Électronique

Transcription

Électronique
EQUIPEMENTS TELECOMS –
ELECTRONIQUE - INFORMATIQUE
This work is licensed under the Creative
Commons Attribution-NoDerivs-NonCommercial
License. To view a copy of this license, visit
http://creativecommons.org/licenses/by-ndnc/1.0/ or send a letter to Creative Commons,
559 Nathan Abbott Way, Stanford, California
94305, USA.
Comme l’année précédente, nous avons regroupé tout le « matériel » et
tout le « logiciel », avec un parti pris de diversité : nous proposons plusieurs
coups de projecteur, techniques, stratégiques, sociologiques et même
esthétiques.
Les équipementiers télécoms souffrent toujours
L’an dernier nous avions décrit comment les grands équipementiers
avaient été pris à revers, après une expansion considérable et coûteuse, par
un tarissement subit de leurs commandes et par la déconfiture de nombreux
clients. Hélas, la situation ne s’est pas améliorée cette année. Réduire les
coûts pour abaisser le point-mort tout en n’hypothéquant pas trop l’avenir, tel
était le défi de 2002. Dans ce paysage très désolant, chaque grand industriel
essaie de trouver sa voie. Heureusement, une lueur d’espoir est apparue fin
2002.
Il y a neuf grands équipementiers dans le monde, mais on peut
légitimement se poser la question de la survie de l’ensemble, du moins en tant
que généralistes des télécoms. Les nord-américains Lucent (passant de 123
000 personnes en 2000 à 35 000 en 2003) et Nortel ainsi que Ericsson (dont
les problèmes ont fait baisser le PIB suédois d’un demi point) semblent les
plus affectés. Les six autres, à des titres divers, sont moins pessimistes.
C’est certainement le cas de Cisco. Le prodige des réseaux n’a pas
échappé à la crise, mais a limité les dégâts. L’entreprise a vu ses ventes
baisser de 15 % dans l’année fiscale 2002, mais a renoué avec les profits (1,9
milliards de dollars en année fiscale 2002 contre une perte d’un milliard de
dollars l’exercice précédent). En France, Cisco a renoncé, pour cause
d’économies, à la construction de son futur siège européen à Meudon mais
113
s’est classée 2 ème dans le « top 20 des grandes entreprises où il fait bon
travailler »1, derrière Microsoft...
Le deuxième du peloton est Alcatel. Effroyablement ballotté par la crise
boursière (l’action est tombée le 24 septembre 2002 à 2,05 € , mais termine
l’année à 4,18 € ), la dette descendue au rang des « obligations pourries »,
après avoir supprimé plus de la moitié de ses effectifs depuis 2000 et avec
encore 23 000 personnes à faire partir en 2003, cédant sa distribution
européenne au fonds d’investissement Platinum Equity, diminuant ses coûts
opérationnels de 25 % en un an face à une baisse de 35 % du chiffre
d’affaires, et malgré tout finissant l’année sur une note presque optimiste :
avec 40 % du marché mondial du DSL, très bien implanté en Chine, se
renforçant (achat d’Astral Point.Com pour 153 M€ ), surprenant les analystes
par ses résultats en hausse. Alors que les salariés « sont à bout »2, le PDG
Serge Tchuruk déclare3 : « S’il n’y a qu’un survivant, ce sera Alcatel ».
Nokia pour sa part jouit de sa place de leader mondial du marché des
terminaux mobiles (il vise 40 % et cela représente les trois-quarts de son
chiffre d’affaires…), mais est touché par le retard pris dans le déploiement de
l’UMTS en Europe.
Quant à Siemens, son activité diversifiée et sa gestion prudente lui
permettent de ne pas aller au delà d’une sévère restructuration de ses
activités. L’entreprise a annoncé vouloir se séparer de sa division téléphonie
fixe si elle ne devenait pas rentable et a entamé des négociations avec
Motorola pour échanger des actifs. Ce dernier devrait finir l’année à l’équilibre.
Sa force vient de sa position de leader de l’énorme marché des mobiles en
Chine (28 % de part de marché environ).
Parmi les « petits », Marconi n’en finit pas de diminuer de taille, sans
atteindre pour autant la rentabilité. Quant à Sagem, l’entreprise continue son
chemin atypique à cheval sur l’électronique de défense et les
télécommunications, ce qui lui permet de mieux supporter la crise. L’entreprise
poursuit sa diversification en achetant Monetel à Ascom et en entrant dans le
capital de Gemplus.
1
Isabelle Mas et Sabine Dreyfus-Arnaud, Les entreprises les plus cool, L’Expansion,
novembre 2002
2
Le Parisien, 3 octobre 2002
3
Le Monde, 22 septembre 2002
2
La crise de l’Optique
Eric Gangloff
Les Télécoms sont en crise et l’Optique, pierre angulaire dans ce
domaine, est évidemment frappée de plein fouet.
Pourtant, le secteur des télécommunications optiques est sans doute un
de ceux qui ont résisté le plus longtemps à la tourmente qui, après avoir
secoué le monde Internet, a soufflé sur les Télécoms. Le marché de l’Optique
a largement bénéficié des pratiques euphoriques, souvent excessives voire
déraisonnables, qui ont caractérisé les Télécoms ces dernières années.
L’optique avait inventé sa propre loi. Mieux que la loi de Moore qui traduit le
doublement de la capacité des puces informatiques tous les dix-huit mois, la
capacité des fibres optiques doublait tous les neuf mois. Les profits
continuaient de croître alors que tous les autres pans de l’économie des
Télécoms s’effondraient les uns après les autres.
Ce n’est plus le cas aujourd’hui. La dégringolade est à la mesure des
sommets atteints. Les plus touchés sont les constructeurs et dans une
moindre mesure, les opérateurs.
Les retombées sont importantes sur l’économie des régions qui avaient
beaucoup misé sur l’Optique. Le Trégor autour de Lannion qui concentrait un
grand nombre de start-ups est particulièrement touché. Plusieurs communes
de l’Essonne qui avaient cru elles aussi en l’avenir de l’optique et financé
d’ambitieux programmes de recherche se retrouvent aujourd’hui
décontenancées face au revirement stratégique des grands groupes
industriels du secteur. Le projet « Optics Valley » en vallée de Chevreuse en
est un exemple.
On dispose effectivement aujourd’hui d’une surcapacité de fibres dans
tous les grands réseaux d’opérateurs. On a compté, par exemple, jusqu’à une
trentaine d’acteurs sur les réseaux pan-européens ; chacun disposant
potentiellement de centaines de Gbit/s sur chaque section du réseau.
3
Alcatel et la crise de l’optique
La branche optique d’Alcatel autrefois florissante est aujourd’hui dans la tourmente.
Les annonces de réduction d’effectifs se sont succédées au cours de l’année 2002. Pourtant,
le secteur optique a longtemps résisté. En avril 2001, alors que les mobiles étaient déjà en
pleine crise, Serge Tchuruk prenait la décision de reconvertir le site d’Illkirch en Alsace vers
la fabrication de sous-systèmes intégrés pour Alcatel Optronics, la filiale optoélectronique du
groupe. Au point que le Télégramme de Brest pouvait titrer alors : « Alcatel se réorganise
dans les mobiles et se muscle dans l’optique ».
Depuis, les activités en optique sont en chute libre. Le secteur accuse un résultat
opérationnel déficitaire de 225 M€ pour le troisième trimestre 2002 alors qu’il enregistrait
encore un léger excédent de 29 M€ au dernier trimestre 2001.
Les deux secteurs les plus touchés sont les systèmes sous-marins et les fibres
optiques. L’activité sous-marine, un des fleurons du groupe, a enregistré une chute de 80 %
entre 2000 et 2002. Il n’y quasiment plus de commandes et rien n’est annoncé pour l’année
à venir. Le site de Calais perdra 280 emplois sur 745. A Ormes, dans le Loiret, l’activité
réseaux marins perdra 70 postes sur 830.
Côté fibres, le déclin est évalué à 60 % sur les deux dernières années. La décision la
plus spectaculaire est la fermeture définitive de l’usine de fabrication de câbles optiques de
Conflans-Sainte-Honorine qui compte 380 salariés. Les activités de recherche sont
transférées à Douvrin dans le Pas-de Calais.
L’activité composants optiques est au plus mal. Les sites de production d’Illkirch (700
salariés) et de Lannion (250 salariés) sont menacés de fermeture. Alcatel Optronics a décidé
de recentrer ses activités d’optronique sur les deux sites de Nozay en région parisienne et
Livingston en Ecosse.
Le déclin du géant entraîne dans sa chute un certain nombre d’entreprises du
secteur. La région de Lannion est particulièrement affectée. Ainsi Highwave, spécialisé dans
les composants optiques, en est à son troisième plan de suppression d’emplois en quelques
mois. Après voir fermé ses deux sites de production des Ulis en Essonne et de Trégastel en
Bretagne, la société ne maintiendra que 65 emplois à Lannion. Dramatique illustration de la
dureté des temps : Highwave employait près d’un millier de collaborateurs avant que la crise
ne frappe le secteur des télécommunications optiques
4
A peine 10 % de la capacité potentielle est aujourd’hui effectivement
utilisée. Néanmoins, tout n’est pas totalement sombre. Les marchés de
l’Extrême-Orient sont toujours en forte croissance et permettent de maintenir
une activité. D’autre part, l’optique ne se limite pas à la fibre. Les réseaux
métropolitains, situés entre les cœurs de réseau et la boucle locale, étaient
restés un peu en marge des investissements.
Ils sont aujourd’hui l’objet de beaucoup d’attention de la part des
constructeurs qui cherchent à y introduire des produits spécifiques. Plusieurs
start-ups tentent de proposer pour ce marché des solutions hybrides prenant
en compte les spécificités de ce segment de réseau.
Il est indéniable que les infrastructures de câbles optiques sont
aujourd’hui pléthoriques et en tout cas surdimensionnées par rapport aux
besoins actuels. Néanmoins, ce patrimoine est en place pour de nombreuses
années et l’infrastructure optique constitue le socle de tout l’édifice Télécom, le
dénominateur commun du réseau. Ce constat s’applique en fait aux
backbones et dans une moindre mesure aux réseaux métropolitains. La
percée de l’optique dans la boucle locale est à ce jour marginale. Il y a là un
immense marché qui attend les investisseurs pour peu que quelques
politiques volontaristes s’appliquent à promouvoir la fibre dans ce segment de
réseau.
Tout ou presque passera à l’avenir par la fibre optique. Il ne fait aucun
doute que les innovations futures, encore dans les limbes pour la plupart
d’entre elles, nécessiteront des bandes passantes sans commune mesure
avec celles utilisées aujourd’hui. Il ne serait pas étonnant que l’Optique
connaisse, une fois la crise passée, une croissance spectaculaire.
Les opérateurs propriétaires de ce patrimoine auraient sans doute tort
d’adopter une vision à trop court terme en faisant le choix de brader un
patrimoine qui constitue un capital pour l’avenir.
La rencontre de deux mondes :
le mariage de raison des Télécoms et des Réseaux
Eric Gangloff
5
On assiste depuis quelques mois à d’intéressants rapproche-ments
entre deux mondes qui ont longtemps cohabité sans vraiment se fréquenter :
le monde des télécoms, domaine privilégié des grands opérateurs du
téléphone et le monde des réseaux, issu de l’informati-que et colonisé depuis
peu par le protocole Internet.
Chaque monde avait jusqu’alors ses propres protocoles, ses propres
infrastructures, choix justifiés par la nature même des flux véhiculés. D’un
côté, le monde des réseaux d’entreprise, les LAN (Local Area Networks)
caractérisés par des distances faibles, un profil de trafic de type sporadique,
difficilement prédictible et sans grande contrainte de temps réel. Ethernet s’est
imposé dans ces réseaux de données pour le transport des datagrammes IP.
Ethernet représente en effet aujourd’hui 95 % des LAN, les 5 % restant étant
partagés entre les technologies ATM et Token-Ring. Un succès qui s’explique
en grande partie par son faible coût et sa facilité de mise en œuvre.
Chez les grands opérateurs, les réseaux avaient été construits pour
acheminer le trafic entre commutateurs, un trafic prévisible, à croissance
modérée et de type agrégé. Ces réseaux sont structurés à partir des
techniques SDH (Synchronous Digital Hierarchy) et dans une moindre mesure
ATM (Asynchronous Transfer Mode) qui garan-tissent qualité et disponibilité à
très haut débit. Des réseaux robustes assurant une qualité de service
irréprochable mais qui nécessitent des investissements lourds. Le provisioning
y est lent. Etablir une liaison louée peut demander des jours. En bref, ces
réseaux sont mal adaptés au trafic IP issu des LAN qui exige souplesse et
réactivité.
Depuis peu, de nouvelles exigences apparaissent. Les réseaux
d’entreprise, si bien adaptés au trafic de données peuvent difficilement assurer
la qualité de service que requièrent les nouvelles applications. Par ailleurs, on
souhaite de plus en plus interconnecter les LAN via des réseaux
métropolitains (MAN : Metropolitan Area Network) sur des distances plus
importantes. La donne a aussi changé pour le cœur de réseau. Le trafic de
données, lié à l’essor de l’Internet, a connu une croissance spectaculaire. Il
dépasse désormais en volume le trafic téléphonique.
6
Pendant longtemps, chaque monde a cherché ses propres réponses
feignant souvent d’ignorer les travaux effectués par ailleurs. On a vu ainsi se
multiplier les protocoles, les nouvelles couches de réseau. De nouveaux sigles
sont apparus. La crise des télécoms n’est certainement pas étrangère au
rapprochement inattendu auquel on assiste ces derniers mois. Il n’est pas
anodin de constater en effet que le pragmatisme auquel chaque acteur se voit
contraint en ces temps chahutés, incite chacun à adopter une position moins
dogmatique.
Au lieu de réinventer ce qui existe déjà, la tendance serait plutôt
aujourd’hui à utiliser le meilleur des deux mondes. Les grands opérateurs
cherchent à conserver le réseau existant pour le faire évoluer vers un réseau
qui combinerait la souplesse et la réactivité du LAN à la robustesse des WAN
(Wide Area Networks).
Les MAN sont le terrain privilégié de cette rencontre. Ils font l’objet
aujourd’hui de toute l’attention des opérateurs et des constructeurs. Les
équipements installés ces derniers temps intègrent de manière optimisée les
fonctionnalités Ethernet et SDH. La technique WDM (Wavelength Division
Multiplexing) sous-jacente constitue l’interface avec le support optique. Sur
une même fibre optique peuvent alors cohabiter des flux très diversifiés ayant
des exigences de qualité de service différentes.
Le CEBIT qui s’est tenu au printemps 2002, a parfaitement reflété ce
nouveau positionnement des opérateurs. Aucune annonce spectaculaire n’a
émaillé ce salon. Au contraire, tous les participants ont plutôt joué la carte du
pragmatisme, mettant en avant leur préoccupation de « coller » réellement aux
besoins exprimés par des clients soucieux avant tout de valoriser leurs
infrastructures.
Les produits intégrés tels que les plate-formes multiservices ont été
particulièrement remarqués et plusieurs gros contrats passés ultérieurement
ont confirmé le bien fondé de cette approche. Plusieurs start-ups du secteur
ont tiré leur épingle du jeu cette année sans doute parce qu’elles avaient su ou
pu anticiper les exigences des clients bien avant les grands du secteur.
Atrica par exemple, décroche plusieurs contrats avec de gros
opérateurs, France Télécom, notamment. Une stratégie novatrice et gagnante
que résume l’analyste Michael Howard : « Atrica a fait preuve de qualités
7
d’innovation précoces et démontre sa compréhension des exigences des
opérateurs. En intégrant commutation optique et Ethernet, Atrica réduit les
dépenses d’investissement (CAPEX) et d’exploitation (OPEX) permettant aux
opérateurs d’éviter l’exploitation de réseaux optiques et Ethernet séparés ».
Un exemple suivi par d’autres. Foundry Networks, Riverstone ont elles aussi
adopté la même approche, finalement gagnante dans un contexte
particulièrement difficile.
Autre exemple de cette stratégie, la société chinoise Huawei. Premier
équipementier chinois, cette compagnie est celle qui a connu la plus forte
croissance du secteur ces derniers mois. Une spectaculaire ascension. Après
avoir conquis le marché asiatique, Huawei s’attaque au marché prometteur
des réseaux métropolitains européens. Plusieurs grands opérateurs
européens ont déjà choisi l’équipementier chinois.
Les mastodontes ont bien sûr réagi. Lucent, Alcatel, Nortel ont eux aussi
élargi leur gamme de produits mais souvent avec un retard qui ne pardonne
pas dans un monde où la réactivité est une qualité essentielle.
L’industrie chinoise des mobiles se développe
Bruno Salgues
L’Asie devient la zone la plus dynamique en ce qui concerne les
télécommunications mobiles. Parmi les pays de cette zone, la Chine est
devenu en 2002 le plus grand marché des téléphones mobiles. Peu à peu, elle
devient aussi le plus grand fabricant avec 110 millions de mobiles produits en
2002 et des exportations de 45 millions d’unités.
Une économie des téléphones mobiles en proie à des évolutions
importantes …
Avec plusieurs centaines de modèles proposés par une trentaine de
fabricants, la Chine est l’un des marchés les plus fragmentés et les plus
concurrentiels au monde. Alors que les plus grands noms de la téléphonie
mobile, comme Motorola et Nokia continuent de se tailler la part du lion
(environ la moitié du marché à eux deux), ils font face à l’explosion des
8
téléphones spéciaux fabriqués localement. Il y a un an, ces constructeurs
locaux ne détenaient pas plus de 25 % de part de marché. Fin 2002, il est
difficile d’annoncer des chiffres. Au moment où de grands opérateurs comme
Orange commercialisent en Europe des téléphones conçus et fabriqués dans
cette zone, l’impact des produits fabriqués en Chine se fait aussi sentir à
l’exportation.
La bataille est perceptible dans les magasins de téléphones mobiles,
omniprésents en Asie, où les fabricants mondiaux rivalisent avec des marques
locales, dont beaucoup sont les héritières des secteurs de l'électroménager et
de l'électronique. Eastcom, TCL, China Kejian, Ningbo Bird et Capitel, le géant
des ordinateurs Legend Group et Xiamen Overseas Chinese Electronic
figurent parmi les autres fabricants locaux d’origine chinoise.
A l’appui de la thèse selon laquelle les téléphones conçus en Asie sont
les plus à même de remporter les suffrages des clients du monde entier, le
sud-coréen Samsung Electronics, troisième fabricant mondial, gagne des
parts de marché dans le monde et aussi sur le marché chinois. Les alliances
se multiplient entre des fabricants de cette zone et nos leaders européens.
Déjà Sony s’est associé avec Ericsson. Siemens développe ses produits en
Chine avec la China Academy of Telecommunications Technology de Datang
depuis 1998.
Des produits originaux …
L’originalité des mobiles caractérise la production asiatique.
L’individualisation du mobile dépasse le changement de coque initié par le
constructeur nordique Nokia.
L’originalité est d’abord dans le design. Certains appareils produits par
TCL sont sertis de diamants vrais ou faux. D’autres dansent lorsque la
sonnerie se déclenche, tel le modèle "A8" de Amoisonic. Enfin, le téléphone
« Oriental Pearl-888 » d’Eastcom, est de forme carrée, il est recouvert de
peau de gourami, un poisson d'eau douce aux écailles perlées…
La spécificité des téléphones apparaît aussi dans les usages des
appareils, ce qui impose au fabricant d’utiliser des solutions logicielles
9
téléchargeables et écrites dans des langages simples et normalisés. Cette
situation a fait le bonheur de SUN grâce à Java. Il en est de même pour le
géant du logiciel Microsoft, qui a annoncé avoir signé un contrat d'utilisation de
son logiciel pour téléphones portables et ordinateurs de poche fondé sur
Windows avec l'entreprise de télécommunications mobiles TCL Mobile.
Des entreprises presque inconnues en Europe
Présenter un panorama exhaustif de la production chinoise serait
fastidieux. Voici simplement une brève présentation de quelques entreprises
représentatives.
TCL Mobile est détenue à 30 % par TCL International Holdings, cotée à
la bourse de Hong-Kong. Forte d'une croissance exponentielle, la firme a
vendu 1,04 millions de combinés mobiles au premier trimestre 2002, contre
114 000 l'année précédente à la même époque. Le géant japonais de
l'électronique Matsushita Electric Industrial a réalisé une alliance avec TCL
pour améliorer sa rentabilité en Chine et pour étendre ses activités dans ce
pays. Matsushita, connu pour ses marques National et Panasonic, possède 41
usines en Chine, concentrées sur la zone côtière et a dégagé des ventes de
300 milliards de yens sur l'année terminée fin mars 2002 uniquement avec ses
activités chinoises. Les accords entre ces deux firmes passent par de la
production et de la distribution réciproques.
PTIC Capitel a été fondé en 1946. Elle est issue de l’opérateur de Pékin
créé en 1906. Elle construit des téléphones mobiles et des infrastructures
dans une usine proche de la capitale chinoise.
Eastcom s’est développée autour de l'usine du matériel de
transmissions de Hangzhou qui était l'un des plus grands fabricants de ce
domaine tenus par le gouvernement chinois via le Ministère de
télécommunications. Eastcom est devenue une « compagnie de pointe »
généraliste des réseaux mobiles. Eastcom a établi un centre de R&D en Chine
et a un centre de R&D secondaire dans la Silicon Valley californienne. Il a
coopéré fructueusement avec Motorola. L’entreprise est implantée dans la
province de Zhejiang.
10
Ningbo Bird, créée en octobre 1992, a démarré sa production en février
1993 dans la province de Zhejiang (Ningbo est une ville de cette province
côtière). Cette firme est actuellement l’une des plus grandes productrices de
mobiles et pagers en Chine. L’usine produit trois millions de mobiles par an,
avec 6000 employés. Elle dispose d’un centre de recherche qui regroupe plus
de 200 ingénieurs. Toute la production actuelle est conçue par la firme à
l’exception d’une gamme de produits conçue en coopération avec la firme
française SAGEM. ChinaConnect, une filiale technologique de Lionbridge, a
signé un accord définitif avec Ningbo Bird pour développer conjointement des
mobiles utilisant la technologie Java en avril 2002. Elle utilise aussi les
technologies de texte prédictif de la firme canadienne Zi.
ChinaConnect a, avec succès, intégré sa plateforme sans fil SkyVM
avec les prochains téléphones modèles de la génération CDMA 2000-1x. Il
réalise localement des téléphones développés avec la technologie Java
depuis le troisième trimestre de 2002. SkyVM permet à des équipements
portables d’utiliser différentes normes de matériel qui acceptent des
téléchargements dynamiques en Java.
Le Groupe JinPeng, dont le siège social se trouve dans la province de
Guangdong (Canton) assure actuellement la fourniture à China Unicom
d’équipements GSM composés d'un commutateur conçu et produit par lui,
ainsi que de stations de base produites avec Motorola dans le cadre d'une coentreprise avec cette firme.
CEC Telecom, dispose d’une capacité de production annuelle de deux
millions d’unités de combinés téléphoniques mobiles. Le groupe CEC, dont
l’Etat chinois est l'actionnaire majoritaire, commercialise sur l’ensemble du
territoire les combinés réalisés selon les technologies de la société coréenne
KTF.
La co-entreprise GreaTom a été créée par la société hongkongaise
Tom.com et le groupe de la Grande muraille de Chine, dont le siège se trouve
en Chine continentale. Ses activités sont centrées sur les services Internet, les
jeux vidéo en ligne, le VoIP (Voice Over IP), ainsi que les portails mobiles, et
sa valeur a récemment été estimée à 60 millions de dollars par HSBC.
11
ZTE (Zhongxing Telecom) est une compagnie généraliste, créée en
1985, qui construit des mobiles GSM, GSM/GPRS et CDMA, mais aussi les
infrastructures de réseau associées. Etabli à partir de technologies de semiconducteurs à Shenzhen, elle a évolué vers une intégration totale des
systèmes. Elle annonce, pour 2002, un revenu proche de 2,5 milliards d’euros.
Elle développe une forte capacité de R&D avec des centres de recherches à
Nanjing , Shenzhen, Shanghai (depuis 1994), Pékin (depuis 1998) Xi-an
(depuis 2000) et en Corée depuis 1999 pour le développement des mobiles
CDMA.
Les coréens sont particulièrement actifs en Chine. Fin 2001, le second
opérateur de téléphonie mobile coréen (KTF) annonçait l'établissement d'un
partenariat avec trois sociétés de télécommuni-cations chinoises aux termes
d'un marché dont le montant est évalué à 20 M$. Cette alliance a été signée
avec le fabricant de combinés portables CEC Telecom et le Groupe JinPeng,
un constructeur de matériels de télécommunications. En vertu de cet accord,
KTF et CEC Telecom s'engagent à créer une entreprise commune qui
assurera la production de combinés portables de type CDMA (concurrent du
GSM) et, dans le cadre d'une coopération avec le Groupe JinPeng, à proposer
des prestations de réalisation de réseaux et de fourniture de services
multimédia mobiles. Puis, c’était au tour de la société GreaTom de s’unir à
KTF par un second regroupement stratégique portant sur des activités
multimédia et Internet mobiles.
Les Japonais ne sont pas en reste : ainsi Toshiba produit et
commercialise des téléphones mobiles en Chine et à Taiwan ainsi qu’en
Europe dans le but de pousser les ventes au-delà du Japon et des Etats-Unis.
Toshiba, qui développe des téléphones mobiles en collaboration avec
Siemens, vise la vente de plusieurs centaines de milliers de téléphones
mobiles en Chine, pendant l'année comptable qui va terminer en mars 2003,
et un million de portables la prochaine année. Toshiba fournit des téléphones
mobiles compatibles avec l’Internet aux opérateurs téléphoniques américains
et hollandais (KPN) dès avril 2002, en les important via une société
taiwanaise.
D’ailleurs, signe des temps, l’opérateur Orange commercialise un
téléphone provenant de cette zone en cachant la marque asiatique sous le
signe SPV qui signifierait Son Photo et Vidéo …
12
Deux constructeurs de niche
Michel Berne
Pour les happy few qui cherchent l’exclusivité pour leur téléphone portable,
Vertu offre depuis 2002 une gamme de mobiles de luxe (celui en platine est le
plus cher, 24000 € , et le plus lourd, 215 g) qui ne peut s’acquérir que dans
quelques boutiques dans le monde et sur le web. La firme a aussi mis en
place un service de concierge pour résoudre à distance les petits problèmes
de la vie. Vertu est une filiale de Nokia, basée au Royaume-Uni, qui emploie
200 personnes. (www.vertu.com). Plusieurs autres grands constructeurs ont
annoncé le lancement de gammes de produits de luxe et le joaillier autrichien
Peter Aloisson fait aussi des coques de portables de luxe sur mesure.
Dans un tout autre style, le finlandais Benefon (www.benefon.com) est
le spécialiste des mobiles « de sécurité » incorporant le GPS. Il commercialise
aussi des mobiles NMT ou mixtes NMT/GSM, encore utilisés dans les grandes
étendues nordiques. Il s’est fait remarquer en 2002 par la conception d’un
mobile pour chien de chasse. Benefon, créé en 1987 par deux anciens de
Nokia, emploie environ 160 personnes, exporte dans 50 pays et a un chiffre
d’affaires de l’ordre de 50 M€ .
13
Esthétique : les nouvelles générations
Mabel Seijas
Ultra-léger, ultra-performant, miniaturisé, sophistiqué et, si possible,
coloré, sont les adjectifs récurrents qui doivent être associés aux nouveaux
produits high-tech.
Loin de nous la lourdeur, les dimensions imposantes, les couleurs
sombres. L’effet « tendance » joue ici son rôle et nous avons vu en 2002
comment, en plus de qualités techniques, l’habillement de l’objet compte de
plus en plus pour les consommateurs. Ces si chers produits, intégrés dans la
vie quotidienne, ces compagnons doivent être «mode ». Etres en constante
évolution ils sont entrés dans la dichotomie du paraître. Pris dans un
processus d’humanisation les outils de jadis, plus intelligents et plus beaux,
plus « portables », sont dorénavant en train de devenir une extension du
« corps ». Mains et regards sont avec ou sur eux. Quels que soient les offres
et les produits, tous mettent en commun l’appât du « confort ». L’alliance
entre beauté et intelligence (vieux fantasme de la psyché humaine) a, semblet-il, traversé la frontière pour intégrer maintenant un idéal dans la conception
« des objets tech de rêve ».
Le phénomène a une ampleur particulière et, puisque de regard il s’agit,
jetons un coup d’œil sur quelques exemples. D’abord les écrans plats à
cristaux liquides sont en train de devenir l’alternative obligée face aux
moniteurs à tube. Il y a d’un côté la diminution des prix (le prix moyen est de
600 € contre 1000 € en 2001), mais aussi des améliorations constantes,
comme l’augmentation des niveaux de con-traste, avec des angles de
visualisation de 170 degrés. Il y a 16 fabricants dans le monde dont le premier
est Samsung, suivi du consortium LG et de Philips. La production mondiale
pour l’année 2002 est de 33 millions d’unités, Taiwan et la Corée du Sud en
concentrant 75 %. James Chu, le principal fournisseur indépendant sur le
marché des USA, (Viewsonic) annonce un chiffre d’affaires supérieur à 1,4
milliards d’euros, dont 300 millions en Europe. Il définit très bien la nouvelle
tendance : « maintenant le facteur pour choisir un équipement est la forme et
la dimension du moniteur »4.
4
Dans Ciberp@is, El Pais, 29.08.2002
14
Passons maintenant aux assistants personnels, les PDA : belle réussite
de l’ordinateur « miniature », fait à la dimension de notre main ! La propre
idée « d’assistant » permet une personnalisation de cet outil qui n’est plus
seulement un ordinateur mais qui ouvre d’autres perspectives assez
insoupçonnées et prometteuses. Pour Sophie Tarry, chef de produit chez HP
France5, « c’est la multiplication de ces applications qui va aider au
développement des PDA ». Nouvelles utilisations qui s’inventent (par exemple
Assimil a misé sur cet outil pour ses méthodes de langue) le Guide
thérapeutique de Masson et le Vidal médical (dont il faut dire qu’ils sont assez
encombrants en version papier !), ont fait de même. Le futur est semble-t-il
chaque jour plus PDA, guidage graphique, œuvres de droit, tourisme. D’autres
applications sont imminentes.
En France 60 % d’utilisateurs donnent la «palme » à Palm, qui occupe
la première place du marché. Petit bijou le M 515 avec son écran couleur,
mais il y a aussi le Compaq iPaq, le Toshiba e-310. Dorénavant le choix passe
par de nouveaux « modèles » où les qualités de puissance et de confort
s’allient à la « beauté ».
Le même phénomène concerne, bien sur, la téléphonie mobile : les
nouveaux petits appareils offrent l’alternative de devenir plus gais, plus
colorés, et donc « personnalisables » au gré du consommateur, moyennant
l’achat de gadgets supplémentaires.
Nous voudrions aussi mettre l’accent sur un vieil objet, déjà miniaturisé,
que nous portons à notre poignet, en le regardant sans cesse. Fallait-il y
penser ! La e-montre ! Il est évident que naît ici un nouveau champ
d’attraction : puisque nous avons l’habitude de la porter et étant donnée sa
petitesse pourquoi ne pas la doter de nouvelles possibilités ? Les montres
vont compter donc plusieurs fonctions numériques. D’ailleurs elles sont déjà
en train de se transformer en mini-ordinateurs, en permettant l’accès à
Internet, en prenant des photos, en devenant téléphones.
Aux Etats-Unis, le Timex Internet Messenger (99 $) dispose d’un
processeur, de mémoire et d’un logiciel et peut se connecter au Réseau. On
peut aussi accéder au courrier électronique, à certains services Yahoo!, et
d’autres renseignements : météo, courrier électronique, etc. P.C. Unite de
5
Cité dans le journal « Le Monde », 20.09.2002
15
Casio est une sorte d’agenda doté d’une connexion au PC. Swatch, de son
coté, a conçu Cybercom-mander qui peut garder en mémoire les différents
codes d’accès à des sites Internet. Citons également le projet Spot de
Microsoft qui donnera des produits signés Fossil, Citizen ou Suunto. L’idée de
transformer la montre en mobile est aussi l’expérience tentée par Samsung.
Watch Phone, est le mobile (disponible en Corée) le plus petit et léger : 37
grammes.
Dans notre XXIème siècle ces objets multi-usages offrent de nouvelles et
étonnantes possibilités. Ils sont conçus en tenant compte d’utilisateurs très
ciblés. Si nous pensons au public des amateurs de sport ou des amateurs
d’aventure, ils peuvent compter sur la Tissot T-Touch spécialement pensée
comme montre numérique «boussole » tout terrain ! En effet, elle dispose de
multiples fonctions avec son écran tactile : chronomètre, altimètre,
thermomètre, baromètre, alarme, boussole. Certains produits intègrent des
localisateurs GPS comme la Casio Protreck Satellite Navi GPS 2 et il y a déjà
des prototypes (à l’Université de Bristol) avec un système de reconnaissance
vocale.
D’autres modèles sont ciblés sur les mélomanes comme la Casio WMP1 qui stocke des chansons en format MP3 et se connecte à l’ordinateur à
travers une prise USB. Le Casio WQV-10D permet la prise de photos et peut
garder jusqu’à 100 instantanés. Et d’autres créatures intelligentes comme
Swatch Access permettent l’ouverture électronique des portes ou le paiement
des billets dans l’autobus. L’idée est toujours là : avoir tout dans un même
objet et plus qu’à la portée de la main ! Voici, donc, beaucoup de nouvelles
perspectives pour ce petit ordinateur multi-usages et portable.
Nous avons ouvert cet ouvrage sur une évocation de « l’heure
Internet » : pour aider les cyber-rencontres, Swatch avait créé il y quelques
années une nouvelle mesure de temps universel : le jour est divisé en 1000
beats. Dans la Swatch Beat, en plus de l’heure locale et de l’heure à l’étranger
nous pouvons consulter l’heure Internet.
Nous pourrions parler d’autres produits originaux, par exemple une
mémoire qui a la taille d’un porte-clé et permet de charger l’information pour
ne plus avoir besoin de nous balader avec un ordinateur. A l’épreuve de l’eau
16
et de la poussière et avec une capacité de 32, 64, 128 ou 256 Mo (connexion
USB) comme le FM-1 de Freecom.
L’un des traits qui caractérise la nouvelle société est qu’elle devient plus
nomade, et, par conséquence, les meilleurs atouts des produits seront
vraisemblablement les notions de légèreté et de puissance. C’est aussi la
raison pour laquelle nous entendons et entendrons beaucoup parler des «
hybrides » : des produits qui auront comme base l’ordinateur. Produits
multifonctions qui vont multiplier les possibilités mais seront faciles à
manipuler.
Comme dernier exemple nous mentionnerons une petite caméra photo
et vidéo : l’Aias ressemble d’emblée à un petit caméscope numérique avec
son écran LCD en couleurs de 1,6 pouces (d’une taille assez réduite :
92x75x35 mm). L’un de ses atouts ? Elle n’a pas besoin de cassette pour
enregistrer ! Sa mémoire interne de 8 Mo lui permet de stocker des images
photo et vidéo, celles-ci pouvant être visionnées par Internet et les photos
tirées au format 10x15. Autre aspect séduisant : elle sert aussi de webcam et
se connecte sur PC ou Mac par prise USB. D’autres logiciels comme
Netmeeting permettent une visioconférence entre amis (Aias, Spypen à un
prix indicatif de 229 € ).
Un produit de rêve et assez abordable, puisqu’il faut le dire, la
concurrence passe aussi par la diminution progressive des prix de tous ces
petits bijoux ! Si de légèreté il s’agit, il faut aussi penser à celle de la facture.
L’engouement pour les lecteurs de DVD
2002 est définitivement l’année du DVD en France. Selon Samsung, le taux de
pénétration serait passé de 12 à 23 % en 2002 en France et les ventes (2,5 millions selon
GfK) dépasseraient celles des magnétoscopes. Cet engouement fait naître des marchés de
niche : baladeur DVD (Sony D-VM1), camescope DVD, lecteur mixte VHS-DVD, graveur de
DVD. Et déjà se profile l’arrivée des DVD enregistrables à laser bleu « Blu-Ray Disc », hélas
en deux formats incompatibles, présentés cette année (d’un côté NEC et Toshiba ; de l’autre
Sony, Philips etc.). Ce nouveau format permet de stocker 27 Go.
17
Micro-électronique
Après une année 2001 catastrophique, 2002 a vu une stabilisation de
l’activité selon le WSTS 6. Toutefois, cette industrie étant très cyclique, un
rebond est perceptible en 2002 sur certains segments – on verra sans doute
des pénuries en 2003.
L’heure est aux alliances pour rester dans la course : Intel, qui a lancé
en janvier 2002 le Pentium 4 gravé à 130 nanomètres, va passer à la gravure
à 90 nanomètres en 2003 et annonce 65 nanomètres pour 2005. Et les
leaders de l’industrie passent à des wafers (tranches) de silicium de 300 mm
de diamètre – un investissement d’au moins 2,5 milliards de dollars par usine.
Les questions stratégiques ne manquent pas : faut-il suivre la technologie, ou
devenir un designer, « industriel sans usine », qui sous-traite à des fondeurs ?
Faut-il se spécialiser dans des marchés de niche, plus rémunérateurs mais
plus exigeants ?
Il en va ainsi pour les entreprises japonaises, autrefois dominantes. Les
cinq plus grandes (Fujitsu, Hitachi, Mitsubishi, NEC et Toshiba) avaient perdu
4 milliards de dollars en 2001 dans leurs activités de micro-électronique. Elles
sont coincées entre les grands donneurs d’ordre américains et les soustraitants réactifs et à bas prix d’Asie du Sud-Est, dont Taiwan. Elles essaient
de limiter la casse grâce à des alliances complexes. Hitachi et Mitsubishi ont
décidé de fusionner en 2003 leurs activités (hors mémoires) dans une coentreprise, Renesas Technology. Mitsubishi va rejoindre Elpida, la filiale
commune de Hitachi et NEC dans les mémoires. NEC a filialisé sa division
micro-électronique dans NEC Electronics pour la dynamiser. De même,
l’américain Micron et le coréen Hynix ont annoncé leur fusion, qui n’a pas été
finalisée bien que cela en aurait fait le premier producteur mondial sur le
marché très concurrentiel des mémoires. Les fondeurs taiwanais, qui
craignent la concurrence de Chine continentale mais rêvent de son marché
tout proche, cherchent les liens et essaient de monter en gamme : UMC s’est
allié à AMD, TSMC fait de la R&D avec Philips et STMicroelectronics. Ces
deux derniers sont rejoints en avril par Motorola dans leur alliance
technologique basée à Crolles, près de Grenoble.
6
World Semi-conductor Trade Satistics, www.wsts.org
18
Encore en Europe, Infineon, qui avait échoué à s’allier avec Hynix, a
racheté en juin la division micro-électronique d’Ericsson pour 400 millions
d’euros.
Une autre victime de la crise est Gemplus, entreprise française leader
des cartes à puce. L’entreprise réalisait presque 70 % de son chiffre d’affaires
dans la téléphonie mobile et subit l’impact de la saturation du marché. A la
suite de ses pertes, Gemplus est entrée depuis 2000 dans une spirale
infernale : plans sociaux, dissensions au conseil d’administration entre
actionnaires (le fonds américain TPG, la famille Quandt – qui possède BMW –,
le dirigeant historique Marc Lassus), avec éviction de ce dernier qui accuse les
américains de vouloir mettre la main sur les brevets de l’entreprise. La part de
M. Lassus est rachetée par Sagem en décembre 2002 ce qui pourrait pacifier
la situation, mais pas éviter les quelques 1000 suppressions d’emplois
supplémentaires prévues.
Pour conclure ce tour d’horizon, il ne reste plus qu’à donner des
nouvelles d’Intel qui domine l’industrie de la tête et des épaules. Confrontée à
une demande peu dynamique, l’entreprise a pu stabiliser ses ventes et
poursuivre ses investissements. Par ailleurs, Intel a commencé à solder ses
diversifications les plus aventureuses mais doit élargir ses clients – 80 % de
son chiffre d’affaires vient du monde du PC et la firme détient 80 % de ce
marché… Le sans-fil est le grand relais de croissance à court terme.
Informatique
Le marché du PC
Le marché mondial des PC, qui avait décru de 4,2 % en 2001 selon
IDC, a progressé modestement en 2002. En France, selon GfK, les ventes de
PC ont baissé de 2 % en 2002 : -8 % pour les PC de bureau et +25 % pour les
portables. Les prix d’entrée de gamme des PC de bureau sont tombés à 599 €
en France dans la distribution spécialisée.
19
La principale actualité de l’année concerne la fusion Hewlett PackardCompaq. Le nouvel HP est né en mai 2002 après une longue bataille de
procédure, une partie des actionnaires étant contre la manœuvre (en
particulier un des héritiers, Walter Hewlett). Ayant gagné la partie, la PDG
Carly Fiorina doit tenir les promesses faites, ce qui passe par un plan
drastique d’économies et une rationalisation des gammes de produits (85 000
références avant la fusion…). 15 000 emplois seront supprimés dans le
monde, dont 1200 en France. Fin 2002, 17 900 employés étaient partis et les
profits étaient au rendez-vous mais la part de marché s’effrite. En fait, les
leaders Dell et le tandem HP-Compaq, au coude à coude toute l’année, ont eu
du mal à estimer la demande et ont engagé des guerres de prix pendant l’été
2002.
Apple essaie de se positionner sur le marché des entreprises et lance
en mai le serveur Xserve dans un nouvel effort pour sortir de sa niche de
marché.
Les principales nouveautés viennent du monde du PDA : Palm (1/3 du
marché mondial) a présenté le Zire en entrée de gamme (139 € en France,
$99 aux USA) et le Tungsten, plus sophistiqué et prévu pour incorporer les
liaisons sans-fil Bluetooth. On voit arriver une nouvelle génération de
systèmes hybrides pour « nomades », comme pour le marché des entreprises
le Blackberry (RIM) qui combine un PDA, un serveur d’e-mail et une
connexion GPRS. Le marché mondial aurait baissé en 2002 de 9 %, à 12,1
millions d’unités livrées selon Gartner.
Grève à haut risque
Dans le reste de l’actualité, signalons la grande peur des fabricants d’électronique
lorsque les dockers de la côte Ouest des Etats-Unis se sont mis en grève : les usines,
adeptes du juste à temps, ont failli s’arrêter faute d’alimentation en composants par les
équipementiers d’Asie.
20
Microsoft
2002 est une bonne année pour Microsoft : il s’est débarrassé de son
principal procès aux Etats-Unis, au moins provisoirement car certains
plaignants envisagent de relancer l’affaire. Depuis la nomination de la juge
Colleen Kollar-Kotelly pour remplacer le très controversé juge Jackson, dans
le contexte d’une administration américaine plus pro-business que la
précédente, et malgré de nombreuses péripéties (nouvelles plaintes de neuf
états en mars 2002, extension de l’enquête à de nouveaux domaines en avril),
un an après sa signature en novembre 2001, le règlement judiciaire est
devenu définitif. Et Microsoft a commencé à appliquer les accords signés : lors
de la mise à jour de Windows XP en septembre, ou encore en dévoilant ses
marges par produits (86 % sur Windows !). Toutefois fin 2002, un tribunal
américain a commencé à donner raison à Sun dans une plainte déposée en
mars, obligeant Microsoft à re-intégrer Java dans Windows XP. Microsoft n’en
a sans doute pas fini avec ses ennuis judiciaires.
Au rayon des nouveautés de l’année on citera le domaine des
téléphones portables (Orange a commercialisé fin 2002 un mobile SPV dérivé
du Smartphone Microsoft), le lancement du Tablet PC et de routeurs pour la
domotique. Le géant de Redmond s’est offert en mai l’éditeur danois de
solutions pour entreprise Navision pour 1,3 milliards de dollars. Petit à petit la
stratégie .net pour les services web prend forme avec des alliances
multiples et la présentation d’outils spécifiques.
Malgré tout, certains projets de Microsoft ont rencontré des oppositions.
D’abord en mettant en application son nouveau système de licences
d’utilisateurs Software Assurance (qui ressemble à un abonnement permettant
de recevoir les mises à jour, mais souvent beaucoup plus cher), Microsoft
s’est attiré le ressentiment d’une majorité de ses grands clients qui envisagent
ouvertement de se passer de Windows et d’Office. Autre nouvelle mi-figue miraisin, Microsoft a rationalisé en octobre sa politique de soutien-produits : elle
sera assurée 5 ans, plus deux années payantes. Souhaitant échapper au
quasi-monopole de Microsoft, quatre importants fabricants de PC, Dell, HP,
Sony et Gateway ont décidé d’équiper leurs produits d’entrée de gamme de
WordPerfect (Corel) plutôt que de Microsoft Office, plus cher. Dans le monde
des portables, le fabricant britannique Sendo a rompu avec Microsoft pour
21
rejoindre Nokia. Enfin une certaine inquiétude se fait jour quant au projet
Palladium de sécurisation des PC et de leurs données.
IBM
Le poids lourd de l’informatique poursuit sa route, depuis mars 2002,
sous la houlette de Sam Palmisano qui a remplacé Lou Gerstner. Ce dernier
avait fait de Big Blue la première entreprise de services du monde et cette
évolution est encore accentuée cette année. IBM a vigoureusement promu le
« e-business on demand ». Ainsi à Montpellier a été installé un gigantesque
centre de services, avec deux liaisons à 622 Mbit/s. En 2002, IBM a annoncé
avoir signé plusieurs contrats de service exceptionnels : avec American
Express, pour 7 ans et 4 milliards de dollars ; avec Deutsche Bank pour 10
ans pour 2,5 milliards de dollars ; avec J.P. Morgan pour 7 ans et 5 milliards
de dollars. IBM a aussi racheté Rational Software (2,1 milliards de dollars en
décembre) et PriceWaterhouse Consulting (PWC, en juillet pour 3,5 milliards
de dollars). L’entreprise a également restructuré ses activités avec au moins
15 000 suppressions d’emploi au 2 ème trimes-tre et, plus tard, 3700 en
Hongrie. Elle s’est faite également remarquer en France par son système de
notation des salariés, soupçonné d’avoir servi à créer un quota de low
performers à éliminer.
Sun
SUN a eu une année 2002 décevante. La domination de Sun sur le
marché des serveurs est déclinante, sous la pression combinée d’Intel,
Microsoft, IBM, Dell et Linux. Bien que Java soit devenu le langage dominant
dans de très nombreuses applications, Sun a du mal à en tirer parti. Le virage
vers le logiciel et les services, pris par exemple par IBM, s’avère difficile à
négocier pour Sun qui a des partenaires fidèles dans ces secteurs et craignent
de voir l’entreprise les concurrencer. Sun travaille sur son offre intelligente
d’administration de réseaux complexes N1, mais elle est concurrente de
projets similaires chez IBM et HP. Enfin, le Directeur général (president) E. J.
Zander et plusieurs autres dirigeants ont quitté l’entreprise.
22
Le coût des bugs
Une étude conduite par le NIST (www.nist.gov) a chiffré le coût des défauts de
logiciels à presque 60 milliards de dollars pour l’économie améri-caine : 38 milliards pour les
utilisateurs et 21 milliards pour les producteurs de logiciels. Cet enjeu important suscite tous
les jours de nouvelles initiatives.
On a annoncé en 2002 la création du Sustainable Computing Consortium, un thinktank soutenu par de grandes entreprises comme Cisco, GM, Oracle, Microsoft et animé par
l’université Carnegie Mellon.
Des ordinateurs et des applications qui se réparent seuls (« self-healing ») et
s’adaptent à leur environnement demanderont moins de surveillance et seront plus
performants. Dans ce but, IBM promeut l’autonomic computing .
Linux
Linux continue à grandir, soutenu maintenant par des grandes
entreprises comme IBM ou Sun. Même Microsoft avait retenu un stand à
LinuxWorldExpo, témoignant d’un changement remarquable d’attitude de la
part de l’éditeur bien connu. Dans le même temps, le groupe de gestion des
normes Free Standard Base (LSB) a maintenu la compatibilité des trois
grandes distributions (Red Hat, Mandrake, SuSE) malgré la rivalité qui les
anime.
Dans la lignée du livre-culte d’Eric Raymond 7, l’étude FLOSS de
l’Université de Maastricht et Berlecon a mis en évidence les caractéristiques
des développeurs Linux : uniquement des hommes, jeunes (de 19 à 33 ans),
dont 70 % passent au moins 10 heures par semaine à programmer dans le
monde du « Libre ». La moitié d’entre eux travaille aussi sur des logiciels
commerciaux.
7
Eric Raymond, Bob Young, The cathedral and the bazaar, O’Reilly, 2001
23
Enfin, une demande a été initiée par l’Association bordelaise des
utilisateurs de logiciels libres (ABUL) pour faire classer Linux par l’UNESCO
au patrimoine mondial de l’humanité.
SSII
Pour la première fois depuis 1993, le marché français des services
informatiques est en recul de 2 à 5 % en un an. Selon les prévisions de Syntec
Informatique, il atteindrait 20,9 milliards d’euros au mieux. L’atonie de
l’économie, la fin des grandes opérations (Bug de l’an 2000, euro) en sont la
cause. Le développement des web services n’est pas encore suffisant pour
prendre le relais. Les prix de vente des prestations et les marges sont en
baisse sensible. Les secteurs utilisateurs sont diversement touchés, les
administrations continuant de croître alors que l’assurance et les télécoms
baissent.
Les SSII ont subi une évolution très importante en quelques années. La
première est la course à la taille. La croissance interne a été relayée par des
opérations de fusion spectaculaires comme Cap Gemini – Ernst & Young en
2001 ou IBM – PWC en 2002. On attend toujours les bénéfices de ces mégafusions. Une des raisons de ces grandes manœuvres est l’obligation faite aux
cabinets d’audit et de conseil de séparer ces deux activités pour des raisons
déontologiques. Ainsi BearingPoint, ex-branche conseil de KPMG, a racheté
cette année la filiale française d’Andersen Consulting.
La conjoncture est similaire aux Etats-Unis. EDS a fait une très
mauvaise année : les contrats ne sont plus aussi juteux, certains clients ont du
mal à payer. En plus, EDS a perdu de l’ordre de 225 M$ en pariant sur
l’évolution du cours de son action. La compagnie est spécialisée dans les
grands contrats de maintenance informatique.
Schlumberger Sema a décidé en décembre de se concentrer sur les
applications au secteur de l’énergie. Les autres activités seront vendues ou
fermées si elles n’occupent pas une position sérieuse dans leur domaine.
Enfin Altran Technologies (18 000 consultants) a été pris dans une
tourmente boursière liée à des soupçons de manipulation des comptes. Le
cours de l’action, à environ 60 € en mai 2002 est resté en dessous de 10 €
depuis septembre avec un creux à 2,72 € en octobre.
24