COMMENT FAIRE SA GÉNÉALOGIE CADASTRALE EN BARONNIES

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COMMENT FAIRE SA GÉNÉALOGIE CADASTRALE EN BARONNIES
Les rencontres du Garde-Notes Baronniard
Nº 1. - ÉTUDES ET RECHERCHES EN BARONNIES
COMMENT FAIRE SA GÉNÉALOGIE CADASTRALE
EN BARONNIES
Bruno POINAS
Le Prieuré
26740 Saint-Marcel-les-Sauzet
Résumé
Remonter au fil du temps l’histoire d’un bien nécessite de bien connaître les deux types fondamentaux de
documents cadastraux : la matrice, où les biens sont enregistrés par propriétaire, l’état de section et le plan, suivant
l’ordre topographique. Que ce soit dans le sectionnement contemporain (depuis 1930-1970 environ), napoléonien
(après 1810-1835 environ) avec plan, ou révolutionnaire (à partir de 1791-1793), ou dans les cadastres médiévaux
ou modernes, la réussite de l’entreprise dépend de deux clés : de tables plus ou moins complètes et de mutations
notées de façon plus ou moins succincte.
INTRODUCTION
La « généalogie cadastrale », tout comme la généalogie traditionnelle, consiste à démêler et remonter, plus ou moins facilement suivant les périodes et les documents, le fil du temps. Cependant,
l’écheveau n’est plus, ici, celui de la famille, mais celui du patrimoine. Et lorsqu’on parle de patrimoine
à l’Administration, elle vous guidera forcément à l’impôt et à l’une de ses plus belles créations : le
cadastre. Établir la généalogie d’un bien dans ce subtil dédale fiscal nécessite, alors, autant de rigueur
et de patience, qu’un défrichement méthodique de jungle notariale. Le faire en Baronnies drômoises ne complique pas la tâche, bien au contraire, vu les nombreuses archives que l’on peut y consulter.
1) Les documents cadastraux
La raison d’être du cadastre est simple : connaître la richesse foncière de chacun des contribuables
pour mieux répartir l’impôt ; en revanche, son organisation l’est moins et a souvent varié au cours du
temps. En conséquence, les documents cadastraux revêtent de multiples aspects et, même si des
similitudes existent, l’archivistique cadastrale reste un domaine difficile, voire peu connu si l’on ne
considère que les archives communales.
On peut répartir ces différents produits de la fiscalité publique en quatre périodes inégales :
- médiévale et moderne (jusqu’en 1791-1793, parfois après),
- révolutionnaire (jusqu’en 1810-1835 environ, suivant les communes),
- napoléonienne (jusqu’en 1930-1970 environ, suivant les communes),
- contemporaine (toujours en cours).
Les biens des divers propriétaires peuvent être enregistrés de deux manières :
- par propriétaire,
- suivant l’ordre topographique.
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Ces deux modes d’enregistrement génèrent deux types fondamentaux de documents :
- la matrice,
- l’état de sections ou sa représentation figurée : le plan.
a) L’entrée topographique
Les biens, sous l’Ancien Régime, sont rarement présentés sous forme de plan ou de son répertoire,
sorte d’état de sections avant la lettre. Avec le cadastre révolutionnaire apparaît l’organisation par
sectionnement. Le terroir est découpé en zones précises qui reçoivent, chacune, une appellation et sont
signalées par une lettre de l’alphabet. A l’intérieur de chaque zone, que l’on appelle « section », chaque
bien d’un seul tenant est repéré par un numéro. Les biens décrits dans le document cadastral (l’état de
sections) se succèdent numériquement en fonction de l’ordre que suivent les géomètres sur le terrain,
généralement par « paquets » ou « tourbillons ». Les états de sections (ou leur pièce préparatoire les
« états indicatifs») de la période révolutionnaire ne correspondent pas à un plan ; les biens sont, parfois, situés par confronts. Le sectionnement napoléonien contient, généralement, moins de sections
que le sectionnement révolutionnaire, mais présente un plan antérieur d’une à quelques années à
l’état de sections. Le plan contemporain est actualisé régulièrement par l’édition de nouvelles feuilles.
Lorsqu’il y a eu un remembrement, le procès-verbal des opérations de remembrement représente une
sorte d’état de sections complémentaire.
b) L’entrée propriétaire
Lorsque le document enregistre les biens regroupés par propriétaire, il s’agit, alors, d’une matrice
(parcellaire ou courcier sous l’Ancien Régime). L’ordre d’enregistrement varie suivant les époques :
alphabétique des prénoms, non alphabétique ou topographique, alphabétique des noms surtout depuis le XVIIIe siècle. Le cadastre révolutionnaire ne connaît que des matrices de la contribution foncière, alors que pour le cadastre napoléonien, de 1882 à sa fin d’utilisation, il existe des matrices
spécifiques pour les propriétés non bâties et pour les propriétés bâties. Les matrices du cadastre
contemporain commencent, avant la lettre A, par les personnes morales, signalées à partir de 1974 par
le sigle « + » ; les propriétés indivis sont signalées, elles, par un astérique « * ». Les matrices sont
généralement pluriannuelles, à l’exception de quelques spécimens révolutionnaires annuels.
c) La durée d’utilisation
Outre la nature des différents documents, il est, en effet, essentiel de connaître précisément leur
durée d’utilisation, de quelques années (parfois une) à plusieurs décennies. Bien souvent, un seul
document manque, le fil se coupe et ne peut être renoué.
Les parcellaires d’Ancien Régime ont été utilisés, parfois, pendant deux siècles. L’emploi séculaire
est fréquent. Ces documents sont, parfois, doublés et résumés par des courciers ou lièves qui récapitulent l’estime des biens par propriétaire, eux-mêmes en usage pendant plusieurs décennies.
Les états de sections révolutionnaires, voire les états indicatifs, sont, souvent, actualisés jusqu’à
la mise en place du cadastre napoléonien, parfois quarante ans plus tard. Les états de sections napoléoniens ont été effectués, au plus tard, quelques années après la levée du plan. Ils ne comportent
jamais de mentions postérieures à leur réalisation. Les états de sections contemporains, réalisés en
même temps que le plan, sont annotés jusqu’à la mise en place des microfiches, à partir de 1981 (pour
les communes qui ont opté pour ce support), sinon jusqu’en 1990.
Les matrices, sous les sectionnements napoléonien et contemporain, sont nombreuses et de durée
variable. Suivant les communes, les premières matrices « napoléoniennes » apparaissent en Baronnies en 1824, les dernières en 1837. Elles sont utilisées, pour la plupart, jusqu’en 1914. Dans les
communes les plus importantes, la première matrice va seulement jusqu’en 1851ou 1882, puis une
autre jusqu’en 1914. Dans ces documents, jusqu’en 1882 sont enregistrés autant les biens bâtis que les
biens non bâtis. Après cette date, la matrice originelle ne s’intéresse qu’aux propriétés non bâties et
est créée une matrice spécifique aux propriétés bâties qui va, donc, de 1882 à 1910. Une autre matrice
des propriétés bâties est utilisée, ensuite, de 1910 jusqu’à la fin du cadastre napoléonien, c’est à dire
en Baronnies entre 1934 et 1971. Il s’agit du même terme, bien sûr, pour la matrice des propriétés non
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bâties commencée en 1914. Avec le cadastre contemporain, on retrouve dans le même document les
biens bâtis et non bâtis. La première va jusqu’en 1973. La seconde de 1974 à 1979. La troisième de
1980 jusqu’à l’option du support microfiches (à partir de 1981), sinon pour les autres communes jusqu’en 1987. Une autre matrice semble en cours depuis 1988.
2) Tables et mutations : les deux clés du problème
Sans mutations, le cadastre n’est pas vraiment cadastre : en effet, il ne peut correctement remplir
sa fonction première de connaître la répartition foncière s’il n’est pas régulièrement actualisé de la
valse continuelle des héritages, ventes ou achats de tout un chacun. Aussi, est-il indispensable de
comprendre où et comment sont notées les mutations si l’on veut remonter, maillon après maillon, la
chaîne cadastrale.
D’autre part, faire des recherches sans pouvoir bénéficier de tables alphabétiques ou chronologiques complètes relève de la gageure ou de la loterie. Si, par exemple, le cadastre révolutionnaire que
l’on consulte n’a pas de table, la seule solution est d’en faire une.
a) Choix de la méthode
Le bien dont on veut faire la généalogie doit d’abord être bien identifié d’un point de vue topographique : localisé sur le plan et affecté de son numéro d’identification dans la section du cadastre
contemporain.
Deux méthodes sont, alors, possibles :
Si le bien est facilement repérable (maison isolée, par exemple), on peut directement essayer de le
repérer sur le plan napoléonien, en notant son numéro dans la section et en regardant sur l’état de
sections à qui il appartient. Il est conseillé de vérifier la similitude de la superficie notée dans l’état de
sections du XIXe siècle et de celle que l’on trouve dans la matrice du XXe siècle dans les propriétés
non bâties (où la maison apparaît en nature de bien comme sol ; en effet depuis 1882, la
superficie d’un bien bâti ne peut être connue que par sa mention en tant que sol de maison
dans les propriétés non bâties). Au début du XIXe siècle, arp. (arpent), p (perche) et mèt.
(mètre) équivalent aux h (hectare), a (are) et ca (centiare) postérieurs. Si le bien n’a pas la
même surface, cela ne veut pas forcément dire qu’il ne s’agit pas du même bien, vu les fréquentes erreurs rencontrées au moment de l’établissement du cadastre contemporain. Aussi
est-il préférable de choisir une méthode moins rapide, mais plus prudente qui suit le bien de
document en document.
L’autre méthode utilise, en effet, systématiquement l’entrée propriétaire, c’est à dire la matrice.
b) Les feuillets supprimés ou comptes annulés
Si l’on connait le propriétaire, il suffit de regarder dans la matrice commencée en 1974 par
exemple, la « table des numéros communaux de propriétaire », table alphabétique qui renvoie aux
propriétaires, repérables par une lettre de l’alphabet et un chiffre (Boyer Paul = B17). Il s’agit de la
situation de la matrice en fin de période d’utilisation, c’est à dire en 1979, car chaque année une
nouvelle table est éditée. Au lieu de passer par la table, on peut chercher directement dans la matrice,
où les feuillets sont classés par ordre alphabétique.
Il est important de noter que, dans le cadastre contemporain, à partir de 1974, on supprime un
compte qui évolue dans la contenance ou l’évaluation de ses biens pour éditer la nouvelle situation sur
un nouveau feuillet. Les feuillets qui ne sont plus en cours ne se trouvent plus dans le corps de la
matrice, mais généralement relégués en fin de volume ou dans un autre : ce sont les « feuillets supprimés » ou, avant 1974, les « comptes annulés » (lorsque la totalité du compte n’est plus en usage). Ces
derniers sont conservés par ordre numérique ; quant aux feuillets supprimés, ils sont regroupés par
année de suppression par ordre alphabétique.
Si le propriétaire (en 1979) a acquis ce bien après 1974, on trouve dans les deux premières colonnes
en partant de la gauche mentions de l’année d’acquisition (1977, par exemple) et de la référence
alpha-numérique (B17) du propriétaire. Avec cette référence, il faut chercher dans les feuillets suppri-
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més cette année-là, donc en 1977, soit en regardant dans la table alphabétique, soit en cherchant
directement, dans les B, le B 17. Il arrive que soient mentionnés une année d’acquisition antérieure à
1974 et un numéro de compte à retrouver, alors, dans la matrice précédente.
S’il n’y a pas de mentions dans les deux premières colonnes, c’est que ce propriétaire possédait ce
bien au début de la matrice, c’est à dire en 1974.
c) D’une matrice à l’autre (cadastre contemporain)
Pour suivre le propriétaire dans la matrice qui finit en 1973, il faut regarder directement dans la
« table des comptes » qui a été réalisée au début de la période d’utilisation du cadastre contemporain
et actualisée au fur et à mesure, table à la fois alphabétique (au début) et chronologique (à la fin).
Première hypothèse (la plus simple) : le propriétaire possédait ce bien en début de période et on
trouve ses références dans la « table des comptes ».
S’il a vendu son bien, son nom est barré ; si, dans la colonne à droite, sont mentionnés la date de la
mutation et le nouveau propriétaire, c’est que le bien a été vendu ou légué en totalité à une seule
personne. Si ce nouveau propriétaire est barré à son tour et qu’il n’ y a aucune mention dans la colonne
de droite, c’est que le compte a été annulé parce que les biens ont été vendus ou légués à au moins deux
personnes différentes. Pour trouver le nouveau propriétaire, il faut rechercher le numéro du compte et
le consulter, soit dans les comptes annulés classés par ordre numérique si le nom est barré, soit dans
le corps de la matrice où les propriétaires sont classés par ordre alphabétique, si le nom n’est pas
barré.
Si le propriétaire n’a pas vendu son bien, on retrouve facilement son compte dans le corps de la
matrice (ordre alphabétique).
Deuxième hypothèse : le propriétaire ne possédait pas ce bien en début de période d’utilisation de
la matrice, c’est à dire que son nom n’est pas à sa place dans l’ordre alphabétique d’origine. Il a été
rajouté à la fin de la table, lorsque son compte a été créé. Pour le trouver, on est obligé de lire attentivement les nouveaux comptes jusqu’à ce qu’on le rencontre. Pour retrouver le ou les propriétaires
antérieurs, les deux premières colonnes de gauche du compte indiquent l’année d’ « entrée » et le
numéro du compte, soit à rechercher dans les comptes annulés si le propriétaire (ou son éventuel
héritier) ne possède plus d’autre(s) bien(s), soit à rechercher dans le corps de la matrice dans le cas
inverse.
d) l’état de sections contemporain
Si l’on ne connait pas le propriétaire, la seule possibilité est de se tourner vers l’entrée topographique, grâce au numéro d’identité du bien (le numéro de sectionnement) ; dans l’ignorance de ce dernier,
il ne reste plus qu’à repérer le bien sur le plan contemporain et à noter ses références. La consultation
de l’état de sections, commencé au début du cadastre contemporain et actualisé par la suite jusqu’aux
années 1980-1990 suivant les communes, permet de voir les différents propriétaires qui ont pu se
succéder. En face de chaque numéro de section est noté le numéro du compte du propriétaire ; dans les
colonnes postérieures (à droite) sont notés, éventuellement, les années de mutations et les numéros de
compte ou de feuillet des nouveaux propriétaires. La consultation de la matrice permet, ensuite, de
connaître les coordonnées du propriétaire en début de cadastre contemporain et des éventuels propriétaires successifs jusqu’à l’époque actuelle.
e) Changement de sectionnement (contemporain - napoléonien)
Un premier problème majeur se pose avec le changement de sectionnement. Même si le cadastre
contemporain reprend généralement les mêmes sections que celles du cadastre napoléonien, leur
organisation interne est loin d’être la même. Pour connaître la correspondance entre le numéro de
sectionnement contemporain et le numéro de sectionnement napoléonien, si on a la chance d’être dans
une commune où il existe une « table de correspondance entre le nouveau et l’ancien numérotage des
parcelles », la tâche est aisée.
En revanche, sans ces pages placées en fin de volume ou de section, il est nécessaire de revenir à
l’entrée propriétaire et chercher dans la table alphabétique de la matrice des propriétés non bâties,
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commencée en 1914 et actualisée jusqu’à la fin du cadastre napoléonien. Si le propriétaire est le même
en 1914 qu’au début du cadastre contemporain, on le trouve, à sa place, dans la table alphabétique
d’origine ; sinon, il faut chercher son nom à la fin de la lettre (B, par exemple), où ont été enregistrés
les nouveaux propriétaires commençant par B au fur et à mesure de leur apparition. Attention aux
veuves ou héritiers qui peuvent changer d’appellation ! En face du nom est noté le numéro de la page
où se trouve la première page des biens. En effet, lorsque les biens possédés ne peuvent tenir en une
page, ils sont enregistrés sur la page ou partie de page vierge la plus proche ; la mention en bas de page
ou en marge « continué au folio ... » est, bien sûr, capitale pour ne pas perdre le fil.
Il est nécessaire de bien vérifier la superficie annoncée dans chacun des deux sectionnements. En
cas de désaccord, il est nécessaire de calculer, également, la superficie d’éventuels biens contigus,
appartenant ou non au propriétaire, afin de voir si quelques centiares n’ont pas été incorporés à une
parcelle contigüe, de ce même propriétaire ou d’un autre... Une vérification ultime de plan à plan n’est
généralement pas superflue... La comparaison du revenu cadastral « napoléonien » et de celui du
cadastre contemporain est, également, un élément primordial. De 1882 à la fin du cadastre napoléonien, il est à rappeler que le revenu cadastral d’une propriété bâtie apparaît seulement dans la matrice des propriétés bâties.
f) D’une matrice à l’autre (cadastre napoléonien)
Les deux matrices des propriétés bâties commencées en 1882 et 1910 comportent deux « cases »
par page, contenant chacune les biens d’un propriétaire. Dans celle de 1910, est mentionnée la « case
de l’ancienne matrice », ce qui évite la consultation parfois longue de la table. Tout comme la matrice
des propriétés non bâties commencée en 1914 et celle des « propriétés foncières » généralement commencée en 1822, elles contiennent, toutes, quatre colonnes destinées aux mentions des mutations, pas
toujours localisées au même endroit : deux colonnes concernent les années d’ « entrée » et de « sortie »,
deux autres les numéros de page ou de case d’où sont « tirées » et où sont « portées » les propriétés.
L’année d’entrée n’est pas mentionnée lorsqu’il s’agit d’un bien possédé dès l’origine de la matrice,
sauf pour la matrice des propriétés bâties de 1882. De même, pour un bien possédé en fin d’utilisation
n’est pas notée l’année de sortie ; il apparait, seulement, 1882 pour les biens bâtis contenus dans la
matrice des propriétés foncières du début XIXe qui ont été transférés dans la nouvelle matrice des
propriétés bâties. En ce qui concerne les indications de page ou de case, pour ce cas de biens bâtis
transférés, est mentionné, dans cette matrice des propriétés foncières, P.B. (=propriété bâtie) comme
« numéro de sortie » ; de même dans la matrice des propriétés bâties, est notée dans la colonne « tiré
de » le numéro de la page de la matrice des propriétés non bâties d’où vient le bien, mais si le numéro
est suivi d’un B, il s’agit d’une « case » de la matrice des propriétés bâties. Un trait continu qui ondule
dans une colonne équivaut à un idem. Au lieu d’un numéro, on peut trouver « C. Nle » (construction
nouvelle) ou démolition ou corrosion pour un bien. Quand un bien est vendu ou légué à plusieurs
personnes, on trouve autant de numéros correspondants dans la colonne « porté à ». Enfin, dans le cas
d’un partage d’un bien, les nouvelles parcelles (qui portent dans le cadastre contemporain un nouveau
numéro), sont notés dans le cadastre napoléonien avec le même numéro suivi de p (=partie).
g) Changement de sectionnement (napoléonien - révolutionnaire)
Passer du sectionnement napoléonien au sectionnement révolutionnaire est une entreprise difficile, étant donné que l’Administration révolutionnaire n’a pas jugé utile de lever de plan cadastral et
que les confronts ne sont pas toujours notés dans les états de sections révolutionnaires, qui sont,
généralement, les seuls documents à avoir été actualisés jusqu’à la mise en place du cadastre napoléonien. La consultation du procès-verbal de sectionnement établi par les municipalités à partir de 1792
permet de connaître les limites topographiques de chaque section et d’y localiser plus facilement le
bien recherché.
La recherche du propriétaire dans le cadastre révolutionnaire s’effectue, de façon idéale, si l’on
peut consulter une table actualisée jusqu’à la veille de la révision napoléonienne ; sinon, par la lecture
attentive de chaque bien et des éventuelles mutations pour en constituer une. L’existence d’une matrice de la contribution foncière (généralement sans mutations ou enregistrées de façon incomplète)
permet de voir tous les biens possédés par un propriétaire sous leur numéro de sectionnement. Si l’état
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de sections révolutionnaire possède une situation par confronts des biens décrits, en tenant compte
des mutations enregistrées jusqu’à la veille du cadastre napoléonien, il est possible d’ébaucher un plan
succinct du quartier qu’il est intéressant de comparer avec son homologue napoléonien de quelques
mois plus vieux. Sans confronts, à partir du plan et de l’état de sections napoléoniens, il est, alors,
nécessaire de relever dans l’ordre numérique napoléonien plusieurs biens voisins de celui recherché.
Seule la comparaison de la liste de ces propriétaires en principe contigus dans le cadastre napoléonien
avec la même liste dans le cadastre révolutionnaire permet de repérer une éventuelle correspondance,
souvent dans un ordre inverse. .
h) Cadastres d’Ancien Régime
Malgré les apparences, le passage du sectionnement révolutionnaire à l’encadastrement d’Ancien
Régime n’est pas très problématique ; ceci peut s’expliquer essentiellement par le fait que ces deux
organisations cadastrales ont été effectuées sous le contrôle étroit des autorités municipales et que le
cadastre révolutionnaire, devant être fait rapidement, s’est grandement appuyé sur la situation cadastrale antérieure.
Là plus qu’ailleurs, l’existence d’une table complète et actualisée se révèle un élément déterminant pour la suite des recherches. Les biens, à l’origine du cadastre, sont parfois enregistrés suivant
un ordre alphabétique des noms des propriétaires ; cette caractéristique peut être intéressante et
suppléer l’absence d’une table, si le cadastre n’a pas été réalisée avant le milieu du XVIIIe siècle, soit au
maximum une quarantaire d’années d’utilisatio. De toute façon, s’il n’existe pas de table utilisée à la
veille de la Révolution dans un cadastre commencé au début XVIIe, la seule solution est d’en faire une,
en prenant soin de bien noter les mutations en marge des biens légués ou vendus.
Les mutations sont, en effet, inscrites dans la marge, voire entre les paragraphes suivant la place
disponible. La mention marginale de mutation, pour les cadastres des XVe-XVIe, ne comporte pas de
date, mais juste « t » ou « tenet » (=tient) X Y . A partir de la deuxième moitié du XVIe siècle, des dates
apparaissent davantage. Au XVIIe et XVIIIe, peuvent être notées également des mentions de filiation,
les références de l’acte notarié, la cause de la mutation, les précisions d’un partage ...
La recherche d’un possesseur dont le numéro de folio a été trouvé par la consultation d’une table,
doit se faire en sachant que le numéro de folio mentionne deux pages : le recto et le verso. S’il s’agit
d’une ancienne « parcelle » (=compte) transmise totalement par achat ou legs, on peut retrouver le
bien recherché écrit avec l’écriture d’origine lors de la création du cadastre, ou avec une écriture
postérieure s’il a été rajouté en fin de « parcelle ». Les biens « chargés sur » (=acquis par) un propriétaire sont, en effet, rajoutés en fin de sa « parcelle » ou, faute de place, sur la partie de page vierge la
plus proche. S’il s’agit d’une nouvelle « parcelle » créée bien après le début du cadastre, elle ne se
trouve pas forcément en haut d’une nouvelle page, mais dès qu’un peu de place le permet, généralement en fin de volume. Une fois le bien trouvé, il est, en principe, indiqué qui a été « déchargé » (=l’a
vendu), voire le numéro du folio du « tenet » (description du bien) de l’ancien possesseur. Normalement, chez cet ancien possesseur, une mention marginale en face de ce bien indique le folio et le nom
du nouveau propriétaire d’où l’on vient qui a été « chargé » du bien.
L’usage d’un courcier ou liève permet, généralement, d’accéder plus facilement au cadastre. Les
mutations, dans un courcier, sont enregistrées au fur et à mesure, en fin d’article. Elles peuvent renvoyer aux nom et prénom de l’ancien possesseur et son folio dans le cadastre.
Si le bien recherché est un bien bâti, de surcroît situé dans le village, un relevé systématique des
biens bâtis du village, généralement décrits en premier dans les « parcelles » de biens, évite de se
noyer dans cet océan patrimonial. Si les biens sont situés par quatre confronts (en principe aux quatre
points cardinaux), l’esquisse d’un plan permet, parfois, d’y voir plus clair et de trouver d’éventuelles
similitudes avec le plan napoléonien.
Le passage d’un cadastre à un autre dépend, encore une fois, de la durée d’utilisation de ce document et de la qualité de sa ou ses tables, à consulter en priorité.
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CONCLUSION
De même que la prudence, la rigueur et la patience sont des vertus aussi utiles à conseiller en
généalogie traditionnelle qu’en généalogie cadastrale, de même faut-il encourager le dépouillement
méthodique et systématique d’un cadastre révolutionnaire ou d’Ancien Régime tout autant qu’un
dépouillement de généalogie traditionnelle pour qui veut maîtriser d’aussi nombreux éléments, riches
et inattendus, originellement mis dans un ordre qui ne satisfait pas l’esprit curieux de cette fin XXe
finissant.
La consultation de sources annexes (terriers seigneuriaux, dossiers d’aménagement ou de construction de routes, de biens communaux, ...) pourra toujours aider, avec un peu de chance, à sortir
d’une impasse que l’on croyait définitive.
❦
Fig. 1 : Matrice des propriétés foncières commencée en 1822. La maison B377 apparaît comme bien bâti sur la prmière ligne,
comme bien non bâti sur la deuxième.
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Fig. 2 : État de sections napoléonien sans mutations.
La superficie est encore notée en arpents, perches et mètres
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Fig. 3 : Matrice des propriétés foncières commencée en 1822.
Détail de la table alphabétique (colonne de gauche) et chronologique (reste de la page).
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Fig. 4 : Du sectionnement contemporain au sectionnement napoléonien.
En haut, matrice des propriétés bâties 1910-1950 du cadastre napoléonien.
En bas, la matrice du cadastre contemporain 1951-1973. Le revenu cadastral est le même.
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Fig. 5 : L’élaboration du cadastre contemporain en Baronnies (1934-1971).
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