Une Mouette ivoire ou Mouette blanche Pagophila eburnea en

Transcription

Une Mouette ivoire ou Mouette blanche Pagophila eburnea en
Une Mouette ivoire ou Mouette blanche Pagophila eburnea
en Basse Vallée de la Somme
Francis MONTEL
MONTEL F. (2002) Ivory Gull Pagophila eburnea in the lower valley of the Somme river. Avifaune
picarde, 13 : 77-79.
One Ivory Gull is observed at Port-le-Grand (Lower valley of the Somme river) in 2001 (13th and 16th
February).
Mots-clés : Mouette ivoire, basse vallée de la Somme.
Circonstances de l’observation
Le 13 février 2001
11 h 20 HL (soit 10 h 20 TU)
A hauteur de la mare de la la Station Biologique de Blanquetaque à Port-le-Grand (Somme), un
groupe d’une trentaine de Mouettes rieuses Larus ridibundus évolue pendant une dizaine de minutes. Parmi
celles-ci, je remarque un oiseau différent, sensiblement de la même taille mais au vol plus louvoyant de
Sterne ou de Mouette pygmée, aux ailes plus arrondies, au plumage blanc pur, aux pattes apparemment
sombres et au bec grisâtre (ces deux derniers caractères mal vus !)
Tout laisserait penser que cet oiseau soit une Mouette ivoire Pagophila eburnea, encore appelée
Goéland sénateur ou Mouette blanche ; malheureusement l’observation trop brève (quelques minutes) et trop
lointaine ne permit pas de relever un critère important tel que la couleur détaillée du bec.
13 h 30 à 13 h 50 HL (soit 12 h 30 à 12 h 50 TU)
Le Laridé suspect est de nouveau repéré en vol depuis les bureaux de la Station Biologique (à trop
longue distance) puis au sol dans un champ de céréales en herbe sur le plateau de Port-le-Grand non loin de
la Route Départementale 40.
14 h 10 à 14 h 22 HL (soit 13 h 10 à 13 h 22)
Après un parcours dans un contre-fossé de la ligne SNCF Paris-Calais, je parviens à hauteur du
champ où j’avais repéré préalablement l’oiseau en question : une bande de 48 Mouettes rieuses, 16 Goélands
cendrés Larus canus et l’oiseau « mystérieux » sont psés effectivement sur une terre plantée de céréales près
d’un champ de Maïs Zea mays. L’ensemble est à moins de 50 mètres de l’endroit où je suis parfaitement
dissimulé et il ne fait aucun doute que l’oiseau posé parmi la bande de Laridés est bien une Mouette ivoire.
La silhouette de l’oiseau posé est moins svelte que celle de la Mouette rieuse et relativement plus proche de
celle du Goéland cendré. La tête est très arrondie, un peu du type Mouette tridactyle Rissa tridactyla. La
luminosité parfaite me permet d’observer en détail les caractéristiques suivantes :
- plumage entièrement blanc pur sans la moindre tache sombre (oiseau probablement adulte) ;
- bec gris verdâtre à pointe orangée, coloration plus prononcée vers l’extrémité ;
- pattes noires et plus courtes (réalité ou impression de terrain : céréales en herbe !) que cettes des Mouettes
rieuses et Goélands cendrés présents sur zone.
L’oiseau est au repos tandis que les deux autres espèces s’activent à s’alimenter.
Avifaune picarde
2002, vol. 13
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L’observation a pu être détaillée dix bonnes minutes ; ensuite toute la bande s’est envolée vers
Blanquetaque avant de s’éloigner vers la Baie de Somme.
Il est bon de rappeler qu’un oiseau correspondant au signalement d’une Mouette ivoire avait été
noté en vol (avec doute !) courant janvier sur le site de Blanquetaque depuis la Route Départementale 40 (G.
BECQUET, comm. pers.).
Le 16 février 2001
10 h 15 HL (soit 9 h 15 TU)
Au niveau d’une terre inondée de Blanquetaque, alors que j’observe depuis 10 h un Goéland cendré
leucique et d’autres oiseaux stationnés sur le secteur, j’ai l’agréable surprise de voir arriver de son vol
ondoyant la Mouette ivoire. Elle se pose sur une bande de terre à environ 80 m de mon véhicule (d’où
j’observe) dans un groupe de 9 Pluviers dorés Pluvialis apricaria. L’oiseau, contrairement à la première
observation posée, n’adopte pas une position de repos mais se déplace presqu’aussi lestement que les
Limicoles mais sur de courtes pattes. Je n’ajouterai rien quant à la description déjà faite si ce n’est l’allure
générale qui laisse penser à un oiseau tel que le Pigeon ou un Laridé proche (déjà évoqué) la Mouette
tridactyle (impressions personnelles de terrain).
10 h 30 HL (soit 9 h 30 TU)
A mon départ de la zone considérée, la Mouette accidentelle était toujours présente en compagnie
des 9 Pluviers dorés, quelques Tadornes de Belon Tadorna tadorna, Mouettes rieuses et Goélands cendrés.
11 h 30 HL (soit 10 h 30 TU)
Retour sur le terrain avec Patrick TRIPLET pour renforcer les témoignages relatifs à l’observation
de « l’oiseau rare ». Présence effective du Goéland cendré leucique ; malheureusement plus trace de Mouette
ivoire malgré un ratissage rigoureux de la zone de présence.
16 h HL (soit 15 h TU)
Un dernier contrôle effectué sur zone n’a révélé aucune présence de la Mouette ivoire tandis que le
Goéland cendré leucique était, lui, toujours sur place.
Distribution de la Mouette ivoire (d’après DIF, 1982)
Strictement cantonnée aux plus hautes régions arctiques, elle ne se reproduit que sur les premières
terres entourant les pôles. Elle niche ainsi sur l’île Wrangel, l’archipel de la Nouvelle-Sibérie, les Terres du
Nord et François-Joseph, au nord de la Nouvelle-Zemble et aux Svalbard. L’espèce occupe également les
côtes septentrionales du Groenland et du Spitzberg.
Provenance de l’oiseau observé en Basse Vallée de la Somme
La Mouette ivoire ne descendant que très exceptionnelement au sud de son aire de répartition,
quelques hypothèses peuvent être émises quant à l’origine de l’oiseau pbservé :
- oiseau déporté par un violent blizzard dans les régions arctiques qui aurait affecté, notamment, les
populations du Groenland et du Spitzberg (les données météorologiques de ces régions seraient à
rechercher) ;
- oiseau « passager » d’un navire en provenace des contrées nordiques ;
-oiseau échappé de captivité (hypothèse peu probable vu l’excellent état du plumage mais neanmoins
envisageable ; un trafic important d’espèces exotiques existant entre certaines républiques de l’ex-URSS et la
Belgique).
Avifaune picarde
2002, vol. 13
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Observations françaises
Trois mentions sont authentifiées jusqu’en 1997 (DUBOIS & al., 2000) :
- un individu capturé dans le Calvados entre 1830 et 1834 ;
- un individu capturé à Dunkerque (Nord) le 7 décembre 1895 ;
- un immature à Brest (Finistère) du 29 décembre 1984 au 6 janvier 1985.
Un individu aurait été capturé en 1906 à Ault (Somme) et se trouverait en collection au Musée de Saint-Omer
(Pas-de-Calais ; DUBOIS & YESOU, 1992).
Bibliographie
DIF G. (1982) Les oiseaux de mer d’Europe. Paris (Arthaud), 445 p.
DUBOIS P.J., LE MARECHAL P., OLIOSO G. & YESOU P. (2000) Inventaire des oiseaux de France.
Paris (Nathan), 397 p.
DUBOIS P.J. & YESOU P. (1992) Les Oiseaux rares en France. Bayonne (Chabaud), 364 p.
Francis MONTEL
26-28 Cité Leday
80100 Abbeville
Avifaune picarde
2002, vol. 13
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