BAC BLANC n°2 : éléments de correction

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BAC BLANC n°2 : éléments de correction
BAC BLANC n°2 : éléments de correction :
Question préliminaire :
La réponse doit se fonder sur l’analyse des objectifs de l’auteur dans chaque texte. Que
veulent faire Rousseau et Casanova en écrivant chacun de ces « avant-textes » ?
(note : on valorisera les réponses qui tiennent compte des nombreux renseignements, donnés
en paratexte, sur les circonstances de la parution de ces textes et leur place dans la vie et
l’œuvre des deux auteurs).
Texte A : Dans ce texte, Rousseau s’interroge sur la pertinence de parler de soi, de s’adresser
au lecteur, et sur le devenir de ce nouveau texte autobiographique. Chaque paragraphe a une
fonction particulière, que l’on repère notamment par l’analyse des temps des verbes.
Par une première série d’interrogations et de verbes au conditionnel Rousseau pose le
problème qui le préoccupe : doit-il parler ou se taire ? S’il parle, de quelle manière (« de quel
ton »).
Dans le second paragraphe, Rousseau rappelle la nature de son propos autobiographique,
affirmant (phrases affirmatives et passé-composé) qu’il a atteint son objectif : « j’ai dit à peu
près ce que j’avais à dire ». Il s’adresse également aux lecteurs en n’hésitant pas à exclure ceux
qui ne chercheraient dans ce récit de vie qu’un«objet d’amusement »
Dans le troisième paragraphe (verbes au futur et phrases interrogatives), il s’inquiète de
l’avenir de ce texte, mais exprime, malgré ses craintes, une confiance intacte dans « l’espèce
humaine ».
La fonction de ce texte est donc de justifier l’écriture d’une nouvelle œuvre tout en exprimant
ouvertement, devant le lecteur, des réticences et des craintes qui sont récurrentes dans le
projet autobiographique de Rousseau.
Texte B : Rousseau ne s’adresse plus au lecteur mais à Dieu lui-même… Nous retrouvons les
mêmes propos que dans le texte A, mais le changement de destinataire donne au texte une
autre tonalité, celle d’une prière (registre lyrique, ton emphatique, vocabulaire religieux,
litotes, expression de l’humilité et de la dévotion. Après avoir rappelé ses souffrances
endurées, Rousseau exprime ainsi à nouveau ses craintes sur le devenir de cette œuvre mais
une fois encore cependant évoque sa « confiance ». Il semble faire ainsi de Dieu (comme dans
le fameux préambule des Confessions) le seul « arbitre de cet écrit » en lui confiant ce
manuscrit qu’il dépose à Notre-Dame de Paris. Mais en fait, dans le dernier paragraphe (et «
au verso » de la page !! en parlant de lui à la troisième personne : « l’Auteur ») il s’adresse
néanmoins à un lecteur pour l’implorer de le lire « en entier ». Il ne peut ainsi se résoudre à
n’avoir que Dieu comme destinataire…
La fonction de ce texte est donc la même que celle que le texte A, mais en s’adressant à Dieu,
Rousseau donne une tonalité plus pathétique à l’expression des angoisses de ce « cœur brisé
de douleur ».
Texte C : Casanova s’adresse à son lecteur et présente à son tour la nature de son projet
autobiographique. Il le justifie d’abord par la volonté de simplement « amuser », mais très vite
insiste sur le thème de la « confession » en disant qu’une autobiographie n’a d’intérêt que
dans ce cadre (verbes au présent : vérité générale). Il anticipe également les réactions de ce
lecteur, ne doutant pas que son œuvre sera bien reçue car lui-même (principal protagoniste de
ces Mémoires ) reconnaît par avance certaines fautes mais les justifie dès cet avant-propos.
La fonction de cet texte est donc là-encore identique à celle des textes A et B : il s’agit de
présenter ses « confessions » et d’anticiper les réactions des lecteurs. Mais le ton est fort
différent. Casanova ne s’interroge pas, il affirme. Il ne parle d’aucune souffrance, mais plutôt
de plaisir…
Texte D : Dans cette préface, Casanova s’adresse à nouveau à son « cher lecteur » pour lui
annoncer ce qu’il trouvera (verbes au futur) dans l’Histoire de ma vie. Il s’agit d’une
confession… mais sans repentir ! Cependant, il s’interroge malgré tout, comme le faisait
Rousseau dans le texte A, sur ce désir de raconter son histoire : folie ou sagesse ? En
définitive, Casanova choisit d’en rire…
La fonction de ce texte est donc d’annoncer au lecteur le contenu et le but de son œuvre à
venir, tout en revendiquant le droit de parler de sa propre vie, non comme un modèle, mais
comme un récit plaisant.
En définitive, nous voyons bien les points communs que nous pouvons relever dans ces
quatre textes. Rousseau et Casanova, comme beaucoup d’autobiographes, sont soucieux de
présenter et de justifier l’œuvre dont ils sont le sujet. Mais ce sont deux caractères fort
différents, et il est plaisant de voir comment chacun dit la même chose que l’autre, mais sur un
ton très différent.
Commentaire :
Plan possible :
1) Une prière personnelle (voir remarques ci-dessus faites à propos de ce texte : destinataires,
ton, procédés de l’emphase et de la solemnité, vocabulaire…)
2) Une réflexion générale sur le projet autobiographique. Au-delà du cas particulier (un
homme qui souffre) les considérations plus générales sur la relation particulière qui s’établit
avec un lecteur : quel « pacte » ici ? sachant que le lecteur ne semble pas visé (sauf au « verso
»… élément révélateur !) mais qu’il est omniprésent cependant...
Il s’agit de montrer comment la question de l’autobiographie se trouve exprimée dans un texteprière, comment l’on peut s’interroger sur la nature d’un « pacte » qui prend ici une forme
particulière dans la mesure où le lecteur semble nié mais qu’il reste le seul « problème » de
cette situation particulière de communication….
Dissertation :
Plan possible (simple mais efficace) :
1) La littérature autobiographique comme confession : les textes du corpus + extraits des
Confessions + Saint Augustin + Leiris par exemple. D’ailleurs Casanova lui-même, ici,
déplace très vite la question vers le plaisir de lecture et le rire, et parle certes de « confession »
mais pas « repentir »…
2) Une autobio n’est pas « nécessairement » confession et repentir. Autres fonctions
possibles : le récit de l’enfance, à la quête soi, plaisir de raconter le passé, expression du
bonheur, témoignages divers notamment sur l’histoire (les Mémoires) ou sur des expériences
traumatisantes, etc… Exemples nombreux : Colette, Sarraute, Stendhal, Primo Levi, ou des
œuvres plus romancées comme celle de Vallès etc… Et au-delà, vouloir faire œuvre, faire
revivre pour recréer : Proust.
3) Cependant, n’y a-il pas toujours une part « d’aveu » dans toute autobio, même si ce n’est
pas nécessairement l’objectif principal ? Sartre se « confesse-t-il » dans Les Mots ? Levi n’at-il pas besoin de « confesser » le fait d’être un « survivant » ? N’y-a-t il pas toujours une
dimension un peu psychanalytique dans les récits d’enfance et leur volonté de comprendre
comment s’est formé l’adulte qui écrit ? N’y-a-t-il pas un besoin « d’avouer » une enfance
malheureuse (pour justifier un caractère adulte) ou « heureuse » (pour justifier là aussi
certaines postures de l’adulte). On peut donc distinguer la notion de « confession » de celle du
« repentir ». Une autobiographie ne se fonde pas sur une ou des « erreurs », mais relève bien
dans tous les cas d’un besoin de « témoigner », de « dire », qui est une sorte de confession.
Cette confession n’appelle pas un jugement ou une punition, mais l’autobiographie est bien
une situation particulière de communication, très différente de celle du roman… bien que
celui-ci puisse être aussi une forme d’aveu comme c’est le cas aujourd’hui dans de nombreuses
« autofictions » (ex : Angot, Nothomb, Millet…).
(Note : un plan en deux parties peut être tout à fait satisfaisant. On valorise : respect du sujet,
questionnements, exemples variés, rédaction claire).
Invention :
On sera attentif :
Aux marques de la situation de communication (c’est une lettre…).
Aux arguments avancés (4 paragraphes peuvent suffire s’ils sont suffisamment développés).
Exemples d’arguments possibles :
1) L’intérêt du genre… pour soi en tant que lecteur, et pour l’éditeur en tant que vendeur (le
succès actuel du genre, et notamment sous des formes plus ou moins romancées type «
Bridget Jones »…).
2) Quel intérêt pour soi ? Je n’ai aucune faute à avouer, et je ne pense pas qu’une
autobiographie soit nécessairement fondé sur une volonté de repentir… Mais je ressens un
profond besoin d’exprimer ce qui me hante, ce qui m’angoisse et ce qui me rend heureux, dans
cette vie d’adolescent « ordinaire » du début du XXIème siècle…
3) Parce que j’ai déjà écrit un roman chez cet éditeur… un roman écrit très jeune, et qui a eu
un certain succés…
4) Pourquoi raconter sa vie si jeune ? Précisément parce que cela est inhabituel. Se décaler de
l’histoire d ‘un genre habituellement réservé à des écrivains d’âge mûr…
5) Pourquoi raconter une vie « banale » ? Pour revendiquer cette « normalité », pour rester
proche des lecteurs, trouver une relation de connivence… Qu’est-ce qu’un adolescent
aujourd’hui, que ressent-il, comment vit-il ? Titre possible : « Je ne suis pas un héros, mais je
m’en fous »… !!!
6) Parce que je tiens un journal intime régulièrement depuis l’âge de 12 ans… et revendiquer
un style, un ton, une écriture singulière, ni provocatrice, ni mièvre…un style déjà illustré par
le roman publié antérieurement par l’éditeur.
Conclusion : proposer de fournir avec cette lettre quelques pages déjà rédigées.
« En espérant vous avoir fait comprendre l’importance que ce projet a pour moi et l’intérêt
que pourrait avoir pour vous la publication de cet ouvrage, je vous prie d’agréer, Monsieur,
l’expression de ma considération distinguée et de mes hommages littéraires… ».
Note : on ne pénalisera pas le fait qu’il y ait des arguments qui exposent les raisons d’ écrire «
pour soi » et celles qui concernent aussi l’interêt de l’éditeur.