(MRSA) dans la porcherie: une menace pour la santé publique
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(MRSA) dans la porcherie: une menace pour la santé publique
Folia veterinaria DES STAPHYLOCOQUES RESISTANTS A LA METICILLINE (MRSA) DANS LES PORCHERIES: UNE MENACE POUR LA SANTÉ PUBLIQUE? La presse signalait récemment l’apparition dans les porcheries de Staphylococcus aureus résistants à la Méticilline (SARM ou MRSA1). Tout comme l’oxacilline, la cloxacilline et la nafcilline, la méticilline appartient au groupe des pénicillines résistantes aux bêta-lactamases. Ces souches MRSA ont une incidence importante en santé humaine, en particulier dans les milieux hospitaliers. Mais, depuis quelques années, des souches MRSA sont régulièrement isolées à partir de nombreuses espèces d’animaux domestiques (Tableau 1), dont l’espèce porcine (Haesebrouck et al., 2006). Par exemple, lors d’une étude réalisée à la demande de l’Institut national des Pays-Bas pour la Santé publique et l’Environnement (Nederlands Rijksinstituut voor Volksgezondheid en Milieu <RIVM>), 40% des porcs examinés étaient porteurs de MRSA. Bien que ces animaux puissent représenter une source d’infection pour l’homme, le nombre de patients infectés par des MRSA d’origine animale reste restreint et, à ce jour, aucune donnée n’indique que la transmission de MRSA entre l’animal et l’homme puisse avoir lieu en dehors d’un contact étroit. Une autre étude néerlandaise indique d’ailleurs que les personnes ayant, de par leur profession, un contact étroit avec des porcs ou des veaux de boucherie sont plus souvent infectées par des MRSA que les populations témoins. Il semble, cependant, qu’une souche MRSA d’origine porcine transmise à l’homme, puisse se répandre dans la population humaine et ainsi causer des problèmes dans les hôpitaux. Inversement, l’homme peut aussi être source d’infection pour l’animal. La question de la présence de MRSA dans le cheptel porcin est pertinente. La présence de bactéries résistantes est, en règle générale, le résultat de l’usage d’antibiotiques qui assurent la disparition de bactéries sensibles, tout en favorisant l’émergence des bactéries résistantes. C’est ce qu’on appelle la pression de sélection positive exercée par les antibiotiques. Mais, si la méticilline, l’oxacilline, la cloxacilline et la nafcilline ne sont jamais utilisées dans l’élevage des porcs (Timmerman et al., 2006), les souches MRSA isolées sont également résistantes, ou présentent des sensibilités diminuées, aux autres pénicillines et céphalosporines. Une première hypothèse pour expliquer l’existence de ces souches MRSA dans les élevages porcins est donc que l’utilisation d’autres β lactames favorise l’émergence de MRSA du fait d’une résistance croisée. Une seconde hypothèse est celle de la « co-sélection » qui repose sur la possibilité de la co-existence dans le génome bactérien des gènes de résistance à la méticilline avec des gènes de résistance vis-à-vis d’autres antibiotiques, fréquemment utilisés dans les porcheries. La sélection de souches résistantes à l’encontre des classes d’antibiotiques les plus utilisées pourrait aussi avoir pour conséquence une augmentation de l’incidence des souches résistantes à la méticilline. Une étude approfondie de ce sujet dans le secteur de l’élevage de porcs et de veaux de boucherie en Belgique est indispensable pour recommander des mesures pratiques efficaces et adéquates pour combattre l’émergence de telles souches, aussi bien chez l’animal que chez l’éleveur. 1 MRSA ou SARM: souches Staphylococcus aureus résistantes à la méticilline La méticilline fut la première pénicilline non affectée par l’action des bêta-lactamases, à être utilisée chez l’homme. Les souches MRSA sont, elles, moins sensibles, voire résistantes, vis-à-vis de tous les antibiotiques bêta-lactames. Les souches d'hôpitaux (encore appelées nosocomiales) de MRSA (HospitalAcquired MRSAs ou HA-MRSAs) sont également résistantes vis-à-vis de nombreux autres antibiotiques. Ces dernières années, des souches MRSA ont été régulièrement observées en dehors de la communauté hospitalière (Community-Acquired MRSAs ou CA-MRSAs). Celles-ci sont en général moins résistantes aux antibiotiques autres que les β lactames que les souches HA-MRSA. Dans l’attente de mesures ciblées, on ne peut que renouveler les recommandations habituelles pour les personnes concernées du secteur, à savoir : utiliser les antibiotiques selon les règles de bonnes pratiques. Rappelons qu'en milieu hospitalier, des mesures hygiéniques simples telles que le lavage des mains et la désinfection des locaux se montrent efficaces pour limiter la transmission entre le personnel et les patients (tableau 2). L'efficacité de mesures similaires, adaptées aux conditions d'élevage des animaux , devrait être évaluée. Tableau 1: Résistance acquise vis-à-vis des antibiotiques bêta-lactames chez S. aureus Source: Vlaams Diergeneeskundig Tijdschrift 2006, 75, 254 – 261 Classe de staphylocoques Origine Staphylocoques producteurs de bêta-lactamases classiques Souches de S. aureus d’origine animale et humaine Staphyloccoccus aureus résistants à la méticilline (MRSA) Staphylocoques coagulasenégatifs (CNS) Souches de MRSA d’origine humaine surtout mais aussi animale (le porc, la volaille, les oiseaux de compagnie, le lapin, le chien, le chat et le cheval) Souches d’autres staphylocoques que S. aureus, résistantes à la méticilline (chez le chien, le bovin, le chat, le cheval et la volaille) Résistances aux pénicillines sensibles aux bêtalactamases (pénicilline, ampicilline, amoxicilline) à tous les bêtalactames, y compris les pénicillines insensibles à l’action des bêtalactamases (méticilline, oxacilline, cloxacilline, nafcilline) ; à l’association amoxicilline-acide clavulanique et aux céphalosporines. Parfois résistances supplémentaires vis-àvis d’autres familles d’antibiotiques (principalement en cas de HA-MRSA) Mécanisme de la résistance acquise Production de bêtalactamases. Ces enzymes inactivent l'antibiotique par ouverture du cycle bêta-lactame. Synthèse d’une cible (« protéine liant les pénicillines »2 de type PBP2a) qui n’a plus qu’une affinité très faible pour les lactames. L’activité enzymatique de cette PBP2a ne peut plus être inhibée par l’antibiotique, contrairement à l’activité des autres PBPs synthétisées normalement. Tableau 2: hygiène et asepsie des mains mains propres: friction avec une solution hydro-alcoolique entre chaque patient soigné mains sales: lavage des mains avec de l’eau et du savon, séchage, puis friction avec solution hydro-alcoolique ongles courts et propres pas de bagues, bracelets, montres usage de gants lors du soin de la plaie hygiène des mains après l’enlèvement des gants usage de crème hydratante pour prévenir le dessèchement de la peau des mains 2 L e s « Penicillin-Binding Proteins » (ou PBPs) sont des enzymes intervenant dans la fabrication du peptidoglycan de la paroi bactérienne. Elles représentent les cibles des antibiotiques de la classe des lactames, pénicillines et céphalosporines. 2 Aperçu du rôle pathogène de Staphylococcus aureus chez divers animaux domestiques et chez l’homme Sources: Vlaams Diergeneeskundig Tijdschrift 2006, 75, 254-261 Folia Veterinaria 2002 n°1 bovins et petits ruminants ovins volaille chevaux porcs lapins homme mammite dermatite et septicémie arthrite, synovite, ostéomyélite, cellulite, septicémie dermatite, cellulite occasionnellement infections des plaies et septicémie mammite, dermatite, abcès sous-cutanés et pododermatite diverses maladies allant d’infections de la peau à des formes très dangereuses de pneumonie, d’ostéomyélite et de septicémie. Syndrome du choc toxique. Si vous désirez en savoir davantage: - F. Haesebrouck, D. Vancraeynest, K. Hermans, B. Catry, P. Butaye, A. Decostere. (2006). Methicilline resistente Staphylococcus aureus-stammen bij dieren: een gevaar voor de gezondheid van dier en mens? Vlaams Diergeneeskundig Tijdschrift 2006, 75, 254-261 - T. Timmerman, J. Dewulf, B. Catry, B. Feyen, G. Opsomer, A. de Kruif, D. Maes (2005). Quantification and evaluation of antimicrobial-drug use in group treatments for fattening pigs in Belgium. Preventive Veterinary Medicine 74, 251-263 - Nederlandse Rijksinstituut voor Volksgezondheid en Milieu: lettre du ministre en Agriculture, Nature et Qualité alimentaire (Landbouw, Natuur en Voedselkwaliteit), dr. C.P. Veerman, au président de la “Tweede Kamer der Staten-Generaal” concernant la problématique MRSA, dd. 17 janvier 2007 - Matériel de campagne nationale « Hygiène hospitalière »: https://portal.health.fgov.be/portal/page?_pageid=56,8730625&_dad=portal&_schema=PORTAL 3
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