrielles ou des grandes emprises mal utilisées - en préservant le site de la Seine et des canaux (pour ne plus revivre de projet d’autoroute comme celui du canal Saint-Martin) - en créant de nouveaux espaces verts - en réservant des rues exclusivement aux piétons - en programmant de nouveaux équipements. L’effort de construction dans la capitale (26 000 logements construits en 1975, record absolu) et de réhabilitation a considérablement amélioré la qualité des logements. Leur taille moyenne s’est accrue et la proportion des logements qui disposent du confort (wc intérieur et salle d’eau) atteint 90% en 1990. Mais la population de Paris diminue et la structure sociologique de la ville se modifie du fait de la constante envolée des valeurs immobilières qui a d’abord touché les quartiers les plus recherchés puis l’ensemble de la ville. En conséquence, les jeunes et les ménages des classes moyennes avec des enfants trouvent difficilement à se loger dans la capitale. 8 La rénovation en cours des vastes secteurs, notamment la place d’Italie, Tolbiac, la porte de Choisy dans le XIIIe, le Front de Seine dans le XVe, la rue de Flandre dans le 19e, la place des Fêtes dans le XXe, est arrêtée. Le secteur des Halles qui pendant quelques années n’était qu’un trou béant du fait de la construction de la grande gare du RER change d’aspect avec la réalisation d’un centre commercial et d’équipements enterrés. A proximité, le centre Pompidou à l’architecture résolument avant-gardiste conserve l’une des deux plus importantes collections d’art moderne et contemporain au monde, des galeries d’expositions temporaires, des salles de spectacles et de cinéma et la première bibliothèque de lecture publique en Europe. Il accueille chaque année plusieurs millions de visiteurs. Cette réalisation parisienne voulue par un président de la République est suivie par d’autres « chantiers de présidents » , perpétuant une tradition de laisser à la postérité un geste architectural pour la capitale. En 1977, Valéry Giscard d’Estaing lance le projet de la construction d’un musée du XIXe siècle dans l’ancienne gare d’Orsay. Le musée d’Orsay est inauguré le 9 décembre 1986. Il présente des œuvres d’art allant de 1848 à la naissance du cubisme. Toujours en 1977, le président de la République confie à Roger Taillibert et Maurice Lévy une mission d’étude sur la reconversion de la vaste halle en béton armé des abattoirs de la Villette en musée des Sciences, des Techniques et de l’Industrie. En 1979, l’établissement public du parc de la Villette est créé sous la présidence de Paul Delouvrier. Le 24 septembre 1981, lors d’une conférence de presse, le président de la République François Mitterrand annonce la construction d’une Cité internationale de la musique. Le site de la Villette renaît ainsi avec l’aménagement du parc, l’ouverture du musée, APUR, Schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de la ville de Paris, Paris Projet n°19-20 p.3, 1980. 101 DREIF, Claude COTTOUR, septembre 2008 Une brève histoire de l'aménagement de Paris et sa région L’Ile-de-France du schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de 1975 au schéma de 1994 Centre Pompidou La Géode parc de la Villette (photographie C. COTTOUR) (photographie C. COTTOUR) La Défense (photothèque DREIF) de la Géode, du Zénith, de la Cité de la musique. La même année, François Mitterrand annonce que le Palais du Louvre est entièrement dévolu au Musée. Le Ministère des Finances, logé jusque là dans l’aile Richelieu, est transféré dans de nouveaux locaux construits à Bercy, à l’est de la capitale en dehors du centre historique. Le projet «Grand Louvre», entraîne un remodelage complet du Musée. Il dure 16 ans. Le 30 mars 1989 est inaugurée la pyramide de verre. François Mitterrand fait également construire l’Arche de la Défense, l’Opéra Bastille, l’Institut du Monde Arabe et la Bibliothèque de France. Ces réalisations prestigieuses contribuent au rayonnement culturel et touristique de Paris et de la France et attirent chaque année des millions de visiteurs étrangers. La ville s’est embellie et offre à ses habitants des conditions de vie plus agréables avec la création d’une vaste zone piétonne dans son centre et de plusieurs parcs : Georges Brassens (anciens abattoirs de Vaugirard), Belleville, André Citroën... Mais Paris continue de se dépeupler, perdant près de 400 000 habitants entre 1975 et 1994. Ce dépeuplement qui avait déjà commencé dans quelques communes limitrophes de banlieue avant 1975, s’étend maintenant pour la même période à tout le cœur de l’agglomération dans un rayon approximatif de 10 km à partir de Notre-Dame. Par contre la grande couronne connaît une forte croissance démographique, principalement dans les villes nouvelles. 102 DREIF, Claude COTTOUR, septembre 2008 Une brève histoire de l'aménagement de Paris et sa région L’Ile-de-France du schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de 1975 au schéma de 1994 Transformation de la première couronne La Défense Dans les communes limitrophes de Paris, l’industrie présente depuis la fin du XIX e siècle régresse fortement pour s’installer, soit en banlieue plus lointaine comme dans les villes nouvelles, soit dans d’autres régions françaises, soit dans des pays émergents. Ce déclin est dû aux difficultés économiques des secteurs industriels et aux difficultés de moderniser ces activités dans un tissu urbain dense. De plus, dans certains secteurs comme à l’ouest et au sud-ouest de Paris la pression foncière accélère encore le départ de l’industrie au profit du tertiaire ou de l’habitat résidentiel. Le nombre d’emplois diminue dans ces communes jusqu’aux années 1990. Puis le mouvement s’inverse, d’abord à Issy-les-Moulineaux puis le phénomène de déclin et de reconquête touche rapidement d’autres communes industrielles des Hauts-de-Seine (Boulogne-Billancourt, Suresnes, Courbevoie, Puteaux, Levallois-Perret, Asnières-sur-Seine, Vanves, Montrouge). Dans ces secteurs, des immeubles de bureaux, des logements ou de grands équipements sont construits sur les anciennes friches industrielles. Cette transformation se traduit par une évolution très nette des catégories socioprofessionnelles. Le nombre d’ouvriers diminue et corrélativement la part des cadres supérieurs ne cesse de croître dans l’emploi et parmi les résidents. Le prix de l’immobilier en très fort hausse dans toute la région atteint un niveau très important dans ces communes devenues attractives pour de jeunes cadres. Elles bénéficient de la proximité de Paris et de ses quartiers de bureaux déjà affirmés (XVe et XVIe arrondissement) ainsi que de celle du quartier d’affaires de la Défense. Elles sont très bien desservies par les transports en commun. Les immeubles sont neufs et intègrent toutes les nouvelles normes de confort. Des espaces verts et des parcs sont créés dans les Hauts-de-Seine comme ceux de l’Ile Marante à Colombes, de l’Ile-Saint-Germain à Issy les Moulineaux, de Villeneuve-la-Garenne. Les communes de la Seine-Saint-Denis et du Valde-Marne, également touchées par le déclin industriel, restent, en 1994, encore à l’écart de cette transformation urbaine accentuant l’écart sociologique entre l’est et l’ouest. La Défense très bien desservie par le métro, le RER, le tramway, le chemin de fer, les bus et les voies rapides est devenue un pôle tertiaire de dimension internationale en attirant les sièges sociaux de grands groupes du secteur bancaire, de l’assurance, de la chimie... Depuis sa création en 1957, le pôle a connu des crises immobilières et des relances remarquables comme en 1986 où le programme a été porté à 2 080 000 m2 de bureaux. Le nombre d’emplois a été multiplié par 2 entre 1982 et 1990 passant de 51 700 à plus de 104 000. C’est en terme d’image que le quartier va connaître l’évolution la plus spectaculaire avec l’aménagement de la Tête Défense. Le choix de cet aménagement s’est fait au plus haut niveau de l’Etat. Après le projet de Leoh Ming Pei en 1969 soutenu par Georges Pompidou, celui d’Emile Aillaud en 1973, celui de Jean Willerval en janvier 1981 soutenu par Valéry Giscard d’Estaing, François Mitterrand choisit en 1983 le projet de la Grande Arche de l’architecte danois Johan Otto Van Spreckelsen. Version du XXe siècle de l’Arc de triomphe de l’Étoile ce projet laisse la possibilité de poursuivre un jour « l’axe triomphant » plus à l’ouest. La Grande Arche est inaugurée en juillet 1989, année du bicentenaire de la Révolution française et à l’occasion du sommet du G7. Le bâtiment accueille dans sa paroi sud les bureaux du ministère de l’équipement. Le monument est devenu un lieu de tourisme et reçoit environ 500 000 visiteurs par an. L’ensemble du secteur du tourisme génère des centaines de milliers d’emplois. Les centres d’exposition et de congrès Depuis 1980, l’Ile-de-France occupe la première place mondiale pour l’organisation de congrès internationaux. Les salons et congrès sont principalement organisés par : - Paris Expo qui gère sept sites de la région Ile-deFrance : Porte de Versailles, le CNIT de la Défense, le Carrousel du Louvre, le Palais des Sports, l’Espace Champerret, Cœur Défense et l’Espace Grande Arche - la chambre de commerce et d’industrie de Paris (CCIP), qui est l’actionnaire unique des palais des congrès de Paris et de Versailles et des sociétés d’exploitation de Paris-Nord Villepinte et du Bourget. 103 DREIF, Claude COTTOUR, septembre 2008 Une brève histoire de l'aménagement de Paris et sa région L’Ile-de-France du schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de 1975 au schéma de 1994 Les villes nouvelles Un statut revu et corrigé en 1983 La loi du 13 juillet 1983 donne aux villes nouvelles une forme originale. Elle modifie profondément le statut des agglomérations nouvelles et renforce le poids des élus. Cette orientation s’inscrit dans le processus mis en œuvre avec les lois de décentralisation tout en conservant des dispositions particulières pour les villes nouvelles, opérations d’intérêt national. Les périmètres des villes nouvelles sont révisés. Celui de la zone d’agglomération nouvelle suit obligatoirement le découpage communal et chaque commune décide de son maintien ou de son retrait de la structure d’agglomération nouvelle. La loi prévoit également la compétence du SAN (syndicat d’agglomération nouvelle) dans les domaines de l’urbanisme, des transports, du développement économique, des infrastructures et des nouveaux équipements collectifs. La gestion des équipements revient aux communes sauf pour ceux concernant l’ensemble de l’agglomération. La loi permet également d’adopter un système de répartition des ressources fiscales en ville nouvelle. Le SAN fixe le taux et perçoit le produit de la taxe professionnelle et les communes font de même pour les autres taxes locales. Une urbanisation éclatée Les villes nouvelles ont une urbanisation discontinue. Les différents pôles sont souvent séparés par des coupures comme des bois, des zones industrielles mais aussi par des voiries primaires rapides de taille importante et voies ferrées difficilement franchissables. Les communes conservent leur propre identité. Les maires des différentes communes ont des tendances politiques diverses. Les habitants n’ont pas forcément le sentiment d’appartenance à une entité supracommunale. Une architecture variée L’édification des villes nouvelles par étapes successives sur une relativement longue période permet d’adapter les réalisations au fur et à mesure de l’évolution des besoins ou des techniques nouvelles. Les premières réalisations sont construites selon les principes de séparation de circulation adoptés dans le centre de Cergy-Pontoise. Les circulations des piétons se font sur dalle et le franchissement des voies primaires sur des passerelles. A Evry, le centre ville est concentré autour du centre commercial et d’une place couverte, l’Agora. L’architecture des immeubles d’habitations adopte des formes nouvelles comme dans le quartier des Pyramides à Evry ou celui des Sept Mares à Elancourt (Saint-Quentin-en-Yvelines). A côté des immeubles aux formes classiques découlant de la « politique des modèles » soutenue par le ministère de l’équipement, des immeubles originaux apparaissent comme : - les Arcades du Lac à Montigny-le-Bretonneux (Saint-Quentin-en-Yvelines) de l’architecte Ricardo Bofill en 1982 - le Théâtre, l’Arc de Triomphe, le Palacio d’Abraxas de Ricardo Bofill à Noisy-le-Grand (Marne-la-Vallée) en 1984 - les Arènes de Picasso de l’architecte Manuel Nunez-Yanowsky à Noisy-le-Grand en 1984. A partir des années 1985, des constructions moins spectaculaires, plus traditionnelles mais mieux acceptées par leurs occupants remplacent les gestes architecturaux. Le Théâtre à Noisy-le-Grand (Marne-la-Vallée) Les Arcades du Lac à Montigny-le-Bretonneux (SaintQuentin-en-Yvelines) (photothèque DREIF) (photothèque DREIF) 104 DREIF, Claude COTTOUR, septembre 2008 Une brève histoire de l'aménagement de Paris et sa région L’Ile-de-France du schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de 1975 au schéma de 1994 Des pôles d’emploi Le rythme d’implantation des entreprises dans les villes nouvelles s’accélère nettement à partir de 1975 et en particulier à Cergy-Pontoise et à Marne-laVallée notamment grâce à des exonérations fiscales exceptionnelles. Dans les années 80, de nouvelles zones d’activités sont créées. Des géants d’envergure internationale ou de simples PME/PMI s’y installent poussées par la politique d’agréments de l’Etat. De nombreuses entreprises quittent la banlieue dense afin de s’agrandir et se moderniser. Elles choisissent de ne pas trop s’éloigner de Paris et du lieu d’habitation de leurs collaborateurs et restent souvent sur le même axe de transport en commun. Ainsi les entreprises qui quittent Boulogne, Issy-les-Moulineaux ou Clamart s’établissent à Saint-Quentin-en-Yvelines au sud-ouest de l’agglomération. C’est le cas notamment de Bouygues, de Thomson et de Renault. Le nombre total des emplois des 5 villes nouvelles passe de 92 270 en 1975 à 160 596 en 1982 et 274 870 en 19909. Les villes nouvelles s’affirment comme des pôles d’emploi importants de l’agglomération parisienne. De équipements structurants en grand nombre Les villes nouvelles accueillent non seulement de nombreux équipements pour leur population locale mais aussi des grands équipements dont les zones d’influence dépassent leur territoire comme : - des centres commerciaux régionaux, - des universités10 ou des grandes écoles (ESSEC, école du Trésor, des Ponts et Chaussées...), des instituts spécialisés (Institut franco-Japonais), - des équipements sportifs : golfs (dont le golf national), piscines, patinoire - des équipements de loisirs : bases de loisirs, parcs d’attraction de renommée internationale comme celui d’Euro Disneyland - des équipements culturels de grande taille : théâtre national, médiathèques, cinémas... Des habitations toujours plus éloignées Alors que dans la période précédente les communes rurales perdaient des habitants, cette tendance s’inverse. Les petites villes et villages ruraux en grande couronne se transforment avec l’arrivée de nouveaux habitants. Ceux ci sont attirés par un cadre de vie agréable mais aussi des prix moins élevés. La consommation d’espaces agricoles est forte. Cette transformation dépasse les limites de l’Ile-de-France et touche l’Eure-et-Loir, l’Eure, le Loiret et l’Oise où de nombreux habitants travaillent dans le secteur de Roissy. Les transports 19 millions de déplacements quotidiens en 1983 Le nombre de déplacements11 motorisés quotidiens effectués par les habitants de l’Ile-de-France est en augmentation : 17 millions au milieu des années 1970, 19 millions en 1983 (21 millions estimés en 1995). La proportion des déplacements effectués en voiture ne cesse de croître. Elle de l’ordre de 60% pour l’ensemble de la région tandis que la part des transports en commun reste stable aux environs de 31%. Cette augmentation est due essentiellement aux répartition des déplacements quotidiens motorisés tous motifs en 198312 9 DREIF, Division de l’urbanisme et du schéma directeur, Population emploi : évolutions longues éléments de suivi du SDRIF, mai 2002. 10 Le plan « Université 2000 » lancé en 1990 pour la période 1991-1995 marque un important effort d’investissement pour la construction universitaire. En Ile-de-France, 4 nouvelles universités sont créées : Cergy-Pontoise, Evry-Val d’Essonne, Marne-laVallée, Versailles-Saint-Quentin. En 1998, le programme « Université du 3ème millénaire » (U3M) permet leur développement. Des bibliothèques universitaires sont également construites. 11 Il y a déplacement chaque fois qu’une personne âgée de plus de 6 ans atteint une destination pour un motif donné ; enquête effectuée par la DREIF, la RATP et l’INSEE. 12 Préfecture de la région Ile-de-France, DREIF, Les transports de voyageurs en Ile-de-France, 1988. 105 DREIF, Claude COTTOUR, septembre 2008 Une brève histoire de l'aménagement de Paris et sa région L’Ile-de-France du schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de 1975 au schéma de 1994 12 millions de déplacements quotidiens de banlieue à banlieue effectués à 75% en voiture. Les transports collectifs sont majoritaires (61%) pour effectuer les 3,1 millions de déplacements quotidiens à l’intérieur de Paris et les 4 millions de déplacements de banlieue à Paris et Paris-banlieue (59%). L’importance nouvelle des déplacements banlieuebanlieue montre que le fonctionnement de la région Ile-de-France est devenu plus complexe que par le passé quand Paris monopolisait une grande part de l’attraction pour le travail, les loisirs et les achats. L’augmentation de la population de la grande couronne et l’émergence de pôles multiples en banlieue comme les préfectures, les villes nouvelles, les centres commerciaux ou les zones d’activités expliquent cette augmentation spectaculaire des déplacements banlieue - banlieue. Le cadre administratif des transports Jusqu’au 31 décembre 1990, l’action du syndicat des transports parisiens s’exerce à l’intérieur d’une zone dénommée "la région des transports parisiens" plus restreinte que le territoire régional mais plus étendue que la zone agglomérée. A partir du 1er janvier 1991, la compétence du STP s’étend sur l’ensemble de la région Ile-de-France répartie en huit zones concentriques de tarification de la carte orange. Les transports en commun urbain Prolongement de lignes de métro en banlieue En 1975, le programme de prolongement de lignes de métro en proche banlieue prévu depuis 1928 n’est toujours pas terminé13. La construction active de lignes entre 1972 et 1985 aboutit à l’ouverture de nouveaux tronçons. L’importante liaison nord - sud de la ligne 13 se concrétise par l’ouverture en 1976 du tronçon central réalisé sous la Seine entre les stations ChampsElysées et Invalides. Cette ligne est prolongée en même temps au sud de la porte de Vanves à Châtillon et au nord de Carrefour-Pleyel à Saint-DenisBasilique. En 1980, le tronçon porte de Clichy - AsnièresGennevilliers, au nord-ouest est ouvert à la circulation. La ligne 10 atteint Boulogne-Jean Jaurès en 1980 et Boulogne-pont de Saint-Cloud en 1981. La ligne 7 est prolongée au nord de la porte de la Villette au fort d’Aubervilliers, en 1979 puis à la Courneuve en 1987 et au sud jusqu’au KremlinBicêtre en 1982 puis jusqu’à Villejuif-Louis Aragon en 1985. La ligne 5 atteint Bobigny-Pablo Picasso en 1985. source : DREIF Les transports de voyageurs en Ile-de-France en 1988 13 En 2008 il manque encore le prolongement de la ligne 4 à Montrouge et celui de la ligne 12 à Aubervilliers. 106 DREIF, Claude COTTOUR, septembre 2008 Une brève histoire de l'aménagement de Paris et sa région L’Ile-de-France du schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de 1975 au schéma de 1994 Les prolongements de lignes de métro de 1975 à 2000 (DREIF/DUSD/ME/CC) Après la mise en service de ces prolongements, la croissance du réseau connaît un ralentissement. Seuls 2 prolongements en banlieue sont réalisés entre 1987 et 1998 : - celui de la ligne 1 du pont de Neuilly à La Défense en 1992 - celui de la ligne 13 entre Saint-Denis-Basilique et Saint-Denis-Université en 1998. Le 9 décembre 1977 plusieurs tronçons sont ouverts donnant naissance à un vrai réseau : tronçon central de la ligne A entre Auber et Gare de Lyon, tronçon de la ligne B entre Luxembourg et Châtelet, branche de la ligne A entre Vincennes et Noisy-le-Grand Mont d’Est. En décembre 1980, la ligne A est prolongée de Noisyle-Grand - Mont d’Est à Torcy. Le RER : l’interconnexion des lignes A et B Le schéma de principe de l’interconnexion est pris en considération par le STP le 11 mars 1976 après bien des hésitations et des réserves sur l’intérêt économique de ce projet pharaonique. Cette interconnexion des réseaux SNCF et RATP consiste dans un premier temps à faire arriver toutes les voies des lignes A et B au même niveau à Châtelet, permettant ainsi des correspondances quai à quai. Dans un deuxième temps, elle permet de faire circuler sur les mêmes voies entre Châtelet et gare du Nord les trains RATP du RER B et ceux de la banlieue SNCF sud-est. La station de la Gare de Lyon est entièrement repensée par la réalisation d’une gare souterraine SNCF superposée à la station de la ligne A du RER. En 1988 l’interconnexion entre le réseau RER de la RATP et les lignes de banlieue SNCF est réalisée permettant d’atteindre la ville nouvelle de CergyPontoise. En 1989 la branche de Poissy vient s’y raccorder. Le prolongement de la ligne B entre Châtelet et Gare du Nord est mis en circulation en décembre 1981 avec les liaisons Paris - Roissy-Charles-de-Gaulle et Paris - Mitry-Mory. En 1983, la réalisation complète de la gare du Nord souterraine du RER permet de réaliser l’interconnexion des lignes de bout en bout entre Saint-Rémy-les-Chevreuse et Roissy Mitry - Mory. Des gares nouvelles sont ouvertes : parc des Expositions de Paris-Nord II Villepinte en 1983, SaintMichel-Notre-Dame en 1988, aérogare 2 de Roissy. 107 DREIF, Claude COTTOUR, septembre 2008 Une brève histoire de l'aménagement de Paris et sa région L’Ile-de-France du schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de 1975 au schéma de 1994 Deux projets en concurrence : EOLE - METEOR La saturation de la ligne A du RER dans sa partie centrale (entre Auber et Gare de Lyon) devient problématique à la fin des années 1980. La SNCF et la RATP étudient chacune une solution pour y remédier. La SNCF propose l’aménagement de la ligne Est de banlieue en direction de Chelles et la construction d’un tunnel entre les gares de l’Est et du Nord jusqu’à la gare Saint-Lazare avec une possibilité éventuelle de prolonger la ligne vers l’ouest dite EOLE (Est Ouest Liaison Express). La RATP a une vision parisienne plus marquée et veut s’orienter vers une solution entièrement automatique. La nouvelle ligne de métro METEOR (Métro Est-Ouest Rapide) entièrement construite à l’intérieur de Paris est la solution proposée pour répondre à la surcharge de la ligne A du RER. Source : RATP Les deux projets clairement concurrents sont présentés en 1989 au premier ministre Michel Rocard. Celui-ci ne voulant privilégier ni la SNCF, ni la RATP annonce que les deux projets seront réalisés. La jonction des gares terminales Invalides et Orsay, séparées de 840 mètres est mise en service le 26 septembre 1979, donnant naissance à la transversale rive gauche du RER. La ligne de Versailles, largement modernisée est ainsi reliée à la banlieue sud-est de Paris-Austerlitz. En mai 1980, le secteur Est de la ville nouvelle de Saint-Quentin-en-Yvelines est à son tour desservi. La branche nord-ouest du RER C vallée de Montmorency – Invalides est mise en service le 25 septembre 1988. Le premier tronçon de METEOR (ligne 14) de 7 km construit à très grande profondeur dessert 7 stations dans Paris. Il est mis en service en 1998. La réalisation est prestigieuse, l’architecture des stations Gare de Lyon et Bibliothèque Nationale est spectaculaire. Le projet EOLE est déclaré d’utilité publique le 15 novembre 1991. Les travaux démarrent en 1993. Dans Paris, un souterrain de 2 km relie les gares Haussmann (Saint-Lazare) à Magenta (Gare de l’Est) à une profondeur particulièrement importante vu l’encombrement du sous-sol parisien. La ligne E du RER est mise en service en 1999. La ligne D Le renouveau du tramway L’amorce de la nouvelle liaison nord-sud est créée dès 1987 par le prolongement de la ligne Paris-Nord - Creil jusqu’à la gare de Châtelet - Les Halles. L’interconnexion des réseaux nord et sud-est doit attendre la construction de deux tunnels à sens unique entre Châtelet et Gare de Lyon car l’idée originelle de faire circuler les rames de la ligne D dans le tunnel de la ligne A se révèle impossible au vu de la densité du trafic. Les travaux des souterrains entre Châtelet et la Gare de Lyon s’achèvent en 1995 permettant la création de la ligne D interconnectée entre Creil – Orry – Châtelet et le réseau Sud-Est Melun / Malesherbes En 1975, Marcel Cavaillé, secrétaire d’État aux Transports, demande par lettre aux maires des grandes villes françaises que soit étudiée la possibilité de réintroduire le tramway. En Ile-de-France, un projet de rocade de tramway ceinturant la capitale en traversant les trois départements périphériques, est mis au point en 1985. Les communes de la Seine-Saint-Denis soutenues par le conseil général y sont très favorables. La ligne SaintDenis - Bobigny en site propre est mise en service en décembre 1992. La ligne Puteaux - Issy-Plaine, exploitée par un matériel SNCF ancien jusqu’en 1993, est transformée en ligne de tramway du Val-de-Seine et prolongée jusqu’à la Défense en 1997. La ligne C : création d’un réseau tentaculaire 108 DREIF, Claude COTTOUR, septembre 2008 Une brève histoire de l'aménagement de Paris et sa région L’Ile-de-France du schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de 1975 au schéma de 1994 Les projets ferrés Les idées ne manquent pas pour améliorer les transports aux débuts des années 1990 principalement pour des liaisons de banlieue à banlieue. Le projet de la RATP et du conseil régional, ORBITALE, se présente sous la forme de 2 rocades. La plus proche de Paris relie les terminus des stations de métro. La seconde plus loin est une rocade par tronçon de tram ou bus en site propre avec 3 branches pour desservir Vélizy-Villacoublay, Orly et le plateau de Saclay et Créteil-Bonneuil. Le projet de la SNCF, LUTECE, concerne 4 liaisons de rocade formant une très grande ceinture permettant de relier Saint-Quentin-en-Yvelines à Evry et à Melun-Sénart ; Pontoise à Roissy , Cergy à Massy et une autre tangentielle à l’est entre Roissy et Melun. Le projet MIRE14 de la SNCF aux marges de l’Ilede-France doit assurer le maximum de connections entre les réseaux de banlieue, nationaux et TGV en évitant au maximum Paris Les routes : priorité aux rocades Dans les années 1970, l’Etat finance en moyenne chaque année 3 milliards de francs de travaux pour la réalisation du réseau autoroutier d’Ile-de-France15. Les autoroutes radiales actuelles sont ainsi pratiquement toutes réalisées (A1, A3, A6, A13) ou en chantier en 1975 (A4 et A15). Après la réalisation du boulevard périphérique en 1973, l’effort financier de l’Etat et la Région se porte sur la réalisation de l’autoroute de rocade A86. Mais la crise économique réduit rapidement les budgets consacrés aux travaux routiers. Les travaux permettant de terminer les 80 kilomètres de la rocade A86 sont complexes pour insérer cette voie rapide dans le milieu urbain avec les mesures imposées en matière d’environnement. Plus loin en grande couronne une troisième rocade se profile. L’autoroute A104, baptisée la Francilienne, contourne l’agglomération au sud et à l’est. Fin des années 1980, des projets de réseau autoroutier en souterrain pour désengorger Paris Au milieu des années 1980, apparaît l’idée de doublement du boulevard périphérique sud en viaduc. A la fin de la décennie, des projets de voiries rapides traversant Paris réapparaissent non plus en viaduc ou au niveau du sol comme dans les années 1960 mais en souterrain. Des groupes de travaux publics proposent de réaliser les travaux en échange d’une concession d’exploitation. Un accord est signé entre la ville de Paris, la préfecture de police et GTM Entrepose pour étudier l’impact de leur projet sur la circulation parisienne. Les études montrent un accroissement des déplacements en voiture et pour des liaisons banlieue-banlieue à travers Paris. Ces projets aux noms de LASER16 et HYSOPE17 pour Paris, sont complétés par le vaste réseau souterrain imaginé par le conseil régional d’Ile-deFrance ICARE18 et par celui du conseil général des Hauts-de-Seine, MUSE19, dont le principe est repris dans le schéma directeur de la région Ile-de-France de 1994. Les coûts sont faramineux. Ces projets sont finalement abandonnés. Ils n’ont pas fait la preuve de leur efficacité pour réduire la circulation en surface. De plus les problèmes d’évacuation des gaz d’échappement et de la sécurité dans les tunnels ne sont pas vraiment résolus. DREIF/DUSD/ME/CC d’après le Livre blanc de l’Ile-de-France DREIF/ IAURIF 14 Missions inter-régionales express. Préfecture de la région d’Ile-de-France, DREIF, Division des infrastructures et des transports, les transports de voyageurs en Ilede-France 16 Liaison automobile souterraine express régionale. 17 Nom d’une plante aromatique qui facilite la décongestion des poumons. 18 Infrastructure concédée d’autoroute régionale enterrée. 19 Maille urbaine souterraine express. 15 109 DREIF, Claude COTTOUR, septembre 2008 Une brève histoire de l'aménagement de Paris et sa région L’Ile-de-France du schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de 1975 au schéma de 1994 projet LASER (en haut) et projet HYSOPE (en bas) projet ICARE (source la Charte de l’Ile-de-France) Développement des liaisons vers l’extérieur de la région Le réseau des TGV Paris est au centre d’un réseau de transports national et international de grande qualité avec les lignes de trains rapides (TGV) permettant d’accéder en un temps très court aux grandes villes françaises et européennes. 3 lignes de TGV ont été mises en service : la ligne sud-est en 1981, la ligne Atlantique et la ligne du Nord. Pour permettre des liaisons directes de province à province, évitant la capitale, ces lignes sont reliées par une infrastructure de 102 km de long qui contourne Paris par l’est. 3 gares (Massy, Marne-la-Vallée et Roissy) implantées en banlieue dans des pôles majeurs de développement desservis par le RER offrent de nouveaux accès à la clientèle des TGV pour les habitants de l’agglomération parisienne.. Les aéroports Paris possède l’un des premiers systèmes aéroportuaires du monde avec les aéroports d’Orly et de Roissy. L’aéroport de Roissy Charles de Gaulle s’étend sur 3 200 hectares, soit le double de Londres Heathrow ou de Francfort. Ouverte en 1974 avec une seule aérogare, la plate-forme se développe rapidement. Une deuxième aérogare de conception modulable ouvre ses premiers halls d’embarquement en 1982. En 1994 le trafic passager atteint 28 millions de voyageurs. 110 DREIF, Claude COTTOUR, septembre 2008 Une brève histoire de l'aménagement de Paris et sa région L’Ile-de-France du schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de 1975 au schéma de 1994 Une plus grande protection des sites naturels et du paysage En Ile-de-France, la sensibilisation à la protection des paysages remarquables et monuments est très ancienne. La protection de la forêt remonte à l’époque médiévale, celle des sites et monuments naturels à la loi du 21 avril 1906 et celle des monuments naturels et des sites de caractère artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque à la loi du 2 mai 1930. La préservation des grands massifs forestiers, des grands châteaux et de leurs perspectives (Versailles, Saint-Germain-en-Laye, Marly-le-Roi, Sceaux, Meudon, Saint-Cloud) est inscrite dans le premier plan d’aménagement de la région parisienne approuvé en 1939. Le PARP de 1956 définit des zones de protection générale limitant l’urbanisation en zone rurale autour de l’agglomération parisienne. Le PADOG de 1960 délimite une zone de protection régionale recouvrant les paysages naturels. Le SDAU de 1976 crée des zones naturelles d’équilibre. Les parcs naturels régionaux (PNR) En 1967 les parcs naturels régionaux (PNR) sont créés par décret. Le concept apparaît en France à la suite des réflexions de la DATAR sur l’avenir des territoires ruraux. En Ile-de-France, la pression de l’urbanisation sur les sites les plus fragiles provoque dès le début des années 1960 la mobilisation des habitants et des élus locaux. Suite à leur action, une proposition de loi pour la création d’un parc naturel régional de la vallée de Chevreuse est déposée en 1973. Le Gouvernement signe le décret du 24 octobre 1975 qui permet aux régions de créer et de financer les PNR des études jusqu’au fonctionnement. Le conseil régional d’Ile-de-France bien qu’ayant donné son approbation à la phase d’étude du PNR de Chevreuse en 1979, devant ainsi en assumer une partie du financement, cherche à se désengager « en se demandant si les intérêts régionaux se trouvaient présents dans le PNR de Chevreuse ou si le PNR ne servirait pas uniquement aux intérêts d’une minorité privilégiée qui habitait la vallée »20. Le parc naturel de Chevreuse, regoupant 19 communes, est officiellement créé en décembre 1985. Le décret de 1988 précise la procédure de création d’un PNR et instaure le principe de la révision décennale de leur classement. La loi du 8 janvier 1993, dite « loi paysage «, précisée par le décret d’application du 2 septembre 1994 donne une consécration législative aux PNR. En Ile-de-France, de nombreux projets de création de nouveaux parcs sont à l’étude en 1994. Le PNR du Vexin au nord verra le jour en 1995 et celui du Gâtinais au sud en 1999. Chevreuse : parc naturel régional de Chevreuse (photographie Claude Cottour) 20 DESROCHES, Serge, Les défis de l’agriculture périurbaine dans une société en métamorphose. Étude comparative des transformations au Sud-Ouest de Versailles et au Nord-Est de Montréal, thèse, Université de Montréal, département de géographie, mai 1999. 111 DREIF, Claude COTTOUR, septembre 2008 Une brève histoire de l'aménagement de Paris et sa région L’Ile-de-France du schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de 1975 au schéma de 1994 Des déséquilibres et des difficultés Les activités et les emplois sont inégalement répartis Les difficultés de se déplacer persistent Au début des années 1990, les déséquilibres constatés depuis des décennies ne se sont pas atténués. Le territoire de l’Ile-de-France présente des disparités sociales et économiques entre le centre et la périphérie, entre l’est et l’ouest, le nord et le sud. Plus de 800 km d’autoroutes sont en service en 1990. Cependant les embouteillages persistent aux heures de pointe, malgré les systèmes mis en place pour gérer le trafic. L’ensemble du réseau est affecté par le foisonnement anarchique du stationnement. Malgré les améliorations importantes des réseaux depuis la fin des années 1960, les conditions restent difficiles sur certaines lignes de transport en commun : fréquence insuffisante, attente importante aux heures creuses, interruption du service trop tôt le soir, vétusté du matériel qui entraîne des incidents à répétition et un sentiment d’insécurité. Le manque de liaisons de banlieue à banlieue et d’accès rapide aux aéroports oblige des millions de banlieusards soit à de longs déplacements avec de nombreux changements fatigants, soit le plus souvent à l’utilisation de la voiture. L’emploi reste concentré à Paris, principalement, dans les arrondissements ouest, et dans le quart sud-ouest de l’agglomération qui accueille les activités tertiaires et industrielles de recherche et conception de haute technicité. La répartition inégale des emplois constitue un important facteur de disparités fiscales. La répartition inégale de la richesse se traduit par d’importants écarts dans les niveaux d’équipement et de service des communes. Les sites où se rassemblent les activités économiques les plus valorisées coïncident avec le lieu de résidence des populations les plus favorisées. Les anciennes zones industrielles de la fin du XIXe siècle sont les plus touchées par la crise économique à partir de 1975. Les ouvriers les moins qualifiés, les étrangers, les femmes sont les plus fragilisés. Ces populations sont souvent exclues des circuits habituels d’accès au logement et se retrouvent dans des îlots d’habitations vétustes, inadaptées ou en voie de dégradation. Le quart nord-est de l’agglomération concentre les zones les plus défavorisées où les pertes d’emploi industriels ne sont pas compensées par des emplois tertiaires et où la population est la moins formée et la plus démunie. La répartition inégale des emplois entraîne également des surcharges sur les lignnes de transport en commun et difficultés pour les voyageurs. Crises des banlieues Certains quartiers de banlieue concentrent les problèmes sociaux de notre société depuis le milieu des années 1970 : accumulation de familles pauvres souvent immigrées mal intégrées ne trouvant pas de logement ailleurs, chômage des jeunes en situation d’échec scolaire, manque de perspective de sortir de la cité, délinquance, drogue, fanatisme religieux... Ces quartiers sont le plus souvent les anciennes ZUP ou grands ensembles des années 1958 – 1972. Leur nom est fortement médiatisé suite aux actes de violences urbaines : les Bosquets à Montfermeil et Clichy-sous-Bois, le Val-Fourré à Mantes-la-Jolie, la cité des Indes à Sartrouville, la Noé à Chantelouples-Vignes, la Grande-Borne à Grigny, les Tarterets à Corbeil... Les politiques de la ville La situation globale des quartiers défavorisés ne s’est pas améliorée malgré les nombreuses politiques menées depuis le début des années 197021. Dès 1971, le SRERP et l’IAURP, alarmés par la dégradation du climat social de plusieurs grands ensem- 21 La Documentation française, La politique de la ville (1970-2005) - 35 ans d’expérimentations, Vie publique, 2006, www.viepublique.fr/politiques-publiques/politique-ville/chronologie 112 DREIF, Claude COTTOUR, septembre 2008 Une brève histoire de l'aménagement de Paris et sa région L’Ile-de-France du schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de 1975 au schéma de 1994 bles créent un groupe de travail sur les problèmes sociaux des grands ensembles avec les bailleurs de la région parisienne. A l’initiative du préfet, chef du SRERP, un « club habitat et vie sociale » est instauré. Ce groupe lance des études pour recueillir de l’information sur la vie quotidienne des habitants de neuf grands ensembles de la région parisienne22 et sur l’endettement des ménages23. S’inspirant des réflexions menées en Ile-de-France, un groupe de réflexion national « habitat et vie sociale » (HVS) est créé en 1973 à l’instigation de Robert Lion, directeur de la construction sur le devenir des grands ensembles. Le constat dressé est sombre : pauvreté et atomisation de la vie quotidienne, faiblesse des structures sociales locales, ségrégation interne entre les groupes les plus pauvres et les groupes qui attendent pour épargner en vue d’une accession ultérieure à la propriété individuelle, ghettoïsation des jeunes. Les remèdes proposés sont la rénovation de l’habitat le plus dégradé, et surtout le développement d’une vie sociale communautaire, l’animation et la participation des habitants. Le premier « plan banlieue » est lancé en 1977 par Jacques Barrot, secrétaire d’État au logement. Des contrats sont passés entre les villes, les organismes HLM et l’Etat afin d’aménager 53 sites en banlieue. 39 opérations sont lancées en France dont 12 en Ilede-France24. La procédure HVS tente de corriger les défauts les plus évidents de ces quartiers et de réhabiliter les HLM avec l’aide financière de l’État. Après les violents incidents du printemps 1981 dans le quartier du Toxteth à Liverpool et ceux de l’été 1981 dans le quartier des Minguettes à Vénissieux (Rhône), la DREIF (ex SRERP) et l’IAURIF s’attachent à mieux cerner les problèmes de certaines cités de la banlieue parisienne25. En décembre 1981, le conseil des ministres institue la commission nationale pour le développement social des quartiers chargée de la mise en œuvre de programmes de réhabilitation. Une circulaire prévoit la création de zones d’éducation prioritaires (renforcement sélectif de l’action éducative dans les zones et dans les milieux sociaux où le taux d’échec scolaire est le plus élevé). Fin 1982, Hubert Dubedout, maire de Grenoble, présente son rapport sur le développement social des quartiers et en janvier 1983 la commission des maires sur la sécurité, présidée par Gilbert Bonnemaison remet au premier ministre, un rapport intitulé « Face à la délinquance : prévention, répression, solidarité ». En novembre 1983, la mission Banlieues 89 est créée sous la direction des architectes Roland Castro et Michel Cantal-Dupart pour mettre en œuvre des projets de réhabilitation, d’aménagement et de désenclavement des banlieues tout en réintroduisant l’esthétique dans ces quartiers. En Ile-de-France, le contrat de plan Etat - Région 1984-1988 intègre le développement social de 28 quartiers. Après les lois de décentralisation donnant plus de pouvoirs en matière d’urbanisme aux communes, l’Etat crée en 1984 des nouvelles dispositions pour définir, animer et coordonner les politiques relevant de sa responsabilité destinées à améliorer le cadre de vie urbain. Le décret du 28 octobre 1988 crée un conseil national et un comité interministériel des villes et du développement social urbain et une délégation interministérielle à la ville et au développement social urbain dirigée par Yves Dauge. La loi du 31 mai 1990 vise à la mise en œuvre du droit au logement. Elle rend obligatoire l’élaboration d’un plan départemental d’action pour le logement des personnes défavorisées et prévoit l’institution d’un fonds de solidarité pour le logement (FSL) ainsi que des protocoles d’occupation du patrimoine social (POPS). Les POPS fixent des objectifs en terme d’accueil de populations défavorisées. Le 4 décembre 1990, lors des assises nationales « Banlieues 89 », le président de la République, François Mitterrand, annonce un plan de rénovation des quartiers défavorisés sur 5 ans et estime qu’il faut « casser partout le mécanisme de la ségrégation ». Il annonce la création d’un ministère chargé de coordonner les actions en faveur de ces quartiers et préconise la solidarité entre les communes riches et les communes pauvres. 22 SRERP, Division de l’urbanisme opérationnel et du logement, Club habitat et vie sociale, L’amélioration des ensembles de logements sociaux, rencontre du 4 novembre 1976, documentation DREIF : les 4000 à la Courneuve, Bois l’Abbé à Champigny-surMarne, les Gaziers à Orly, la Grande Borne à Grigny, les Petits Bois à Versailles, Trappes ouest, ZUP d’Argenteuil, Curial-Cambrai à Paris XIXe. 23 SRERP, Division de l’urbanisme opérationnel et du logement, RAVOUNA, Jacqueline, Le phénomène des dettes de loyers dans les organismes HLM de la région parisienne, juin 1973. 24 Préfecture de la région d’Ile-de-France, DREIF, Division de la construction et de l’habitat, Bilan des opérations habitat et vie sociale, février 1988. 25 DREIF/IAURIF, Information et réflexion pour les îlots sensibles, 11/1981, 11 fascicules. 113 DREIF, Claude COTTOUR, septembre 2008 Une brève histoire de l'aménagement de Paris et sa région L’Ile-de-France du schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de 1975 au schéma de 1994 Le ministre de la ville est nommé pour la première fois en décembre 199026. Chargé de préparer et de mettre en œuvre la politique de la ville, il a autorité sur la délégation interministérielle à la ville et au développement urbain, et sur la délégation à la rénovation des banlieues. 13 sous-préfets chargés de mission pour la politique de la ville sont nommés en janvier 1991. La loi du 13 mai 1991 institue une dotation de solidarité urbaine et un fonds de solidarité des communes de la région d’Ile-de-France, réforme la dotation globale de fonctionnement des communes et des départements et modifie le code des communes. de la ville. Elle instaure les programmes locaux pour l’habitat (PLH). Malgré tous ces dispositifs, les risques de violence urbaine sont jugés de plus inquiétants. « En 1993, les faits constatés par la police […] ont été multipliés par quatre en France »27. Ces actes de violence sont commis de plus en plus par des mineurs de plus en plus jeunes. On assiste parfois à des embrasements qui s’apparentent à des guérillas urbaines. « Une trentaine de quartiers, dont la moitié se trouve située en région parisienne, peuvent être catalogués comme “hyper sensibles”, ou particulièrement à risques »28. La loi d’orientation pour la ville du 13 juillet 1991 établit le droit à la ville et pose les principes de la politique Démolition de la barre Renoir à la Courneuve le 8 juin 2000. Parfois, la solution radicale pour résoudre le problème est de détruire une barre, une tour puis deux… pour ouvrir le quartier sur la ville, récréer des rues et supprimer des passages ou coursives qui donnent un sentiment d’insécurité, permettre aux forces de l’ordre et aux services de secours de pénétrer plus aisément dans ces quartiers. (photothèque DREIF) 26 ANDRE, Pierre, Un nouveau pacte de solidarité pour les quartiers, Sénat, rapport n°49, octobre 2006 : « depuis 1990 et jusqu’à juin 2007, 19 ministres vont se succéder avec un positionnement au sein de l’organisation gouvernementale et un périmètre d’activité variables ». 27 BODY-GENDROT, Sophie, LE GUENNEC, Nicole, Mission sur les violences urbaines, Institut des hautes études de la sécurité intérieure (IHESI), La Documentation Française, 1998. 28 BUI-TRONG, Lucienne, L’insécurité des quartiers sensibles : une échelle d’évaluation, Les cahiers de la sécurité intérieure n° 14, 1993. 114 DREIF, Claude COTTOUR, septembre 2008 Une brève histoire de l'aménagement de Paris et sa région L’Ile-de-France du schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de 1975 au schéma de 1994 1983 : de nouvelles idées pour le « Grand Paris » L’évocation d’un Grand Paris dans le PADOG en 196029 ou dans le SDAU de 196530 pas plus que la publication en 1970 du livre de Jean Vaujour, Le plus Grand Paris 31 n’avaient fait l’objet d’aucune remarque. Le Grand Paris de ces documents était celui de la zone agglomérée de Paris ou parfois étendu au bassin parisien. La mission « Banlieue 89 » présente fin 1983 son projet phare du « Grand Paris » à François Mitterrand32. Cette mission a été créée par le premier ministre Pierre Mauroy et installée à Matignon en novembre de la même année. Sa responsabilité est confiée aux architectes Roland Castro et Michel Cantal-Dupart. Les objectifs fixés sont de « promouvoir une réflexion prospective sur le devenir de la périphérie de Paris sans pour autant interférer avec les documents d’urbanisme des collectivités » 33 . Plusieurs expositions et manifestations sont organisées en 1984 et 1985 en présence du président de la République et de plusieurs ministres pour présenter une série de projets tendant « à inverser le processus d’aménagement des villes banlieues »34. Bénéficiant de l’appui bienveillant de François Mitterrand, ces évènement sont très médiatisés. La première version de leur projet de « Grand Paris » recouvre sensiblement l’ancien département de la Seine considéré par ses auteurs comme le parent pauvre du développement. Il s’agit de réparer le tort causé à ces territoires par la capitale et de réduire les disparités territoriales par des nouvelles solidarités entre Paris et sa périphérie. Ce « Grand Paris » serait placé sous l’autorité régalienne d’un supra maire ou un second Paul Delouvrier. Le débat sur la révision du SDAURIF est lancé lors des premières assises de « Banlieue 89 » en décembre 1985 à Enghien. Avec le retour de la gauche au pouvoir en 1988, la mission « tente de retrouver un second souffle ». Intégrée au sein de la délégation interministérielle à la ville et au développement social urbain, la mission publie une seconde version du « Grand Paris » en 1990. « Le pari des cinq Paris » se recentre sur l’aménagement de quatre territoires intercommunaux conçus comme autant de Paris périphériques en mesure de rivaliser avec la capitale : Seine amont (d’Ivry à Villeneuve-le-Roi), les Hauts de Paris (d’Issy-les-Moulineaux à Antony), Paris presqu’île (de Puteaux à Gennevilliers), Paris la Plaine (de SaintDenis à Bondy)35. Le projet concernant notamment Paris Amont est de faire un Manhattan sur Seine, pendant de la Défense à l’Est, bâti sur une île artificiellement créée entre les voies ferrées des gares de Lyon et d’Austerlitz, grâce à la couverture d’un bras confluent à la Seine. Ce courant de pensée s’oppose à la fin des années 1980 aux réflexions des architectes de l’association « 75021 »36 menée par Yves Lion et Christian de Portzamparc, auteurs de « l’appel pour une métropole nommée Paris ». Pour cette association la métropole doit recouvrir toute la région parisienne y compris les villes nouvelles pour renforcer la compétitivité internationale de l’aire métropolitaine37. « Le statut d’OVNI du « Grand Paris » dans le champ conventionnel de la planification urbaine intrigue, fait mouche ou suscite inversement la condescendance » 38 . « L’impact physique de l’action de « Banlieues 89 » sur les périphéries semble, à de rares exceptions près, discutable [...] l’impact culturel et politique [...] paraît quant à lui beaucoup plus décisif »39. Ces propositions apportent un éclairage nouveau aux réflexions préalables à la révision du SDAUIF et sont poursuivies par des études sur des problématiques spécifiques concernant notamment la zone centrale de l’agglomération. 29 PADOG, p.104. SDAU, p.27 et 45. 31 VAUJOUR, Jean, Le plus grand Paris, PUF, 1970. 32 Murs, Murs, Le Grand-Paris pour une capitale à l’échelle européenne, cahiers de Banlieues 89, supplément au n°14, avril 1986. 33 MAUROY, Pierre, Lettre de mission du 7 novembre 1983. 34 H, revue de l’habitat social, Banlieues 89, 73 projets pour faire la ville, n°95 avril 1984. 35 Banlieues 89, Le pari des cinq Paris, juin 1990. 36 J. Bardet, G. Bouchez, J.P. Buffi, P. Colombier, R. Dottelonde, F. Leclercq, Y. Lion, C. Parent, A. Pélissier, C. de Porzamparc, P. Robert, R. Simounet, F. Soler, G. Thurnauer, C. Vasconi. 37 BAYLE, Christophe, 75021-Paris image, identité territoire, revue urbanisme n°226/227, août, sep. oct. 1988. 38 MOUROUX, Françoise, Le Grand Paris de Banlieues 89, un pur exercice de style ?, revue Urbanisme n°333, nov. déc. 2003. 39 MOUROUX, Françoise, De Banlieues 89 à Jean-Louis Borloo, revue Urbanisme n°332, sep. oct. 2003. 30 115 DREIF, Claude COTTOUR, septembre 2008 Le Grand Paris de 1983 de la «Mission Banlieue 89» Une brève histoire de l'aménagement de Paris et sa région L’Ile-de-France du schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de 1975 au schéma de 1994 116 DREIF, Claude COTTOUR, septembre 2008