l`innovation en italie
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CONFERENCE-DEBAT CYCLE DE CONFERENCES – "REPERES SUR L'INNOVATION" L'INNOVATION EN ITALIE JEUDI 4 DECEMBRE 2003 - PARIS Président de séance : Guido Frigessi di Rattalma Introduction par Denis Randet, Délégué général, ANRT Les caractéristiques du système de recherche et d’innovation Guido Frigessi di Rattalma, VP AIRI Les perspectives de la recherche et de l’innovation en Italie Nicoletta Amodio, Direction pour la recherche et l’innovation, Confindustria Repères géopolitiques, économiques et culturels Luigi Nicolais, Professeur de l’Université de Naples « Federico II », Député à la recherche de la Région Campanie LES ACTEURS DE L’INNOVATION EN ITALIE : ECHANGE D’ EXPERIENCES Modérateur : Luigi Lesca, Directeur ENEA § L’attractivité de la recherche en Italie Andrea Cuomo, VP Advanced System Technologies, ST Microelectronics § Innovation de produit et innovation de filière Massimo Nini, Administrateur délégué Textileitaly Srl § Le rôle des parcs scientifiques et technologique comme interface recherche/économie/collectivités locales Eugenio Corti, Président des parcs scientifiques et technologiques § Les nanotechnologies en Italie : l’initiative de Nanotec IT Guido Frigessi di Rattalma, VP AIRI § L’innovation dans les organismes de recherche Luigi Lesca, Directeur ENEA Conférence organisée par l’ANRT, en collaboration avec l’Ambassade d’Italie en France, avec le soutien de l’AFIRIT. Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris Sommaire Introduction Denis Randet Délégué général, ANRT 5 Les caractéristiques du système de recherche et d’innovation Guido Frigessi di Rattalma VP AIRI 7 Les perspectives de la recherche et de l’innovation en Italie Nicoletta Amodio Direction pour la recherche et l’innovation, Confindustria 11 Repères géopolitiques, économiques et culturels Luigi Nicolais Professeur de l’Université de Naples « Federico II », Député à la recherche de la Région Campanie 15 LES ACTEURS DE L’INNOVATION EN ITALIE : ECHANGE D’ EXPERIENCES § L’attractivité de la recherche en Italie Andrea Cuomo VP Advanced System Technologies, ST Microelectronics 21 § Innovation de produit et innovation de filière Massimo Nini Administrateur délégué Textileitaly Srl 27 § Le rôle des parcs scientifiques et technologique comme interface recherche/économie/collectivités locales Eugenio Corti Président des parcs scientifiques et technologiques 31 § Les nanotechnologies en Italie : l’initiative de Nanotec IT Guido Frigessi di Rattalma VP AIRI 33 § L’innovation dans les organismes de recherche Luigi Lesca Directeur ENEA 35 3/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris REPERES SUR L’INNOVATION EN ITALIE Introduction Denis Randet Délégué général, ANRT Des liens étroits unissent la France et l’Italie, deux des six pays fondateurs de l’Europe. Le cadre européen constitue, en effet, une référence commune dans le paysage de l’innovation étant donné que la réflexion stratégique ne peut plus se limiter au seul terrain national. Si l’objectif avancé par Bruxelles d’élever les investissements en recherche et développement à hauteur de 3 % du PIB apparaît aujourd’hui largement irréaliste, il permet néanmoins de cerner des vérités et reste très stimulant. Un tel indicateur traduit la faculté des pays à réaliser des combinaisons efficaces entre recherche publique (pour laquelle l’Etat peut se targuer d’avoir encore quelques leviers en main) et privée. Cette dernière ne saurait être gouvernée et se développe plus ou moins selon les conditions réglementaires qu’elle rencontre, dans un milieu de plus en plus international et compétitif. 5/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris Les caractéristiques du système italien de recherche et d’innovation Guido Frigessi di Rattalma VP AIRI L’association italienne pour la recherche industrielle (AIRI) a été créée en 1974 et compte à l’heure actuelle plus de 110 membres (sociétés de biens et de services, centres de recherche publics, associations industrielles, organisations financières) employant environ 30 000 personnes dans le secteur de la recherche et représentant 36 % de l’ensemble de la recherche nationale, 34 % de la recherche industrielle et 33 % de la recherche publique. L’association fournit des services à ses membres : elle étudie pour eux les questions relatives aux politiques nationale ou communautaire et met à leur disposition des outils d’analyse et de développement de leur pôle « recherche ». LE CADRE GENERAL DE LA RECHERCHE EN ITALIE Quelques chiffres En 2001, les montants totaux consacrés à la recherche en Italie s’élèvent à 13,5 millions d’euros, soit 1,11 % du PNB, ce qui constitue un pourcentage faible. La part de la recherche industrielle dans ce total est de 6,68 millions d’euros, soit 49 % de l’ensemble des fonds, contre 32 % pour la recherche universitaire et 19 % pour les organisations publiques. La recherche en Italie emploie plus de 150 000 personnes dont 65 000 chercheurs. Explications La part de l’industrie dans la recherche demeure modeste, du fait de la part prépondérante des petites et moyennes entreprises dans le tissu industriel italien. Celles-ci font de l’innovation et de la recherche, mais ne disposent pas de structures organisées de R&D : elles constituent ainsi une source invisible de recherche, qui n’est pas mise en évidence par les statistiques. En Italie, les grandes entreprises (employant, selon les seuils communautaires, plus de 250 personnes) sont peu nombreuses ; les grands centres de recherche corporate sont donc également rares. Au total, les grandes entreprises couvrent pourtant 83 % de la recherche. 7/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris Perspectives Afin de remédier à cette situation, des pôles technologiques ont été lancés en 2003 et encouragés par le ministère des activités productives. Ces centres ont pour objectif de développer la compétitivité des entreprises et de faciliter la création d’entreprises high-tech en renforçant le soutien à l’innovation dans tous les secteurs et sur l’ensemble du territoire italien. Parmi ces pôles, on compte : • le pôle aérospatial de Turin (ville qui développe également le projet Torino Wireless, consacré aux technologies avancées de l’information et de la communication) ; • le pôle de la Vallée de l’Etna (dont le développement a été impulsé par ST Microelectronics) ; • le pôle de la robotique à Gênes ; • le centre de Venise pour les nanotechnologies ; • le centre de Naples pour les matériaux composites. STRUCTURE DU PAYSAGE DE LA RECHERCHE EN ITALIE L’Italie dispose de plusieurs structures pour encourager la recherche. Les organismes ministériels Certains ministères italiens disposent de départements spécifiques traitant de recherche. Si le ministère de l’éducation, des universités et de la recherche (MIUR) regroupe des actions dans ces trois domaines, d’autres ministères sont également dotés de fonds propres pour mener des activités de recherche. Il s’agit notamment des ministères de l’industrie, de l’agriculture, de l’économie et des finances, de la culture, de l’environnement, de la communication, des affaires étrangères, de la défense, etc. Un poste de ministre de l’innovation et des technologies a été créé après les élections de 2001 (ministre sans portefeuille) afin d’encourager le développement de la société de l’information en Italie. A la différence de la France, l’Italie ne recense pas la dépense totale du pays en matière de recherche : les fonds sont très éparpillés. Les principaux fonds publics dédiés à la recherche Les principaux fonds finançant la recherche poursuivent différents objectifs : • Le fonds FIRB (Fonds pour les Investissements en Recherche de Base) a été créé par la loi de finances 2001. Ce fonds est financé par 10 % des recettes liées à la 8/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris vente de la licence de téléphonie mobile troisième génération (UMTS). Ces disponibilités sont bientôt épuisées, ce qui pose le problème du refinancement du FIRB. • Un programme spécifique FIRS a pour vocation l’aide à la recherche industrielle. • Le FAR (Fonds pour les Aides à la Recherche Industrielle) a subventionné jusqu’en 2003 toute entreprise présentant un projet innovant (ce fonds, limité par l’Union européenne, n’a pas été refinancé). • Le PRIN (PRojets d’Intérêt National) cofinance des projets pour une durée de deux ans, proposés par les universités et par les observatoires astronomiques, astrophysiques et vulcanologiques. • Le PON (Programme Opérationnel National « Recherche, développement technologique et haute formation ») intervient dans les régions les plus défavorisées du Mezzogiorno (il est cofinancé par l’Union européenne). • Le FIT ( Fonds pour l’ Innovation Technologique) est destiné aux projets de recherche industrielle appliquée par opposition au FAR qui prend en charge les projets de recherche fondamentale. Le gouvernement italien encourage parallèlement la recherche des entreprises par des incitations fiscales. L’augmentation de la dépense de recherche sur les trois années précédentes et la dépense annuelle en recherche ne sont pas soumises aux impôts, mais des pourcentages et des limites rendent assez modeste l’effet de cette mesure. Celle-ci se révèle beaucoup moins intéressante que ce qui a été réalisé en France, au Canada ou en Australie. Les centres publics de recherche Les centres publics de recherche sont également dispersés. Le Conseil National de la Recherche (équivalent italien du CNRS) et le Centre de la Matière sont les deux organismes publics principaux de recherche en Italie. D’autres centres sont également actifs en matière de recherche dans des domaines spécifiques : • l’institut de physique nucléaire (INF N) ; • l’organisation pour la recherche météorologique (un nouvel organisme résultant de la fusion de deux instituts) ; • l’agence spatiale italienne (ASI) qui reçoit la plus grosse part des financements du MIUR ; • l’organisation du ministère de l’industrie (structure datant de 1890, financée par les industries elles-mêmes, proche des centres techniques français) ; • l’institut supérieur de santé ; • l’institut du travail ; 9/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris • l’institut italien de la technologie (qui existe depuis 2003 et est financé par le ministère de l’économie et des finances). En Italie, 19 hôpitaux mènent des activités de recherche. Les ministères financent des actions par le biais de comités, mais n’ont généralement pas de structures propres. 10/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris Les perspectives de la recherche et de l’innovation en Italie Nicoletta Amodio Direction pour la recherche et l’innovation, Confindustria Confindustria est une association d’entrepreneurs italiens qui compte 259 associations affiliées, à tous les niveaux (territorial, régional, sectoriel), représentant 111 000 entreprises et 4 200 000 salariés. Elle offre des services à ses membres et a pour tâche d’aider ceux-ci à investir dans le domaine de la recherche et développement pour accroître leur compétitivité. LA RECHERCHE ET L’INNOVATION EN ITALIE Des moyens limités... Les statistiques de 2001 montrent le retard pris par l’Italie en ce qui concerne les dépenses de R&D. Dans les graphiques publiés par la Direction Recherche de la Commission européenne, l’Italie se place derrière l’Espagne, avec 0,69% de son PIB consacré à la recherche en 2003. De même, les montants investis par les entreprises dans ce domaine sont très bas. L’Italie compte 2,5 chercheurs pour 1 000 salariés contre 9,8‰ au Japon, 8,4‰ aux Etats-Unis et 6,2‰ en France. Ces moyens limités rendent compte du faible nombre de brevets détenus par Italie : 3,6 % des brevets mondiaux sont l’œuvre de chercheurs italiens, contre 20,6 % aux Allemands et 27,5 % aux Américains. En conséquence, l’Italie détient une assez faible part d’exportation de produits à haute technologie. Mais ces chiffres sont également la conséquence de la configuration du tissu industriel italien où 90 % des entreprises sont de petite ou de moyenne taille (dans tous les pays, il existe un lien entre les dépenses des entreprises en R&D et leur taille). Les statistiques ne tiennent pas compte de la faculté d’innovation des petites et moyennes entreprises. ... mais quelques constats encourageants Pourtant, malgré ses moyens limités, l’Italie se distingue par la qualité de sa recherche, tant dans le domaine des produits à haute technologie que dans les secteurs traditionnels (textile). Même si elle reste faible, la dépense privée en R&D est croissante. Le nombre de produits créés va également croissant. Devant ces 11/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris constats, Confindustria s’efforce d’aider les entreprises en accroissant leur coopération. Résultats du programme CRAFT Le programme CRAFT mené par l’Union européenne a révélé que les petites et moyennes entreprises italiennes se situaient au premier rang en matière de coordination des activités de recherche. A cet égard, Confindustria a analysé les projets menés entre 1998 et 2002 et en fournit le détail par région et par technologie : dans la plupart des régions, les petites et moyennes entreprises italiennes participent de plus en plus aux activités de R&D dans de nombreux secteurs. La politique en matière de R&D : créer un environnement adéquat pour favoriser l’innovation L’évolution de la part du PIB consacrée aux dépenses publiques en matière de R&D montre un très léger redressement en ce qui concerne l’Italie. Parallèlement, il s’avère que le pourcentage des entreprises collaborant avec des centres de recherche avoisine 5 % : alors que les universités travaillent volontiers avec ces centres, les petites et moyennes entreprises s’en trouvent plus éloignées. Le Parlement italien a récemment introduit des incitations dans ce domaine, valables pour une durée d’un an. Si la majorité des acteurs du secteur de la recherche et de l’innovation a demandé ces mesures, elle n’est pas entièrement satisfaite des propositions gouvernementales. Par ailleurs, la mesure de l’attractivité de l’Italie atteste la présence de facteurs importants : un fort capital technologique, des infrastructures satisfaisantes, des ressources humaines intéressantes et un système industriel qui, lui, pourrait être plus attractif pour de nouveaux investissements. Il s’agit dès lors de continuer à créer un environnement adéquat pour promouvoir l’innovation. Il convient donc : • d’adopter une approche holistique et des solutions ciblées : il faut considérer les marchés financiers et de capitaux ; • de mettre en œuvre un policy mix qui stimule les investissements privés en R&D (davantage d’incitations fiscales doivent voir le jour, ainsi qu’un réel système de fonds publics) ; • de réformer les universités et les centres publics de recherche (cela pose la question de l’évaluation des performances de ces centres et suppose d’instituer de nouvelles formes de coopération entre le privé et le public) ; • d’encourager les nouvelles entreprises à haute technologie ; • d’améliorer le réseau de transfert de technologie. 12/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris Les centres publics de recherche (Conseil National de la Recherche, ENEA, etc) subissent actuellement une réforme importante. Confindustria travaille à faire collaborer les entreprises privées avec ces structures, afin de multiplier les synergies. Le travail avec les universités, notamment, s’avère parfois difficile. Il s’agit non seulement d’un problème réglementaire, mais aussi d’une difficulté d’ordre culturel. Les acteurs doivent apprendre à travailler ensemble et de nombreux exemples prouvent qu’une telle coopération est possible. DEUX ACTIONS DE CONFINDUSTRIA Le réseau de l’innovation (Rete dell’innovazionne) Confindustria a mis en place un réseau comportant l’ensemble des associations membres. Il s’agit de développer les contacts entre les différents acteurs, afin de conduire les structures publiques et privées à coopérer. Confindustria intervient ici comme un intermédiaire, qui peut mieux comprendre les demandes des entreprises et les présenter aux autres acteurs. Carte des compétences R&D des entreprises italiennes Dans ce second projet, Confindustria analyse les projets menés par l’ensemble de ses membres et synthétise les données sous la forme d’une carte, technologie par technologie (alimentaire, agriculture, énergie, chimie, etc). Pour chacun de ces documents, le nom de l’entreprise ainsi que la nature du projet sont conservés. Des partenariats dans d’autres pays ou en Italie sont également montés. La productivité du système italien de recherche Le nombre de publications et de citations ne constitue pas forcément un indicateur suffisant. La productivité des organismes publics italiens de recherche est bonne : le nombre de publications par chercheur est élevé, même si ceux-ci ne sont pas nombreux. Mais les entreprises privées préfèrent souvent se rendre à Munich ou aux Etats-Unis pour déposer un brevet. En Italie, les chefs d’entreprises ne sont pas habitués à convertir les résultats de leurs recherches en un brevet. 13/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris Repères géopolitiques, économiques et culturels Luigi Nicolais Professeur de l’Université de Naples « Federico II », Député à la recherche de la Région Campanie Les modifications à l’œuvre dans le système politique italien actuel : davantage de pouvoirs et de ressources sont dévolus aux régions. Celles-ci, notamment la Campanie, voient leurs moyens d’action radicalement transformés. UNE NOUVELLE DONNE GEOPOLITIQUE Le bouleversement des délocalisations En premier lieu, la situation des industries est modifiée à l’échelon mondial. En raison des faibles coûts salariaux et d’un important potentiel humain, des délocalisations ont lieu vers certains pays. Les nations industrialisées doivent désormais faire de la qualité de leurs produits un avantage compétitif. Cela est particulièrement vrai pour les régions du sud de l’Italie, qui sont conduites à utiliser les savoirs dont elles disposent et à améliorer leurs industries high-tech. La fin de la compétitivité liée aux dévaluations En deuxième lieu, l’euro empêche tout ajustement monétaire : les dévaluations du passé ne peuvent donc plus accroître la compétitivité de l’Italie. Il s’agit au contraire de réaliser des innovations de manière permanente en utilisant la recherche. Les petites et moyennes entreprises n’ont parfois pas les moyens d’effectuer cette recherche elles-mêmes. Elles doivent se tourner vers les universités et les centres publics de recherche. Les grandes entreprises, qui investissaient autrefois dans des centres corporate, sont conduites aujourd’hui à utiliser aussi l’expertise d’autres centres afin de développer des produits dotés d’avantages compétitifs. Bilan : de l’importance des régions Ainsi, le monde est passé de la globalisation à la « glocalisation », où le développement des stratégies de commercialisation s’effectue à l’échelon global, mais l’ancrage reste local. Dans cette perspective, les régions jouent un rôle fondamental. Elles constituent un bon échelon pour le développement de l’innovation 15/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris par les centres de recherche. Les forces et faiblesses de ceux-ci peuvent y être évaluées. AGIR POUR ACCROITRE L’INNOVATION EN ITALIE ET EN EUROPE Le cas de l’innovation en Campanie La Campanie compte 8 000 chercheurs dont 6 500 sont employés dans les 7 universités de la région. Pour les 1 500 restants, ils travaillent notamment dans les 90 centres publics de recherche. Les grandes entreprises sont rares et la plus grande partie des entreprises est de petite ou moyenne taille. La Campanie demeure une région jeune ; 200 000 étudiants y résident. Comment agir ? La Campanie doit développer ses atouts et saisir les opportunités qui se présentent à elle. Sa situation demeure caractéristique de celle de l’Italie : avec 50 % de moins de chercheurs que l’Allemagne ou la France, ce pays détient une bonne productivité scientifique, qui atteste de l’excellence de la production de savoirs. Pourtant, peu de brevets sont déposés et les Italiens manifestent peu d’intérêt pour la recherche appliquée. Celle-ci jouit d’une réputation peu flatteuse car elle s’écarte de la « vraie » science. De plus, des connotations politiques lui sont attachées : alors que la recherche fondamentale est perçue comme de gauche, la recherche appliquée est liée dans les esprits à la droite. Les Italiens doivent donc apprendre à utiliser les connaissances qu’ils produisent. Aussi, il revient aux acteurs publics de donner des incitations pour regarder autrement la connaissance, pour la gérer plutôt que l’améliorer en permanence. A la question « que faire ? », plusieurs réponses peuvent être apportées. Il s’agit notamment : • de simplifier les procédures administratives, qui sont très lourdes en Italie ; • d’intégrer les politiques régionales avec les directives nationales et européennes (les divergences sont souvent source de confusion : le gouvernement régional pourrait encourager la R&D, le gouvernement national, la recherche fondamentale et l’Union européenne faire tenir ensemble les objectifs spécifiques des différents échelons) ; • d’augmenter l’automatisation ; • de partager les bonnes pratiques internationales (les best international practices sont trop souvent ignorées des entreprises ou des universités italiennes). 16/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris Des buts poursuivis en commun Dans toutes ces actions, il faudra veiller à : • obtenir une masse critique (pour cela, la coopération est indispensable ; il faut interagir, travailler ensemble et mettre en place une gouvernance du système de la recherche qui encourage la recherche fondamentale et définisse des buts) ; • passer des districts industriels aux districts technologiques ; • donner un modèle d’outils financiers ; • développer une recherche state-of-the-art ; • encourager la création d’entreprises high-tech ; • donner des opportunités aux chercheurs tant dans le domaine de la recherche fondamentale que dans celui de la recherche appliquée ; • augmenter le rôle des universités et de la recherche publique, institutions qui constituent la base du développement de l’innovation (les universités semblent commencer à encourager les brevets, mais il ne s’agit que d’un début) ; augmenter la présence de capital humain dans le monde de la recherche ; • utiliser l’évaluation pour augmenter la qualité et la performance ; • accélérer, simplifier et développer les procédures administratives (l’obtention des fonds est encore trop compliquée ; elle n’est pas accompagnée de procédures de suivi ou d’évaluation). LES ACTIONS MENEES PAR LA CAMPANIE Les centres de compétences, moteur de l’innovation 7 centres de compétences ont été développés en Campanie. Leur mission consiste à appuyer les compagnies locales grâce à leur haut niveau de compétences. Les secteurs stratégiques retenus sont les suivants : • analyse et gestion du risque environnemental ; • sciences du vivant ; • conservation et promotion du patrimoine culturel et environnemental ; • produits de l’agriculture et de l’alimentation ; • nouvelles technologies pour les produits manufacturés ; • technologies de l’information et de la communication (le software engineering dispose dès à présent d’une forte présence dans la région) ; • transport (terrestre, maritime, aérien). 17/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris Les actions des districts technologiques Par ailleurs, des districts technologiques ont été mis en place pour les polymères et des matériaux composites. Leur mission consiste à recenser les connaissances les plus avancées dans ce domaine, développer un système organisant les savoir-faire ainsi que des cursus pratiques de formation pour les post-doctorants. Les partenaires de ces actions englobent quelques banques, le ministère de l’éducation, des universités et de la recherche, et des acteurs privés ayant tous un intérêt pour les polymères organiques. Résultats En Campanie, 2,5 % du PNB de la région sont d’ores et déjà consacrés à la recherche. Ce chiffre, qui représente le double de la moyenne italienne, couronne les efforts réalisés dans ce domaine : grâce à lui, la région se rapproche des pourcentages affichés par le nord de l’Italie. Les entreprises semblent bien entrer sur le chemin de l’innovation. Mais les unités doivent apprendre à utiliser au mieux la connaissance. Il ne suffit pas de produire du savoir, encore faut-il apprendre à appliquer la recherche et à transmettre une méthodologie adéquate qui aboutisse au dépôt de brevets. 18/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris DEBAT L’Italie, notamment la Campanie, rencontre des problèmes culturels : les opportunités données par les universités italiennes ne permettent pas le transfert des savoirs. Luigi Nicolais : L’enjeu principal est de faire prendre conscience aux entreprises de la valeur de la connaissance. Après 8 mois, l’argent investi en Campanie a été évalué sur la base des interactions qui ont été menées avec les entreprises. Dans les programmes subventionnés, la région s’efforce à la fois d’encourager les activités des centres de recherche qui s’investissent dans la coopération avec les entreprises et d’amener les entreprises à coopérer avec les départements de l’université. Les dépenses de R&D en Campanie représentaient moins de 1% du PIB il y a quelques mois. Certains des fonds alloués proviennent de l’Union européenne : ils sont utilisés dans la mise en place d’infrastructures matérielles et immatérielles. 6 % des fonds de l’UE alloués à l’Italie sont ainsi dévolu à la recherche (privée et publique). Les centres publics de recherche doivent développer des actions vers le privé. Un comité d’évaluation a été nommé pour assurer le suivi de l’utilisation des fonds alloués. Il est composé de deux personnalités américaines, compétentes dans les questions de recherche appliquée, d’un expert britannique et de deux directeurs de recherche italiens. Aucun professeur académique ne figure dans le comité car celui-ci évalue la capacité à appliquer la connaissance, non à produire des savoirs. Une loi récemment passée, s’efforce de promouvoir la recherche appliquée en instituant des propositions conjointes entre les centres publics de recherche et les entreprises. 140 des projets retenus pour les financements proviennent d’entreprises implantées en Campanie. La Campanie a montré combien cette politique favorisait les interactions entre les acteurs privés et publics. Une approche bottom-up, qui partirait des entreprises elles-mêmes et permettrait de mieux développer des interactions, augmenterait la productivité. Luigi Nicolais : l’approche bottom-up est aussi essentielle que la démarche topdown. Le problème consiste à promouvoir ces actions sur le long terme : pour construire ce modèle, les deux approches sont jugées indispensables. Les procédures administratives italiennes sont complexes . Qu’elles sont les structures existantes pour accompagner les entreprises étrangères souhaitant investir en Italie ? Nicoletta Amodio : Confindustria remplit très bien cet office. L’Agence nationale pour le développement ne soutient que les entrepreneurs voulant investir dans le sud. 19/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris LES ACTEURS DE L ’INNOVATION EN ITALIE L’attractivité de la recherche en Italie Andrea Cuomo VP Advanced System Technologies, ST Microelectronics Il est nécessaire non seulement de disposer de bons chercheurs et de financements mais aussi de développer une bonne manière de donner cet argent, en instituant une coopération satisfaisante entre les acteurs publics et privés, à l’échelon mondial. DES MOYENS LIMITES DANS LE SECTEUR PUBLIC La dépense publique en R&D L’Italie n’investit pas assez dans le domaine de la recherche : une comparaison européenne la place parmi les pays aux plus faibles dépenses en R&D, avec l’Espagne et la Grèce. Son nombre de chercheurs est par ailleurs réduit, la partie publique embauchant difficilement des doctorants. Quant au nombre de brevets, il est fatalement peu élevé. A ce titre, on constate pourtant que la productivité par chercheur est semblable à celle obtenue par les scientifiques français, avec un nombre de chercheurs certes moindre. On peut pourtant s’interroger sur la valeur des indicateurs utilisés pour rendre compte de cette productivité (publications et citations). Les dépenses publiques en R&D sont faibles (0,64 % du PIB), proches de celles réalisées par l’Espagne ou la Grande-Bretagne. Les universités ne sont pas bien financées. L’exemple de l’école polytechnique de Milan montre le fort accroissement des crédits cumulés, alors que les crédits annuels diminuent depuis 1998. Bien souvent, les universités ne reçoivent pas tout l’argent qui leur est dû. Seules certaines d’entre elles parviennent à s’organiser afin de ne pas placer l’ensemble de ces financements dans les dépenses en personnel (celles-ci représentent jusqu’à 95 % des ressources de certaines universités). Le Conseil National de la Recherche (CNR) Le CNR est une institution employant environ 8 000 personnes, dont une moitié de chercheurs. Ce Conseil a été récemment rajeuni ; la moyenne d’âge actuelle est de 21/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris 45 ans. Le CNR occupe un rôle central dans l’organisation de la recherche en Italie. Il gère plus d’une centaine d’instituts de recherche et assure la coordination de plusieurs programmes de recherche nationaux et internationaux : le CNR participe à 508 projets communautaires et est associé dans 333 accords bilatéraux de recherche avec 58 pays. Son budget est d’environ 800 millions d’euros. Une importante réforme est en cours au sein du CNR : un commissaire unique a été nommé, qui dispose de tous les pouvoirs. Peut-être saura-t-il faire de l’organisation une institution de recherche de valeur mondiale ? Bilan En résumé, il apparaît que la recherche publique italienne bénéficie de bons chercheurs et d’un excellent niveau d’éducation, mais souffre d’un certain éparpillement des financements (les universités et les centres sont trop nombreux). Des centres d’excellence se développent, à Gênes plutôt qu’à Milan ou Turin. Mais les contraintes en matière de recherche y sont beaucoup plus fortes qu’aux EtatsUnis et en Suisse : il n’existe en effet pas assez de grandes entreprises capables de supporter le coût de la recherche. Pourtant, une volonté de faire changer les choses se fait de plus en plus nettement sentir. Le faible coût d’un PhD en Italie (40 000 euros pour 3 ans) ou d’un chercheur (30 000 euros par an suffisent pour financer un poste) constitue un atout de taille dans cette optique. Ainsi, si la recherche publique en Italie apparaît sous-financée et dispersée, il existe des possibilités de coopérer à bon coût et de développer des îlots d’excellence mondiale. LE ROLE JOUE PAR LE SECTEUR PRIVE EN MATIERE DE RECHERCHE ET D’INNOVATION Quelques faits Les dépenses consacrées par les entreprises à la recherche en Italie ne sont pas élevées : elles représentent moins de la moitié (souvent un tiers) de celles qui sont effectuées par les sociétés d’autres pays. En Allemagne, les dépenses du secteur privé dédiées à la recherche constituent 1,76 % du PIB, contre 0,56 % en Italie. Si l’on considère les coûts salariaux à l’échelle mondiale, en prenant pour base le coût moyen d’un designer américain (base 100, en valeur réelle), l’Allemagne atteint 81 points, la France, 60 et l’Italie du Sud, 29, ce qui rend ces régions compétitives avec l’Europe de l’Est et l’Afrique du Nord (Prague et le Maroc présentent les chiffres de 22 et 15, respectivement). 22/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris De nombreuses opportunités Le niveau des ingénieurs italiens est réputé. Leur coût est un des plus faibles sur le marché. Ils travaillent en général très bien. Les régions du sud de l’Italie ont gardé cette foi en l’éducation, qui leur fait respecter l’université et leur futur travail. De plus, des subventions importantes sont disponibles dans ces régions. En revanche, il n’existe pas de tissu industriel capable d’exploiter ces potentiels : l’Italie dispose de 4 millions d’entreprises de 1 à 19 salariés et de 63 000 sociétés de 20 à 29 employés. 6000 entreprises emploient entre 99 et 249 personnes. Les grandes entreprises ne sont que 2 500. Ainsi, la structure de l’industrie du pays ne favorise pas la recherche. ST M ICROELECTRONICS Présentation ST Microelectronics, multinationale italo-française spécialisée dans les semiconducteurs et les micro-puces, investit environ 15 % de son chiffre d’affaires dans la R&D. Cet investissement est vital dans ce type de métiers, où un niveau semblable de dépenses doit être conservé, y compris durant les crises du marché. Ainsi, ST Microelectronics a continué à embaucher 2 000 personnes dans ses départements de recherche pendant la période de ralentissement. L’entreprise se développe à partir de quatre sites en Italie : • Catania, qui emploie 4 500 personnes ; • Milan où 4 000 salariés effectuent des recherches en process et conception ; • Lecce ; • Naples. ST Microelectronics réalise une recherche avancée qui lui a permis de devenir leader mondial sur certains segments (en Italie, comme en France) et d’accroître sa compétitivité dans le reste du monde. La stratégie de ST Microelectronics Dans un monde de plus en plus global, où les savoirs stratégiques sont développés dans différents endroits du monde, ST Microelectronics a su trouver des relais pour se développer et toucher des consommateurs globaux grâce à un marketing global mis en œuvre dans des marchés périphériques. La globalisation réduit la prééminence d’un emplacement unique : ST Microelectronics apprend du monde entier, alors que les coûts de la distance se sont considérablement réduits. Il est 23/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris devenu très facile de communiquer ou d’acheminer des matériaux. Partant, la conquête d’un avantage compétitif se trouve renforcée. Si une société comme ST Microelectronics est parvenue à se hisser parmi les leaders mondiaux, c’est qu’elle a su récupérer des connaissances et des savoir-faire du monde entier (notamment de Californie), aider au développement de start-up en Irlande (celle-ci compte aujourd’hui 500 personnes), acheter des sociétés en Angleterre, en Finlande (Nokia), à Grenoble ou à Singapour. Il faut aller chercher dans le monde ces connaissances qui convergent, tout en sachant transférer ces informations dans d’autres pays. Pour accroître sa compétitivité, ST Microelectronics a été cherché les connaissances mondiales et les a implantées dans les pays où elle détenait ses racines historiques. Fédérer les énergies La recherche dans un seul pays n’a pas beaucoup d’intérêt : il est nécessaire de tisser un réseau d’excellence dans l’ensemble du monde. Dans ce domaine, les Etats-Unis sont en train de réaliser des exploits et marquent une nette différence pour les prochaines générations. L’Europe, au contraire, apparaît dispersée. De nombreuses universités nouvelles sont créées en Italie. L’exemple de la Suisse doit pourtant nous apprendre à fédérer les savoirs : ce pays a su – en copiant les EtatsUnis - développer des pôles d’excellence et développer un réseau cohérent de centres de recherche. Pour atteindre la taille critique qui permettrait de rivaliser avec la puissance américaine, trois des principales institutions européennes (le CNR italien, le CNRS français et le Fraunhofer Institut allemand) pourraient s’allier en une agence de recherche européenne. Il est nécessaire de disposer d’un réseau excellent, qui constituerait un partenaire pour de nombreux pays, soucieux de trouver une alternative aux Américains. Einstein disait : « je connais des applications de la recherche plutôt que des recherches appliquées ». Dans ce sens, l’innovation et la mise en réseau doivent aboutir à des résultats concrets. A l’heure actuelle, une politique locale permettra d’obtenir des résultats dans des îlots d’excellence mais sans disposer de la flexibilité nécessaire à un développement plus vaste. Au contraire, une alliance des réseaux de Zurich, Milan et Cambridge permettrait de donner l’ampleur nécessaire pour concurrencer les Américains. 24/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris DEBAT Il est important de mettre en réseau les centres d’excellence et de cibler les financements sur des pôles clés. L’initiative communautaire Eurêka a joué un rôle décisif dans la création de ST Microelectronics. Andrea Cuomo : L’obtention des financements communautaires est soumise à de lourdes procédures, les négociations ont lieu à Bruxelles mais certains pays peuvent ensuite procéder localement à des renégociations portant sur l’ensemble des points. Il faut parfois deux ans pour aboutir à un accord, un délai qui est souvent préjudiciable à la réussite du projet et qui constitue un désastre pour les petites entreprises. En Italie, l’argent parvient très lentement à ses bénéficiaires. La structure d’Eurêka n’est pas appropriée à l’Italie. Il en va autrement pour la France. Il faut réunir les connaissances. Andrea Cuomo : L’Union européenne a déjà œuvré en ce sens en encourageant l’échange des chercheurs par différents programmes (Socrates, etc) et l’harmonisation des ressources humaines par la reconnaissance des diplômes. De fortes particularités nationales persistent pourtant : alors que l’Italie demeure axée sur la créativité, la France dispose d’une méthodologie qui attire plus d’un chercheur en Europe. Il faut réussir à mettre en synergie le capital humain européen autour de projets communs dont on peut espérer une forte valeur ajoutée. La création d’une agence européenne de recherche paraît irréaliste. Une institution d’une telle taille subirait de trop fortes contraintes. Aux Etats-Unis, les agences de recherche n’emploient pas de personnel en propre. Andrea Cuomo : Une agence intracommunautaire est nécessaire, les modalités de création devront être discutées. Le fait de travailler ensemble permet de faire surgir des synergies bénéfiques et confère des degrés de liberté estimables à la direction. Il est préférable d’augmenter la qualité de la recherche plutôt que ses montants globaux. Il est possible d’obtenir davantage d’applications avec des financements semblables. Andrea Cuomo : il est certes possible de faire mieux avec l’argent dont on dispose, à condition de changer la manière dont ces financements sont attribués. Une subvention trop importante déresponsabilise les agents : ceux-ci sont souvent plus ingénieux avec moins d’argent. Chez ST Microelectronics, la direction générale reste dubitative devant un pourcentage d’investissement en R&D qui dépasserait 3 % du 25/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris chiffre d’affaires. Donner de l’argent pour la recherche à un niveau mondial constituerait un premier pas pour le développement d’une recherche d’envergure. La région est un acteur important pour la réussite. Andrea Cuomo : la région constitue bien un acteur important pour ST Microelectronics. Des financements régionaux ont été utilisés en Sicile, à Naples et dans la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur. Ils fournissent une aide pour le développement, non pour la recherche. 26/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris Innovation de produit et innovation de filière Massimo Nini Administrateur délégué Textileitaly Srl L’évolution d’un secteur plus traditionnel en Italie : le secteur textile. La mission de Textileitaly, une compagnie créée il y a deux ans, est d’augmenter la compétitivité de l’industrie textile italienne en offrant des solutions et des services relatifs au commerce électronique, capables d’augmenter les performances des entreprises italiennes et de leur fournir l’environnement technologique le plus avancé. Il est difficile de parler de l’industrie textile dans son ensemble, car les 500 entreprises membres de l’association italienne du textile (ATI) poursuivent des buts très variés et appréhendent le secteur de manière différente. PRESENTATION DE L’INDUSTRIE DU TEXTILE ET DE L’HABILLEMENT Données générales Le secteur du textile et de l’habillement européen représente environ 4 % de l’ensemble des produits manufacturés produits par l’Union Européenne et 7 % de l’emploi dans ce domaine. Il rencontre à l’heure actuelle des défis sans précédent et joue un rôle très important dans certaines régions d’Europe, notamment dans les Etats récemment admis. Le contexte actuel de globalisation des marchés ainsi que l’élargissement de l’Union Européenne sont deux facteurs déterminant l’évolution du secteur. La Turquie est à même de doubler sa production en 5 ans et de devenir le premier producteur de textile en Europe. Le sommet de Lisbonne, en mars 2000, a conclu au caractère essentiel de l’innovation pour la renaissance du textile en Europe. L’Italie représente 32 % de l’industrie communautaire du textile, avec plus de 58 000 entreprises, un chiffre d’affaires annuel de 46 millions d’euros et 690 000 salariés. En 2002, la crise a conduit à une chute de 8 % du chiffre d’affaires. L’organisation en districts industriels Le système industriel italien est caractérisé par le modèle des « districts industriels », enracinés au sein d’une zone géographique bien définie et constitués d’un tissu serré de nombreuses entreprises de petite et moyenne taille, chacune spécialisée dans une phase bien spécifique de la filière de production. 27/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris Ce modèle, issu des traditions manufacturières locales développées dès le MoyenAge, a permis à l’industrie italienne de répondre avec souplesse et rapidité aux différentes crises économiques qui ont frappé les marchés mondiaux. Ce système industriel doit s’ouvrir aux investissements directs sur les marchés étrangers sans se limiter uniquement à l’exportation du produit fini pour faire face à la mondialisation. En effet, 75 % des PME italiennes dépendent à plus de 50 % d’un consommateur unique ; le marché final de plus de 76 % des entreprises se situe dans leur région. Environ 11 % des PME de Vénétie trouvent leurs consommateurs les plus importants à l’étranger, alors que les industries du sud de l’Italie et de la Toscane dépendent très fortement de la région voisine. Avec la globalisation, le monde change pour les 4 millions de PME italiennes qui doivent désormais entretenir des relations étroites avec leurs consommateurs, leurs fournisseurs et les centres de recherche. La chaîne de création de valeur dans le textile La chaîne de production dans le textile montre la valeur ajoutée aux différentes étapes du processus, depuis la fibre à la distribution d’un produit fini. Il s’agit pour les fabricants non seulement d’optimiser les applications habituelles du textile, mais aussi de créer des applications non conventionnelles. L’INNOVATION DANS LE SECTEUR TEXTILE Une innovation en matière de produits Depuis les lendemains de la Seconde Guerre mondiale, des innovations constantes ont eu lieu en matière de fibres : la seule fibre naturelle a été agrémentée des fibres synthétiques comme le polyester. Les applications tant dans la construction (filins de protection, etc) que dans le domaine du sport (vêtements isolants) ou de la sécurité (casques) n’ont cessé de se développer. L’innovation dans la chaîne de production L’apparition de nouveaux produits induit également des modifications dans les relations que l’entreprise entretient avec ses fournisseurs ainsi que dans le mode d’organisation de celle-ci. La société est conduite à coopérer : elle signe des accords commerciaux, dessine des produits en relation avec des experts d’autres secteurs et entretient des liens de coproduction. Elle doit également faire partie de divers réseaux pour développer des systèmes de fabrication interactifs et une production intégrée. 28/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris Le développement des intermédiaires électroniques (les e-actors : e-designer, emanufacturer, e-consumer, e-developer, e-industrial customer, e-intermediation service provider, e-fulfillment service provider, e-retailer) modifie sensiblement la donne. Les procédures doivent être transformées afin de tirer parti d’Internet. Les entreprises sont désormais liées dans un réseau étroit d’interactions. Des bonnes pratiques doivent être définies et mises en œuvre, telles celles qui sont proposées par la Commission Européenne dans une communication du 20 octobre 2003. La contribution de Textileitaly Textileitaly s’est efforcée de créer une communauté virtuelle entre les différents acteurs. Elle vise également à collecter et diffuser les meilleurs pratiques, en assortissant celles-ci de règles de collaboration permettant l’échange d’informations. T2T Response a ainsi créé une communauté du textile dont les membres peuvent interagir efficacement les uns avec les autres. Il garantit de meilleures opportunités à ses participants et augmente les performances des communautés du textile, grâce à l’Internet. Ce modèle facilite grandement les contacts. 29/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris Le rôle des parcs scientifiques et technologiques comme interface recherche/économie/collectivités locales Eugenio Corti Président des parcs scientifiques et technologiques Les parcs scientifiques et technologiques sont des organisations intermédiaires visant à favoriser les interactions entre la recherche, les acteurs économiques et les partenaires publics (les collectivités locales, en l’occurrence). Actuellement, ces organisations reçoivent un faible soutien financier en Italie : leurs ressources technologiques et financières sont donc limitées, mais elles contribuent tout de même fortement à faciliter l’accès aux nouvelles technologies de l’information et de la communication. LE ROLE DE LA TECHNOLOGIE DANS LA CROISSANCE ET L’INNOVATION La technologie, facteur de croissance et d’innovation La technologie constitue un des facteurs importants de la croissance : elle est responsable d’importants gains de productivités qui conduisent à accroître le niveau potentiel de croissance. Dans le domaine de l’innovation, elle permet la transformation d’un savoir fondamental en une application. Les savoirs atteignent une certaine maturité, grâce aux recherches menées, et c’est à partir d’un savoir technique mature que de nouvelles applications sont créées. Sur le marché des services, on assiste également à une demande de nouveaux savoirs techniques pour mener à bien l’innovation technologique. La collaboration scientifique est responsable du développement de l’innovation technologique : les publications scientifiques de l’université élaborent un savoir scientifique qui est ensuite converti dans les entreprises en un savoir technique qui, s’ajoutant aux procédés existants, aboutit à une nouvelle technologie. Ce concept de « savoir technique complémentaire ou intermédiaire » est très important. Comment les entreprises utilisent-elles les savoirs ? Les sociétés les plus innovantes sont celles qui savent le mieux faire la synthèse des savoirs préexistants en un savoir technique intermédiaire puis passer de ce savoir à l’application innovante. Pour cela, les entreprises ont besoin d’obtenir des capitaux, soit du système financier local, soit directement des marchés. Il apparaît que les 31/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris petites compagnies peuvent très difficilement accéder à ce savoir technique mature, complémentaire. De même, elles ne parviennent pas toujours à se financer sur les marchés des capitaux. Au contraire des petites et moyennes entreprises, les grandes entreprises parviennent à se fournir en capitaux et à réaliser l’exploitation des résultats scientifiques. Elles sont donc les organisations les mieux à même d’utiliser l’ensemble des savoirs produits en un temps donné, après avoir réalisé une évaluation des connaissances utiles. PROMOUVOIR LES INTERACTIONS ENTRE LES ENTREPRISES ET LES CENTRES PUBLICS DE RECHERCHE POUR RENFORCER LES SAVOIRS INTERMEDIAIRES Les organisations intermédiaires que constituent les parcs scientifiques et technologiques se révèlent donc particulièrement utiles pour assurer la transmission et la collecte des savoirs existants. Elles ne produisent pas de nouveaux savoirs mais transmettent ces derniers depuis l’endroit où ils sont créés (universités, centres de recherche publics, centres d’innovation industrielle) vers la structure où ils pourront être utilisés (les entreprises). Chaque partenaire doit jouer son rôle. Celui des parcs est d’offrir les savoirs aux structures qui développeront l’innovation, donc la croissance. Selon l’article 1 de son statut, l’association italienne des parcs scientifiques et technologiques (APSTI) accepte comme partenaire toute organisation contribuant à accroître la compétitivité de son territoire en promouvant des projets de transfert de technologie en collaboration avec l’association. Créée il y a 12 ans, elle connaît un succès certain puisque le nombre de ses membres s’est accru d’environ 30 organisations. 32/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris Les nanotechnologies en Italie : l’initiative de Nanotec IT Guido Frigessi di Rattalma VP AIRI Un domaine-phare de l’innovation en Italie : les nanotechnologies. LES TECHNOLOGIES STRATEGIQUES EN ITALIE : LE RAPPORT DE L’AIRI L’AIRI recense tous les 2 ou 3 ans l’évolution des technologies stratégiques en Italie. Le rapport 2003 avait été intitulé L’innovation pour le futur : les technologies stratégiques pour l’industrie. 114 technologies avaient ainsi été identifiées, dont 4 portaient sur les nanotechnologies. Sur 12 secteurs industriels, ces technologies avaient été identifiées comme étant d’intérêt pour les associés de l’AIRI (ce recensement n’est pas représentatif de l’ensemble du paysage industriel italien). Le rapport est conçu pour fournir une évaluation indicative des technologies du futur aux centres publics de recherche et au ministère de la recherche, afin d’aider ceux-ci à construire les compétences requises. Les programmes nationaux de recherche réalisés par le ministère de l’éducation, des universités et de la recherche indiquent ainsi les lignes du développement technologique du pays. Une édition spéciale du rapport de l’AIRI a été consacrée à la promotion des nanotechnologies. LES MISSIONS DE NANOTEC IT Nanotec IT, un centre autonome au sein de l’AIRI, a pour mission : • d’analyser l’évolution du secteur des nanotechnologies, à l’échelon national et international ; • de diffuser l’information ; • de promouvoir les contacts entre les industries et les institutions de recherche pour mettre en œuvre une action nationale et des liens transnationaux. Nanotec IT participe de l’effort réalisé pour développer les nanotechnologies. Presque toutes les organisations publiques de la recherche se sont affiliées à l’équipe. La région de Vénétie rejoindra prochainement l’organisation : Veneto Nanotec verra le jour le 1e r janvier 2004. Des études par questionnaire ont été lancées auprès des 77 organisations publiques participantes (notamment le CNR) et de 24 entreprises, dont 8 sont des grandes entreprises. Il ressort de cette étude que le niveau de la recherche est considéré 33/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris comme assez satisfaisant dans la plupart des technologies, notamment la santé, l’informatique et les télécommunications. Des initiatives auront lieu dans un cadre communautaire, afin de réaliser des études à long terme : tel est l’objectif du NanoRoadMap Project qui doit analyser les systèmes et les matériels, en particulier dans le domaine de la santé et de l’énergie. Ce projet compte pour partenaires la France, la Grande-Bretagne, l’Allemagne, l’Espagne, les Pays-Bas, la Finlande, la République tchèque et Israël. Dans peu de temps, une conférence lancera officiellement ce projet, mais la plupart des informations sont disponibles sur le site du Centre italien pour les nanotechnologies, www.nanotech.it. Le partenaire français de ce road-map est une petite société de conseil. Celle-ci s’est révélée plus déterminée à participer que les partenaires du réseau international des nanotechnologies. 34/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris L’innovation dans les organismes de recherche Luigi Lesca Directeur ENEA L’ENEA, l’agence nationale pour les nouvelles technologies, l’énergie et l’environnement, est un organisme public, financé à plus de 70 % par l’Etat et ses programmes nationaux de soutien à la recherche. Elle réalise ses propres projets de recherche dans ses instituts et assure également un rôle de soutien au transfert de technologies : réseaux régionaux de diffusion, centres d’aides à la création d’entreprises. Elle dispose d’un budget de 371 millions d’euros en 2002 et emploie près de 3 300 personnes dans 11 centres de recherche répartis sur l’ensemble du territoire. L’ENEA, correspondant italien du CEA, a été fermée en 1987, lors de l’arrêt du nucléaire en Italie. Depuis, la structure a été profondément modifiée en une organisation technologique générale, qui s’occupe également des questions liées à l’énergie. L’ENEA entretient de nombreuses coopérations, notamment avec la France avec laquelle elle travaille sur divers projets. Les organismes de recherche de l’ENEA mettent en œuvre l’innovation dans différents secteurs : • dans le domaine des énergies renouvelables (des installations situées près de Rome utilisent l’énergie solaire pour créer de l’électricité, jour et nuit, grâce à un réservoir d’une capacité très importante) ; • dans le domaine de l’eau (traitement de l’eau, nettoyage) ; • en matière de technologies anti-sismiques (des systèmes sont mis au point pour atténuer les effets des tremblements de terre et protéger notamment la basilique d’Assise) ; • dans la recherche sur les matériaux, l’ENEA coopère notamment avec la France ; • en ce qui concerne les biotechnologies, l’ENEA travaille seulement sur les applications agricoles de celles-ci. Ces activités sont conduites en partenariat avec les entreprises. Si, auparavant, seules les grandes entreprises (Fiat, etc) étaient invitées à coopérer, car leurs activités étaient plus conformes aux travaux réalisés par l’ENEA, les petites et moyennes entreprises high-tech sont aujourd’hui les principaux interlocuteurs de l’organisation. Le système productif italien est en effet basé sur les petites entreprises, un état de fait qui ne doit pas être oublié. 35/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris A l’intérieur de l’ENEA, une autre unité a été créée qui ne s’occupe pas de recherche mais uniquement de transfert de technologies. L’unité travaille avec des secteurs précis (notamment le textile) qui ont une importance considérable en Italie. Elle a permis d’atteindre la première position mondiale pour les céramiques et les chaussures. Le travail avec les petites entreprises pose différents problèmes dus à la pluralité des acteurs et aux difficultés liées à l’allocation et au suivi des fonds. L’ENEA est parvenue à une certaine cohérence en traitant les entreprises par filière et par district, c’est-à-dire par agrégation d’entreprises. Les premiers pas ont été réalisés dès 1982 avec le secteur de la laine. La reconversion de l’ENEA a été difficile : il fallait changer l’ensemble des attitudes antérieures et apprendre un nouveau métier. En ce qui concerne la création de start-up, depuis 4 ou 5 ans, entre 500 et 800 doctorants fréquentent les instituts liés à l’ENEA pour leurs doctorats. Ils effectuent un passage auprès des entreprises, il s’agit alors de les convaincre d’être embauchés. Par ailleurs, l’ENEA bénéficie des mesures régionales de promotion de l’innovation afin d’aider à la création de start-up. Les échecs sont néanmoins considérables. 36/38 Repères sur l'innovation en Italie ANRT – Jeudi 4 décembre 2003 – Paris DEBAT Le potentiel en ressources humaines : il semble que, du fait de la démographie, le nombre d’étudiants diminue. Or l’objectif d’investir à hauteur de 3 % du PIB dans la recherche supposerait la multiplication par 2 du nombre des ingénieurs diplômés. Andrea Cuomo : en Italie, les meilleurs ingénieurs peuvent toujours être choisis. Le sud de l’Italie renferme beaucoup de jeunes salariés motivés, qui pensent qu’il est possible de changer leur vie grâce à l’université. L’attractivité du système américain ne laisse pas d’être menaçante pour le reste du monde. L’Italie doit également accroître son prestige en développant un accueil de qualité, en mettant en place une université en anglais et un système d’intégration qui favorise l’apprentissage des étudiants étrangers. Luigi Lesca : le problème du potentiel en ressources humaines ne se pose pas dans le secteur high-tech, qui connaît un important développement, mais est à l’ordre du jour dans d’autres secteurs. Le déclin s’amorce déjà dans le nord de l’Italie en matière de main-d’œuvre qualifiée. CONCLUSION Luigi Lesca conclut la conférence en remerciant l’ANRT et les intervenants de cette journée instructive. Il considère la coopération avec la France comme essentielle. L’AFIRIT et l’Ambassade d’Italie en France ont contribué au succès de cette journée. 37/38 Association Nationale de la Recherche Technique 41 boulevard des Capucines – F-75002 – Paris Tél : 33 (0)1 55 35 25 50 – Fax : 33 (0)1 55 35 25 55 www.anrt.asso.fr