DI CES 93/2002 (MERAL)
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DI CES 93/2002 (MERAL)
REX/100 "CCM UE-Turquie" 13ème réunion du Comité consultatif mixte UE-Turquie Erzurum, les 11 et 12 juillet 2002 DOCUMENT DE TRAVAIL (volet turc) ____________________ Conséquences de la crise économique en Turquie et propositions de solution ____________________ Élaboré par M. Bayram MERAL, président de la Confédération des syndicats "TURK-IS", groupe des travailleurs ____________________ DI CES 93/2002 (MERAL) E-MLJ/LA/jg -1Introduction La question de la crise économique en Turquie est capitale pour cette dernière et pour les relations qu'elle entretient avec l'UE. C'est pourquoi je suis reconnaissant au CCM d'avoir décidé d'aborder cette matière. Nous ne devons toutefois pas oublier les vives discussions tournant autour des raisons de la crise et des solutions proposées afin de parvenir à une situation économique stable, c'est-à-dire avec un taux de croissance élevé et de nouveaux emplois décents pour les millions de chômeurs. C'est pourquoi ce document entend refléter les points de vue différents et parfois divergents de la partie turque du CCM. Lors de sa 12ème réunion, le CCM a décidé de mettre ce point à l'ordre du jour. Par la suite, les membres de la délégation turque du CCM ont reçu une lettre demandant leur avis sur la question. En tant que coprésident de la délégation turque, je me limiterai à résumer les opinions des représentants turcs du CCM qui ont répondu à mon appel, notamment ceux de ma propre organisation. Problèmes actuels Un consensus semble se dégager sur la liste des problèmes actuels de la Turquie. En 2001, le PNB a baissé de 9,4%, et le PIB de 7,4%. En 2000, le revenu par habitant était de 3.095 USD, mais en 2001, il est descendu à 2.160 USD. L'indice des prix à la consommation a augmenté de 68,9% en 1999, de 35,9% en 2000 et de 73,2% en 2001. Fin mai 2002, les prix avaient enregistré une hausse de 46,2% au cours des douze derniers mois. Le taux de change de la lire turque (TRL) s'est rapidement déprécié à la suite des deux crises. De 542.000 pour 1 USD le 31 décembre 1999, il est passé à 672.000 au 31 décembre 2000, 1.554.000 au 30 septembre 2001 et 1.430.000 au 31 mai 2002. Les réserves en devises de la Turquie ne semblent pas poser de réel problème. Si les crises des années 1970 et 1980 étaient surtout dues à une pénurie grave de devises, le 26 avril 2002, la Turquie disposait d'un total de 35,6 milliards de USD en devises et en or. Le principal problème de la Turquie est l'accroissement des besoins de financement du secteur public. Alors qu'il représentait 10,6% du PNB en 1992, ce besoin est descendu à 5,2% en 1995, et est remonté à 15,6% en 1999, 12,1% en 2000 et 15,8% en 2001. En 2001, 15,5 points de pourcentage des 15,8% étaient attribués au déficit du budget consolidé. DI CES 93/2002 (MERAL) E-MLJ/LA/jg …/… -2Un déficit public de cette ampleur entraîne naturellement une hausse de la dette intérieure et extérieure, ainsi que des intérêts de la dette, ce qui à son tour débouche sur le cercle vicieux de nouveaux emprunts. La dette intérieure était de 220.344 milliards de TRL en décembre 1992 (22,9 milliards de USD en 1995). Elle a grimpé jusqu'à 23.005.048 milliards de TRL (42,4 milliards de USD) en décembre 1999, juste après la conclusion de l'accord de confirmation avec le FMI. En décembre 2000, la dette intérieure s'élevait à 36.420.626 milliards de TRL (54,2 milliards de USD), en décembre 2001 à 122.157.263 milliards de TRL (84,9 milliards de USD) et en avril 2002 à 123.290.381 milliards de TRL (92,6 milliards de USD). L'ensemble de la dette intérieure représentait 17,3% du PNB. Fin 1999, ce chiffre était de 29,3%, fin 2000 de 29,0% et fin 2001 de 68,1%. En janvier 2002, l'échéance moyenne de la dette intérieure était de 43,4 jours. Cette durée est passée à 43,3 jours en février, 41,9 jours en mars et 40,1 jours en avril, ce qui constitue un problème grave. En 1991, la dette extérieure équivalait à 50,5 milliards de USD. Au moment de la conclusion de l'accord de confirmation, en décembre 1999, elle s'établissait à 102,1 milliards de USD. Ce chiffre a progressé en 2000, pour atteindre 118,6 milliards de USD à la fin de l'année, puis a affiché un léger tassement : il était de 115,1 milliards de USD à la fin de l'année 2001. Le besoin de financement grandissant du secteur public, la pénurie de capitaux et les taux d'inflation élevés détournent les capitaux de l'investissement productif au profit des obligations d'État. Officiellement, le taux d'intérêt réel est de 32%. Selon un rapport essentiel des Chambres de l'industrie et du commerce (TOBB) (Savurganlik Ekonomisi Arastirmasi, avril 2001), le gouvernement aurait pu gagner 120 milliards de USD en octroyant un taux d'intérêt réel de 8% au cours de la période 1990-2000. Les taux d'intérêt exceptionnellement élevés ont donc permis de transférer à différentes personnes, entreprises et banques des sommes énormes, qui dépassent le niveau actuel de la dette extérieure. Étant donné l'augmentation des besoins de financement, le service de l'intérêt de la dette constitue désormais la principale charge qui pèse sur l'économie turque. En 1991, l'intérêt de la dette ne représentait que 18,5% de l'ensemble des dépenses du budget consolidé du gouvernement et 30,7% de l'ensemble des recettes fiscales. En 1999, ces chiffres étaient passés à 38,2% et 72,4%. En 2000, à la suite de la conclusion de l'accord de confirmation avec le FMI, ils ont grimpé jusqu'à 43,8% et 77,1%. Le nouveau programme a été lancé en 2001. Cette année-là, les intérêts de la dette ont atteint 51,1% de la totalité des dépenses du budget consolidé du gouvernement et 103,3% de l'ensemble des recettes fiscales. La situation a continué de se dégrader en 2002. Fin avril 2002, l'intérêt de la dette représentait 55,4% de l'ensemble des dépenses et 128% de l'ensemble des recettes fiscales. DI CES 93/2002 (MERAL) E-MLJ/LA/jg …/… -3L'union douanière conclue avec l'UE a entraîné un afflux de produits de l'UE, mais aucune hausse simultanée des exportations turques vers l'UE. Le déficit commercial croissant est à l'origine d'une nouvelle dépréciation de la lire turque, de fermetures ou de restructurations d'usine et de licenciements. La corruption et le gaspillage des ressources sont d'autres facteurs permettant d'expliquer les problèmes économiques. La méfiance accrue envers les hommes politiques, qui s'explique par plusieurs raisons, aggrave encore la situation et entrave le bon déroulement de la mise en œuvre de mesures visant à surmonter les crises. Ces problèmes ont été les causes et les conséquences des récessions et des crises. Une récession a eu lieu en 1991. Des crises ont été enregistrées en 1994 et 1998. En 1999, le PNB a baissé de 6,1%. La crise de novembre 2000 a fortement affaibli l'économie et en 2001, le PNB a chuté de 9,4%. Les faibles taux d'investissement, l'appauvrissement des paysans et des artisans, les crises, l'union douanière avec l'UE et d'autres facteurs ont entraîné une hausse du chômage. Nous ne disposons d'aucune donnée fiable sur le taux de chômage en valeur absolue, mais tous les observateurs s'accordent pour dire que le chômage a enregistré une forte hausse ces deux dernières années et que pour la première fois de notre histoire, la main-d'œuvre très qualifiée se retrouve confrontée à une pénurie d'emplois. Sachant que la grande majorité des chômeurs ne peuvent bénéficier d'une allocation de chômage ni d'aucune autre forme d'aide de l'État, l'émergence de troubles sociaux est envisageable. À l'heure actuelle, la solidarité familiale, le recours à l'épargne existante et l'utilisation de cartes de crédit permettent aux habitants de survivre, mais le degré d'acceptation est bientôt atteint. Opinion de l'Union des Banques turques1 Selon l'Union des Banques turques, la croissance de l'économie turque est instable depuis longtemps. L'important déficit de l'épargne intérieure ne cesse de s'accroître. L'équilibre du secteur public est faussé. L'inflation est forte et chronique. Les taux d'intérêt réels sont insensés. Le chômage se développe. Les déséquilibres intérieurs entraînent des déséquilibres de la balance extérieure. L'augmentation du déficit du commerce extérieur et du déficit courant limite les possibilités pour la Turquie d'emprunter de l'argent à un coût raisonnable sur les marchés financiers internationaux. Ces différents facteurs, ainsi que l'insuffisance de l'épargne intérieure et la taille réduite du système financier, rendent problématique le financement du besoin croissant de ressources. 1 Réponse de l'Union des Banques turques du 20 décembre 2001 à la lettre de M. Meral du 21 novembre 2001. DI CES 93/2002 (MERAL) E-MLJ/LA/jg …/… -4Les retards dans la mise en œuvre des politiques visant à éradiquer les déséquilibres macroéconomiques sont décevants et ont des retombées sur les prix, les taux d'intérêt et les taux de change. Le programme lancé par le gouvernement, avec le soutien des institutions financières internationales, vise à éradiquer les déséquilibres macroéconomiques, réduire l'inflation, garantir la stabilité, renforcer et élargir le système financier, retrouver une crédibilité internationale et améliorer les prévisions. Le système financier turc est limité, les activités financières ne représentant que 29% du revenu national. Si l'on intègre les dépôts en devises, le chiffre est de 65%. Les déséquilibres macroéconomiques à long terme nuisent à la structure, la croissance et la fonctionnalité du secteur bancaire. Selon l'Union des banques, au cours des neuf premiers mois de l'année 2001, la taille du système bancaire turc a été réduite de 28% en termes de USD. Les dépôts sont à très court terme et prennent souvent la forme de dépôts en devises (63% du total). Les crédits étrangers ont diminué. Les prêts bancaires ont baissé de 33% en septembre 2001, par rapport à septembre 2000. Les difficultés de recouvrement des prêts consentis se sont multipliées. Le secteur bancaire déjà peu rentable a commencé à enregistrer des pertes. Les pertes accumulées par ce secteur au cours des neuf premiers mois de 2001 s'élèvent à 3,4 milliards de USD. Le capital des banques s'est également effrité. En conclusion, l'Union des Banques soumet une série de propositions. Nous ne pourrons tonifier la croissance économique et assurer sa durabilité qu'en améliorant les conditions financières actuelles du système bancaire. Par conséquent, il convient de résoudre les problèmes de la structure financière du système bancaire, de renforcer la structure de son capital et de trouver des solutions pour éviter que les risques de crédit non réalisés ne dégradent encore davantage la structure financière. Dans ce contexte, le programme de restructuration financière pourrait s'avérer utile. L'Union des Banques considère que les nouvelles mesures relatives au système bancaire qui ont été mises en œuvre sont adéquates. La mise en application de réglementations reconnues sur le plan international est correcte. Cependant, compte tenu des problèmes déjà rencontrés dans le passé, il faudrait prévoir une période raisonnable de transition et d'adaptation. On pourrait également établir de nouvelles règles pour la période de transition. La structure du capital des banques doit être renforcée. Les conditions, les risques, les charges et les faibles taux de rentabilité que connaissent actuellement les banques ne les incitent guère à accroître leur capital. DI CES 93/2002 (MERAL) E-MLJ/LA/jg …/… -5Opinion de la Confédération des artisans et petits commerçants de Turquie (TESK)2 Selon la TESK, 2.752.222 artisans et petits commerçants sont enregistrés auprès des chambres concernées et ces petites entreprises constituent 98,8% du nombre total d'entreprises. Néanmoins, en dépit de leur contribution majeure dans les domaines de la production et de l'emploi, ces entreprises ont été les principales victimes des crises économiques récentes. Les données fournies par la TESK montrent que sur les dix premiers mois de 1999, 2000 et 2001, respectivement 59.098, 90.278 et 92.100 petites entreprises ont disparu. Le nombre de petites entreprises créées a également chuté. La proportion entre les nouvelles entreprises et les entreprises en liquidation était de 26%, 50% et 84% au cours des périodes susmentionnées. La TESK note également que le nombre réel de suppressions d'entreprises doit encore être augmenté de 25% afin de tenir compte du secteur informel. La ventilation des entreprises disparues par secteur d'activité révèle l'impact négatif des hypermarchés. En effet, les épiceries constituent environ un tiers du total et les cafés arrivent en deuxième position. La TESK constate que malgré les sacrifices consentis par ses membres à la suite du programme d'austérité de décembre 1999, les crises de novembre 2000 et février 2001 ont eu de nouvelles conséquences désastreuses pour eux. Les crises s'expliquent principalement par l'alourdissement de la charge de la dette du secteur public, la dépendance par rapport aux avoirs étrangers pour les opérations de refinancement, les problèmes du secteur bancaire, l'impact de cette évolution négative sur le secteur public, l'instabilité économique et l'atmosphère d'ambiguïté et de méfiance par rapport aux marchés. À la suite des crises, la lire turque s'est dépréciée, les taux d'intérêt ont grimpé en flèche et les prix du pétrole et de l'énergie ont augmenté du fait de la dépréciation. Conséquence : les coûts de production et les prix ont augmenté. À son tour, cette évolution a entraîné un déclin de la production et de la demande intérieures. L'érosion de la demande intérieure, l'accroissement du coût du recours à l'emprunt, le recul des crédits bancaires, l'augmentation des coûts de production résultant des hausses de prix et de la dépréciation, ainsi que les ambiguïtés des marchés financiers ont eu des effets négatifs sur les investissements. Les intérêts d'emprunt ont atteint des niveaux qui dépassent l'entendement. Les activités industrielles et commerciales ont été pour ainsi dire paralysées. Ces crises économiques ont eu des conséquences désastreuses pour les artisans et les petits commerçants. Ceux qui le pouvaient ont épuisé leurs réserves dans l'espoir d'une amélioration rapide de la situation. Par conséquent, les artisans et petits commerçants, qui représentent la principale strate de la société, sont au bord du gouffre sur le plan financier et personnel. 2 Réponse du TESK du 14 décembre 2001 à la demande de M. MERAL du 21 novembre 2001. DI CES 93/2002 (MERAL) E-MLJ/LA/jg …/… -6- La TESK présente une série de propositions visant à surmonter les crises et à résoudre les problèmes rencontrés par ces groupes importants de la population active. - Les petites et moyennes entreprises doivent être encouragées/soutenues. - Les hypermarchés doivent être installés en périphérie des villes. - L'enseignement et la formation professionnels doivent être restructurés pour répondre aux besoins de notre économie. - Les artisans et petits commerçants doivent bénéficier d'une exonération de l'impôt sur le revenu. - Les salaires minimums doivent être exonérés d'impôt sur le revenu, les cotisations sociales doivent être réduites et la législation sur le travail doit être modifiée afin d'abroger les dispositions qui imposent aux employeurs des obligations excessives. - Il faut réhabiliter l'Organisme de sécurité sociale pour les indépendants (BAG-KUR). - La TESK doit être représentée au sein du Comité chargé de la fixation d'un salaire minimum. - Des mesures de stimulation doivent être prises, en particulier pour les investissements des PME employant une à neuf personnes. - Turkiye Halk Bankasi, le principal financier des artisans et des petits commerçants, doit consentir des prêts suffisants aux PME. Opinion de la Chambre de commerce d'Istanbul3 La Chambre de commerce d'Istanbul considère que la crise de 2001 est principalement due à une crise financière du secteur public et du système bancaire. Pour pouvoir répondre à la forte demande de prêts émanant de la population, le niveau des intérêts de la dette intérieure a été maintenu au-dessus du taux d'inflation et du taux de dévaluation de la monnaie. Les capitaux à court terme ainsi attirés, de même que l'épargne ont été orientés vers les effets publics, ce qui a permis de financer les déficits publics. En ayant recours à cette forme de financement, nous avons négligé les tentatives de formation d'un consensus politique visant à éradiquer le gaspillage et les insuffisances structurelles du secteur public, ce qui a entraîné les déséquilibres financiers existants. L'obstination à utiliser les fonds des banques du secteur public a provoqué de grandes pertes, qui à leur tour ont incité les banques du secteur public à demander d'importantes quantités de capitaux à court terme. 3 Réponse de la Chambre de commerce d'Istanbul du 9 janvier 2002 à la demande de M. MERAL du 21 novembre 2001. DI CES 93/2002 (MERAL) E-MLJ/LA/jg …/… -7La revalorisation de la lire turque s'est accompagnée d'une relance de la consommation et les crédits à la consommation ont renforcé la progression de la consommation et des importations. L'augmentation de la valeur de la lire turque a mis les entreprises locales dans une position concurrentielle délicate par rapport aux produits importés. Les préoccupations du secteur bancaire concernant le besoin de liquidités et la fuite des capitaux à l'étranger ont entraîné l'effondrement des marchés financiers et du programme de stabilité. La Chambre de commerce d'Istanbul estime qu'il est capital de développer l'économie officielle au détriment de l'économie informelle, et de créer des emplois. Il convient donc de promouvoir les investissements productifs et de réduire les impôts et cotisations sociales. Il faut encourager les investissements directs étrangers et supprimer les obstacles bureaucratiques aux investissements. La confiance doit être développée. La croissance économique est nécessaire pour assurer le service de la dette. Cette croissance doit se fonder sur les exportations et les services rétribués en devises. Le système bancaire et les marchés financiers doivent jouir d'une certaine stabilité. La Turquie doit exploiter sa situation géopolitique et constituer un exemple de stabilité dans la région. La Chambre de commerce d'Istanbul propose également d'autres mesures en vue de surmonter la crise et d'éviter qu'elle ne devienne chronique. - Réduction de la taille de l'appareil étatique. Promulgation rapide des projets de loi à l'examen au Parlement. Accélération et achèvement du processus de privatisation. Prévention du gaspillage des ressources. Renouvellement complet de la législation fiscale. Octroi des prêts bancaires aux entreprises autres que celles du groupe et aux PME. Mesures d'encouragement pour les exportations et les exportateurs. Mise en œuvre de mesures et de projets spécifiques en vue de promouvoir le tourisme. Maintien de l'équilibre et de la stabilité des finances publiques et des marchés financiers. Adoption immédiate de la réglementation requise en vue de l'adhésion à l'UE. Opinion de la Chambre d'industrie d'Istanbul4 4 Réponse de la Chambre d'industrie d'Istanbul à la demande de M. MERAL du 21 novembre 2001 (Structural Change for a Healthy Developing Economy, juillet 2001). DI CES 93/2002 (MERAL) E-MLJ/LA/jg …/… -8- La Chambre d'industrie d'Istanbul (ICI) a émis une série de propositions visant à surmonter les crises et les a présentées au gouvernement en 2000. Ces propositions répondent à la nécessité de restructurer l'économie et l'administration publique dans la perspective du 21ème siècle. Tout d'abord, la Chambre d'industrie d'Istanbul insiste sur la nécessité de faire participer la société à l'établissement et la formulation de politiques anticrise. La transparence est donc primordiale. L'État doit faire connaître ses obligations en matière de dépenses et de recrutement de personnel, ainsi que les prix des biens et services marchands produits par les entreprises publiques. C'est avant tout dans ses propres politiques que l'État doit montrer qu'il est déterminé à réduire le taux d'inflation. Les organismes de sécurité sociale (Institution de l'assurance sociale – SSK, Fonds de pension des fonctionnaires et organisme de sécurité sociale des indépendants – BAG-KUR) doivent fusionner pour former un système de sécurité sociale unique pour tous les citoyens. Le niveau de l'inflation doit être ramené en dessous du taux de dépréciation de la monnaie turque. Il convient de se mobiliser pour renforcer les exportations. L'État doit fournir des ressources pour favoriser les exportations par l'intermédiaire de l'Eximbank. L'économie officielle et le travail déclaré doivent être encouragés. Il faut créer un Conseil économique et social autonome, dont l'action sera complétée par celle de conseils économiques et sociaux locaux. Le système d'imposition doit être révisé afin d'élargir la portée de la base imposable et d'empêcher la fraude fiscale. Par ailleurs, il faut réduire la bureaucratie. L'Organe de planification de l'État doit être restructuré afin de permettre l'élaboration d'autres scénarios et politiques visant à améliorer la compétitivité de notre industrie. Dans ce même but, il convient de mettre au point un nouveau système de mesures d'incitation destinées à l'industrie. Une stratégie de développement et de recherche globale doit être élaborée au niveau national et mise en œuvre. Il faut promouvoir la production axée sur les exportations et les exportations ellesmêmes. Les zones franches pour l'industrie d'exportation (zones de libre-échange) doivent être réévaluées pour répondre aux besoins de l'économie. DI CES 93/2002 (MERAL) E-MLJ/LA/jg …/… -9Tout en honorant ses obligations internationales, la Turquie doit élaborer et mettre en œuvre des politiques visant à protéger l'industrie nationale et les biens produits à l'intérieur du pays. Il faut accélérer le processus de privatisation et en améliorer la transparence. Les secteurs bancaire et des assurances doivent être restructurés. La population doit pouvoir disposer en permanence d'une énergie peu coûteuse. La Turquie doit également utiliser la technologie du nucléaire dans sa production d'énergie. Le système de télécommunications doit être maintenu à jour. Une réforme agricole devrait supprimer les politiques de prix garantis et encourager l'innovation technologique dans ce domaine. La structure des Chambres de commerce et d'industrie (TOBB) doit être actualisée. Il faut étendre les pouvoirs des gouvernements locaux et promouvoir les ONG. Les restrictions et limitations relatives à la création et au fonctionnement des associations doivent être annulées. L'appareil étatique doit être réduit et restructuré. Opinion de la Confédération des syndicats turcs (TURK-IS) Pour commencer, la TURK-IS regrette que ce soient les demandes du FMI et de la Banque mondiale, qui représentent les capitaux transnationaux et les super puissances, plutôt que les demandes vitales du peuple turc, qui soient prises en considération par les gouvernements lors de l'élaboration de leurs politiques. Au Conseil d'administration du FMI, les gouvernements de l'UE détiennent 29,88% des voix. Il faut donc que les gouvernements de l'UE soient convaincus de la nécessité d'adapter les politiques du FMI concernant la Turquie. Les politiques imposées par le FMI et la Banque mondiale visent à garantir le service continu de la dette intérieure et extérieure et à restructurer l'économie turque en fonction des intérêts des entreprises multinationales, conformément à la nouvelle division internationale du travail. Cette attitude gouvernementale sape la confiance envers les hommes politiques, les partis et les gouvernements. La corruption et le gaspillage contribuent également à cette perte de confiance et à ces crises. DI CES 93/2002 (MERAL) E-MLJ/LA/jg …/… - 10 Dans ces conditions, les premières mesures à prendre pour résoudre le problème économique sont politiques. L'indépendance de la Turquie et sa souveraineté nationale doivent être garanties, une lutte résolue contre la corruption et le gaspillage doit être lancée et la confiance envers les hommes et les partis politiques doit être rétablie. Ces mesures doivent être suivies d'une démocratisation (suppression des derniers vestiges des années 1980) et d'un alignement de la législation du travail sur les conventions de l'OIT ratifiées par la Turquie. L'"État social" dont il est question dans la constitution de la république turque doit être effectif. L'État doit intervenir et créer des emplois décents, mais aussi fournir une éducation et des soins de santé qui soient universels et gratuits ou peu coûteux. Ces mesures garantiraient un soutien massif à toute campagne visant à accroître la production et la productivité. Une réforme fiscale globale doit être exécutée afin d'élargir l'assiette de l'impôt et de réduire le plus possible l'économie informelle. Étant donné que les ressources sont rares, l'État doit donner un second souffle à l'Organe de planification, soutenir et réglementer la recherche et le développement sur le plan national et promouvoir les investissements productifs et générateurs d'emplois. L'union douanière avec l'UE doit être réexaminée. La consommation de biens et services produits en Turquie doit être activement encouragée. La privatisation a entraîné la destruction de notre patrimoine national et le pillage des biens de l'État. Il faut y mettre un terme. L'État doit renforcer son contrôle du secteur économique et ne doit pas remettre le marché entre les mains du capital transnational en invoquant les "forces du marché libre". Les politiques de soutien de l'agriculture doivent être rétablies, rationalisées et intensifiées. L'État doit être plus transparent, démocratique et puissant. La Turquie doit exploiter sa position géostratégique et persuader ses créanciers de renégocier les termes de la dette intérieure et extérieure. Conclusion La Turquie dispose : - d'une base économique forte; d'une main-d'œuvre jeune et qualifiée; DI CES 93/2002 (MERAL) E-MLJ/LA/jg …/… - 11 - d'entrepreneurs courageux, innovateurs et expérimentés; d'un marché intérieur vaste et en pleine expansion; d'un territoire et d'un climat formidables. La Turquie a les capacités et la volonté de surmonter les crises et de devenir une puissance économique. Tous les participants turcs du CCM UE/Turquie sont décidés à se mobiliser et à unir leurs forces en faveur de leur pays. Nous pensons que cette évolution serait également très bénéfique pour l'UE. DI CES 93/2002 (MERAL) E-MLJ/LA/jg