Santé - Œuvre du Marin Breton

Transcription

Santé - Œuvre du Marin Breton
Almanach 1905 : P. 144
Avis aux jeunes gens
Vous avez tous lu, chers amis, les pages 99 à 103 de l’Almanach 1903, et vous avez
compris les risques de graves maladies auxquels bien des jeunes gens s’exposent ?
Les médecins de la marine ont relevé que, dans les équipages de la Flotte, il y a 87
hommes sur mille qui meurent de ces maladies ! Dans la troupe, il y en a 140 pour
mille qui succombent à ce mal sournois et perfide !
Et notez bien que dans ces chiffres on ne peut compter que ceux qui meurent au
service ; combien finissent douloureusement, plus tard, des suites de cet empoisonnement du sang !
Almanach 1905 : P. 154
INSTRUCTIONS MÉDICALES
EN CINQ CHAPITRES
I. - Soins et remèdes en cas d’accidents.
Voici quelques conseils médicaux qui pourront rendre service pour soigner les
collègues en cas d’accidents ou de blessures, lorsqu’on se trouve sans médecin. Nous
allons passer en revue les principaux cas qui peuvent se présenter dans la vie de
tous les jours : blessures, plaies, pourriture des plaies, mauvaises piqûres, mauvaises
morsures, brûlures, membres cassés, pertes de sang, coups, foulures, tour de reins,
hernies, étouffement ou asphyxie, empoisonnement, évanouissement et faiblesses,
ivresse mauvaise, insolation.
Blessures, plaies, pourriture des plaies, abcès. - Voilà une bles-
sure, une plaie, un abcès abouti qui rend du pus, blanc, jaune ou vert. Quand elle
fatigue le malade, quand celui-ci a de la fièvre, chaleurs, frissons, grande fatigue, c’est
grave et il faut soigner sérieusement.
Il faut une propreté parfaite dans les pansements, mains et linges très propres.
Avant de toucher la plaie, lavez vos mains parfaitement au savon et à l’eau très
chaude, puis lavez la plaie avec de l’eau ayant bouilli, et avec du sublimé (poison), si
vous en avez. Avant de mettre les linges sur la plaie, faites-les bouillir cinq minutes
dans de l’eau et trempez-les dans le sublimé (poison). Plus tard, si le malade est repris
de fièvre, d’abattement, c’est qu’il y a encore du pus qui se fait dans la plaie, c’est
qu’il reste encore dans cette plaie des mauvais microbes qui fabriquent le pus. Dans
ce cas, il faut larguer le pansement et recommencer les lavages avec un remède qui
achève de tuer tous ces mauvais microbes. Le mieux est de consulter un médecin
qui saura ouvrir toute la plaie et y faire pénétrer le remède. Si on ne peut voir un
médecin, il faut soigner de suite énergiquement cette plaie enflammée. Avec des
ciseaux ou un canif qu’on purifie au feu auparavant, on élargit la plaie, on coupe les
chairs mortes, de manière à pouvoir bien faire pénétrer le remède partout pour qu’il
lave et purifie la blessure dans tous ses coins. Cette opération-là doit être faite avec
prudence, car on risque de couper une grosse veine par où s’échapperait tout le sang
du malheureux. Si le malade n’a pas de fièvre, c’est que la plaie, la blessure, a été
lavée comme il faut, et qu’il n’y est resté aucun microbe fabriquant du pus. Dans ce
cas, il faut bien se garder de larguer les linges pour voir la plaie ; moins on y touche,
mieux ça vaut. Si la fièvre revient encore, il faut tâcher de voir un médecin, aussitôt
qu’on sera à terre, car cette fièvre est causée par du pus qui se répand dans le corps
et empoisonne le sang. Cc que nous venons de dire s’applique aussi aux panaris,
furoncles et à tous les abcès chauds.
Vous voyez comme le remède qui tue les microbes a un rôle important : il est heureusement facile de le posséder à bord ou à la maison. Le meilleur est la solution de
sublimé (poison violent) ou encore l’eau phéniquée (à 10 grammes d’acide phénique
pour un litre d’eau), ou encore l’eau de javelle ou de l’eau très chaude.
A défaut de ces drogues-là, on peut laver la plaie avec de l’eau très chaude qui
aura bouilli auparavant ; ou bien avec de l’eau-de-vie, du rhum : au moins de cette
manière, à l’extérieur, ces alcools sont capables de faire un peu de bien en empoisonnant les mauvais microbes des plaies. Un autre remède qui agit souvent avec succès et
qui a l’avantage d’être très bon marché et pas du tout poison, c’est le bicarbonate de
soude. On fait fondre à peu près 10 grammes de cette poudre-là dans un litre d’eau
1
et on fait les lavages avec cette eau. Avoir soin de toujours jeter l’eau dès qu’elle a
servi. Enfin un autre remède (celui-là c’est à boire), c’est de la lévurine ; le pharmacien en indiquera la dose. En cas de panaris, d’anthrax, de furoncles, la lévurine est
un très puissant remède ; à défaut de lévurine, on peut avaler de la levure de bière
(bien fraîche), la valeur de deux cuillères à café par jour, si on peut s’en procurer.
La levure de bière se trouve être un précieux remède contre beaucoup de maladies.
Essayez-en à l’occasion, puisque c’est si bon marché.
Mauvaises piqûres, mauvaises morsures. -
Voici une piqûre de
poisson, une morsure de chien qui a mauvaise apparence, ou même simplement
qui donne des craintes... Vite, il faut presser de tous les côtés pour en faire sortir
beaucoup de sang ; bien vite aussi, il faut arrêter le courant de sang, sans perdre
une minute, de manière que le sang déjà vicié n’aille pas dans le corps corrompre le
reste : pour cela on fait un amarrage un peu souqué avec un mouchoir au-dessus de
l’endroit blessé. Puis, élargir le trou avec un couteau très propre (purifié au feu), et
aussitôt laver cette plaie avec du sublimé (poison) ou bien, si on n’en a pas, avec de
l’eau bouillie ou de l’eau de javelle.
Si la plaie noircit, enfle, donne de la fièvre, il faut brûler la plaie au fer rouge
(avec un clou pointu ou épissoir rougi au feu, si on ne peut aller voir de suite un
médecin). Après ça, larguez l’amarrage du bras, car ce serait dangereux d’arrêter le
courant du sang pendant plus d’une heure. Il faut donner au malade beaucoup de
café, mais sans cognac ni aucune boisson alcoolique. Donner aussi un demi-gramme
de quinine, si possible.
Brûlures. -
Il y a beaucoup de remèdes contre les brûlures. Rappelez-vous qu’il
faut les traiter comme plaies, c’est-à-dire avec de grands soins de propreté, lavages à
l’eau bouillante ou au sublimé (poison) ; puis, panser la brûlure en la couvrant de
vaseline boriquée, et par-dessus du linge bien propre.
Mettre de la ouate au sublimé, si on en a, entre la brûlure et le linge. Lorsqu’il y
a des ampoules pleines de liquide, il faut les percer avec une aiguille propre (pour
rendre propre l’aiguille, chauffez-la un instant sur une chandelle, ou au feu). Si la
brûlure est grande et donne beaucoup de fièvre et de douleurs, consultez un médecin.
Au bout de quelques jours, si la brûlure ne fait pas de pus, c’est qu’elle a été bien
soignée. Dans ce cas elle guérira assez vite ; ne touchez pas au pansement.
Membres cassés (Fractures). - Un bras ou une jambe cassés, voilà un
accident qui n’est pas rare.
Vous savez à peu prés ce qu’il faut faire ; rapprocher l’une de l’autre les deux
parties cassées, mais n’oubliez pas deux choses, si vous voulez que les os se recollent,
bien et rapidement :
1° il faut que les deux bouts de l’os cassé soient réunis bien en face l’un devant
l’autre ;
2° il faut qu’ils ne puissent plus se déranger de cette position pendant 15, 20, 30,
40 jours.
Il vaut mieux ne pas chercher à faire ce pansement-là vous-même. Si vous êtes
à terre, portez le blessé chez le médecin ; si vous êtes en mer, faites un pansement
provisoire pour qu’il puisse attendre le moment de voir le médecin sans que le mal
risque de s’aggraver. Pour faire ce pansement provisoire, on dégage en douceur la
jambe ou le bras cassé et on le met à nu : si on voit l’os qui a percé la peau, on lave
avec grand soin, le mieux possible, l’entourage de la plaie avec de l’eau de mer, ou du
sublimé (poison) ou de l’eau de javelle ; ensuite on recouvre la plaie, sans chercher à
faire rentrer l’os, avec du linge bien propre, mouillé du remède que l’on a (sublimé
ou eau de javelle ou eau d’vi). Puis on pose le membre cassé sur une planche que
1 Y ajouter quelques grammes d’Eucalyptol, si on peut en avoir.
l’on a garnie auparavant avec de l’étoupe ou de la paille, et on amarre délicatement
le membre sur la planche avec des bandes de toile ou du vieux filin, juste assez serré
pour que ça ne puisse plus se déplacer pendant le transport chez le médecin. Quand
il survient de la fièvre, il faut craindre que ça tourne mal ; il ne faut pas hésiter à voir,
le plus tôt possible, un médecin (et non pas un rebouteur).
Pertes de sang (Hémorragies).-
Quand le sang coule, coule avec
force d’une blessure, vous savez comment on l’arrête ; vous faites un tampon avec un
linge bien parfaitement propre, mouillé de sublimé (poison) ou bien trempé dans de
l’eau de mer ou du cognac, et vous bouchez le trou, le mieux que vous pouvez, avec
vos mains que vous avez bien savonnées auparavant. Par-dessus, mettez un bandage
avec un mouchoir qui maintient le bouchon en place. Si le sang coule par secousses,
ça veut dire qu’un gras canal, une artère est coupée ; alors il faut souquer avec un
mouchoir le bras ou la jambe blessé, au-dessus de l’endroit blessé, entre le corps et
la blessure, pour arrêter le courant du sang. Si le sang coule régulièrement en faisant
de la mousse, ce sont des petites veines qui ont été coupées : dans ce cas-là, c’est le
bout du bras ou de la jambe qu’il faut serrer, non pas entre la plaie et le corps, mais
entre la plaie et le bout libre.
N’oubliez pas qu’il ne faut pas trop souquer, surtout pas trop longtemps, autrement cela ferait mourir le membre trop souqué, et il se mettrait vite à pourrir de
gangrène. Si la coupure est longue et profonde, tâchez de voir un médecin le plus
tôt possible ; car s’il recoud la plaie sans tarder elle guérira en quelques jours, tandis
que sans cela elle risque de s’enflammer, de faire du pus et d’empêcher l’homme de
travailler pendant plusieurs semaines. Heureux même si ça ne tourne pas plus mal
Coups (Contusions). - Quand une grosse bosse vient sur un endroit qui a
reçu un coup (coup de sabot, coup de pierre, coup de bâton, etc.), et que le membre
s’engourdit, il est bon d’y faire quelque chose. Tenir sur la bosse des linges trempés
d’eau froide, qu’on arrose souvent. Si on a de l’eau blanche ou de l’alcool camphré:
en mettre des compresses dessus. Faire boire du café au malade s’il est étourdi par
la secousse.
Foulures, entorses. -
C’est en général le pied ou le poignet qui attrape les
foulures et les entorses. Plonger de suite dans de l’eau très froide le membre qui a
subi ce mauvais effort, et le laisser ainsi une demi-heure. Ensuite, avec une bande de
toile, on entoure la partie malade en souquant un peu la toile. Après cela on peut
continuer à se servir du pied ou de la main, tout en le ménageant. Si la douleur ne
mollit pas, il ne faut pas se forcer, mais laisser le membre au repos et le frictionner
avec de l’huile, un peu rudement.
Tour de reins, mauvais effort dans les cuisses. - Les mâts de mi-
saine, les manœuvres d’ancres, les efforts au guindeau vous jouent souvent de vilains
tours. Pendant un violent effort des reins, on éprouve tout à coup une vive douleur
et on largue tout sans force... C’est un muscle du dos qui vient de manquer. Il n’y a
guère de remède pour se rétablir vite ; c’est la bonne nature qui se charge de faire à
elle toute seule la réparation. Pourtant, on peut l’aider en se faisant faire des frictions
avec de l’huile camphrée et en se faisant mettre par le médecin ou le pharmacien 4
ou 5 ventouses scarifiées. En tous cas, il faut éviter absolument, et pendant quelques
semaines, de faire des travaux pénibles et des efforts.
Hernies. - Vous connaissez tous la hernie ; c’est une espèce de boule qui paraît
dans le bas du ventre sur le côté, et qui descend ensuite dans les parties.
Ça vient souvent un jour qu’on a fait un effort trop grand en travaillant.
C’est une partie de boyau qui est sortie de sa place. Il faut empêcher absolument
que cette boule sorte davantage, et même il faut essayer avec les doigts, tout doucement, de la faire rentrer à sa place.
Pour faire cela, allongez le malade sur le dos, avec un paquet sous les cuisses, de
façon à faire un peu plier les jambes ; puis, couvrez la boule avec un linge mouillé
d’eau froide toujours refroidie, ou plein de débris de glace, et laissez-le pendant
plusieurs heures.
Lorsque cette boule est rentrée, il faut empêcher qu’elle ne ressorte ; pour ça on
met une ceinture exprès, et puis on place en dedans, entre la ceinture et la boule,
un petit paquet de linge un peu dur, qui appuie bien sur la boule et la force à rester
à sa place dans l’intérieur du corps ; si on ne peut pas faire rentrer la boule par
la douceur, si elle est sortie depuis plus de 24 heures et que le malade vomisse et
souffre beaucoup, il faut voir le médecin, car lui seul peut savoir ce qu’il y a à faire.
En attendant, laisser les pansements froids sur la boule. Nous conseillons beaucoup
à tous ceux qui ont une hernie, de prendre conseil d’un médecin qui leur dira si leur
hernie peut devenir dangereuse.
Depuis quelques années, les médecins réussissent à guérir complètement et pour
toute la vie les mauvaises hernies au moyen d’une opération.
Étouffements (Asphyxie).- Vous savez que pour vivre il faut absolument
respirer ; si l’air ne peut plus arriver jusque dans la poitrine, on se met à étouffer :
l’asphyxie commence et ne tarde pas à faire mourir.
L’asphyxie peut prendre de plusieurs manières :
1° Par l’eau. - Quand on se noie, c’est que l’eau prend la place de l’air ;
2° Par les mauvais gaz que fait le feu. - Aussi, dans une cabine de bord, ou une
chambre petite, il faut bien veiller que le tuyau du poêle emmène dehors les gaz et la
fumée du feu. Si par malheur ces mauvais gaz ne sortent pas facilement par le tuyau,
il en reste dans la chambre : ça engourdit, ça endort, et ça peut tuer les malheureux
qui se laissent aller au sommeil dans ces conditions.
Remarquez bien que ces mauvais gaz sont tout à fait traîtres, car ils n’ont aucune
odeur et aucune couleur.
La fumée fait tousser, mais elle n’est dangereuse que parce qu’elle contient de ces
mauvais gaz dont je vous parle, qui sortent du feu en même temps qu’elle.
3° Les malheureux qui se pendent par le cou, ceux-là encore meurent par asphyxie ; la corde qui les étrangle ferme le canal de la respiration.
4° Ceux qui restent à respirer les mauvais gaz au-dessus des cuves à cidre, dans
les fosses pleines d’ordures, ou tout simplement dans une cabine de bord trop bien
fermée.
Voici comment on soigne tous les asphyxiés :
On cherche à faire rentrer l’air dans la poitrine en faisant certaines manœuvres
qui forcent la poitrine à se gonfler et se dégonfler. Cherchez la page 113, vous trouverez expliqué tout cela dans le chapitre « Soins aux noyés ». Ce n’est pas la peine
de vous répéter ici comment il faut manœuvrer la langue et les bras du malheureux
qu’on soigne, puisque vous trouverez tout cela dans l’instruction de la dite page.
Empoisonnements. - Un homme qui est pris de grandes douleurs dans le
ventre avec vomissements, coliques et diarrhée, douleurs de tête et grande fatigue,
est probablement empoisonné.
Il faut le faire vomir bien vite, mais auparavant il faut lui faire avaler beaucoup,
beaucoup d’eau chaude, pour affaiblir le poison. Il faut aussi le faire suer tant qu’on
pourra et lui donner de grands lavements d’eau tiède si c’est possible. Il y a plusieurs
manières de faire vomir : la meilleure, c’est la poudre d’ipéca (un gramme dans de
l’eau tiède) ; mais il y a aussi d’autres moyens plus simples : avaler du sel et de la
moutarde dans de l’eau tiède ; chatouiller le fond de la bouche avec une plume
d’oiseau, une cuillère ou le doigt. Quelques heures après, on pourra lui donner une
bonne purge ; ça fera très bon effet, surtout si c’est la nourriture qu’on a mangée
qui contenait le poison. La purge la moins chère et très bonne, c’est 40 grammes de
sulfate de magnésie à faire fondre dans un demi-litre d’eau tiède.
Vous savez que la nourriture qui reste plus de deux jours dans un pot ou une cas-
serole peut devenir malsaine, dangereuse, et donner des coliques.
La viande aussi peut empoisonner quelquefois. Mangez toujours la viande très
cuite, lorsqu’elle n’est pas très fraiche. Surtout ne croyez pas que la viande est nécessaire pour fortifier et pour bien nourrir : le pain, le poisson, les légumes secs, les
graisses, le sucre, le beurre et les huiles, tout ça nourrit autant et ne donne pas de
maladies, comme peut faire la viande. Regardez les riches qui mangent beaucoup de
viande ; ils ont dix fois plus de maladies que vous.
Nous ne parlons pas des contrepoisons parce qu’il n’y a que le médecin qui peut
savoir les donner ; et puis, d’ailleurs, on ne sait pas la plupart du temps quel est le
poison qui vous a rendu malade ; car vous savez, il y a des remèdes différents pour
chaque poison : des contrepoisons spéciaux pour chacun des poisons.
Évanouissements. -
Sous le coup d’une grande douleur, d’une forte perte
de sang, d’une vive émotion, un homme peut perdre connaissance et s’évanouir... Il
n’y a qu’une chose à faire : allonger le malheureux à plat par terre et même les pieds
un peu plus hauts que le corps, la tête un peu plus basse. Dégager le cou, la ceinture, jeter de l’eau froide sur la figure. Mais surtout ne pas relever, ni même asseoir
l’homme, avant qu’il ait repris ses sens.
Ivresse mauvaise. - Voilà un pauvre camarade qui a trop bu de tafia ou d’ab-
sinthe, et il paraît très malade. Tâchez de le faire vomir avec un peu d’eau chaude, et
faites-lui boire, si vous en avez, quelques gouttes d’ammoniaque (alcali volatil) que
vous aurez versé dans un verre d’eau. S’il est pris de grandes colères, de mouvements
fous, il faut le maintenir et le désarmer, après avoir ouvert les vêtements et écarté
tout ce qui peut l’étrangler et gêner sa respiration. Faire grande attention à ne pas le
laisser refroidir : les hommes saouls risquent beaucoup d’attraper du mal et même la
mort par refroidissement. Tous les hivers, il y a un bon nombre de buveurs d’alcool
qui attrapent des mauvaises maladies, de poitrine surtout, par suite de leur malheureux goût pour l’eau d’vi.
Insolation, coup de soleil. -
Il arrive quelquefois que le soleil frappe
d’étourdissement un homme qui a la tête nue, ou qui a trop bu d’eau d’vi ; on le voit
alors chanceler comme s’il était ivre, et tomber par terre sans connaissance. Vite, il
faut le porter à l’ombre, l’étendre tout de son long, dégager cou et ceinture, lui tenir
sur la tête des compresses d’eau froide et lui frictionner rudement tout le corps. Ensuite, il faut qu’il reste au repos et au calme pendant quelque temps. Si la fièvre vient
avec beaucoup d’agitation, il faut faire venir un médecin si c’est possible.
Il. - Remèdes contre le mal de dents.
Ah ! le mal terrible lorsque surtout on est forcé de travailler quand même, et sous
le vent et la pluie !!! Retenez ce qui suit pour soigner vos dents.
Avant tout, celui qui souffre des dents violemment doit se rendre compte s’il a un
abcès, on s’il n’en a pas.
1) Si vous ne sentez pas d’abcès, c’est-à-dire si la douleur est générale dans toute la
mâchoire, et sans sensation de battement nulle part, il y a peu de chose à faire, ou,
pour mieux dire, il n’est pas certain que vous arriviez à vous soulager ; pourtant il
faut essayer les moyens suivants : prendre un quart de gramme de sulfate de quinine
matin et soir durant deux jours ; ou encore appuyer, une seconde, sur la gencive
qui est la plus douloureuse, un petit bouchon d’ouate imbibé de teinture d’iode, et
cracher aussitôt. Si on sent quelle est la dent malade, on la soignera de la façon suivante : si elle a un creux, dans ce creux (qu’on aura d’abord bien nettoyé, puis bien
séché avec des petits bouchons d’ouate tournés sur de fines épingles) on introduira
un petit bouchon d’ouate imbibé de créosote dentaire ou bien d’eucalyptol, et cela
plusieurs fois par jour ; n’oubliez pas que la créosote brûle beaucoup la chair et qu’il
ne faut pas s’exposer à en avaler ; son emploi demande des précautions.
2) Si vous sentez des battements aux environs d’une dent c’est le signe certain
qu’un abcès cherche à se faire. Dans ce cas, voici la manière presque assurée de vous
soulager, et de vous guérir ensuite :
L’abcès se forme à la racine de la dent, laquelle racine communique avec l’intérieur
de la dent par un petit canal. Or, c’est parce que ce canal se trouve bouché que vous
éprouvez de la douleur ; il faut arriver, en sondant avec un fil de fer extrêmement
mince l’intérieur de la cavité de la dent, à trouver l’entrée de ce petit canal ; puis,
vous y glissez le fil de fer pour le dégager. Aussitôt que vous aurez senti glisser dans
le canal votre petit fil de fer, vous éprouverez une vive douleur et puis ce sera fini:
plus mal du tout ; le pus de l’abcès s’écoulera par ce canal, et, plus tard, si vous
recommenciez à souffrir vous n’auriez qu’à déboucher de nouveau ce canal que la
nourriture se trouverait avoir fermé. Seulement, pour arriver à guérir tout à fait la
dent, c’est-à-dire l’abcès, il sera bon de faire tenir, si vous le pouvez, dans le creux de
la dent, un tampon d’ouate (gros comme une tête d’épingle) imbibé de créosote, ou
d’eucalyptol et que vous renouvèlerez tous les deux ou trois jours...
Grâce à ces indications très simples, vous avez quelques chances de vous soulager,
ô vous tous qui vous débattez contre ce mal insupportable.
Docteur X***
III. - Secours aux noyés.
Comment il faut soigner ceux qui sont tombés à la mer.
-
N’oubliez jamais qu’il faut travailler, non pas à chercher à faire sortir l’eau, mais
surtout à faire rentrer l’air dans la poitrine, car c’est le manque d’air qui fait périr.
Et ne jamais économiser son temps et sa peine auprès d’un homme qu’on vient de
repêcher, car on a vu des malheureux revenir à la vie après avoir séjourné plusieurs
heures dans la mer et après 4, 5, 6 heures de soins.
Coucher l’homme sur le côté droit en lui mettant sous la tête quelque chose pour
la lui relever un peu. Ouvrir sa bouche et coincer entre ses dents un bout de liège
pour qu’elle reste ouverte, puis le déshabiller vivement de tout, et le frotter rudement
avec de la laine en l’abritant du vent le plus possible. En même temps il faut faire
la manœuvre la plus importante qui est de chercher à faire remettre en marche les
mouvements de la respiration. Pour cela, deux moyens :
1° On lui croche la langue avec les doigts et on hale dessus, en douceur, pour l’allonger hors de la bouche, puis on mollit, et on la laisse revenir en dedans ; et on fait
ça, dix à quinze fois par minute.
2° Au bout d’un quart d’heure de cette manœuvre, on en essaye une autre. La poitrine étant un vrai soufflet, il faut forcer la poitrine du noyé à se gonfler pour qu’elle
attire de l’air en dedans, et l’obliger ensuite à se dégonfler pour qu’elle repousse cet
air qui a servi. Pour cela, on commence par replier les deux bras du noyé et on les
serre un peu contre sa poitrine ; de cette manière, on force la poitrine à se gonfler ;
cela fait appel d’air vers l’intérieur. Puis on relève les bras du malheureux, et on les
allonge le long de sa tête, étendus ; et cela fait alors aplatir et vider la poitrine. Et on
continue ainsi un autre quart d’heure. Après ça, on recommence la manœuvre de
la langue... puis la poitrine... puis la langue... et ainsi toujours, sans se décourager,
pendant plusieurs heures.
Faire chauffer des briques, des couvertures, pour essayer de réchauffer le pauvre
corps. Quelquefois, presser un peu sur le ventre, puis sur la poitrine, pour essayer de
faire sortir de l’eau par la bouche. Frictionner tout le corps avec une brosse, si on en
a. Ne jamais faire rien boire tant que le noyé n’a pas donné signe de vie. Et même
dans ce cas, ce n’est pas de l’eau-de-vie, mais bien quelque boisson très chaude qu’il
faut lui donner.
Surtout, il ne faut pas craindre sa peine. Du moment qu’un corps n’a pas de
traces de vraies blessures, pas de taches vertes sur le ventre, et pas de mauvaise odeur,
mettez-vous vite à l’ouvrage autour de lui, et essayez de le faire revenir à la vie. Si ce
corps n’a pas plus de cinq ou six heures de séjour dans l’eau, personne, même pas
un médecin, ne peut affirmer qu’il est sûrement mort.
IV. - Notions générales sur les maladies.
La santé passe avant tout. Un pêcheur qui tombe malade ou qui devient infirme,
c’est souvent le malheur et la misère pour lui et tous les, siens.
Donc, il faut que le marin, lorsqu’il se porte bien, se méfie davantage des maladies
qui le guettent. Et, lorsqu’il est malade, il faut qu’il se soigne mieux qu’il ne fait
d’habitude. C’est tout de suite qu’il faut faire attention à son mal : aussitôt qu’on
se sent malade.
Soyez tranquilles, ce n’est point de la dépense ni des cérémonies inutiles que nous
vous conseillons : nous voulons vous donner le moyen d’économiser votre vie et
votre argent, en vous aidant à vous défendre, à vous préserver des mille maladies qui
vous menacent. Si vous nous écoutez, vous échapperez à beaucoup de maux, et aussi
vous guérirez plus vite quand vous serez malade.
Le plus grand nombre des maladies sont contagieuses, c’est-à-dire qu’elles sautent
facilement d’un homme sur un autre sans qu’on puisse les voir. Pourquoi et comment? direz-vous.
Ecoutez, c’est très facile à comprendre.
Voici comment elles viennent, les maladies : les maladies sont faites par des microbes ; les microbes, ce sont des espèces de petites anguilles si petites, si petites, qu’il
faut, pour les voir, une sorte de longue-vue faite exprès, qui se nomme microscope.
Cet instrument-là fait voir 600 et 800 fois plus gros. - Quand vous regardez une
goutte d’eau, de lait, de sang, avec le microscope, vous voyez des espèces de petites
anguilles de plusieurs formes et par milliers. C’est ça des microbes.
Tous les microbes ne donnent pas des maladies ; il y en a des bons, il y en a des
mauvais.
Les savants commencent à en connaître beaucoup d’espèces. Chaque espèce fait
un ouvrage différent ; c’est un microbe qui fait fermenter les jus de raisins et de
pommes et qui les change en vin et en cidre ; c’est un microbe qui fait pourrir le
poisson, la viande, le bois ; c’est un microbe qui fait aigrir le vin, le cidre, le lait. Et
ce sont aussi des microbes différents qui font des maladies telles que le choléra, les
mauvaises fièvres, la fièvre typhoïde, la dysenterie, le croup, les maladies de gorge,
de poitrine, des yeux, de la peau, la pourriture des plaies, la vérole, la coqueluche, la
scarlatine, la rougeole, la variole, et tant d’autres encore.
Il n’y a pas à dire que c’est des idées de savants, puisque nous connaissons très
bien ces microbes, et puisque nous les cultivons et les élevons à volonté dans nos
laboratoires de médecine.
Ces tout petits êtres se promènent partout par milliers : sur les poussières de l’air,
dans l’eau, dans le lait, le vin, le bouillon, le sang, les ordures, dans le nez, les oreilles,
la bouche, etc.
Quand un microbe arrive dans un corps qui lui convient, c’est-à-dire dans un
corps qui se trouve moins résistant parce qu’il a subi des fatigues, du grand froid,
de la grande chaleur ; quand un microbe rencontre un organisme qui ne fonctionne
pas bien, parce que l’estomac est brûlé par les boissons fortes, ou bien parce que la
poitrine est affaiblie par le mauvais air des ateliers des villes, allez, ça y est : le microbe
y mouille toutes ses ancres et se met à travailler, c’est-à-dire à pourrir et à désorganiser
l’endroit où il est. En même temps il se met à faire des petits avec une rapidité si
grande, qu’au bout de 24 heures, il y a déjà des milliers de petits microbes qui, eux
aussi, travaillent à détraquer le pauvre corps, et qui se répandent plus loin.
Voilà ce que c’est que les maladies contagieuses.
Tout cela, chers amis, c’est pour vous faire bien comprendre la manière d’échapper
aux maladies et de les soigner. Vous comprenez tout de suite que le grand remède des
maladies, c’est celui qui peut tuer les microbes.
Ce remède, qu’est-ce que c’est ? Il y en a plusieurs : parlons d’abord des drogues.
Ces drogues se nomment antiseptiques. Il y a beaucoup de drogues qui tuent les
microbes, mais elles ont des défauts. Il y a des drogues qui sont des poisons pour
nous aussi ; celles-là tuent les microbes, mais elles peuvent nous faire grand mal, si on
ne prend pas de précautions ; d’autres sont très chères ; d’autres ne tuent pas toutes
les espèces de microbes.
Pour le moment, voici les deux meilleures que nous puissions vous conseiller. Pour
l’intérieur du corps (pour avaler), c’est le sulfate de quinine (à la dose de 1 demi
gramme). Pour l’extérieur du corps, c’est-à-dire pour laver les plaies et la peau d’un
malade, c’est la solution de sublimé (à un quart de gramme par litre d’eau).
Faites bien attention, mes amis, à enfermer toujours la bouteille de sublimé, de
peur qu’un enfant n’y goûte, car c’est un grand poison si on l’avale. N’oubliez pas
non plus que cette drogue ne doit jamais vous servir plusieurs fois ; celle qui a servi
une fois à laver un mal doit être jetée aussitôt après.
Mais, pour tuer les microbes, il y a aussi d’autres remèdes plus simples et souvent
meilleurs. Ceux-là, tout le monde peut s’en payer, surtout si on n’habite pas les
grandes villes.
Ces remèdes, c’est le soleil et c’est l’air pur. Oui, chers amis, les mauvais microbes
n’ont pas de plus grands ennemis que la lumière du soleil et le grand air. Il y a
beaucoup de maladies, par exemple les maladies de poitrine (les tuberculoses), qui
peuvent guérir sans aucun autre remède.
Vous vivez au grand air, vous autres, pour sûr ; mais malheureusement, dans vos
maisons, vous habitez souvent très nombreux.
Le grand air et le soleil n’y entrent pas assez abondamment. Et pourtant, vous
voyez comme c’est important ; n’ayez donc pas peur de laisser toujours portes et
fenêtres ouvertes ; et puis aussi, prenez de grandes précautions de parfaite propreté,
des fréquents nettoyages soigneux au savon et à l’eau chaude, quand vous avez un
malade chez vous.
Donc, pour rester bien portants, et aussi pour guérir plus vite des maladies, soyez
les grands amis du soleil et du vent, dans vos maisons ou dans vos cabines de bord.
Laissez les fenêtres ouvertes, même la nuit ; ne craignez pas les courants d’air pour
les malades ; l’air pur, c’est le meilleur remède pour les malades ; à condition, bien
entendu, que leur corps soit assez couvert pour qu’il ne souffre pas du froid.
Quand vous habitez auprès d’un malade, défiez-vous beaucoup de ses crachats et
de ses ordures ; il faut absolument que crachats et ordures soient brûlés ou enterrés
très profond ; il faut que les linges salis, la literie et les vêtements de malade soient
bouilli, avec de l’eau et des cristaux de soude. Autrement, gare à la contagion pour
les voisins.
Après la mort d’un malade, une précaution bien utile pour les vivants qui habitent
la même chambre, c’est de tuer les microbes répandus par les ordures, les crachats
ou par la respiration du malade : pour cela, il faut laver le plancher, le lit, et tout ce
qui a servi à ce malade, avec du sublimé (poison) ou bien avec de l’eau dans laquelle
on a fait fondre des cristaux de sulfate de cuivre ; il faut lessiver tous les linges, couvertures, vêtements qui lui ont servi, et puis enfin faire brûler dans la chambre deux
kilos de soufre (2), et blanchir les murs à la chaux, si c’est possible.
Défiez-vous beaucoup de l’eau que vous buvez. Ainsi, quand il y a près de chez
vous plusieurs personnes malades d’une grave maladie (comme : typhus, choléra.
mauvaises fièvres, croup, etc.), donnez-vous la peine de faire bouillir, le matin, l’eau
que vous boirez dans la journée.
Une eau qui a bouilli ne contient plus de microbes et on peut la boire en confiance
Une bonne manière de boire de l’eau bouillie, c’est de mettre dedans quelques
feuilles de thé ou une feuille (par litre) d’eucalyptus que vous trouverez gratis dans
les Abris-du-Marin ; ça fait une boisson très saine, agréable, et pas chère.
N’oubliez pas que ça ne sert à rien, absolument à rien, de mettre dans l’eau, soidisant pour la purifier, de l’eau d’vi, de l’absinthe, du vin : rien de tout cela ne tue
2 Pour cette manœuvre-là, il faut mettre le soufre dans un vieux chaudron, placer ce chaudron
sur une pierre plate ou deux briques au milieu de la chambre ; bien fermer fenêtres, cheminées et
ouvertures, puis mettre le feu au soufre et s’en aller en fermant la porte. Au bout de quelques heures,
on peut rentrer pour ouvrir les fenêtres et habiter de nouveau la chambre.
les mauvais microbes, quand ce n’est pas tout a fait pur, sans eau.
Une habitude utile, c’est de se savonner de temps en temps la tête et de porter
les cheveux coupés ras. Brosser ses dents au savon et à l’eau très salée, est aussi une
bonne manière de les conserver et d’éviter les douleurs de dents.
Et vous, jeunes gens, qui prenez plaisir à vous laisser mouiller, tandis que vous avez
près de vous votre ciré qui pourrait vous abriter, ne vous amusez donc pas en mer
à chercher comme cela les rhumatismes ! Mais oui : il y a un tas de jeunes marins
qui ont une mauvaise honte de capeler leur capote cirée aussitôt qu’il pleut : ils
attendent d’être biens mouillés ; alors, ils finissent par se décider. Cela, c’est de l’enfantillage bon pour des mousses de 10 ans, qui ne réfléchissent pas aux rhumatismes
qui font vieillir et souffrir. Ça arrive déjà bien assez souvent qu’on soit forcé de rester
mouillé des journées entières.
Pour finir, écoutez un vrai bon conseil. Quand vous allez trouvez un rebouteur, un
sorcier ou une sorcière, comme on dit dans le Finistère, pour vous faire soigner, réfléchissez donc combien c’est dangereux. Un bras cassé, ça peut être quelquefois soigné
par un rebouteur parce que la bonne nature suffit souvent toute seule à réparer la
cassure ; mais, lorsqu’il s’agit des autres maladies de mille espèces qui tourmentent
le monde, les sorciers sont complètement incapables de savoir guérir. Quand ils
réussissent, c’est que le hasard ou la force de tempérament du malade ont travaillé à
leur place. Savez-vous bien qu’un médecin travaille plus de quinze ans dans les villes
et dépense souvent vingt à vingt-cinq mille francs pour apprendre son métier ? Comment voulez-vous qu’un homme de la campagne, même très fin et très adroit, puisse
savoir tant de choses sans avoir appris.
V. - Conseils aux jeunes mères.
La plus grande partie des maladies qui affligent les femmes (la faiblesse, le mal de
ventre, le mal de reins) seraient faciles à éviter si on prenait plus de soin de la femme
au moment de la naissance des enfants. C’est vrai que c’est un acte naturel qui peut,
dans certains cas, se passer tout seul, mais souvent avec quelques soins on préserve la
femme de bien des misères pour l’avenir. Ainsi, quand l’enfant tarde à venir, ou bien
quand il se présente mal, ou qu’il y a des difficultés, il faut faire venir sans hésiter
une sage-femme, mais une vraie sage-femme, qui a fait vraiment des études. La sagefemme fera le nécessaire et neuf fois sur dix elle préservera la malade d’infirmités très
gênantes, et peut-être de la mort.
Une fois que l’enfant est né, il faut beaucoup de calme et d’air autour de la mère;
il est une très mauvaise coutume : c’est la réunion de nombreuses voisines dans la
chambre ; ça fatigue la mère et ça peut faire venir la fièvre, ce qui est toujours dangereux. Mauvaise habitude de faire le fricot de baptême près de l’accouchée : tout ce
monde la fatigue et puis c’est une occasion de faire boire du cognac à la mère et souvent aussi à l’enfant, soi-disant pour les fortifier ! Aussi, étonnez-vous donc après ça si
la mère reste malade et si l’enfant vomit !!! Une fois l’enfant au monde, la mère doit,
pour bien faire, rester tranquille, couchée ou allongée pendant huit jours. En tout
cas, quatre jours sont indispensables, même pour les plus vigoureuses : commencer
à marcher et à travailler plus tôt. c’est une grosse faute que beaucoup de femmes
paient très cher dans la suite : les sages-femmes ne cessent de le répéter avec raison ?
Nourrissage. - Si la mère reste faible, si elle tousse, et qu’elle ait de la fièvre, il
ne faut pas qu’elle nourrisse : ça serait le malheur de l’enfant et en même temps de la
mère. La mère qui nourrit doit être assez raisonnable pour régler les têtées et ne pas
donner le sein à l’enfant toutes les fois qu’il crie : une têtée toutes les deux heures,
c’est la bonne règle pour voir l’enfant grossir vite, sans diarrhée, et pour ménager
les forces de la femme. Et dans les premiers temps, chaque têtée ne doit pas durer
plus de dix minutes. Jusqu’à six mois, c’est le lait seul qui doit nourrir l’enfant, si
on veut éviter les coliques et les diarrhées affaiblissantes. Une grosse erreur c’est de
croire que les soupes, les bouillies, les pommes de terre données à un bébé de trois
mois peuvent le fortifier : c’est tout le contraire. Un mal qui souvent fait souffrir les
nourrices, ce sont les crevasses ou gerçures des bouts des seins. Pour éviter cela, il est
bon de laver souvent les bouts des seins avec de l’eau bicarbonatée. Quand le mal
«aboutit», il faut tenir sur le bout malade des morceaux de linge très propre mouillés
d’eau bicarbonatée. Quelquefois, la mère est obligée de renoncer à nourrir, quand
ces crevasses se sont envenimées et que le mal est trop enflammé.