Hallem et al. JREMT 2011

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Hallem et al. JREMT 2011
3ème Journée de Recherche et d’Echanges en Management du Tourisme, 10 Juin 2011, Groupe Sup de Co La Rochelle, France
Le rôle d’Internet dans le développement d’un service de croyance :
proposition d’un modèle autour du tourisme médical
Yousra Hallem
Doctorante
Ecole de Management de Strasbourg/ HuManiS/URMR
[email protected]
Tel : 0616415488
Isabelle Barth
Professeur
Ecole de Management de Strasbourg/ HuManiS
Abdelfattah Triki
Professeur
Institut Supérieur de Gestion de Tunis/ URMR
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3ème Journée de Recherche et d’Echanges en Management du Tourisme, 10 Juin 2011, Groupe Sup de Co La Rochelle, France
Le rôle d’Internet dans le développement d’un service de croyance :
proposition d’un modèle autour du tourisme médical
Résumé:
Bien qu’il soit un service à fort attributs de croyance, de manière paradoxale le tourisme
médical s’est fortement développé grâce à Internet. Traitant du cas du tourisme de chirurgie
esthétique en Tunisie, cet article propose un modèle conceptuel pivotant autour des
fonctionnalités informationnelle, sociale et relationnelle d’Internet ainsi que de son utilité
perçue et sa facilité d’utilisation perçue dans le contexte du tourisme médical.
Mots clefs: service, croyance, Internet, tourisme, médical
The role of Internet in the growth of medical tourism: proposing a conceptual model
Abstract:
Although it is a service of high credence attributes, medical tourism was surprisingly grown
thanks to the Internet. Treating the specific case of cosmetic surgery in Tunisia, we develop a
conceptual model dealing with the informational, social and relational functions of Internet
and its perceived usefulness and perceived ease of use in the context of medical tourism.
Key words: service, credence, Internet, medical, tourism
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3ème Journée de Recherche et d’Echanges en Management du Tourisme, 10 Juin 2011, Groupe Sup de Co La Rochelle, France
Le rôle d’Internet dans le développement d’un service de croyance :
proposition d’un modèle autour du tourisme médical
INTRODUCTION
Le tourisme médical qu’il s’agisse de soins de confort et d’esthétiques ou de traitements de
pathologies lourdes, se définit comme « le déplacement à l’étranger pour s’y faire soigner»1.
Ce phénomène existe depuis longtemps et plusieurs pays développés sont en effet une
destination privilégiée pour des patients en provenance des quatre coins du monde. Or, depuis
plus d’une dizaine d’années, on observe que cette tendance est en train de s’inverser. Les
patients-touristes se déplacent, désormais, de plus en plus, des pays riches en direction des
pays les moins développés pour se faire soigner et bénéficier de traitements souvent invasifs
nécessitant une technologie de pointe. Ces nouveaux patients-touristes
peuvent ainsi
bénéficier de soins médicaux présumés de qualité à des prix très attractifs. Des études
pionnières (Bookman et Bookman, 2007) montrent qu’Internet a ouvert le tourisme médical
aux pays en voie de développement et a fortement accéléré son développement (Connell,
2006). De même, toute la démarche de contraction du service se fait à distance: la démarche
préliminaire de recherche d’information, le diagnostic préopératoire comme le suivi
postopératoire se font via Internet (Triki et Hallem, 2008). Cette évolution peut étonner car si
Internet est devenu le média incontournable de distribution et de commercialisation des
produits touristiques, il semble à priori plus difficile de l’envisager pour une prestation de
tourisme médical avec les risques qui lui sont associés. Il ne s’agit pas seulement de ‘‘rater ses
vacances’’ mais bien de risques vitaux.
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www.tourismedical.com
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3ème Journée de Recherche et d’Echanges en Management du Tourisme, 10 Juin 2011, Groupe Sup de Co La Rochelle, France
En effet le tourisme médical est un service de croyance, c'est-à-dire un service dont les
attributs sont difficiles à évaluer avant l’achat (notamment à cause de l’impossibilité de voir
par exemple son médecin bien avant l’opération, la difficulté de vérifier ses compétences et
l’incertitude quant à la modernité, la qualité de service et la prise en charge des établissements
d’accueil), et cela même après l’achat et la consommation du service (Darby et Karni, 1974).
De plus, le consommateur a généralement du mal à collecter une information pertinente à un
coût modéré, le risque perçu associé à l’achat est très élevé (Mitra et al, 1999).
Ces
caractéristiques inhérentes au tourisme médical en tant que service de croyance le rendent
théoriquement non adapté à une commercialisation en ligne (Girard et Dion, 2009). Or, ceci
est loin d’être le cas dans la réalité puisque toute la démarche de contraction d’un service
médico-touristique se fait à distance à travers Internet (Triki et Hallem, 2008).
Cette contradiction entre des résultats de recherche et notre constat au sein de l’activité du
tourisme médical en tant que service de croyance nous incite à chercher à comprendre
comment et pourquoi Internet a contribué au développement du tourisme médical ?
INTERETS DE LA RECHERCHE
Le tourisme médical est un phénomène qui prend relativement de l’ampleur ces dernières
années ; le différentiel en terme de prix est évoqué comme un des principaux moteurs de cette
activité dont le développement a été également grandement favorisé par les technologies de
l’information et de la communication comme Internet (Bookman et Bookman, 2007 ; Connel,
2006). Une observation au sein du secteur nous a même montré que toutes les démarches de
contraction d’un service médico-touristique se font à distance par le biais d’Internet et que
même le diagnostic préopératoire et le suivi postopératoire se font à distance. Mais en tant que
service de croyance à forte implication et à fort risque perçu (Mitra et al, 1999), nous pensons
que le différentiel de prix ne peut exclusivement justifier la contraction d’un service médico4
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touristique dont toutes les étapes se font à distance et où le seul contact physique entre le
patient-touriste et le prestataire de service se fait uniquement une fois que le patient-touriste
se trouve au pays de destination. Notre point de vue est également conforté par plusieurs
études (Ostrom et Iacobucci, 1995; Hsieh, Chiu et Chiang, 2005) qui ont montré qu’un
consommateur est moins sensible au prix et plus sensible à la qualité dans le cadre de l’achat
d’un service de croyance. Ainsi, même si les tarifs des prestations médico-touristiques en
Tunisie sont bien moins chers que ce que l’on peut trouver en France, nous pensons que cette
activité engage bien plus de risque perçu qu’on peut facilement réduire sur la base de ce
différentiel de prix. Et comme on l’a bien dit plus haut l’enjeu n’est pas seulement lié au fait
de ‘‘rater ses vacances’’ mais bien de risques vitaux. Nous avons donc tenté d’expliquer le
comportement du patient-touriste et sa tendance à accepter de s’affranchir des contacts en face
à face avec les prestataires de service et à contracter un tel service à distance en s’intéressant
de près aux fonctionnalités et caractéristiques d’Internet en matière de tourisme médical.
Notre premier objectif est tout d’abord de démontrer que parmi les services de croyance aussi
risqués et impliquant qu’ils soient certains
comme le tourisme médical sont
commercialisables par Internet. Ce premier objectif revêt un intérêt d’ordre théorique,
puisqu’il a été largement démontré dans d’autres études (Girard et Dion, 2009 ; Korgaonkar et
al, 2006) que les services de croyance ne sont pas adaptés à une commercialisation en ligne ;
ce qui est loin d’être le cas avec le tourisme médical. Ensuite, notre deuxième objectif est de
montrer comment les fonctionnalités d’Internet pourraient réduire le risque perçu inhérent au
service médico-touristique. Enfin notre troisième objectif est de montrer comment les
caractéristiques d’Internet pourraient être un facteur de confiance dans le prestataire du
service médico-touristique. Ces deux derniers objectifs revêtent un intérêt d’ordre managérial
dans la mesure où l’on pourra proposer plusieurs solutions pour optimiser davantage les
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potentialités de l’outil Internet en la matière en superposant par exemple dans le contexte du
tourisme médical plusieurs techniques empruntées de l’e-santé et la télémédecine.
LE TOURISME MEDICAL : UN PHENOMENE EMERGENT A L’ERE
D’INTERNET
Même s’il est difficile d’obtenir des données chiffrées fiables, un faisceau de données
convergentes permet d’affirmer que l’activité du tourisme médical affiche, depuis quelques
années, une croissance exponentielle ; ainsi le dernier rapport du Tourism Research and
Marketing sur le tourisme médical rapporte que le marché global englobe 19 millions de
voyages en 2005 (derniers chiffres publiés) avec un volume d’activité de l’ordre 20 billions$2.
Il est maintenant acté qu’Internet a révolutionné le secteur touristique, et l’on assiste à une
véritable reconfiguration des rôles des intervenants dans ce secteur. Internet ayant modifié la
manière dont les produits touristiques sont distribués. On est passé du tourisme à l’e-tourisme,
un e-tourisme marqué essentiellement par la désintermédiation et la facilité d’accès à une
large palette d’offres touristiques variées.
Des études récentes montrent que le tourisme médical n’aurait pas échappé au phénomène ; sa
croissance s’est fortement accélérée avec l’usage d’Internet (Connell, 2006). Internet aurait
largement contribué au développement du tourisme médical dans les pays en voie de
développement (Bookman et Bookman, 2007). Internet représente tout d’abord un moyen
d’information pour les patients-touristes sur les destinations, les prestataires de service et les
procédures à suivre.
C’est également un outil pour les fournisseurs de service pour
promouvoir leurs offres de service et établir le contact avec les patients-touristes. A Cuba, par
exemple, et sous les contraintes de l’embargo, Internet est le seul média pour toucher les
patients-touristes américains. Conscient de la puissance de l’outil Internet dans le contexte du
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www.tram-research.com
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tourisme
médical,
le
gouvernement
malaysien
a
même
lancé
un
site
web
(myhealthcare.gov.my) pour promouvoir l’offre du pays dans ce domaine.
Internet a aussi accéléré le développement du tourisme médical en Tunisie et au Maroc où
l’on observe le nombre croissant de sites web (que ce soit de tour operators, de cliniques
privées ou même de chirurgiens) à travers lesquels les différents prestataires proposent leur
offres de services notamment l’organisation de séjours médico-touristiques.
Dans ce cadre, toute la démarche préliminaire de contraction du service médico-touristique et
notamment le diagnostic quant à l’opération se fait à distance via Internet et le patient-touriste
n’est effectivement en relation avec son médecin que lors du séjour médico-touristique (Triki
et Hallem, 2008). Si le processus administratif et logistique, voire même médical peut être
admis comme un déroulé pertinent, il reste que tout le processus menant à la prise de décision
du patient-touriste sur la seule foi d’échanges virtuels demeure étonnant et demande à être
mieux compris. Dans ce contexte une recherche netnographique sur le tourisme de chirurgie
esthétique en Tunisie (Hallem, Barth et Triki, 2010), nous a permis de mettre l’accent sur les
fonctions informationnelle, sociale et relationnelle d’Internet dans le contexte du tourisme
médical. En effet, les résultats ont montré qu’Internet est une source d’information privilégiée
en matière de tourisme médical. Internet revêt également une importante fonction sociale en
permettant aux patients-touristes de se partager des expériences et de soutenir mutuellement
notamment via les forums de discussion. Enfin, Internet se présente comme un outil qui
permet de garantir le contact à distance (notamment à travers les échanges d’e-mail qui
s’avèrent utiles pour le diagnostic préopératoire et le suivi postopératoire) entre les patientstouristes et les prestataires de service, particulièrement le chirurgien.
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CADRE CONCEPTUEL
Sur la base d’une revue de la littérature sur la classification SEC des produits et services, sur
la notion du risque perçu et de confiance en matière d’achat en ligne et sur le modèle
d’acceptation de la technologie; ainsi que qu’en se référant aux résultats de la recherche
netnographique, nous proposons le modèle ci-dessous qui reprend les relations entre les
fonctionnalités et sur le risque perçu et la confiance en matière d’un service de croyance
comme le tourisme médical.
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Process
Input
Output
Fonction sociale
Partage
d’expérience
H5-
Support
émotionnel
H6-
Sexe
H10-
Fonction informationnelle
Risque
perçu
H1-
Age
Crédibilité du message
sur les forums
H3Intentions
d’achat
H2+
Crédibilité du message
sur les sites commerciaux
H12
H4+
Nationalité
Fonction relationnelle
Confiance
Décision
d’achat
H7-
Contact
H11+
Niveau
d’éducation
H8+
Utilité perçue d’Internet
pour le diag préop
Niveau de
revenu
H9+
Utilité perçue d’Internet
pour le diag post-op
Modèle explicatif du rôle d’Internet dans le comportement du patient-touriste
Ainsi, et malgré les attributs de croyance du service médico-touristique, les fonctionnalités
d’Internet dans le contexte du tourisme médical nous laissent à croire que les fonctionnalités
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(informationnelle, sociale et relationnelle) d’Internet pourraient jouer le rôle d’un réducteur de
risque et que les caractéristiques d’Internet (utilité perçue et facilité d’utilisation perçue)
pourrait jouer le rôle d’un facteur de confiance dans le contexte du tourisme médical. Dans ce
qui suit nous explicitons les différentes relations supposées, ainsi que les hypothèses qui en
découlent.
FONCTION INFORMATIONNELLE
Sur Internet même, plusieurs sources d’information sont disponibles comme l’information
collectée sur le site web du vendeur, l’information collectée sur des pages web neutres et
l’information collectée auprès d’autres consommateurs (Bei, Chen et Widdows, 2004). Dans
ce qui suit, notre intérêt portera sur les informations collectées sur les sites web des
fournisseurs de service et les informations collectées auprès d’autres patients-touristes sur les
forums de discussion. Notre intérêt portera sur la crédibilité de l’information collectée sur
Internet (au niveau des forums de discussion et des sites web des TO ou des cliniques) telle
quelle est perçue par les patients-touristes. Nous tacherons également d’étudier son impact sur
la confiance et le risque perçu. Des chercheurs définissent la crédibilité comme la plausibilité
ou la qualité perçue (Tseng et Fogg, 1999). De même, et selon plusieurs chercheurs, de
multiples dimensions composent la crédibilité comme l’expertise, la confiance, la pertinence,
et la fiabilité.
On distingue dans la littérature 3 types de crédibilités qui sont la crédibilité du message, la
crédibilité de la source du message et la crédibilité du média (Metzger et al, 2003 ; Flanagin et
Metzger, 2007). Dans ce qui suit nous traitons le cas de la crédibilité du message ou de
l’information en relation avec le tourisme médical véhiculée par Internet.
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Les informations collectées sur les forums de discussion
En matière de tourisme des sites comme Travelpod.com ou Tripadvisor.com permettent aux
internautes d’échanger des recommandations et des opinions sur plusieurs destinations et
produits touristiques. (Schmallegger et Carson, 2008). Les opinions des consommateurs sont
perçues comme beaucoup plus crédibles que les autres sources d’information traditionnelles.
La même tendance est à remarquer dans le contexte du tourisme médical, où l’on assiste à la
naissance de plusieurs forums de discussion sur lesquels d’anciens patients-touristes
(doctissimo.fr; aufeminin.fr; plasticsurgeryjourneys.com) relatent tout le récit de leur
expérience dans le but de conseiller et guider de futurs touristes en quête d’information. Selon
Bei, Chen et Widdows (2004), pour juger les produits et services de croyance les
consommateurs ont recours ont recours soit à leur propre expérience ou aux commentaires des
proches. Toutefois la collecte d’information auprès des contacts étant relativement coûteuse et
les consommateurs n’ayant pas toujours un large réseau de connaissance pour la collecte
d’information, les chercheurs mettent ainsi l’accent sur l’utilité d’Internet dans ce contexte. Il
a été ainsi montré que les consommateurs cherchent de l’information en ligne ont tendance à
se fier beaucoup plus aux expériences d’autres personnes en matière de produits et services
d’expérience de (Rha, 2002; Bei, Chen et Widdows, 2004). Le tourisme médical étant
considéré comme un service de croyance engage également une forte dimension expérientielle
qui nous laisse penser à croire à l’importance de la crédibilité que peuvent attacher les
patients-touristes aux messages et l’information collectée sur ce genre d’espace de discussion.
Même si certains chercheurs pensent que plus le besoin en information augmente plus le
chercheur d’information percevra l’information comme crédible (Tseng et Fogg, 1999). Ceci
étant dit, une revue de la littérature sur la notion de crédibilité nous montre que très peu de
recherche se sont intéressées à la relation entre la crédibilité des messages en ligne et la
confiance et le risque perçu. Ainsi Corritore et al (2003) ont simplement supposé une relation
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positive entre la crédibilité en ligne et la confiance et sans pour autant vérifier empiriquement
la relation. Enfin, seuls Nicolaou et Mc Knight (2006) ont vérifié empiriquement, dans un
environnement électronique, la relation respectivement négative et positive entre la qualité
d’information et le risque perçu d’une part et la qualité d’information et la confiance d’autre
part. C’est dans ce contexte que nous sommes donc tentés de supposer les hypothèses
suivantes, H1 : plus l’information sur les forums de discussion est perçue comme crédible
plus le risque perçu à l’égard du service médico-touristique diminue ; H2 : plus
l’information sur les forums de discussion est perçue comme crédible plus la confiance à
l’égard du prestataire médico-touristique augmente
Les informations collectées auprès des sites web des fournisseurs
Pour ce qui est des sites web commerciaux, il s’agit, dans notre cas, des sites web de
cliniques, de chirurgiens ou de tours opérateurs (dans le cas où le patient-touriste contracte un
séjour médico-touristique par l’intermédiation de ce dernier). Malgré que l’on ait
fréquemment posé l’hypothèse que les informations collectées auprès des sites web des
vendeurs sont plus utiles pour les produits et services de recherche, des études empiriques
(Rha, 2002 ; Bei, Chen et Widdows, 2004) montrent que l’information collectée auprès du
vendeur (à travers son site web) est aussi importante pour les produits et services d’expérience
que pour les produits et services de recherche. Si cette information est davantage importante
pour le consommateur et donc notre cas le patient-touriste, il faut donc qu’elle soit donc
perçue comme davantage crédible. Ainsi dans le même ordre d’idées que les deux premières
hypothèses, nous formulons dans ce qui suit que, H3 : plus l’information sur les sites web
commerciaux est perçue comme crédible plus le risque perçu à l’égard du service médicotouristique diminue ; H4 : plus l’information sur les sites web commerciaux est perçue
comme crédible plus la confiance à l’égard du service médico-touristique augmente
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FONCTION
SOCIALE
Pour ce qui est de la fonction sociale d’Internet, et sur la base des résultats de la netnographie,
notre intérêt portera sur le partage d’expériences et le support émotionnel qu’elle permet entre
les patients-touristes à travers les espaces de discussion en ligne. Pour cette fin, nous nous
sommes basés sur la théorie de réduction d’incertitude (Berger, 1979) et plus particulièrement
sur les stratégies interactives de réduction de l’incertitude. Une stratégie interactive de
réduction de l’incertitude requiert un échange entre les parties (Berger, 1979). Dans le
contexte de la toile, une stratégie interactive de réduction d’incertitude consiste en une
interaction directe entre les individus via les technologies de l’information et de la
communication (Flanagin, 2007). Toujours selon Flanagin (2007), le risque peut être atténué
par la réduction d’incertitude résultant de l’échange d’information et notamment
d’expériences entre les intervenants. Ainsi des recherches ont montré que le risque peut être
réduit via l’obtention d’une information pertinente à travers les expériences vicariantes
(Flanagin, 2007). C’est ce qui nous amène à proposer l’hypothèse suivante, H5: Plus le
patient-touriste partage ses expériences avec autrui sur Internet (notamment au niveau des
forums de discussion) plus son risque perçu à l’égard du service médico-touristique
diminue
Dans le même ordre idée stipulant que les consommateurs ont recours à des stratégies
interactives en ligne pour réduire leur incertitude (Berger, 1979 ; Ramirez, 2002) notamment à
travers les différents échanges en ligne ; nous sommes tentés de supposer que le support
émotionnel entre internautes a tendance à réduire l’incertitude et le risque quant à l’objet ou
sujet de préoccupation. Ceci nous amène à proposer l’hypothèse qui suit, H6 : Plus le
patient-touriste reçoit un soutien émotionnel en ligne (notamment via les forums de
discussion) plus son risque perçu à l’égard du service médico-touristique diminue
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FONCTION RELATIONNELLE
Cases (2002) a conclu que les capacités interactives d’Internet (notamment en termes de
communication et de contact) sont très faiblement réductrices du risque perçu. Nous pensons
que le résultat de cette étude n’est pas généralisable à tous les produits et services. L’étude a
en fait porté sur le risque perçu d’achat d’un vêtement sur Internet, un produit de recherche
dont l’achat est très fréquent et familier. L’auteur suggère même de vérifier les résultats sur
un autre type de produits comme les produits d’expérience. Nous pensons donc pouvoir
dégager des résultats différents dans le cas d’un service de croyance comme le tourisme
médical qui nécessite une forte interaction entre le client et le fournisseur de service
(Hirvonen et Halender, 2001) et où le contact avec le fournisseur de service semble être très
important. C’est pour cela que nous formulons l’hypothèse suivante, H7 : plus le patienttouriste est en contact avec le prestataire du service (chirurgien ou TO) par le biais
d’Internet (messagerie électronique) plus son risque perçu à l’égard du service médicotouristique diminue.
Dans le cadre de la fonction relationnelle d’Internet, nous nous intéresserons de près à son
utilité perçue. Le concept d’utilité perçue forme, avec d’autres (comme la facilité d’utilisation
perçue), la pierre angulaire du modèle d’acceptation de la technologie (Davis, 1989). Des
études se sont penchées sur la relation entre les deux concepts de l’utilité perçue et la
confiance (Gefen et Straub, 2003 ; Chen et Barnes, 2007). Plusieurs chercheurs pensent ainsi
que le modèle d’acceptation de la technologie (TAM) peut expliquer la confiance en ligne
ainsi que les intentions d’achat. Un site web perçu comme utile réduit l’asymétrie de
l’information, augmente le degré de confiance en ligne (Koufaris et Hampton-Sosa, 2004).
Dans le cadre de notre travail de recherche, notre intérêt ne portera pas spécifiquement sur le
site web du fournisseur de service (TO ou chirurgien) mais sur l’outil Internet en tant que
technologie- qui faute de contact en face à face avec le prestataire de service- est susceptible
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d’augmenter la confiance du patient-touriste à l’égard du prestataire de service. Nous mettrons
ainsi l’accent sur l’impact de l’utilité perçue de l’outil Internet en tant que moyen
d’information, moyen de socialisation et moyen de contact sur la confiance du patient-touriste
à l’égard du prestataire de service. Ainsi nous formulons par la suite que, H8: plus Internet
est perçue comme utile pour le diagnostic préopératoire plus la confiance à l’égard du
prestataire du service médico-touristique augmente ; H9 : plus Internet est perçue comme
utile pour le suivi postopératoire plus la confiance à l’égard du prestataire du service
médico-touristique augmente
INTENTION ET DECISION D’ACHAT
Plusieurs études se sont intéressées à l’impact du risque perçu et de la confiance sur les
intentions attitudinales. Pour ce qui est de la confiance plusieurs études attestent de son
impact positif sur les intentions attitudinales (Mayer et al, 1995; Jarvenpaa et tractinsky,
1999; Doney et Canon, 1997; Gassenheimer et Manolis, 2000 ; Guenzi et Georges, 2010). En
ce qui concerne le risque perçu, il a été admis que le niveau de risque perçu prédit la
propension d’un consommateur à acheter tel produit et/ou service (Babin et al 1999; Mitchell,
1999). Ainsi, il a été largement montré que le risque perçu influence négativement les
intentions attitudinales (Wood et Scheer, 1996; Mitchel, 1999; Aqueveque, 2006). C’est ainsi
que nous proposons de tester les deux hypothèses, H10 : Plus le risque perçu à l’égard du
service médico-touristique diminue plus les intentions de contraction d’un service médicotouristique sont renforcées ; H11 : Plus la confiance envers le prestataire de service
augmente
plus les intentions de contraction d’un service médico-touristique sont
renforcées.
Enfin plusieurs études attestent de la relation positive entre les intentions et le comportement
et que les intentions sont un très bon indicateur du comportement (Kalwani et Silk, 1982;
Warshaw, 1980; Kalish et Soref, 1993). Alors que d’autres études montrent, en revanche, une
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relation négative entre les intentions et le comportement et que les intentions ne prédisent pas
toujours avec acuité le comportement (Jamieson, 1986 ; 1989). Nous préférons donc ne pas
se prononcer sur le sens de la relation vu que nous allons interroger d’une part, des patientstouristes qui sont allés au bout de leur parcours et qui se sont donc fait opérer en Tunisie et
d’autre part des personnes qui ne sont pas allées au bout de leurs parcours et qui au final ont
décidé de ne pas se faire opérer en Tunisie. Ainsi, nous partons du constat que les patient-
touristes qui se sont fait opérer en Tunisie, auraient pu avoir soit des intentions positives soit
des intentions négatives. Et que les personnes qui au final n’ont pas contracté le service
médico-touristique auraient pu avoir soit des intentions défavorables ou favorables à la
contraction du service médico-touristique. L’étude de ces relations pourrait éventuellement,
nous donner quelques éléments explicatifs du rôle d’Internet dans la configuration de la
relation entre les intentions et le comportement à la fois pour les acheteurs et les nonacheteurs d’un service médico-touristique. Nous nous proposons donc de tester la l’hypothèse,
H12: Les intentions de contraction du service médico-touristique influencent la décision de
contraction du service médico-touristique.
Enfin nous étudierons l’impact de certaines variables sociodémographiques comme l’âge, le
sexe, le niveau de revenu et la nationalité sur l’appréhension des fonctionnalités d’Internet
dans le contexte du tourisme médical.
CONCLUSION
Grâce à une revue de la littérature exhaustive ainsi qu’en référence aux résultats d’une
recherche netnographique préalable sur le rôle d’Internet dans le développement du tourisme
médical, nous proposons dans ce papier un modèle qui met l’accent sur le rôle d’Internet dans
l’explication du comportement du patient-touriste. Dans une seconde étape, nous procédons
au test du modèle et à la vérification des hypothèses du modèle relative aux différentes
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fonctions et caractéristiques d’Internet et leur relations avec des concepts comme le risque
perçu et la confiance à travers une enquête électronique auprès d’un échantillon de patientstouristes. Les résultats attendus de cette étude, et en connaissance préalable de l’importance
du facteur prix dans la décision d’achat d’un service médico-touristique,
pourraient
éventuellement nous proposer d’autres éléments et facteurs explicatifs de la décision de
contraction de ce genre de service sur la base des fonctionnalités informationnelle, sociale et
relationnelle d’Internet ainsi que sur la base de ses caractéristiques intrinsèques à savoir son
utilité perçue et sa facilité d’utilisation perçue.
L’objectif ultime de notre recherche est de percer, en partie, ce qui reste une boite noire mais
aussi d’accompagner le développement exponentiel de ce secteur d’activité dans le respect du
patient-touriste, la recherche de sa satisfaction optimale, et la réduction maximale de risque de
cette prestation de service « pas comme les autres ».
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