Il faut être prudent avec les avantages en nature (voir Gérer n°2 p
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Il faut être prudent avec les avantages en nature (voir Gérer n°2 p
OUVERTURE SUR LES AVANTAGES EN NATURE Les avantages en nature accordés au personnel 1 ou aux dirigeants sont de nature très variée : mise à disposition gratuite d’une automobile ou d’un logement, paiement d’une prime d’assurance-vie souscrite par un dirigeant au profit de son épouse ou de cotisations à un régime d’assurance retraite complémentaire, octroi d’un prêt sans intérêt à un salarié… Le florilège jurisprudentiel des tribunaux administratifs témoigne d’une grande créativité des opérateurs : « le régime fiscal des avantages en nature est un pot-pourri de dispositions dont l’abondance même témoigne de la combativité du fisc devant le spectacle d’une matière imposable qui risquerait de s’évaporer » 2 . Cela ne va pas sans susciter la perplexité du comptable – quand ce n’est pas celle du commissaire aux comptes – confronté à des problèmes d’identification, d’évaluation et de comptabilisation aux effets fiscaux parfois dévastateurs… Après avoir rappelé les principes en la matière, nous porterons spécialement le fer à deux endroits où l’expérience prouve que le bât blesse parfois : l’évaluation et la comptabilisation desdits avantages en nature 3 . Les AN constituent un supplément de rémunération et suivent le régime de celle-ci : déductibilité du résultat de l’entité versante, imposition au nom du bénéficiaire dans la catégorie dont il relève (TS ou art. 62 CGI). Encore faut-il qu’ils se rattachent naturellement aux fonctions exercées (I), sinon ils sont réintégrés et constituent une distribution de RCM (art. 109 CGI). Il faut ensuite que, ajoutés à la rémunération, le total corresponde à un travail effectif et ne soit pas excessif eu égard à l’importance du service rendu (art. 39-1-1° CGI), faute de quoi il y aurait encore RCM (art. 111 d CGI) (II). Enfin, s’ils ne sont pas explicitement identifiés en comptabilité, la somme revêt un caractère occulte (art. 111 c CGI) (III). Trois conditions donc que nous aborderons successivement. I. Un lien direct et logique avec la fonction exercée Des avantages qui ne se rattachent pas directement et logiquement à la fonction exercée 4 constituent, pour la partie versante, une libéralité voire un acte anormal de gestion, évidemment non déductible, et pour le bénéficiaire une distribution taxable au titre des RCM. La prise en charge par une société des dépenses d’aménagement ou de grosses réparations de biens immobiliers appartenant aux dirigeants, la jouissance gratuite, ou presque, par ceux-ci de logements appartenant à la société, la rémunération d’un maçon ou d’employés de maison affectés à la propriété personnelle du dirigeant, les abandons de créances, remises de dettes au profit de dirigeants, les prêts sans intérêt ou à intérêt symbolique sont des exemples 1 « L’avantage en nature résulte, pour les salariés, de la mise à disposition, par l’employeur, de biens qui lui appartiennent ou dont il est locataire ou de la prise en charge de services gratuitement ou moyennant un prix préférentiel », Dictionnaire fiscal 2008, Groupe Revue Fiduciaire, p.872 2 Chronique du Conseiller d’Etat, J. Turot, Le charme discret des avantages en nature, RJF 1991, p.511. 3 Désormais AN pour simplifier, de même que TS pour traitement et salaires, RCM pour revenus de capitaux mobiliers et autres acronymes poétiques. 4 En cas de contestation lors d’un contrôle, la Commission Départementale des Impôts est compétente pour apprécier si la dépense a été faite ou non dans l'intérêt de l’entreprise. Et depuis la loi du 8 juillet 1987, la charge de la preuve incombe toujours à l'administration quel que soit le sens de l'avis de la commission. 1 classiques 5 . Les frais de déplacement remboursés par une société à son PDG ne sont pas un complément de rémunération mais une distribution de RCM dès lors qu'ils sont engagés dans le seul intérêt de l'exercice par l'intéressé de son autre activité d'agent commercial pour le compte d'une autre société 6 . Tout cela ne soulève plus grand débat. La question des primes d’assurance est, en revanche, un peu plus délicate. Bien qu’elle relève essentiellement d’une casuistique, on peut cependant tenter de dégager quelques grandes lignes. Les primes d’assurance-vie, pour être déductibles du résultat de la partie versante et n’être pas imposées en RCM entre les mains du bénéficiaire, doivent être justifiées par « les besoins de l’exploitation »7 , n’avoir pas pour bénéficiaire des tiers à l’entreprise 8 (et, comme on le verra, ne pas porter la rémunération globale du dirigeant au-delà de la rétribution normale de ses fonctions 9 ). Telle est, schématiquement, la position stricte du juge au regard de cette question du lien direct. L’administration paraît plus compréhensive : la déduction de primes d'assurance-vie contractées au bénéfice du personnel et des dirigeants salariés (toujours dans la limite d'une rémunération globale normale) est admise lorsque les primes sont versées en exécution 10 : - d’un contrat souscrit par une SA au profit des membres de son personnel (PDG compris), - ou d’un contrat conclu au profit de ses gérants par une SARL, - ou de contrats d'assurances individuelles d'accidents souscrits par une entreprise au profit de ses dirigeants ou de ses cadres. Les primes versées par une société pour couvrir la RCP de ses dirigeants sont un complément de rémunération imposable dans la catégorie correspondante 11 , et non une distribution. L’administration indique aussi que, si le contrat souscrit couvre uniquement des « risques inhérents à l'activité professionnelle », la prise en charge par une société de primes d'assurances destinées à couvrir la responsabilité de ses dirigeants salariés constitue, pour ceux-ci, une indemnité représentative de frais exonérée d'IR (art. 81-1° CGI) 12 . Reste à apprécier ce que sont lesdits « risques inhérents à l’activité professionnelle » et à en tirer toutes les conclusions autres que fiscales, notamment juridiques et sociales. II. Une rémunération globale raisonnable Aux termes de l’article 39-1-1° CGI, « les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l’importance du service rendu. Cette disposition s’applique à toutes les rémunérations directes ou indirectes, y compris les indemnités, allocations, avantages en nature et remboursements de frais ». A défaut, nous l’avons vu, l’excédent est non déductible des résultats de l’entité versante et imposé en RCM entre les mains du bénéficiaire13 . 5 Susceptibles aussi de relever de l’abus de biens sociaux. CE 20 juillet 2007 n° 268957, 10e et 9e s.-s., Vanhove : RJF 11/07 n° 1253 7 CE 17 mai 1985 n° 33860, 8e et 9e s.-s. : RJF 7/85 n° 1008 8 CE 24 juillet 1987 n° 47321, 7e et 9e s.-s. : RJF 11/87 n° 1084, en l’occurrence, l’épouse et les enfants du P.D.G. d’une SA. 9 Réponses Chaban-Delmas, JOAN 27 avril 1950 p.2947 n° 13070 et Tellier, JOAN 30 mai 1956 p.894 n° 6577. 10 Réponse Lathière : JOAN 13 janvier 1962 p.57 n° 12647. 11 Réponse Belcour, JOS 11 juillet 1985 p.1311 n° 23071. 12 Réponse Salles : AN 26 octobre 1987 p. 5931 n° 25786. 13 Avec application de la mesure de correction de 1.25 et, puisqu’il s’agit d’une distribution irrégulière, sans la réfaction en base de 40 % ni l’abattement fixe annuel (1 525 €/3 050 €), ni le crédit d’impôt de 50 % plafonné à 115 €/230 €. 6 2 L’appréciation du caractère excessif de la rémunération totale « eu égard à l’importance du service rendu » est encore une question de fait. En cas de contestation, sa preuve incombe à l’administration et, si celle-ci est valablement rapportée, l’excédent est réintégré dans le résultat social de la partie versante et imposé comme RCM chez le bénéficiaire 14 . Jusqu’à l’imposition des revenus 2004, les AN étaient évalués selon les règles applicables en matière de Sécurité sociale pour les salariés dont la rémunération était inférieure ou égale au plafond et, au-delà, à leur valeur réelle. La loi de finances rectificative pour 2005 a supprimé cette distinction dans un souci de simplification, de sorte que les AN sont désormais évalués selon les mêmes règles pour tous les salariés. De fait, cette harmonisation n’a changé la donne que pour les rémunérations excédant le plafond et pour les AN constitués par la fourniture de logement et la mise à disposition d’un véhicule puisque les dispositions étaient déjà les mêmes pour la nourriture et la mise à disposition d’outils issus des NTIC. Ces règles sont un peu différentes pour le dirigeant non salarié… Examinons chacun des cas principaux : logement, véhicule, nourriture, autres frais. Mise à disposition d’un logement L’employeur doit opter, salarié par salarié, entre le forfait social et la valeur locative cadastrale : - le forfait social est un barème 15 indexé, évalué au mois le mois, et comprenant, outre le logement, les avantages accessoires suivants : eau, gaz, électricité, chauffage et garage, - la valeur locative cadastrale est celle servant de base à la taxe d’habitation, mais il faut alors lui ajouter les avantages accessoires pour leur valeur réelle, - quelle que soit l’option retenue, les autres coûts que l’employeur prendrait en charge, tels par exemple la taxe d’habitation ou les frais d’assurance, sont des avantages en espèce imposables à l’IR. Que se passe-t-il si le salarié verse un loyer ou une redevance à son employeur ? L’employeur doit toujours exercer son option et le montant du loyer doit au moins être égal au forfait social ou à la valeur locative cadastrale. S’il est inférieur, il y a AN, mais l’administration le néglige si son montant est inférieur à la première tranche du barème forfaitaire pour une pièce principale (soit de 61 € à 172.70 € par mois). Si l’immeuble est d’usage mixte, il faut proratiser : - selon la superficie si l’employeur opte pour l’évaluation selon la valeur locative cadastrale - selon le nombre de pièces s’il opte pour le forfait social. Frais de véhicule L’avantage résultant de l’utilisation privée d’un véhicule mis à la disposition d’un salarié est évalué, quel que soit le niveau de rémunération du bénéficiaire depuis le 1er janvier 2005, comme en matière de sécurité sociale. Il est donc chiffré sur la base des dépenses réellement engagées ou, sur option de l'employeur, sur la base d'un forfait exprimé en pourcentage du 14 D. adm. 4 J-1212 n° 122, 1er novembre 1995. BOI 5 F-8-08 n°30 du 6 mars 2008 téléchargeable, comme toutes les instructions administratives, à partir de 2001, sur le site http://www11.minefi.gouv.fr/boi/boi2001/boi.htm 15 3 coût d'achat du véhicule ou, en cas de location ou location avec option d'achat, du coût global annuel comprenant la location, l'entretien et l'assurance du véhicule 16 . Commençons par l’évaluation annuelle des dépenses réelles, qui suit le schéma suivant : Véhicule acheté 5 ans et moins Plus de 5 ans Véhicule en location ou en location avec option d’achat L’employeur ne prend pas en charge le carburant 20 % du coût d’achat TTC + assurance + frais d’entretien 10 % du coût d’achat TTC + assurance + frais d’entretien coût global annuel de la location + assurance + frais d’entretien Montant de l’avantage en nature = total des dépenses ci-dessus x kilométrage parcouru à titre privé kilométrage total du véhicule pour la même période L’employeur prend en charge le carburant • ajouter, le cas échéant, les frais réels de carburant utilisé pour un usage personnel • ajouter, le cas échéant les frais réels de carburant utilisé pour un usage personnel • ajouter, le cas échéant, les frais réels de carburant utilisé pour un usage personnel L’évaluation réelle des frais de véhicule est exigeante car elle impose la conservation de tous les justificatifs des dépenses ainsi qu’un suivi des kilométrages, tant par l’utilisateur que par l’entreprise. Elle se justifie donc, a priori, le mieux si les kilométrages sont faibles. 16 Instruction administrative 5 F-1-07 du 12 janvier 2007. 4 Passons à l’évaluation forfaitaire, étant entendu que, pour un véhicule pris en location, elle est plafonnée à celle qui résulterait de la règle applicable à un véhicule acheté. Véhicule acheté 5 ans et moins Véhicule en location ou en location avec option d’achat Plus de 5 ans L’employeur ne prend pas en charge le carburant 9 % du coût d’achat 6 % du coût d’achat 30 % du coût global annuel pour la location (location, entretien, assurance) 17 L’employeur prend en charge le carburant 9 % du coût d’achat TTC augmenté des frais réels de carburant utilisé à des fins personnelles (sur justificatifs) 6 % du coût d’achat TTC augmenté des frais réels de carburant utilisé à des fins personnelles (sur justificatifs) ou sur option ou sur option 30 % du coût global annuel pour la location (location, entretien, assurances) plus frais réels de carburant utilisé à des fins personnelles (sur justificatifs). ou sur option 12% du coût d’achat TTC 9 % du coût d’achat (prix 40 % du coût global annuel pour TTC réglé par la location (location, entretien, l’entreprise) assurance et coût global du carburant utilisé à des fins professionnelles et personnelles)16 Ce mode de calcul est plus simple et peut permettre, en cas de location, de plafonner l’avantage en nature au montant qui aurait résulté d’un achat : 9 % ou 12 % du prix d’acquisition par le loueur, ce qui peut être intéressant si le loueur bénéficie d’un rabais substantiel à l’achat en fonction du nombre important de véhicules qu’il achète chaque année à un constructeur. *** CET EXEMPLE PEUT FAIRE L’OBJET D’UN ENCART Exemple d’un véhicule en Location Longue Durée : Hypothèses : Contrat de location longue durée de 36 mois 17 L’évaluation ainsi obtenue est plafonnée à celle applicable au véhicule acheté, le prix de référence du véhicule étant le prix d’achat TTC du véhicule par le loueur, rabais compris dans la limite de 30% du prix conseillé par le constructeur pour la vente de véhicule, au jour du début du contrat. 5 Prix d’acquisition du véhicule par le loueur : 17 000 € TTC Coût mensuel de location (loyer financier + entretien+ assurance) : 550 € TTC L’entreprise ne prend pas en charge le carburant pour les déplacements privés Le véhicule a parcouru 120 000 kms, dont 45 000 kms justifiés à titre privé. Evaluation forfaitaire : Le taux applicable est celui de 30% du coût global annuel pour la location, qu’il faudra confronter au plafond constitué par ce qu’aurait été l’AN si le véhicule avait été acheté, soit 9 % du coût d’achat TTC puisque la location ne dépasse pas 5 ans. Montant de l’AN : (550 € x 12) x 30 % = 1 980 € par an Plafond : 17 000 € x 9 % = 1 530 € par an Le plafond va donc s’appliquer, l’AN est de 1 530 €. Evaluation réelle : 550 € x 12 mois x 45 000 kms / 120 000 kms = 2 475 € Le forfait plafonné s’avère définitivement plus économe (et plus simple) 18 . *** Cela dit, qu’entend-on précisément par dépenses engagées à retenir dans le calcul de l’AN ? Il faut prendre toutes les charges que le bénéficiaire aurait eues à supporter s’il s’était agi de son propre véhicule : amortissement, assurance, entretien, éventuellement carburant (CE, 31 oct.1979, n°14384 ; JurisData n°1979-606291). Mais pas la taxe sur les véhicules de société et les charges d’emprunt qui n’entrent pas dans l’avantage consenti car elles ne concernent que la société (CE, 13 mai 1991, n°68969, JurisData n°1992-052424, CE 21 novembre 2007, Jurisdata n°2007-081203, Dr. fiscal 24 avril 2008, n°17, p.13). Et les frais de grosses réparations ? La sécurité sociale admet qu’ils ne soient pas inclus dans le montant de l’avantage en nature et ne retient que les frais courants (Circ. DSS 2003-07, 7 janvier 2003, n°2-2-3). Dans une affaire récente (CE, 21 novembre 2007, 8ème et 3ème s.-s., JurisData n°2007-081203) où l’administration fiscale adoptait cette position, et où le Commissaire du Gouvernement, du même avis, préconisait de raisonner comme en matière immobilière (au propriétaire incombent les dépenses prolongeant la durée de vie, au locataire incombent les dépenses courantes) la Haute Juridiction constate, au contraire, qu’il n’est pas établi qu’il s’agit de dépenses amortissables et que ces frais eussent été supportés par le contribuable s’il eût été propriétaire du véhicule. Ils entrent donc, selon lui, dans le calcul de l’avantage en nature. Le plus piquant dans cette affaire est que l’administration, dans le dernier état de ses écritures, avait adopté la position de la Sécurité sociale ! Nourriture Revenons à un peu plus de simplicité… Lorsque l’employeur fournit la nourriture, l’avantage est évalué forfaitairement à 4.25 € par repas et 8.50 € par jour pour 2008. Un tarif spécial s’applique aux salariés des HCR 19 . Mais la pratique des titres-restaurant est courante. 18 Simulation étudiée lors du petit-déjeuner ECF du 9 juillet 2008, consacré à la fiscalité automobile d’entreprise et animé par LeasePlan France. 19 Instruction administrative 5 F-8-08 du 6 mars 2008. 6 NTIC L’utilisation à titre privé par les salariés d’un téléphone mobile, d’un micro-ordinateur… mis à leur disposition par l’employeur constitue un avantage en nature évalué, sur option de l’employeur, soit sur la base des dépenses réellement engagées, soit sur la base d'un forfait égal à 10 % du coût d'achat de ces outils ou 10 % du coût annuel de l'abonnement. Toutefois, l’avantage est négligé lorsqu’il correspond à l’utilisation raisonnable de ces outils pour la vie quotidienne (par exemple, appels au domicile de courte durée, brèves consultations de serveurs pratiques sur Internet …) dont l’emploi est justifié par des besoins ordinaires de la vie professionnelle et familiale. Reste à préciser le sens de ces belles formules… Le cas des dirigeants Par principe, les AN consentis aux dirigeants sont évalués pour leur montant réel. Mais pour les gérants minoritaires ou égalitaires de SARL, de SELARL, les PDG et DG de SA et SELAFA, ainsi que les présidents et dirigeants de SAS, il est admis une évaluation forfaitaire pour les véhicules et les outils issus des NTIC. Par contre, et quelle que soit la nature du mandat social, la nourriture et le logement restent obligatoirement évalués selon le mode réel : ils ne seraient susceptibles d’évaluation forfaitaire qu’en cas de cumul du mandat social avec un contrat de travail. Encore faut-il que ce cumul soit juridiquement valable. A défaut, l’effet domino est certain ! ----------------------------------------------ENCART A INSERER SUR LA PAGE Lorsqu'un exploitant ou un membre de sa famille habite un local appartenant à l’entreprise (individuelle ou société, de personnes ou de capitaux), il faut rapporter en 708 Produits des activités annexes une somme représentant la valeur locative réelle, au cours de la période d'imposition considérée, des locaux réservés à cet usage 20 car, aux termes de l'article 38 CGI, le bénéfice imposable est déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises. Or, ces opérations comprennent, notamment, le produit de l'avantage en nature que retire un exploitant de l'utilisation privative d'un immeuble inscrit à l'actif de son entreprise. N’oublions pas que, de son côté, l’immeuble est amorti sur sa totalité ! IL y aura toutefois exception lorsqu’il s’agit d’un associé salarié : ce « loyer » n’est pas rapporté au résultat imposable si la rémunération globale n’est pas excessive eu égard à l’importance du service rendu. -----------------------------------------Pour ce qui concerne le droit des sociétés, les « avantages de toute nature » versés à un mandataire social d’une SA ou SCA dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé ou d’une filiale non cotée d’une telle société, doivent figurer nominativement dans le rapport de gestion (art. L.225-102-1 C.com.). Les SAS ne sont pas concernées, ni, selon 20 Réponse Quentin, n°36096, JOAN 28.2.2000, p.1295 donnée à propos des loueurs en meublé saisonniers ; Doc. adm. 4 A 223-23 ss., téléchargeable sur le site http://doc.impots.gouv.fr/aida/Apw.fcgi?FILE=Index.html 7 l’AMF, les mandataires sociaux spéciaux désignés et membres de comités créés par le conseil d’administration 21 . III. Des obligations comptables et déclaratives respectées L’entité versante doit 22 , sous peine d'amende : - faire figurer sur le relevé détaillé de frais généraux, en tant que rémunérations indirectes, les avantages en nature ou en argent accordés aux personnes les mieux rémunérées de l'entreprise (art. 54 quater CGI) ; la non-déductibilité des charges omises n’est plus une sanction, mais seule l’amende de 5 % des sommes en cause s’applique (art. 1763 CGI) ; - mais surtout – et c’est là qu’est souvent le maillon faible – inscrire en comptabilité, sous une forme explicite, la nature et la valeur des avantages en nature accordés à son personnel ou bien, en vertu d'une tolérance administrative23 , simplement les récapituler sur un état spécial annexe à la comptabilité et tenu à la disposition de l’administration 24 (art. 54 bis CGI). L’important est que le bénéficiaire puisse être directement identifié en comptabilité, à partir d’enregistrements spécifiques qui ont fait l’objet de préconisations par le CNC 25 . Il a ainsi été jugé que la simple comptabilisation de frais de déplacement personnels d’un dirigeant en frais généraux ne satisfaisait pas à cette exigence 26 . Mais il faut raison garder : les avantages accordés collectivement au personnel (cantine d'entreprise, par exemple), évalués comme en matière de cotisations sociales, peuvent être inscrits en comptabilité globalement en fin d'exercice pour toute la durée de celui-ci et pour l'ensemble du personnel. Et il ne s’agit que des AN : les remboursements de frais professionnels n'ont pas à faire l'objet d'une mention explicite en comptabilité et le fait de ne pas les faire figurer sur le relevé de frais généraux ne suffit pas à leur conférer le caractère d'avantages occultes imposables dans la catégorie des revenus mobiliers. Que coûte à la partie versante, la méconnaissance de ce principe d’enregistrement comptable distinct posé par l’article 54 bis CGI ? Depuis 2004, la société qui ne mentionne pas explicitement ses avantages en nature dans la comptabilité n’est plus sanctionnée par l’amende de l’article 1763-1 CGI, abrogée car, sans doute, trop citoyenne : 7.5 € à l’époque ! Reste la non-déductibilité des sommes en cause qu’aucun texte ne prévoit mais qui est une sanction prétorienne constante 27 , comme le soulignent les conclusions du Commissaire du gouvernement, L.Vallée, sous l’arrêt SARL Euro Constructions Industries Outre-mer : « Depuis l’origine, la sanction d’une violation de l’article 54 bis par la réintégration d’un avantage en nature ne trouve pas son fondement dans un texte, mais dans le fait que ces avantages ont un caractère occulte au sens de l’article 111 c CGI ». La somme réintégrée 21 Bull. COB n°367, avril 2002, p.63 ss. outre la mention sur la DADS 1 pour les salariés. 23 L’état comporte, soit pour chaque bénéficiaire soit globalement (selon qu'il s'agit d'avantages particuliers ou d'avantages collectifs), l'indication du montant par catégorie des avantages alloués au cours de l'exercice. Note 23 novembre 1965 : BOCD 1965-II-3130 n° 24 ; Inst. 2 octobre 1979, 4 C-14-79 ; D. adm. 4 G-3331 n° 28, 25 juin 1998. 24 L'état n'a pas à être joint à la déclaration de résultat, mais doit seulement être tenu à la disposition du service, comme document annexe à la comptabilité. Inst. 2 octobre 1979, 4 C-14-79. 25 Bulletin n°36-02. Des schémas d’enregistrement sont couramment proposés par les publications professionnelles spécialisées. 26 CE 12 mai 2003, n°234811, RJF 2003 p.969. 27 CE 25-1-1984 n° 36755, CE 24-7-1987 n° 51770, CE 14-7-1992 n° 81090 et, depuis 2004, CE 24 mars 2006 n° 260787, 9 et 10 s.-s., SARL Euro Constructions Industries Outre-mer. 22 e e 8 revêtant le caractère occulte, elle est aussi sanctionnée par l’amende de l’article 1736 CGI : 50 % de la somme. Remarquons toutefois que la sous-évaluation (par exemple de la partie privative en cas d’usage mixte d’un bien mis à disposition d’un salarié) ne suffit pas à elle seule à caractériser le caractère occulte de l’avantage, pour autant que le bénéficiaire soit directement identifié en comptabilité : la sous-évaluation serait imposable en complément de salaires. On le voit, on peut aimer la nature, mais ses avantages peuvent parfois avoir un goût amer. Jean-François Pestureau 9