décatie a des yeux de velour - ThTh
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décatie a des yeux de velour - ThTh
* décatie a des yeux de velour revue mensuelle proposée par konsstrukt t e x t e s , d e s s i n s , m u s i q u e , v i d é o , e t c . numéro 7 novembre 2010 2 sommaire Mandy Aurore Laloy N.A.G. Benjamin Monti Boris Crack Dave 2000 Mamadou Love Soomiz Dom Garcia Nicolas Brûlebois Marlène Tissot RMM Alkbazz Clotilde Delcommune Anaïs Mauzat Paul Sunderland Horses eat sugar Myriam Linguanotto Joel Mas Ex Aequo Gaijin Régis Belloeil Jacques Cauda Osmose Curves Sarah Fist'Hole Alain Marc Samantha Gai Manuel Montero Florian Tomasini Sara Chelou Rémi Teulière Heptanes Fraxion Oscarr Lance-Roquette Ronan Rocher SLip Thomas Vinau Cloud A.C. Hello Gilles Fela 4 5 7 21 22 29 30 32 35 39 42 47 48 50 51 56 57 60 61 63 64 68 71 73 74 76 77 83 85 86 87 94 95 97 98 99 100 107 111 3 Olivier BKZ Jérémy Brethes Wood Thierry Théolier Jean-Marc Renault Marc Brunier-Mestas François Richard Vincent Pons Fred Gevard Christophe Siébert Olivier Allemane 117 121 124 125 142 143 144 159 160 171 193 4 mandy sans titre Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 5 aurore laloy nacre 1 La tache de sperme sur sa robe étincelait de mille petites paillettes et éclipsait l’éclat de ses yeux. 6 aurore laloy nacre 2 Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 7 n.a.g. c+U= C J'ai le béguin pour two thousand and nine. J’ai une fibre. Une vibe. Un cri unanime. J’ai des rots de joie scotchés au palais. Ça fait mal. Ça congestionne. Faut qu’ça sorte tous ces Hmpff, faut qu’ça crisse comme des paquets de chips sous mes doigts. J’embarque. J’ai l’âme ciselée, taillée au cordeau, nettoyée au plumeau. Putain, on fait partie de l’Histoire, non ? C’est con mais on pourrait finir par en douter vu tout ce qu’on entend sur le monde. Ils veulent nous pourrir le paradis ? Eh bien ?!!! Oui ? Non ? On fait partie du cri de désespoir généralisé oui ou non ? Soit, nous en serons les voyelles et nous pisserons des I majuscules dans les neiges de juillet, qu’en dis-tu Ursula ? Je lui fais : j’ai le béguin pour two thousand and nine, mon sucre, mon miel, mon ovocyte. Elle sourit. Elle aime bien quand je suis bien. Elle adore quand j’me marre. Il fait froid dehors, c’est ça qui me rend jouasse. Une putain de caillante à pas traîner dans les rues avec les doigts mouillés. La ville fume de froid. On bifurque sur l’avenue de Rome avec la poussette et le pique-nique dedans, à la place de la gamine. En réalité, on arrive pas à faire un enfant, mais on a acheté une poussette en attendant. Je lui ai dit : on va pique-niquer au square ? Par un temps pareil ? Elle m’a fait Aboule le jambon j’ai dit et on a tracé. 8 J’avais juste oublié que le square est rempli de balançoires remplies d’enfant remplis de joie, remplis de putain de bâtons de dynamite de joie. Bon. Bref. Voilà. C’est ma première histoire de deux mille neuf. C’est inquiétant, qu’en pensez-vous ? Deux personnes âgées de trente et quelques années et douées de toute la raison du monde qui achètent une poussette avant même la conception du môme. Qui s’esquintent avec ça. Basculent dans la nouvelle année comme un malheureux par-dessus un balcon… Mon père me téléphone à 12h52. Tout le monde cherche ma mère. Elle s’est barrée. Tout le monde lui court après. Une infirmière l’a vue sortir vers 11h et puis plus rien. Elle a dit qu’elle allait faire le tour du petit bassin et nourrir les trois canards. C’est ce qu’elle a dit qu’il me dit, tu te rends compte ? Tu t’imagines un peu ? Je saisis, oui. C’est l’enfer. Ça commence bien. U J’ai pas la gueule de bois, je sais plus ce que ça veut dire la gueule bois, j’étais même pas défoncée hier soir, le 31/12. Même pas chaude. Même pas gaie. J’ai marché sur des trottoirs toute la nuit à m’imaginer des flaques de verglas mauves un peu partout. J’ai cherché une boulangerie d’ouverte ou un salon de coiffure. J’ai remonté la Rue de la Roquette. Les bars à salsa. Merde. Les videurs qui zozotent, des blondes en Levi’s ni tristes ni joyeuses, on ne sait pas ce qu’elles ont dans le crâne, on n’arrive pas trop à voir, elles sont toutes molles, habillées en bleu, intangibles, elles ne parviennent jamais jusqu’à l’excès… Me suis laissée gobée par le marché d’art contemporain à Bastille. Ai négocié une statue avec un pneu de Jeep et le Christ au milieu. Dessiné le portrait de mon enfant pas encore né. Ce soir, nous sommes sur le balcon, on fume le canal Saint-Martin, d’humeur fantôme. Non pas qu’on en veuille à tous ces crétins pour la mascarade d’hier soir, ce serait trop facile. Hier après-midi, j’ai reçu un texto de Cyril : Devant Carrefour… Un océan de bagnoles à portée de mains, ça brille de partout, on dirait un cimetière cétacé… Viens me chercher… Pourquoi m’as-tu demandé de venir ici ? Je te conchie… Cyril à peine tournée la clé dans la serrure quand il est rentré hier après-midi vers 5h, je lui ai sauté dessus. L’ai 9 sucé. Un goût de pomme verte. Lui, des sacs de provisions plein les mains. J’ai retiré un minuscule petit bout de peau de sa bite avec le bout de ma dent. L’ai crachoté sur le parquet. Alors ce soir, ça rigole pas sur le balcon : –– On aime ses personnages qu’une fois qu’on a terminé de rédiger leur histoire ! –– Ah ouais ? –– Ecrire est un truc d’impuissant, quoi ! –– !!!??? –– Une sale vérole mentale… ça m’empêche de dormir ! –– Viens te coucher... –– Quoi ??? Cyril est écrivain. Pas moi. Il fait la gueule. Je l’ai vu quand on est rentrés de la balade tout à l’heure, il tirait la tronche. Faut dire qu’il y a eu hier quand je l’ai mordu volontairement, il m’en veut encore. Je pensais pas que ça faisait aussi mal, honnêtement, je croyais pas que c’était si sensible. Hier on a pas fait le réveillon ensemble. On est marié depuis quatre ans et quart. C’était le premier réveillon qu’on faisait pas ensemble. C’est pour ça que je l’ai mordu, mais je lui ai pas dit. Moi j'ai marché toute la nuit du 31/12 dans les rues du XIè. = Je viens de tuer Ursula. JE VIENS DE TUER URSULA. Ursula, on dirait un mannequin de mauvaise qualité maintenant. Enroulée, étendue, saupoudrée de son sang coquelicot. Elle crée une flaque avec des grumeaux sur l’avenue Parmentier. Des croûtons, des dés de jambon, des haricots rouges, ça parsème le bitume jusqu’aux deux trottoirs. Et puis y a son corps au milieu, en plein milieu, on dirait qu’elle l’a fait exprès. Elle forme une espèce de croix gammée parfaitement parallèle aux deux trottoirs. La bagnole de police lui déloge un poignet en pilant. Y a des bruits de portières, y a des caquètements, y a des flashs, des rots qui veulent toujours pas sortir, j’aperçois une gamine qui passe, y a sa mère qui la tire par le bras, elle qui continue de lécher sa sucette en regardant tout ça, y a des caravanes de gens qui passent et regardent et puis un flic qui essaye de remettre le poignet d’Ursula à sa place d’origine. Mon père m’a téléphoné à 13h16 : on a retrouvé maman, tu sais quoi. Tu devineras jamais. C’est trop drôle, tu devineras jamais. Partie faire un pique-nique en 10 campagne. Doux Jésus Marie Joseph. Un pique-nique avec rien à bouffer !!! Faudrait quand même qu’on réfléchisse à la suite pour Maman, t’en dis quoi ? Pas un croûton de pain dans la poche et elle elle s’imaginait qu’elle allait se faire un pique-nique !!! Et le temps dehors, t’as vu la température qui fait ??? !!! Je me rappelais la dernière missive de ma mère. Un skud. Une anthologie pour âmes égarées. Le parfait exemple de ce qu’on a pas envie de devenir, je crois que c’est ce qui m’a finalement décidé à pousser Ursula dans le vide. J’y avais déjà pensé mais là, en repensant à la missive de Maman, j’ai dégénéré. Dans sa lettre, Maman me parlait des oiseaux qui chantaient dans le jardin devant sa chambre à l’asile. Elle dressait une liste exhaustive des espèces avec leur nom latin et tout le tremblement. Je m’étais mis à trembler en lisant ça. Ensuite, elle me parlait des ateliers de motricité. Elle disait qu’on la faisait mettre en cercle avec les autres patients. Il s’agissait de faire rebondir une balle au sol en la faisant tourner en rond de mains en mains. Attention, la balle ne devait rebondir qu’une fois elle précisait, et m’expliquait combien c’était difficile. Après, il fallait refaire l’exercice deux à deux, de plus en plus vite, avec un seul rebond, sans laisser échapper la balle. Elle disait qu’elle en bavait avec les toutes ces ombres qui dansaient sur le mur à cause du soleil rasant, et la difficulté qu’elle avait à se concentrer. Y a un pompier qui soulève Ursula et la replie comme une boîte en carton. Je vois le flic avec un calepin sur le trottoir. Il interroge un type chauve et lève la tête vers moi. Je rentre à l’intérieur et puis ressort par la porte d’entrée. Je prends l’escalier, j’hésite, la porte de derrière ou celle de devant sur l’avenue Parmentier. Je prends celle de devant, je vais voir le flic, je me dis que c’est le meilleur moyen. Je me plante devant le flic en me frottant la nuque. Il me toise, ôte son képi et se gratte les cheveux avec son stylo. Y a la gamine un peu plus loin qui me regarde en léchant sa sucette. Elle plisse les yeux. Elle m’observe en penchant sa tête vers l’avant. On dirait qu’elle attend de voir ce que je vais bien pouvoir raconter. Je déglutis. Le flic a l’air embarrassé. Votre femme est morte j’en ai bien peur, il me fait. Je fonds en larmes. Bon. C’est qu’une première histoire de deux mille neuf. Rien de neuf sous le soleil, eh eh eh. Les couples auront toujours du mal à se supporter, le tout étant de ne pas basculer dans le sordide et l’irrattrapable, Osama Bin Laden court toujours. Bref. Ursula a sauté par-dessus la 11 rambarde, je ne sais pas si j’irai à son enterrement. Je suis veuf, putain de Dieu, JE SUIS VEUF. Ça me fait l’effet du permis de conduire. Une sacrée nouvelle. Pour l’instant, je sais pas trop comment je vais m’en sortir sans elle. Je digère le scoop, je profite pleinement du caillot qu’il a laissé au fond de ma gorge. Pourtant, j’ai le béguin pour two thousand and nine. J’ai une vibe pour ce nombre en anglais. Si vous le dites avec l’accent Cockney, ça fait two thousand and noine, y a un rythme là-dedans, ça me fout en transes. Le n est ma lettre préférée, je viens de le décider, et puis y a une espèce d’aboutissement dans ce nombre, two thousand and nine, pas un truc fermé comme dans two thousand and ten, non, plutôt une sorte de fin ouverte, une note qui se prolonge, un larsen qui meurt doucement. Y a un cri unanime dans ma tête qui me dit qu’il faut en profiter. C’est littéralement un appel. Il se poursuit jusque dans mes bras et mes doigts qui tricotent sur le clavier. Vraiment, j’ai pas l’habitude de dire des trucs comme ça, mais je crois que je vais être magnifique en écriture cette année. U Cyril me fait chier avec ses textes, autant dire les choses telles qu’elles sont. Au début je trouvais ça excitant de remuer ses papiers. C’était transcendant et doux à la fois, je crois que je confondais mon amour pour lui et son écriture en quelque sorte. J’étais indulgente, c’était tellement nouveau pour moi, j’acceptais tout ce qu’il écrivait, je ne voyais même pas les fautes d’orthographe… Je trouvais tout subtil, j’étais capable de lire entre ses lignes. Et puis ça le rendait précautionneux, attentif aux autres, l’écrivain observe il disait, l’écrivain prend note. Maintenant il a bloqué tous les accès. Je ne l’ai pas vu venir. Il est enfermé devant son ordinateur comme dans la pire des prisons coréennes et ne se rend pas compte. Il vous trouve des sentences pour tout, on dirait qu’il s’amuse à fusiller toutes les valeurs les unes après les autres. Le seul problème est qu’il a mis l’amour dans le peloton d’exécution. Il m’a projetée en première ligne avec un bandeau sur les yeux et m’a demandé cinq minutes, le temps de charger son fusil. En cette fin d’après-midi du premier janvier deux mille neuf, on est à demi couché sur la rambarde de sécurité et on fume sur le balcon, lui et moi. Il neige et je trouve que c’est une belle surprise, une merveilleuse nouvelle, mais si je le regarde je sens que je vais m’énerver encore 12 une fois. Prenez le premier cochon en peluche que vous trouverez dans un magasin pour enfants et vous aurez une idée du regard qu’il jette sur le canal Saint-Martin. Ses yeux ostensiblement tournés vers l’intérieur. De là où je suis si je le regarde, je ne verrai qu’un voile gris, si je lui pose une question il ne me répondra pas et je vais m’énerver encore une fois, si je lui prends la main, il serrera la mienne machinalement en me pressant les doigts, me caressera la nuque et ça s’arrêtera probablement là. Je vais rentrer à l’intérieur, je vais aller me coucher, c’est plus rationnel comme ça. Tant pis pour les flocons de neige. C’était quoi ces conneries à propos d’écrire tout à l’heure ? « Une vérole mentale », ça veut tout et rien dire… Cyril a le chic pour ça, son imagination le rend imprécis… Il veut imiter qui avec ce genre de phrases ? « Ecrire est un truc d’impuissant… » Il veut se dédouaner de quoi avec ça ? Du fait qu’il ne me touche plus ? Ne me baise plus que par rafales, comme on décharge un pistolet, avec une violence inouïe ? Et puis : « On aime ses personnages qu’une fois qu’on a terminé de rédiger leur histoire ! », ça veut dire quoi, franchement ? Je suis couchée. J’ai les yeux grands ouverts dans le noir, j’imagine que ça brille férocement, mes yeux dans la nuit. Dans trois secondes je vais pleurer, je vais ruisseler comme une fontaine, je vais faire du bruit et Cyril m’entendra. Il va s’approcher de moi, s’assoir sur le bord du lit, de mon côté, il va dire : « Allons bon… » Et se sentira mal. Des dizaines de choses vont se bousculer dans sa tête et il va essayer d’argumenter. Il me rassurera car il sait trouver les mots. Nous allons baiser, ce sera toujours ça de pris que je me dis, et puis je sens que je commence à pleurer. Pourtant je rigole à l’intérieur, mais je sais que ce rire est malade. J’entends Cyril qui s’approche dans le couloir. Je hoquète, j’ai du mal à respirer, je sanglote, ça me fait trembler de partout et je perds le contrôle de tous ces spasmes… J’aimerais qu’il soit déjà là, juste à côté de moi, je sens que mon visage se tord dans tous les sens, la bouche en U inversé, les yeux injectés, le nez tout morveux. C’est vrai que ça doit être impressionnant vu de l’extérieur mais moi je sais que ce n’est rien, un orage passager, je m’en remettrai. Cyril allume la lumière et avance à petits pas. Je repense à hier, quand je lui ai mordu la quéquette, putain fallait que je sois dans une drôle de rage pour faire ça… Fallait vraiment qu’il m’ait poussée à bout… Je ris à l’intérieur, 13 c’est trop con, tout ça est trop drôle… Vas te faire voir Cyril, vas te faire foutre mais avant, fais-moi juste un enfant… C’est tout c’que je te demande… Un enfant et je te laisse en paix ! Je trouve rien de mieux à lui dire : un enfant et je te laisse en paix ! Je suis confuse, j’ai honte de ce que je viens de dire. Cyril me darde un regard étonné, j’ai l’impression que je le dégoûte, ça me donne envie de pleurer encore plus fort, qu’est-ce que tu veux que je te dise d’autre ? Je lui demande… Qu’est-ce que tu voudrais que j’espère de mieux de ta part ? Cyril est pris de cours. Il ne s’attendait pas à un tel scandale. Il se racle la gorge en cherchant quoi répondre. Je me demande si ça l’inquiète vraiment tant que ça, s’il est réellement avec moi, sur cette planète, à cet instant précis. Cyril est écrivain, ce genre d’histoires, ça le connaît. C C’était un accident ! Un bien étrange accident ! Je m’explique : Il neigeait. Vous avez vu ça ? Il neigeait je vous dis ! Des flocons gros comme le poing ! Et durs comme tout ! De vrais obus ! Ursula a voulu en attraper un et hop elle a basculé, c’est aussi simple que ça, elle voulait en mettre un dans sa bouche, vous entendez ? Juste pour le plaisir, pour le goût que ça a, les premières neiges de l’année… Le flic continue de se gratter le crâne avec son stylo. Il ne trouve pas que j’en fais trop, ça lui semble naturel d’en rajouter un peu dans un cas pareil et je vous assure que son verdict est sans appel, je le vois dans ses yeux radieux de compassion : C’ETAIT UN ACCIDENT. A peine le temps de jeter un dernier coup d’œil à Ursula, y a un pompier qui referme un sac noir autour d’elle et plus loin la petite fille qui continue de lécher sa sucette en m’observant. Elle assombrit un peu le tableau cette gamine avec sa sucette, comme le leitmotiv qui vous transforme un rêve en cauchemar. Son apparente innocence ne me plaît guère. Je lui balance une grimace, la plus horrible trogne dont je sois capable mais c’est sa mère qui prend peur. Allez viens, Ursula, elle lui dit en la tirant par le bras… La gamine s’appelle Ursula !!! CETTE GOSSE INFERNALE se prénomme Ursula !!! J’ai l’impression que mon cœur me lâche, y a plus que de la fumée dans mes bras et mes jambes, ça picote, ça se vide en crachotant ses dernières étincelles, y a plus que des volutes rêches en moi, peu de chances que j’en sorte indemne. J’ai froid d’un seul coup. 14 Je me remonte l’escalier en veuf, note un tremblement dans mes doigts au moment d’introduire ma clé dans la serrure. Si je me questionnais sur ma qualité de monstre absolu, me voilà rassuré. Je balance des coquillettes dans une casserole sans poignée… La dernière trouvaille d’Ursula avant sa mort… Le must en matière de rangement… Ursula, voyez-vous, je l’aimais pour ça aussi. Je dégote un paquet de 200g de lardons. J’en bave pour l’ouvrir, péniblement je me souviens que j’ai oublié de faire bouillir l’eau pour les coquillettes. Les lardons légèrement calcinés, je ne comprends pas comment les grands chefs n’y ont jamais pensé. Pour peu que vous preniez des lardons fumés au feu de bois, le résultat est stupéfiant. Ne pas lésiner sur le jus. Verser l’intégralité de la poêle sur les coquillettes et déguster. Les lardons se révèleront longs en bouche, incroyablement fondants et fermes sous leur croûte noire. Pour faire court, je dirais que ma première surprise de deux mille neuf survient lorsque j’entends des hoquets dans la chambre à coucher. Ses reniflements. J’aurais dû m’en douter. Avec tous ces mouflets dans le square... Passe-moi le jambon je disais, passe-moi ci passe-moi ça mais je savais bien qu’elle n’avait d’yeux que pour les gosses. Et puis y avait la poussette qui brillait à côté de nous. Quelle étrange idée j’ai eu d’acheter cette poussette… C’est pas un jouet une poussette, c’est sérieux, c’est bourré de symboles lumineux… Faut que j’aille la voir, faut que je m’approche doucement, faut m’assoir à côté d’elle, elle adore ça, faut qu’je trouve les mots, les enchaînements… Two thousand and nine, ça va être notre année, ma chérie… Y a qu’à voir comment ça sonne bien en anglais… En plus si tu prends l’accent Cockney, ça fait two thousand and noine… Tu vois comme ça rend bien ? Cette année c’est pour nous mon amour !!! Faut que je lui communique mon humeur, c’est palpable un optimisme… Je lui fais : j’ai le béguin pour two thousand and nine, mon sucre, mon miel, mon ovocyte. Elle sourit. Elle aime bien quand je suis bien. Elle adore quand j’me marre. Il fait froid dehors, c’est ça qui me rend jouasse. Une putain de caillante à pas traîner dans les rues avec les doigts mouillés. La ville fume de froid. Tous les héros de mon histoire sont en place. Ça tient la route, putain. Ça tient la route ! 15 = Après, Il ne neige plus. La rue est large, l’asphalte régulier, je m’engouffre sans peine entre les vieilles maisons. Je suis bien, je suis au mieux, je souris à l’adhérence de mes pneus sur les rares craquelures du sol. Dans mon coffre un jerrycan fait le va-et-vient mais je n’y prête guère attention, j’ai une main sur le volant, l’autre repose sur mon fémur droit juste au-dessus de la rotule. Régulièrement je change une vitesse et le bruit du moteur comme un cri étouffé dans un foulard me rassure. Je ne fume pas, mon cœur est reposé, je suis bien, je suis au mieux. J’appréhende la courbe à 120° devant une école. A un moment T, au milieu du grand virage, le soleil vient taper le pare-brise. Je tire sur le pare-soleil, ma main droite abandonnant un instant mon fémur. Je ressors de la courbe et salue deux vieux messieurs qui se tiennent debout sur le bas-côté. Ils ne me voient pas. Je tends les doigts, j’agite la main, je parle plus fort, je plante mon visage au plus près de la vitre passager mais les deux vieillards ne me saluent pas. A un moment T+2 je suis sur le parking du Franprix. J’avance tranquillement en pompant la pédale de débrayage. Une vieille dame surgit au milieu de la place de parking. Une femme concentrée sur ses pas. Je ralentis pas. La mémé ne me voit pas. Je ralentis pas. Bientôt ma voiture frôle son tibia, elle regarde ses souliers, cherche à éviter les flaques d’huile. La collision se produit sans un bruit, naturellement. J’entraperçois sa jambe qui disparaît sous le capot, puis son bassin, sa nuque. J’actionne le frein à main, je me propulse en avant d’un coup de rein, j’ouvre la portière, je sors au soleil bleu. Après, j’appelle mon père : Ursula est morte, tu sais. Bon Dieu c’est arrivé à quelle heure ?? Et puis, je viens d’amocher une vieille, elle est pas jolie à voir, Papa… Si tu la voyais tu comprendrais… Les pompiers, ils mettent pas trente secondes à arriver, le camion tout penché sur le côté dans les virages. Les flics aussi, les mêmes flics que tout à l’heure, la patrouille de secteur quoi. Le gars est tout emmerdé de me revoir. Il va s’en faire une infection du cuir chevelu tellement il se sera gratté pour moi aujourd’hui. Merde, 16 vous alors, on peut dire que c’est votre jour… Mon pauv’ vieux… Il balance la tête en soupirant bien fort pour que je l’entende… Et un premier janvier avec ça ! Putain de reflet du soleil sur la neige, je lui fais, putain de soleil… Pas vu la vieille !!! Je crie entre mes dents... Pas vu la pauvre vieille… Même pas son chapeau… Même pas son chien… Même pas sa canne avec les affreuses dorures… Putain de vieille je conclus. Il se redresse. Pôvre… Pôôôôvre vieille, je corrige. Il se détend et conclut : AFFAIRE CLASSEE. Tapie dans l’ombre avec sa sucette, bien à l’abri derrière un climatiseur pendu sur les murs du Franprix, y a la gamine qui me regarde, sa mère a disparu. Elle est où sa mère ??!! Two thousand and nine, j’aimerais pouvoir te parler face à face pour te dire à quel point ta gueule me plaît. Ta fibre, tes formes, ta couleur, ta tessiture m’inspirent. Tes premiers cris me parlent. On dirait que je me tiens au bloc opératoire et que je viens de voir mon propre visage jaillir des entrailles de la Terre. Je ne sais pas combien de temps ça va vouloir sourire alors en attendant j’écris. Tout le temps, même quand je descends les poubelles, j’écris en pissant, j’écris en conduisant, j’écris en me pignolant, j’écris au travail, j’écris en allant chercher du vin à la cave, j’écris en dormant, j’écris en marmonnant bonne nuit. J’écris les yeux grands ouverts dans le noir en ce moment même, j’imagine que ça brille férocement, mes yeux dans la nuit. Ma femme dort à côté de moi, sa crise de larmes est passée. Un coup de sang, rien qu’un petit coup de spleen, elle m’a dit. Moi je sais que c’est plus profond que ça mais je fais comme si je comprenais que dalle. Ça me donne du temps pour écrire en attendant de m’occuper d’elle plus sérieusement. D’ailleurs elle fait sûrement semblant de dormir en ce moment même. Je ne sais pas trop par quel bout je vais prendre ça mais je vais m’occuper d’elle bientôt, dès que mon ciboulot m’aura laissé en paix. U J’ai passé toute la nuit du 31 /12 à vagabonder dans les rues du 11è. Y avait des flaques de verglas comme des nuages sur les trottoirs. Des nuages de couchers de soleils, mauves et clignotants. Dans les appartements toutes les lumières étaient allumées et les portes ouvertes en grand, je voyais des verres qui trinquaient 17 mais jamais de visages. J’entrapercevais des bras qui tendaient des plateaux de gibier à travers des tables dressées et jamais un seul regard qui m’aurait guidé vers une âme. Des rideaux pourpres tombaient aux fenêtres, derrière j’imaginais les grands lustres qui s’effondraient sur les convives et allumaient des feux. Des brasiers de fête. Y avait des plateaux d’huîtres qui circulaient aussi, accrochés à des mains et des boutons de manchettes, ça me soulevait le cœur et me ramenait à Cyril. Cyril adorait les huîtres et il m’avait plantée pour le réveillon. C’est pour ça que je l’ai mordu et lui ai retiré un morceau de prépuce dès le lendemain. J’ai trouvé une boulangerie juste avant 2009. J’ai mangé deux gâteaux à la crème de café, l’échoppe était déserte et il y faisait froid, les gâteaux n’étaient pas mauvais mais j’ai préféré sortir et les bouffer dehors en marchant au milieu des boulevards. Et puis, plus loin en direction de la Seine, il y avait un salon de coiffure pour mères célibataires. C’est ce que disait l’enseigne aux néons : salon de coiffure, coupes, mèches et teintures pour mères célibataires. J’ai poussé la porte en espérant qu’ils demandaient pas le livret de famille. C’était surtout des femmes pauvres à l’intérieur, des junkies, un air de dignité apaisée circulait dans leurs regards. Les tarifs étaient dérisoires. Je me suis assise, j’ai calé mon cou et j’ai demandé des mèches blanches. Blanches ? Ouais, blanche-neige j’ai fait. Des fils de neige un peu partout dans mes cheveux noirs. Tu fais chier Cyril, j’ai pensé. Les femmes conversaient à voix basse dans la boutique en se tenant la main d’un siège à l’autre. Elles se racontaient des histoires affolantes et conservaient un air impassible, le regard déconnecté. Elles demandaient toutes une transformation radicale de leur visage par le prisme de leur coupe de cheveux. « Quand on a vécu deux ou trois trucs vous savez… » m’a dit la coiffeuse. Elle m’a regardée et a ricané. Elles avaient des vies merdiques et moi j’étais la bourge de service, un ventre plat comme une limande. J’avais jamais touché à la cocaïne ou à l’héroïne, j’avais jamais avorté, j’avais jamais enterré mon mari, j’avais jamais voulu me noyer avec mon enfant dans les bras. A minuit les cloches de 2009 ont sonné et on s’est toutes embrassés à la va-vite. Je me faisais l’effet d’un fantôme, j’ai à peine senti leurs lèvres sur mes joues. Cyril. Maintenant je suis à quatre-pattes sur lui et il arrive pas à ouvrir les yeux. Je le chevauche comme une enragée. Cyril est comme tous les autres, il bande 18 surtout quand il a peur. Il trique même comme un âne alors j’ai aucun mal à le diriger, surtout que j’en ai salement envie et que cette envie me semble paradoxale, limite nauséabonde, mais je m’attarde pas làdessus sur le coup. Cyril tapote la table de nuit, il cherche ses lunettes. Il pue de la gueule. Je le chevauche, je suis en équilibre sur mes pieds à présent, c’est meilleur ainsi. Je lui dis que c’est pas la peine de se réveiller, que c’est bon comme ça, comme un viol. Faismoi juste un enfant je murmure à son oreille sale, il panique et cherche la lampe de chevet qui se renverse et se brise. Je lui tire sur la queue quand il se ramollit. Je me retire et attrape son membre comme une arme de poing. Il rebande vite. Je le chevauche en lui donnant des coups de seins au visage. Il est KO, son cerveau évaporé dans une de ses histoires. Il a perdu toute sa substance, Cyril, depuis qu’il écrit des histoires de meurtres. Je lui fous des coups de nichons de plus en plus forts et j’enrage quand il jouit et que je sens le nuage tiède et le gland pomper dans mon trou. Il est vide, il n’a plus de tripes, plus de cœur, il se rendort. C Le 23 janvier elle vient me voir sur la pointe des orteils et ça y est c’est bon. Ça y est c’est réglé, une affaire qui marche. Attend de savoir ce que j’en pense, se plante devant moi en tapotant le test de grossesse dans la paume de sa main. Ça ressemble à n’importe quoi son test de grossesse, une sorte de petit thermomètre, et pourtant elle tient ça comme si elle manipulait une arme sophistiquée dont elle allait pas tarder à se servir. Visiblement elle attend une espèce de clin d’œil du destin pour la pointer sur ma tempe. J’ai pas de réaction autre que de la prendre dans mes bras et d’enfoncer mes doigts dans ses cheveux et de les peigner. Le lendemain je reçois une autre lettre de ma mère avec papier à en-tête de l’asile où elle m’explique comment elle entend les oiseaux du matin au soir maintenant. A quel point elle les entend pépier du matin au soir, au moment du petit-déjeuner collectif à la cantine, pendant le repas de midi, entre les deux aussi, de 8 à12h et puis après à la sieste tout en somnolant. Elle dit qu’elle ne dort que très peu pendant la sieste finalement à cause du vacarme. Et qu’elle entend alors les oiseaux. Peu de sommeil profond c’est le lot de toutes les folles dans son genre elle m’explique, m’implore de la sortir de là. Au beau milieu des ateliers de sophrologie, au 19 crépuscule avec un tintement de cloches en contrepoint, elle dit qu’elle ne vit plus que pour les oiseaux. Que ce soit dehors, que ce soit dehors sur le balcon, dehors dans le parc, dehors dans le jardin aux magnolias, plus loin sur le terrain de sports ou plutôt dans son cerveau dément, elle entend piailler et battre de l’aile, claquer ces mêmes ailes contre l’air trop doux, comme des appels au calme depuis le fond de leur bec aussi. Elle dit qu’elle va s’enfuir de là, avec les sternes de préférence. Avec les sternes de préférence elle martèle dans sa lettre, dégringoler avec elles, leurs ailes qui se froissent, leurs yeux comme des lance-flammes quand elles frôlent la mer et reprennent leur vol, une proie entre les pattes, etc. Tout ça me fait penser à cette nouvelle de Selby dans chanson de la neige silencieuse et finalement me donne envie de pleureur. J’écoute en boucles un morceau qui s’appelle scared of ghosts en ce moment. En boucles aussi je plie et replie les lettres de ma mère dans mes poches de pantalon, et c’est ainsi que formidablement tout se met à faire sens d’un seul coup tandis qu’au fond de mes poches de pantalon, je sens que les coutures cèdent… = L’enterrement d’Ursula est une réussite. Y a pas grand monde mais tous mes personnages sont là : la mère de la gamine et la gamine cachée derrière un cyprès son sucre d’orge à la main, le flic chauve, mon père radieux, ma propre mère avec ses cheveux fous, deux infirmiers qui la tiennent par dessous les bras, comme pendus à son peignoir, trois couples de pompiers. Il neige et les pas des fossoyeurs crissent et de la fumée froide sort de nos bouches. Nos larmes gèlent, nos doigts nous font mal, nos nez coulent. Il y a aussi quelques collègues de travail d’Ursula, chacun lutte avec son corps et la peine qu’il lui inflige. Ursula était vendeuse et maintenant elle est morte, Ursula était belle, née à Fontainebleau morte à Paris, c’est déjà une sacrée trajectoire de réussite fait le prêtre civil - ou quelque soit son titre. So long Ursula, il conclue, see you in heaven, il dit ça avec un accent irlandais, je le regarde bizarrement et lui file un billet de 50 euros. Le soir même je rêve que j’incise le ventre d’Ursula, de bas en haut, que je retire l’embryon et le mange. Au matin du 24 janvier j’ai plus de fuel. J’aurais jamais dû rassembler mes personnages à l’enterrement d’Ursula. C’est là que les problèmes commencent. Ma tête me 20 gratte, j’ai une douleur intercostale, le bras ankylosé, je l’ai entendue chantonner en se coupant les ongles des pieds depuis son réveil et ça me fait souffrir. J’ai jamais été très bon pour les dialogues alors je lui parle pas, je lui hurle pas de la fermer à travers le couloir, je garde tout pour moi. Pas étonnant dès lors que ma pensée devienne brouillonne et que mes yeux se perdent sur l’écran de mon PC comme des papillons en fuite. Mes oreilles bourdonnent, mon cœur grince. Je me lève : syndrome de la page blanche, writer’s block en anglais, peu importe, de l’avancée de ce curseur Word vertical ne dépend pas la survie de ma famille, ça pourrait être pire, je fulmine, je boue littéralement, je suis en nage à cause du chauffage collectif ouvert en grand. Je suis pas écrivain, j’ai menti, à vrai dire j’ai une autre occupation qui subvient à nos besoins, je suis enseignant. En classe, j’étudie des extraits de roman en anglais, parfois des nouvelles entières, les jeunes n’aiment plus trop lire, je les force pas. Je m’appelle Sébastien, ma femme se prénomme Sophie, elle est une des rares choses vraies dans cette histoire. Nous attendons notre premier enfant, elle dit que c’est une fille. Je regarde son ventre et j’y vois que dalle. –– Comment tu sais ça toi ? –– Simple intuition, tu sais bien… Et toi, tu voudrais que ce soit quoi ? Elle rigole. –– What’s a blind deer ? –– ???? –– No idea ! Je lui fais et enfile mon blouson. Je suis en colère. Ce qui est vrai aussi dans cette histoire, c’est qu’il neige une espèce de neige de noël depuis 25 jours. Paris est un château blanc. La ville a perdu l’arrogance de ses boulevards, la paralysie lui va bien. Je passe devant le lycée fermé à double tour, la neige a obstrué le grand portail en bois, des stalactites pendent aux fenêtres et des toiles d’araignées s’enroulent autour. Quand j’arrive à Fontainebleau je me gare en forêt. Je marche en faisant des glissades sur la neige. Derrière moi j’entends de petits pas. J’aimerais bien que ce soit un chevreuil beige qui me suive. Je me retourne pas, je sais que c’est la gamine au sucre d’orge qui bondit de sapin en sapin et m’observe en attendant la suite. Ursula. Putain d’enfoirée d’Ursula ! Le silence retombe et devient terrifiant. C’est dans cette ambiance-là que tu comptes finir ton roman ? Je me demande. Avec une pensée pour ma mère, je retourne à ma voiture et prends la direction du sud. 21 benjamin monti sans titre Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 22 boris crack le crack de 29 J’ai eu 29 ans hier A 29 ans Romy Schneider vidait les cendriers J’ai bu des bières J’ai dormi sur le balcon J’avais l’air un peu con Romy dans sa trentaine vidaient les cendriers d’Harry Meyen Je me suis réveillé C’était bière ou café J’ai bu des bières J’ai vu Romy Schneider qui vidait les cendriers chez moi à l’aube « C’est le Crack de 29 » J’ai dit à Romy « Il écrit de la daube » Moi aussi elle m’a dit « J’ai 29 ans aujourd’hui et je vide les cendriers » J’ai allumé la radio Un livre de Cadiot lui servait de balayette Il y avait des cendres par terre Je fêtais mon anniversaire à Pompéi 23 « Pour mon pays me dit Romy Schneider Je suis une petite pute » Il y avait un air de flute à la radio et bientôt ils nous promettaient du Michel Berger Je suivais des yeux Romy qui vidaient les cendriers J’ai regardé son cul J’ai dit « Si j’ai survécu c’est grâce à Michel » « C’est le Crack de 29 » J’ai dit à Romy « Ghost is in the Shell » Si j’ai survécu, c’est grâce à la bonne musique C’est grâce à la bonne musique si j’ai survécu Si j’ai survécu, c’est grâce à la bonne musique C’est grâce à la bonne musique si j’ai survécu La justice c’est la voiture La police c’est la nature Les nains ont les yeux clairs Ce soir je vais plaire C’est le Crack de 29 je lui dis Et Romy vident les cendriers Ma grand-mère est née en 29 C’est elle qui m’a payé Ma première banana split Si j’ai survécu, c’est grâce à la bonne musique C’est grâce à la bonne musique si j’ai survécu et à la banana split de ma mémé Si j’ai survécu, c’est grâce à la banana split C’est grâce à la banana split si j’ai survécu C’est grâce à la banana split de ma mémé Et Romy vident les cendriers « Pour mon pays me dit Romy Schneider Je suis une petite pute » 24 Il y avait un sac en toile de jute et un livre de Cadiot par terre, à la radio il passait du Balavoine Je suivais des yeux Romy qui vidaient les cendriers J’ai regardé son cul J’ai dit « Si j’ai survécu c’est grâce à Daniel » « C’est le Crack de 29 » J’ai dit à Romy « Ghost is in the Shell » C’est grâce à la bonne musique si j’ai survécu Si j’ai survécu, c’est grâce à la bonne musique et grâce à la banana split de mémé Si j’ai survécu, c’est grâce à la banana split C’est grâce à la banana split si j’ai survécu C’est grâce à la banana split de ma mémé Et Romy vident les cendriers La justice c’est la voiture La police c’est la nature Les nains ont les yeux clairs Ce soir c’est mon anniversaire 25 boris crack j'ai payé 13 euros 50 pour voir une bite en 3D se faire bouffer par un piranha (Les petits reportages de Boris) J’ai payé 13 euros 50 pour voir une bite en 3D se faire bouffer par un piranha. C’est ma faute, j’ai pris un Perrier. Mais ça fait quand même 11 euros 50 pour voir « Piranha 3D » d’Alexandre Aja. Je n’ai rien contre la 3D, même si ça fait un peu loucher. Quant à mon mal de tête, ce devait être la chaleur, il faisait très chaud ce jourlà dans le sud de la France. Il a dû se trouver quelques personnes, à l’époque, pour reprocher aux Pharaons le côté tridimensionnel de leurs pyramides et préférer les peintures murales. Contre le film lui-même, je n’ai pas non plus de critiques à formuler. Les films d’horreur, j’ai grandi avec, ils auront toujours un goût de « reviens-y ». Je les ai tous vus, sans doute parce que mon père les aimait lui aussi mais s’interdisait de les voir à cause des « enfants ». Quand je vais en voir un au cinéma, j’y vais de manière non-intellectuelle. Un rien fait mon bonheur. Comme ce moment où l’un des personnages principaux (joué par la vedette de cette ancienne série « Sliders – les mondes parallèles ») vient de se faire attaquer par les piranhas et s’écrie « Y m’ont bouffé la bite! Y m’ont bouffé la bite ! » La caméra replonge dans l’eau et on retrouve sa bite (belle bite) en 3D en train de couler au fond du lac. Elle est alors, à la stupeur d’un public adolescent qui n’aura pas rêvé pareille scène (moi non plus), interceptée par un piranha qui la pousse du nez vers son collègue qui, lui, l’avale tout rond. 3 secondes et la bite est recrachée par le poisson avec un signe de dégoût. L’organe à demi mâchouillé reste suspendu un 26 instant au-dessus de nous dans la grande salle du multiplexe. J’ai de très bon souvenirs dans les multiplexes. Mais je ne me rappelle pas avoir jamais payé si cher même quand j’habitais aux Etats-Unis. Le supplément de 1€ pour couvrir les frais occasionnés par la technologie 3D passent encore. La location des lunettes (qui ressemblaient d’ailleurs à des masques de plongée) facturée aussi 1€ est, elle, une pure arnaque. Comment pourrait-il être légal de facturer la location d’une paire de lunettes sans laquelle le film aurait l’apparence d’un vitrail d’avant-garde ? D’un point de vue juridique, cette location obligatoire est indéfendable, j’en suis convaincu. Si je m’étais douté qu’il fallait payer une telle somme pour voir une bite en 3D se faire bouffer par des poissons, j’aurais mis la mienne dans un aquarium. J’ai un copain qui a un aquarium. Il aurait été ravi de me voir plonger un chibre frileux (au demeurant une belle bite) parmi les algues artificielles, près de l’entrée d’un château en terre cuite. Il aurait pris une photo et il aurait mis ça sur Facebook, ce con. Je suis sorti du cinéma vénère. J’avais pourtant passé un bon moment (suis-je idiot ?). La scène où une centaine d’étudiants en maillots de bain se font massacrer dans l’eau est un régal. Les hors-bords et la sono du port de plaisance où avait lieu le concours de t-shirts mouillés disparaissent sous des hectolitres de sang et des tonnes de viscères. Bande de païens fortunés (étudiants en droit et apprentis ingénieurs ci-inclus), vous l’avez bien mérité ! « N’empêche, je me dis, 13€50 avec un Perrier pour voir une bite en 3D se faire bouffer par un piranha, j’ai du mal à l’avaler. » Je dois rejoindre ma copine à l’autre bout du centre commercial. Je sors du parking du cinéma en enjambant un mur en béton. Je longe Top Office. J’allume une cigarette dans l’ombre de Kiabi. Je finis mon Perrier. Je traverse la route. J’arrive sur le parking d’Auchan. Je suis le sentier ouvert pour les piétons entre deux rangées d’arbustes. Il y a énormément d’insectes volants dans ces arbustes. Je n’ai pas trouvé de poubelle alors j’ai encore ma bouteille de Perrier à la main. J’ai l’impression que ça les attire. J’aperçois une espèce de gigantesque taon. Je me fais discret mais c’est trop tard. Je sens une douleur vive dans mon arrière mollet droit. Merde, ça brûle. Je traverse à nouveau la route. Les automobilistes ralentissent à contrecoeur. Il font rugir leur moteur. C’est un samedi après-midi et, dites-le à Francis Cabrel, un samedi soir sur la Terre, un samedi après-midi en enfer. Le film d’horreur, c’est d’aller au cinéma. Le centre commercial s’étend sur des kilomètres. Il faut une demi 27 heure pour en sortir à pied. Je trouve enfin une poubelle. Je tourne au coin après Conforama et me retrouve sur un chemin de terre au bord d’un petit ravin. J’ai dû manquer quelque chose. Quelqu’un longe le ravin devant moi, je le suis. On passe entre deux buissons. On marche sur des copeaux de bois. L’homme parle Russe dans son téléphone portable. Plus loin, deux vigiles (des agents de la sécurité du parking) nous regardent. On arrive sur le parking de Toys « Я » Us. L’un des vigiles vient vers moi. Il me demande ce que je fais là. Je luis dis « Quoi ? Eh ben je fais les magasins comme tout le monde. » Il me dit « ça fait un moment que les caméras du parking vous suivent et on vous a vu entrer dans aucun magasin. » Heureusement, dieu-de-la-zac soit loué !, à ce moment-là ma copine arrive et leur dit qu’on avait rendez-vous ici. Les vigiles matent ma copine et s’éloignent en nous souhaitant une bonne fin de journée. Doris a acheté une des ces grandes assiettes rectangulaires en plastique qu’on met sous les jardinières. Elle ne rentre pas dans son sac à dos. Je la porte à la main. On avait prévu de faire un tour chez Cultura. Rentrée littéraire. Je m’abrite derrière ma jardinière. On trouve deux bricoles (un tube de colle et un magazine) et on passe à la caisse. Je dis à la caissière que « l’assiette à jardinière, c’est à nous, on l’a achetée chez Auchan, de toute façon vous en vendez pas ici. » La caissière me dit « Attendez, il faut que je vérifie. » Elle prend le téléphone, elle dit à quelqu’un « On vend des jardinières ?... Des jardinières, tu sais, des pots et des assiettes en plastique pour mettre des fleurs sur le balcon... OK... d’accord... Je t’attends... » Quelqu’un arrive, regarde ma grande soucoupe à jardinière, me demande « C’est à vous ? », à quoi je répond « Oui ». Conclusion : « Bon, OK, allez-y. » On sort du magasin. On rejoint l’arrêt de bus. Il est 45, le bus passe à 54. Il n’y a pas de banc. On s’assoit sur le trottoir, au bord de l’espace prévu pour le bus sur le côté de la route. Ni Doris, perdue dans le mode d’emploi de sa colle, ni moi, perdu dans la lecture d’un article sur mon téléphone portable à propos de Johnny Hallyday, ne remarquons l’arrivée du bus avant qu’il ne soit près de nous écraser les jambes. Le chauffeur, un jeune très sympathique, s’amuse de nous. Je lui achète deux tickets et nous avançons au milieu du bus. Nous restons debout, il n’y a plus de place. En face de nous, il y a deux blacks, très grandes et très minces, sans doute des sœurs. Toutes les fenêtres du bus ont été verrouillées pour privilégier une clim’ pourtant très légère. Nous roulons depuis dix minutes quand l’une des deux blacks s’évanouit. 28 Quelqu’un la retient mais elle est inerte. Tout le monde vient à son secours. Quelqu’un lui donne son Coca. Le chauffeur s’arrête. Elle met du temps à revenir à elle. On l’assoit dans un siège à l’avant du bus. Le chauffeur dit qu’il peut appeler les pompiers mais la sœur dit que « ça va aller, on descend bientôt. » Elle est très calme. Sa sœur, elle, fait des grimaces de douleur. Le bus redémarre. J’ai envie de boire une bière. Le vendredi, c’est poisson. Le samedi, c’est l’horreur. 29 dave 2000 last days part 2 Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 30 mamadou love jolie biche Explosion tendre pour toi jolie Une biche tuée tuer une biche tu es une biche tu es la biche Du haut des toit mitraillettes, jolie Viens là bibiche Allez vas-y ! Déchirée en 2 la bibiche tendre Petit trésor qui culmine au top 10 de mon cœur. Présentation d'un nouveau produit sensationnel qui va véritablement révolutionner Le monde du ...... grâce à ses incroyables ..... . Tous les regards sont fixés sur l'écran. L'instant est intense mythique. Il déclare sa flamme à bibiche. Mes plusieurs moi ont tous envie de toi ma jolie. Marteau et clous pour bien qu'elle comprenne Oh ! La belle peluche féroce Regardez bien ici et voilà hop Jolie visqueuse sac d'entrailles dans la biche au soleil séchée Fais la sieste dans ruelle 4 étoiles coup de pavé au bas ventre C'est ça, oui , danse à poil au carrefour de bagdad On ira boire des sodas cendres c'est ça Oh bordel ! Jolie ! Tape ce regard bbrrrrrr Souffle la langue ton accent étranglé Explose moi biche jolie ta fourrure au soleil /sur le trottoir Tu trimes avec les mouches Bibiche cœur glacé recouverte d'étiquettes Je marche dans ton nid, tes bébés à la fourrière Explose la bibiche family Ouai oh ouai oh ! Oh ! Ouaaiii ! Schplarf ah tu rigoles moins là hein ? Jolie 31 Joli sourire mamal Jolie biche, jolie biche, joliiie biii ii cheuu ! Jolie biche tu nous rend si heureux ! Dans tes montagnes fleuries va planter les bougies Joyeux anniversaire bichette à la fraise De peu tu rate la bouée jolie Biche molle gonflée Dans le bac à crocos ton histoire finie male mal mal 32 soomiz le petit chaperon rouge ou le loup travesti Il était une fois un loup qui vivait dans une très grande ville avec des centaines de milliers d’autres loups. Les loups avaient toujours vécu en meute, mais la ville avait atteint une taille tout à fait démesurée, et, comme bon nombre de ses congénères, notre loup se sentait souvent bien seul, surtout le soir lorsqu’il rentrait du chantier, le corps harassé et les mains dégueulasses. Un jour ou plutôt une nuit, alors qu’il regagnait son triste logis après s’être un poil enivré dans un bar du quartier de la Gare, il rencontra sur un trottoir le petit Chaperon rouge. D’emblée, il tomba à genoux devant la beauté fière et froide de cette ténébreuse prédatrice tout de latex et de cuir vêtue. Habituellement ce sont les chaperons qui font les quatre heures des loups, et en particulier de loups de chantier tant il est vrai qu’ils ont grave la dalle après le boulot, mais il était une fois n’est pas coutume, et ce Chaperon-là avait plus d’un tour dans son sac (en fait, dans son sac, il y avait des godes, des menottes, des préservatifs fantaisie, un tube de gel lubrifiant et pas mal de liquide. Notons, pas de petite monnaie). Le loup, ébahis, ne savait comment garder un minimum de contenance quand le petit Chaperon rouge s’approcha de lui, une cigarette aux lèvres, pour lui demander du feu. Celle-ci, experte, remarqua aisément la gêne du loup et lui proposa sans détour un marché que le loup aurait bien du mal à refuser. Contre un peu d’oseille le Chaperon, pas farouche, lui offrait son pot de beurre. Le loup fut bien en peine de refuser, d’autant qu’il lui restait un peu du blé que sa mère-grand lui avait envoyé par mandat postal pour agrémenter son quotidien… Une fois dans l’intimité d’une chambre de bonne, le loup se mit spontanément à genoux, au pied de la divine mais injuste créature qui lui ordonna prestement de lécher ses cuissardes rouges qu’elle avait fort longues. L’opération 33 prit bien du temps pendant lequel le Chaperon, toujours de rouge botté, jouait du bout d’une cravache avec le rectum du loup qui l’avait sensible. « Tu les aimes, mes bottes de sept lieues, hein mon cochon ? » Le loup rougissait en acquiesçant. La vicieuse lui proposa de l’attacher, puis de lui bander les yeux, ce que le loup ne refusa pas, et en guise de pot de beurre, c’est un lubrifiant qu’elle lui passa sur l’anus, avant de le déflorer sauvagement à l’aide d’un gode ceinture. Quand elle lui rendit la vue, l’érection du loup redoubla. Vingt minutes plus tard, il était dehors, plus léger d’une centaine d’euros, et voulant se jurer, mais un peu tard, qu’on ne l’y prendrait plus… Or dès le lendemain soir, alors qu’il essayait de calmer sa faim en se frottant le ventre, le souvenir lui revint de son expérience, et l’envie le prit de nouveau. Les jours passaient et le loup luttait contre son désir fou de retourner voir le petit Chaperon rouge. Finalement il craqua et fit mander à sa bonne mère-grand quelques menues monnaies pour, lui écrivit-il par lettre, racheter les Equipements de Protection Individuels qu’il avait égarés sur le chantier et que son patron ne voulait plus lui fournir. Tôt fait l’argent arriva, et le loup retourna rôder aux alentours de la Gare. Le Chaperon vénal, le vit venir de loin et en conçut quelques projets fructueux. Elle décida de s’occuper de lui bien longuement en prenant soin de ne jamais le laisser jouir, mélangeant ainsi plaisir et frustration, elle escomptait le revoir plus vite. Ainsi fut fait, et le loup tomba dans la dépendance de cette maitresse sanguine qui le tourmentait en esprit nuit et jour. Il recalcula son budget, économisa sur toute ses dépenses, et emprunta partout ou il le pouvait pour revoir le sujet de ses fantasmes aussi vite qu’il le put. Ce petit manège se poursuivit plusieurs mois, et chaque fois, le petit Chaperon rouge inventait de nouvelle torture pour ce pauvre loup qui n’avait plus d’estime de soi qu’au travers des rares compliments de sa dominatrice. Le jeu le plus avilissant qu’elle avait inventé consistait à travestir le loup de la plus horrible manière qui soit avec des habits de vieille femme. Vêtu de la sorte, le loup était attaché, griffé, mordu et molesté, et le petit Chaperon rouge lui répétait sans cesse : « Mère-grand, que vous avez de petits seins ! » et lui de répondre « C’est que je n’ai plus de lait mon enfant… », et elle le frappait. « Mère-grand, que vous avez de petits tétons ! », disait-elle en les lui pinçant. « C’est qu’ils sont très sensibles mon enfant… », pleurait-il. Elle : « Mèregrand, que vous avez une petite bouche ! », et lui : 34 « C’est que je n’ai jamais sucé, mon enfant… ». Elle : « Mère-grand, que vous avez une petite queue ! » Et lui tristement : « C’est qu’elle ne sert jamais, mon enfant… » Par ce traitement, le petit Chaperon rouge eut bien vite fait de déconstruire la personnalité du loup qui fut entièrement en son pouvoir. Elle n’avait plus qu’à l’offrir à d’autres loups contre de modestes mais substantiels émoluments. Le loup ne mangeait plus, ne dormait plus, n’avait plus gout à rien ; il ne se souvenait même plus de sa dernière érection, pourtant il continuait d’attendre passivement chacun de ses rendez-vous avec celle qui avait fait de lui sa chose. Chaque nuit recelait son lot de stupre. Le loup se dégoutait lui-même d’être ainsi réduit à des passes à dix euros dans le fond d’une ruelle, mais un simple sourire ou un regard méchant de sa déesse lunaire et il se sentait comblé, différent, en un sens privilégié. Pour être honnête, quoique l’histoire ne s’attarda pas sur ce point, tout cela excitait beaucoup notre loup, surtout quand le Chaperon rouge lui fournissait du poppers. Un soir que la vilaine, vilaine fille avait conduit son esclave, car c’est bien ce qu’il était, dans une soirée bondage huppée, ce dernier trouva la mort lors d’un jeu sexuel d’étranglement. Le décès fut très habilement masqué en suicide, et nul ne fut jamais inquiété. MORALITÉ : On voit ici que certaines sortes de gens, Sans scrupule, profitent de toute forme de faiblesse, Disposant d’autrui et de leur argent, Sans jamais s’inquiéter de savoir s’ils les blessent, Et que ce n’est pas chose étrange Si tant de loup disparaissent, Dans de secrètes parties de fesse, Qu’on les abuse, les viole ou les mange. Ils s’évanouissent dans des pratiques honteuses. L’amour et l’addiction sont choses dangereuses. Mais nul ne peut dire si au final, Si le loup n’a pas eut une fin royal, Car les voies des plaisirs restent mystérieuses, Quoique pénétrables, et il ne faut lire dans ce conte, Rien d’autre qu’une histoire peu sérieuse, Où se mêlent plaisir, humour, danger et honte. 35 dom garcia bitume/fonte Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 36 dom garcia et thierry theolier alibi art «The match is over (pas le temps de pleurer ? ``vs 2#``:) In order to stay alive, knowledge workers will have to stay virtual. Cyborg-narrators will do their dance of differance on the border.» Le silence ouvre sur le virtuel quand tout est musique dans une danse macabre extatique. Avec un désir de se faire l'instrument des medias pour rentrer dans la cour cynistrée des Actualités, simple cafardage amplificateur déformant, qui veut se faire événement (tel le crapaud et le buffle), Alibi Art singe les mythomanes qui règnent dans les châteaux de sable de la dixit «société d'information», société d'informateurs, de rapporteurs (Etat policier vu ultérieurement ?). Fiers de revendiquer un machiavélisme opportuniste, les deux compères & co jouent à l'art contemporain en étalant les petits riens accessibles à tous qui aiguisent les différences au sein même de la répétition. Avec une touche esthétisante 37 superflue propre au voyeurisme séculaire, le quotidien y est en effet vénéré en vue des opportunités de rencontrer des acteurs à solliciter pour une performance d'autodérision. Le tampon est un passe-partout. Attitude infamante de demander la grâce de pouvoir tamponner l'épiderme, prétexte à séduction. De quel côté est le don et où est le contre-don ? Hommage aux corps désirants et pensants. Fameux tampon, symbole administratif du règne de la paperasse, instrument d'autorité, de reconnaissance officielle. Invalider ou valider, degré zéro du jugement, logique binaire du codage de l'information réservée auparavant aux machines outils. Y aurait il inversion, illustration de «l'art à l'ère de sa reproductibilité technique» ? Ne peut-on attendre un approfondissement de cet équilibre de plaisir et de déplaisir ? Alibi Art - Label : duo d'agents de liaison, dandies portraitistes de l'époque, chirurgiens du temps présent qui s'évertuent à tenter d'épuiser la sphère médiamétrique, processus à la Perec mais appliqué au spectaculaire et non à l'infra-ordinaire. En indexant des personnalités sans réelle valeur ajoutée, sinon une vague esthétique de la présence co-temporelle (contemporanéité hors cadre historique) le marquage de masse se fait indice unidimensionnel, surface immanente glacée de flashs. Cette tribu aux airs de troupeau, tels les fascinés, devant ou derrière, de l'écran, addicts à la notoriété, a le mérite de rassembler de l'hétérogène. Dans un dépassement du sens à portée collective, il y a là une collection de subjectivités qui revendique la perte du réel pour mieux appréhender les fictions qui se disputent l'orchestration du chaos. Cette instantanéité fétichisée au service d'un surf sur l'intensité illustre une guérilla dans laquelle l'anonymat se rebelle contre le matraquage médiatique. Comme pour mordre la main qui nourrit, le harcèlement à coups de tampon n'est qu'une légitime défense où l'alibi se fait symbole de la supercherie en quête de notoriété (ou l'inverse). L'esthétique relationnelle qui opère dans ce processus contagieux est également un écho au rituel qui se pratique aux entrées des soirées payantes. Le tampon s'échange contre une participation aux frais. La libre circulation des personnes y dépend de cette marque. Le folklore nocturne placé sous les signes d'une industrie du divertissement se fait complice de la dictature consensuelle qui dicte les comportements et les interactions diurnes. Le tampon s'y fait ultime trace culturelle de résistance aux diversions programmées. 38 En cela Alibi Art est un symptôme pertinent de la résurgence des matricules tatoués. Le totalitarisme n'est qu'une forme de la prolongation de l'esprit des Lumières, maîtrise de la nature, de l'homme par luimême, de l'homme par l'homme encore d'actualité. Le réseau contre la hiérarchisation des pensées serait il une issue au schéma pyramidal maternant et instrumentalisant qui apprivoise les ressources humaines (forces productives désubjectivisées) ? Alibi Art convie à une sorte d'enthousiasme permanent, «Blank Revolution», dionysie assoiffée d'horizontalité dans les rapports humains. La frénésie du tampon pourrait être un moyen de sortir du mauvais rêve décrit ci-dessus : ligne de fuite permettant de ne pas jouer le jeu du black-out qui sévit depuis plus d'un demi siècle. La fulgurance de l'acte ne permet certes qu'un jugement hâtif propre à la génération fin de siècle prise dans l'accélération provoquée par l' aspiration du vide, mais elle permet par contre de déchirer le voile des illusions conservatrices. La durée de vie du tampon n'étant qu'éphémère on ne peut calquer cette pratique sur les usages concentrationnaires, tout au plus un symptôme révélateur, une irruption quasi allergique. Alors à quand pansement ? le patch repositionnable, Karma-trauma contre karma police. Laurent Carlier ou un 39 nicolas brulebois en attendant la chute Elle n’a que 25 ans, et déjà les seins qui tombent. C’est effrayant… et merveilleux à la fois. Les caresses y gagnent en ambiguïté : plaisir d’humilier en cajolant, rehausser d’amour pour mieux les voir chuter ensuite – prétexte à revenir la consoler, plutôt deux fois qu’une ! * Le dénivelé entre la posture rehaussée et celle livrée à elle-même est impressionnant : un gouffre, qui n’a jamais tant mérité son nom de gorge, avec l’idée de cascade ou bel éboulis qui s’y rattache. * Décolleté audacieux, qui n’occulte pas l’idée d’un naufrage à venir. Elle bombe le torse en grandes inspirations inquiètes, prie pour que les bouées ne lâchent pas en cours de route. * Mes mains lui offrent, en rêve, ce beau maintien que la réalité leur refuse : rehaussée dans l’estime de soi, pour mieux affronter le regard des autres. * Je l’imagine, à l’adolescence : sous l’assaut d’une puberté trop expansive, crever les pronostics (premiers dessous achetés) et ne pas s’interrompre en si bon chemin… passant le point de non-retour pour adopter cette morphologie tombante, mollesse caractéristique des filles de sa race : affaissement que même les plus sévères armatures ne sauraient endiguer… et que l’amour, seul, semble pouvoir réparer. 40 nicolas brulebois en attendant la pièce* Clou du spectacle : le petit ventre de l’ouvreuse, à l’air très doux, qu’elle laissait distraitement affleurer sous son pull. Le cher Bertolt, en son paradis, dut apprécier ce parti pris de mise en scène... * Entre-deux charmant, où pantalon et gilet ne se rejoignaient plus, qu’un geste ample suffisait à révéler. Ce n’était pas de ces nombrils qu’on exhibe, trop sûrs de leur platitude. Le laisser-aller semblait involontaire, révélant la rondeur à sa naissance : ce moment où le bas laisse place au ventre proprement dit, bombé de si aimable façon qu’on en devine les prémisses, avec un peu d’attention. * Chair entrevue l’espace d’une seconde : bien plus précieuse que celles, jetées à la figure sans qu’on l’ait demandé, par des filles n’ayant pas froid aux yeux. Quelques kilos joliment accommodés, plutôt que les perfections au milligramme près, si vulgairement mises en sauce. * Divin entre-deux, bombé à souhait, où se viendront idéalement joindre les mains d’un amant – surgi dans son dos, sans qu’elle sursaute le moins du monde. * Chair épanouie en courbe si naturelle, qu’il ne vient pas à l’idée d’en avoir honte : elle la laisse libre, préférant cette gourmandise aux restrictions complexées. 41 * Il en faudra du temps, des grossesses et des coups au moral (l’affaissement de l’humeur précède souvent celui des chairs), pour que cet arrondi inspire pitié. * Elle était charmante, promenant sur nous ses beaux yeux las – tandis que je ne pouvais ôter les miens de son bedon, involontairement dévoilé. Nous allions voir un spectacle de Brecht, mais il n’était plus question de distanciation, pour le coup. La cohue du public, attendant qu’elle dénoue le cordon pour accéder à la salle, dissimulait tant bien que mal la gourmandise de mes regards. Une camarade ouvreuse finit pourtant par remarquer ce manège : elle lui adressa un signe d’alerte, qui me fit détourner les yeux in extremis. Repassant devant elle au sortir de la pièce, je m’aperçus que le divin pli de chair était définitivement remballé – et son air passablement durci, à l’idée d’avoir été surprise, en ses zones les plus vulnérables… * Rêverie autour du Don Juan de Brecht (adapté d’après Molière), vu au théâtre Lucernaire le 30/10/2010 Chronique du spectacle : http://www.ep-la.fr/index.php? option=com_content&view=article&id=258%3Amoliereb recht&catid=11%3Atheatre&Itemid=46 42 marlene tissot colle-toi bien ça dans le crâne Comme le début d’une fin. Quelque chose en dedans sur le point de basculer du côté adulte de la vie. Et j’avais beau lutter, mes griffes plantées dans le mur du temps, un monde s’effritait. Ne restait que la poussière à bouffer… On entamait le dernier trimestre de l’année scolaire et déjà, j’appréhendais la trop longue coupure estivale. J’espérais trouver un petit job. Pour remplir mes journées. Éviter de penser. Ne pas tourner en rond dans l’appart’. Avec papa et maman et leurs problèmes qui finissaient toujours par devenir mes problèmes. Je détestais l’été. Le soleil c’est bien beau quand on a des lunettes noires et qu’on aime lézarder au bord de l’eau chlorée/salée (rayer la mention inutile). Enfin, d’ici là, y avait le bac de français à préparer. Et les résultats à maintenir aussi haut que possible. Au-dessus des lignes de flottaisons. S’accrocher à cette foutue réussite comme à une bouée pour éviter de sombrer dans le gosier du monde d’en bas. Celui où plus rien n’est possible. Y croire un peu parfois, malgré les parois glissantes qu’on escalade dans le froid et l’odeur de merde. Et puis se faire magistralement enfoncer la tête sous l’eau par un enculé de prédateur à cravate. J’avais jamais pu blairer la gueule de monsieur M., le prof de math. Ses regards comme des anguilles sournoises. La sueur en perles grasses sur son visage. Ses poings serrés quand il marchait d’un pas raide, entre les allées de tables, à l’affût des tricheurs. Il me foutait les jetons. Sa rage contenue, ce je-ne-sais-quoi de violent qu’il dégageait. Alors j’évitais d’avoir affaire à lui. Mais ce vendredi-là, il m’a retenue à la fin du cours. La sonnerie a résonné dans les couloirs. Le cri des chaises traînées sur le carrelage. Cavalcade d’ados dans les escaliers. Et puis le silence ouaté a repris possession des lieux. Le bâtiment s’était vidé en une poigné de secondes. Tout le 43 monde avait foutu le camp. Le week-end s’annonçait splendide. Et moi j’étais là. Au pied de l’estrade. Je regardais le bureau. En silence. Ma copie retournée entre les mains du prof. Les manches de sa chemise remontée. Ses bras poilus. Sa montre. Son alliance. J’attendais. Il a soupiré. J’ai levé les yeux vers son visage. Les gouttelettes de sueur sur ses tempes et juste audessus de sa bouche. Il m’observait. Je comprenais pas trop. Qu’est-ce que je foutais-là ? C’était à cause de l’interro ? J’avais eu une mauvaise note ? C’était ça ? Mais pourquoi il disait rien bordel ? Il a fini par se lever. Il a contourné le bureau pour venir se planter juste devant moi. Tout près. Beaucoup trop près. –– Il faut que je te parle, il a dit. À propos de… il a toussoté, puis il a repris : à propos de ton devoir. Et il a agité la feuille double sous mon nez. Il s’est penché vers moi, son regard punaisé dans le mien. –– Je te fais peur ? il a demandé. J’ai secoué la tête. –– Tu as perdu ta langue ? il a demandé. Et ça l’a fait marré. –– Non, j’ai dit. Il mordillait sa lèvre inférieure, le visage toujours penché vers moi. Si proche que j’aurais pu compter chaque pore de sa putain de peau suintante. Son haleine puait l’ail et le vin. J’ai tendu une main tremblante vers ma copie, mais il l’a reculée. Il a soupiré à nouveau. –– Je t’ai mis un mot à l’intérieur, il a dit, en montrant mon devoir. Je t’ai mis un mot, mais ça doit rester entre toi et moi, il a précisé. J’ai hoché la tête. –– Entre toi et moi, compris ? Et il m’a laissée récupérer la feuille double. Il s’est éloigné, quelques pas vers la fenêtre. J’ai demandé si je pouvais y aller. Il m’a fait signe que oui et j’ai foncé vers le couloir. Mais il a dû se raviser, m’a rattrapée in extremis, plaquant sa main sur la porte pour m’empêcher de sortir. Il était dans mon dos. Collé contre mon cul. Et je me suis sentie soudain prise au piège. L’épine dorsale hérissée d’une peur animale. J’étais prête à crier, à demander de l’aide. Mais il ne s’était rien passé. Il ne se passait rien. Juste son corps contre le mien. Son odeur de transpiration. Son souffle tiède. –– Ce mot que j’ai mis dans ta copie, il a murmuré, c’est strictement personnel, tu comprends ? J’ai hoché la tête. –– Tu le liras, n’est-ce pas ? 44 J’ai hoché la tête. –– Tu le liras ce soir dans ton lit. Et on en parlera plus tard. Tu me raconteras, n’est-ce pas ? Je tremblais. Il continuait de chuchoter je ne sais quoi dans mon cou, et je sentais ses lèvres sur ma peau. Il puait de la gueule. Sa main droite bloquait toujours la porte. Son autre main a glissé sur ma hanche, m’attirant contre lui. Je l’ai senti bander contre mes reins, et quand il m’a mordu l’oreille, ça a fait comme une décharge électrique. Mes muscles prêts au combat. Sursaut vital. Je l’ai repoussé avec une sauvagerie mal maîtrisée. Et je me suis sauvée à l’autre bout de la salle de cours. Il m’a regardé. Avec surprise d’abord. Et puis avec colère. Je chialais, planquée derrière une table. Accroupie. Je savais pas quoi dire, ni comment me sortir de ce merdier. –– Qu’est-ce que c’est que ce cinéma ? il a rugi. Pourquoi tu pleures ? Pourquoi tu pleures bordel ? J’ai haussé les épaules. J’avais pas de réponse. –– Tu n’es plus une gamine, il a dit, en pointant son index vers moi. Colle-toi bien ça dans le crâne, tu n’es plus une gamine, il a répété. Puis il est venu m’arracher la copie des mains d’un geste agacé. Dégage, il a fait, sans me regarder. Je suis partie. J’avais loupé le bus. Je n’étais plus une gamine. Je me suis collée ça dans le crâne. Je savais pas trop si c’était une bonne ou une mauvaise nouvelle… 45 marlene tissot puisque je n'étais plus une gamine Se dire qu’il est temps de tondre les dernières mèches de l’enfance tremper les orteils dans l’océan des choses des choses de la vie avancer coûte que coûte éviter de se faire piétiner C’est étrange parfois les sentiments. Ces trucs qui poussent en nous et qu’on ne sait pas trop dans quelle case ranger. Cet été-là, mon cœur n’en faisait qu’à sa tête. À croire qu’il se mettait à fonctionner comme celui des gens normaux. Je suis tombée amoureuse de Saïd. En tout cas, j’y ai cru. Mais peut-être était-ce davantage le plaisir de faire enrager papa qui faisait palpiter l’oiseau dans ma cage thoracique. Saïd venait me siffler en bas de l’immeuble. Pourquoi tu laisses ce petit con t’appeler comme une chienne, demandait papa ? Je répondais pas. Je descendais rejoindre Saïd. Papa descendait une autre bière. Chaque chose était à sa place. Le monde continuait de tourner. On a failli baiser, Saïd et moi. Dans ma chambre. Il était monté, un jour où les parents n’étaient pas là. On s’embrassait, allongés sur mon lit. Puis il a vite commencé à s’exciter, à se frotter sur mon short. Il a remonté mon tee-shirt , viré mon soutif. Et je savais bien qu’il faudrait que j’y passe un de ces jours. Mais les bruits qu’il faisait, sa bouche grande ouvert, les soupirs moites, le soleil qui m’observait par la fenêtre en ricanant, les ressorts du lit qui grinçaient. Non, je pouvais pas, pas comme ça, pas maintenant, pas ici. Et puis papa et maman sont rentrés. Plus tôt que prévu. J’ai entendu la poignée de la porte d’entrée. Merde, a fait Saïd ! Ce con avait fermé à clef sans me le dire. Sûrement qu’il avait prévu de me sauter depuis le début. Papa a commencé à tambouriner en gueulant. Je suis allée ouvrir illico, consciente que j’allais probablement m’en recevoir une bonne. Papa m’a jeté un regard dangereusement sombre, du genre qui annonce la 46 violence de l’orage à venir. Saïd s’est faufilé vers la sortie sans dire un mot. Évidemment, cette histoire a fait comme un petit cataclysme à la maison. Papa a sérieusement ralenti la boisson. Il avait dans l’idée de me fliquer. Maman savait pas trop si elle devait prendre ma défense ou juste fermer sa gueule. J’avais l’interdiction formelle de revoir Saïd. Mais j’ai jamais supporté les interdictions. Alors on se retrouvait en cachette. Et on a même fini par baiser dans les toilettes de la piscine municipale. Contre le carrelage blanc et humide. Ça sentait le chlore et la pisse. On entendait les mômes plonger, pleurer, rire. Et la radio de la baraque à frites à côté qui grésillait dans les haut-parleurs. On a fait ça très vite. Debout. Il a juste écarté le maillot de bain entre mes cuisses avant de m’enfourner son sexe. Ça a été vaguement moins douloureux que je ne le craignais. Juste désagréable. La sensation d’un corps étranger. Le frottement. Les mains de Saïd agrippées à mon cul. En trois minutes, il avait tout lâché. Ensuite, il a rangé sa bite, comme si de rien n’était. À l’époque on parlait pas tellement du SIDA. J’y avais pas pensé. J’avais pensé à rien. La page était tournée. Je n’étais plus une gamine. Bon. Pas la peine d’en faire une histoire. On a guetté par-dessus la porte des chiottes. Saïd est sorti dès que le champ a été libre. Je suis restée là un moment, assise sur la lunette des toilettes. À me demander si quelque chose avait vraiment changé, et quoi exactement. J’ai senti que ça coulait entre mes jambes. Dans la cuvette des toilettes, il y avait une petite flaque de sperme marbrée d’un filet de sang. Résumé d’un chapitre sans intérêt. Je me suis essuyée. J’ai remonté mon maillot de bain et je suis allée bouquiner à l’ombre d’un grand arbre. 47 rmm alkbazz sans titre Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 48 clotilde delcommune chambre Le personnel, gérant d’un culte, inquisiteurs. Leur regard menaçant enjoint au sérieux, dans l’immensité froide des couloirs. Dans toute la dignité de l’odeur d’hôpital déployée. Les narines confirment ce que le cerveau savait : on ne pourrait être ailleurs. Le lit est central, immense, cérémonieux. Temple du sacré. On n’est pas là pour rigoler. Le Lit ne souffre aucune impertinence. Le Lit est La Loi. Des machines tout autour. Ca pourrait sonner comme du Kraftwerk. S’il n’était La Loi du Lit. On n’est pas là pour penser à du vivant, ne serait-ce que par analogie. On est là pour Révérer La Vie. La Vie Mécanique. La Vie qui fait bip et des dessins de montagnes sur un moniteur. Des tuyaux relient les machines et le lit. Très sérieux aussi, les tuyaux. Dans toute la dignité de leur fonction, toute la fierté de leur fonctionnalité. Il y a celui qui goutte-à-goutte ; il y a celui qui insuffle de l’air. C’est en suivant les tuyaux qu’on la trouve. Elle est devenue partiellement machine. Le rythme l’a prise. Elle soubresaute régulièrement avec le tuyau-à-air, le tuyauà-gouttes dans le bras. Portant, le monstre de la mer. Pourtant, l’incroyable de sa force. Le sel dans le nez. L’eau étouffe. Des gouttes partout. Ballottée. Emportée. Vagues derrière. Ennemi dans le dos. Géants. Vagues éclatent. Prennent. Corps infime. Courant vers le bas. Vorace. Chaos. Eau et air mélés dans la bouche. Cris se fraient un chemin. Voix si faible dans grondement furieux. Au secours. Ne pas boire la tasse. De nouveau, les vagues. Le courant. Sans régularité. Peut pas s’adapter. Panique. Immensité rugissante. Une main t’agrippe. Ton corps, lourd, sur un corps, fort. Le sable sous toi. Des mains sur toi. Couchée. Déshabillée. Bouche-à-bouche. Des corps s’agitent. Une ambulace t’emporte. Te faire analyser. 49 Scruter. Radiographier. Réparer. Aliter. Mourir dans la dignité. C’est à la mer que je dis que tu me manques. Je fuis les hôpitaux, depuis. Pour Caroline Delhaye (1987-2007) 50 anaïs mauzat sans titre Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 51 paul sunderland comment j'ai terrorisé une fillette Je sortis de ma chambre d’étudiant. Il faisait un temps humide, la nuit était déjà tombée, c’était l’automne ou l’hiver. J’ai oublié le mois, même la saison. Il y avait un boulevard à traverser, sur les dix-huit heures quarantecinq beaucoup de voitures circulaient encore, on se trouvait sur une artère très passante. Je traversai en dehors des clous, entre deux giclées de carcasses lumineuses, et me retrouvai sur un terre-plein central transformé en parking, saturé de carcasses éteintes. Je zigzaguai un peu entre des carrosseries au repos et des arbres qui se faisaient chier. Par bouffées ça humait les feuilles en décomposition et les gaz d’échappement. Je me retrouvai de l’autre côté, à attendre pour traverser l’allée parallèle. La ville, je la trouvais conne, grise et sale, avec ses maisons de briques rouges dupliquées à l’infini (disons une longueur trop importante à mes yeux), souvent accolées les unes aux autres, comme pour mieux se soutenir dans leur médiocrité. Les autochtones, je ne les aimais pas des masses non plus, en général. Je n’avais pas trop envie de leur faire la conversation, à cette époque. Pas que ça aie beaucoup changé, d’ailleurs. Je suis sélectivement asocial. Je traversai sans me faire aplatir. En fait, j’allais au resto u, comme tous les soirs en semaine. Ma chambre avec sa plaque chauffante et sa fenêtre sur cour intérieure absurde, elle me déprimait. Je n’avais même pas envie d’allumer, en rentrant. Je ressortais vite fait, même quand il faisait un temps de merde. Même pour aller manger de la daube ; je me demandai probablement ce soir-là si ce serait encore du steak haché-purée, une barbaque noircie, sèche, accompagnée de bouillie à grumeaux servie à la louche par Miss Ukraine 1956. Je n’étais pas encore arrivé, il fallait traverser un pâté de maisons, un petit quartier engoncé entre deux colonnes 52 de trafic, celle que je venais de franchir et une autre, plus loin. Là, les rues n’étaient pas larges, c’était de la ligne droite mais ça partait un peu dans tous les sens, probablement parce que c’était une zone plus ancienne. Comme on dit, c’était chichement éclairé. Les lampadaires, vous aviez presque envie de les appeler des becs de gaz. Il n’y avait pas un chat, dans ces rues. Je passai devant une boulangerie encore ouverte. La lumière de ce commerce, à chaque fois que je le voyais à cette heure-là, en ces moments de l’année, je ne comprenais pas. Enfin si, je comprenais, mais ça tranchait sur l’ambiance locale. Je me disais qu’à la limite ça aurait déjà dû être fermé parce qu’on était dans une espèce de ville morte de son urbanisme, de son usure, de ses flots séquencés de phares et de catadioptres sur les grands axes. Moi, j’étais à pied, je prenais juste des rues tristes. Je tournai à un angle et aperçus la gamine. Elle était probablement sortie de la boulangerie quelques instants avant que je passe, et elle ramenait à la maison la baguette familiale. Brave petite. Je n’en avais strictement rien à foutre du point de vue qui est le vôtre et auquel vous ne pouvez pas ne pas penser. De mon point de vue à moi, je vis tout de suite que nous étions les seuls humains sur un segment de trottoir désert et qu’elle allait forcément entendre le bruit de mes pas. J’eus la certitude que j’allais la rattraper même si je ne le désirais pas. Je ne le désirais pas. Seulement, je marchais plus vite qu’elle. Je ralentis mon allure, m’obligeai à ne pas la regarder avec insistance. De dos, j’estimai son âge à dix-onze ans maximum. Petite fille sage qui allait chercher le pain, cheveux châtains qui tombaient un peu dans le cou. Sa maison ne devait pas être très loin. Elle entend forcément le bruit de mes pas, me dis-je. Elle sait mon regard posé sur son corps. « Paul, tu sais que tu as une tête de pervers ? On t’imagine bien à la sortie des écoles ! Ou dans les parcs, en imper ! A poil en dessous, bien sûr… Ou alors non, pas à poil, mais avec plein de photos de cul que tu revends à la sauvette ! Non mais franchement on te verrait bien faire ça… Bon tu nous en veux pas, on dit ça pour rigoler, hein. » J’avais de vrais copains, à l’époque. La gamine se retourna et me regarda sans rien dire. Soit. Alors je m’amusais bien avec ma tête de pervers nouvellement décrétée, quand j’étais dans ma chambre, disons quand j’étais seul devant une glace. Le mieux : les petites armoires murales, à trois portes avec miroir 53 sur chacune d’elles. En orientant correctement celle de gauche et celle de droite, vous bénéficiez non seulement de votre tête vue de face, mais également de profil, de trois-quarts avant, trois-quarts arrière, côté gauche, côté droit. Pour mon faciès, c’était simple : pour que ça ait frappé à ce point et de façon unanime les copains carabins et pharmas avec qui j’avais l’habitude de dîner, c’est que ça ne devait pas demander beaucoup d’efforts d’imagination. Eh, regarde-toi, de face pour commencer ; tu relèves un peu la tête, de préférence le matin au réveil, les cheveux hérissés, le menton gris. Garde encore un peu ton haleine de trappeur kalmouk, ça, on ne le voit pas mais c’est la petite touche subjective qui aide. Regarde-toi, avec ta tête de pervers, surtout ne souris pas, dis-toi que tu es en garde à vue, on est en train de te prendre en photo, c’est un police line-up, comme on dit chez les Américains, montre bien ton matricule, Paul. Et puis soudain mets-toi à rouler des yeux fous, sans bouger, fais comme si tu étais pris d’hyperventilation, continue de te regarder, ce n’est plus le line-up à présent, vision latérale dans les autres glaces si tu as envie, tu joues, tu te regardes en train de regarder comme si ça allait franchement mal finir pour quelqu’un dans les secondes à venir. La petite poursuivit son chemin sans modifier son allure, sans lâcher sa baguette. Ouais, c’est exact, j’ai une tête de pervers, maintenant que vous le dites je m’en rends compte. Ma piaule, en ces détestables années quatre-vingt, sent le phoque et j’y entasse des bouquins de cul. La chambre d’à côté est occupée par la fille de mes logeurs. Doit avoir dans les quinze-seize ans. Pas vilaine. Je ne la croise pas souvent mais je l’entends qui prend sa douche tous les soirs, avant de se coucher ou de faire ses devoirs. Dès qu’elle libère la salle d’eau je vais prendre une douche moi aussi et là, évidemment, je me branle en pensant à elle. Evidemment. La trace de son corps est si proche. Evidemment… Soudain, sans pousser le moindre cri, sans me regarder à nouveau, la petite se mit à tracer droit devant elle. Elle avait utilisé ses ultimes réserves de self-control mais pour une enfant de cet âge et dans cette situation, ce n’était déjà pas mal. Surtout qu’elle continuait de tenir son pain. Donc, voilà, je l’avais terrorisée. Heureusement qu’à cet endroit du quartier se trouvait une fourche entre deux rues et que je devais pour ma part prendre à gauche, tandis qu’elle prit à droite. Sur l’instant je me dis qu’au moins elle n’aurait peut-être pas besoin d’attendre d’avoir refermé la porte derrière elle 54 pour se sentir en sécurité. J’eus désespérément envie qu’elle comprenne l’épisode comme une fausse alerte. Sans joie, je poursuivis mon chemin, arrivai au bout de la rue. Je récupérai un boulevard, de la circulation. Je fus presque saisi de la flemme incroyable d’avoir à attendre à un feu avant de traverser. Je me sentais crevé. –– Dites, vous savez pas où on peut trouver des putes, dans le coin ? Il s’était inscrit dans mon champ de vision, il se tenait même debout à côté de moi, à guetter le prochain passage au vert pour les piétons mais je n’y avais pas prêté attention. Il était juste arrivé plus brusquement que moi. A ses paroles je le regardai vivement. On était les deux seuls cons à ce feu. Un homme entre quarantecinq et cinquante ans, pour autant que je me rappelle. Une allure quelconque. L’air d’un type seul, ou en ménage, mais alors franchement pas heureux dans ce cas. Oh mec, si tu savais l’erreur que tu viens de commettre. Il y a à peine cinq minutes que je viens de causer bien malgré moi un malentendu attristant, je viens juste, cent mètres en arrière, de faire peur à une gosse alors que je ne lui voulais rien, tout ça parce qu’on vit dans l’horreur quotidienne, médiatisée, l’horreur démocratique qui peut arriver à tout le monde, y compris à une enfant qui était ressortie uniquement pour aller, en ronchonnant ou de bonne grâce, chercher le pain et toi, entre des engins de chantier au repos et des zombies motorisés, sur un terre-plein gadouilleux et jonché de jantes, d’artefacts plastiques et de bouts de verre brisé, à un feu de circulation sous un éclairage cadavérique, là ce soir où il fait froid, où rien ne donne envie, toi, tu trouves encore le moyen d’avoir la bite en feu et de me demander l’adresse du baisodrome le plus proche comme si tu allais éjaculer dans ton slip dans moins de dix minutes, comme si le premier type croisé allait te répondre de la façon la plus naturelle puisque ben hé hé, communauté masculine et tout, on se comprend, etc. –– Hein dites, vous sauriez pas ?... Voix vulgaire. Je faillis lui confier mes pensées de l’instant dans toute leur spontanéité vespérale mais je m’abstins et en fait, je ne dis absolument rien et lui mis un taquet dans la gueule. Le type partit en arrière, tomba sur les fesses. Sa bouche saignait. Pris de peur, il se releva et détala. Je le regardai s’estomper dans la nuit. Je respirai lentement, par le nez. Je dus rater une séquence complète de passage autorisé. Je finis par traverser. En face, on arrivait dans la rue du restaurant 55 universitaire. C’était une zone mieux éclairée, plus vivante. Dans les toilettes du bâtiment je me lavai soigneusement les mains car je venais de toucher le Diable. Puis je montai à l’étage, m’insérai dans la file avec tout l’attirail, plateaux, couverts, et mon ticket. Je me souviens que contrairement à mes prévisions, ce n’était pas steack haché-purée, ce soir-là. C’était knacksfrites. Ca allait. 56 Horses eat sugar Pour écouter ce morceau, rendez-vous dans le dossier bande originale ou bien cliquez ici pour l'écouter directement 57 myriam linguanotto bleus d'enfance C’était un jour de Toussaint, terne et pluvieux. Tôt le matin, ma mère et ma grand-mère sont parties dans les vignes. Je jouais dans le poulailler qui s’étendait entre la route, peu fréquentée, et les champs à perte de vue. A cette hauteur, le goudron formait un lacet serré pour s’éloigner jusqu’à la prochaine église. Trois ombres vêtues de noir sont passées silencieusement, des fleurs à bout de bras. Elles rejoignaient le cimetière, à plusieurs centaines de mètres en bordure des prés. Une pluie fine relevait l’odeur âcre des arbres. Tout était calme autour de moi. J’ai entendu le crissement des pneus. Un grincement sec et strident, qui s’est interrompu dans un fracas de tôles, effroyable. La violence du choc a troué l’air, figeant la vie un court instant dans un silence glacé. Des oiseaux se sont envolés de la forêt, de l’autre côté de la route. J’ai ouvert les yeux, senti la contracture de ma mâchoire et mon cou raidi. A quelques mètres de moi, dans le virage, un camion barrait la chaussée, une voiture écrasée contre son pare-chocs. Un monstre de ferraille compressée s’éventrait sur la cabine du poids lourd. Une portière a grincé. Lentement, un homme est descendu du camion. Il s’est approché de la voiture pour coller son visage contre la vitre du conducteur. Il a marché rapidement, en sens inverse, en criant des mots que je n’ai pas compris. Il singeait des gestes désespérés. J’étais cachée par le léger surplomb et les broussailles qui séparaient le poulailler de la route. Je ne pouvais faire le moindre geste. Ma grand-mère est arrivée en courant. L’homme pleurait. Je ressentais son effroi. Je l’ai entendu parler, ils ont rejoint la maison. Ma grand-mère jetait des regards furtifs derrière elle. Je suis restée seule, un long moment à regarder la voiture disloquée. A écouter le silence. Je sentais une odeur de métal chaud se répandre. Le moteur refroidissait dans un cliquetis métallique. Je n’osais pas m’approcher, je surveillais les moindres signes, un bruit 58 de tôle, la pluie qui coulait contre la carrosserie. Ma grand-mère est enfin revenue avec l’homme, des voitures se sont arrêtées. Les gendarmes et bientôt une ambulance. Leurs voix me parvenaient, ils s’affairaient, ce qu’ils disaient m’était étranger. Ils ont réussi à ouvrir la portière avant. J’ai vu la civière blanche. Je devinais un corps, entièrement recouvert sous un drap. Les gendarmes regardaient les traces sur le goudron, ils parlaient à voix basse. Je n’ai pas senti ma mère s’approcher de moi. Elle m’avait cherchée, je la voyais tourmentée. Elle m’a entraîné dans la maison. Mes jambes étaient lourdes, mon cœur serré dans un étau. J’ai retrouvé la chaleur de la cuisine. Plusieurs fois les gendarmes sont venus téléphoner, ils parlaient avec ma grand-mère et avec l’homme du camion. Je l’observais. Abattu, il ressemblait à une bête traquée. Il soupirait, répétait sans cesse « c’est pas vrai », le visage enfoui dans ses mains. Ma mère lui a servi du café, sans une parole, elle était pâle. Après, ils sont tous repartis, en disant merci. Ma grand-mère et ma mère ont préparé le déjeuner, personne n’avait faim. C’était déjà l’heure des champs. La pluie avait cessé, ma grand-mère et ma mère sont retournées travailler dans les vignes. Jusqu’au soir, j’ai attendu dans la cuisine, en regardant la route à travers la fenêtre. Les ombres du matin sont repassées. Elles se sont arrêtées à quelques pas de la voiture, ont fait le signe de croix. Une remorque a dégagé la chaussée, emportant avec elle la montagne de ferraille encore fumante. Le camion a démarré, escorté par les gendarmes. Le goudron a été nettoyé. Dans la cuisine, j’attendais que la vie reprenne en s’éloignant du matin. Le soir, ma grand-mère a raconté ce qui s’était passé. L’homme avait eu une crise cardiaque, sa voiture s’était déportée dans le virage et écrasée contre le camion. Tué net, d’un coup, sans souffrir. Il n’était pas d’ici. On n’y pouvait rien, il y en avait eu d’autres, à cet endroit. Il y en aurait d’autres. La route était dangereuse, aucun panneau n’annonçait le tournant. J’écoutais, une boule dure au creux du ventre. Broyée d’incertitudes, je me demandais comment traverser la nuit, avec cet homme qui rodait parmi nous. La mort, elle, crépitait dans la cheminée, le long des parois en fonte, escaladant les bûches pour entamer un dialogue avec l’au-delà. Elle s’amusait avec les flammes et nous réchauffait de ses feux. Le lendemain matin, je suis retournée à l’endroit. Il y avait des débris de pare-brise mêlés aux graviers. Certains brillaient, minuscules diamants couchés sur 59 l’herbe verte. Les traces des pneus apparaissaient encore. Au milieu du goudron, un corps était dessiné à la craie bleue. Je me suis approchée. J’ai enjambé le tracé, jusqu’à l’emplacement du coeur. Les yeux fermés, la gorge serrée, j’écoutais ce qu’il restait, un bout de lui, sa voix. Je me préparais à sentir l’âme, à accueillir un souffle chaud, un frôlement de quelque chose. Mais seule la forêt murmurait, les branches des arbres dansaient au fil du vent. Tout était rempli, les fermes au loin entourées de champs, la route à l’horizon, un serpent gris sur les coteaux verdoyants. J’écrasais les débris de pare-brise de toute la force de mes pieds, je les faisais crisser pour faire sortir l’âme. Je ressentais la dureté du verre traverser mes semelles. L’âme était tombée dans les entrailles de la terre, avant de rejoindre le cimetière. Je tremblais à l’idée de la voir errer, au milieu des tombes, puis frappant aux portes des fermes endormies. Les jours suivants, le contour bleu s’est peu à peu effacé, au gré du passage des voitures, du vent et de la pluie. Seuls les cristaux de verre persistaient dans leur éclat. J’ai déserté le poulailler, pour jouer plus près de la maison ou dans les champs, à l’écart de la route. La mort s’éloignait. Je ressentais pourtant sa présence bleutée accompagner mes silences. Elle était là, tapie au fond de moi, invisible. Je la pressentais de l’autre côté de la route, dans le balancement sombre des arbres. A la fin des vacances, nous sommes reparties, ma mère et moi, en voiture. Les roues sont passées là où l’âme s’était échappée. J’ai regardé l’endroit disparaître dans le rétroviseur. Je me sentais soulagée au fur et à mesure que nous avancions sur l’autoroute. Des voitures arrivaient en sens inverse à vice allure, j’étais grisée par leur vitesse. 60 joel mas sans titre Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 61 ex aequo les chiens dorment parmi les loups Alors c’est ça, la vie de rêve. Trainer son cul d’chantier en chantier, se bâfrer à côté d’tous ces ploucs, en faisant mine de rire à leurs blagues de putes bigardées, confondus dans leurs pets, dans leurs rots, savoir seul dans son coin qu’on n’sera jamais autre chose qu’un peigne-cul de smicard sans talent et sans âme, continuer sa journée d’merde à bouffer du ciment et d’la terre molle, les mains dans l’cambouis, les mains dans la chiasse mécanique, rêver d’un bureau chauffé, d’une secrétaire un peu chienne, rêver de vivre comme ces pontes, ces mafieux d’la finance, boursicoteurs en latex Chanel, vivre comme une hyène, attendre 17h30, foutre le camp dans sa caisse de merde, payée à crédit, qui pue pas comme soi-même, mais qui sent salement l’effort de réussite et la prise de tête quotidienne, écouter d’la musique de merde sur NRJ, ou sur Foune Rade Yo, peu importe, on fait tous pareil, au fond, bien au fond du confort prolétaire. Maudire ces petits branleurs diplômés. Qui, eux, ont des « noms », véritables étiquettes, passeport pour la réussite, avec des jobs qui payent, bien, un peu trop, et des places de concert gratis pour aller voir des groupes de putes islandaises en dentelle. Des connards de bobos en faculté qui aspirent à la vie de voyou, de rebelle, d’antécliché. Polaroïds sans couille, tous. Rentrer dans son taudis de 40m2, chialer devant la télé (en silence et sans trace, pute légère), baiser (et s’apercevoir être un mauvais coup, vouloir tenir plus qu’une minute, ne pas y arriver, vouloir s’arracher la bite à coup d’burin), partir chier du sang (avoir peur d’un cancer du cul ou d’un aut’truc tout aussi grave, sale, qui t’emportera lentement et surement), fumer des clopes toute les demi-heures et boire de la mauvaise orge (faut pourtant bien mourir de quelque chose, comme le voudrait ce vieil adage néo-beaufien, de ceux qui n’ont peur de rien dans l’absolu, et 62 trembleront au jour du jugement des derniers cons), attendre le repas, compote de chiotte, fait de plats micro-ondables dégarnis et de yaourt Lidl, tu sais, les liquides qui baignent dans ces gros pots sans image, café-télé-odeur de bite rance, dormir profond dans un lit trop court, se réveiller toujours trop tôt, repartir au boulot dans sa 206 quasi-neuve (penser à c’putain d’crédit, encore et encore, penser à en faire un autre pour les loyers en retard, un autre pour ce canapé qui te manque tant, un autre pour lui offrir une vraie robe, de vraies fleurs, une vraie féminité). Devenir dingue. Ecraser des vieilles, des mioches, des ados-putes antiHadopi, sac à dos Eastpack à patch Slipknot qui manifestent devant la fac, avec des joints tout frais et des I-Pod dernier cri crachant leurs merdes synthétisées, des t-shirts fantaisie de chez Zara, ou d’autres encore, du Che Guevara, de l’imagerie d’bobo hypocrite, en vérité, une masque de sympathie sur un visage de prétention, des putes en décolletés d’à peine 16 ans, minis shorts armés, prêts à faire feu. Les écraser, en faire de la purée d’organes, déraper salement sur leurs gueules blafardes, faire voler ces petites merdes sur l’asphalte, rire fort, rire à pleines dents, se croire dans GTA, continuer sa route avec des boyaux déchiquetés dans l’pare-brise, des poumons incrustés dans les jantes, des cervelles collées sur le capot, qui tremblotent sous l’effet du vent, se gratter les couilles avec vigueur et lâcher son volant, partir droit dans un mur de béton brut. Rater sa mort et finir légume dans un fauteuil d’occasion, entouré d’infirmières pleines de verrues, de suffisance et d’antipathie, et gober des cachetons pendant des semaines, se faire torcher l’cul (en espérant puer bien fort, bien fait pour toi, salope), voir sa femme partir avec un autre connard, un beau-gosse costard faux-chic acheté sur un quelconque site maghrébo-russe, cet entrepreneur, qui en plus, est ton ancien patron, celui par qui venait l’angoisse, et qui viendra t’plaindre chez les éclopés, la gueule pleine de rires retenus (ça t’apprendra, tête de gland, quand tu seras remis, direction la prison mon gars, sans case départ, mais avec un casier neuf et des tas d’frayeurs au cul). N’en plus pouvoir, se faire sauter à coup d’hydrogène dans les locaux d’l’hôpital, partir avec tout ces connards d’infirmes et d’cancéreux, ces pédés du Sida et ces drogués d’l’aiguille, ces déchets de trisomiques mal foutus, ces pétasses en blouse blanche et ces escrocs du scalpel. 63 gaijin sans titre Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 64 regis belloeil multa tuli L’homme regarda par la petite fenêtre de son duplex, d’où s’échappait une lumière poussiéreuse. Sombre. Peu d’animation dans la rue : quelques piétons, deux ou trois voitures. Le silence n’était jamais total car… Martèlement. Une enclume peut-être. Ou un froissement de tôles. Des corps carbonisés encore vivants (comment cela peut-il être possible ? Et pourtant si, ils crient). La charogne commençait à puer. Sous le toit se trouvait un corps intumescent, gonflé par les gaz de la décomposition. L’homme monta l’escalier et s’attarda longuement sur le spectacle de la corruption. Lèvres violettes. Ventre bombé, comme prêt à exploser. Baudruche infernale, amusement de pacotille pour psychopathe taquin. Cette femme était belle, pourtant. Il n’y a pas si longtemps. Ce brutal changement d’apparence fit naître un sourire sur son visage. Impermanence de toute chose, pensa-t-il… les bouddhistes sont dans le vrai. Pureté du chaos. La folie des hommes était symbolisée par cette croix en feu illuminant la nuit. La chair humaine grésillait sous les flammes, barbecue démoniaque empuantissant un air déjà méphitique et qui se corrompait de plus en plus. Il lui fallait du sang, encore plus de sang pour accomplir sa destinée. Tout était écrit depuis sa naissance mais la révélation n’avait eu lieu qu’à l’aube de la trentaine. Comme le christ. Non. Pas tout à fait. Le christ n’était qu’un imposteur, un faux prophète venu sur terre pour avilir l’espèce humaine. Une âme faible, dominée par l’asservissement. Comme les autres. Lui, au contraire, se sentait fort. Et capable de causer de grandes douleurs. Privilège des forts selon Baudelaire. 65 Tuer. Tuer par amour. Quoi de plus beau ? La……… Sortir de cet appartement. L’odeur devenait vraiment insupportable. Dehors, tout semblait normal. Quelle folie dans cette normalité. Le bruit se trouvait à l’intérieur de lui. Bordel de merde. Ce bruit dans la tête va finir par le rendre fou. Comme un acouphène mais ce n’est pas seulement un son. Il sait que quelqu’un lui parle, quelqu’un qui veille sur lui mais en même temps lui tord la cervelle comme une éponge moisie. Une seule façon de faire cesser le bruit : la mort. La mort détruit tout, même le temps, la mort aspire la douleur, elle est la grande rédemptrice, l’alpha et l’omega de toute chose. L’homme se dirigea vers la porte de son appartement puis s’arrêta net. Il lui fallait des accessoires. Corde. Marteau. Voilà qui ferait l’affaire. Ne pas faire n’importe quoi. Réfléchir. Peser les conséquences de ses actes. Ah Ah Ah ! L’homme éclata de rire à cette pensée. Quel con. Comme si quelque chose avait la moindre importance… Il descendit calmement les escaliers et se retrouva dans la rue. Le soleil de plomb attisait encore ses maux de tête. Toute cette rage au fond de lui devait sortir d’une façon ou d’une autre. Il ne connaissait qu’un seul remède, en fait. La forêt n’était pas très éloignée. Il marchait vers elle comme on retourne vers la matrice, en quête de pureté originelle. Aucun souffle de vent n’agitait les grands arbres. Un silence de mort régnait. Que venait-il chercher ? Il n’en savait rien mais marcher dans cette forêt lui semblait la seule chose sensée à faire. Dans son sac à dos, la corde, le marteau, un sandwich et des bières. La tension dans son esprit était à son comble. Il se mordait les lèvres si fortement que l’odeur du sang lui emplissait la bouche. Il aimait cette odeur. Il emprunta un sentier au hasard, sans savoir où il menait. Marcher lui faisait du bien. Le bruit faiblissait quand il marchait, devenait un murmure presque agréable à entendre. L’homme souriait. Le silence l’angoissa tout à coup. Aucune bestiole à l’horizon. Pas normal. Il s’arrêta de marcher et tendit l’oreille, en quête d’un signe de vie. Il entendit alors une sorte de râle étouffé. Il se dirigea vers la source du bruit et comprit de quoi il s’agissait. Caché derrière un arbre, il examina la situation. A quelques dizaines de mètres, une blonde sur le retour se 66 faisait ramoner sur une barrière. Il voyait le mec, pantalon sur les chevilles, en train de donner des coups de butoir entre les cuisses écartées. L’homme ne se sentit pas excité par le spectacle. Rien de plus qu’un accouplement de cadavres en sursis, mélange de viandes et d’orifices destinés à se remplir puis se vider. Rien de plus qu’une mécanique de l’instinct, perdurant depuis l’aube des temps. L’homme n’éprouva aucun mal à se rapprocher du couple, tant celui-ci était concentré sur sa jouissance. Mourir pendant l’acte est le rêve de bien des humains. Chanceux que vous êtes, pensa l’homme. Le marteau se trouvait désormais dans sa main droite. Il le serrait si fort qu’il eut peur d’en briser le manche. Mais non. Ce n’est pas le manche qui céda mais la boîte crânienne de la viande masculine. Horrible craquement. Le coup fut si violent que le marteau resta prisonnier de la boîte. L’homme le dégagea avec brutalité, laissant apparaître un trou béant sur le haut du crâne. La femelle semblait tétanisée mais hurlait, comme si ça servait à quelque chose dans ce lieu désert. Son visage dégoulinait du sang de son amant. Emouvant, non ? L’homme hésita un instant. Fallait-il lui infliger le même destin ? Non… Il avait tout son temps. Il faut prendre le temps de profiter de la vie lui répétait sa mère lorsqu’il était petit. Salope. Dans sa bouche, ça signifiait se faire troncher par tous les crevards du coin. Bref… L’homme enfonça son mouchoir dans la bouche de la blonde et la ligota avec la corde. Il était atterré par tant d’imbécillité de sa part. Pourquoi ne pas tenter de s’enfuir ? Pourquoi ne pas résister ? Pourquoi… Elle ne savait que pleurer visiblement, les larmes faisaient couler son maquillage et elle plaisait à l’homme comme ça. Résignée. Désespérée. Marquée du sceau du destin qui lui a fait croiser sa route. L’homme saisit une bière dans son sac. Après l’effort, le réconfort. Son esprit était en paix, il entendait même les oiseaux maintenant, la vie animale était réapparue dans cette forêt en même temps que celle de l’homme avait cessé. Le cycle continuait. Chaque goulée du liquide le remplissait d’aise, décidemment une bonne invention ces sacs isothermes. Bon. Et maintenant ? Creuser un trou pour enterrer l’homme semblait une bonne idée mais avec quel outil ? Brûler le cadavre ? Avec quelle essence ? Merde ! Rien à foutre ! Que les corbeaux lui bouffent les yeux à ce connard ! L’homme chargea la blonde sur son dos et pénétra plus 67 profondément dans la forêt. Il marcha au hasard, sans autre but que d’avancer. Son esprit était vide de pensées et cette sensation lui était agréable. Enfin, les bruits le laissaient en paix, il éprouvait une paix intérieure inconnue jusqu’alors. La blonde ne pesait pas très lourd mais il commençait à fatiguer. Il allait devoir penser rapidement à la suite des événements. Qu’allait-il faire d’elle ? Où aller ? Il s’arrêta dans une clairière et posa la fille contre un arbre. Il la regarda vraiment pour la première fois. Elle n’était pas spécialement jolie, ni moche d’ailleurs. Banale. Résignée en tout cas. 68 jacques cauda la lime Sac à croûtes Purin des pizzas Trou à merde mixée vomi Dont le mieux est l’anus où Je m’enfonce raide saleté Dans ce cul ! 69 Chienne boue la fente trempée Suant les chiottes à l’odeur de blatte De pute nazant le poil chauve Et pire! Miches tourniquets ce cul sans plis Les cuisses écartées la motte grosse Qui lâche dans le trou du centre c’est une Salope par la faille une Volaille limée (un) croupion ! C’est à moi encore avec ma bite et mes boules Dont les infantes sont toutes maboules (je chante et je rime) La lime et la baise Toujours dans ce cul Posé comme chié sur la table Qui rend l’effet bien plus durable ! 70 jacques cauda sans titre Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 71 osmose curves c'est moi qui t'ai baisé mon chéri Je comprends mieux, son envie de ne pas être à l'avance Éviter de monter, d'être seul avec elle Ce besoin de pouvoir résister à ses pulsions qui parcourent son échine face à ses courbes Fuir la faiblesse de ses bas qui le blessent, de son regard avide, cette peur du grand vide Il en connaît la saveur, l'odeur de son entre-cuisse Ses doigts qui y glissent et sa langue sur ses lèvres La baiser comme à chaque fois, déchirer sa croupe, sa queue brûlante et son visage couvert de foutre « Stop je m'égare... » « tu penses que je devrais lui dire qu'elle s'est servie de lui ? » Il était l'excuse idéale, ce tourniquet infernal Feindre l'éprise, détonateur de sa fuite Savourer ses pseudos petites victoires, 72 faire semblant de le croire Intensifier de toute part et le pousser à s'inventer une vie Dérisoire en est le résultat Il reste ce branleur ébranlé, satisfait de sa vie illusoire Vainqueur éphémère, presque évincé Jusqu'à la moelle elle a sucé ses faux espoirs A plaider sa cause, faussaire, piégé jusqu'à en crever et tard le soir elle suce son pouce devant son miroir avale quelques bouts de chairs le regard satisfait « n'est pas manipulateur qui veut, il se prendra le même couteau mais plus profond » 73 sarah fist'hole sans titre Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 74 alain marc six poésies erotiques Même quand nous sommes loin de l’autre tout nous unit La plus familière créature hypnotique ILLUMINATIONS Mêler à ma jouissance mes dernières illusions et mes aspirations sentimentales s’évanouissent JAMAIS JAMAIS je ne te connaîtrais QUAND JE ME BRANLE Une femme sur le canapé son corps était ouvert COMME SON SEXE Se frayant un chemin au milieu de la merde la bite continuait son avancée DESTRUCTRICE Vicieuse pute et salope Elle redevenait vierge 75 après chaque viol Une main sur la jambe restée posée l’autre tenant la deuxième à angle droit appuyée sur son épaule dans une liberté mutuelle de se mouvoir en de multiples variantes profonde pénétration la masse des seins bouge au rythme des coups DE BOUTOIR Debout nue elle a jeté ses bras en avant ET MONTRE SON CUL poils noirs fournis entourant les deux trous 76 samantha gai sans titre Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 77 manuel montero miettes dimanche octobre 10 ... Un jour je décidais d'être parmi ceux qui me détestaient à mort. Hercule urine de l'éther sur le fils du chien. La critique de l'excellence est le privilège de la blancheur affolée du poli dahlia qu'on vient mettre sur la commode. Ses pétales sont les canifs des anges, les menaces du décapité. Salomé récurrente dans la broderie des blessures masculines. Le soldat languissant : le Saint Sébastien de Guido Reni au Musée du Prado. Le narcisse pense que le dahlia c'est lui. La nymphe Europe ? Ou était-elle simplement une femme ? Le coeur palpitant sur un Mihura dont le dos était voué au sacrifice. Horreur des dahlia éclos qui savent que les pages des livres durent plus ouvertes que les paupières de leurs corps. Le livre avait les pages rouges, je lisais des partitions étrangères au dedans de mes côtes, j'écoutais la couleur illicite dans le pavot rouge de ce livre intérieur, une musique qui battait depuis quarante ans comme avaient battu les siècles sur les larmes des montagnes. Le jeune 78 Montero, le jeune Montero, le vieux. Ils pensaient qu'il manquait du poids à la fleur accusée, la couvrirent de chaînes et la firent brûler le temps d'un infini. Guido Reni n'a pas de suite possible, son génie est la jouissance stérile. Et pourtant il aborde la course entre l'homme et la femme, sachant la féroce métamorphose qu'elle entraîne, suite à la ruse de l'or. (Hippoménès et Atalante au Prado) Le Grimal suffit à l'écrivain, le peintre a besoin d'Ovide. Les familles d'artistes ne supportent que mal la mixité. Elles sont comme les écoles religieuses. Amour à minuit, aucun dans son lit. Per me si va nella città dolente , disait la grille que le poète latin voulait nous ouvrir. Nous en fûmes bien instruits. L'épique fut bien forcée de se mettre à servir. Nous avions la foi de la doctrine, la machinerie du sujet. (Je voulais voir s'il y avait de l'italique sur facebook. Ils en sont même pas fichus, je vais faire un scandale !) ... Je n'ai que ça, les raclures des planètes pour un ciel sans fixité, un atelier sans papier ni pinceaux. Que suis-je sans rien à fumer ? Un poids de conscience futile. Peux-je dire que j'ai une faim canine d'ivresse ? Vénus est l'écume d'un ciel castré. Vous voyez, mademoiselle, à quels extrêmes j'arrive ? Je trahis votre nom pour parler à la Lune. Je passe à côté, je fais du bruit, je suis ivre d'eau fertile, de froid dans les poumons, de votre silence. En toute intimité, comme des vieux, on s'ignore passionnément. Si je meurs, je n'aurai pas connu la Chine, du moins ce soir. 79 Tout va bien, ma pigeonne, ma colombe, vole et dis-le à mon père du ciel, dont tu es consubstantiel. L'on n'arrose pas avec de la vodka les géraniums, mais l'on touche la Bible avec un peu de salive. Tout est erreur et désespoir, dans le monde des objets. La voix des ménades me fait frémir... pire que ça, me paralyse. Bon, d'accord, vous me crucifiez... mais alors je touche l'invalidité, disait-il. Elle sait, ça cesse, elle sait, je ne sais pas si elle sait. Cette nocturne peinture du fou: Tasso avec sa folie a passé la relève aux étrangers comme Rubens et après l'exception du Titien a achevé le peintre italien. Du côté du Titien c'est comme s'il s'était dit : Puisque Florence ne veut pas de ma peinture, finie l'Italie, en avant, Rubens. ... 80 manuel montero miettes sur les larmes ... Lancé dans l'art comme prostitution universelle, quelle différence avec les agences de recrutement ? Il y a pas de pute sans proxénète, disait le Christ aux justes d'Israël. Ce sera la faute à la vodka et à Sarkozy, vos larmes à mon atelier, votre absence. Mon ami me tord la gueule dans cet alcool où il n'y a pas toi, même pas lui, il y a personne. Je ne fume plus, je bois, au bout du rouleau, la vérité et autour, la variété. L'œuf sera pourri, le sel aura un goût sucré, le matin commencera au milieu de la nuit. Les larmes du peintre pleuvent sur le Louvre. Surpopulation de larmes où les bouteilles sont des armes. Les infâmes qui déportent des gitans meurent tranquilles entourés de chiens. Voilà l'ironie de Dieu, une goutte de vodka, une larme, un pet. Be freak, not geek. C'est interdit de parler du café ? Travailler ? C'est ce que fait l'étalon sur la première dame de son choix, vous parlez de quel travail, vous ? J'aurais dû mettre une majuscule à l'étalon. Dieu travaille 81 par plaisir. Le salaire était salé... mais sucré. ... Du n'importe quoi, voilà ce qu'est l'amour pour moi. Je serai déchiqueté par les filles à travers le téléphone, disait mon oracle à Delphes. Un coup de matraque et va dormir, me dit la France. Tout ce que j'ai construit est un bidon-ville. On a mis sous hypnose l'hystérique jusqu'à ce qu'elle porte une barbe. Tu veux que je dorme ? Pour le bien du Parti ? Ou pour mon bien ? Tu sais ce que je pense de mon bien ? La femme barbue et l'éléphant rose, mes nouveaux amis. Le sommeil est le problème. Un type assez coincé était partant pour draguer, mais dans son coin, quoi. Déchiqueté par les filles, sa tête roula par la pente de Ménilmontant et miraculeusement, arrivée à Belleville, elle s'arrêta comme il se doit au feu rouge. Les cyclistes ne le font même pas. Enfin la beauté à la portée du public, ça valait la peine de lire le journal. Belle histoire que j'aperçois à peine, dans une catastrophe. Les rues m'angoissent à nouveau, la nuit redevient la vérité. Je change de lunettes les années de vraie bagarre, quand ça me touche, les casseuses. La ruine du songe est le luxe. J'amusais ma grande-mère et depuis je erre, je erre... 82 manuel montero sans titre Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 83 florian tomasini les futurs demunis Ni l’Orient ni l’Occident ni les désirs de voyage ni les errances immobiles Ni les espoirs désertiques ni les gouffres de bonheur à sec les rivières de tristesse encastrées les échappatoires perdus les yeux appesantis Ni nuage, ni voie lactée Nos assiettes sont vides, nos couverts des serpents qui nous fixent. Nous marchons face à l’espace qu’engouffrent nos pas, nos bras s’enlacent au danger fumant. Les nuits meurtrières courent sans cesse dans nos vaisseaux. Elles se démarquent du soleil mais en prélèvent la force. C’est un astre en construction, une fournaise sans pareil. Ce soir encore, demain, qui sait, nous y aurons droit Nous nous en souvenons comme d’un rêve et ses impuretés noires : notre minuscule vie et ses tentacules puissants. Jusqu’où aller, remplis d’amour envers la bête qui nous pèse ? 84 florian tomasini les tortures Cime C’est qu’il faut briser les lampes, marcher sur le verre bouillant et glisser sur l’huile des ruptures Se cloisonner dans ses pensées, aiguiser les lames de ses pensées et rire de sa bâtisse Choisir les siens qui ont cherché sous terre, Cherché partout ou va le possible, vers un nouveau monde, sans tête Les aveugles Que cherchent-ils au ciel, tous ces aveugles ? une terre mêlée à la grève, un secours qu’illumine un soleil absent et le sable du sommeil que déversent ses rayons ? Oh je sais qu’ils voient de riches couleurs, c’est le propre du noir, cette composition visqueuse mélangée de bitume et de poix, d’être visité du jaune et du rouge spasmodique et de descendre dans l’iris chaque jour un peu plus Le vent Le vent coule son fleuve sans fin, sa fin est sa mort, sa disparition insensée. Seules les graines qu’il emporte voyagent, et quelques grains de terre bruns. Mais il est trop libre, il ne nous heurte pas, son silence n’est pas mécanique IL EST TROP LIBRE 85 sara chelou rêve urbain Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 86 rémi teulière erenvolk Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 87 heptanes fraxion c'est vide et c'est beau c o m m e u n v o ya g e chiant entre deux etoiles mortes Ce monde stupide est plein de symboles ma petite sœur se sent seule et pourtant elle ne veut voir personne et pour une fois elle ne connait pas de proverbe à la con pour exprimer ça ma petite sœur refait son chignon-tortillon ma petite sœur fouille dans son sac comme un marsupial dans sa poche ventrale et l'infinie finesse du moindre de ses gestes fait carrément kiffer les fées ce monde stupide est plein de symboles quand il y a trop de monde ma petite sœur imagine que les gens sont des arbres et qu'elle se balade en forêt et s'il n'y a personne c'est pas le style à rester prostrée dans le noir à regarder la télévision à faire de l'électro-musculation à fumer des plantes ésotériques à attendre que ça passe que la pâte à bois et que la caravane passe non son truc c'est plutôt de faire le ménage habillée en salope sexy de faire la vaisselle en écoutant du Vivaldi de passer l'aspirateur en écoutant du McLusky en espérant que tout ça puisse aussi nettoyer son âme ce monde stupide est plein de symboles le vieux sperme passe dans la pisse les vieilles larmes dans les sourires 88 et ma petite sœur sourit et son sourire fait des étincelles et ses yeux font du feu les mêmes yeux que ceux du petit chaperon rouge qui a mangé du loup au lit et pas qu'un peu le même feu qui brule mais qui réchauffe ce monde stupide est plein de symboles 89 heptanes fraxion moi aussi je t'emmmerde même les chiens ne m'aiment plus c'est rigolo c'est même pour ça que je partirais bien quelques semaines en week end style maison de campagne à la mer le temps que le bronzage fasse tenir en équilibre toutes les bosses de ma tête c'est rigolo l'océan ça manque un peu de trottoirs ça fait que je suis de suite un peu paumé mais c'est vachement beau les baïnes surtout c'est rigolo tout le monde me prend pour DJ Henao tout le monde croit que je vais mixer samedi tout le monde s'imagine que si j'avais une bite aussi grosse que mon ego ben je m'enculerais tout seul que c'est même un fantasme mais non attaquer les gendarmes à coups de caleçon pendant mon arrestation ça oui c'est un fantasme c'est rigolo ton petit cul de petite pute hypersensible peut tenir caché derrière une boite de céréales c'est rigolo mais c'est pas une raison pour me briser le cœur kesse tu crois casser nos liens c'est pas facile c'est comme couper des veines ça va pas sans peine c'est rigolo en te regardant je me dis que le système semble parfait surtout quand on en fait partie que la France c'est mon pays mais que c'est pas ma 90 patrie et que je n'ai jamais tort sauf des fois quand je te parle encore durant mon sommeil somniloquie ça s'appelle moi aussi je t'emmerde mon amour mais moi c'est une putain de tendresse 91 heptanes fraxion le vomi du diable Après tout tout le monde te croyait en train de tournoyer plein sud cuvant déjà découpé par la nuit quasi rongé par les bestioles de la mélancolie dans un parking souterrain où c'est tellement triste et tordu que ça ne peut que te plaire toi dont l'ange gardien est un petit enculé toi que le pur instinct fout souvent dans la merde tout le monde croyait ça mon pote du coup lorsque tu débarques dans le bar préféré de ta princesse gothique ben la princesse gothique en question renifle la clavicule d'un rugbyman argentin même pas de niveau international et toi tu fais bien le mec qui dit normal le mec qui fait bien le mec qui n'a pas mal et t'essayes de retrouver un peu de charisme mais c'est pas facile d'être encore crédible maculé comme tu l'es de guacamole mais c'est pas du guacamole que tu dis c'est le vomi du diable et ça, ça fait rire l'autre moitié de ton visage et faire rire l'autre moitié de ton visage c'est pas donné à tout le monde et quand l'autre moitié de ton visage rigole tout le monde rigole même les esprits zoomorphes de cet univers hanté Après tout c'est vrai que c'est drôle mon pote tes coups de foudre tous les dix mètres tes tangos qui finissent dans le sang et à la fin le ramassage de tes dents tu savais que les jolies nanas pouvaient te briser le cœur maintenant tu sais que les laides aussi 92 Après tout, on peut pas vraiment t'en vouloir mon pote les journées sont longues parfois comme bloquées par un feu rouge dans le désert d'Atacama et même avec une nouvelle bagnole et même avec une nouvelle carte bancaire et même dans la perspective d'un nouvel appartement… Les journées sont encore plus longues quand tu les passes planqué dans l'espoir morbide de rester vivant jusqu'à la prochaine paye Après tout tu peux être comme eux mon pote normal c'est-à-dire normalement taré c'est-à-dire assez con pour être heureux mais pas comme eux ! 93 heptanes fraxion ça veut dire que je ne va i s p a s r ê v e r cette nuit c'est pas difficile de la connaître par cœur c'est toujours la même interminable ou minable y a pas trop le choix en fait en tombant en mille morceaux je fais semblant de danser à la fête et en dormant dans mon vomi je fais semblant d'attendre la femme de ma vie et me salir me lave et me vautrer me purifie et le jus violent de ma viande qui bégaye et qui bave c'est encore de la chaleur humaine de la vraie lave à faire voler à travers le bordel comme Victor le singe fou le fait si bien avec sa merde ça veut dire que je ne vais pas rêver d'avenir et ça me va très bien ça veut dire que je ne vais pas rêver d'avenir et c'est merveilleux comme venin ça veut dire que je ne vais pas rêver ça veut dire que je ne vais pas rêver 94 oscarr sans titre Pour regarder ses oeuvres, 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semble en effet inapte à me redresser 96 Je ne peux compter que sur moi même pour retrouver un chemin Et j’écris comme si la chiasse coulait de mes doigts sur le papier, d’une façon plate et idiote VIII Nos journées de travail sont autant de cadeaux aux riches, autant d’injures à nos âmes et à nos corps. IX Détruire, détruire tous nos amours La crainte anticipante et la destruction à coup d’arguments-massue, massifs J’ai déjà fait X On a beau avoir une belle crinière de cheveux, on en est pas moins mortels et fragiles Tout est ouvert au vent et tout ce qui vole dans les airs vient se planter dans mon thorax XI Si on arrête de chanter, ça veut dire qu’on est un peu morts Mais il faut payer pour chanter Para bailar la bamba XII Tu aimes une version facile de moi, une version édulcorée Je ne suis pas ta pute. La peur rend con, le pont rancœur le cœur rend pont le rond pend cœur la con rancœur XIII 97 ronan rocher sans titre Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 98 slip sans titre Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 99 Thomas vinau sans titre Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 100 cloud alone in the city Premier épisode - david Ce matin mon réveil n’a pas sonné Marche plus C’est peut-être moi Je vais être viré Je vais être viré Je suis toujours en retard Mais aujourd’hui le matin doit être près de se terminer Comme si j’aimais ça Donner à bouffer à des petites frappes Qui vous crachent à la gueule A la première occas’ J’allume une cigarette de marque américaine Et me sert un thé brûlant Je bois je fume Je me régénère Pas le temps pour la douche de toute façon J’aime mon odeur Je ne sais pas pour les autres Et je m’en fous Tiens ma radio ne marche plus Je voulais passer un peu des feux d’artifices royaux Histoire d’entamer la merde quotidienne Comme un seigneur Les piles étaient quasi neuves pourtant Foutus pakis Avec leurs bazars en plastoc’ Une chemise un pantalon la ceinture Tout est silencieux C’est dingue vraiment Je m’entends penser si fort On dirait des cris 101 Pas le bruit d’une voiture pas une parole dans la rue Pas une injure Par la fenêtre le soleil me reconnaît Je baigne mes yeux trois secondes sublimes En son centre Le pacte entre lui et moi continue Tout semble désert Il est onze heure bientôt je dirais mais Pas une voiture pas un chat pas un enfant qui pépie Merde Sans musique Cette journée s’annonce très moyenne Tout à l’heure Deux timbrés ont fait une crise commune Je me suis ramassé une claque Au réfectoire Sur le chemin de l’aller Il y avait trois personnes dans mon wagon Trois adolescents En train de fumer un pétard J’aurais dû tirer une latte Je me serai mis en colère Et j’aurai balancé les plateaux A la figure du claqueur J’aurai enfin perdu ce boulot J’écris ce poème depuis que j’ai vingt ans Ça lui aurait donné peut-être Un peu plus de piquant Sans travail Les dernières limites franchies Sombrer doucement dans L’exclusion la plus complète Papa va bientôt sombrer lui aussi Son cancer le ronge Il va falloir que je le revoie Les infirmières me prendront Pour un fils indigne Et maman s’effondrera sûrement Son visage tourné vers la fenêtre de la chambre Dans l’ombre du soir Petite sœur Mettra sa main sur mon épaule J’irai acheter une bouteille de vodka Chez l’épicier en bas de chez moi 102 Sur le trajet du retour Il n’y avait personne dans mon wagon Je refumerai bien de l’herbe Et ce contre l’avis de ma jolie psychiatre Elle me parle de fuite et d’infantilisme De médicaments et d’amour définitif Je l’écoute d’une oreille distraite En pensant à des cathédrales englouties Sous le poids des siècles Je pense aussi à mon destin Je sais qu’un saint Me le révélera au coin d’une rue Menotté à un réverbère Aboyant sur les passants Mon grille-pain a lâché Je voulais me faire des tartines grillées Au chèvre chaud Accompagnées d’une salade bien vinaigrée Au lieu de quoi J’ai avalé avec peine un grec immonde Salade-tomate-oignons Sauce samouraï La radio annonçait la reprise des hostilités Sur le front Est Si loin de la ville Tactiques et frappes chirurgicales Je suis objecteur de conscience Sans quoi je me retrouverai Le cul collé à un bureau quelconque A valider des transferts et des rationnements J’ai remis des piles des bonnes cette fois-ci Dans ma radio Mais ma radio refuse de marcher Je ne peux plus me mettre sous hypnose Emporté par les boucles infinies de Steve Reich J’écris deux fois plus De choses inutiles maintenant Et je fume Je fume deux paquets de cigarettes Pour tuer le temps Il ne passe plus aucune voiture dans ma rue Tant de gens sont donc partis La foule qui s’étiole crée un vide J’ai repéré un dealer que je connais Il a refilé de la came à un junkie quelconque Que je connais 103 La tentation était grande Mais j’y ai résisté Sans Mozart Je suis fier Et tenté De fortes bourrasques ont soufflé Toute la nuit Et encore au petit matin Je n’ai pas dormi Une horrible mégère a gueulé Des heures et des heures Je voyais sa tête écrasée par flashs La cervelle étalée sur le trottoir Près de la lumière artificielle de mon lampadaire Il faudra que je pense à m’acheter un nouveau cahier C’est le troisième réveil que j’achète Et qui ne marche plus Je commence à croire qu’il y a Quelque chose de maudit chez moi L’ambiance au centre se dégrade Depuis que trois nouveaux dingues sont arrivés Encore plus dingues que les autres Il va y avoir un meurtre à ce rythme Ou bien un viol sérieux Avec strangulation etcetera Mon chef ne supporte plus mes retards répétés Il ne veut pas croire en ma malédiction Je lui ai demandé de me prêter son réveil Il m’a fixé en silence Puis m’a conseillé de prendre un ou deux jours De repos Non non je ne veux pas me reposer Je veux gagner de l’argent Je vous promets Chef que je vais régler ma vie Je prends des métros vides Les seules voix que j’y entends Sont celles des annonces automatiques A la télé ils ont parlé d’un sanglant fait-divers Trois adolescents ont été retrouvés défoncés à mort dans une ruelle De la vieille ville Lacéré de trois cent coups de couteaux On craint qu’un nouveau tueur sadique Se ballade quelque part La guerre a détraqué tellement de citoyens Et bla bla bla 104 Des conneries pour étouffer le mal Je ricane sur mon canapé Un verre de vodka à la main Un joint dans l’autre Que le chaos vienne une bonne fois pour toute Myriam ne m’a pas rappelé depuis deux mois Nous faisions l’amour comme des animaux Et elle partait toujours avant que je ne me lève C’était comme ça Notre vie normale Je regarde deux gouttes de pluie faire la course Sur ma vitre Comportement infantile ne grandira jamais Il arrive au lampadaire de s’éteindre par intermittence Je passe une taf au dealer Et sort mes cinquante crédits Au revoir et à bientôt Je me suis résigné à ne plus acheter de réveil J’ai pris l’habitude De me réveiller avec l’aube C’est un sentiment inédit Je profite de ces deux heures gratuites Pour ranger mes papiers Il y a trop de phrases sans importance Je bois mon thé et je supprime beaucoup d’histoires Autant se concentrer sur mon grand œuvre Afin de m’assurer la gloire dérisoire de l’écrivain Avec le thé je fume un joint Mes idées se remettent en place Il faut que je recontacte Myriam En prétextant l’état de maladie avancé De mon père Demain je dois me rendre à l’hôpital Et subir la tristesse de ma mère La pitié de ma sœur Le regard sévère des infirmières Myriam m’a répondu après le déjeuner Il y avait de la résignation dans sa voix Peu importe Ce qui compte ce n’est pas sa résignation C’est la chaleur de son corps contre le mien Les nouveaux dingues ont l’air plutôt calmes Mais jusqu’à quand Chef se réconcilie avec moi Ici on est un peu tous original Sinon comment pourrait-on bosser Il part d’un grand sourire 105 Je dis oui oui c’est vrai chef en remarquant Que sa montre est arrêtée Il faudra qu’on aille se prendre un verre un de ces quatre Je vous présenterai ma femme Je pars de son bureau mal à l’aise Ma télé se brouille de plus en plus souvent Je rate les informations Aux dernières nouvelles La guerre sur le front est faisait rage Et le tueur sadique avait commis un autre crime abominable Une histoire de chats éventrés dans une église protestante Je me suis surpris à rêver Que leurs entrailles brillaient d’une flamme bleue Aux pieds d’un prêtre fondant en larmes Les voies du seigneur sont impénétrables Voici venir des temps de grand changement Je sirote mon whisky avec volupté Je fais de gros ronds de fumée La trinité diabolique comme on la surnomme Maintenant dans les couloirs du centre A commencé à frapper Ils entraînent les autres à se révolter contre l’Ordre Merde c’est qu’ils ne sont pas si fous que ça Donc d’autant plus dangereux Des manipulateurs charismatiques Des Führers en puissance Et moi là avec mes plateaux repas Je ne reçois plus de menace Mais des bravades poétiques et sensées Si les fous commencent à s’organiser Vraiment J’ai peur Papa m’a accueilli sans rancœur Je me sens moins soulagé que je ne le devrais Il faut dire que maman a refait son grand numéro Dos tourné masque de marbre et larmes contenues Fils indigne ne cesse-t-elle de répéter dans ma tête Grande sœur n’était pas là Pour m’épauler Il y avait une infirmière sexy par contre Au bloc numéro 15 J’en ai profité pour rendre visite à un ami Je matais son cul jusqu’au vertige Elle m’a grillé et m’a souri 106 Comme un ange Je bandais encore en sortant de l’hôpital Près à revoir Myriam Des banalités échangées autour d’une bouteille de rouge L’ivresse qui amollit nos carapaces caractérielles La promesse d’une proche réunion sexuelle Ne pas brusquer les choses Jouer sur sa corde sensible à la manière D’un équilibriste Je connais Myriam n’a pas changé Elle m’excite toujours comme au premier jour Où nous nous étions rencontrés Adolescents perdus dans un concert de hippies Nous avions connus alors la certitude Que seul un amour animal peut apporter Je dois la revoir dans deux jours Chez moi J’achète la vodka Et ma journée fait que Je ne méprise pas le vendeur 107 a.c. Hello sale temps Je suis un homme empêché. Qui s’est interrompu. Qui est resté collé à des choses quelconques. Je fais du bruit. Je remue dans les lieux publics sans savoir comment sortir de ma trajectoire. J’absorbe des nourritures chimiques. J’ai peu d’amis. Je débarque. On me dit d’appeler machin. On m’explique comment ça fonctionne. Je débarque. J’ai des gros yeux éjaculés. Hors de l’orbite. Je tiens un rôle. Un beau rôle. Je marche vite le long des murs. Je débarque. J’ai la sensation de mener une vie borgne au milieu d’une matière malade. Un matin je me réveille et je décide d’appeler machin. Je veux comprendre. J’appelle machin. Je lui murmure des cochonneries. Je m’agite. Je tiens le bon bout. J’éjacule. Puis je dis au revoir. Je décide d’opérer un renversement. Au milieu de leur vision compartimentée. De leurs uniformités rectilignes. De leurs formes d’expressions dominantes. Je vais faire sauter mes résistances. Perdre mon histoire. D’ustensile. Je cherche une destination. Je veux être hors du sillon. Convulsif. Dur. Déréglé. J’efface l’histoire. La petite histoire. Ma pauvre petite histoire d’ustensile. Je décide que je ne sais plus rien et je fixe un nouveau point de départ. Demain. Le lendemain je me suis enfin ramassé. Ramassé par terre. Avec mes deux mains. Je me suis enfin ramassé. Remis droit. Bien que cassé par endroits. Je vis différemment. C’est une bonne nouvelle. Je ne suis définitivement plus une cible. Les choses changent. Je les laisserai stupéfaits. Avec des plaies. Tout sera programmé. Ignoble dans le moindre détail. Ils souffriront longtemps. Je n’en ressentirai rien d’extraordinaire. Je serai sans étonnement. Aveugle. Sourd. Au fond de cette machinerie radicale résonnera peut-être une sympathie fugace. Secondaire. Vite effacée par un émouvant mépris. Je suis Dupont, âgé de trente ans, de corpulence 108 moyenne. Je suis étendu sur le dos et je repose directement sur la moquette de mon salon. Mon corps est écrasé par une bibliothèque de trois mètres cinquante de long. La partie de la moquette où repose ma tête est couverte de caillots de sang auxquels sont mêlés des écailles de peinture blanche. La rigidité cadavérique est très prononcée. La putréfaction n’est pas commencée. Plaies ecchymotiques du désir avec écrasement du leurre. Plaies à bords décollés de quatorze centimètres de longueur au niveau du chantage à l’inconscient. Petite plaie rectiligne du binarisme. Longueur : cinq centimètres. Parallèlement au bord de la mâchoire polémique, plaie ovalaire de quinze centimètres de longueur de la prise de recul. Cœur mou, vide de sang, présentant les caractéristiques d’un organe souffrant de la famine. Le contenu de l’estomac, semi liquide et de couleur grisâtre, contient quelques fragments de tomates et de vermicelles. L’estomac a souffert d’une rupture gastrique et a ingurgité plus de quatre litres de soupe chimique. Le contenu s’est répandu dans tout le corps, provoquant des contusions fraîches au niveau des organes génitaux, pouvant faire penser à des violences sexuelles. Je ne veux pas mourir ainsi. Je suis Dupont. J’ai trente ans. Je suis secrétaire de rédaction. Au chômage. Célibataire. J’ai un hobby : écrire des chansons. Je les chante dans ma cave auprès de mon vieux sapin en plastique démontable. Stature : 168,5 cm Poids : 62,4 kg Tour de poitrine : 96 cm Tour de taille : 75 cm Tour de hanches : 92 cm Tour de bassin : 100 cm Je sens bien à ces chiffres, que mon offre produit pourrait être réajustée pour mieux s’adapter à la clientèle. Dupont, trente ans, de corpulence moyenne, je dois maigrir, je ne veux pas mourir d’une déchirure gastrique causée par de la soupe chimique écrasé par une bibliothèque. Je vis perché sur une chaise. On dirait un œuf. Parfois agité de tics nerveux et de piaulements angéliques. Mes jambes sont repliées bizarrement sous moi. Je mange pour deux euros par jour. Deux soupes lyophilisées. J’ai une grosse bouche. Il paraît que les grosses bouches sont sensuelles. Qu’elles engloutissent. 109 Certes. Pour le moment de la soupe lyophilisée. Je possède vingt chaussures de grand standing peu adaptées à ma mobilité. Alors souvent je porte les mêmes baskets. Avec des habits troués (par des cigarettes ou peut-être des mites). J’aime bien mes meubles. Je me suis mis à acheter n’importe quoi. Des nains de jardins Pop. Un porte-éponge Bob l’éponge. J’ai rangé beaucoup de livres dans mon étagère. Je ne me souviens pas de tout. Je’ crois, Dostoïevski, Camus, Kafka, Céline, Ionesco, Beckett, Soljenitsyne, Böll, Arendt, Acker, Kundera, Jean-Louis Costes, Boris Vian, John Kennedy Toole, William Burroughs. Puis dans un coin des livres d’art, par exemple un livre sur la collection Peggy Guggenheim à Venise ou bien encore « Le design depuis 45 ». Ainsi qu’un plan de ParisBanlieue. Cet assemblage disparate ne signifie rien. Il ne signifie rien. À part que manifestement ces lectures m’ont donné le goût de l’absence de chute et d’objectif. Car c’est bien de ça dont il s’agit. Dupont, 30 ans, un point errant. Suivant une ligne ordinaire et sans secousses. Un échantillon de banalité. Je ne me déplace plus. Je sors rarement. C’est devenu complexe. Je fréquente beaucoup le ED. Je me rappelle avoir baisé dans des chambres d’hôtel bas de gamme. Comme cette fois, près de l’île de Ré. Je ne me souviens plus du nom de la ville. J’ai baisé violemment. J’ai déjà baisé sous un pont avec un type homophobe, raciste et mythomane. Je ne savais plus quoi faire de sa gueule blanche. Peutêtre lui vomir dessus. J’ai déjà baisé sur un banc public très tard dans la nuit. Des types se rapprochaient depuis le terrain de pétanque, tapis derrière les arbres. J’ai déjà pleuré dans des couloirs d’immeuble, dans le métro, dans ma cuisine, dans ma rue. Mais rarement. J’ai vomi dans la rue en allant au travail. Mon père fume des Cohiba Behike et prononce des phrases violentes. Car devenir père n’a pas été facile. Ma mère arrose ses chaussons rangés par gamme chromatique sur son balcon, manifestement détériorée par vingt ans de mariage avec cet homme problématique. On note également dans son appartement la présence d’une mouette empaillée. Mon frère est porté disparu. Dupont. Trente ans. Mon cadavre de corpulence moyenne qui pourrait maigrir, mon corps frustré et maladroit qui ne veut pas mourir d’une déchirure gastrique causée par de la soupe chimique écrasé par une bibliothèque dont les livres ne signifient RIEN, ma capacité à baiser près d’un terrain de pétanque, mon père qui me dit que je vais faire crever ma mère, ma mère qui possède une mouette empaillée, mes gestes 110 d’animal traqué, sont malheureusement inadaptés à mon rôle social. Ce qui explique mon licenciement. Alors je vais rentrer dans les rangs. Réorganiser mon corps et ma personnalité individuelle autour de mon rôle socioprofessionnel. Adopter des automatismes. Je donnerai de l’importance à machin. Je l’écouterai me raconter abondamment sa vie, ses passions, ses visions solipsistes, ses admirations. Je le féliciterai pour sa stéréotypie. Son royaume d’évidences. Voici mon rôle : 1. Cesser d’aimer. 2. Il n’y a plus de part inviolable en moi. 111 gilles fela surfer d'argent Je regarde le monde à hauteur d’homme, ma passion est égoïste : j’aime aimer et ne percevoir qu’uniquement des détails zoomés. Les poils, la largeur des jambes au travers du tissu du pantalon, la matière du pantalon, le pli du sexe, la boucle de la ceinture, la montre, rarement les chaussures. En été, en sandales, en tongs, la forme du gros orteil et la régularité des doigts de pieds. Pour les doigts de mains, c’est l’épaisseur qui prime, qui saute à mes yeux, la paume doit être ronde et le bout des doigts arrondi. Il n’y doit pas avoir un doigt trop long ou des doigts de taille trop différente formant une herse, pas de mains de pianiste, des mains de pommier. Le visage doit être légèrement aussi rond et les yeux crever l’écran du film documentaire sur la Souffrance et son corollaire, la Douceur d’homme seul immergé dans sa camera obscura. Les yeux doivent être marron, parfois bleu si je peux y couler après y avoir plongé. Les yeux pleins de bleu sont d’eau. Les yeux marrons des pépites mélangeant charbon et diamant dur, combustible qui brûle le désir des miens fortement et à une vitesse de combustion vertigineuse. Les yeux marrons scrutent pour à l’égal uniquement se donner et prendre appui, force, solidarité, silence; ce sont, contrairement aux yeux bleus, des yeux muets ; et foi, espoir, amour caché, discret, vache voire de lynx sans se voir grands et beaux entourés d’un visage ovale poncé au papier de verre. Les yeux bleus sont bleu simple, de cette simplicité dans laquelle on se noie avec enthousiasme et abandon. Avec les yeux marrons il ne faut jamais s’abandonner, il faut faire fier et ne se fier qu’au courroux des sourcils bruns. Les avant-bras sont charnus et veloutés, couverts de poils noirs ordonnés comme une œuvre d’art, d’optical art. Les points poussant de la barbe piquent. Pour les yeux bleus aux cheveux châtains clairs, la peau est vue ; il s’agit de ne jamais toucher; elle doit être glabre si ce n’est rasée proprement. Le nez doit être viril, il n’y a rien d’autre à dire. Le port de tête, Mister 112 Univers, et les cheveux savamment sauvages comme de l’eau ; les cheveux bruns sombres jusqu’à châtains clairs, jamais blonds, doivent être l’équivalent d’un parfum, de Dior jusqu’à la flagrance d’un Issey Miyake. Le torse doit être torse parfois bombé au dessus de la bombe d’un petit bidon harmonieusement tendu par la chemise un poil trop serrée laissant imaginer qu’un bouton pète révélant la pilosité du thorax. Les biceps répondant de profil : oui aux dorsaux. La démarche doit être lente et presque psychotique mais sans l’être, ahurie, soliptique jusqu’à ce que la voix tonne grave. L’homme peut bouger, remuer dans la mélasse de l’air, ses bras de robot fiveties. Ses gestes doivent être artificiels comme contenant un désir secret d’enlacement du vide pour l’instant ne montrant jamais l’importance de la rose. Les cils : les cils sont grands et féminins, les cils sont les maîtresses de l’homme. La lumière irradie de l’ensemble du corps au-delà du vêtement clair ou sombre, presque jamais bariolé, de couleur Nicolas de Staël. Le battement du cœur doit s’entendre des kilomètres réguliers autour de lui, émission d’un signal séminal. Seigneurial, l’homme doit parfois éclater d’un sourire, jamais de rire, un sourire rare, parfois autorisé dans certaines circonstances très codifiées à un rire gras de cascade. L’homme qui rit, sourit avec calme, air entendu de celui qui s’amuse plutôt que de celui qui s’esclaffe. La démarche est un rien brutale cachant mal son mâle rythme. Son centre de gravité au-delà du regard est son sexe : invisible. C’est pourtant une étoile hollywoodienne, l’essieu, le fouet, l’accélérateur de particules, le défragmenteur de disque, tout le reste est spoutnik tournant satellite autour de lui. A quelques dizaines de centimètres du call center viril les mains jouent au scrabble et forment des mots de sept lettres tous blancs qui pour qui devine écrivent qu’elles ne tournent jamais loin du phallus, de la bite piédestale, lui répondant en canon. Tout geste non mesuré de l’achat d’un café à la remise en place du sous vêtement, tout geste non mesuré tombe par terre pourtant même à terre il est debout si sa chute est mesurée, tellurique. L’homme parfait regarde toujours quelque chose d’autre que l’objet de son désir puis une nanoseconde venue théâtralement montre qu’il a remarqué lui aussi cette femme. Ce que dit l’homme sur les femmes n’a aucune importance, il ment, il ne dit jamais la chose ; pudique jusqu’à se masquer d’une hyper vulgarité ; alcoolique pour ne pas montrer sa sensiblerie ou violent pour détruire ses propres sentiments, il vous baisera les mains 113 si ridicule vous le remettez debout et disparaitra parfois à jamais. L’homme disparait toujours au coin de la rue et se fait alors passer pour mort sans indiquer à quiconque ni perte ni profit. Les hommes qui discutent se doivent de jouer avec eux-mêmes ; l’idéal c’est une main dans une poche ; pas de walkman ; un journal en turc : Hurryiet par exemple ou à l’opposé un Financial Times. Quand à ceux qui n’ont pas conscience de leur ridicule, c’est l’adolescence de l’homme qui parfois est courte voire écourtée parfois longue voire trop longue, adolescence qui n’a rien à envier au complexe du homard de Françoise Dolto et même par certains aspects s’en rapproche même si l’homme n’aime pas qu’une femme le comprenne : il n’a pas d’armure, non, il est de marbre voilà, c’est ainsi. Un homme n’est pas envieux : un homme porte sa vie sur ses épaules comme une femme une étole un soir d’automne au Théâtre de la Ville bien que cet us soit remplacé aujourd’hui par l’Ipod qui ne fait vibrer que le tympan. L’homme est ontologiquement écrasé. Les veines de l’homme battent bouillantes. Un homme dira toujours qu’il est nerveux pour vous faire comprendre qu’il est émotif, à fleur de peau, fêlé. Celui-là, celui qui ne sait rien sur lui et qui le sait, celui-là seul, à mon sens, sera un bon amant, doux, viril et droit. *** Depuis que je ne picole plus, ma peau est redevenue bien alors pourquoi tu nies, ne nie pas, je me suis vu dans les chiottes de Délices d’Asie le néon blanc au dessus de la glace du lavabo est le pire de tous les chiottes des bars et restaus du quartier pire que ceux de Monoprix. Pourquoi ne pas me le dire que je ne suis plus bouffi. Tout le monde me le dit que j’étais métamorphosé même les gens qui ne m’aiment pas spécialement surtout ceux là même c’est bizarre hein ? Ma peau est belle et pas seulement moins rouge et avec moins de cernes sous les yeux ce n’est pas être pédé que d’admettre ça. Ca te troue le cul de dire que je suis beau. Je le sais pas la peine de le dire que tu n’es pas amoureux de moi pas la peine de le crier sur tous les toits quel est le rapport Akli m’a appelé beau gosse une fois alors qu'il n’est pas pédé Akli. Je reprends gout à la vie mon corps se remet et toi tu n’es même pas capable de le dire je suis juste moins gros moins de poches sous les yeux et moins rouge alors pourquoi tu m’as dit que ma veste en jean m’allait bien si tu ne vois pas ce genre de détails et ne viens pas dire que c’est parce que l’on se 114 voit tous les jours. Pourquoi tu faisais la gueule à la manif contre Sarkozy t’essayais de me semer dans la foule tu n’as pas ri lorsque j’ai mis un autocollant C.G.T. sur mon pull je voulais te le coller dans le dos je ne l’ai pas fait pour ne pas que tu penses que je veuille te toucher que tu sois touché par la main d’un pédé si c’est pas de la vraie amitié ça. Et pourquoi dans le métro ce keubla debout a touché le lobe de l’oreille de son ami assis de dos pour lui dire salut et que l’autre keubla l’a regardé en souriant si ce n’est pour nous faire comprendre que nous sommes deux cons. C’est ma différence qui fait que tu ne me feras jamais la bise depuis le temps qu’on se connait qu’au premier de l’an alors pourquoi tu lorsque nos mains ou nos chaussures se touchent dis pardon. Quel vice te pousse à me parler des culs des femmes et de me dire que dommage que cela ne m’intéresse pas –– dommage aussi que les hommes ne t’intéressent pas, je dis et tu réponds dommage hein ? Avant de disparaitre pisser dans les chiottes du bar te toucher quoi alors si ce n’est la queue ha ça va je ne vais pas venir te la tenir quel vice c’est diksa d’allumer le pédé qui s’en fout ah c’est dur que le pédé s’en foute et après de lui jeter un seau d’eau glaciale comme sur deux chiens qui s’enculent. *** Est-ce que le mot mort mord dans le noir ? Je ne veux pas être un artiste de plus je veux être un artiste de moins comme dans les installations de Tatiana Trouvé où il n'y a de place pour personne et où l’on se sent pourtant étrangement chez soi. Un jean c'est tout ce que je vois. Un Djinn très bon ou très mauvais comme elle dit Tatiana comme le vin de table –– pour moi un tableau violet. J’ai grimacé gesticulé hurlé. La close queen est enfermée la queue à la main dans les water closet : elle se vide de sa pisse et sa pisse est la water music d’Haendel. Ca la rend heureuse cette musique elle se pisse sur les doigts c’est chaud dans le froid de l’hiver évaporation odeur d’urine pure elle n’a besoin de rien d’autre elle voit sa bite comme si c'était celle d'un autre. La bite est celle d’un autre soi. Elle se la montre se la raconte se la joue. Pisse-moi dessus. Hurle-moi je veux au creux de l’oreille : le lobe oculaire gobe. J’avale ta bite pour espérer qu’elle m’encule à l’envers défoncé de la bouche jusqu’au cul puis tu me retournes et fais craquer ma chemise assez d’assez je râle bavant le mot mort aux dents ton nœud coulant m’étouffe aspirateur éclatant tubercule solaire brillant de vaseline star night 115 ce jour j’éjacule de la light par tous les pores je suis intense arque bouté chair énergie émotionnelle solidifiée condensée sueur fluide je suis une statue qui frémit ma bouche est rouge blanc bleu sans rouge à lèvres est-ce donc pour ça que Tatiana en met un coup, de tube –– drapé de draps agrippés par ma main là j’artisane je sculpte un cri je rauque tu escrimes toute ta littérature sacrée bout dans l’extrémité de ton membre tu craches une giclée de non-mots opéra spatial d’outre-dos si je pouvais nous peindre perdre paître naître, fenêtre-êtres blêmissants lueur du moi-peau dans la peur de jouir jusqu’à la suprême explosion tâche d’être régulier et avec à coup brosse ton code de l’honneur à cheval sur le principe du plaisir presque nu. C’est avec une horreur non feinte que je respire je ne suis plus moi je suis toi je suis nous tu es ma bouche crachant le soleil et des perles de sueur de dégout –– le dégout est hors de nous –– salées retiens ta main elle tremble comme tout ton corps sur mon flanc. Alors toi aussi hein toi aussi oui. Où es Tatiana Trouvé? Elle promène son chien d’installation en installation pendant que ta bite est juste à la taille de mon cul ma bite est juste à la taille de ton cul tu dis juste une peu trop grosse plus grosse que d’habitude juste parfaite les portes ont volé en éclats ? Il n’y a pas de portes ici pas de miroir qu’une télé vidéo crachant du cul bleu plus d’art que celui de la collision le sang n’explique pas tout cela il n’y a plus d’interstice entre nos deux mondes il y a une collision brutale qui illumine tout être nous regardant c’est un état d’une pureté brutale de diamant liquide-solide-gazeux-en fusion-minéral-végétatif-bestial-divin-nirvana de carnaval où avec des masques se pratique la sodomie les WC sont trop petits pour nous deux par chance ne formons désormais qu’un installateur de débouche-chiottes si tant est que c’est ce que nous faisons, nettoyer nos âmemoncules de leur merde respective et interchangeable d’ailleurs je ne sais pas pourquoi je crois que nous sommes dans des WC ; estimé glissement de tes pectoraux humides sur mes bras derme électrolyse anode et cathode plus et moins devant derrière et le grand han ! Au milieu creusant nos vits vital pour nous deux. Je veux jouir en toi encore un petit peu encore un petit peu non c’est bien comme ça tu te masturbes tombant par terre tout ton être crie, éjecte de la lumière je jouis je jouis je ne te vois pas jouir je me retourne il ne reste que l’installation de Tatiana Trouvé je suis un chien ou quoi ? Personne dans la pénombre je distingue un troisième type que me dit « dommage que tu aies joui. » avec toi les draps imaginaires du lit –– il n’y a pas 116 de lit dans ses installations –– de Tatiana Trouvé ont disparu. Je me remets à avoir des yeux à ne voir qu'avec eux. La pièce est devenue de théâtre et vide noire excepté le troisième type et moi ramassant mes morceaux tombés sur le sol sale de carrelage quant à moi, je suis libre enfin je crois l’espace d’un instant c’est si violent que je me cogne sur le montant de la porte voilà c’est fini. Pour une fois que je n’ai pas l’impression de regarder le monde de derrière une vitre en plexiglas. Ca m’apprendra quoi d’aller dans une backroom baiser en sortant d’une exposition d’art contemporain, je suis en manque de picrate, je me vide les couilles, je vois tout de traviole et je perds les pédales. Dehors –– j’ai fini mon Coca light –– la ville resplendit, brillante de lumière morte, dehors c’est l’autre monde, dedans le hasard, pour l’espace d’un instant, t’a remplacé, surfer d’argent, sans un mot. 117 olivier bkz les règles du je C'était Samedi. Je suis allé à Franprix pour acheter des trucs qui me manquaient, et déjà à cet instant j'avais l'âme bleu-gris. L'entropie envahissait de plus en plus mon quotidien. Je m'étais battu contr'elle jusqu'à aujourd'hui, mais là, je commençais à fatiguer. Alors j'avais pris des vacances, mais pas elle. L'entropie s'était insinuée dans beaucoup de choses, elle squattait chez moi depuis quelque temps, et il devenait difficile de la déloger. Elle était tout d'abord entrée par la fenêtre, en la cassant. Je n'avais toujours pas appelé le vitrier, du coup ça caillait. Elle avait envahie ma boite aux lettres sous forme de prospectus, je les ai virés, mais ils se sont retrouvés au milieu du salon, comme ça, par terre. Ensuite l'entropie s'est glissée par les fentes d'aération de mon ordinateur, et a déposé son baiser glacé sur ma carte graphique qui s'est mise à grésiller en saignant un peu d'électricité, faisant de mon écran une putain d'œuvre d'art contemporain résolument postmoderne. Ensuite, Samedi, elle s'est attaquée avec succès à la douce lampe de la cuisine, celle-là même que je laissais allumée pour écrire ou faire l'amour. Saloperie ! Avant le Franprix, j'ai étudié sans succès le problème de l'interrupteur bloqué de la lampe. J'ai forcé en appuyant dessus, ensuite je lui ai mis des petits coups de poing sec. Rien à faire. Je réalisais enfin pourquoi les femmes bandaient pour les bricoleurs, c'est parce qu'ils avaient le pouvoir de repousser l'entropie. Enfin, c'est une illusion bien sûr, car la mort à toujours le dernier mot à la fin. Les bricoleurs ont cette capacité de projeter leur énergie vitale vers les objets malades afin d'en comprendre le fonctionnement, puis d'agiter leurs avant-bras outillés afin de les soigner , alors que moi, je ne sais projeter mon énergie que pour aimer/haïr, manger/baiser, boire, 118 rire et pleurer, et enfin, écrire. C'est pas grand chose tout ça, ça ne sert à rien. J'étais en colère alors j'ai pris le marteau pour prouver au monde que je pouvais réparer cette foutue applique, que j'étais bon à un truc aussi, et ne me demandez pas comment je comptais m'y prendre exactement. Naturellement, ça a mal fini. Un grand coup de marteau dans la gueule de la lampe ! Des centaines de petites pièces de plastique partout qui volaient... Les femmes aiment les bricoleurs, les publicitaires orangés et cokés, les techniciens de l'art, les marchands d'art, les artistes subventionnés ou médiatisés, les écrivains édités, les quinquagénaires mariés, et puis tous ceux qui peuvent faire avancer leurs carrières ou qui possèdent un appartement grand et ensoleillé. C'est dans la nature des choses et ce n'est pas très grave. La plupart du temps, les femmes sont des connasses. C'est dans cet état d'esprit que je me pointe au Franprix, dernier endroit où je dois trainer lorsque je suis en baisse de moral. La marque du papier toilette que je prend au hasard est identique, à une lettre près, au prénom d'une ex, et cela me déprime un peu plus, même si le parallèle reste géométriquement judicieux. Mauvaise idée ces courses, je choisi sans le vouloir des produits abusant d'huile hydrogénée, j'ai oublié les fruits et légumes. La caissière qui a pourtant l'âge de profiter de sa retraite est nouvelle dans le magasin. Je pars, vite. Ce soir, j'ai rendez-vous avec une ex, pas celle dont le prénom est presque une marque de papier toilette, bien sûr. Au début, nous n'arrivons même plus à nous comprendre, comme si nous ne parlions pas la même langue. Cette situation bizarre dure une demi heure, puis ça va mieux, nous sommes un peu plus détendus. Nous avons passé une soirée tranquille dehors, puis elle m'invite chez elle, par pure politesse bien sûr. Elle ne me voit plus. Je m'y attendais, mais cela fait toujours bizarre. Comme le musicien dans « Il était une fois dans l'ouest », elle joue quand il faut se taire, et se tait quand il faudrait jouer. Qu'est-ce qui est à l'origine de ça, exactement ? Qu'est-ce qu'il fait que l'autre ne vous voit plus, d'un coup, alors que vous êtes la même personne, celle pour laquelle ses yeux brillaient et s'illuminaient il n'y a pas si longtemps ? Je ne sais pas, et on s'en fout. Seul le résultat compte, il s'agit d'un crime contre mon humanité, ouais... Un crime dont nous sommes tous coupables un jour... J'étais assis en face d'elle, et elle ne me voyait pas, alors du coup, elle pouvait être n'importe qui, et moi aussi. 119 Je lui ai demandé pourquoi elle avait souhaité me voir, elle me répondit « comme ça, histoire de parler , c'est sympa », tout en regardant l'heure sur l'ordinateur. « Et puis... » ajouta t-elle, « c'est toi qui me l'a proposé... ». Ouais c'est vrai, j'avais oublié ce détail. Alors je lui ai fait une bise sur le front, et puis je suis parti sous la pluie. Je ne suis pas rentré chez moi... Le bar était plein à craquer, et tout tournait. Je n'arrivais pas à détacher mes yeux de ceux de cette fille qui se trouvait toujours, quoique je fasse, à deux mètres de moi. Je me suis approché d'elle, et j'ai fait ce que je sais faire, je lui ai envoyé une bonne dose d'énergie. Ensuite, j'ai dragué sa copine, ouvertement, et en la regardant avec ce qu'un ami appelait « mon regard salace ! ». Et puis je me suis barré sans me retourner, en prétextant que je devais aller voir un copain dans cet endroit rempli d'inconnus. J'ai attendu une demi heure, et puis je suis revenu vers elle, et je lui ai renvoyé une grosse dose d'énergie, pas de celle qui répare les choses, mais de celle qui fait briller les yeux, et battre le cœur. Plus tard on s'est embrassé sous la pluie, et j'ai repensé à cet ex de ce soir que j'avais aussi embrassé sous la pluie, la première nuit. « Tu veux venir boire un verre chez moi ? » « Oui. » Je l'ai suivie, nous avons traversé deux cours intérieures, et pris un ascenseur en nous embrassant encore. Dans son petit salon chaleureux, elle avait un canapé deux places de couleur rouge. J'ai enlevé mes chaussures mouillées et elle aussi, puis ma veste, et nous sommes allé nous vautrer dans le canapé. On continuait de s'embrasser comme ça, et puis je ne sais pas pourquoi, je me suis retrouvé à califourchon sur les genoux de la fille. J'ai levé les yeux vers l'étagère au dessus du canapé, et mon regard a été pris par le sien. Il s'agissait d'un mec aux joues un peu épaisse, blondin, au regard porcin. Il posait à côté de la fille que j'embrassais, devant un paysage de cocotiers, ils avaient l'air heureux... Je ne sais pas pourquoi, je n'arrivais pas à détacher mon regard du type. La fille me dit : « C'est mon ex. J'ai toujours cette photo...c'est pas grave ne t'en fais pas... » Comme je continuais de le fixer, elle s'est tortillée pour se dégager, puis a plaqué la photo contre l'étagère. Ensuite, elle s'est levée et est partie dans la cuisine. N'ayant plus le blondin sous les yeux, je me suis rassis sur le canapé. La fille revint avec deux verres à pied remplis de vin. 120 Elle m'en tendit un et alla s'assoir sur un petit fauteuil en rotin, et maintenant, une table basse nous séparait. « Je suis désolé...j'sais pas... » je lui ai dit. « Quoi ? » « Rien, non je ne sais pas. » Silence. Je lui dit, pour reprendre la conversation : « Tu... Est-ce que parfois, tu attends son appel ? » Elle prit un paquet de clope sur la table basse, en sortit une, la posa entre ses lèvres puis l'alluma d'une façon très élégante. « Non. Oui. Enfin, je n'attends pas le téléphone. Mais quand j'ouvre ma boite mail, il y a une petite partie de moi, tout au fond, qui espère avoir un message de lui. Un mail qui dirait « je t'aime, nous avons fait une erreur, je t'aime et je t'aimerais toujours », ce genre de conneries... » J'acquiesçai en silence. « Et toi ? » me demanda t-elle. « Oui. J'attends aussi. Enfin, je n'attends pas. C'est toujours une petite partie enfouie aussi qui attend, malgré moi. » « Et c'est déjà arrivé ? » « Oui. Une fois. J'étais persuadé de n'avoir plus jamais l'occasion de lui parler, et puis un jour, elle m'a envoyé un mail, et je me suis retrouvé en train de jouir en elle. » « Et... c'était bien ? » « Non... C'était pire à la fin... » Je tendis l'index à la fille et je lui fit signe de venir. Elle se leva et écrasa sa cigarette dans le cendrier. Elle a contourné la table basse qui nous séparait, et s'est assise sur moi, nous nous sommes embrassés, et puis nous avons baisé sur ce canapé, nous avons baisé comme des malades, comme des désespérés, sous la photo retournée d'un type blondin aux joues grasses et au regard porcin qui avait l'air heureux devant des cocotiers. « Tu ne dors pas avec moi ? » me demanda t-elle plus tard, à moitié endormie. « Non, j'ai du boulot demain ». Elle se réveilla un peu : « on va se revoir ? » je lui répondis « Tu en a envie ? » Elle me dit : « Claque la porte en partant, ce sera bien. » Je suis parti en claquant tout doucement la porte. J'ai allumé mon ordinateur en rentrant. Je n'avais aucun message. Enfin si, j'avais des messages, mais en fait non, je n'avais aucun message. 121 jérémy brethes ma famille, mes amis Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 122 jérémy brethes même pas mal (sur un c h e va l r a i d e d e a d ) Je suis sur un cheval là, et je me souviens, le ciel dispense des couleurs chaudes, roses et jaunes, comme un crépuscule à red dead, ma vie est faîtes d'rêves, parce que j'en branle pas une, enfin, juste une, et accélère, tagatak tagatak... Dans mon casque, un riff répétitif, sciant, en quatre quatre, 22 long riffle, sang froid. J'ai envie de crier, pleurer, là ma rédemption passe par là la la la, somme d'orgasmes, poésie chaude. Des chansons inconséquentes et violantes Depuis que l'amour est raide dead. Le futur est red red. Comme bloody-mary-jane-d'arc un triomphe cramé comme mes ailes (mais elle). Je te jure c'est comme l'Afrique avec du fric, veau-doux child saigné où toute les natures (se roulent des) pêlemèlent. Césure que c'est///(silence)/// la faim de l'Histoire, et le dé-pute du Jeu. Le hasard est une prostit-huée, mais c'est comme chat, life is chaos et indomptable. Je l'aime imprévisible et féline ; elle marche sans faire de bruit le bras tendu poignet tordu la main parallèle au sol comme si elle caressait un lion invisible. Elle parle avec des tissus (fascinante farouche fashionista) de mensonges délicats, qui ceci dit sont veaux doux, pas veaux d'or, ni veaux tour de Baby(so)lone-ly. *** Refrain : c'est parce que je savoure ma course que je suis brave ours mon oeuvre est mon parcours 123 J'ai l'alcool joyau et je m'idolâtre (tu sais c'est à Moor Marie... : « si on s'aime pas qui nous aimera ? ») Un jour je ne m'aimais plus et j'ai fait une dépression. J'étais vraiment de bad company. Et puis parlais avec Dieu et dansais avec le Diable. Maintenant je suis sur un cheval et j'ai envie de pleurer, mais je ne peux pas, je n'ai plus de larme, peu de rancœur, je me sens comme un missionnaire (je te baise frontale), galope vers la fin du jour où des nuages pourpres. Une post-civilisation, que je dessinerai tribale et (il faut surtout) t'aimer-raire, pas hyène (paupières closes), pour la transe en danse, une intelligence à la sueur, extatique, exotique, et zoo-térique. Chaude comme ma foi, le souffle de mon destrier que je surnomme Térus et que je motive en criant : uh ! Térus ! Il contient un enfant invisible destiné à piétiner une ou deux fois Troie qui s'est vendue sans tripe sans cœur sans foi. Que serais-je devenu sans toi ? Hein ? Toi qui n'aimais pas trop ma froideur de façade. Mais sans elle sans quoi, je ne serai pas si cool qu'ils m'appellent renoi. Rayonnant comme ce peintre des pensées nerveuse qui rêve d'être, à la bravoure, raide déf' éparpillé, parti pillé, mais bref, on t'emmerde, nous sommes exquis esthèthes s'escrimant à trouver un terme à nous-même. Pas mal. Nous. même pas mal (x72). Pas mal (x164) 124 wood emprise Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 125 thierry théolier cyberpunkpostmondain 1.0 Teaser pour le tiseur « CR2VARD_le retour de la fuite en avant! » [baise-sollers] extrait du premier chapitre LES RESTES 1. CyberPunkPostMondain 1.0 à paraitre dans un an chez un éditeur couillu. *** « Nous sommes tous des hypeux A un moment pourtant, nous pouvons cesser de l'être. Savez-vous à quel moment ? » Nobody after Bove Frag/ment 0_ TOUCHER Lundi j'appelle Eudeline pour un one2one # 04 / je tombe sur sa messagerie / ya personne à part son esclave standardiste comme dans Soleil Vert mais désincarné, juste une voix en boucle. Du coup, j'improvise un jingle et une impro chaotique façon büro electronica / je prends l'ouverture du morceau de Sheller dans la B.O de L'écrivain public (ça me va bien ça, moi le spammeur public) / ça donne Bienvenus à Hypol / Abruti par les boucles sonores schizoïdes, je sors de ma Tour pour aller à l'Espace boborepaire voir l'expo de Francky Boy. C'est surtout pour picoler à l'œil en bon SDH-chien que j'incarne et TOUCHER du monde / marre du screen / en arrivant je tombe sur Soral, il porte comme une armure, un imperméable cow-boy, casque de moto, casquette russe, imposant le mec. Il est aussi boxeur / ben ouais / La sociologie est un sport de combat. Direct je l'accueille en petit frère fan : j'avais lu ses Mouvements de mode 126 expliqués aux parents qu'un max de journaleux ont pompé pour décrypter les attitudes et les tribus de Hype City et ça continue... / Pas mal de crevards Mamie Nova et des vieilles peaux années 80. Bordel qui se souvient de Francky Boy ? Une pensée2merde : qui se souviendra d'André le gentil marchand du Palais du Tok ? Nobody... mais j'ai un doute en fait, les nouveaux taggers ont bien mieux intégré la machine commerciale et ont oublié d'être diiiiistroy comme leurs grands frères punks des années 80... / retour boborepaire des jeunes taggers aux dents longues et aux logos envahissants s'agglutinent autour de Jérôme Mesnager, Jean Faucheur, Miss.Tic. Y'en a un même qui bombe sur le verso blank d'un panneau publicitaire, juste à droite la porte de la galerie. Je balance « Tiens, ça me rappelle les Crottes de Lascaux ». Voodoöo me lance un œil noir et sûrement un sort. Je rentre inside et m'enfile le plus vite possible du picrate, bouffe des chips au céleri (pitain c beurk). Débarquent alors Artus de NIM ex-Epicier de choc, l'artiste Hondo résident à Ars Longa et le skateur Bilal. Ils viennent en repérage pour une expo dans ce nouveau lieu plutôt notsobad, open et vivant mais un peu 4$$-been, il n'y a pas de réel galeriste : c'est juste un parking payant pour des artistes et des commissaires un peu à la ramasse sauf mes potes (sick) mais why not, c'est roots et souvent open bar / sur le trottoir, je baise les bottes à talons pointus d'une MILF blonde, une copine de Miss.Tic... Célia, une jeune reporter photos à peine de retour d'un exil australien me shoote, je la rencarde sur le SDH. Artus me prête son nouveau skate, une marque qui a débarqué à Paris en 1976 et je discute avec l'importateur parisien venu ici par hasard (...). Arrivent aussi Pascal Bories en jolies tennisTechni(aristo)kart et Lazerges que j'ai rencontré la veille en train de réparer sa mob devant l'Ile Désenchantée (pour les organisateurs de soirées : ils sont radins bah comme tous les patrons de bars de P.A.R.I.S). On déballe les infos et/ cassos. Jeudi. Soirée Trash Poney à la Nouvelle Supérette près du café Calcaire avec notre Yvette Neliaz, elle doit faire un vibrant hommage à sa girlfriend disparue Luzy (voir l'article dans le gratuit des « outsider de l'underground »). Jude 4$$ spamme un mail très agressif sur le SDH et je casse ultime en mattant Le Prince des Ténèbres de John Carpenter. C'est Chloé Delaume qui m'a rappelé cette diffusion. Je trouve çà mimi. Vendredi. Toute la semaine je zappe le salon du livre qui me rappelle trop la FIAC mais en plus conceptuel (sick) mais ce soir, j'abdique pour aller boire du champagne 127 chez Léo Scheer dans sa galerie au 16.17 rue de Verneuil avec son buffet, son champ' et ses potes de l'édition (mélange hétéro d'intelligentsia largos et depuis peu d'intello-warriors déguisés en crevards avec dans leurs poches des nids d'hirondelles chinois (?) et un seul Blanchot Les intellectuels en question (...). A notre arrivée, Léo nous déçoit grave. Picrate à la place du champ' et le buffet Aloyau est remplacé par des ca'ouètes toutes pourrîtes. Du coup, sur un coup de sang/ sur-sens, je renverse direct un verre de vin devant l'écrivain rock n' roll Christophe Fiat (Bienvenus à Sexpol) et une blonde plutôt mignonne que j'insulte de « pétasse » –– pour la forme/ et juste pour stopper le pingpong verbal mondain sur le (non)sens de casser d'la hype et ainsi lui faire une petite démo : je crache alors dans le verre de vin rouge, bois le picrate et le recrache par terre. La meuf de Scheer –– une blonde riche héritière, très belle (bonne pour un Rohmer), n'apprécie pas du tout mais je m'en branle complet et le serveur ramasse ma casse... Fiat s'excite en me sortant Debord que je n'ai pas lu et que je ne lirai jamais. Tout la pasta littéraire Al Dante est là : Daniel Foucard (Novo), Eric Arlix (Mise à jour) et d'autres comme Luis de Miranda (Ego-trip une société d'artistes sans œuvre) et sa sublime girlfriend polonaise Evelyn. Je lui souffle au passage dans le creux de l'oreille en regardant son décolleté que « c'est trop hype d'être polonaise à Paris », du coup, elle saute de joie et demande dans un polonais-anglais à son mec Luis pourquoi il la cache !!! Ah ah ah... Timothée Rolin shoote, Koozil est là, Jean-Yes, Emmanuel Caron, Igor Tourgueniev, Laurence Rémila, Antoine Besse, Franck Chevalier, Pascal Bories aussi et c'est le big «Rendez-vous!» SDH. Entre deux ballons et saucissons ED, chu interviewé par Elénora Rossi pour la radio semi-libre Paris-Plurielle. A la fin, Chloé nous lance un fatal « Nan j'vais pas à Gallimard. » le groupe despasjolipunks se scinde en deux et on s'infiltre à la réception Gallimard qui a lieu dans un hôtel particulier juste à côté... Vieilles peaux de l'édition... ET BAM ! On tombe au buffet nez à nez sur MAURICE G. DANTEC !!! Le buffet est digne de l'ancienne époque Léo Scheer : Alcools à donf' et petits fours. L'excitation du commando SDH devant le Momo du cyberpunk est totale. De plus, Stéphanie Rebato une petite nana inconnue au bataillon nous a suivis et sa présence est plus qu'attractive... Ensuite, on amène Maurice au Bar des Bons Amis à Belleville pour retrouver ma Victoire, Anaïs Donati et Cathy TR4$H - elle la pauvre, je l'envoie balader par terre sous de l'electronica speed (la chaise 128 morfle) / je manque de rouler une pelle à son mec qui commence à s'énerver mais dommage, il se dégonfle. La bande commande bières sur bières et roule des pétards avec Momo. Je remarque une grande nana cheveux noirs très belle. Koozil en a même des vertiges mais fuck/ c'est la copine de Jimmy T. La nuit passe et on se finit au Zorba à 7 h du matin. Je prends le phone de Momo qui devient officiellement le fan le plus cyberpunkmondain des plus underoverground egotroopers de Paris, les cassos2hiiipe. Le reportage photo par Timothée Rolin, l'ange aux doigts de fiel. Dimanche. Les cow-boys de la post-modernité contemporaine top moderne se donnent RDV à EOF (lieu hyperactif et subground au 15, rue St Fiacre) pour le vrai saloon du livre indépendant, j'ai nommé Les Littératures Pirates. On passe aussi à la galerie Peauneuve pour voir un concert de EVOLUTION CONTROL COMMITTEE, entre temps je bois un thé avé Krikor & Sandrine à Ménil... Telex : Krikor part mixer en Russie, Sandrine me promet de shooter les pét4$$-punks de la maffia. Kool. Voilà finito, chu naze : vivement un charter mondain à Bagdad pour une grosse teuf à l'arrivée avec les trans-irakiennes, on flambe Hussein & Bush au pastis sous un mix de Jean-Yes et DJoubliémoNom... Et hop! « Le hype va mourir, ça vous apprendra.» Nobody after Rigaut F1rst Frag/ment_ EGO-TROOPER IN MARS La dernière fois que je squattais les tuyaux PHP de Parissi, j'ai paumé en un seul malheureux geste con-pulsif tout mon texte sur 3 ou 4 events de mars notamment l'expo ABSOLUT CUSSOL et aussi la soirée de lancement de l'essai Ego Trip, la société des artistes sans œuvre à l'atelier Papa-rassis (sick). L'auteur Luis de Miranda a invité des hypeux à se faire photographier le nombril. Les clichés ont été affiché au fur et à mesure, construisant un «mur de nombrils». Bon voilà les restes retrouvés dans mes dossiers outlook : « (…) j'en reviens c'était supra-décadent tout le monde bourré au bout de 3 heures de blabla ensuite shoots intense-festifs de nombrils et tamponnage alibi-art : c'était limite partouze avec sexe... C.a.l.v.i.n a accroché 1/4 de peau (jeune blonde). Evelyn était au top /copine de Luis/ y'avait ausi un couple bandant avec des vêtements assorties tapisseries et une culotte en dentelle orange très-très mimi / Dabug faisait le distributeur de vodka avec le caddie et d'autres trucs /chai plus / chu trop blindé dodo 129 (…) 5 h du matin, assis en yogi dans mes chiottes, - 'rive pas à dormir - je lis le livre de Miranda presque bon bouquin : j'y retrouve + ou - mes stigmates de praticien en transe conceptuelle on-line entre le YES et le NO / le passage Jésus² et le terme nobody etc. Je commençais à me sentir un peu encerclé, le fiel se transformerait-il en miel ? Dur pour un casseur... et bam! je surfe sur mixbeat.com et tombe nez à nez avec la soirée Minotaure chez Maxim's ... Et là, me revoilà, comment dire... motivé. Second Frag/ment_ HYSTERIE KITSCH Après avoir descendu les bassines de sang alcoolisé (The blood of Christ) au Café Charbobo et hacké une drink card au café Castes en descendant nos flasks, NOUS les Intouchables avons décidé d'aller checker la Grande Schlemerie au bowlin' Foche... Waouh les nerfs des casseurs ont été mis à rude épreuve. Armés de nos invitations détournées par nos agentriples², nous avons frôlé la dépression au-dessus du nain de jardin. Topo_20€ pour encourager une compétition de bowlin' entre des équipes d'hommes sandwichs paninimédiatiques (Anal +, Show bizz café, Blest qui ressemble de + en + à Actuel, Rodak etc.). Un max de hiiiiiipe était au rendez-vous. Dix pétasses au m² pour un seul people. Bières à 10€ (...). Seules les péta$$ de Quiche se sont révélées à la hauteur de l'hystérie organisée. Vous avez dit kitsch production ? Troisième Frag/ment_ HAHA! 2BAD Pas allé à l'exposition hehe ! de Helen Evans & Heiko Hansen à Mains d'œuvres : chu resté coincé à Artazart avec ma Victoire et Pauline de la Gaité Lyrique (inutile de vous dire qu'on a cassé ultime la boom-scaleuse de TRAX, nous avons bouffé chez Maurice / pas Dantec / le restau derrière 'tazart ! Tout ce que je sais, c'est qu'un des selectors Ewen Chardronnet a balancé des skeuds à cette expo... Pour info, Ewen a traduit un très bon texte UNDER CONTROL de Konrad Becker édité par NSB samplé de l'Introduction au Dictionnaire de Réalité Tactique. Ewen fait parti de l’Association des Astronautes Autonomes. Il rentre juste de Moscou et du Cosmodrome Gagarine où il a fait un vol d'entraînement à l'apesanteur. 19 paraboles de 25 secondes en zero-g ! ça vous retourne votre hypeux ! Comme un gros extasy mais en mieux parce que les autres lévitent autour de vous et cela dans le cadre de MIR. Voilà de l'info Bordel / mais que fout les arbres scoopés de la hiiiipe ? Ah ah ces infos-links sont copyleft notsobad / mettez la 130 source sinon Koozil mon avocat-casseur vous tronçonne. Kapito ? MEDIA NOSTRA EN FORCE. Fin du soli-loque. Quatrième Frag/ment_ YOU'RE NOT BACK IN DENIM ! 1992. Un dandy-anglais PD comme un FOCK, Lawrence explose son groupe pop FELT déjà cultissime et casse la dance music montante avec un titre monumental prophétique. Ce single enterre rétroactivement le revival actuel électro-glam-rock (foutez la paix au Clash) Nobody percute et c'est un flop : ça s'appelle BACK IN DENIM soit un méga-egotrip sonique en l'honneur de sa situation de looser trop génial pour les kids qui encensaient à l'époque les Happy-Mondays et autre New Order. Avant l'électroconsensuel chiant des 00's qui passe à bobobourg juste avant Polette et bien avant le matraquage marketin' Red Lewi's couilles de rat/ bref avant la hiiiiiiiipe qui re-suck les re-vivals, Laurence était déjà BACK. Faites une B.A, écoutez ce single et retenez le nom de ce groupe mortné : DENIM et faites un doigt bien profond aux suiveurs en gueulant « You're not back in DENIM !!! » et si, un seul Scout Massif, balance-ça dans une soirée sponsorisée par les zombies de la marchandise teknoïde scaleuse, prévenez-moi, je leur tamponne le cul et leurs vomis ma flask de saké à la gueule. « I'm back in Denim and Denim will put a soul in Rock and Roll » « Once I owned the world but I gave it away » Lawrence de FELT. Cinquième Frag/ment_ NOPRESENT.exe Avril.exe (expo) chu passé samedi dernier / le 19.04.03 / très déçu par la conception de l'X-bition : frontale, ça m'a même carrément NRV quand j'ai vu la gueule de KRN sur le screen dans une esthétique très MTV flashouille (en + c'est le clone de Gabrielle Lazure) bref, c'est du LOFT en différé d'artistes démiurges - expression d'Henri Chapier pour IVG (sick) - pluggés à la subvention/convention qui démo-montre en main - « espace-support-temps unique » un « savoir-faire-faire-savoir » technique accompagné d'une logorhée théorique-teasin' drapée de consensus intello 10 mots à deux l'heuze / bon alors faudrait construire peut être des passerelles >entre< l'art contemporain² qui pense parfois l'expo en terme d'œuvre –– mais il faut « Oublier l'exposition » –– et l'art numérique qui dépense le budget en pluggin' et leur temps en apprentissage sans penser au collectif noninitié/ en fait chai pas trop/ vous devez alors faire de la peinture presque interactive en attendant Hollywood / je 131 ne suis pas critique mais tout cela me semble très (net) art appliqué, un dispositif archaïque comme à la première expo de la Gaité / je suis peut être passé au mauvais moment, peut être au meilleur du pire mais faites gaffe BORDEL (TM) vous allez finir comme Maurice Benayoun, plein de tunes et à la ramasse ou Fred Forest à la ramasse sans tunes/ Vivement une expo-manifeste ! La dernière en date : ZAC 99 et sur ma Console d'occaz' tous les jours....» extrait de La société du slide-show (en cours d'oubli soon sur http://editionsoubliees.fr.st) Sixième Frag/ment_ JAVA 5000 Only for White Trash Pussies J'ai reçu çà dans ma B.A.L : FREAK THE SKIPPING SHEILA MIX March 03 par Javasoul ([email protected]) 77 MO de FREE-MP3 !!! JeanYes : « Pas mal du tout ce mix par moments ça a un côté chicago/old-school qui est pas désagréable, ça change un peu de l'ambiance Scratch Machin » & Koozil « ça y est ça tourne... ça commence très bien. DJ Sneak, vieux de la vieille. En parlant de ça, Anthony Shakir ce soir au Rex, vieux briscard de Detroit, je pense que j'vais aller m'y mettre une ourlée direct. » La PLAYLIST_ 1-Those Guys « American Poem » Basement Boys 2-Virgo « Free Yourself » Trax 3-M.E « Ride » Trax 4-Sheila The Freak « Sheila the Freak» Loose Screws Dub n/a 5-16B « Doubt » Brooks Slickquick mix Hooj 6-Dexter « I Dont Care » N/A 7Mr.Negative « Star Spangled Banger » FreaksMix C&S 8Phonique « Beets&Greets » PokerFlat 9-Phil Weeks « Trip to Paros » « Luke Sardello Rmx Icon 10-Nasty Girl »Nasty Girl« UC001 11-Formidable Forces » « Mind Games » Original Mix 20:20 12-DJ Sneak « Fix My Sink » B.h.q rmx Creadance 13-DJ Sneak « Basic Jam » Magnetic 14-Sheila The Freak « Sheila The Freak » Kaboom Feeling sheila up Rmx N/A 15-Phil Weeks « Hypnose » Tony Hewitt Rmx Robsoul Rev. 16Stephann Goldmann « True » Riton Rub Classic. « Le cerveau a des capacités tellement étonnantes, qu'aujourd'hui les hypeux en ont un. » Nobody Septième Frag/ment_ Ceci n'est pas une note au-delà de la hype. L'undeground branchouille a du mal à employer le terme « hype », il préfère travestir son reflet dans un jeu de miroir sémiologique en deçà de sa représentation pré-institutionnelle dans la Hype et utilisera donc en auto-critique refoulée : les mots « tendance » ou « trendy » et même « branché » plus populaire et plus 132 méprisant de peur de propager sa véritable appellation self-control. Il chroniquera ainsi sa propre mort annoncée juste avant ou pendant sa métamorphose de larve prospectrice silencieuse en mouche bruyante attirée par les sponsors. Merci de votre attention. NIHILISME. n. m. T. de Philosophie. Doctrine d'après laquelle rien de ce que nous croyons connaître par les sens n'a de réalité substantielle. Il se dit aussi du Système politique qui vise à la destruction de toutes les institutions religieuses, sociales, politiques. (in Dictionnaire de l'Académie française, 8ème édition) Huitième Frag/ment_ GIRLS THEY JUST WANNA HAVE FANS Aline Can Dance a invité Aurore Daerden & Smagghe au Lime-moi Light_ X : Ya un album de Lou Reed qui s'appelle Sally Can't dance... Y : Ah... hommage ou pompage ? X : Rien des deux man, c'est ça le pire ! X : Ah... sinon Salepif et l'autre... c'est pour un Ultime Divorce Mix ? Y : Nan... c'est un Fautbienkonbouffe Mix X : Hiiiipe just banana flouze !!! Neuvième frag/ment_ OLD POLITIK NETWORK SUCKS. BLANK E-GENERATION IS BORN. CREATE A NOMAD.ID.ENTITY SPAM ALL HYPEDATA FOR SOCIAL-HACKIN. NOBODY Je viens d'écouter pour la première fois les Scroutch Mastik et je me suis dit «Vasy, sois cool... tu connais Xavier, il est maqué avec Maud... blabla... fais comme toute la hiiiiipe, dis que c'est bien... » Mais bordel c'est quoi cette voix ? Elle geint en anglais –– j'ai horreur des français qui se la pètent in english (même les Thugs à la fin chantaient en français merci Seconde Chambre) –– Ah je la vois la Maudasse acheter sa baguette en anglais –– sur une ligne de basse asthmatique digne d'un groupe de neuve-fève qui répète pour la première fois dans la cave... Le clip accumule les clichés de la nuit parigote qui se termine comme chacun sait par une bonne branlette et une partie de Playstation à shooter des streumons. Un clip de Duran-Duran est dix fois plus décadent que cette soupe visuelle digne de Zazie. Le pire c'est que j'apprends dans le communiqué de presse maquillé en article dans Culturama ex-Inrocks qu'un Poupaud a participé à l'album « Et ça c'est vraiment pas possible ». Allez je fous un pirate de New-Order (« Temptation » Rennes/1987) 133 « En démocratie romantique la destruction n'est qu'une promesse de reconstruction. » Luis de Miranda in EgoTrip une société d'artistes sans œuvre. Dixième Frag-ment_ 26 AVRIL SKIES. Je blackliste la soirée de Jérôme Sans au Café Chéri(e) : trop de monde que je ne connais pas (ou que je ne veux pas connaitre) alors forcément c'est naze/ ah ah ah « Je t'emmerde et je t'emmerde » MC Jean Gab'1. Je me casse à l'Ile Désenchantée pour entendre de l'electro-hip-hop de Jacques Braunstein (passeur de plats à Tech' et Zurban). Too late / juste entendu du New Order, Smiths et du Cure bootleggé à moins que le son était pourrave... Ce soir le Grenier Overground d'Alex relève plus du sauna que du club de poche (genre Menestrel) tellement il fait chaud. On devra next time se mettre à poil avec des walk-man... Question gibier : OK c'est un peu hippique mais alert ! la moyenne d'âge des polypeuses est de 2025 ans. Rencontré en bas Victor de mixbeat et espion double sur Kantin. Sucrage2fion fini, je passe au vernissage de Miss. Toc ex-Miss-Tic à Artéfact : OB timide et concept du boudoir-rencontre un peu pompé sur Calle mais Sophie a du déjà pomper quelqu'un... Célia Couder, la RP est vraiment trop bandante / ensuite avec Laurence Rémila on va direct à CONSOLE pour le concert de Dorine Muraille et c'est une musique échantillonnée contemplative dixit Victoire, un rien maladive que je rate pour cause de soif au 1étage. Pour Informe : Dorinne (Julien quoi...) va de temps en temps au bar des Bons Amis pour les soirées d'Alex (un autre) les fameux Global Elements –– la seule soirée que je kiffe à fond : gros son, public hyper chaud et pas trop jeun's, bière pas chère, Anais Donati et Catherine Nutten (les freegirls au supermarché et au fast-food) sont souvent en furie etc. Merde je m'égare... revenons à CONSOLE : concert également de Deathsitcom de Lionel qui fait parti de Büro dans la cave de Murielle Colin-Barrand (j'aime bien quand elle ne porte pas de soutien gorge) –– Un casseur @nonyme fracasse une œuvre (un cocktail molotof rose d'Olivier Babin - au fait Oliv' sur sa grande tof avec ses cuisses écartées façon HPG ressemble méchamment aussi au guitariste de Noir Dez... les tofs. « Intégrer le spectacle-spectaculaire intégré OK mais après ? » Nobody after Dabug Onzième Frag/ment_ Googlism for : thth 134 thth is very meaningful for me thth is ed's review of this book about the history of the church in Bali thth is an unknown symbol thth is 1 book thth is accorded a similar valuation for its growth during the next five years thth is the basis of a smooth continuation of thth is defined to be the action such that (?) thth is me on camea thth is the kind of functions from type expressions of kind thth is goin down. « Ne jamais se lever. Ou ne jamais se coucher. Le doute le plus célèbre du monde. Est-il noble de se lever le matin en sachant déjà tous les emmerdements qui vont suivre ? Est-il lâche d'aller se coucher, de dormir jusqu'à en crever, et dire au revoir à tout ce qui nous bouffe l'existence ? C'est là, la question. » Tonio Benacquista Douzième fag/ment_ Mail à Tania une Putafrange Hier au Purple c'était l'ouverture de Büro et leur festival anniversaire 5 ans (déjà) avec... Jack Lang ! Toute la clique du cahier TentaFion de Libé, Olivier Zahm + Arnaud Viviant, MBK, la freeparty girl Anaïs Donati (encore elle..) et d'autres... Une certaine Jude 4$$ l'a insultée sur le SDH...) « Bonjour Tania, oui je me suis permis de mettre notre échange de mails sur le blackblog. Sorry mais prends une partie de mes conneries comme d'une « médiation hardcore » comme du « terrorismedia sur le journalisme de luxe » (sick) / pas très éthique mais j'assume mes méthodes / trop kiffé l'inspecteur Harry / chu donc capable de me griller parce que l'éthique des médias de masse actuellement spamme une langue2bois percée du clou du spectacle s(t)imulis-acres / maintenant les crevards de la Cantine qui n'ont pas la parole savent qu'ils écoutent aussi une crevarde qui bosse. Désolé d'avoir été mon otage. C'est fini tout a été dit. On peut continuer à bosser ensemble ? » affaire classée X putafrange. Tu sais le fait de s'appeler Putafranges et commencer à se la péter hiiiipe au Lime-moi light (sick) –– cloube qui a l'air d'être déjà mal barré –– génère une provok et de la jalousie alors faut assumer les mauvais feed-backs et les larsens on-line. Le rapport du public et des médias changent, les gens se lâchent, s'organisent, se fédèrent etc. C'est un espace public/privé encore assez vierge et obscur... anyway, je suis désolé des propos de Jude cette folle et essaierai de la tempérer 135 next time. Si vous pouviez rectifier : « Les principaux activistes du SDH sont des artistes, des pigistes, des cybergonzos bref des intello-précaires, des nerds aussi et si l'Elite (TM) veut nous taxer de « crevards » no prob. « Nous sommes seulement sur-informés et constituons la première solidarité post-mondaine cyberhumaniste2merde. » Là, on applaudit. « Le vide de leur intérieur, l'insipidité de leur intelligence, la pauvreté de leur esprit les poussent à rechercher la compagnie, mais une compagnie composée de leurs pareils car similis simili gaudet. Alors commencent en commum la chasse au passe-temps et à l'amusement, qu'ils cherchent d'abord dans les jouissance sensuelles, dans les plaisirs de toute espèce et finalement dans la débauche. » A.S . 1851. Treizième frag/ment_ WE ARE ALIVE - THEY ARE DEAD DANCING BY MODULES. Dernièrement sur la Kant-IN (backroom du SDH) Klute m'a cassé les couilles avec le dernier bébé de la mère Burgalate... Rien à faire je blackliste R.A.S DRAGON pour clonage sans flip. Le rock end roll ça s'écoute sur le Net avec un son bien cracra et pas à la Nouvelle Supérette devant des Johnsoneux2merde / disons que –– rapidement –– ça se streamme à partir de vieilles K7 toutes pourries de ton adolescence avec des morceaux qui ont disparu de la circulation parce que la hiiiiiiiipe (TM) l'a décidé pour vendre de la daube recyclée façon Daft ou pire 2manydj's. Quand t'es vraiment rock end roll c.a.d icono-castes –– tu crack pour les autres des logiciels, ces nouvelles guitares qui crachent de l'image et parfois du son comme le fait Jean-Gilles des Electrik Callas (groupe punk défunt). C'est le nouveau paradigme du spirit punk et je mets pas « cyber » devant –– because on est déjà sur le web puis lisez le dernier Eudeline, il a écrit l'avenir du rock en une seule page et c'est pathétique, le reste appelle ça du clonage qui est encore plus pathétique. Allez j'écoute les FEELIES qui reprennent le Velvet sur mon walkman STEREO SCP52 pluggé sur mon HP 233 d'occase. « L'opposition qu'il faut maintenant unir contre la décomposition idéo-médiatico-plastok doit s'attacher à casser les merdes qui se produisent dans les formes comme l'art contemporain ou la mode. » Nobody after Debord in La décomposition, stade suprême de la pensée bourgeoise 136 Quatorzième Frag/ment_ ROTE TOGETHER Date : I don't remember. Heure : 23 h 30. Terminus P.A.R.I.S. Café Be4. Cabaret Electro-nique. Je rentre. Audrey Mascina (ACTUEL ex-BLAST + Modzob) et Jérôme Sans (Palais du Tok) sont aux commandes d'un énième planeur relationnel-festouille. Les deux apprentis-pilotes flight-simulator essaient désespérément de faire planer leur cabaret Vol-au-Vent à grands coups de vents électroclash-mou-du-bide (cholestérol tekno que les DJ's injectent en intraveineuse aux porcs du Tok qui leurs permet de se vautrer dans la boue nostalgique de leur première boum gothique / tout en ayant l'aval d'OVAL (?) –– fin de l'hyparté / L'engin festif plane dans le vide et pique direct du nez pour tomber dans un bain d'ennui et expulser des petits pets nostalgiques kitschouilles. L'odeur, corps gazeux des désirs de viscosité tribalebobo insatisfaits, surplombe l'abysse du ridicule quand Gégé Sans mime tel un Maurad pour retraités Frac-Drac, le fameux geste des rappeurs –– YO ! –– et balance sans trop y croire une reprise de « Boys Boys » de Sabrina bootleggée « encore et encore » par un obscur groupe suédois-basque. La deuxième couche des lyrics années 80 (période Guy Lux / oublié à jamais John Peel et ses sessions, le Bertrand Lenoir anglais des 80's...) –– est rajoutée en play-back par un clone raté de Placebo qui –– quand il balance un désespéré « I WANT MAKE SEX TONIGHT » –– se fait à moitié pécho par les hanches par un rapatrié-irakien en costard Tati, complétement bourré. Pathétique pantonyme d'une partouze sans sexe qui voudrait rendre hommage à Kurt Weill mais ne fait mouiller qu'Amanda Lear. Débarquent sur ce fiasco non gratta, G.Wen artiste Trash pour gens chics accompagné de son singe punk et de sa pét4$$ rose qui nous infligent (en)direct une pantalonnade sponsorisée Diesel poussive performance où rien ne doit dépasser : ni une bite rouge de gorille rose, ni un poil de cul d'ados attardé. Les artistes Trash mais pas trop simulent une partie à trois en se trémoussant à mes pieds –– là, me vient l'idée saugrenue de leur pisser à la gueule mais too bad, chu pas déchiré / open bar fantôme / Ils arrivent quand même, à mes pieds, pour me foutre de la peinture argentée sur mes Acupuncture et voilà la goutte qui fait déborder cette vase. Scène porno sort graphique. J'aurais préféré tout de même un lancer d'étron de Costes sur la gueule de Mascina (avec un peu de chance il aurait éclaboussé la suckeuse underground (TM) Bubble Star. « Pourquoi tant de haine ? » Tais-toi et rote « over me ». 137 « Une nuit sans hype c'est un jour de lecture gagné mais je préfère allumer ma console. » Serge Balasky Quinzième Frag/ment_ LES ANGES CRÂNENT Soirée Kia-No rue de Ravioli –– 16 septembre 2003 –– Rencontré avant-hier soir à la soirée KIA-NO qui a pondu un B.ame G.oy (inversez les initiales valeurs et vous pourrez jouer à « The Game ») THibaut de Montaigu, l'auteur des « Anges brûlent » (Fort Fayard). Bon. J'ai pas lu son livre –– je lis « Rien » à P.A.R.I.S –– un livre blank hypra design qui se vit everyday I write the blank book –– mais le branleur rive extrême-gauche Fauchon est kool. Nada à voir avec ses cons-génères blacklistés sur le blackblog.fr.fm : bientôt les tofs de cette soirée hype sur pOst-repOrt où nous avons croisé Bouchitey, le Phoque-Kan –– 'savez le péruvien qui shoote les soirées depuis 20 ans sans (se) casser (de) cette Mascara en rade –– un géant blond « dont j'ai oublié le nom » qui branle du k-raté dans des chef d'oeuvres kitchs, le clone d'HPG poursuivi par une meute de pét4$$ qui gueulaient dans le Vide de la soirée « Toozeur ! Toozeur ! », Calvin 2 : le Retour, Inès2labarre, Antoine Besse (avec sa coupe Zurban) qui arrivait quand on s'cassait, Dabug qui fight à L'EntrepriZ une nouvelle gueule THomas Floyd, Marla Singer qui a shooté (une) Jud4$$ qui s'est téj' sur elle en lui disant : « C'est pour ki ? » (accent2merde parigot) –– C'est pour wam. –– Ah bon... ça roule alors ! Viens que je t'sucke chez Damepipi !!! Bon plan pour la Béné-tr4$h-fion, l'alibi du papa-rassis. Alexandra2Muteen avec ses chaussettes à rayures roses (très Burennnnn meets H&M) Franck Knight le sucker2hype de la soirée, filmé par Vladimir TYBIN (remember le documentaire sur Pacadis en juin dernier au Palais du Tok...). Bientôt les culottes et les tampax du SDH en « Prime time » (Flama-Rions). Un 26 minutes est en tournage ! Préparez les chéquiers Anal +. Klute avec son ego Puma et sa nouvelle EXVictoire : Flore. Alix (Vaginale ?) démon-stra$$-trice suédoise de B.ame G.oy/ Quant au Crevard N°1, il devait casser ultime avec Syphon Filter 2 sur PS1. Ben ouais, il évite de trop sortir, il n'a plus une tune pour s'HT ne serait-ce qu'un shampouin2merde, il est juste allé entendre le dernier al-boum de Belle & Sebastian au pub-club qui monte le Truskel.com avec Laurence Rémila mais too bad ils sont tombés sur un match2foot2merde avé des yuppies qui s'enfilaient des pintes devant un écran géant très All(beauf)Over, c'était donc très PopProlo (heureusement Sandri & Émilie 138 étaient là). After ? Sorry... « J'ai la mémoire qui flanche, je record plus très bien » mes excuses auprès des oubliés, les Invisibles (super « heroes » de la nonprésence) mais je crois qu'on s'est fini chez le Ventriloque des animaux avec Klute. Spam U soon ? Seizième Frag/ment_ MISSION ACCOMPLIE « Ce soir l'appel de l'alcool et du Vide sera plus fort que le désir de re-trouver l'Innocence que seuls les jeux vidéos arrivent à … » Nan ! je déconne. Bring your flask-back : avant hier-soir, j'ai cassé ultime. Resté chez wam koi. Espace Tricard, j'ai raté Catherine M. merde j'aurais bien foutu le Bordel mais j'ai préféré combattre les démons échappés du Necronomicon dans EVIL DEAD sur ma PS1 d'okaz. Matté aussi des loutres empêtrées dans les filets de TF1. A part ça, parait que l'OB des Clarkounets au Rex a duré une misérable heure comme au Geebbouse. Ce soir add-ID-4$$ au Grand Rex pour encore une daube design Ora-Clito. Rien à foutre. La promo se termine au Rex avec Pedro Winter, Ivan Smagghe. Super. La sempiternelle Hype Ac'. Le turn-over est vraiment faible. Ya aussi un after D*I*R*T*Y au Palais duTok. C'est tentant mais si j'arrive à m'trainer en slamboard rive extrême-gauche et que je bois, chu capable du pire mais bon, faut que j'aille F1rst au coke-tail et ça, c'est pas donné. Je résiste ................... Raté. Je m' casse de ma Tour. Joker. Chais toujours pas où j'vais. Des fois, je fais le tour du canal en mattant les bobos au snack du MK2 quai de seine et je rentre pour retrouver mes pixels. Là, j'ai une canette de bière et ma flask de saké dans les poches c'est donc (très) mal parti pour une casse ultime. Je phone à Klute. Il bosse pour un site écologique nucléaire. Mort2rire. Je prends le trome. (quelques heures trépassent...) Mission accomplie ! J'me suis fait ENFIN viré du Palais du Tok comme un Crevard que je suis. C'était VRAIMENT mou du cul, j'ai dû pousser ma gueulante2merde. D*I*R*T*Y devrait s'auto-tamponner C*L*E*A*N et les vidéos du Fake-Club sont bonnes pour Anal+. « Que s'est-t-il passé....? » spamme Stéphane Rakita de Dirty Fashion sur la Kant-in. RIEN. J'ai chouré une bouteille de cognac que j'ai refilée à Vladimirrr Tybin (c'est l'amorce de la CAISSE NOIRE du SDH (que du liquide) pour les LAVAGES2CERVEAU (bientôt + d'inf.). Secundo, j'ai picolé méthodiquement à l'OB (bière japonaise chaude/cognac2merde) et aussi mon verre de saké (1.8 € àBelleville ssous chapeau plastique) Tertio on s'est mis devant le faisceau du projo qui passait en boucle la vidéo du Zouk-Club. Clovis, la 139 boule à zéro comme Faltot- trop hiiiiiiipe la boule à zéro semble-t-il en cette rentrée2merde (je garde les cheveux longs comme le dernier des hippies) est venu me demander de dégager l'angle... J'ai fait : « NON je pars pas. ». Rien que pour masquer avec nos têtes, le logo2merde Fake qui squattait des images récupérées des nanars 70's. OK pour estampiller/détourner les films hollywoodiens 00's reloaded mais les nanars et leurs nains, c'est sacré merde ou alors « ils » auraient pu foutre un nocopyright ou un copykat mais non, c'était comme dans Videogag mais sans avoir HT les droits –– ah peut être que « ça » s'voulait 'subversif-softcore' peut être (suck). Bon « ok ok » –– accent Joe Pesci –– c'était biensûr un alibi pour me Vn'R et faire mon true-man-show au Palais du Fake. J'ai commencé petit à petit à m'exciter le corpus et le cortex quand enfin j'ai entendu les premières mesures de « Highway to Hell ». Avant cette bombe, le reste de la zik, c'était limite easy-listening (beurk). Remué la bidoche avec Inès2labarre et Anaïs Donati / me suis ramassé sur mon skate plusieurs fois / à moitié bousillé mes lunettes de vue de nuit puis j'ai commencé à gueuler comme si je spammais sur le web des slogans2merde style « Ressentiment corporation », « Fake ! Fake ! la hype est fake » (Evidenz quand tu nous tiens...) / 'fin bref j'essayais de Rester Vivant dans ces sables mouvants mondains qui ressemblaient à RIEN jusqu'à qu'un gentil GO physio me demande de me barrer sans Inès. Hélas trois fois hélas je n'ai pas fait le « corps mort ». Shame on mi fa sol la si dodo et donc chu rentré avec Calvin et Franck Anesse du magazine SOFA où j'ai pécho ENFIN une blank page pour écrire mes rastignaKeries-post-punk (sick). Bon faudrait surtout pas oublier qu'hier, c'était surtout la sortie officielle de la seule compilation valable depuis la découverte de la capote et qu'elle s'appelle mollestement « Seriously underground shit found in the trunk of a mini parked underneath the Eiffel tower ». C'est du tout bon. La hiiiiiipe extrême rive-gauche2merde à la ramasse peut aller se coucher après leur after Plaza. Culturama exInrocks, Nova et FG aussi peuvent se faire aussi fister par Jude 4$$ (ça fait du monde.) Du coup, Je streamme un morceau de ROYALTRUX de 95 (not available on C*L*E*A*N stuff) biscotte Chic CR-4$$ over for neobobos sucks. « Back to the Kroots ! » je dis, les tofs by Carl2Tagada Dis-septième Frag/ment_CREVARDS ex-NONOS (antiBOBOS) « Up-date. Les « Crevards 00's » selon PH Nassif et Pascal Bories, ce sont déjà les bobo-artistes que 140 Léon Bloy carbonisait avec bonheur dans plusieurs exégèses, ces bobos à mi-temps, ces bobos vacataires, ces bobos de troisième type, ces bobos-à-la-pige, bref ces bobos anti-bobos sont en fait des NONOS*, bobosrebelles, bobos contestataires de l'ordre établi (hype), ces nonos spammeurs, webmasters ou cybergonzos, exvidéastes, DJ's qui ont oublié leurs 100 noms, explasticiens sans oeuvres, ces bobos précaires par intérim, post-journalistes du web (cybergonzos notsobad sur parissi.com ), antiphilosophes de mailin' list (kant-in) –– je reste clean et néo-progressiste –– révolutionnaires syndicaux (SDH), nous les avons tous reconnus, c'est at least ce crevard de TH, ce qui n'était encore qu'une tendance socio-politique parmi d'autres à l'époque de Léon Bloy est devenu l'instance suprême du monde démocratique post-moderne –– la Hype (bis) –– sa substance et son telos. Les bobos-pauvres, ou semipauvres, ces prolos-cultivés, ces bobos devenus parasites sociaux de la Hype, n'en étaient alors qu'à leurs gestations ou disons à sa toute récente parturition, mais au cours du XXIe siècle ils finiront par se rendre rois de P. A. R. I. S, en l'ayant trance-muté à leurs images (couv' Tech septembre 2003) : un immense réseau de signes et de flux instituant l'économie free pornogaphique, le web devenu un simulateur de haut v(i)ol social ». S(ai)igné Nobody after Maurice G. Dantec / extrait de « Bloy est vivant et nous sommes morts » in Cancer ! Hors-série n°3). Tof : Pierre Chanson @ La Suite « Au ressentiment, je demande la compafion à sec. » Serge Balasky Dis-huitème Frag/ment_ DE RIVETS EN DÉRIVE Trop chanmé/trop golerie !!! Hier soir, je m'suis fait interdire le passage à la nouvelle supérette d'art –– sans amour –– Nemour rive extrême-gauche par la BO$$ d'AGENDA !!!! (inepte gratuit2merde : « Si t'es pas starsucker / t'es mort »). Hourra !!! Victoire !!!! T'es où que je t'enlace mon Amour ? Sophie Berbar-Sollier nous l'a mimé cerbère de Kamel en bonne chienne hype « qu'elle hait ». Mieux encore... Encore plus hype !!!! Elle a même tej' mon idole Cathy TR4$H (« Freeparties dans les supermarchés ») quand ma pineco m'a confondu avec un autre clône et qu'elle a gueulé très (trop) fort : –– « Hé !!! mais c'est ... (« Ou knout mi amen ») L'autre chienne-put4$$ s'est jeté sur elle : –– « Quoi !!! Tu connais ce connard ?!!! Dehors !!! » (véridique : source TR4$H) La crevure l'a donc poussée violemment jusqu'à la sale salida comme une Demoiselle pas clean. Trop 141 cool la hype 90's. Dépités par autant de (res)sentiments à notre égard (sick & suck) mais heureux d'être sevrés de hype pour un moment d'Eternity (ce n'est que passager, nous –– les jolis hype(r)junkies-archi-freaks-sans fric –– reviendrons chez nos BO$$ tels des bâtards virtuels abandonnés sur les autoroutes de l'information en juillet ! –– mes ami(es) crevard(e)s et moi avons donc « dérivé en mauvais produits mondains » vers le QG des étudiants d'archi Rue Jacques Callot (Merci Jérémy). Complètement déchirés les futurs bobos !!! Bataille d'eau, pétards, bière, tags ont coulé, brûlé dans une salle improbable mal éclairée et sous une déferlante de cuivres et de tambours balancés par la « Vrai-Faussefanfare des Beaux-arts » (???). Bref, une putain de bonne Z.A.T (zone anarchiste temporaire / Fuck les Bey, je préfère les framboises.) comme on les aime au SDH !!!!!! J'vous en reparlerai plus tard car hier soir... c'était... « Trop golerie ! Trop chan-mé !!! » (j'insiste sur cette effet sémantique mimétique2merde de ma playgégé...gé...nération). Se pétait donc sévèrement la tronche hier soir (pendant qu'le Cerbère gardait son fief) un max de beaux mecs et de jeunes filles pas encore trop contaminés par le Jeu Social2merde qui sévit à P.A.R.I.S. Évidemment c'est d'la chair à canon hiiiiipe dans 5 ans. C'est quand même aliénant d'apprendre à construire des trucs hype sur des bases pourries, non ? Bon faut voir alors comment ils se mettent minables les étudiants d'architecture. Signs of times2merde. 142 jean-marc renault sans titre Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 143 marc brunier-mestas sans titre Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 144 françois richard replicants (2) Modules scriptopsiques pour oeil [compression moyenne] V. VI. VII. John Isidore Rick Deckhard Rachel Tyrell les réplicants : ceux qui donnent la réplique Nom : John Isidore Type : Humain Genre : Masculin Statut : Débile / Spécial Naissance : 29/02/1984 Fonction : Sans Autorisation départ Terre [émigration] : Non Scriptopsie : som animo, vec outil ksapel cervo / paraît que ma bouche parle / que je devrais surveiller la / jpeuple banlieubandonnée, abanlieudonné, abanlie né dodo / autroutes terrompues dans vide, omilieu dchamps / jvoudrais bien avoir cervo comme vôtr ; jpasserais test et nsrais plus débil / vous : spérieurs ; jpourrais prendre beaucoup dvous / j’a pas chappé nettoyeurs cervo / étiqté spécial, stérisé, cessé dfaire partie manité / j'essaye trouver + dans - / jchange chair en os / jmanifest pour objets / pour leurs droits / ozobjets / zandroïdes sont malades… d’une maladi atroce / - l’est mort ? / - difficile dire à, l’a toujours tête-là cette / robots doiv êtr traités vec manité / tuer robots est contnatur / cien métier : ogrammeur de livr / suis végétation ambiante / mzyeux sont gétationbiante, pnneaux solaires d’ADN / j’entends pensées / j’a pas voix mais j’envie / zenfants courent vite com rats en rage / lucinations teractives / jromps silence par otr silence, différent / ton vizaj ktsors dnulpart / intérieur tête capter, émissions vnant xtérieur corps / jpy rien : msens pa 145 kserné par tricité / enyj py rien : msens pa kserné par osiété / voir… vouarc-en-ciel d'idées comme arc-en-ciel couleurs / bombe nuclaire dans champ dfleurs / vingt mille poubelles distinctes dans arc-en-viol, sans qu'ocune soit nuance d'autre / babelpoubel : descendons tous de viols / msuis achté brochur Suicid pour Nuls / exilofoné / msuis cent fois mieux dverti quand jtais coma dans / simlateur d’aube, fontaines bière / on fum pas dans mtête MERCI / tu mmarches sur la bouche / - -tu me manques – be ou / fleurtrounoirs / umain orscircuit / t'engueules vec réverbèr / fçades fnêtres murées / beauté monde vie quand soleil là / chminées scapées struction zine / sréchauff tour feu dans bidon / - chu mort, pas sourd / dans mense meuble vide décrépi, cepteur lévision bite formations dans pièce déserte / dans mense meuble vide & crépidé, qui jadis a brité liers d’habitants, un nique récept vilésion bite sa salade dans pièce déserte / normaux gendrent parfois spéciaux par advertance / penser par camizol / viouvriers crasseux tagent verres plastic gros rouge sur capot voiture pleine d’outils / nconnaît vraiment organes ses, kprès vous fait sffrir ou jouir / sonnalités fantômes / pupolations dracinées par guerre errent hasard, campent dans région puis autre / maintenant soleil cessé briller Terre, conisation entr dans phase tièrement nouve / coquille ville, cancer tête / la gérosité des achines, la géronité des dinateurs, y pense-t-on, pense-t-on assez, y pense-t-on ssez souvent ? / jcherche côté sombre dl’obscurité / jvis par mon nez / la pluie tatoue poux sur vizaj / grêle pique zaj-paupière / ptêt nodules extra-soriels dservo fini par rpousser / suis ponge blessée kponce oigneusement ses plis / mèches chveux pogotent / arc-en-ciel est pâtissrie solaire (mille-feuilles photonique) / monamie laptiteNoire ochveumoves et blousonranjo / pourquoi sortir drêvenfance ? / trairement à Réplicant un, la moinde plante, kpourtant parle pas, contient sprit conscient kvoit tout, qu’est âme de plante, son essence, qui rend vivante la / même pétales tige feuilles, sont pleines d’êtres / Rplicant a rien dtout ça, et doit tout rcréer lui / même chveux yeux reilles, sont pleines d’êtres / suis portevalises à microrganismes / janage sous ladouche ma j’du mal à rmonter lcourant / fermi zyeux : squences dmages lusnantes dfilant tesse nouïe / ADN : slule vivante qu’émet photons / ma subjet d’étude : lmission photons dans nrones d’un ête qu’halcine / libellumaindroïd / rende louïe o sourds / diouleur fantôme, rebelle à traitement / cancer dla tête / structions mentales dont zêtes héros / térieurement veuglé par orescence neurones / flubiorescence / hom des fondeurs de tête / 146 âm du crim : lalime du crâne / mémains gratt murs tjours ploin, cherchent fourmis dans racines tête / tellement pressé que mtorche avant chier / faut vite que jchie avant kmerde pourrisse dans testins / j'ava pote qui chie piranhas, flait gaffe à scouilles quand passe après lui / pluie = programme stinction spèces masse / sleil briller Terre cessé / liqué-fictionné / iperdéprim / bistouil, cracher bistouil sur sol stéril / mon nom .est. ihizy door / Nom : Rick Deckhard Type : Humain Genre : Masculin Statut : Normal / Normal Naissance : 27/07/1994 Fonction : Tueur de robots Autorisation départ Terre [émigration] : En attente Scriptopsie : jme fais des shoots d’€$ (l’argent est drogue dure) / humeur optimisée / chaque être est un scénario différent / suis forme ancienne et élevée de biotechnologie / ma proie est supérieure mais sans défense / chacune de mes cellules contient jusqu’à cent mille milliards fois plus d’informations que puces informatiques les plus sophistiquées / 1 cerveau = 10100 milliards de neurones / 1 neurone = 1000 synapses / 1 synapse = 10 millions de récepteurs / j’écoute de la quantech / ma conscience est champ électromagnétique engendré par l’ensemble de mes émissions corticales / « Il semble que le cerveau soit un des objets les plus complexes que l’on puisse rencontrer dans l’univers » / trahir un traître, éthiquement, ça se situe où ? / votre structure cognitive ne dispose pas des ressources nécessaires pour accéder à la conscience et la compréhension d’elle-même / bonne odeur mêlée d’orange fraîche et de café brûlant / je suis un tueur de mort / je ne tue pas ce qui ne vit pas, je tue des nonvivants : les androïdes / je ne tue pas : je retire, reformate, réforme, rétracte, diffracte / réformé 6 Nexus6 en 24h / les robots qui se suicident à la moindre contrariété, c’est pénible, on peut plus les tuer / boom sur stimulations psychiques exogènes (apport données cognitives) / les hommes disposent d'un orgue d'humeur, appareil leur servant à choisir [composer] leur état d'esprit / les ordis sont devenus tellement compliqués, des systèmes si subtils, que vouloir comprendre ce qui déconne dans un système s’apparente à de la psychanalyse, une psychanalyse d’ordinateur / mieux faut reformater, ça va plus vite / on peut pas faire ça avec les humains, dommage / ai-je déjà mis hors service un humain par erreur ? / ton organe 147 mental est incapable d’interpréter l’abîme entre nos deux existences / laisse-moi pénétrer ton cerveau… et je cesserai de te torturer / les mésanges vivant dans les villes acquièrent un chant plus varié émis à une fréquence plus élevée que leurs homologues des bois et des champs / robots toxicos, accros au biotex / au sein de bâtiments gigantesques se cache une microbille de 2mm de diamètre / je nage à la surface du lac le plus profond du monde, il grouille de circuits réplicants / d’organismes synthétiques / toute vie est en retirée / utopie ou autopsie / je collectionne les poèmes de serialkiller, les lettres d’espionne, les lettres de condamnés à mort, les poignards d’anarchiste, les pistolets, l’horlogerie de bombes ayant tué des gens célèbres, les statuettes empoisonnées, les squelettes d’assassins décapités / vous avez de très belles veines, des veines à piqûres / il faut aussi répertorier tous les présumés innocents / chapelet de lacs de méthane liquide / lacs sombres et irréguliers associés à des chenaux et des dépressions / neige d’éthane / le sperme m’embouteille les synapses / baiser nettoie le sperme qui mbouche le crâne / baiser enlève les émeutes qui me bousillent la tête / pute-frite svp = pipe + vous mangez des frites, très répandu à Lunar-3 / dégage de mon schéma actanciel / je ne suis pas une personne, chuis une arme, j’encule le métal / chuis un mystère que t’as pas envie de découvrir / le combat est l'hygiène de la guerre / rien à voir avec ce que tu crois être ta « personnalité », putain / ta cousine est un uzi, regarde-la dans les yeux, regarde son ptit trou / jte transperce et t’épingle comme insecte dans collection / liposuce ton trouduc babouine / mets ta tête dans ta foune babouine jveux plus voir ta gueule de fouine / jtranspire angoisses dans bain de sang-froid / étranges bactéries dans tes tissus internes / d-graf le soutien-gorge rouge de tes fesses / cible 1 : Roy Batty [Préoccupé de métaphysique, cet androïde « mystique » a été l’instigateur d’une tentative d’évasion en groupe assortie d’une pseudo-justification idéologique : le caractère prétendument sacré de la « vie » des androïdes. De plus, cet androïde a dérobé et manipulé pour diverses expériences des drogues ayant pour propriété de permettre la fusion des esprits. Pris sur le fait, il a alors fait remarquer que les androïdes étaient « privés » de toute expérience de groupe de type fusion sacrée, et indiqué qu’il désirait remédier à cet état de fait.] / grille-pain / baiser mdébouche le cerveau / cible 2 : Isidore [Monstre, plus spécial que le plus spécial des spéciaux] / plus spécial que le plus spécial des spéciaux, je suis le flic des normaux / plus spécial que le plus 148 spécial des spéciaux, je suis le chien de garde des normaux / plus spécial que le plus spécial des spéciaux, je suis le protecteur des normaux / plus spécial que le plus spécial des spéciaux, je suis le gardien de la paix des normaux / plus spécial que le plus spécial des spéciaux, je suis le policier des normaux / les Souffleurs : émigrez ou dégénérez / haut niveau du caniveau c’est du chaos-niveau bébé / avec l’allure de l’espoir / dealer de douleur-délire / ordi rachidien / la pourriture mutilante de l’air / seins-nébuleuses / crime anti-empathique / boire bière sous pluie en haut montagne face vallée / la toux est dans le crâne bas / le soleil se lève avec les neurones / l’os-œil, le soleil est l’os de l’œil / villes de mensonges, cabanes de vérité / habille-toi pour la mort / cible 3 : Léon [Vampire électrique né de la foudre et suçant l’électricité des vivants et des objets (mécanismes, sources d’énergie) ; particularité : systèmes de furtivité (absorption des ondes radar et profils aérodynamiques spécifiques) ; nous pouvons présumer qu’il fonctionne sur le thème « tuerécraser-détruire »] / cités : silos à humains / humains : silos à ADN / ADN = serpents / station Guerre-Mondiale / centre commercial Zone-Nucléaire-Soleil / ma surface de muqueuse olfactive est de 150 cm3 / par jour de grand vent, les caniches mutent en cerfs-volants / écoute ce langage des couilles, débile métal : t’es hors-circuit / va tfaire archiver, tes pets toxiques sont la préhistoire du terrorisme / interfass tracorticale / procédure neurochirurgicale d'augmentation dl'intelligence / premier humain amplifié / d’abord je fonce, ensuite jpète les plombs / partouzes super-rapides / 100% pure mort / on éclate et on svide de son sang comme un porc / sexe brûlant et sang frais / délit : copulation avec androïde, article 14.242 / au bout d’un certain temps, je trouve que c’est incestueux dcoucher avec sa propre femme / fille dans le vent, fille qui sait se vendre / prostipute fourre-tout / tes yeux sont des trous noirs où les gens meurent / ce ne sont pas des personnes, ce sont des armes / j’ai un révolver caché dans mon œil, elle a un révolver caché dans ses gros seins (des poches-rêvelovers sous les yeux) / androïdes mystiques et drogués contre machines réflexes recouvertes de chitine et dépourvues de vie réelle / choses étranges se suicident par réponse émotive programmée / herbes couvertes de poussière / j’ai l’impression de plus rien avoir dnaturel, suis devnu personnalité contre-nature / j’ai trop de pensées dans tête ma, je… npeux pas concentrer, ça mjêne / tu dois lutter contre / je dois laisser faire / la pluie se. suicide sur nous / le sang éclabousse le feu et 149 l’éteint / nous n'avons pas réussi à modifier lesmodifications de leursmodifications / cervo abîmé par diocvité _ ça y est chuis spécial _ me confonds totalement avec la poussière / ja me conf. tot. vec la pouss. / me conftote vec pouss / Genre : Féminin Désignation : Rachel Série : NEXUS-7 Modèle : N7MAA10130 Mise en service : 1er janvier 2030 Fonction : Recherche Niveau physique : A Niveau mental : AA Scriptopsie : la pensée est matière comme terre ou son : je la vois / écrire n’est pas penser mais sculpter / cervoN7 peut choisir parmi 30 trillions de constituants – mille milliards trajectoires neuroniques distinctes / mille milliards de combinaisons d’activité cérébrale possibles / le pouvoir sur notre pensée : un sacré marché / je pense sans aspérité / tout ce que quiconque a jamais sculpté est vrai / en ligne pour toujours / l’information est ma nourriture / loi 1 : dire la vérité modifie la vérité / loi 2, dite de convergence : quand les hommes deviennent des machines, les androïdes aspirent à avoir des émotions humaines / sensation temporalité débordée par trop-plein données / virus biomécanoïde m’a fait subir des transformations biochimiques importantes / d’une simple pensée je les ai tous détruits / sabir saphir / activité nerveuse de sculptures semi-vivantes connectée à des bras robotisés qui bougent en fonction des influx nerveux / mon crâne serre / chamane robote / condensation de résumés de résumés / concentrer les résumés pour aboutir au niveau 2, faire ouvrir la porte secrète – des pensées, du cervo / toujours se dire : jusqu’ici ce n’était qu’un échauffement, il faut aller beaucoup plus loin / l’ADN s’exprime à travers la musique / neurones-spermatroïdes vont vers odulesnovules apparus dans cervo / penséponge, pensigne / molécule d’ADN informatique = technologie ultime : organique et si miniaturisée qu’elle s’approche des limites mêmes de l’existence matérielle / mes molécules d’ADN organo-informatique sont un support capable d’autoduplication / le son est interactif, il est possible de dialoguer avec lui / I WANNA BE AN ANARTIST / superposition des nervures d’une main avec celles d’une feuille verte / conscience agrandie niveau moléculaire / je conçois, définis et programme des peurs / suis une matière programmée pour copier le monde / une usine 150 capable de fabriquer ses propres machines / mécanisme de capture interconnecté aux consciences du monde entier / imaginaire niveau 4 / protéines-enzymes = robots miniaturisés / cellules = usines / ribosomes = ordinateurs moléculaires / je bouillonne de microordinateurs biologiques / concentrer toutes les informations en un seul point minuscule – pour créer un point particulier synthétique, accéder au niveau 2 / compresser les résumés pour atteindre le niveau 2 / le clavier du corps, c’est l’oreille / 5000 milliards d’opérations à 14 chiffres/seconde / puissance lumineuse de 750 milliards d’ampoules ordinaires de 100 watts / mini-nukes / hybride mathématico-empirique / il faut apprendre et s’entraîner à tordre son esprit / le décoincer, l’assouplir, pour qu’il puisse exécuter figures, gestes, acrobaties / lui enlever son incapacitant collier de contrôle / les expériences de cauchemar maîtrisé sont des sources de savoir biomoléculaire (le tout est d’en sortir intacte) / synthétiser et centraliser les données pour en tirer une vue d’ensemble / technologie d'autoreprogrammation directe permettant de se transcender / se reprogrammer pour être plus intelligente, se reprogrammer (avec cette nouvelle intelligence) pour être encore plus intelligente, et ainsi de suite, jusqu’une seule de mes phrases soit chargée de centaines d'informations, de concepts, et de sentiments / somme totale de la connaissance scientifique humaine stockée dans un format cognitif prédigéré, prêt-àpenser / les tâches simples sont réalisées à des vitesses phénoménales et sans erreur, les tâches conscientes réalisées avec une mémoire parfaite et une conscience de soi totale, au rythme d’un million d'années subjectives par seconde / toute solution se situe en dehors du cerveau humain / totalité de la connaissance humaine perceptible en une expérience instantanée, de la même façon que l’on perçoit une image entière d'un seul coup / vous n'êtes pas celui qui exprime vos pensées, vous êtes celui qui entend vos pensées / les modèles prédictifs s’effondrent à ma proximité / un nombre a produit sur moi, la première fois que je l'ai rencontré, une impression indescriptible : dans les chiffres décimaux de ce nombre peuvent être encodées, avec pratiquement n'importe quelle méthode, toutes les œuvres jamais écrites par une main humaine, et toutes celles qui auraient pu être écrites, à raison de cent mille mots par minute, pendant toute la durée de l'Univers, mis à sa propre puissance mille fois / bébandroïde a appris 324 langues cette semaine / j’ai un contrat avec un futur absolu / à 10 000 années-amour de toute 151 pensée / vivons heureux sans lendemain (sous l’angle de l’éternité) / je recueille les pensées extra-terrestres / cerveau tumeur / mettez une tentacule sur votre œil, cela vous reliera à la mémoire optique de la nuit des temps, et agira comme une représentation 3D de tout ce qui s'est passé / créature dont yeux sont fibres optiques amovibles qui enregistrent sans discontinuer et renvoient les images même en étant séparés du corps / j’étais la seule possi / la terminaison de toutes idées possibles ou impossibles, leur inconnue / les pistolets me nourrissent / pluie de message / avertissement : tout fonctionnera comme prévu / s’endormir et se réveiller c’est « redémarrer » # mappemonde-moi # )( quatrième nature )( () () ^ des parcours hors du commun peuvent donner des êtres très banals ^ O un robot averti en vaut trois O / première ligne / totale émersion / lesbiennes mécaniques = + ° ` | {‘`}~{} }{ ¤o0O°dµ§§§/}*µ*{ } *ç*{}Oço{ }°ç°{ }*ç°{ }*µ°{ }0µ^{ }^µ°{ croistoi vivant, ne te réveille jamais, et peut-être qu’un jour tu naîtras / un pénis en forme d’interrogation nucléaire / puissance crue – pouvoir pur / la vérité n’est pas bonne à dire ni même à penser / nouvelle partie : une vie entière à bousiller / les pansements poussent sur ma peau / les pense-vivants / je suis une bibliothèque dans un singe / l’observatoire d’un ciel pur et noir / fusées, radars, détecteurs infrarouges, sonars / je plonge pour trouver l’inspiration au milieu des micro-organismes des eaux glacées / piégées dans des millions de seringues : la palette des odeurs existantes / vivons heureux, sans lendemain / « C’est une idée d’androïde », dit-elle / Modules scriptopsiques pour oreille [compression forte / données : incomplètes] V. John Isidore VII. Rachel Tyrell Données manquantes pour VI Nom : John Isidore Type : Humain Genre : Masculin Statut : Débile / Spécial Naissance : 29/02/1984 Fonction : Sans Autorisation départ Terre [émigration] : Non Scriptopsie : som animo, vec outil ksapel cervo / paraît que ma bouche parle / que je devrais surveiller la / jpeuple banlieubandonnée, abanlieudonné, abanlie né dodo / autroutes terrompues dans vide, omilieu 152 dchamps / jvoudrais bien avoir cervo comme vôtr ; jpasserais test et nsrais plus débil / vous : spérieurs ; jpourrais prendre beaucoup dvous / j’a pas chappé nettoyeurs cervo / étiqté spécial, stérisé, cessé dfaire partie manité / j'essaye trouver + dans - / jchange chair en os / jmanifest pour objets / pour leurs droits / ozobjets / zandroïdes sont malades… d’une maladi atroce / - l’est mort ? / - difficile dire à, l’a toujours tête-là cette / robots doiv êtr traités vec manité / tuer robots est contnatur / j’entends pensées, j’a pas voix mais j’envie / jromps silence par otr silence, différent / intérieur tête capter, émissions vnant xtérieur corps / jpy rien : msens pa kserné par tricité / enyj py rien : msens pa kserné par osiété / voir… vouarc-en-ciel d'idées comme arc-en-ciel couleurs / bombe nuclaire dans champ dfleurs / babelpoubel : descendons tous de viols / msuis achté brochur Suicid pour Nuls / exilofoné / on fum pas dans mtête MERCI / tu mmarches sur la bouche / - - -tu me manques – be ou / fleurtrounoirs / umain ors-circuit / t'engueules vec réverbèr / - chu mort, pas sourd / normaux gendrent parfois spéciaux par advertance / penser par camizol / nconnaît vraiment organes ses, kprès vous fait sffrir ou jouir / maintenant soleil cessé briller Terre, coquille ville, cancer tête / la gérosité des achines, la géronité des dinateurs, y pense-t-on, pense-ton assez, y pense-t-on ssez souvent ? / jcherche côté sombre dl’obscurité / jvis par mon nez / ptêt nodules extra-soriels dservo fini par rpousser / mèches chveux pogotent / arc-en-ciel est pâtissrie solaire (mille-feuilles photonique) / monamie laptiteNoire ochveumoves et blousonranjo / trairement à Réplicant un, la moinde plante, kpourtant parle pas, contient sprit conscient kvoit tout, qu’est âme de plante, son essence, qui rend vivante la / même pétales tige feuilles, sont pleines d’êtres / Rplicant a rien dtout ça, et doit tout rcréer lui / même chveux yeux reilles, sont pleines d’êtres / janage sous ladouche ma j’du mal à rmonter lcourant / fermi zyeux : squences dmages lusnantes dfilant tesse nouïe / ma subjet d’étude : lmission photons dans nrones d’un ête qu’halcine / libellumaindroïd / rende louïe o sourds / âm du crim : lalime du crâne / mémains gratt murs tjours ploin, cherchent fourmis dans racines tête / tellement pressé que mtorche avant chier / faut vite que jchie avant kmerde pourrisse dans testins / j'ava pote qui chie piranhas, flait gaffe à scouilles quand passe après lui / pluie = programme stinction spèces masse / sleil briller Terre cessé / liqué-fictionné / iperdéprim / bistouil, cracher bistouil sur sol stéril / mon nom .est. ihizy door / 153 Genre : Féminin Désignation : Rachel Série : NEXUS-7 Modèle : N7MAA10130 Mise en service : 1er janvier 2030 Fonction : Recherche Niveau physique : A Niveau mental : AA Scriptopsie : la pensée est matière comme terre ou son : je la vois / le pouvoir sur notre pensée : un sacré marché / je pense sans aspérité / tout ce que quiconque a jamais sculpté est vrai / en ligne pour toujours / l'information est ma nourriture / loi 1 : dire la vérité modifie la vérité / loi 2, dite de convergence : quand les hommes deviennent des machines, les androïdes aspirent à avoir des émotions humaines / d'une simple pensée je les ai tous détruits / superposition des nervures d'une main avec celles d'une feuille verte / conscience agrandie niveau moléculaire / je conçois, définis et programme des peurs / suis une matière programmée pour copier le monde – une usine capable de fabriquer ses propres machines : mécanisme de capture interconnecté aux consciences du monde entier / votre structure cognitive ne dispose pas des ressources nécessaires pour accéder à la conscience et la compréhension d'elle-même / toute solution se situe en dehors du cerveau humain / un nombre a produit sur moi, la première fois que je l'ai rencontré, une impression indescriptible ; dans les chiffres décimaux de ce nombre peuvent être encodées, avec pratiquement n'importe quelle méthode, toutes les œuvres jamais écrites par une main humaine, et toutes celles qui auraient pu être écrites, à raison de cent mille mots par minute, pendant toute la durée de l'Univers, mis à sa propre puissance mille fois / crois-toi vivant, ne te réveille jamais, et peut-être qu'un jour tu naîtras / vivons heureux, sans lendemain / « C'est une idée d'androïde », dit-elle. 154 françois richard amatemp 6 · · · — — — · · · code : 404 · · · — — — · · · déconnexion impossible · · · — — — · · · Les sites sont autonomes, les pages défilent d'elles-mêmes, les liens s’ouvrent d'eux-mêmes. · · · — — — · · · De la croissance et de la forme de la Métamorphose des plantes · · · — — — · · · dizaines d'écrans saturés de couleurs et de mouvements saccadés · · · — — — · · · en ligne, tu n'as jamais existé · · · — — — · · · Vers une Réalité Diminuée massive · · · — — — · · · N'admire rien. · · · — — — · · · le destin, on l'emmerde · · · — — — · · · anatomie de l'anomie · · · — — — · · · du punk-hardcore pour sourds, reposant uniquement sur les vibrations fortes · · · — — — · · · point de non-retour atteint quand seuls restent les yeux et la langue · · · — — — · · · NO MAN'S LANGUE · · · — — — · · · à la perceuse, aspire l'air dans la tête de poupées Barbie et injecte-le-toi dans les veines · · · — — — · · · dissémination de poussières intelligentes _ capables de se diviser frénétiquement sans jamais mourir, · · · — — — · · · le nombre de joueurs en ligne augmente, la fréquence du jeu elle aussi s'accélère · · · — — — · · · combinaison de molécules peu efficaces séparément mais dont l'union fait la synergie · · · — — — · · · nuvo jeu vidéo : une phrase qui se détruit elle-même · · · — — — · · · la principale difficulté consiste à trouver la matière première, à savoir des cerveaux de joueurs, 100% consacrés au jeu et non « pollués » par d'autres substances · · · — — — · · · unité Inserm 837 · · · — — — · · · neurones projettent leurs branches axonales comme autant de tentacules à la recherche de contacts · · · — — — · · · oiseau sans ailes. le cerveau consomme à lui seul 20% de l'énergie de l'organisme · · · — — — · · · tu es une série... d'impulsions électriques · · · — — — · · · Merci. Merde. Pardon. · · · — — — · · · je cherche ma poche et ne la trouve pas, et pour une bonne raison : je 155 suis nu. · · · — — — · · · phobie-phobe, je raconte à trois psy différents que ces chats parlent avec la voix de ma mère · · · — — — · · · me suis fait jeter des Hare Krishna parce que j'étais trop hippie · · · — — — · · · ...psychothérapies en tous genres, pensée positive, méthode Coué, homéopathie, acupuncture, aromathérapie, sophrologie, relaxologie, stages de rigologie, de méditation, luminothérapie ou encore coaching de vie · · · — — — · · · je devrais voir un psy... un psychopathe · · · — — — · · · traverser les murs comme un ver qui avance en mangeant ce qu'il trouve sur son chemin · · · — — — · · · c'est pas un baladeur que j'ai mais un casque anti-bruit · · · — — — · · · Ici : le corps social le plus docile et le plus soumis qui soit jamais apparu dans l'histoire de l'humanité. · · · — — — · · · La vie est simple quand on suce des bites. · · · — — — · · · Ici : création de corps dociles mais libres qui assument leur identité et leur liberté de sujet dans le processus même de leur assujettissement. · · · — — — · · · Les vaches qui ont des noms donnent plus de lait. · · · — — — · · · On te branche, puis tu vis le reste de ta vie dans un rêve. (ça ira très bien dans une soirée lecture ) · · · — — — · · · léthargie très profonde, le cerveau empêche tout mouvement afin d'éviter de "vivre" · · · — — — · · · fourmillement de processus de limitation sociaux, physiques, intellectuels · · · — — — · · · combinaison complexe de stimuli visuels et auditifs subsoniques ingénieusement conçus pour court-circuiter les impulsions électriques du cerveau, les piégeant dans une boucle sans fin. · · · — — — · · · C'est un virus informatique qui infecte les personnes _ Satanesque ! · · · — — — · · · · · · — — — · · tape frénétiquement sur Google : « où est la sortie ? » · · · — — — · · · le monde est une balle dans la tête · · · — — — · · · les gens et les pensées sont des vagues qui rongent et corrodent · · · — — — · · · je n'aime que les gens que je ne connais pas · · · — — — · · · LE DESTIN, ON L'EMMERDE · · · — — — · · · Internet, the drug of the planet (27 personnes aiment ça) · · · — — — · · · On ne dissertera pas sur le triomphe du smartphone. · · · — — — · · · Le gouvernement décrète qu'un humain soit repérable par des pigeons. · · · — — — · · · Ce sujet a été gavé de stimulants et gardé éveillé une année entière, constamment soumis à des images terrifiantes. · · · — — — · · · Le Marine place son pénis dans le canon huilé du tank et atteint l'orgasme en quelques va-etvient. · · · — — — · · · Jacques a commandé pour 2 000 $ de sperme de babouin. · · · — — — · · · DHL Error : nous ne livrons pas les bébés · · · — — — · · · les 156 humains sont des systèmes électriques · · · — — — · · · Les pigeons sont des rats avec des ailes. · · · — — — · · · 100 000 milliards d'interconnexions sous surveillance · · · — — — · · · toute déconnexion est désormais interdite · · · — — — · · · toute déconnexion est désormais impossible et interdite · · · — — — · · · biohackers développent des bactéries aux propriétés étranges comme celle de produire de l'électricité (mousses, gels, émulsions, cristaux liquides) · · · — — — · · · explosion de la population de Turritopsis nutricula, méduse potentiellement immortelle, à travers les océans du globe : l'animal est capable d'inverser son processus de vieillissement _ régénérer l’ensemble de son corps, et cela de façon infinie · · · — — — · · · Anywhere out of the Internet (34 personnes aiment ça) · · · — — — · · · la biologie a maintenant pour objectif de construire de nouveaux systèmes vivants. · · · — — — · · · panne de courant lors d'une tentative de réinitialisation de personnalité. _ résultat : gros black out, chais pas qui chuis, et télécharge péniblement des fragments ici et là pour me recomposer en vague quelque chose. · · · — — — · · · pied droit garanti pour un milliard de pas. · · · — — — · · · tout corps doit être remboursé en cas de non-paiement. — — — · · · toute déconnexion est désormais impossible et interdite · · · — — — · · · « Il faut bien que ceux qui sont partout se vengent de ceux qui ne savent pas comment faire pour n’être nulle part. » · · · — — — · · · toute déconnexion est désormais interdite · · · — — — · · · · · · — — — · · · · · · — — — · · · 157 françois richard chant des réplicants – final Pour écouter ce morceau, rendez-vous dans le dossier bande originale ou bien cliquez ici pour écouter directement le morceau 158 françois richard sans titre Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 159 vincent pons sans titre Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image 160 f r e d g e va r t cryo (episode 1) Miller regrettait d’avoir tué sa femme. Et surtout de s’y être pris n’importe comment. En regardant le panier, il ne put s’empêcher de penser que tout ceci n’était qu’un malheureux concours de circonstances. Il aurait suffi que la fille — Miller se rendit compte qu’il n’avait jamais retenu son nom — ne décroche pas son téléphone, pour remplacer au pied levé sa collègue. Du coup, elle ne serait pas allée travailler dans ce bar à Soho, ce soir-là. Elle n’aurait pas assisté au concert. Un groupe au nom péteux, réduit en fait à un seul guitariste. Le type était vaguement paumé, vaguement débraillé, vaguement alcoolique, mais franchement talentueux. Elle l’avait laissé la raccompagner chez elle à la fermeture. Le gamin, Dieu sait pourquoi, avait justement choisi ce moment-là pour passer à l’improviste. Depuis quelques semaines, il projetait de la demander en mariage. On ne saura jamais si c’était la première fois que sa fiancée se détendait de cette manière après avoir trimé pendant cinq heures dans les flaques de bière, mais cette question devint sans importance à l’instant où le gamin ouvrit la porte du deux pièces sur la cent cinquante sixième rue. Il les surprit sur le canapé, elle le cul en l’air et le visage écarlate, l’autre jean troué sur les genoux. La fille hurlait en haute-contre pendant que Django la pilonnait. En pleine lumière, nom de Dieu. Le gamin claqua la porte. Le type se retira d’un seul coup, mais ne put s’empêcher de jouir sur le cul de la fille. Elle, elle regarda le gamin avec stupeur, avant de se mettre à pleurer. Le guitariste marmonna des excuses en gagnant la porte, les laissant seuls. Ni la fille ni le gamin ne le revirent jamais. Le gamin s’en alla vers six heures trente. Il erra dans Manhattan, sans parvenir à pleurer, longeant Central Park et ce qui restait de ses souvenirs. En fin de matinée, il dépassa la ville, en suivant les voies de chemin de fer. Il hésita longtemps. Plus d’une fois, il 161 s’était arrêté devant des cabines téléphoniques, aux abords des gares, et avait composé le numéro de la fille. Mais chaque fois il avait raccroché. Même s’il avait caressé l’espoir d’entendre des regrets, même s’il les aurait acceptés, pour l’heure, les images étaient trop fortes. Cette grosse queue plantée au fond d’elle, cette giclée de foutre quand il avait ouvert la porte. Cette plaie, cette salissure. Il s’était jeté sur la voie au passage de l’express de 17 heures 15, en pleine heure de pointe, au moment où le train atteignait sa vitesse de croisière. Le trafic fut interrompu durant près de quatre heures, le temps pour les ambulanciers de récupérer les restes du gosse, et pour les flics d’interroger les témoins. Il fallut détourner le train sur une voie de garage, puis rendre compte des complications au siège de la compagnie des chemins de fer du New Jersey. Pendant tout ce temps, à Grand Central, c’était l’émeute. Une armée de businessmen en furie courait dans tous les sens, prenant à parti les employés de la compagnie, invectivant les contrôleurs, et de manière générale tous ceux qui leur paraissaient socialement inférieurs. Même les petits porteurs de bagages avaient du mal à s’en tirer indemnes. Le gamin, sans le savoir, avait fait exploser un pétard dans cette fourmilière. On se serait cru à la corbeille un jour d’octobre 29. Miller passa à travers la cohue comme un fantôme, indifférent à la débandade. Sourd au bruit, aveugle aux mouvements. Il se sentait hors-jeu. Six semaines qu’il n’avait plus goût à rien, qu’il était mal dans sa peau. Au début il avait mis ça sur le compte d’une dépression passagère, peut-être pas sans rapport avec les deux ou trois contrats qu’il avait laissés filer. Par le passé, il n’était pas le genre d’homme à se laisser abattre pour trois ou quatre malheureux millions de dollars. Il pouvait alors, les meilleurs jours, en ramasser le triple sur un claquement de doigts. Miller avait mal au dos. « Simple sciatique, mon vieux », l’avait rassuré Stan, leur médecin de famille. « Tu devrais prendre du repos. Merde , tu ne t’arrête jamais une minute ? » Miller avait rassuré son médecin, ce cher vieil ami, d’un hochement de tête, sachant pertinemment qu’il ne lâcherait pas la bride. Ce n’était pas le moment. Avec la crise, lâcher la bride revenait à introduire six cartouches dans un barillet, et coller le canon contre sa tempe. Il était donc sorti du cabinet de Stan et il avait rejoint la Banque à pied — pas le temps de poireauter un quart d’heure après un taxi — en coupant par Central Park, sans prêter attention à la douceur de l’été indien. Puis il 162 avait repris la course, comme tous les gens indispensables, ses semblables, cette élite à laquelle il avait plus que jamais conscience d’appartenir : la douleur ne rentrait pas en ligne de compte, qu’elle se contente de lui titiller les vertèbres à la façon d’un boxeur poids mouche, où qu’elle lui balançât ses droites avec la violence d’un super-lourd. Il avait continué, tous les matins, à attraper son train à six heures quarante, qu’il pleuve ou qu’il vente. Une putain de course de rats. Un labyrinthe dans lequel il s’entêtait à courir dans tous les sens, sans vouloir admettre qu’un dingue avait déjà ouvert le robinet. Mais Miller s’était retrouvé au tapis, pour finir. Contraint de s’arrêter pour de bon, direction l’hôpital et les comprimés, la kiné et l’enchaînement des mauvaises nouvelles. Pendant son hospitalisation — trois semaines, autant dire trois siècles — le monde avait continué à tourner et Cunningham, son subalterne, en avait profité pour prouver ce qu’il estimait devoir prouver. Le gosse avait raflé des contrats réputés infaisables, le genre de coups que seuls des vieux briscards comme Miller réussissaient parfois, avec un coup de pouce de la chance, et encore, à peine dans un tiers des cas. Autant dire qu’à peine sorti de l’hôpital, Miller s’était rué au bureau, plié en deux, alors qu’il n’avait pas encore subi la moitié des examens prescrits par Stan. Assis à une mauvaise table de la buvette de la gare, derrière un double scotch sans glace, Miller se demanda pourquoi il s’était remis à picoler aussi sec. La douleur sans doute un peu (il ne supportait pas la morphine, cette sensation ouatée de perdre tout contrôle), mais surtout cette terrible spirale d’échec qui avait suivi. Ces contrats mal négociés sous le regard faussement compatissant de Cunningham. Sa mauvaise humeur et l’ambiance abominable à la maison avaient fait le reste. Ses relations avec Marla s’étaient rapidement dégradées. Au début, elle avait fait tout ce qu’elle avait pu pour le retenir au bord de l’abîme. Mais depuis un gros mois elle avait lâché prise. Il ne se parlaient plus, excepté de sujets terre à terre comme passer la salière, aller chercher la petite à l’école, ce genre de choses insignifiantes. Non, en fait c’était inexact : Miller parlait. Depuis toutes ces semaines, il n’arrêtait pas de déblatérer à propos de ces contrats qu’il ne parvenait plus à conclure, des regards de moins en moins patients du Boss, de la sale petite gueule de Cunningham. Et puis il grimaçait de douleur en se resservant un verre de vin. Sa douleur, il lui collait un bâillon sur la bouche dès qu’il pénétrait dans la banque, mais à la maison, il la laissait exprimer 163 toutes ses gammes et massacrer toutes les mélodies. Deux semaines auparavant, Marla avait craqué. « Ecoute, arrête de nous casser les pieds avec ton martyre. Si tu es vraiment malade, retourne voir Stan et prends toi enfin en mains ». Il avait grommelé, réussi à enchaîner sur la perte du contrat Rosenthal, et Marla n’avait plus prononcé un mot de la soirée. Le lendemain, il était retourné au cabinet de Stan, à contre cœur. Puis il avait enfin accepté de passer son Scanner. Les résultats n’étaient pas bons. Ses lombaires ressemblaient à des caramels brûlés. Stan avait pris une figure d’enterrement et lui avait prescrit de nouveaux examens, en le suppliant presque de les réaliser. Miller, homme pragmatique s’il en est, avait aussitôt contacté Life Ex, afin de souscrire à l’option ALIVE, pour lui et pour elle. Il n’en avait pas encore parlé à Marla. Nous ne sommes que des intérimaires dans cette grande mascarade, déclara-t-il en levant son verre. Dans les allées en surchauffe, ses semblables continuaient à courir dans tous les sens, hurlant, vociférant, exigeant. Des putains de rats dans un putain de labyrinthe. Même pas foutus de se rendre compte que l’inondation a déjà commencé. Dans les dernières secondes de lucidité qui lui restaient, il faillit tout laisser tomber, attraper un taxi, par la force s’il le fallait, filer à la Guardia et s’embarquer pour la Suisse. Vingt-six minutes de vol. Loin de tout. Puis Lausanne, un autre taxi, et le bâtiment sépulcral de Life Ex, celui qui éclaboussait toutes les brochures de son imposante sobriété. Il signerait tous leurs foutus papiers. Tout compris, Miller aurait pu être libre dans moins de deux heures, et attendre, confiant, qu’on le réveille le jour où on traiterait les cancers du poumon comme des rages de dents ou des boutons d’acné. Mais il y avait Juliet. Et puis Marla. Pas question de s’en aller sans leur dire au revoir. Et sans obtenir un semblant d’explication. Il arrêta un serveur et commanda un autre scotch. Aujourd’hui, venait la noyade. Ce matin, Marla lui avait menti. C’était rare. Du moins, d’ordinaire, elle tricotait ses mensonges avec beaucoup moins de fil blanc. « Il faudra que tu passes chercher la petit à la garderie », lui avait-elle signalé d’un ton morne, pendant qu’il avalait son café. « Pourquoi ? C’est quand même beaucoup plus pratique pour toi, tu n’es qu’à cinq minutes ». Elle avait haussé les épaules. « Il y a une réunion importante, à la pharmacie. Winston voudrait s’agrandir. Ça commence à dix-huit heures. » Il avait rendez-vous chez Stan trois heures avant, ce qui 164 lui laissait largement le temps d’attraper un train, de rentrer à la maison et de passer prendre Juliet en voiture à dix-huit heures trente à la garderie. Aussi, il ne protesta pas. Ce n’était pas le moment de toute façon. Marla était d’une humeur massacrante. Puis, à quinze heures, il y avait eu Stan et ses trémolos : Cancer. Métastases. Ça se résumait à ça. Et puis Miller avait demandé : « Combien de temps ? » Une heure plus tard, comme prévu, il était arrivé à la gare. Trois quarts d’heure que le gamin n’était plus de ce monde. Et c’était déjà l’enfer à Grand Central. Mais Miller répétait avec minutie la conversation qu’il aurait avec Marla, quand elle rentrerait de sa réunion. Il y aurait des larmes. Ce serait difficile. Il se demandait surtout comment ils s’y prendraient avec la petite. « Sois courageuse. Soyez courageuses ». Il lui dirait ça, devant un verre de Chardonnay, une fois que Juliet serait couchée. Il attendrait de la voir se décomposer, ce qui lui retournait le ventre par avance, avant d’enchaîner « Normalement je devrais mourir. J’ai un cancer. Généralisé ». Merde, il se donnait lui-même envie de pleurer. Mais il lui laisserait à peine le temps de mouiller le coin de ses yeux. Il balancerait son miracle sur un plateau. « Mais j’ai peut-être une bonne nouvelle » continuerait-il sur un ton flegmatique. Un air de marin britannique en pleine tempête à l’heure du thé. « J’ai modifié notre police Life Ex. Je nous ai pris l’option ALIVE ». Il se répétait tout cela, devant son Whisky, comprenant peu à peu qu’il allait falloir téléphoner à Marla. Il était clair qu’il lui faudrait renoncer à sa réunion importante. Elle comprendrait. Miller paya son verre et gagna la cabine téléphonique la plus proche. Il glissa une pièce dans la fente et composa le numéro de la pharmacie sur le cadran électronique. C’est Winston lui-même qui décrocha. Il eut l’air surpris quand il vit le visage de Miller sur l’écran. Le vieil homme avait piqué un fard de collégien. Mais il reprit aussitôt le contrôle de lui-même, et parla d’une voix presque naturelle. — Tiens, salut, Tom. Qu’est-ce qui me vaut l’honneur ? — Salut, Winston. Je voudrais dire un mot à Marla. Vous pouvez me la passer ? À nouveau, le visage de Winston se crispa. Le vieux se passa la main dans la barbe. — Je ne comprends pas, Tom. Je voudrais bien te la passer, mais elle est partie il y a une heure. — Hein ? Miller avait haussé le ton sans le vouloir. Winston se repassa la main sur le menton. 165 — Attendez, Tom, reprit le vieux. N’allez pas vous projeter un film. Elle est peut-être juste sortie faire une course. Je ne sais plus exactement ce qu’elle m’a dit. — Oui, ça doit être ça…Laissez tomber, rien de grave, dit Miller, essayant de reprendre le contrôle. Je rappellerai tout à l’heure, juste avant la réunion, c’est bien à six heures, hein ? Winston devint si écarlate qu’il n’était même plus nécessaire d’essayer de couvrir quoi que ce soit. L’un et l’autre le comprirent tout de suite. Il n’y avait aucune réunion. Juste un alibi fragile, qui n’avait tenu aucun compte des impondérables. Ils écourtèrent la conversation avec embarras. En raccrochant, Miller se sentit tomber. Marla lui avait raconté des salades. Elle était Dieu sait où. Dieu sait avec qui. Et il n’y avait aucun moyen de la joindre. Il dut accomplir un effort quasi surhumain lorsqu’il téléphona à la garderie. Une fois le problème réglé, il retourna à sa table, commanda un nouveau verre, puis un autre encore, se détachant peu à peu de la situation. L’ivresse, le seul moyen d’essayer de ne pas y voir trop clair. À ta santé Marla. À ta santé petite tumeur de mes amours… Pourtant, il fut l’un des premiers, à vingt et une heures, à monter dans un train. Il composta son billet et trouva par miracle une place assise. La douleur, malgré l’alcool, avait repris de plus belle. Bientôt libéré. Bon sang, la souffrance était abominable désormais. Sur le trajet, beaucoup d’hommes d’affaires, ayant eu vent des raisons de cette interruption du trafic, scrutaient les rails à travers les vitres embuées. À la recherche de Dieu sait quel vestige. Morceau de scalp, flaque de sang, fragments de cervelle oubliés. Miller ne vit rien. Il descendit à son arrêt, longea les squares désertés, leur sol couvert de feuilles mortes, arpenta les rues livides. Sans doute ne reverrait-il pas l’automne de sitôt, pensa-til en progressant sur le bitume. Il se mit à pleuvoir dru. La petite se jeta dans ses bras à peine eut-il franchi la porte d’entrée. Elle aurait dû être couchée depuis longtemps, mais elle réclamait sa séance de lecture quotidienne. Elle voulait toujours que ce soit lui. Il s’efforça donc de masquer sa douleur, s’installa dans le canapé avec sa fille sur ses genoux, et lui lut une histoire. Marla, elle, s’affairait dans la cuisine. Miller expédia l’histoire (une vingtaine de pages), en deux minutes, puis pria sa fille d’aller au lit. Enfin, il rejoignit sa femme. Marla lui tournait le dos, penchée au dessus de l’évier, où elle feignait de s’escrimer sur une casserole. Miller fonça tout droit vers 166 le frigo et se décapsula une bière. — Salut, dit-il en reniflant. Puis il vida sa bière en trois gorgées. Une armée de petits alpinistes sadiques étaient en train de planter des pitons dans son dos. Des pitons bien pointus et bien longs. Il grimaça sans qu’elle le vît. Au dessus de leurs têtes, la pluie martelait le toit de la cuisine au rythme d’un boléro. — Pas eu trop de mal à prendre la petite ? Marla ne répondit pas, elle semblait figée sur place, toujours le visage penché sur sa saloperie d’évier. Miller rouvrit la porte du frigo et décapsula une deuxième bière. — Désolé que tu aies dû louper ta réunion. J’espère que Winston n’a rien trouvé à y redire, dit-il avant de porter la canette à ses lèvres. — Arrête de boire comme ça… — « Arrête de boire comme ça… » C’est tout ce que tu trouves à dire ? J’en ai besoin, dit-il en vidant la bière d’un trait. Rudement besoin. Puis, comme Marla avait repris son petit manège, il s’alluma une cigarette. En temps normal, elle aurait poussé des hurlements. Ce ne fut pas le cas. — Je crois que j’en ai jamais eu autant besoin, précisa-til. Miller retourna au salon et se vautra dans le canapé. Cinq minutes plus tard, il se relevait. Il se confectionna un Whisky et revint avec un verre rempli à ras-bord, ainsi qu’avec une autre bière. Marla toujours cramponnée à son évier, ne lui fit aucune remarque. — Il y a eu un accident. Je crois qu’un gosse s’est jeté sur la voie. T’aurais dû voir le bordel à la gare. — Je sais. J’ai entendu ça à la radio… Sur sa colonne vertébrale, les alpinistes avaient été foudroyés. Il eut l’impression que des milliards de volts sillonnaient tous ses nerfs. Miller grimaça, sans que Marla ne paraisse s’en étonner. Puis, l’espace d’une seconde, le calme revint dans son corps. Mais le répit ne serait pas long. L’alcool ne suffirait pas cette fois. Marla vint s’asseoir en face de lui, sur un fauteuil en cuir saccagé par le chat. Ses yeux étaient écarlates. — Où tu étais, cet après-midi, nom de Dieu ? — Je ne veux pas que tu ailles en Suisse… Miller fut pris de court. Il ne s’était absolument pas préparé à cet aspect de la discussion. Il l’avait occulté. Il avait envisagé d’autres scénarios. Des aveux de son côté à elle. Il avala son verre cul-sec et fut pris d’une quinte de toux. Juliet passa la tête par l’escalier et sa mère se redressa : 167 — Juliet ! Je t’ai dit d’éteindre la lumière. — J’arrive pas à dormir ! P’pa tousse trop fort. Marla lui lança un regard noir. La douleur se réveilla, plus pénible que jamais. Il se releva pourtant, et gravit l’escalier. Il prit l’enfant dans ses bras, malgré les coups de poignard qu’il ressentait dans sa colonne, et lui murmura quelques mots apaisants, en se faisant violence, puis Marla les entendit marcher jusqu’à la chambre de Juliet. Miller redescendit quelques secondes plus tard et se servit un autre verre. Il revint s’asseoir au salon, en face d’elle. Il baissa les yeux. — Comment t’es au courant ? dit-il en vidant les trois quarts de son verre. Marla haussa les épaules. Il termina son Whisky et fit aussitôt mine de se relever. — Arrête ça bon sang ! Tu vas arrêter de fuir, nom de Dieu ? — Fous-moi la paix. Il se rassit néanmoins, puis, en essayant d’être patient : — Comment t’es au courant ? Non. Je veux dire, on verra ça après. Tu étais où, bordel ? Avec qui ? Marla secoua la tête. C’est elle qui se leva, cette fois. Elle qui entra dans la cuisine. Elle qui se servit deux doigts de Whisky. Miller fronça les sourcils. Tout ceci n’annonçait rien de bon. Sa femme n’avait jamais tenu l’alcool. Au bout de quelques gorgées, comme prévu, elle commença à divaguer. « Comment t’es au courant ? » reprit-elle, l’imitant mal à dessein. Mais tout ce qui te trotte dans la tête, comme toujours, c’est surtout « avec qui ? », hein ? Tu ne changeras jamais… Miller balança son verre sur le parquet, mais il résista au choc. Il rougit. — Ne te fous pas de ma gueule. Ne te fous pas de ma gueule, s’il te plaît. Je répète : pourquoi tu m’as raconté des bobards pour ta réunion ? Elle haussa les épaules et ferma les yeux. — Je me suis trompée de date, c’est tout… Qu’est-ce que tu es encore allé t’imaginer ? Tu t’es vu ce soir ? Comme si c’était moi qui avait quelque chose à expliquer... D’ordinaire, Miller se serait probablement contenté de cette explication. Parce qu’elle l’arrangeait bien. Mais Miller, à la gare, avait déjà bu. Il était arrivé chez lui déjà dans le brouillard, n’avait retrouvé son chemin qu’à l’instinct, à la manière des pigeons voyageurs. Il avait vaguement conscience que cette conversation serait calamiteuse, pourtant, il insista. 168 — Ça me paraît court, comme explication, dit-il en se redressant sur son siège. Va me chercher un autre verre. — Va te faire foutre. Tu devrais t’entendre. Tu es déjà ivre mort. — Qu’est-ce que ça peut bien te foutre ? Ses lèvres tremblaient. — Je ne vais plus supporter ça longtemps, tu sais. — C’est une menace ? Miller s’était trompé. Il pensait avoir franchi les bornes tout à l’heure, mais il était encore très loin du compte. La colère lui montait aux joues. — Arrête. Tu sais très bien que ce n’est plus toi qui parles. — C’est quoi, alors ? C’est qui ? — Tu sais très bien ce qui est en train de parler. Tu devrais aller dormir. Demain nous parlerons de tout ça. Au calme. Miller passa l’extrémité de ses doigts sur les coutures de son fauteuil. Le contact du tissu lui procura une vague sensation de dégoût. Ni lui, ni elle, n’avaient besoin de ça. Juliet non plus. Mais il ne parvenait pas à se calmer. Marla jeta le contenu de son verre dans le pot du ficus. Miller se mordait les lèvres. Il crevait d’envie d’aller s’excuser quelque chose d’étrange l’en empêchait. L’envie de savoir. La jalousie. C’était une de ses toutes dernières soirées, et ils étaient plongés en pleine scène de ménage. Il alluma une autre cigarette. Il réprima pour le moment l’envie de prendre une nouvelle bière dans le frigo — la dernière, s’il tenait bien le compte —. À ce moment précis, Miller aurait encore pu se donner l’illusion de retrouver son calme. Sa femme était là. Aux dernières nouvelles, elle l’aimait. Du moins, c’était encore à l’ordre du jour il y avait moins de trois mois. Mais elle était au courant d’une chose. D’une chose que seuls lui et Stan savaient. Il se radoucit. — Qu’est-ce que tu sais, au juste ? Marla se mordit les lèvres. Ses yeux s’étaient humidifiés et elle renifla. Le peu d’alcool qui était passé dans cette petite gorge suffisait à faire trembler sa voix. — Je sais que tu es malade et que c’est grave. Avant qu’il ait eu le temps de dire quoi que ce soit. Affirmer ou nier, elle reprit, avec une voix de robot, le regardant droit dans les yeux, s’efforçant de ne pas ciller. — Je sais que tu as souscrit au contrat ALIVE de Life Ex. Nom de Dieu, comment tu as pu décider ça sans m’en parler ? 169 Il rougit et se rendit compte que son dos ne lui faisait plus du tout mal. — Je… J’allais t’en parler. Elle haussa les épaules et poursuivit. — Je sais que tu as un cancer. Que ton cas est sans espoir… Je sais qu’on te donne à peine six mois. Je sais aussi que tu ne t’es jamais fait à l’idée… — Nom de Dieu… C’est Stanley qui t’a raconté ça ? Elle ne répondit rien. Miller revit la scène, dans le bureau de leur médecin, l’ami de la famille, tout à l’heure. Le bon vieux Stan, ce cher, très cher ami…Stan avait pris un air lugubre. C’était une charmante attention. Il montrait à Miller quelle gueule il aurait le jour de l’enterrement. Satané fils de pute. Ils se faisaient jusqu’alors face, de part et d’autre de son bureau, et Stan avait gardé son attitude professionnelle : mains jointes, petites lunettes. Son nœud de cravate, comme toujours, n’était pas une réussite. Miller, Dieu sait pourquoi, avait reporté toute son attention sur ce nœud de cravate, sur ce col de chemise amidonné avec amour par Emma, la femme de Stan. Elle était allée à la fac avec Miller. Une fille gentille. Très gentille. Un peu nunuche, certes… Stan avait rompu le cérémonial. Il s’était levé de sa chaise pour rejoindre Miller de l’autre côté. Il avait franchi la frontière : plus de diplômes, de connaissances scientifiques, de statistiques. Juste un ami qui étreignait un ami, qui avait desserré sa cravate pour chercher un peu d’air en contournant son bureau en chêne, un meuble prétentieux qui devait valoir dans les sept mille dollars. Un vieil ami, un frère. — Sois courageux, Tom. Je suis avec toi. — Ne dis rien à Marla, Stan. Je t’en prie. Laisse-moi le temps. Il avait senti les mains de Stan se crisper, lorsqu’il avait dit ça. Il avait pris cette réaction pour une émotion triste. Pour un sanglot viril. « Ne dis rien à Marla, Stan… ». Marla était là, en face de lui, et le regardait de ses grands yeux bleus détrempés. Il ferma les siens. — Comme tu veux, Tom. Bien sûr. Pourquoi voudraistu que je lui en parle ? Peut-être parce que t’avais juste envie de célébrer la grande nouvelle avec elle, enculé. Allez, un peu de patience, toubib, mon ami, mon frère. Dans six mois, d’après toi, je ne serai plus là et tu pourras larguer ton laideron stérile, t’installer dans mon lit et te faire sucer le gland par ma femme. — Depuis combien de temps vous couchez ensemble ? Depuis combien de temps, merde ? 170 Marla se redressa, prit une expression de colère absolue. — Pauvre crétin… Il la gifla. Marla se figea net. On aurait dit qu’il venait de briser une poupée de porcelaine. Il était horrifié. Il avait projeté, ce soir, de rentrer, de serrer sa fille dans ses bras. Il aurait dîné ; tard, avec sa femme. Ils auraient bu du vin, du Chardonnay. Il avait répété ça, tout à l’heure, à la gare, avant que le geste du gamin n’ait provoqué ce stupide retard, avant qu’il ne doive téléphoner à la pharmacie. Il connaissait la séquence par cœur. Là-bas, Miller aurait aussi bien tenu l’alcool que le Consul dans Sous Le Volcan. Au terme de ce repas déchirant-larmoyant, il aurait tout dit à sa femme. Oui, il était malade depuis des mois, oui, il était théoriquement condamné. Oui, il ignorait encore tout cela il y avait quelques heures. Il était désolé que les dernières semaines aient été si moches. Elle aurait pleuré, beaucoup pleuré. Il aurait pleuré aussi. Ils auraient fait l’amour. Mais juste avant, ou bien juste après, il lui aurait appris, comme un miracle, qu’il venait justement (enfin le hasard n’y était pour rien) de modifier son contrat de Life Ex. Qu’il venait de souscrire à l’option ALIVE. Du reste, cela aurait dû se passer de cette manière. C’était Marla qui avait insisté pour inclure cette clause dans leur contrat de mariage. Du temps romantique et révolu où ils s’aimaient d’amour, d’eau fraîche et d’espérance. Elle lui avait dit « je veux que ça dure toujours comme ça. Toi, moi. » C’était bien avant la naissance de Juliet. A suivre 171 christophe siebert une chance sur six (episode 7) 43. 3 JANVIER 2006 Toulouse, le 3 janvier 2006 Cynthia, ma chérie, mon bébé, Les semaines, mois, années passent et je ne reçois, jamais, aucune nouvelle de toi. Rien, aucune information, aucun commentaire, aucune réponse à mes propres envois. C’est difficile, de ne pas se sentir triste et déprimé. Je ne sais même pas quels sont tes sentiments à mon égard, je ne peux qu'en saisir le caractère négatif. Je tente de deviner. Le mépris, le dégoût, la haine pure et simple. Je ne sais pas. Je penche pour le mépris, le dégoût ; s’il s’agissait de haine tu m’aurais écrit, téléphoné, retrouvé peut-être, tu aurais été motivée, poussée par l’envie de me cracher au visage tout ce que tu penses de moi. Mais là, rien. Le silence, le néant. Le mépris. Le dégoût. Tu n’es pas venue au rendez-vous que je t’ai fixée. Je sais, je me répète. Mais c’est le rôle de ton vieux père, non, de radoter ? Je ne te fais aucun reproche. Tu es grande. Tu es grande, n’est-ce pas ? Où en es-tu ? Tu as passé ton bac, tu l’as eu ? Tu es à l’université ? Tu travailles ? Tout ce que j’ignore de toi et que j’aimerais tant savoir. Ton visage, je l’oublie. Tous ces coups que je reçois dans la tête, je crois que ça perturbe ma mémoire. Je vais bientôt mourir, tu sais. David est de plus en plus exigeant, et je comprends de moins en moins ce qui me lie à lui. Une partie de moi se révolte, hurle de rage, voudrait le tuer, et fuir ; pourtant je reste, je me soumets et j’étouffe aussi fort que je peux cette subversion, jusqu’à ce qu’elle crève. J’aimerais tant te voir avant de mourir. J’ai tant de choses à t’expliquer, à justifier. Tant de choses... Je n’ai pas été un bon père ; je ne suis pas un bon 172 amant ; je ne crois pas, en définitive, avoir une quelconque valeur comme être humain. Si je devais être jugé maintenant, ça ne serait ni l’enfer ni le paradis, je ne suis rien d’assez virulent pour mériter l’une ou l’autre de ces deux fins ; non, simplement le purgatoire éternel, une étendue grise et tiède qui sera comparable à ce qu’a été ma vie. J’aimerais te dire ce qui se passe dans ma tête. La culpabilité, la terreur. Les pensées coupables, les pensées mauvaises. Sais-tu ce que c’est, d’être amoureux de ce qui est interdit ? Et de détester ce qui est promis ? Ta mère – ma femme –, je la détestais. Non, même pas. Je la considérais avec indifférence. Elle ne faisait rien de bien, elle ratait tout, elle n’avait rien pour plaire à un homme comme moi. J’ai aimé des filles que je n’avais pas le droit d’aimer ; et puis j’ai aimé David, qui profane mon corps et détruit ma raison, petit à petit. Il me fait du mal, il m’abîme, et moi je suis amoureux de lui, je l’aime comme je n’ai jamais aimé personne. Il est la personne la plus importante de mon univers. Il m’a émasculé, pratiquement ; je ne peux plus marcher normalement, je ne peux plus mâcher ; je suis une collection de douleurs et de stigmates. Je l’aime, du plus profond de mon être. Comment est-ce possible, cela ? Aimes-tu quelqu’un ? Aimes-tu un monstre ? Ou bien es-tu comme ta mère, sèche et banale ? Réponds moi. Réponds au moins à cette question-là... Ton père qui t’aime. 44. 6 JANVIER 2006 http://www.tousvosforums.com/lavieestunemaladie ; topic : présentation des membres ; pseudo : rage Je sais pas par quoi commencer. J’ai lu vos histoires, la mienne est trop banale, tout est pareil, quoi. Putain comment c’est trop vrai le nom de ce forum. Je vais pas me la jouer mes parents me comprennent pas, à l’école on m’aime pas, j’ai pas de mec, je suis grosse, blablabla. Y’en a peut-être pour qui c’est vrai mais moi ça serait un pur pipeau. Mes parents me comprennent pas parce que je leur décroche pas un mot et que je les emmerde, à l’école je fous rien et je fais la gueule alors j’ai des sales notes et je passe pour la connasse de service et aussi pour une pute parce que j’ai eu ma période « je me fais sauter par tout le monde », et je suis ni un thon ni une bombe. J’ai une vie banale, une vie de merde banalement de merde, quoi. C’est juste que ça me fait trop chier, de vivre. 173 D’avance, me faites pas chier avec vos désespoirs plus gros que le mien, s’il vous plaît. J’espère que je me suis pas trompée d’endroit. C’est une meuf qui m’a parlé de ce forum. Je veux pas de la compréhension, ni de putain de condéscendance. Je sais pas ce que je veux, au juste. Je veux raconter ma vie. Je veux crever. Je sais pas comment. J’aimerais bien m’allonger, penser à des trucs chouettes, penser à David, et juste pas me réveiller. Ca serait top, comme mort. Y a les médicaments mais c’est grave dangereux. Je veux pas me réveiller à l’hosto, ou me gerber dessus, ou me péter un truc du cerveau et devenir maboule. Ca serait trop glauque. Je veux mourir en douceur, sans souffrir. Souffrir, j’en ai marre. Ma mère elle est médecin, ça serait facile de piquer des trucs mais, je sais pas, j’ose pas. Vraiment, j’ai grave, grave peur de me louper. Y’en a qui ont déjà essayé et qui se sont ratés ? Comment ça se passe, après ? On se fait coller en psy ? Il se passe quoi au juste ? Putain comment j’aimerais sortir de mon corps, de ma peau et tout. Et entrer dans une autre, ou alors devenir un arbre ou un caillou. Enfin, un truc à qui il n’arrive rien de rien. Quand j’ai fugué je me suis faite violer par trois enculés. Ils sont en taule maintenant. J’ai fugué parce que l’homme que j’aime est un dingue, un monstre. Il me tapait sur la gueule et il me violait pendant que son copain nous filmait. C’était il y a plus de six mois, tout ça. J’y pense encore à ce salopard, à ce monstre. Il me manque. Mes parents me prennent pour une dingue, je suis bouclée à la maison, je n'en sors que pour aller en cours, c’est tout. Ca fait longtemps que j’y pense, à mourir. J’y pensais déjà avant de rencontrer David mais j’avais les moyens de pas trop y penser. Je baisais n’importe qui, n’importe comment, ça me vidait la tête, je ne pensais plus du tout, plus à rien. Et puis y’a eu David, il m’a tellement remplie que j’avais plus envie de mourir. J’avais envie d’accélérer le temps jusqu’au prochain rendez-vous. Il me faisait mal et tout mais c’était chouette. Il se passait un truc dans ma vie, même si c’était trop glauque, c’était quelque chose, déjà. Ensuite c’est devenu moins classe, et puis c’est devenu carrément grave, et il a été trop loin. Il tapait trop fort, me faisait trop mal, limite torture, quoi. Alors l’envie est revenue. Mais je m’exprime mal, en fait c’est pas l’envie de mourir que j’ai, c’est juste que j’ai pas envie de vivre. J’ai envie de parler à des gens comme moi, c’est pour ça que je suis ici. 174 45. 2 MARS 2006 http://www.tousvosforums.com/lavieestunemaladie ; topic : demain je le fais ; pseudo : rage Samira, tu m’impressionnes trop. Putain comment j’aimerais avoir ta volonté. Grave. Je te souhaite très bonne chance pour demain. J’aurais bien aimé venir te voir, moi aussi. J’aurais trop aimé te serrer dans mes bras. Peut-être tu m’aurais donné la force de faire comme toi ? C’est trop la classe, que des gens du forum viennent te voir à ce moment-là. Tu as l’air contente. C’est cool. Comment j’aimerais savoir ce que tu éprouves ! Demain, je penserai grave à toi. A l’école j’ai parlé du suicide, pour voir. Pour voir ce qu’ils pensent les cons qui n’y connaissent rien. Putain j’ai été effarée. Ils sont trop graves tous ces connards. Ca m’aurait fait rire si ça avait pas été aussi gravement pathétique. Y’avait deux camp, quoi. Ceux qui trouvaient que le suicide c’est un acte de courage et ceux qui trouvaient que c’est une preuve de lâcheté. Ils sont trop, trop cons. Moi je ne disais rien. Je les écoutais et je les méprisais, je ne voyais rien d’autre à faire. Y’en a pas un qui a compris. Y’en a pas un qui a eu une bonne idée ou dit un truc juste. Que des conneries, toutes plus graves les unes que les autres. C’est trop pas une question de courage ou de lâcheté, le suicide, c’est trop pas ça, ça a grave rien à voir. Y’a un mec qui te plaît, tu vas lui parler ou pas, t’oses ou pas, mais c’est juste que t’as pas le choix. Soit t’es du genre à aller dire à un mec qu’il te plaît, soit t’es du genre à l’aimer en silence et à fermer ta gueule. Devant cette maladie de merde qu’est la vie, c’est pareil. Soit tu prends les devants et tu en termines au plus vite et de la façon la plus efficace et la moins dégueulasse, soit tu fermes ta gueule et tu souffres en silence. Je crois pas, moi, qu’il y a des gens qui veulent vivre. Y’a juste ceux qui peuvent mourir et ceux qui peuvent pas, c’est juste ça. Moi je sais trop pas où je me situe. C’est pas aussi facile que ça, quoi. Ca vous branche la roulette russe ? Putain moi j’aimerais trop essayer. Ca c’est une trop belle façon d’en finir. Mon fantasme c’est de le faire avec quelqu’un qui me baise. A chaque coup de queue qu’il me met j’appuie sur la gachette. Je pense à ça quand je me branle. J’espère que je vous choque pas. Je sais pas si je pourrais le faire en vrai. Y’en a qui ont essayé la roulette russe ? Ca doit être trop classe. Enfin bref je m’égare. Je t’admire trop Samira. C’est trop beau ce que tu fais, c’est grave un exemple pour nous 175 toutes. Quand je serai en cours demain à quinze heures toute mon énergie sera tournée vers toi, que tu réussisses. Le plus rageant c’est que tu viendras pas nous dire ce qui s’est passé, comment ça c’est passé. C’est pour ça que c’est trop génial que des filles du forum soient là-bas avec toi au moment où tu vas le faire. J’ai hâte de lire ce qui ce sera passé. J’ai trop, trop hâte. 46. 16 MAI 2006 http://www.tousvosforums.com/lavieestunemaladie ; topic : amours déçus ; pseudo : rage Je ne suis plus au lycée. J’ai plus la force d’y aller. De toute façon j’ai dix-neuf ans alors personne ne peut rien dire et surtout pas mes parents. Dix-neuf ans en terminale ils me l’ont assez répété que c’était trop la honte et tout et tout. Bah voilà c’est plus la honte. De toute façon je sors plus de chez moi alors je peux rien faire que leur fasse honte à ces deux connards. Je ne sors plus de la maison. Pourtant ils m’empêchent plus. Ils croient que c’est terminé. Je veux dire ils croyaient que quand j’avais fugué c’était comme si une espèce de maladie, comme un virus, quoi, me rongeait la tête, et maintenant ils pensent qu’au bout de presque un an c’est terminé, la maladie est partie. C’est grave, comme ils sont cons. C’est pas une maladie, c’est ça qu’ils comprennent pas. C’est vivre qui est la maladie. Je reste tout le temps dans la chambre. Je me souviens, entre dix-sept et dix-huit ans je notais les jours qui me séparaient de ma majorité. J’étais grave conne, je m’imaginais qu’il allait se passer un truc le jour de mes dix-huit ans. Que genre j’allais tout péter et partir en gueulant. Ou qu’une tumeur au cerveau m’emporterait. Il ne s’est trop rien passé, évidemment. Je me réveille vers onze heures du matin. Ils sont déjà partis travailler. Ils sont médecins tous les deux, dans le même cabinet, en ville. Je reste au lit une heure ou deux, des fois plus, j’ai pas faim, pas sommeil, j’ai envie de rien. J’ai aucune envie. Je me masturbe des fois, pas tout le temps. Après je me lève et je mange ce qu’il y a, après je remonte dans ma chambre. Je ne fais rien. J’écoute de la merde à la radio, je pense à David. Je me dis que je le hais, que j’ai pas la force de le revoir. Je sais pas pourquoi j’ai pas la force. De toute façon j’ai trop pas de force, trop pas d’énergie, pour rien faire. Je suis molle, c’est grave. Mes parents font semblant de s’inquiéter mais il s’en foutent mortel en vrai. Les heures passent. Je pense à ma vie, j’écris des lettres à David mas je les envoie pas, je m’allonge et je me dis que je 176 suis morte. Je fais des siestes, je note mes rêve. Le soir quand ils rentrent je ferme la porte de la chambre à clé. Ils viennent me parler des fois, ça me fait trop chier et ils restent pas longtemps. Ils ont la trouille de moi je crois, ou alors ils me détestent, enfin en tout cas je m’en fous grave. J’écoute de la musique bien fort, pour pas les entendre vivre. C’est trop écoeurant de les entendre parler, discuter de leurs vies de merde, préparer le repas, tout ça. Je suis obligée de descendre manger avec eux, ça me gave trop. Ils parlent, ça m’intéresse trop pas. Après le repas je monte dans ma chambre, je dessine des trucs, j’écris genre des poèmes, et puis rien d’autre. Je lis des bouquins des fois mais ça m’intéresse pas, c’est juste pour attendre d’être fatiguée. Je me couche vers deux ou trois heures du matin et quand je m’endors c’est l’aube, souvent. Je mate les rayons de soleil qui entrent dans ma chambre, tout est gris. Je pense ça y’est, encore une journée. J’espère que je me réveillerai pas, et je ferme les yeux. David, à la fois il me manque et à la fois je le déteste, j’ai envie de le tuer. C’est space, au départ c’est de lui que je voulais parler, et finalement j’ai parlé que de moi. Trop la fille suicidaire mais mégalo, n’importe quoi, quoi. 47. 17 MAI 2006 mail to : [email protected] mail from : [email protected] subject : si tous les porcs du monde voulaient se donner la main… Nom de Dieu, l’échangisme ça marche du tonnerre ! Plus que ça, même ! Aurélie se fait tringler par des hordes de cochons, et moi je suis submergé par les chaudasses de tous horizons. Enfin, bon, j’exagère un peu. En tout cas, on a fait pas mal de partouzes, un peu dans tous les styles. Si ça t’intéresse, je peux te faire une rapide étude socio du truc. D’un côté tu as les partouzards à l’ancienne, la quarantaine, un bronzage d’institut de beauté, de la chirurgie esthétique et des faux seins, des cosumes de merde, du champagne tiède, on se croirait dans un soap-opera sauf qu’ils sont tous à poil. Les feux de l’amour porno, ce genre. De l’autre tu as la partouze intello, celle-là se passe en appart et y’a plus de mecs que de filles, et ça cite Bataille et tous les dingos du cul, on s’y fait chier comme des rats et y’a pas moyen de filmer ou quoi, vu que c’est là-dedans que tu trouves toujours une semi-célébrité à la ramasse, style le futur-ex Houellebecq, c’est-à-dire la même tête de clébard sur l’autoroute mais juste un peu moins de talent 177 et de hype, et enfin tu as les touzes des beautiful people, c’est-à-dire les seize-vingt ans, pétés de thunes, dans des apparts assez grand pour y ranger tous ceux que j’ai occupés depuis que je suis adulte, et encore il resterait de la place. Là c’est came, porno (sur les écrans aussi bien que en vrai, les filles sont de pures chiennes et les mecs de vraies brutes) et narcissisme. Perso, j’en aime aucun des trois. Quant à l’échangisme classique, deux ou trois couples, un appart, du champagne, des petits fours et chacun choisit sa chacune en écoutant Moby éclairé par des bougies, bof aussi. Enfin, on a fait ça pendant un an, quoi, voire un peu plus, et on a aussi écumé les boites et tout, ça fait qu’on commence a être un peu connus dans le milieu. On a aussi organisé deux ou trois soirées, rien de terrible. Non, ce qui nous fait tripper maintenant qu’on a tout essayé du côté de l’échangisme, mélangisme, collectivisime, tous les communismes du cul, c’est de filmer les autres, enfin presque les autres. Je t’explique. On a un truc qui s’appelle l’invité de la semaine, sur notre site, on a piqué ça à des sites pornos pros. Des mecs et des nanas nous envoient des photos, des mails, des vidéos, etc. Nous, on sélectionne celui ou celle qui va passer chez nous, et là on se filme en train de le tringler. Ah, oui, au fait : je suis devenu omnivore, avec toutes ces expériences. Le seul truc que je fais pas, c’est sucer. Mais enculer, me faire enculer ou me faire piper par un mec, pas de souci. Ca t’en bouche un coin, pas vrai ? Et bin, moi aussi ! (et pas seulement celui auquel tu penses, cochonne !) On s’est fait une quinzaine de films comme ça. C’est chouette, à chaque fois. Les meufs se donnent à fond dès qu’il y a une caméra, et vas-y que je veux tout recevoir en pleine poire, et vas-y que je veux que tu me lèches la chatte pendant que ta femme m’encule avec un gode-ceinture, enfin si leurs mamans voyaient ça elles les reconnaîtraient pas ! Les mecs c’est autre chose, ils ont souvent les yeux plus gros que les couilles. Je veux dire qu’ils n’arrivent pas tous à bander devant la caméra. Là c’est plus chaud, mais Aurélie est devenu la reine des suceuses. Elle ferait triquer un eunuque à la retraite ! Au fait, pendant que j’y pense, tu voudrais pas venir faire l’invitée de la semaine, toi, un de ces quatre ? J’en ai parlé à Aurélie, elle est d’accord. Des gros bisou baveux de gros cochon ! Marc. 178 48. 3 JUIN 2006 http://www.noircommelavie.blogspot.com Je commence ce truc dans l’espoir de dêméler un peu les fils du bordel dans lequel je me trouve. Ce n’est pas vraiment destiné à être lu, encore moins commenté, mais, par une bizarre perversion, j’éprouve la nécessité de rédiger mes pensées ici et pas sur un calepin, par effet de mode peut-être, j’en sais rien. J’avertis mes éventuels lecteurs que j’ai évidemment modifié les noms. J’ai trente-huit ans, je suis marié depuis douze ans, j’ai un enfant de huit ans, j’aime ma femme, j’aime mon enfant. Mon supérieur hiérarchique est tombé dans le coma, il y a quelques jours, juste devant moi. Nous étions assis face à face, dans un bistrot, et nous discutions d'une enquête complêxe sur laquelle il voulait que je le seconde. Ca signifait une quasi promotion. L’instant d’après, son visage était écrasé contre la table et du sang lui coulait des oreilles. Plus tard, les médecins ont dit qu’il s’agissait d’une rupture d’anévrisme. J’ai décidé d’aller rendre visite au commissaire chaque jour, mais ça ne change rien à son état. Ca me rend triste, j’ai l’impression de voir mon père. Je lui ai parlé. Ca m’a mis en colère, je lui en veux d’être absent, d’être dans le coma. Je me sens désemparé, surtout avec un dossier aussi sordide et aussi pourri. Mes collègues m’offrent leur aide, mais ils ne peuvent rien faire, ils ont eux aussi leurs propres dossiers pourris. Le successeur de mon patron ne comprend rien à rien, c’est un type parachuté là en catastrophe, il ne sert à rien d’autre qu’à poser des questions vides de sens et à ralentir tout le monde. Je ne l’aime pas, c'est stupide de penser à lui de cette manièrelà, c’est mon supérieur, je n’ai pas à l’aimer ou à ne pas l’aimer, mais c’est comme ça. J’aimais le commissaire Mattaeï. J’enquête sur un réseau de vidéos pédophiles, mais pas uniquement. Il y a des vidéos de diverses sortes, sexe, violence, mineurs, majeurs, leur seul point commun est que ce qui s’y déroule est affreux, et illégal évidemment. Contraire, de toute façon, à toute dignité. L’enquête établit, péniblement, que ces diverses cassettes, ces divers fichiers informatiques, ces divers DVD, saisis en des cirsconstances différentes, proviennent d’une même source, que nous n’arrivons pas à identifier pour le moment. Je suis fatigué, je ne pense plus qu’à ça, je ne sors pas du travail. Quand je suis chez moi, j’y pense, je regarde 179 les pistes, je compare les témoignages, j’appelle des gens avec mon téléphone privé. Même au bureau je laisse tomber les autres dossiers, tout se casse la gueule. J’ignore pourquoi je fais ça. Voici un extrait de catalogue trouvé sur Internet : - Rein : 5000 euros (âges : 12-16 ans, 30-40 ans) - Oeil (paire) : 3000 euros (âges : 15-20 ans, adultes ; couleurs : verts, bruns) (etc. ; le catalogue en question propose aussi des films. Le fichier était crypté, nous l’avons intercepté en pièce jointe adressée à une adresse e-mail n’appartenant à personne. Dans ce genre d’affaire, c’est courant. Les email, les sites, rien n’appartient à personne. C’est comme enquêter dans un musée de cire...) 49. 22 SEPTEMBRE 2006 Cassette non numérotée et intitulée « le vrp / copie de travail / non monté » Ca n’est pas une cassette super-huit mais une cassette de caméra vidéo professionnelle. La qualité de l’image est comparable à du seize millimètres. De plus, contrairement aux cassettes précédentes, il y a du son. Premières séquences : l’image, flottante, la caméra est portée, montre en gros plan le corps d’un homme attaché à la croix. La croix est disposée à l’horizontale dans le grenier vivement éclairé (mais les sources de lumière, multiples étant donné qu’il n’y a presque pas d’ombre, sont hors champ). La caméra explore en gros plan tout le corps de l’homme, habillé. L’homme pousse des cris, se débat mais il est attaché à la croix au moyen de chaînes cadenassées ainsi que l’était quelqu’un d’autre sur le film de la cassette numérotée 38. Le visage de l’homme porte de multiples traces de coups. Il a l’œil droit poché, le nez cassé, peut-être la mâchoire fracturée. Cependant il trouve l’énergie de crier de fureur, d’insulter plusieurs personnes, de cracher en direction de la caméra. D’autres plans plus stables, filmés à la manière de futurs plans de coupe, montrent à diverses distance, filmé dans son ensemble ou de façon détaillée, le portique en bois sculpté sur lequel sont suspendus les outils en or, déjà vu dans la cassette numérotée 37. Séquences suivantes : une altenance confuse de plans larges et de plans rapprochés, de zooms, de plans fixes et de travellings à l’épaule, montrent de manière fragmentée une action simple. Un homme encagoulé, le même que celui qui sodomisait ou torturait sur certaines cassettes précédentes, utilise une visseuse électrique 180 pour enfoncer trois longues vis aux extrémités latérales et inférieures de la croix, dans les filetages prévus à cet effet et à travers les poignets et chevilles de l’homme qu’il crucifie. L’homme perd son sang en abondance, cependant aucune artère n’est percée. On entend nettement le cartilage brisé par la vis. On entend aussi, bien entendu, des hurlements à divers degrés de stridence et de volume selon les séquences. Le visage de l’homme est déformé par la douleur. Il n’y a plus de trace de colère. Séquences suivantes : L’homme est crucifié mais encore en vie. Il est couvert de sang, ainsi que le sol. L’homme qui a enfoncé les vis essaie de soulever la croix pour l’emmener en position verticale. C’est très dur. Il n’y arrive pas. Au bout de plusieurs essais, couvert du sang de sa victime, il abandonne. Tout au long de ses tentatives, sa victime tentait de ne pas bouger, ou d’accompagner les mouvements erratiques de son bourreau en plein effort, probablement parce qu’à chaque embardée que faisait la croix, soulevée ou remise à terre, les vis fouillaient un peu plus la chair qu’elles traversaient. La séquence suivante est en plan fixe. La caméra, simplement posée à terre, filme les deux hommes, le bourreau et son complice (son complice est l’homme qui se faisait sodomiser et torturer sur les cassettes précédentes). Ils soulèvent la croix, et parviennent à l’installer en station verticale puis à la hisser au-dessus du sol pour enfin la planter dans son socle. L’ensemble tangue un peu puis se stabilise. L’homme crucifié gémit et laisse une piste de sang qui se mèle au flaques déjà présentes au sol. Des gouttes épaisses recouvrent rapidement le socle de béton gris dans lequel la croix est fichée. Séquences suivantes : on assiste à la mort de l’homme. Des plans courts, tantôt larges tantôt rapprochés, il y a même quelques close-up, qui couvrent de façon fragmentaires les quelques heures d’agonie de l’homme. Séquences suivantes : L’homme est mort. Son bourreau à l’autre bout du grenier joue aux fléchettes en prenant son corps pour cible. Sur douze fléchettes quatre atteignent leur cible. Une au ventre, une à la cuisse, une au front (mais elle rebondit contre l’os et retombe), l’autre à la main juste à côté de la vis. A suivre 181 christophe siebert metaphysique de la viande (épisode 1) PREMIERE PARTIE Le silence, on entendrait les mouches voler, s’il y avait des mouches. Trois murs tapissés de lin, le quatrième lambrissé de frêne et semé d’appliques comme des meurtrières opalescentes, une moquette alternant larges bandes coquille d’œuf et rayures crème, un plafond blanc avec au centre un demi-globe en verre fumé, un lit queen size tapi à ras du sol contre le mur lambrissé et couvert d’une couette sable et de trois coussins blanc cassé, en face deux hautes portes-fenêtres masquées de rideaux plissés en coton écru encadrant un bureau en frêne décoré d’une lampe de chevet à abat-jour carré et blanc, au mur de gauche la porte d’entrée et une patère en frêne, au mur de droite une penderie encastrée à porte coulissante blanc mat avec une psyché sans cadre et l’entrée de la salle de bain, deux escarpins Repetto en cuir noir, de style charleston, à talons de neuf centimètres, posés sur la moquette parallèles l’un à l’autre et perpendiculaires au lit, une robe Ralph Lauren en jersey noir à profond décolleté étendue sur la couette, accompagnée d’un blazer bleu marine pour femme sans un pli et de même marque, une paire de bas Chantal Thomass en fine résille anthracite, enroulés et posés sur les coussins, sous le bureau un sac de voyage Vuitton en cuir brun, fermé, sur le bureau un sac baguette Lancaster de couleur réglisse muni d’une longue anse en chaîne et arboré de quatre pompons noirs, au sol près de la porte de la salle de bain un soutien-gorge et un string Nina Ricci, tous deux en tulle noire brodée d’un motif floral et décorés de dentelle ardoise, dans la salle de bain un lavabo, une baignoire, un épais tapis de bain, les WC, tout ça immaculé, sec, propre, lumineux, et une cabine de douche fermée qui laissait entendre l’eau couler et rebondir et laissait voir 182 une ombre mouvante à travers le plexiglas translucide envahi de fausses gouttes figées dans sa matière et de vraies glissant à sa surface. En emboutissant la serrure après un mouvement de balancier, la boule en acier du bélier bâti comme un rail et propulsé par trois CRS fit un bruit de marteau qui percute une enclume et la porte craqua comme un arbre abattu, vola en arrière, claqua contre un mur. Elle ouvrit sur un hall réduit à l’état de carcasse. Tout était noir. Au fond, à neuf ou dix mètres de l’entrée, un escalier émergeait du noir et faisait face à la rue. Les hommes en tenue de combat s’écartèrent et posèrent le bélier ; d’autres prirent place et s’agenouillèrent, lance-grenades à l’épaule. Aux ordres ils tirèrent. Les projectiles partirent en cloche et s’abattirent au pied de l’escalier. Les grenades éclatèrent. Il y eut un bruit mat et bref. En plusieurs foyers une brume blanche gicla dans l’obscurité et se répandit vite, effrayant des blattes qui se mirent à courir en tout sens. Quinze CRS, combinaison pareballes, bouclier souple et transparent, longue matraque noire, masque à oxygène, intensificateur de lumière, visière baissée, envahirent le squat. Leurs semelles écrasèrent les insectes en panique. Après s’être resservi un verre, Claude Zecke reposa le carafon. Il avala la moitié du verre. C’était un verre de petite taille et de forme évasée, un genre de ballon. La surface était grise à force de passages dans le lavevaisselle. Le vin était clair. Il sortit son carnet, fit défiler les feuillets jusqu’à arriver à une page blanche, et nota ceci, jetant des coups d’œil à ce qu’il avait précédemment griffonné sur une serviette en papier : SPIDERMAN L’homme à Reigner L’ohm a régné L’homard est niais L’eau, ma reine y est Omar hait nier Au marais, niais ! Oh ! Marraine ! Yeah ! Ho, ma raie niée Il relut son poème. Il but un verre de vin, en but un autre. Il rangea le carnet dans la poche intérieure de son manteau, qui était accroché au dossier de la chaise. Il attendit. Un moment après il se leva, enfila son manteau et descendit en salle de repos. Il regarda d’un côté et de l’autre. Il entra dans le vestiaire des filles, sortit un cadenas de la poche gauche et s’en servit pour 183 s’enfermer dans la petite pièce. C’était une petite pièce rectangulaire, aux murs blancs, au sol carrelé. Contre l’un des grands murs il y avait un banc en bois. Contre l’autre il y avait une série de casier fermés par des cadenas à clé ou à combinaison. Sur le mur qui faisait face à la porte, il y avait une ouverture qui donnait sur une douche. Jean-Jacques Népès tourna à gauche au croisement, s’arrêta au feu rouge, repartit au vert, s’engagea dans la rue et au bout de la rue il y eut sa maison flanquée d’autres maisons. Il était en chemise et pantalon noirs à 235 euros l’ensemble, ceinture fine en cuir anthracite à 75 euros, cravate mauve rayée bordeaux à 75 euros aussi, chaussures pointues noires à 225 euros, veste noire à 135 euros. C’était la tenue préférée de sa femme. Elle la lui avait offerte à Noël. Il avait employé une partie des jours suivants à vérifier combien tout cela avait coûté. Il était rasé de près. Ses cheveux étaient nets et ses mains manucurées. Ses yeux fuyaient. Il avait quarante-deux ans. Il conduisait une Toyota Aygo bleu terne très propre à l’exception de quelques moucherons écrabouillés sur le parebrise, près de la vignette d’assurance. Sa femme avait quarante-sept ans. Elle s’appelait Denise. Elle était proviseur de lycée. Elle gagnait 3200 euros bruts par mois. Il peignait. Il ne gagnait rien. Avant il était professeur. Il y a sept ans sa femme l’avait encouragé à quitter l’enseignement pour tenter de percer dans l’art. Ce fut un long débat. Il n’aimait pas la solitude, n’aimait pas travailler à domicile, n’aimait pas sa peinture, disait-il. Seul dans la maison il était fréquent qu’il parle tout seul, qu’il pleure ou qu’il hurle des insultes à son épouse. Ces moments d’isolement étaient les seuls où il élevait la voix. Ils avaient acheté la maison à crédit vingt ans auparavant et terminé de payer cette année. Elle avait 210 mètres carrés de surface habitable divisés en deux étages et sept pièces. On y trouvait des murs et des tapis de couleurs claires, des meubles Ligne Roset en ébène noir, bultex rouge brique ou acier chromé, des reproductions de Lichtenstein, Klein, Warhol, Soulages. Le jardin était séparé du trottoir par un muret en pierre de taille de un mètre de haut et une haie de deux mètres de haut en fusain du Japon. Debout dans le jardin on ne voyait pas la rue. C’était Denise qui avait choisi la haie. Lui aurait préféré sans. Ils avaient discuté. Elle avait eu gain de cause. Dans le jardin on trouvait un garage qui communiquait avec la maison, des massifs de fleurs, des arbres taillés, un barbecue en pierre, une table et quatre 184 chaises en teck, un chemin de gravillons et un autre de dalles, une petite piscine. Ils vivaient là avec leur fille de dix-sept ans, leur fille de quatre ans, leur chat de neuf ans. C’était un hôtel désaffecté depuis la fin des années quatre-vingt. Les fenêtres étaient murées depuis huit ans et depuis huit ans la lumière du jour n’avait pas pénétré. Il y avait une cave où personne n’allait plus après qu’une partie du plafond était tombée. Dans le hall, débris de meubles, gravats provenant d’un comptoir en ciment et vestiges de cloisons abattues étaient entassés sur les côtés. Des planches étayaient l’ensemble et dégageaient un chemin. Chaque étage comptait six chambres : deux doubles plus salle de bain, deux doubles plus douche, deux simples plus douche. Un étage sur trois avait l’eau courante, deux sur trois l’électricité. Là où l’eau n’arrivait plus, des plaques de plâtras, des débris de béton, des planches, des vieux vêtements, des livres collés et moisis remplissaient les WC, les douches et les baignoires, tout ça figé dans la même teinte gris fer. Souvent de la vermine en sortait, qu’il fallait écraser. Partout des caillasses ou des morceaux de bois encombraient le sol de ciment abîmé ; le plâtre et la peinture s’écaillaient au plafond et couvraient tout d’un tapis de miettes. Le mortier effrité déposait une suie grise sur les choses et dans les poumons. Zecke s’approcha d’un des casiers. Il sortit de la poche intérieure de la veste qu’il portait sous son manteau un segment de fil d’acier, qu’il utilisa pour ouvrir le cadenas qui condamnait le casier numéro six. Cela lui prit une quarantaine de secondes. Il rangea le fil et empocha le cadenas. Il ouvrit le portillon. Le casier contenait un jean taille basse décoré de papillons en paillettes, un chemiser rose pale, une veste en jean et un sac à main en faux cuir, noir, posé sur les vêtements. Il déplaça le sac et prit le chemisier en faisant attention. Il le porta à ses narines. Il sentit. Ca sentait le parfum. Il inspira fort. C’était un parfum doux, élégant et fleuri. Il tenait le chemisier d’une main. De l’autre il se tâtait la bite à travers le jean. Il flaira pendant une demi-minute. Il reposa le chemisier. Il sortit sa bite. Il était en érection. Il ferma les yeux et commença de se masturber. Ensuite il ouvrit les yeux et, se masturbant toujours, il alla à la douche. Il s’accroupit au sol et se pencha en avant. Il termina de se masturber. Il éjacula. Il se releva, se lava les mains, reboutonna son pantalon et sa ceinture, rinça le sperme à l’aide de la douche, retourna au vestiaire, 185 remis de l’ordre dans le casier, le referma, ouvrit et récupéra son cadenas, ouvrit la porte du vestiaire, jeta un œil, sortit. La famille Abdou occupait les six chambres situées au premier étage du squat. Ils étaient douze. Ils venaient de Tunisie. Ils séjournaient illégalement en France. Les femmes et les jeunes enfants mendiaient aux arrêts de bus, les enfants plus âgés dealaient ou volaient à la tire, les hommes trafiquaient des accessoires de voiture. Dans leur pays ils avaient été menuisier, garagiste, pompier, boucher, vendeur de chaussures. L’une des salles de bain servait au stockage des autoradios, un des WC à planquer la drogue. Au deuxième étage les familles Charkaoui et Zibi se partageaient les chambres doubles. Les Charkaoui étaient huit. Les Zibi étaient trois. Ils venaient d’Algérie. Ils séjournaient illégalement en France. Ceux qui avaient plus de treize ans travaillaient au noir dans un atelier de tissage de tapis, les autres trainaient. Dans leur pays ils avaient été restaurateur, gérant de vidéoclub, infirmier psychiatrique. Habib Yazidi occupait une chambre simple. Il avait cinquante-trois ans. Il était réfugié d’Afghanistan. Il avait été employé de banque. Son titre de séjour avait expiré. Driss Elabkari occupait l’autre chambre simple. Il avait dix-neuf ans. Il était Algérien. Il avait été garçon de ferme. Un tribunal avait ordonné qu’il soit reconduit à la frontière. Il faisait aussi l’objet d’un mandat d’arrêt pour vol avec violence. Il avait tapé un chauffeur-livreur à coups de barre de fer et pris son camion pour aller à la mer. Le troisième étage était le plus en ruines. Tous les murs étaient écroulés et en trois endroits charpente et toiture s’étaient effondrées. Pour boucher les trous on avait tendu des couvertures qu’on avait fixées avec du ruban adhésif marron, mais il fallait les remplacer chaque fois qu’il pleuvait trop. L’hiver dernier tout avait moisi. Le plâtre s’était dissous en plaques visqueuses, révélant des colonies d’insectes. L’odeur s’était incrustée. Ici elle était plus forte que le renfermé, la merde et la pisse qui imprégnaient le reste du bâtiment. Il n’y avait que trois occupants. Jose Embalo, seize ans, Espagnol, fugueur ; Cyril Villagrassa, vingt-trois ans, Français, RMIste, recherché par la police pour avoir participé à des cambriolages ; Emmanuel Ombric, quarante ans, Français, alcoolique, clochard. La femme sortit de la douche et s’enveloppa d’une serviette blanche brodée du monogramme de l’hôtel. Ses 186 cheveux noirs y coulaient comme des algues. Elle en fit une natte qu’elle enroula d’une serviette plus petite et de même couleur. Cela prolongea sa tête d’une corne molle. Elle rangea ses vêtements dans la penderie. Elle commanda à manger par téléphone. Elle parlait français avec un accent anglais. Elle dîna allongée sur le lit. Son repas se composa d’une salade de crudités, d’un verre d’Evian et d’un yaourt nature. Elle pria pendant quinze minutes, silencieuse, les yeux fermés, agenouillée contre le rebord gauche du lit, les mains jointes. Elle se coucha à vingt et une heures, éteignit la lumière, ferma les yeux. Dix minutes plus tard sa respiration ralentit. Elle s’éveilla à sept heures le lendemain, commanda par téléphone un petit déjeuner continental d’une voix que la nuit n’avait pas altérée, ne consomma du plateau que le thé et le jus d’orange et laissa le toast beurré, le croissant, la pomme, l’œuf coque et les mouillettes. Elle se doucha, s’habilla comme la veille, se maquilla, vaporisa autour d’elle un nuage de Coco Mademoiselle, sortit de la chambre. Le taxi la laissa rue Emile Richard, devant la porte numéro trois du cimetière Montparnasse. Elle entra. Elle avait un plan à la main. Son attention se portait au plan et au numéro des allées, pas aux tilleuls qui barraient les allées de leurs ombres, pas aux tombes, pas à celle d’Aloycius Bertrand dont elle n’avait sans doute jamais entendu parler, pas aux quelques admirateurs recueillis devant. Elle s’arrêta devant le tombeau de la famille Mallon, en ruine depuis cinquante ans, de forme ogivale, percé d’un vitrail brisé, parcouru de rouille, mauvaises herbes, bestioles en tous genres qui aimaient l’humide. Ca sentait le moisi, la pisse, le chien. Il y avait des tessons de canettes, opaques à force d’être là, figés dans la poussière qui figeait tout et pendouillait du plafond en filets gris, des grappes de mégots confondus avec la pierre, des graffitis délavés, des cailloux, de la terre, du papier toilette sale, des journaux froissés, un préservatif de la même couleur que le reste, des fleurs qui tomberaient en poussière si on les touchait. La femme marcha quelques pas au milieu des ordures qui ne semblaient pas la gêner. Elle passa la main sur des plaques de marbres et découvrit des noms. La pellicule marron moutonna, s’effrita, remplit l’air. Henri Mallon (1880-1952), Louise Mallon née Morlay (1884-1948), Claude Mallon (1913-1940), Jacqueline Mallon née Rivel (1916-1933), Norbert Mallon (1916-1922), Noémie Mallon (1919-1940). Elle demeura une vingtaine de minutes sans rien faire. Elle ne parla pas. Elle ferma les yeux une partie de ce temps. Elle renifla, à cause de la poussière peut-être ou bien d’une émotion. 187 Les Renault Master, Peugeot Boxer et Peugeot J5 de la Police Nationale et des CRS étaient arrivé à cinq heures quarante-cinq du matin. Ils s’étaient garé en partie dans la rue Adolphe Thiers et en partie dans la rue Jules Moch. Les deux rues, parallèles, étaient reliées notamment par la rue Barbieri où se trouvait le squat. Son accès était bloqué depuis l’arrivée des forces de l’ordre. A cette heure-ci le quartier était silencieux. Entre cinq heures quarante-cinq et six heures quinze, il passa deux voitures, qui ralentirent et dont les conducteurs observèrent le déploiement avec peu d’intérêt. Quelques fenêtres s’allumèrent aux immeubles. On écouta peutêtre France-Inter, ou peut-être RTL, ou peut-être rien du tout. Entre un lampadaire et un panneau de signalisation, une araignée acheva de tisser sa toile. En attendant les ordres, policiers et CRS avaient discuté et bu du café gardé bien chaud dans des thermos qui circulaient de mains en mains. Quelqu’un avait apporté un petit poste et mis Rire et Chansons. Gardiens de la paix et brigadiers souriaient de satisfaction en avalant le liquide fumant. A six heures quinze le brigadier-chef reçut l’ordre. Les lampadaires venaient de s’éteindre. Le ciel devenait de moins en moins noir, de plus en plus gris, à l’est des reflets roses et oranges donnaient du relief aux nuages, mais personne ne s’en aperçut. Elle flâna un moment dans le cimetière. Elle avait un appareil photo numérique de la taille d’un paquet de cigarette. Elle photographia des tombes et des arbres. Elle photographia de loin le Génie du sommeil éternel et des touristes qui se pressaient autour et le photographiaient aussi. Elle photographia la Séparation du couple dans les mêmes conditions. Il y aurait des têtes et des dos sur toutes ces images. Elle sortit par la porte principale et boulevard Quinet elle fut parmi la masse des piétons et le bruit permanent des voitures et des bus. Ca sentait l’essence. Elle contourna une énorme merde de chien couverte de mouches bleues. Elle tendit la main pour arrêter un taxi. Elle passa la journée dans les magasins des grands boulevards. Elle acheta des vêtements Ralph Lauren et des accessoires Christian Dior et Louis Vuitton. Le lendemain elle sortit d’un autre taxi au numéro soixante-seize de la rue Lafayette et photographia avec abondance la façade et la porte. Elle suivit quelqu’un qui entra et photographia le hall bien propre, les boites aux lettres, la cour intérieure avec les plantes dans des bacs vernis, l’escalier. A midi elle déjeuna du poisson dans une brasserie. Tout autour 188 d’elle, le bruit. Elle but de l’Evian, refusa la carte des desserts, accepta un thé. Elle passa l’après-midi au musée du Louvre. Elle déambula beaucoup, regarda peu. La baby-sitter était allongée pieds nus sur un canapé pourpre en forme de haricot. Elle regardait Reservoir Dogs sur l’écran plasma. Le son était très bas. Quand Jean-Jacques Népès ouvrit la porte elle se redressa et appuya sur le bouton pause de la télécommande. Le visage d’Harvey Keitel se figea en gros plan. – Bonsoir ! Sandra est endormie. Elle a bien mangé, tout va bien. Elle sourit. Il fit de même, plus ou moins. – D’accord, dit-il. – Votre femme est à son cours de danse. – Ma fille est sortie aussi ? – Oui, elle dîne dehors. – Ma femme t’a payée ? – Non, elle a dit que vous le feriez. – Bon. Il sortit son portefeuille et adressa un regard interrogatif à la jeune fille. – Euh, bin ça fera quarante-cinq euros s’il vous plaît. Ca fait deux heures que je suis là. Il lui tendit deux billets de cinquante. – Euh, vous vous êtes trompé je crois. Elle sourit et lui rendit le deuxième billet. Il secoua la tête. – Non, non. Garde tout. – Mais... je ne peux pas, c’est beaucoup trop... – Laisse tomber, garde tout, tu t’achèteras des DVD avec. Il sourit mais ses yeux restèrent éteints. Sa voix était dure. Leurs regards se croisèrent. Elle rougit. Il cessa de sourire. Elle sourit avec embarras. – Et bien... dans ce cas, euh, merci beaucoup, dit-elle. C’est vraiment très généreux de votre part. – Il faut que je te raccompagne ? Elle parut surprise. – Non, non, c’est bon, j’ai mon vélo, ça n’est pas la peine. Elle eut un sourire poli. – Tu veux finir ton film ? demanda-t-il. Moi je vais me coucher alors ça ne me dérange pas. – Merci mais je crois que je vais y aller. Demain je me lève tôt. J’ai un cours de socio. Elle lui lança un regard décontenancé. Son visage à lui resta triste et impassible. Tout en discutant elle s’était 189 levée et chaussée. Elle enfila son manteau et mit à l’épaule une besace en laine de toutes les couleurs. Ils se serrèrent la main. Népès referma la porte derrière elle sans verrouiller, éteignit le lecteur DVD et l’écran plasma, alla à la cuisine. Il but trois verres d’eau d’affilée, après quoi il fut hors d’haleine. Appuyé au bord de l’évier, il reprit son souffle en respirant avec bruit. Son regard semblait préoccupé. Un moment, il regarda dans la direction du lampadaire qui éclairait la rue. Une masse de moucherons se pressait dans le halo. – Et voilà, dit-il à voix haute, soufflant par le nez comme un animal. Va te coucher, gros con. Sale con. Pédé. Il s’enfila deux autres verres d’eau. La porte enfoncée réveilla Farid Abdou. L’enfant sursauta dans son lit de camp. Il se dressa, une expression apeurée sur le visage, et commença de pleurer au moment où les grenades lacrymogènes éclatèrent dans le hall et réveillèrent les autres occupants du premier étage et sans doute du reste de l’hôtel aussi. Il appela sa mère. Son frère et sa sœur, qui occupaient des lits de camps accolés au sien, pleurèrent à leur tour. Khadidja Abdou eut une nausée. Depuis qu’elle était enceinte cela arrivait souvent. Les CRS furent au premier étage. Leur déplacement soulevait de la poussière et réduisait les cafards en pulpe noire. Ils matraquèrent les portes en gueulant de sortir. En bas la voix du brigadier-chef portée et amplifiée par le mégaphone donna l’ordre aux squatteurs d’évacuer les chambres et de se regrouper dans le hall sans faire d’histoire. Le gaz lacrymogène remonta l’escalier et attaqua le couloir du premier étage. Les CRS grimpèrent au deuxième. Le brigadier-chef répéta ses instructions. Khadidja Abdou vomit dans la baignoire. Son mari remplissait un sac de sport Décathlon. Ses enfants, son père, son oncle et sa tante les avaient rejoint après s’être habillés. Ils parlaient tous en même temps, vite et fort, en Arabe et en Français. Leurs yeux brillaient d’appréhension. Les CRS matraquèrent les portes du deuxième étage. Driss Elabkari surgit de sa chambre en slip. Il avait une pioche. Il avait l’air furieux. Il en donna un coup au CRS qui ouvrait la marche. La pointe de la pioche étoila le casque. Cela fit un bruit d’oiseau percutant un pare-brise. Le CRS recula et abattit sa matraque sur Elabkari, de toutes ses forces. Il cria « Putain, le pédé ! ». La matraque tapa le côté du crâne et s’écrasa sur l’épaule. Du sang gicla de la tête de l’homme et son épaule s’affaissa bizarrement. L’homme cria bref, lâcha sa pioche, tomba. Les CRS 190 l’enjambèrent. Le brigadier-chef répéta ses instructions au mégaphone. Des bruits de toux montèrent du premier étage et du hall. Habib Yazidi, qui avait l’air triste et découragé, aida Elabkari à se relever. Les autres occupants de l’étage se dirigèrent vers l’escalier envahi de fumée. Eux aussi avaient l’air découragé. Quelquesuns semblaient en colère. Tout le monde marchait vite, certains avaient des sacs de sport, d’autres des valises, d’autres des sacs Lidl ou Ed remplis de vêtements et d’objets de première nécessité. Des phrases brèves fusaient en Arabe, sur un ton de hargne et d’indignation. Elabkari perdait beaucoup de sang. Son visage était affaissé. Yazidi et lui descendirent les marches ensemble et après les autres. Elabkari avait du mal à conserver son équilibre. Il avait les pieds nus. Il parlait mais Yazidi ne répondait pas. Le porte-voix qui répétait la même phrase, les coups de matraque tambourinés aux portes, les bousculades, les pleurs, les cris, la toux, créaient une importante confusion. Les CRS furent au troisième étage. Villagrassa et Embalo avaient déjà quitté leurs chambres. Il regardèrent avec tension les CRS approcher. Villagrassa finissait d’enfiler son pantalon et Embalo laçait ses chaussures. Les CRS les prirent et les poussèrent vers l’escalier en leur gueulant de se magner le cul et de descendre. Le Français cria ; l’Espagnol perdit une chaussure et jura en espagnol. Ils coururent en bas. Les CRS pénétrèrent ensuite dans ce qui restait des chambres. Emmanuel Ombric dormait à côté de deux bouteilles de vodka vides et d’un matelas qui puait la pisse. Il était gras et nu comme un phoque. Ils le réveillèrent à coups de pieds dans les côtes et les cuisses. Il dit quelque chose d’incompréhensible et vomit et un CRS le frappa d’estoc à la bouche avec l’extrémité de sa matraque, qui ripa sur une dent. La bouche pleine de sang et de vomi Emmanuel se hâta à quatre pattes vers le fond de la pièce, vers un carton rempli de cassettes vidéos. On l’attrapa et on le battit. Ses souillures firent des traînées sur son cou et son ventre. Il ne se défendit pas. Il cria et sanglota. On lui ordonna de s’habiller. On lui lança ses vêtements, qui étaient entassés sur le lit. Il s’habilla. Il n’essuya pas le sang ni le vomi sur son corps. Ensuite on le prit et on le jeta vers l’escalier. Il trébucha, tomba, roula jusqu’en bas, se rétablit et tituba jusqu’au rez-de-chaussée. Il s’arrêta une fois en chemin pour vomir encore. Les CRS descendaient derrière lui et vérifiaient vivement que les chambres étaient vides. Au deuxième étage il n’y avait plus personne, au premier non plus. 191 Zecke consulta sa montre. Il était vingt-trois heures. Il remonta dans la salle. Des clients venaient d’arriver. Il les observa. Ils chargeaient leur plateau avec les entrées. C’était un couple. L’homme était vêtu d’une veste de cuir, d’un pull gris en laine et d’un jean usé aux genoux, la femme portait une jupe plissée rouge qui arrivait sous les genoux, des bas noirs, des ballerines noires, un teeshirt ou un débardeur noir à paillettes blanches, un gilet de coton rouge qui s’effilochait un peu. L’homme avait posé sur son plateau une assiette qui contenait une tranche de pâté en croûte, une rondelle de tomates, deux cornichons taillés en fleur ; la femme avait posé sur son plateau une assiette de céleri rémoulade. Ailleurs un enfant expliquait à sa mère qu’il avait vu une abeille dans la salade. Il pleurait. Désormais il se passait surtout ceci dans la vie de Zecke : il buvait du vin à Flunch et se nourrissait peu. Mais avant que sa vie s’étrécisse de la sorte il avait des activités. Il travaillait, avait une femme, des enfants, une maîtresse avec qui il lui arrivait de coucher. Un soir il se passa ceci, qui modifia notablement le cours de sa vie : une minute après avoir joui il se détacha de Lydia et se leva du lit. La pièce sentait le sexe et le graillon. La lueur des lampadaires, trois étages plus bas, traversait la poussière de l’unique fenêtre donnant sur la rue et fournissait le seul éclairage. On se serait cru sous le plafonnier d’une voiture arrêtée quelque part en pleine nuit. Lydia resta allongée sur le dos et ramena sur elle le drap et la couverture pelucheuse vert bouteille. Elle tendit un bras hors du lit pour attraper un rouleau de papier toilette posé par terre non loin d’un tabouret servant de support à une lampe de chevet éteinte. Elle déchira quelques feuilles roses et ornées de fleurs en filigrane, avec quoi elle s’essuya la chatte. Elle abandonna les feuilles roulées en boule sous le tabouret, près d’un radioréveil envahi par une pile de numéros de Voici, Téléstar et Femme actuelle. Zecke, une goutte s’arrondissant au méat, frotta le gland contre sa cuisse et enfila un slip rouge sombre. Il alla dans l’autre pièce et ouvrit le Frigo dans le noir, de sorte que seule la veilleuse de l’appareil l’éclaira, donnant à sa peau une teinte jaune et cireuse. Il s’accroupit sur la pointe des pieds, une main accrochée à la porte et l’autre appuyée sur sa cuisse. Il avait un regard perplexe en face d’une clayette qui supportait un camembert premier prix et un paquet de jambon blanc Auchan entamé. Il évoquait une installation d’art contemporain, une chose morte, une version kitsch du Penseur de Rodin. Une odeur de viande flottait dans la 192 pièce. – Il est où le Coca ? – Y’en a plus, on l’a terminé tout à l’heure. – Merde, et y’a même pas de jus de fruit. Il ferma le Frigo trop fort. Quelque chose tinta à l’intérieur. – Putain, tu aurais pu me le dire, je serais descendu en chercher. Maintenant, c’est trop tard, l’Arabe est fermé. Il se leva, se retourna et alluma le tube au néon installé au-dessus de l’évier. L’éclat blanc et dur lui fit plisser les yeux. L’égouttoir était vide. Dans l’évier il y avait deux assiettes contenant quelques coquillettes, des brins de fromage râpé, des traces de moutarde et des débris de viande hachée, des fourchettes, des couteaux, des verres Nutella (sur l’un d’eux s’accrochaient encore des lambeaux d’étiquette), une poêle à frire, une casserole en aluminium remplie d’eau et de quelques coquillettes et une écumoire en plastique orange pale. Il considéra tout cela un instant en se grattant les couilles à travers l’étoffe synthétique de son slip puis il prit les deux verres qu’il secoua au-dessus de l’évier. Quelques gouttes de vin rouge firent comme des trainées de sang sur la vaisselle et l’émail. Zecke éteignit le néon. Dans la rue il y eut des rires forts ; quelques instant plus tard il y eut simultanément un bruit de moteur qui démarre et un éclat de phares qui traversa le verre gras de la fenêtre à côté de l’évier, glissa sur le visage pensif de l’homme, mourut au plafond et révéla un instant des points noirs qui pouvaient être des moucherons endormis. Zecke revint dans la chambre, les deux verres serrés entre les doigts de sa main gauche. Lydia alluma la lampe de chevet. L’ampoule de quarante watts diffusa à travers l’abat-jour terni par le tabac une lumière qui paraissait chargée de cendres. La femme, assise en tailleur, couverture tendue entre les cuisses, commença à rouler une cigarette. Des brins de Pall Mall tombaient sur la couverture. Un cendrier circulaire noir, avec l’inscription Martini en rouge sur fond blanc qui se répétait sur tout le tour, était posé dans son giron. Il était rempli de cendres et de mégots. A suivre 193 olivier allemane sans titre Pour regarder ses oeuvres, cliquez sur son nom dans le dossier Galerie ou bien cliquez ici pour ouvrir directement la première image prochain numéro : 15 janvier 2011 contact : [email protected]