Le Télégramme et Midi Libre confortés dans leurs choix - WAN-IFRA

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Le Télégramme et Midi Libre confortés dans leurs choix - WAN-IFRA
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Le Télégramme et Midi Libre confortés dans leurs choix
Une fois le « choc » des nouvelles technologies absorbé, les
équipes du « Télégramme de Brest » et de « Midi Libre »
découvrent l’étendue des possibilités offertes par leurs nouvelles rotatives Wifag. Dans les deux cas, les premiers objectifs
assignés à ces machines sont remplis.
Les quotidiens français ont fait preuve d’une certaine
témérité, et, même Götz Stein, directeur de Wifag, utilise le
terme de « risk management » pour qualifier la décision
des premiers quotidiens à avoir opté pour une technologie
sans arbre de transmission, le changement de plaques à la
volée et, dans le cas du groupe Amaury, les encrages
ultracourts USIS (OF 570 GTD).
La préoccupation des quotidiens français n’était certainement pas de se singulariser. L’enjeu, lors de la décision
d’investissement il y a trois ans, était de sauter à temps le
pas d’une nouvelle génération de rotative. Il est rare qu’un
directeur technique ait deux fois dans sa carrière à décider
d’un investissement industriel aussi lourd...et, s’il se trompe, il risque d’handicaper les projets de développement de
son entreprise. Les directions du « Télegramme » et de
« Midi Libre » étaient aussi conscientes du pari. Édouard
Coudurier, directeur général du « Télégramme » explique
ce qui a motivé sa décision :« Nous avons une situation de
challenger en Bretagne, car nous sommes en concurrence
frontale avec « Ouest France » le plus gros quotidien
français. Cette position nous oblige à prendre des initiatives dans tous les domaines afin de gêner notre encombrant rival. Une nouvelle rotative est un investissement
pour les vingt prochaines années. Si ce choix arrive au
moment d’une nouvelle génération de machine il ne faut
pas laisser passer l’opportunité ». Aujourd’hui le « Télégramme de Brest » ne se pose plus de questions. Un an
après le démarrage de sa nouvelle rotative, le souci de
Bernard Chancerelle, directeur de l’imprimerie du Télégramme, est plus d’utiliser cet équipement au maximum de
ses capacités. A « Midi Libre », son homologue Jean-Michel Michard est encore en phase de mise au point. Ses
premiers objectifs sont cependant atteints. Malgré un
premier rejet et un conflit social de plusieurs semaines en
juillet, les imprimeurs du journal montpelliérain ont adopté
la nouvelle rotative. L’inquiétude a laissé place à une
curiosité professionnelle sur cette nouvelle technologie de
changement d’édition sans arrêter la machine.
Une première phase de modernisation réussie
« Le Télégramme de Brest » est le premier quotidien à avoir
choisi une rotative Wifag OF 370 GTD.
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Bernard Chancerelle est un nouveau venu dans la presse.
Il s’est retrouvé pour ses premières responsabilités aux
commandes d’un outil de production dont il ne pouvait
valider les potentiels chez aucun de ses confrères. Conscient d’avoir embarqué son client dans une aventure,le
fournisseur suisse Wifag s’est montré un partenaire attentif
et très présent. Au Télégramme, la complexité résidait à la
fois dans l’apprentissage d’une rotative sans arbres d’entraînement mais aussi dans le couplage d’une tour de huit
encrages Wifag GTD à une rotative Harris. Edouard
Coudurier souhaitait en effet conserver en production la
plus récente des machines Harris (1981). Cette machine
hybride : une rotative conventionnelle (passage du papier
horizontal) et une tour GTD (passage des bandes vertical),
constitue une solution pour un journal qui désirerait
accroître ses capacités couleur sans toutefois investir dans
une machine complète. La difficulté réside dans une
synchronisation parfaite. Lorsque la rotative est en production, le groupe Wifag n’est relié physiquement à la rotative
Harris que par la bande de papier imprimée.
Avec ses nouvelles machines, la direction du Télégramme souhaitait accroître ses capacités en quadri et ajouter
des éditions, tout en raccourcissant les délais de production. Édouard Coudurier, directeur général du quotidien
rappelle ses contraintes :« nous progressons tous les ans
en diffusion grâce notamment au choix de la quadri dès
1967 mais aussi au développement du nombre d´éditions
(17 actuellement). « Le Télégramme » compte huit pages
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locales par édition. Pour des
raisons historiques, notre
imprimerie est très excentrée par rapport à notre zone
de
diffusion.
Certains
points de vente sont situés à
deux heures et demie en
voiture. Nous avons beaucoup développé l’abonnement et le portage à domicile qui représentent près
des 2/3 de nos ventes. Pour
respecter les délais, nous
devons imprimer 220 000
exemplaires en semaine et
260 000 le dimanche entre Bernard Chancerelle est di23 heures et 3 heures du recteur technique du « Télématin. En raison de la gramme de Brest »
concurrence avec « Ouest
France » sur certaines de nos éditions, nous voulons
également boucler le plus tard possible. En choisissant ce
type de rotatives, notre objectif était d’assumer toutes ces
contraintes et de retarder le démarrage de l’impression à
23h30 ». Contrairement à « Midi Libre », « Le Télégramme » n’a pas changé de format ni de maquette lors de cette
première phase de modernisation. Cependant, l’option d’un
format proche du Tabloïd,n’est pas exclu une fois l’ensemble du parc rotative renouvelé et après l’installation d’un
nouveau système prépresse.
Faut-il renforcer la maintenance ?
Le challenge du « Télégramme » est maintenant de
gagner cette précieuse demi-heure nécessaire à un bouclage rédactionnel plus tardif. L’exercice consiste dans les
mois qui viennent à réduire le temps de changement des
plaques : « notre ambition est d’accroître la personnalisa-
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tion des éditions, explique Édouard Coudurier. Mais cela
signifie encore plus d’arrêts de machines ». Bernard Chancerelle est cependant optimiste : « il faut du temps pour que
les imprimeurs se familiarisent avec une nouvelle technologie. Cette rotative est relativement simple à manœuvrer
mais la méthode de travail à beaucoup changé. Depuis mars
1997, je note une nette amélioration sur la vitesse de
changement des plaques. Globalement, si je compare les
performances entre notre machine Harris et la nouvelle
rotative Wifag, nous avons réduit de 50 % la casse papier et
la consommation électrique a baissé de 20 % sur les
premiers relevés. Le tirage est d’environ 20 000 exemplaires supérieur sur la Wifag et la gâche au démarrage a baissé
de moitié. Sur les 110 000 exemplaires (7 éditions avec six
pages quadri par édition) imprimés sur la machine Wifag,
la gâche totale est de 2000/2500 exemplaires. Ce chiffre
comprend l’ensemble des opérations de production : du
démarrage de la machine à la salle d’expédition. Le résultat
est déjà satisfaisant ».
Les véritables craintes de Bernard Chancerelle sont les
pannes possibles. Pour le moment il n’y a pas eu de gros
problèmes, cependant cette inquiétude est omniprésente
sur une rotative aussi sophistiquée. « Une machine permettant une meilleure qualité d’impression se paie par plus
d’électronique et des besoins en maintenance préventive
plus lourds. Nous avons actuellement un électronicien
mais il faudrait peut-être renforcer ce poste. Pour le
moment, les techniciens Wifag sont très présents et en cas
de problème ils peuvent intervenir rapidement. Nous verrons ensuite à l’usage. Au départ nous nous sommes posé
cette question, s’il fallait ou non renforcer notre service de
maintenance. Il nous est apparu que, comme nous produisions plus de quadri, la priorité devait porter sur le nombre
d’imprimeurs ». Mais « Le Télegramme » n’est pas équipé
comme « Midi Libre » d’un scanner de plaques qui permettrait d’affiner le pré-règlage de la rotative. Cette opération
est toujours confiée à l’expertise des imprimeurs qui
Rappel technologique :
– GTD signifie Gearless transmission drive ou entraînement sans arbre de transmission. Cette technologie initiée par
Wifag en collaboration avec ABB a été rapidement adoptée par d’autres constructeurs. Chaque cylindre de blanchet
est piloté par un moteur indépendant parfaitement synchronisable avec les autres. Les variations de vitesse de la
machine n’influent donc pas sur la stabilité du repérage comme sur des machines à entraînement conventionnel et
la maîtrise de la tension de la bande de papier est incomparable.
– PCU ou changement de pages en vol (sans arrêt de la rotative) avec dans le cas du CPU + un changement de laize ou
de passage de bande. Les plaques de l’édition suivante sont montées sur les unités PCU pendant qu’une édition est
en production. Peu avant la fin de cette impression les cylindres de la prochaine édition commencent à tourner pour
atteindre le registre d’impression correcte. Quelques fractions de seconde avant le démarrage de cette nouvelle
édition, les cylindres de celle en production sont mis hors service puis freinés. Le transfert se fait par un système de
découplage et couplage pneumatique des cylindres. Les imprimeurs peuvent programmer les quantités de tirage
d’une édition, visualiser, contrôler et commander ces commutations d’éditions sur un pupitre informatique ABB.
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rentrent ensuite les données dans le système de réglage
automatique de la machine. Actuellement, les deux rotatives (48 encrages au total) nécessitent une équipe de 17
personnes . Près de 21 personnes (quatre personnes supplémentaires) sont chargées dans la journée de l’entretien, de
la préparation des machines et de la maintenance de
l’ensemble de l’imprimerie.
Midi Libre découvre sa nouvelle machine
Jean-Michel Michard ne s’aventure pas à des statistiques après seulement quelques semaines de mise en service
de sa nouvelle rotative. La priorité reste l’apprentissage de
toutes les fonctions de ce nouvel équipement et aussi d’un
environnement très automatisé : de la manipulation des
bobines de papier totalement robotisée au lavage automatique des blanchets, en passant bien-sûr par la conduite de
la rotative (pupitres de contrôle-commande ABB) et au
changement des plaques sans arrêt de la machine. Malgré
cette période de rodage, le déroulement de la production est
spectaculaire. Rien à redire sur la qualité des produits finis,
notamment sur la quadri très mise en valeur par la nouvelle
maquette du journal. Le tirage des 17 éditions (210 000
exemplaires en semaine et 280 000 le dimanche) est un peu
plus long (temps normal : 22 h 30 à 4 heures) par manque
de dextérité sur la machine, mais ce n’est qu’une affaire
d’expérience. Les impératifs de délais d’impression sont
un peu moins rigoureux qu’au « Télégramme » car le
portage ou l’abonnement représentent une proportion assez
faible dans le mode de diffusion. Néanmoins, la zone de
diffusion du quotidien est vaste et les abonnés postaux se
répartissent sur six départements, du Rhône à la frontière
espagnole.
La nouvelle formule de « Midi Libre « représente une
pagination de 32 à 38 pages (40 en période estivale) avec
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Les caractéristiques techniques des machines du
« Télégramme de Brest » et du groupe Midi Libre :
« Le Télégramme de Brest » : Wifag OF 370 GTD,
cinq unités d’impression avec 32 encrages, une plieuse et cinq dérouleurs. La circonférence des cylindres
1156 mm, laize des bobines de papier 1640 mm.
Groupe Midi-Libre : une Wifag OF 370 GTD PCU +,
six unités d’impression avec 48 encrages ; une plieuse
7 dérouleurs. Circonférence des cylindres 940 mm,
laize des bobines de papier 1280 mm.
(« L’indépendant », groupe Midi-Libre : Wifag OF
370 GTD, trois unités d’impression de 20 encrages ;
une plieuse, 6 dérouleurs. Circonférence des cylindres
940 mm, laize des bobines de papier de 1280 mm).
17 éditions (passage de 12 à 17 éditions avec la nouvelle
rotative). La plus petite édition fait environ 4000 exemplaires et la plus grande près de 30 000. « Midi Libre » compte
jusqu’à 16 pages couleur et il est possible d’ajouter des
spots publicitaires quadri ou une couleur d’accompagnement sur les 22 autres pages. La Une de chaque édition est
personnalisée, et, chaque édition, comporte un cahier
central de huit pages communes en quadri. Avec sa
nouvelle maquette, « Midi Libre » a adopté un format
berlinois (32 x 47 cm), le grammage du papier est passé de
45 à 49 grammes ponctuellement, afin de mettre en valeur
le changement de maquette : « avec cette rotative Wifag
PCU+, explique Jean-Michel Michard, nous imprimons
près de 70 000 exemplaires par heure d’un quotidien de 32
pages dont 16 quadri, tout en modifiant le contenu, les
encrages, la pagination selon les éditions. S’il le faut nous
pouvons monter à 40 pages avec une utilisation poussée des
unités PCU mais sans intervention humaine supplémentaire. Grâce à la technologie sans arbre de transmission,
après quelques centaines d’exemplaires le registre quadrichromie et les encrages sont au point. Une fois le réglage
terminé, la machine augmente sa vitesse et ne s’arrête plus
pendant le changement des éditions. Pendant quelques
secondes nous réduisons cependant la vitesse afin de
sécuriser le changement d’une édition à l’autre ».
Les premiers gains visibles
Pour le directeur technique de « Midi Libre », Jean-Michel
Michard, le challenge était de démarrer simultanément une
nouvelle rotative et l’impression d’une nouvelle maquette.
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Prudent, Jean-Michel Michard lâche difficilement des
informations sur la gâche : « Nous sommes actuellement à
environ 270 exemplaires de gâche lors du passage d’une
édition à l’autre, mais, lorsque nous maîtriserons mieux la
machine, d’ici la fin de cette année, nous devrions descendre à 150 exemplaires ». D’emblée toutefois, le choix
technologique de « Midi Libre » a permis d’atteindre un
premier objectif : « indépendamment de la qualité d’impression, en choisissant le CPU, nous avons réalisé une
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économie sur le montant de l’investissement (une rotative
au lieu de deux) et sur le coût d’exploitation de ces
machines. Nous avons six tours à huit encrages comme sur
une Wifag GTD classique. En revanche nous n’avons que 7
dérouleurs alors que si nous avions eu deux rotatives nous
aurions dû en avoir le double, ainsi que deux plieuses. Là,
nous avons opté pour une seule plieuse 2.5.5 et nous avons
ajouté une plieuse de secours 3.2. Nous avons investi dans
un dispositif robotisé de manutention des bobines, le coût
de cet investissement est proportionnel au nombre de
dérouleurs. Enfin, la salle d’expédition comporte une seule
ligne au lieu de deux si nous avions opté pour deux
rotatives. De plus, nous avons également acquis un dispositif de lavage automatique des blanchets (48 éléments Oxy
Dry, dispositif intégré dans le pupitre de commande ABB
et dans l’électronique modulaire de la rotative) ». Le gain
le plus visible actuellement est la réduction du personnel
pour l’impression et l’expédition. Auparavant pour 32
pages, dont 4 en quadri, 18 personnes travaillaient sur les
deux rotatives. Aujourd’hui, pour 40 pages, dont 16 quadri,
11 personnes sont nécessaires. L’effectif de la salle d’expédition est, quant à lui, passé de 6 à 3 postes.Celui du service
maintenance est inchangé à 21 personnes.« Nous avons
plus d’électroniciens et d’électromécaniciens, mais leur
particularité à « Midi Libre » est qu’ils sont affectés à
l’ensemble de l’entreprise puisqu’ils assurent, en plus de
l’imprimerie, la maintenance de tout ce qui est informatique, micro-informatique et télécommunications ».
« Nous imprimons un quotidien de 32 pages dont 16 quadri, s’il
le faut, explique Jean-Michel Michard, nous pouvons monter à
40 pages avec une utilisation poussée des unités CPU mais sans
intervention humaine supplémentaire. »
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L’avis de Götz Stein, directeur général de Wifag
(extrait d’une intervention au symposium de l’IFRA
« les tirages courts dans l’impression des journaux »
24-25 juin 1997)
« Le changement de plaques en vol est particulièrement intéressant sur des tirages courts. Ce qui est une
tendance si l’on considère la multiplication des éditions. A mon avis, des investissements supplémentaires sont plus utiles s’ils évitent les interruptions de
production que s’ils automatisent les machines à
l’arrêt au moyen de robots. Pour imprimer de manière
rentable de petits tirages de journaux, il faut réduire
les besoins en matériaux et les heures de machine. Le
préréglage de la machine à l’aide de données de
scanner est désormais une technique standard. Et, la
préparation de la production sur les ordinateurs est un
préalable pour les équipements les plus récents. Sur
les installations dotées de véritables entraînements
sans arbres, la nouveauté est qu’elles assurent une
bien meilleure maîtrise de la tension de la bande et
qu’elles synchronisent les cylindres avec précision.
Ceci permet une réduction significative de la gâche
imprimée. En ce qui concerne l’unité PCU, deux caractéristiques des techniques GTD sont intéressantes :
d’une part les faibles écarts de repérage aux changements de vitesse. Ceci permet de faire varier la rapidité
de la machine de 10 000 tours à la vitesse maximale
sans production de gâche. D’autre part, au niveau de la
construction des rotatives, la nouveauté réside dans la
possibilité de désolidariser certains groupes du processus d’impression en cours et de les réenclencher
électroniquement et avec la plus grande précision.
L’unité PCU représente un investissement supérieur car il requiert des groupes couleur supplémentaires. C’est pourquoi il y a désormais des tours à dix
encrages au lieu de tours à huit encrages. Mais les
groupes PCU s’emploient aussi comme n’importe quel
groupe imprimant. Dans le cas d’une unité PCU +,
c’est-à-dire pour modifier les paginations au vol, des
dérouleurs « split arm » ou double largeur sont nécessaires. Mais, surtout, il faut une automatisation poussée de la machine car le succès vient de la possibilité
de commander les fonctions les plus diverses au
millième de seconde près : l’enclenchement ou le
désenclenchement des détecteurs de bande, des rouleaux de traction, des lames de coupe et le réglage des
mâchoires de la plieuse. Le degré d’automatisation de
l’environnement doit être parfaitement synchrone
(mise en place des plaques et bobines, salle d’expédition...). Les unités CPU sont rentables à partir de trois,
voire de cinq éditions. Elles représentent l’alternative
la plus économique pour plus d’éditions ».
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