La deuxième Chine populaire : de Tian`anmen (1989) à nos jours
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La deuxième Chine populaire : de Tian`anmen (1989) à nos jours
La deuxième Chine populaire : de Tian’anmen (1989) à nos jours Conférence de Jean-Luc Domenach (CERI-SciencesPo.) au Lycée François 1er vendredi 4 avril 2014 Quelques repères basiques : -1911 : disparition de l’empire chinois ; -1949 : fin du nationalisme du Kuomintang (Tchang Kaï-Chek), prise du pouvoir du PCC avec Mao Zedong (mort en 1976) ; -Mao Zedong : un « abominable », un personnage monstrueux. Il a compris d’un coup la situation mondiale, c’était un manœuvrier très habile. Pour conquérir le pouvoir, il a mobilisé les campagnes. Quand les Japonais sont partis, le PCC a écrasé les Nationalistes, et a détenu dès lors la totalité du pouvoir (RPC proclamée le 1er octobre 1949). M. Domenach explique ceci dans son ouvrage Mao, sa cour et ses complots. Mao n’a aimé personne, sauf son fils aîné, mort pendant la guerre de Corée. -Le nombre de victimes du maoïsme est estimé entre 60 et 65 millions de morts, chiffre comparable au nombre de victimes d’une guerre mondiale. Dans le détail : 5 millions lors de la prise de pouvoir en 1949, 10 millions lors des diverses purges, 40 millions morts de famine et d’épuisement pendant le Grand Bond en Avant, et 5 millions lors de la Révolution culturelle (1965-1969). -A la mort de Mao en 1976, l’enjeu est de se détacher complètement de ce qu’il a fait. En 1978, c’est Deng Xiaoping qui prend le pouvoir, son but est de moderniser la Chine. Il a alors 72 ans (et vivra jusqu’en 1997, atteignant un âge extraordinaire dans la Chine de cette époque). Sa politique est un mélange de communisme et de capitalisme sans démocratie. -Un autre personnage important est Hu Yaobang, le Secrétaire Général du Parti Communiste. Il veut concilier communisme et démocratie. Dans les années 1980, ces deux lignes s’opposent. De cette opposition va naître « la deuxième Chine populaire ». La deuxième Chine populaire En effet, fin avril 1989, Hu Yaobang décède, officiellement d’une crise cardiaque alors qu’il avait été mis à l’écart sur le plan politique. Les étudiants demandeurs de démocratie, perdant leur leader et leurs espoirs, se soulèvent sur la place Tian’anmen. Deng Xiaoping pouvant signifier (selon l’intonation donnée) « petite bouteille », les étudiants se soulevant contre lui cassaient des bouteilles sur la place. Le soulèvement est réprimé dans le sang. Le 4 juin, l’armée chinoise investit Pékin, tire au hasard sur la foule, faisant 700 morts. « De ce pire, va sortir un meilleur ». Deng Xiaoping organise une politique autour de deux axes : maintien du pouvoir du PCC et développement économique. Il s’oppose au premier ministre, Li Peng. Entre 1989 et 1992 se produit un phénomène de maturation politique. Les différents protagonistes se rapprochent : Deng Xiaoping devient d’une part plus souple, et d’autre part le peuple adopte une attitude plus résignée. En 1992, Deng Xiaoping et Jiang Zemin lancent une politique de développement économique. Une guerre commerciale est menée, qui est la source de la puissance chinoise. Il s’agit de 1 rentrer dans la mondialisation par le biais du commerce. Cette guerre commerciale consiste en 3 points : -reformater les types de production ; -éliminer un tiers des effectifs industriels ; les licenciements concernent surtout les femmes, alors plongées dans la pauvreté (notamment dans le nord-est, région la plus industrielle) ; -préparer une offensive commerciale à partir du début des années 2000. En 2001, après deux ans de négociations, la Chine entre dans l’OMC. La Chine s’ouvre au marché mondial, y compris dans le domaine agricole. Les autres pays pensaient que la Chine voudrait protéger son marché céréalier, or elle ne le fait pas. Les Européens et les Etats-Unis sont ravis, car la Chine s’ouvre. Cependant, elle n’accepte pas les contrôles et maintient très basse la valeur du Yuan afin de favoriser sa compétitivité-prix ; en effet, la Chine n’avait rien promis au niveau de son taux de change. Au total, la Chine a davantage gagné qu’elle n’a perdu à son entrée dans l’OMC. Elle a alors une vision de long terme afin de développer son industrie. Il y avait alors une égale répartition de la population entre les villes et les campagnes ; ce chiffre devrait bientôt être respectivement de 75% et 25%. Un plan vise à séparer l’espace agricole en 3 : -espaces d'industrie touristique ; -grandes fermes agricoles inspirées à la fois des sovkhozes et des grandes fermes françaises ; -espaces vides pour la récupération écologique. Pour faire cela, il fallait une forte croissance économique. Pendant 14 ans, cette croissance a effectivement été très importante, oscillant entre 7,5 et 14% pour une moyenne de 11%. Actuellement, cette croissance rapide suscite une violence dans l’atmosphère dans un mouvement de destruction et de construction. Au niveau social, une nouvelle catégorie émerge, celle de la nouvelle bourgeoisie. Mais la corruption est totale ; il y a une « montée en gamme » de la production industrielle dans le cadre d’un système dictatorial producteur d’importants flux monétaires. En revanche, le « progrès moral » ne suit pas et les valeurs « universelles » ne sont pas respectées. Comment la Chine utilise-t-elle son potentiel et ses atouts commerciaux ? Avec ses excédents commerciaux, elle achète des bons du Trésor américain, ce qui lui permet de peser sur la politique internationale. Elle investit dans les pays développés, mais aussi en Afrique, ce qui en fait une puissance financière et commerciale universelle. En revanche, concernant le Moyen-Orient, la guerre en Syrie, par exemple, il semble échapper au modèle de compréhension de la Chine car il n’y a pas d’enjeux économiques. Il y aurait un problème pour établir une démocratie, car celle-ci n’est pas compatible avec la corruption et l’appât du gain omniprésents. Par exemple, l’enjeu des élections locales n’est pas la représentation du peuple (qui y vote), mais le futur partage des richesses municipales. Dans le domaine de politique extérieure, la Chine s’engage là où c’est intéressant, principalement avec ses voisins (Corée du Nord, Mongolie) avec un sentiment de supériorité impériale, par exemple avec le Vietnam, dont les vertus sociales suscitent l’incompréhension chinoise. Le rival principal de la Chine reste le Japon. 2 La Chine s’impose dans ses rapports avec l’Union Européenne et les Etats-Unis : -elle effectue 1/5 de ses exportations vers l’UE ; -le dialogue économique est de très haut niveau avec l’Allemagne (partenariats) ; -en juin 2013, la rencontre entre les présidents Obama et Xi-Jinping, fait apparaître un dirigeant chinois très à l’aise et décomplexé vis-à-vis des Etats-Unis (en quelque sorte, les Américains n’ont qu’à apprendre à parler le Mandarin) ; -d’ici 2022 au plus tard, la Chine espère dépasser le PIB des Etats-Unis. Les contraintes et les enjeux de cette puissance : ce pays est d’une telle grandeur spatiale et culturelle, que cette grandeur est elle-même dangereuse. Son histoire est remplie de gloires et de catastrophes, la Chine est capable du meilleur et du pire. De plus, la Chine avance très vite, elle a fait un extraordinaire chemin depuis le début de sa croissance économique au début des années 80 ; elle a effectué en 20 ans ce que la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne ont mis deux siècles à construire. Le public, élèves et professeurs, posent des questions à M. Domenach : Quelle est la nature des relations entre la Chine et l’Inde ? Leurs points communs (2 grands territoires, 2 populations très nombreuses, 2 économies d’avenir), mais aussi leurs différences culturelles, créent entre eux des tensions. En outre, la population de l’Inde, comprenant 1 milliard d’habitants, devrait bientôt dépasser celle de la Chine qui stagne à 1,3 milliards. C’est le « match » le plus important après celui « Chine-USA ». Qu’en est-il de Hong Kong ? Officiellement Hong Kong est rattachée à la Chine depuis 1997, mais dispose d’un statut particulier. Hong Kong cherche à faire de l’argent, veut la paix et est arrangeante. C’est une chance pour la France, car cette ville est très intéressée par la culture française. La campagne anti-corruption de Xi-Jinping va-t-elle être efficace ? Il est difficile de le dire, et de savoir comment faire avec un système conçu pour ne pas fonctionner sans. Qu’en est-il des relations Chine/Russie ? La Chine est très respectueuse de la Russie en raison du rôle historique de l’URSS dans la construction de la République Populaire. Leurs relations sont cependant ambigües, les deux pays font des affaires ensemble, mais ne sont par forcément loyaux entre eux. Les Chinois émigrent partout, et notamment vers la Sibérie ; V. Poutine s’en plaint. Quel regard la Chine porte-t-elle sur l’Amérique du Sud ? Du point de vue chinois, l’Amérique du Sud existe peu. La Chine considère les SudAméricains, comme de « faux américains ». Cuba est considéré également comme un pays communiste de peu d’importance. Les Chinois s’intéressent seulement au Brésil car il se développe économiquement. Ninon CANTALOUBE, Héloïse FICARA, Mathilde FURIC, Roxane METZGER, Chloé MONNATTE, TL1 ; Claire HAMADA, TL2 ; Clémence MADEMBA-SY, TES2 3