2OO5 2OO6 - Théâtre de la Ville
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2OO5 2OO6 - Théâtre de la Ville
2OO5 saison 2OO6 THÉÂTRE D A N S E MUSIQUE MUSIQUES DU MONDE La vraie liberté, c’est pouvoir toute chose sur soi. Montaigne1 DV8, ph. J. Joyce […] Autant que construction, la théâtralité est interrogation du sens 2. Des auteurs vivants : Joël Jouanneau, déjà coté, Fabrice Melquiot et Martin Crimp, le vent en poupe, Johny Brown et Lee Hall, encore inconnus en France, Peter Handke, fort justement célèbre, ici avec une pièce sans parole mise en scène par son ami Mladen Materic. Des auteurs contemporains : Jean Audureau, enfin, Eugène Ionesco, Friedrich Dürrenmatt, encore, avec les reprises pour cause de triomphes de Rhinocéros et de La Visite de la vieille dame. Un seul auteur classique, le plus grand : Shakespeare, mais adapté par Jean-Michel Déprats, pour être chanté sur la musique de Lewis Furey. Des poètes, et non des moindres : Arthur Rimbaud et ses Illuminations-Coloured plates, Federico García Lorca et son magnifique Llanto por Ignacio Sánchez Mejías, mis en musique par Vicente Pradal et en scène par Michel Rostain, enfin à Paris. la vie autrement Saison 2004/2005 : 238 000 spectateurs. Le public c’est le suffrage universel en art. Jules Renard La saison 2005/2006 débute le 16 septembre pour se terminer le 3 juillet. 95 programmes de théâtre, danse, musique et musiques du monde, 39 créations, 450 représentations. Une forte activité, c’est le moins qu’on puisse exiger d’un théâtre public. une politique Une politique suivie, de saison en saison, avec exigence et persévérance. Les principes restent les mêmes, ils ont fait leur preuve. Aux artistes d’apporter les différences, et peut-être la nouveauté. Priorité aux créations, recherche systématique des coproductions, pour permettre aux projets de se réaliser dans de bonnes conditions et d’être bien diffusés tant à Paris qu’en province et à l’étranger. Attention toute particulière aux découvertes, aux confirmations, aux parcours des artistes. Pas de politique sans un nombre important de programmes – y compris par genre – sans diversité, fidélité, continuité… Liberté des artistes, mais également liberté du public, avec les responsabilités qui en découlent. Bons résultats aidant, la Mairie de Paris apporte au Théâtre de la Ville, bon an mal an, les moyens de cette politique. C’est suffisamment rare pour mériter d’être signalé. Je ne me trouve pas où je me cherche et me trouve plus par rencontre que par l’inquisition de mon jugement. Montaigne théâtre – bien vivant La représentation, c’est la rencontre entre le corps et le texte, entre le présent et le passé, entre la durée, presque matérielle, de l’acte théâtral et l’imaginaire, verbal, du poète. Il faut que les mots, pour être poétiques, soient chauds du souffle de l’âme ou humides de son haleine. Joubert (1754/1824) Antonin Artaud, l’unique, le révolutionnaire, sous le regard admiratif et reconnaissant de David Ayala. Des metteurs en scène : une véritable équipe, attachante et attachée au Théâtre de la Ville : Emmanuel Demarcy-Mota, Dan Jemmett, Omar Porras, Michel Raskine, Thierry De Peretti, Michel Didym. Deux nouveaux, Christophe Rauck et Serge Tranvouez. Des comédiens : plus de 100 comédiens pendant la saison 2005/2006. Des troupes : pas moins d’une quinzaine de comédiens pour Katherine Barker et Marcia Hesse aux Abbesses. Des acteurs rares : Romane Bohringer, Denis Lavant, Marief Guittier, David Ayala, Hugues Quester, Serge Maggiani, Alain Libolt, sans lesquels certaines pièces n’étaient pas jouables. danse – en bonnes compagnies 40 programmes, 26 créations, 203 représentations. De saison en saison, c’est un peu l’histoire de la danse qui s’écrit ou se répète. La nouveauté, selon le mot de Stravinski, ne saurait être « que la recherche d’une place fraîche sur l’oreiller ». La place fraîche se réchauffe vite, et la place chaude retrouve sa fraîcheur. Jean Cocteau Des artistes, parmi les plus grands, que le Théâtre de la Ville a fait connaître et qui ont fait sa réputation : Pina Bausch, Anne Teresa De Keersmaeker, Sasha Waltz, Sankai Juku. Toujours en forme, après avoir bousculé la danse dans les années 80, maturité en plus : Angelin Preljocaj, Maguy Marin, Odile Duboc. Deux événements : Alain Platel de retour à la maison avec la création des Vêpres de Monteverdi, Sidi Larbi Cherkaoui et Akram Khan, en duo. Les créations attendues de DV8, Meg Stuart, Marie Chouinard, Wim Vandekeybus. La virtuosité du mouvement à l’honneur avec, pour la première fois à Paris, Garry Stewart et l’Australian Dance Theatre. Vera Mantero et Robyn Orlin ensemble pour un solo. Des reprises pour cause de triomphes : D’avant de Sidi Larbi Cherkaoui et ses amis, La Chambre d’Isabella de Jan Lauwers, Bâche de Koen Augustijnen, Quando l’uomo principale è una donna de Jan Fabre. Des re-créations emblématiques : Sécheresse et pluie de Ea Sola, Graine de cumquat de Sankai Juku, Noces d’Angelin Preljocaj, Docteur Labus de Jean-Claude Gallotta par les jeunes danseurs de l’excellent Ballet de Lorraine. Hors les murs, dans des théâtres amis, pour des lieux plus appropriés à leurs projets actuels : François Verret et Josef Nadj en solitaires, Rachid Ouramdane, Boris Charmatz, Christian Rizzo, Peeping Tom. Deux projets « hors norme » : la rencontre d’Emio Greco avec Hanspeter Kyburz, et celle de Maria-Kiran avec Bach. Les Abbesses, un écrin pour la danse indienne et le flamenco : Alarmel Valli et Madhavi Mudgal, ensemble, Priyadarsini Govind et Mercedes Ruiz, pour la première fois. L’inclassable et passionnant Wayn Traub pour la suite de sa saga entre opéra, cinéma et chanson, avec trois pièces : Maria Dolorès, Jean-Baptiste, un récital-performance de Jean-Baptiste/Wayn Traub avec 30 musiciens. 46 concerts de musique et musiques du monde. musique – l’excellence Une politique d’interprètes – des programmes choisis en toute liberté – des jours et des horaires stimulants, samedis à 17h – des prix imbattables, “passeport musical” à 10 euros la place – une fidélité réciproque. Les cordes sont à l’honneur : le violon avec Gil Shaham, Fabio Biondi, Midori – le violoncelle avec Miklós Perényi, ici chez lui, Truls Mørk, pour la première fois – deux concerts uniques : le Quatuor Takács et l’Ensemble Musikás pour Bartók, Frank Peter Zimmermann et Christian Zacharias pour Mozart – le piano avec Dezsö Ránki, pour son 13e passage – Café Zimmermann, de retour – les amis Californiens du Kronos Quartet et New-Yorkais de Bang on a can all-stars, pour leurs dernières créations – un concert “3 en 1”, qui a révélé tant d’artistes, avec la flûtiste Alexandra Grot, le pianiste Peter Laul et le Quatuor Ebène. Les richesses musicales de l’Inde, de l’Iran, du Pakistan toujours sans limite. Quelques nouvelles destinations : le Liban avec Ghada Shbeir (chant) – la Bosnie avec Ljiljana Buttler (chant) – Zanzibar avec Ikhwani Safaa Musical Club – le Yémen avec les chants et danses de la Tihama – la Libye avec l’Ensemble de Malouf de la Grande Jamahiriya – le Bangladesh avec Farida Parveen (chant) – l’Arménie avec l’Ensemble Shoghaken – le Maroc avec l’Ensemble Ibn Arabi – la Chine avec Liu Fang (pipa). Á signaler tout particulièrement : le duo sitarviolon de Purbayan Chatterjee & Kala Ramnath – le chant khyal de Kaushiki Chakrabarty – le saxophone de Kadri Gopalnath. C’est l’heure pour le guitariste et compositeur Kurt Rosenwinkel (jazz). pas de droits sans obligations Le droit à la culture, c’est purement et simplement la volonté d’y accéder. André Malraux Des prix de place très accessibles. Des formules d’abonnement individuel ou relais très simples et aux multiples avantages. Un journal (4 numéros par saison) et un site internet pour une information juste et de qualité. Choisir un spectacle, assister à une création, se prépare, comme se prépare un voyage. Une équipe compétente, expérimentée, attentive, pour vous conseiller, vous renseigner, vous servir. amitié, fidélité et engagement Des associés à la production et la diffusion, des amis : Le Festival d’Automne à Paris, le Centre Pompidou, le Théâtre de la Cité Internationale, le Théâtre Paris-Villette, le Théâtre de la Bastille. Des partenaires à l’écoute et en soutien : France Inter, France Musiques, France Culture, FIP, RFI et Mondomix. Des acteurs de la vie culturelle : les relais, les enseignants, les abonnés – merci à eux. À Paris, dans une grande salle, sans un engagement préalable du public sur des projets, pas de créations, pas de découvertes, pas de risques artistiques. allumez le feu La poésie est à la vie ce qu’est le feu au bois. Elle en émane et la transforme. Pierre Reverdy Venez, avec les artistes invités, allumer le feu pour l’espace de quelques instants, voir la vie autrement. L’intimité et l’excellente acoustique des Abbesses au service de la flûte de Barthold Kuijken, la guitare de Filomena Moretti, les harpes de Janá Bouskova et Marie-Pierre Langlamet, le clavecin de Céline Frisch, et les cordes du jeune Quatuor Tetzlaff. musiques du monde – une place de choix Une image de marque forte et belle, tant en France qu’à l’étranger – des programmes indispensables à la vie culturelle de Paris. le directeur Gérard Violette Jacques Rigaud, À propos, Grasset. Bernard Dort, La Représentation émancipée, Actes Sud. 1 2 THEATRE AU THEATRE DE LA VILLE RHINOCÉROS reprise Eugène Ionesco Emmanuel Demarcy-Mota ANTOINE ET CLÉOPÂTRE Shakespeare création Lewis Furey L’HEURE OÙ NOUS NE SAVIONS RIEN L’UN DE L’AUTRE création Peter Handke Mladen Materic KATHERINE BARKER Jean Audureau Serge Tranvouez ILLUMINATIONS – COLOURED PLATES Arthur Rimbaud Thierry de Peretti FACE DE CUILLÈRE Lee Hall Michel Didym création création création THEATRE HORS LES MURS AUX ABBESSES WILLIAM BURROUGHS SURPRIS EN POSSESSION DU CHANT DU VIEUX MARIN DE SAMUEL TAYLOR COLERIDGE Johny Brown création Dan Jemmett AU THEATRE PARIS-VILLETTE TOTO LE MÔMO d’après Antonin Artaud David Ayala Jacques Bioulès et Lionel Parlier LA VISITE DE LA VIEILLE DAME Friedrich Dürrenmatt Omar Porras reprise MARCIA HESSE création Fabrice Melquiot Emmanuel Demarcy-Mota MÈRE & FILS, création COMÉDIE NOCTURNE Joël Jouanneau Michel Raskine GETTING ATTENTION Martin Crimp Christophe Rauck création LLANTO POR IGNACIO SÁNCHEZ MEJÍAS Federico García Lorca Vicente Pradal Michel Rostain CINEMA/OPERA/CHANSON AU THEATRE DE LA VILLE WAYN TRAUB Maria Dolorès Jean-Baptiste le spectacle reprise Jean-Baptiste le récital création Rhinocéros reprise d’un triomphe EUGÈNE IONESCO EMMANUEL DEMARCY-MOTA DU 12 AU 26 JANVIER mise en scène Emmanuel Demarcy-Mota assistant à la mise en scène Christophe Lemaire scénographie Yves Collet avec la collaboration de Michel Bruguière lumières Yves Collet avec la collaboration de Sébastien Marrey musique Jefferson Lembeye avec Walter N’Guyen et Arnaud Laurens travail corporel Marion Levy avec Anne Mousselet costumes Corinne Baudelot masques Mirjam Fruttiger accessoires Laurent Marquès-Pastor maquillages Catherine Nicolas collaboration artistique François Regnault conseillère littéraire Marie-Amélie Robilliard avec Hugues Quester, Serge Maggiani, Valérie Dashwood, Charles-Roger Bour, Sandra Faure, Gaëlle Guillou, Céline Carrère, Stéphane Krähenbühl, Jauris Casanova, Philippe Demarle, Cyril Anrep, Pascal Vuillemot, Benjamin Egner, Sarah Karbasnikoff, Olivier Leborgne Créé au Théâtre de la Ville du 20 septembre au 8 octobre 2004. Le calme routinier d’une petite ville se trouve balayé par l’apparition de rhinocéros, animal fantasmagorique, en qui, progressivement, les habitants se métamorphosent. Tous sauf un, naïf alcoolique, double et porte-parole de Ionesco… Lorsque Emmanuel Demarcy-Mota entreprit de monter Rhinocéros, plusieurs s’étonnèrent : qu’est ce qu’un garçon de trente ans pouvait bien trouver à cette fable, rarement jouée, qui raconte un monde disparu. Car après tout, les dangers liés aux totalitarismes dénoncés ici par Ionesco ont fait place à d’autres. Ce sont justement ces “autres” que le trentenaire a su découvrir, et d’abord le formatage presque inévitable imposé par le jeu social. Et comme il possède le don de faire vibrer la machine théâtrale, y compris les comédiens, les spectateurs entrent dans ce labyrinthe infini, et puis y pensent, longtemps. […] Emmanuel Demarcy-Mota connaît bien son Ionesco ; au plus fort de l’angoisse, l’auteur, souvent, rit […] Il rit, ici, dans cette métaphore écrite à la fin des années 50, au cœur de la guerre froide, créée en 1960 par JeanLouis Barrault, et qui décrit un monde que l’idéologie totalitaire – communiste, Ionesco venait de Roumanie, ou fasciste, la guerre était encore toute proche – gangrène comme une inéluctable glaciation […] A.C, Les Échos […] Il est là le talent premier d’Emmanuel Demarcy-Mota. Il sait lire. Il n’a pas peur. C’est un meneur. Un chef. Sa lucidité est magnifique. C’est bien plus que l’intelligence des textes, la maîtrise du plateau. C’est un don qui ruisselle sur la scène en mouvements harmonieux […] Armelle Héliot, Le Figaro […] Prenons Rhinocéros. On y vit d’abord une fable brechtienne, donc politique, qui dénonçait le totalitarisme hitlérien ou stalinien. Il est vrai qu’ici la critique du totalitarisme existe, mais ces hommes et ces femmes qui sous les yeux de Béranger se transforment en rhinocéros, ne sont poussés ni par la terreur ni par le fanatisme, ni même par l’intérêt, mais par la fascination, le vertige de la conformité […] Ce clonage universel, cette mutation généralisée. Chacun se dépouille de soi pour être comme tous. Il y a là une fatalité plus génétique que sociale. Emmanuel Demarcy-Mota, avec une intelligence extrême des ruptures, des séismes, éclaire comme nul ne l’avait fait avant lui, ce renversement cataclysmique où un petit homme effrayé, éperdu, impuissant, se retrouve seul avec lui-même au cœur d’un monde où personne ne le reflète, où tout le désavoue et le repousse, l’enferme dans la prison de la solitude […] Pierre Marcabru, Le Figaro […] L’allégorie d’Ionesco est sans ornements. Elle avance, inexorable. Elle ne dit pas comment et pourquoi au juste chaque habitant de la ville passe personnellement aux rhinocéros, mais c’est d’autant plus fort. La peste brune gagne d’elle-même, elle est contagieuse, et Béranger n’est pas particulièrement armé contre, il n’a pas une volonté spéciale, une intelligence ou une culture spéciales : il est autre, il échappe à la contagion. La mise en scène d’Emmanuel Demarcy-Mota est un chef-d'œuvre. La pièce n’est certes pas simple, et grâce à lui tout est clair, tout va d’un seul trait […]. Il y a une étreinte magique entre la pièce et le spectateur. C’est dû, entre autres choses, à une implacable interprétation de tous les acteurs, dont se détachent les trois grands rôles, Hugues Quester (Jean), Serge Maggiani (Béranger), Valérie Dashwood (Daisy). Michel Cournot, Le Monde Eugène Ionesco Eugène Ionesco naît en 1909 en Roumanie. En 1911, sa famille l’emmène en France, patrie de sa mère. En 1916, son père laisse femme et enfants, repart pour la Roumanie, se remarie. Eugène le rejoint en 1922, apprend le roumain, entre à l’université de Bucarest, découvre les surréalistes, écrit dans des revues, se marie en 1936, revient en France deux ans plus tard. En 1950, il se fait naturaliser français, Nicolas Bataille monte La Cantatrice chauve aux Noctambules (aujourd’hui cinéma). En 1951, Marcel Cuvelier crée La Leçon. En 1952, les deux spectacles sont repris à la Huchette où ils sont toujours donnés dans les mêmes mises en scène. Ionesco écrit beaucoup (Les Chaises, Amédée, Le roi se meurt…), il est l’auteur incontournable, tous le recherchent, de JeanLouis Barrault (qui crée Rhinocéros en 1960) à Roger Planchon, de Jean-Marie Serreau à Jacques Mauclair entre des centaines d’autres. En 1970, il est élu à l’Académie française, et meurt en 1994. Antoine et Cléopâtre THÉÂTRE CHANTÉ création WILLIAM SHAKESPEARE LEWIS FUREY DU 31 JANVIER AU 4 FÉVRIER livret et musique Lewis Furey d’après le texte de William Shakespeare adaptation française Jean-Michel Déprats mise en scène Lewis Furey assistante à la mise en scène Élaine Normandeau décor Anick La Bissonnière costumes Michèle Hamel, Georges Lévesque lumières Alain Lortie direction musicale Stéphane Aubin chorégraphies Claude Godin avec Sylvie Moreau, Jean Maheux, Renaud Paradis, Stéphane Aubin, Roxanne Hegyesy, David Laurin, Violaine Paradis Antoine et Cléopâtre : drame historique de Shakespeare qui, ce n’est plus une surprise, reste depuis près de quatre siècles notre contemporain, c’est-à-dire en phase avec le monde tel qu’il se vit, quelle que soit l’époque. Lewis Furey, librettiste compositeur et metteur en scène, voit dans cette pièce des personnages hors du commun, qui s’aiment et se déchirent : « La toile de fond est la montée de l’impérialisme, de la mondialisation, et d’une forme de despotisme familial s’étendant sur l’ensemble connu du globe. Antoine, Cléopâtre et Octave-César, font et défont le monde. Leurs histoires d’amour et leur jalousie sont envahissantes, ravageuses. Nous sommes au cœur de l’éternel conflit entre l’Occident et l’Orient, au cœur de l’éternelle incompréhension entre monde nouveau et civilisation ancienne. Nous sommes dans la chambre à coucher de Cléopâtre ». Rome est encore une république. Un triumvirat est censé la diriger, composé de Lepide, Antoine, et Octave-César. « Fils adoptif de Jules César, Octave est jeune, d’une ambition sans limites, sans scrupules. Il aime le pouvoir, s’y consacre, c’est sa force. Antoine n’a plus d’attrait pour la politique romaine. Il tourne le dos au succès et s’interroge sur le sens de sa vie. Cléopâtre est une reine et une dirigeante. Diva immensément théâtrale, elle personnifie une culture de la sensualité, de l’indépendance. Elle repousse les frontières, les refuse toutes. » Marc Antoine a quitté son pays pour rester près d’elle à Alexandrie, elle qui incarne la poche de résistance à l’expansionnisme romain. « Leur passion est adulte, “multi-faceted”. Ils connaissent leurs charges, savent que de leurs actes dépend le sort de millions de gens… Savent qu’ils jouent leurs carrières, leur bonheur, leur honneur, leurs vies. Cette histoire entremêle inextricablement amour et guerre, dans une succession de violences, de trahisons. Effectivement le sort du monde se joue dans le lit, et pour un baiser, Antoine s’exprime avec la solennité du tribun s’adressant à son armée : « Ici est mon espace/Les royaumes sont argile/La fange de la terre/Nourrit la bête et l’homme/La noblesse de la vie/est de faire comme nous. » Lewis Furey a fait son éducation avec les grands opéras de Brecht et Kurt Weill, chez Bob Fosse, Leonard Bernstein, Gershwin… Il vient avec sa troupe montréalaise : trois musiciens, deux danseurs, six acteurs-chanteurs (pour travailler avec lui, savoir chanter est indispensable !). Dans un espace intemporel, futuriste peut-être, le spectacle prend les sonorités d’un théâtre musical aux accents d’opéra moderne, joué d’un seul trait, concentré sur une durée de deux heures. « J’ai travaillé le texte de Shakespeare pour en faire sortir les enjeux familiaux, amoureux et passionnels, l’ambition des êtres exceptionnels de se réinventer et de se surpasser, les répercussions tragiques… Sur les extraits, j’ai composé une partition musicale. » Musique née du langage shakespearien, comme une sorte de lecture parallèle et infinie. Ensuite vient la question de la musique shakespearienne en version française, travaillée avec Jean-Michel Déprats jour après jour, dialoguant au piano et à haute voix, cherchant le mot, le juste mot qui se fond dans le rythme et le son. Le livret de Lewis Furey est divisé en séquences, chacune porte un titre : L’Éternité c’était tes lèvres, Le Temps de la paix universelle approche , Plutôt un fossé en Égypte, J’ai rêvé d’un empereur du nom d’Antoine… Et puis le dernier : Immortels désirs. Lewis Furey Né le 7 juin 1946 au Canada, Parisien intermittent depuis les années 80, enfant prodige, à quatre ans et demi, il étudie le violon et à onze ans joue en soliste avec l’Orchestre symphonique de Montréal. À quinze ans, il s’en va à New York, s’inscrit à la Julliard School, section musique. À vingt ans, il est auteurcompositeur-interprète, enregistre plusieurs albums, compose la musique de films, notamment L’Ange et la Femme (1977) Maria Chapdelaine (1980) de Gilles Carle, avec Carole Laure pour qui il compose une comédie musicale, Fantastica, et dont il réalise les vidéo-clips. Au cinéma, il met en scène Night Magic avec Leonard Cohen. Il travaille avec la compagnie chorégraphique La La La Human Steps, compose la musique de Jacky Paradis de Jean-Michel Ribes (Théâtre de la Ville, 1978), met en scène la version de Starmania présentée au Théâtre Mogador, Victoire de la Musique, Molière du meilleur spectacle musical 1994. Jean-Michel Déprats Maître de conférence à l’université de Paris XNanterre, il a traduit Le Baladin du monde occidental de Synge, Tableau d’une exécution de Barker, L’Importance d’être constant d’Oscar Wilde (Molière 1996 de la meilleure adaptation) entre autres, et surtout une trentaine de pièces de Shakespeare, comédies ou drames, dont il sait restituer les rythmes, les sonorités, pour Matthias Langhoff, Bernard Sobel, Georges Lavaudant, Jean-Pierre Vincent… Et beaucoup d’autres. L’heure où nous ne savions rien l’un de l’autre création THÉÂTRE SANS PAROLE PETER HANDKE MLADEN MATERIC DU 22 MARS AU 1er AVRIL mise en scène et scénographie Mladen Materic lumières Bruno Goubert costumes Bojana Nikitovic direction musicale Vladimir Petricevic collaboration artistique Vesna Bajcetic 30 acteurs, danseurs et musiciens Théâtre national de Belgrade/Théâtre Tattoo « La scène est une place ouverte dans une lumière claire », indique Peter Handke en ouverture de L’heure où nous ne savions rien l’un de l’autre. Et là, déambulent, se croisent, sautillent, trébuchent bon nombre d’individus. Plus de cent peut-être : quelques “indéfinissables”, un Papageno à cage d’oiseleur, une future femme d’affaires moderne… Ils s’agitent en silence. Pas un mot n’est prononcé, n’est échangé. Terrain familier pour Mladen Materic, inventeur d’une forme qui, sans devoir rien au mime, ni au théâtre gestuel, ni à la danse, ni au chant, ne passe pas par la parole, qui se fait entendre par la stylisation des comportements, par l’acuité des regards, des sourires, de toutes les expressions sensibles. Depuis Le Jour de fête (1993), jusqu’à Séquence 3 (2005) en passant par Odyssée (1999, présenté aux Abbesses), à plusieurs reprises on a pu remarquer que les personnages robotisés ne sont pas de son goût. Chez lui, nous sommes face à des êtres parfaitement vivants, faibles ou forts, loufoques ou terrifiants, ridicules ou séduisants… Des êtres humains, proches parents de ceux rassemblés par Peter Handke, avec qui Mladen Materic a déjà travaillé sur La Cuisine (2001). Là, de temps en temps fusaient quelques mots. Ici, pas un seul. Mais, minutieusement décrite, une agitation au bord de l’affolement, découpée en plages séparées par des “pauses”, et qui, à partir d’un désordre plutôt joyeux, montent progressivement vers une sorte de folie burlesque, d’exaspération angoissée. Pour Mladen Materic, chaque plage correspondrait à une partie de la journée, et les heures passent, et la lumière change, et personne n’est plus tout à fait le même. « Allant de l’un à l’autre, nous sommes quelque part, entre le rien et le tout, entre comédie et drame, entre la jeunesse avec sa curiosité positive, et la vieillesse avec cette capacité de relativiser les choses, que l’on nomme sagesse. » Il imagine Peter Handke affalé dans un café au bord d’une place bordée d’un côté par une grande surface, de l’autre par un marché aux légumes, et face à un immeuble de briques tristes. « Il m’a parlé de cette place, je l’ai photographiée. Un endroit où passent tous les habitants du quartier. Il m’a dit aussi, quand je lui ai demandé d’où venait son titre, qu’il a écrit ce texte pour sa fille avant qu’elle naisse. Comme la sonde Voyager portant vers d’éventuels extra-terrestres quelques chansons, quelques dessins gravés sur disque, bribes de notre culture, il envoyait son message à cet enfant qui n’était pas là, qui était encore dans un autre monde. » Mladen Materic organise le chaos en suivant au plus près le texte de Handke. Difficile de faire autrement, si l’on ne veut pas que se perde un déroulement dramaturgique aux significations multiples, ruisselant d’ambiguïtés, de contradictions, et apparemment désinvolte : une sorte de jeu de piste. Avec la troupe du Théâtre national de Belgrade, il a cherché, chacun essayant de trouver son propre rythme et la manière de le fondre dans l’ensemble. Ils vont, viennent, passent, disposant de quelques secondes pour imposer une situation, un sentiment, un état, avant de passer à tout autre chose. Par de brusques arrêts, une tension des gestes, un moment de bascule, une hésitation anxieuse, une galopade inattendue, se racontent les incertitudes d’une société mal dans sa peau et rageusement accrochée à la vie. « Quelqu’un a dit : “le monde est irréparable”. Si on pouvait l’améliorer, depuis tout ce temps, ce serait fait. Mais c’est pourquoi on continue. » Peter Handke Il naît en 1942, en Autriche. En 1966, sa pièce Outrage au public provoque un scandale. En 1991, il s’installe en France où son théâtre est régulièrement mis en scène : Le pupille veut être tuteur créé par Philippe Adrien, La Chevauchée sur le lac de Constance, Les gens déraisonnables sont en voie de disparition, Par les villages par Claude Régy. En 1992, Luc Bondy monte à la Schaubühne de Berlin L’heure où nous ne savions rien l’un de l’autre, spectacle présenté au Châtelet. Pour le cinéma, il tourne La Femme gauchère en collaboration avec Wim Wenders, et co-écrit le scénario des Ailes du désir. Mladen Materic Dans les années 80, il fonde le Théâtre Tattoo, et en 1984 la Scène ouverte Obala qui acquiert rapidement une grande importance en Yougoslavie. Dès 1986, le Théâtre Tattoo tourne en Espagne, en Italie, en Autriche, en Allemagne. Au Festival d’Edimbourg, il reçoit le Fringe First Award, et rencontre le directeur du Théâtre Garonne à Toulouse, qui l’invite en résidence. Il monte en 1993 Le Jour de fête, donné également à Paris au Théâtre de la Bastille (Festival d’Automne). En 1995, Le ciel est loin la terre aussi. En 1997, Le Petit Spectacle d’hiver, en 1999, l’Odyssée donnée aux Abbesses. 2001 marque sa première collaboration avec Peter Handke : La Cuisine. L’heure où nous ne savions rien l’un de l’autre, est sa première mise en scène à Belgrade depuis son installation à Toulouse en 1992. Entre-temps, il a monté Séquence 3 donné à Paris, au Centre Pompidou. photos Roger-Viollet 2 3 photos D. Lewis, Enguerand, J. Robert 1 les auteurs 1. Arthur Rimbaud 2. Antonin Artaud 3. Federico García Lorca 4. Fabrice Melquiot 5. Johny Brown 4 6. Martin Crimp 7. Peter Handke 8. Joël Jouanneau 9. Jean Audureau 5 7 6 9 photos J.J. Kraemer, D. Boeno 8 William Burroughs surpris en possession du Chant du vieux marin de Samuel Taylor Coleridge JOHNY BROWN DAN JEMMETT création 21 SEPTEMBRE AU 8 OCTOBRE texte d’après William Burroughs Caught in Possession of the Rime of the Ancient Mariner de Johny Brown traduction Marie Paule Ramo mise en scène Dan Jemmett assisté de Céline Gaudier scénographie Denis Tisseraud assisté de Jeanne-Lucie Schmutz lumières Arnaud Jung vidéo Bruno Deville costumes Sylvie Martin-Hyszka avec Carine Barbey, Denis Lavant, Pascal Oyong-Oly… (distribution en cours) De Shakespeare à Middleton, de Shake, version très personnelle de La Nuit des rois, à Dog Face d’après The Changeling et Femmes gare aux femmes, Dan Jemmett ne nous a certes pas habitués à un théâtre tranquillement rationnel. Si aujourd’hui, il décide de s’éloigner des auteurs élisabéthains et de leurs extravagances, c’est pour explorer d’autres formes d’origine plus récente, et toujours franchement allumées. Il s’agit là d’une étrange rencontre imaginée par Johny Brown, DJ, musicien, rocker : celle de Samuel Coleridge et de William Burroughs. Le premier se trouve attaché au mât d’un navire sur lequel le second voyage (dans tous les sens du terme) avec quelques amis pas vraiment nets : le peintre Jean-Michel Basquiat, le guitariste punk Johnny Thunders, la féministe Kathy Acker. Sont également de la partie : la Mort, et la Vie dans la Mort. D’où le titre de la pièce : William Burroughs surpris en possession du Chant du vieux marin de Samuel Taylor Coleridge. Dans la vision de Johny Brown, bien des choses rapprochent les deux poètes, et d’abord un goût affirmé pour les paradis et les enfers artificiels. Burroughs ne s’en est jamais caché, au contraire. Il en a fait le thème de son œuvre. Coleridge vivait en un autre temps, moins “libéré”. Or, explique Dan Jemmett, il était un adepte de l’opium, qu’il consommait sous forme de laudanum : « Un médicament alors recommandé pour calmer les douleurs. Les tranquillisants d’aujourd’hui étaient inconnus. Mais enfin, il est l’un des premiers à avoir osé en parler. Pour cette raison, il a traîné une perpétuelle culpabilité et son existence a été une torture. « Tout part d’un poème de Coleridge, Le Chant du vieux marin, dans lequel il est question d’un navire suivi tout au long de sa route par un albatros. Un jour, sans aucune raison, le vieux marin tire et l’abat. À partir de là, ses compagnons meurent l’un après l’autre. De plus en plus seul, et jusqu’à la plus extrême solitude, il poursuit son chemin. Quant à Burroughs qui par ailleurs se disait guidé par Coleridge quand tout allait mal, il a tué sa femme un jour dans un bar, en voulant jouer à Guillaume Tell. Il lui a mis un verre sur la tête, a tiré, a raté le verre. Il a écrit : “Je me vois affreusement contraint de conclure que je ne serais jamais devenu écrivain si ce n’était pour la mort de Joan…” Lui non plus ne s’est jamais pardonné. « Je suis tombé sur cette pièce, à un moment où je cherchais à oublier mon obsession de la littérature élisabéthaine. J’ai éprouvé un choc profond. « J’avoue me sentir généralement en grande difficulté devant le théâtre contemporain. Seulement, je connais Johny Brown, nous avons travaillé ensemble à plusieurs reprises. J’ai été immédiatement emballé par la manière dont il a organisé le dialogue des deux langages, celui de Coleridge, celui de Burroughs. » On peut faire confiance à Dan Jemmett, entraîné par Denis Lavant (Burroughs), pour à son tour “organiser” le choc des deux univers flamboyants : « J’ai le sentiment qu’avec son côté déjanté et son impeccable précision, il va apporter au personnage de l’authenticité, une innocence, une forme de tendresse. » Johny Brown Né en 1961 à Newcastle, il vit à Londres, participe au groupe rock The Band of Holy Joly, avec lequel il a enregistré plusieurs albums pendant les années 80-90, et tourné principalement en Europe, en Russie, aux États-Unis. Il est également programmateur et présentateur de radio, auteur dramatique pour le groupe itinérant Underground Utopia, qui en 2002 crée à Glasgow, William Burroughs caught in possession of the Rime of the Ancient Mariner. À plusieurs reprises il a collaboré avec Dan Jemmett, notamment sur Quartet de Heiner Müller. William Burroughs Né en février 1914 dans le Missouri, il grandit à Chicago, puis s’en va à New York où il rencontre Allen Ginsberg, Jack Kerouac. La beat generation est là, pour qui contestation et drogue ne font qu’un. Ce qui amène Burroughs à voyager, surtout en Amérique latine, et à Tanger où il écrit Le Festin nu, son œuvre maîtresse. Toujours “accro”, il meurt à 83 ans d’une crise cardiaque. Dan Jemmett Né en 1967 à Londres. Son père, marionnettiste, a tenu une grande place dans sa vie, y compris professionnelle. Après avoir suivi son exemple et essayé les marionnettes, avec la troupe Primitive Science dont il est cofondateur, il joue Brecht entre autres, et fait connaître Heiner Müller. À Londres, au Young Vic, il met en scène un Ubu de Jarry, repris en 2000 en version française à Paris. En 2002, aux Abbesses, Shake d’après Shakespeare et La Nuit des rois, (prix de la révélation du Syndicat national de la Critique) font découvrir son talent pour plonger sans bouée dans les plus folles extravagances élisabéthaines. Talent confirmé, toujours aux Abbesses, avec deux adpatations de Middleton : en 2003 Dog Face, en 2004 Femmes gare aux femmes. La Visite de la vieille dame reprise d’un triomphe FRIEDRICH DÜRRENMATT OMAR PORRAS DU 18 AU 30 OCTOBRE traduction Jean-Pierre Porret mise en scène Omar Porras assistants à la mise en scène Domenico Carli, Joan Mompart scénographie Fredy Porras, Omar Porras décors Fredy Porras masques Fredy Porras, Isabelle Matter costumes Maria Gálvez, Omar Porras lumières Mathias Roche musique et univers sonore José-Luis Asaresi, Andrés García, Ludovic Guglielmazzi, Omar Porras avec Claude Barichasse, Jean-Marc Bassoli, Séverine Blanc, Francisco Cabello, Camille Figuéréo, Stéphanie Gagneux, Philippe Gouin, Fabiana Medina, Alexandre Vigouroux, Omar Porras, Hélène Seretti Présenté aux Abbesses du 27 avril au 15 mai 2004. Ma sorcière bien aimée, Tel un messie maléfique, La Parade des âmes en peine, Petit meurtre entre amis… Quelques titres, parmi ceux des nombreux articles qui ont accompagné la Vieille Dame en sa visite, depuis la venue du spectacle d’Omar Porras la saison dernière aux Abbesses. Cette dame qui, immensément riche et maintes fois veuve, retrouve le village où elle fut jeune et pauvre, d’où, séduite et abandonnée, elle fut chassée, que par vengeance, elle a ruiné. Mais sa vengeance, elle ne l’a pas totalement savourée. À ses anciens bourreaux, elle va proposer un terrible marché… Depuis sa création, la pièce a été montée partout, dans toute la France et au-delà, la version Omar Porras a stupéfié, enthousiasmé, a fait surgir bien des réflexions, bien des émotions, et l’envie de les partager. […] Féroce et sublime histoire d’amour que cette Visite de la vieille dame, du Suisse Friedrich Dürrenmatt (1921-1990) créée en 1956, et interprétée depuis par les plus grandes actrices. C’est pourtant en travesti, avec masques et bergamasques, que l’incarne lui-même, sur le mode grotesque, le metteur en scène colombien Omar Porras. Et par on ne sait quelle “farcesque” alchimie, la fable tout entière, montée en très morbide commedia dell’arte, nourrie en permanence d’un luxuriant baroque latino-américain, n’en est que plus terrible, retrouve les accents de la tragédie antique […] Fabienne Pascaud, Télérama Une grande fête des morts. Une mascarade grinçante dans les éclats de cuivres. Il fallait l’intelligence et l’audace d’Omar Porras pour entendre sous la surface polie de la comédie de mœurs, la sarcastique férocité, la couleur criarde, l’outrance […] Armelle Héliot, Le Figaro […] L’outrance est probablement le seul langage raisonnable pour rendre compte d’une histoire aussi effroyable : le consentement de toute une communauté humaine à la mise à mort d’un villageois, dans le seul but de récupérer une fortune. Dürrenmatt dénonce la cupidité des hommes, et surtout ce mal contemporain qui tend à fondre la responsabilité individuelle dans l’immunité collective […] Frédérique Meichler, L’Alsace […] Omar Porras, servi par des comédiens parfaits, invente pour cette sarabande grotesque de l’irresponsabilité et de la culpabilité, de la trahison et de la vengeance, de la compromission avec l’ordre matériel des choses et de l’absence d’idéal, des images splendides […] Il met en scène en grand illusionniste l’illusion fatale d’une époque – la nôtre – qui sème la mort au nom de la justice et du progrès. Et la frappe est d’autant plus forte qu’elle porte les masques du théâtre. Fabienne Darge, Le Monde […] Ces masques qui collent au visage, appuyés par des costumes qui surlignent les traits de caractère, ouvrent grandes les portes à une pantomime à l’ironie grinçante de pantins désarticulés par un tragique d’où le divin a été irrémédiablement chassé par le tout pouvoir de l’argent […] Vincent Pion, Le Quotidien de la Réunion […] Jadis on a pu voir dans La Visite de la vieille dame les prémices de la société de consommation contaminant l’Europe qui relevait ses ruines. Porras, lui, en revient purement et simplement à la mère, « La femme, dit-il, sans laquelle nous ne sommes rien ». C’est vrai, après tout, surtout pour lui car, de son propre aveu, sa mère dut, elle aussi, en semblables circonstances quitter son village natal. Une telle implication affective est rare. […] Il y a là, au fond, une gravité qui excède le seul enjeu du théâtre, une revanche par le fils interposé. Jean-Pierre Léonardini, L’Humanité Omar Porras C’est à Bogota, que fasciné par le cérémonial baroque des messes colombiennes, il choisit le théâtre et fait son apprentissage de comédien. Dans les années 80, il tente l’aventure parisienne, gagne sa vie avec des spectacles de marionnettes dans le métro. Puis il se fixe à Genève où il fonde le Teatro Malandro, avec lequel il monte en 1993 la première version de La Visite de la vieille dame, de Dürrenmatt, qui le fait connaître en France. Suivent Noces de sang de García Lorca présenté en 1999 aux Abbesses, de même que l’année suivante les Bakkantes, et en 2004, la seconde version de La Visite de la vieille dame et L’Histoire du soldat. Au Théâtre de la Ville, il a présenté Ay ! Quixote en 2002, et El Don Juan en 2005. Marcia Hesse création FABRICE MELQUIOT EMMANUEL DEMARCY-MOTA DU 9 AU 26 NOVEMBRE mise en scène Emmanuel Demarcy-Mota assistant à la mise en scène Christophe Lemaire collaboration artistique François Regnault scénographie Yves Collet avec la collaboration de Michel Bruguière création sonore Jefferson Lembeye costumes Corinne Baudelot maquillages Catherine Nicolas environnement image Alain Paul Mallard avec Alain Libolt, Philippe Demarle, Benjamin Egner, Louis Arene, Marie Armelle Deguy… (distribution en cours) La quatrième pièce de Fabrice Melquiot que monte Emmanuel Demarcy-Mota (après Le Diable en partage, L’Inattendu et Ma vie de chandelle présenté en 2004 aux Abbesses) porte un nom de femme : Marcia Hesse. Et cette femme encore toute jeune est morte. Son fantôme parcourt la villa au bord de la mer où, pour célébrer à la fois ce qui aurait dû être son anniversaire et les fêtes de fin d’année, se réunit sa famille. Une famille d’aujourd’hui, au sens large du terme. Plutôt une tribu, composée des parents proches et collatéraux, plus quelques amis. Treize en tout. Histoire de conjurer le sort, à table il y aura son chapeau à elle, Marcia. L’histoire du théâtre est faite d’histoires de familles, et celle-ci ne faillit pas à la tradition. Elle arrive dispersée, et dans le temps compté de ce rituel factice, essaie à toute force de se sentir unie. Et puis bien entendu, elle se déchire à belles dents, mais sans haine, avec une réjouissante vitalité. Comme souvent chez Fabrice Melquiot, la famille se trouve en butte à la violence extérieure : la guerre dans Le Diable en partage ; la mainmise des regards virtuels sur la vie privée dans Ma vie de chandelle ; ici, une tempête qui isole la villa du monde. Le genre de huis clos qu’aime le théâtre, mais bousculé par l’intrusion du fantastique, par l’invisible présence de Marcia. Elle est là dans leurs pensées à tous, ils ne peuvent s’en détacher. Alors, il ne s’agit plus d’un souvenir supplémentaire des Atrides ou de La Noce chez les petits-bourgeois, chef-d’œuvre burlesque de Brecht tant imité, mais d’une écriture qui, dans sa construction même, définit le caractère singulier de la famille, et de chacun de ses membres. Les répliques sont brèves, comme si tous se connaissaient suffisamment pour ne pas avoir besoin de préciser les arrière-plans. Chacun sait de quoi l’autre parle. Ce qui ne les empêche pas de glisser sur la pente de ces mensonges dont personne n’est vraiment dupe. Et c’est l’un des points qui touchent Emmanuel Demarcy-Mota (voir sa mise en scène des Six Personnages en quête d’auteur de Pirandello en 2001). « C’est dans le mensonge, dans la reconstruction des vérités particulières que le théâtre devient intéressant. Pendant toute la représentation, cette famille, lourde de ses secrets, de ses non-dits, tente de se reconnaître, de trouver son identité pour parvenir à “faire son deuil”. Mais est-ce possible, en groupe ? Estce que le deuil peut être partagé ? « Tous s’agitent autour de la table, se comportant le plus banalement du monde. Mais le fantastique, le fantasme s’insinue. Dès le début, ils se préparent à déguster des coquillages, qui deviennent des “êtres entre la vie et la mort”, à dévorer. Et la femme qui est là, que personne ne peut, ne veut voir, et qui les hante, c’est la Mort. « “La Mort n’a pas de phrase”, ils ne peuvent pas en parler, ne peuvent pas dire l’essentiel. Ils tournent autour du pot, ils se tiennent là, comme autour d’un grand trou. Comme lorsqu’on creuse un puits. On creuse la terre, on guette, on regarde l’eau monter, on reste là, attentifs, pour tout de suite construire la paroi de briques, ce doit être immédiat, sinon l’eau s’échappe. Et comme ça, en attendant, on parle de tout et de rien. « Ils sont là, réunis pour un souper en souvenir de Marcia, et vont s’en aller. Ils n’en ont pas envie, n’en ont pas vraiment la force, ne peuvent pas faire autrement, c’est elle qui les oblige. Elle l’a écrit avant de mourir, et la mère va transmettre son vœu, ses ordres. » Ils s’en vont dans la tempête. Ce n’est pas une fin, c’est un commencement peut-être. L’adieu au deuil. Fabrice Melquiot C’est à la Compagnie des Millefontaines qu’Emmanuel Demarcy-Mota rencontre Fabrice Melquiot, alors comédien. Il a vingtdeux ans (il est né en 1972) et déjà il écrit, en direction des jeunes publics : Les Petites Mélancoliques, Les Jardins de Beamon. Peu à peu, l’écriture occupe tout son temps. Il retrouve Emmanuel Demarcy-Mota qui monte Le Diable en partage (prix du Nouveau Talent de la SACD, prix Jean-Jacques Gautier du Figaro, révélation de l’année pour le Syndicat de la Critique) et L’Inattendu au Théâtre de la Bastille puis à la Comédie de Reims dont il vient d’être nommé directeur, où il fait venir Fabrice Melquiot comme auteur associé, où il crée Marcia Hesse. Il n’est pas le seul à s’intéresser à cette écriture, traduite en allemand, en espagnol, en italien. En 2003, pour la première fois la Comédie-Française présente un spectacle pour jeunes publics, et c’est Bouli Miro de Fabrice Melquiot. Emmanuel Demarcy-Mota En 1989, naît au lycée Rodin, par la volonté d’Emmanuel Demarcy-Mota, fils de metteur en scène et de comédienne, la Compagnie Millefontaines. Après avoir affronté Ionesco, Pirandello, Wedekind, elle poursuit avec Léonce et Lena de Büchner au TCA d’Aubervilliers. En 1997, en résidence au Forum culturel du Blanc-Mesnil, elle crée Peine d’amour perdue de Shakespeare dans une traduction de François Regnault avec qui travaille alors Emmanuel Demarcy-Mota, notamment sur Six Personnages en quête d’auteur, créé en 2001 au Théâtre de la Ville. En 2002, nommé à la Comédie de Reims, il y fait venir, en tant qu’auteur associé, Fabrice Melquiot dont il monte Le Diable en partage et L’Inattendu, Ma vie de chandelle (présenté aux Abbesses) et trois monologues. En 2004, il retrouve Ionesco, Rhinocéros, et le Théâtre de la Ville. photos Enguerand, E. Manuel, X. DR 1 2 photos J.-P. Lozouet, M. Del Curto 3 4 5 photos Enguerand les metteurs en scène 1. Emmanuel Demarcy-Mota 2. Michel Rostain 3. Mladen Materic 4. Omar Porras 5. Christophe Rauck 6. Michel Raskine 7. Serge Tranvouez 8. Dan Jemmett 9. Michel Didym 10.Lewis Furey 11.Thierry de Peretti 7 photos J.-P. Lozouet, Enguerand, H. Rosentalski 6 8 9 Mère & Fils, comédie nocturne création JOËL JOUANNEAU MICHEL RASKINE DU 30 NOVEMBRE AU 17 DÉCEMBRE de Joël Jouanneau mise en scène Michel Raskine décor Stéphanie Mathieu costumes Josy Lopez lumières Julien Louisgrand avec Marief Guittier, David Mambouch, Michel Raskine, Christian Ruché Mère & Fils, comédie nocturne, commande de Michel Raskine, metteur en scène, à Joël Jouanneau, également metteur en scène, mais en l’occurrence uniquement auteur. Leur seconde expérience commune, après Kiki l’Indien, comédie alpine en 1989. Entretemps, en 1998, Olivier Py avait répondu au défi avec Théâtres – d’ailleurs présenté aux Abbesses en 2000. Pourquoi une commande, alors que les textes inédits ne manquent pas, et qu’elle oblige à s’engager avant de savoir si le résultat va correspondre à l’attente ? D’abord Michel Raskine s’engage sur des auteurs avec lesquels il peut s’entendre. Ensuite, il obéit à une sorte de pulsion, de besoin à un moment donné d’aller vers l’inconnu. Un inconnu balisé, certes, mais qui sait ? « Évidemment, ce risque existe toujours. Seulement comme je n’ai ni de goût ni de capacité pour l’écriture, j’évite au moins la tentation de me faire écrivain par procuration. Je m’adresse à des gens qui connaissent mon travail et je leur demande : “Est-ce que ça t’intéresserait d’écrire pour moi ? Et pour tels acteurs ?” Car ils sont, je m’en rends compte, au cœur de chacun de mes projets, quel qu’il soit. » Naturellement, en premier lieu, Michel Raskine pense à Marief Guittier : elle est exceptionnelle. Et puis ils travaillent ensemble depuis toujours, depuis le temps – les années 80 ! – où ils appartenaient à la Salamandre de Gildas Bourdet, Centre dramatique du Nord : « Le cas de Marief est particulier. Notre relation de travail ne cesse de me surprendre, à tous points de vue. Jamais je n’aurais imaginé assumer une telle continuité professionnelle. Qu’au jour d’aujourd’hui nous ne ressentions aucune lassitude est tout de même étonnant. Peut-être parce que de Jean-Paul Sartre à Nathalie Sarraute en passant par Manfred Karge ou Dea Loher, Marguerite Duras ou Robert Pinget, ensemble nous avons exploré des auteurs vraiment différents ! Et puis il lui arrive de travailler avec d’autres, et justement Joël Jouanneau pour qui elle a joué J’étais dans ma maison… de Jean-Luc Lagarce, au dernier Festival de Bussang. « De mon côté, j’ai toujours envie de connaître de nouveaux acteurs, l’une des raisons pour lesquelles j’aime bien travailler à l’ENSATT (École nationale supérieure des arts et techniques du théâtre). C’est formidablement revigorant. Donc, comme dernier exercice de la dernière promotion, j’ai monté Atteintes à sa vie de Martin Crimp. J’ai remarqué un élève, David Mambouch, à ce moment charnière entre école et “vraie vie”. Il doit avoir dans les vingt-deux ans, garde un aspect extrêmement juvénile, et en même temps témoigne d’une réelle maturité. M’est apparu que le théâtre permet de façon flagrante la rencontre entre deux générations, entre mère et fils, leur jonction, leur affrontement, quelque chose d’inévitable, de fatal. « Alors quoi ? Hamlet ? C’est trop tôt, et je n’ai pas voulu examiner la liste des pièces traitant de ce thème. Donc, j’ai pensé à Joël Jouanneau. Dans l’idée peut-être de prolonger et renouveler notre épatante expérience commune sur Kiki l’Indien qui parlait entre autres, d’une femme et de son gosse. Nous nous sommes demandés : qu’auraient-ils pu devenir ? Non pas qu’ils reprennent le fil de leurs aventures passées. Pas du tout. Ils ont été longtemps séparés, se retrouvent, et plus tard arrive le père. « Entre eux, il y a un secret. Qui dit retrouvailles dit règlement de comptes. Le temps d’une nuit, on joue du piano, de l’accordéon, on se fait la guerre, on tue quelque chose, le passé, le présent… Et puis la nuit s’achève et c’est le point du jour. Que va-t-il se passer ? » Joël Jouanneau Journaliste, prisonnier à Beyrouth, gardé par un enfant, de retour en France, il écrit Nuit d’orage sur Gaza, et se dirige particulièrement vers le théâtre pour jeunes publics : Kiki l’Indien (1989), Mamie Ouate en Papouasie (1990). En 1981, il découvre David Warrilow au TGP de St-Denis dans Le Dépeupleur de Beckett, monte avec lui En attendant Godot, La Dernière bande (1992) et aussi L’Hypothèse (1987) L’Inquisitoire (1992) de Pinget, Les Enfants Tanner d’après Walser, entre beaucoup d’autres. Nommé en 1989 artiste associé au Théâtre de Sartrouville, puis en 1999 codirecteur de Heyoka Jeunesse, et en 2001 du théâtre devenu centre dramatique national, il y reste jusqu’en 2003, continue d’écrire, de mettre en scène. Dernièrement : Elfriede Jelinek, Les Amantes au Théâtre Ouvert ; JeanLuc Lagarce, Juste la fin du monde, J’étais dans la maison… à Bussang et à la Cité Internationale ; Lars Noren, Embrasser les ombres au Vieux-Colombier. Michel Raskine De 1973 à 1978, il commence sa carrière avec Roger Planchon en tant qu’acteur, avant de rejoindre Gildas Bourdet au Centre dramatique du Nord. Il joue notamment dans Une station service (1985), Les Crachats de la lune (1987), spectacles invités au Théâtre de la Ville en 1985 et 1987. Il se lance dans la mise en scène, avec Marief Guittier dans Max Gericke ou pareille au même de Manfred Karge : en 1984, 1995 et 2003, continue en 1991 avec Huis clos de Sartre, L’Épidémie et Un rat qui passe * d’Agota Kristof en 1993. En 1995, nommé au Théâtre du Point du Jour à Lyon, il monte L’Amante anglaise de Duras, (1996) Chambres d’amour * d’Adamov (1997), et est considéré comme « le plus allemand des metteurs en scène français », Au but de Thomas Bernhard (2000), Théâtres* d’Olivier Py, Barbe Bleue, espoir des femmes (2001), Les Relations de Claire * (2003) de Dea Loher. À l’ENSATT à Lyon, il a dirigé La Maison d’os de Dubillard (1998), Atteintes à sa vie de Martin Crimp (2003). * présenté au Théâtre de la Ville. Getting attention création MARTIN CRIMP CHRISTOPHE RAUCK DU 10 AU 28 JANVIER traduction en cours mise en scène Christophe Rauck scénographie et costumes Aurélie Thomas lumières Olivier Oudiou vidéo Thomas Rathier création musicale Nehil Bordures collaboration chorégraphique Caroline Marcadet avec Philippe Bérodot, Clotilde Hesme, Annie Mercier, Jean-Philippe Meyer, Thomas Rathier, Philippe Smith… (distribution en cours) L’histoire se passe dans un immeuble de la banlieue londonienne, l’un de ces endroits où vivote une population un peu prolétaire, un peu petite-bourgeoise, et surtout paumée. On pourrait croire à une “tranche-de-vie”, dans la mouvance du théâtre ou du cinéma social britannique. Si ce n‘est que l’auteur en est Martin Crimp, virtuose en l’art de brouiller les pistes. Preuve immédiate, le titre : Getting attention. Quelque chose comme “attirer l’attention”, alors que le problème est celui d’une petite fille invisible dont l’agonie passe inaperçue. Sa mère est trop occupée à tenter de séduire pour se sentir vivre, la voisine à en surveiller les faits et gestes, le voisin à chercher du travail… Des gens enfermés, aveuglés, dont l’histoire se construit autour d’une absence. Mais deux personnages masqués viennent rapidement interdire toute tentation naturaliste. Pourquoi ces masques, forcément effrayants ? Se posant la question, la posant à Martin Crimp, le metteur en scène Christophe Rauck y trouve une référence aux traits simiesques, aux visages grimaçants des guignols et polichinelles de nos jeunes âges. « J’adore les marionnettes, y compris dans ce qu’elles ont de monstrueux. Le monde fabrique des horreurs avec lesquelles s’amusent les enfants, cela fait partie de notre quotidien. Au-delà de leur banalité, les personnages qui ici se débattent apparaissent comme des monstres, indifférents au cauchemar d’une gosse, vivant à côté d’elle sans la voir. Ne la voyant pas non plus, le public participe de cet aveuglement, et normalement se pose des questions. « Martin Crimp, quand je l’ai rencontré, m’a parlé d’un couple âgé, des voisins de ses beaux-parents. Il était fasciné en voyant le mari utiliser, pour faire sécher le linge, des pinces avec des harmonies de couleurs très étudiées : le grand raffinement. Et puis ils ont déménagé, alors seulement on s’est rendu compte que cet homme brutalisait sa femme, et qu’à plusieurs reprises, elle avait dû être emmenée d’urgence à l’hôpital. « Le sujet de la pièce pourrait fournir un fait divers au Journal de 20h. Mais au lieu d’être traité en deux minutes, il laisserait le temps d’entrer au cœur des choses comme le font aujourd’hui les documentaires qui ne craignent pas de prendre position, multiplient les points de vue. Ici aussi les points de vue diffèrent et s’affrontent. Les scènes s’entrechoquent, se râpent, se frottent l’une à l’autre. Les personnages abordent brutalement les situations. Ils sont ce qu’ils disent au moment où ils le disent : Martin Crimp tient beaucoup à cette façon d’être, directe jusqu’à la férocité. « Il ouvre des portes, pose les problèmes et se refuse à avancer une quelconque solution. Il ne veut rien imposer, et nous devons le suivre dans cette attitude. Nous sommes aidés en cela par la brièveté de la pièce : une heure trente. Elle ne nous laisse le temps d’insister sur rien. Nous sommes obligés à la rapidité, à la précision, à la force de l’essentiel, sans pour autant sacrifier à la provocation facile. Derrière la rudesse des comportements, il y a des inquiétudes, des doutes, des angoisses, des désirs, une réelle complexité, une vraie humanité. « À la première lecture, je me suis souvenu d’une phrase qu’Ariane Mnouchkine m’a rapportée à propos de son spectacle sur les immigrés, Le Dernier Caravansérail ; quelqu’un lui a dit : “Nous le savions, maintenant nous le ressentons”. Interroger l’actualité en y impliquant émotionnellement le public, c’est l’une des fonctions du théâtre. » Martin Crimp Né le 14 février 1956, il suit ses études à Cambridge, fait ses débuts de dramaturge en 1982, avec Living remains à l’Orange Tree Theatre, salle de la périphérie londonienne. En 1991, il part en résidence à New York. Il écrit pour la radio, et collabore régulièrement avec le Royal Court, théâtre réservé aux textes inédits contemporains. C’est là qu’en 1991, est créé Getting attention. En 1997, Atteintes à sa vie – que Stanislas Nordey met en scène en 2003 dans une traduction de Christophe Pellet – en 2000, La Campagne que, deux ans plus tard, Luc Bondy monte au Burg Theater de Vienne, avant de créer en 2004 à Londres Cruel and tender. Les deux spectacles sont présentés à Paris au Théâtre national de la Colline et aux Bouffes du Nord. Francophone, Martin Crimp a adapté notamment Marivaux (Le Triomphe de l’amour), Molière (Le Misanthrope), Genet (Les Bonnes), Koltès (Roberto Zucco), Ionesco (Les Chaises). En France, son théâtre est publié aux Éditions de l’Arche. Christophe Rauck En 1991, il entre au Théâtre du Soleil, joue Les Atrides et la pièce d’Hélène Cixous, La Ville parjure ou le Réveil des Erinyes, puis en 1996, avec Silviu Purcarete, L’Orestie. Cette même année, il fonde sa compagnie Terrain vague (titre provisoire) avec laquelle il retrouve la Cartoucherie d’Ariane Mnouchkine pour y mettre en scène Le Cercle de craie caucasien de Brecht, qui tourne deux ans et est présenté au Berliner Ensemble. En 1997, il aborde Shakespeare : Comme il vous plaira, continue en 1999 avec La Nuit des rois après un stage auprès de Lev Dodin à Saint-Petersbourg dans le cadre de l’Institut Nomade. En 2000, il monte Le Théâtre ambulant Chopalovitch de Simovitch au Théâtre du Peuple de Bussang dont il prend la direction en septembre 2002. Il y donne La Vie de Galilée de Brecht, Le Dragon d’Evgueni Schwarz, présenté cette saison à la Cité Internationale, où son Rire des asticots d’après Cami avait déjà été accueilli. Llanto por Ignacio Sánchez Mejías FEDERICO GARCÍA LORCA VICENTE PRADAL/MICHEL ROSTAIN DU 31 JANVIER AU 11 FÉVRIER oratorio de Vicente Pradal mise en scène Michel Rostain assistant à la mise en scène Daniel Lecoyer scénographie Jean-Pierre Larroche son Nicolas Jobet lumières Celso Domeque costumes Nathalie Trouvé chant Maria Luna, Vicente Pradal, Luis de Almería, Chango Manzo musiciens Luis Rigou, Jean-Luc Amestoy, Hélène Arntzen, Emmanuel Joussemet Ignacio Sanchez Mejias : mort le 13 août 1934, deux jours après avoir été blessé aux arènes de Manzanares. Torero célèbre, et qui voulait poursuivre son art jusqu’au-delà de ses forces, il appartenait à l’élite intellectuelle espagnole. Il était beau, mélomane, poète, tous l’admiraient. En particulier Federico García Lorca qui n’avait pu assister à son ultime corrida et lui dédia ce Llanto. Douloureux, somptueux chant funèbre, dans lequel est dite l’horreur de la mort. La mort telle qu’en elle-même, tragique et définitive. La seule éternité de ce monde. C’était un peu plus d’un an avant que lui-même soit abattu par les phalanges franquistes. Le lien entre García Lorca et Vicente Pradal remonte à trois générations, l’arrière grandpère de Vicente ayant été – une photo de classe en témoigne – maître d’école du petit Federico. Les deux familles se connaissaient, se côtoyaient. Et puis les Pradal s’exilèrent en France, à Toulouse, où Carlos, le père, épousa une Française. De double culture, Vicente Pradal a donc grandi sans malaise aucun dans cette ville où s’était réfugiée une importante communauté espagnole. Entre deux langages, entre deux pays, il va de l’un à l’autre avec autant de naturel que pour traverser la rue. Il est francoespagnol et hispano-français. Son père était peintre. Lui, de naissance, appartient à la musique : la guitare, le flamenco dont il retrouve l’esprit et la passion chez le poète andalou. C’est en terre d’Andalousie que le flamenco trouve ses racines, qu’il évolue, raison pour laquelle il continue de vivre. Alors, pouvait-il en être autrement ? Le Llanto de García Lorca pour Ignacio Sánchez Mejías a brûlé le cœur de Vicente Pradal. Longtemps il l’a laissé mûrir en lui et s’est décidé à traduire en musique les mots du déchirement, et au-delà des larmes et de la peur, l’irrémédiable solitude de la mort. Il a rassemblé ses musiciens, est allé trouver Michel Rostain, directeur du Théâtre de Quimper – principalement consacré aux opéras, aux spectacles musicaux – qui a accepté de mettre en scène le spectacle. C’était en 1998, sa première représentation a eu lieu au Théâtre national de Toulouse. Depuis, il a sans cesse tourné en Espagne, en France, au Québec ou à Cuba et vient pour la première fois à Paris. Un spectacle en quatre actes, une histoire qui se noue. Vicente Pradal imagine trois hommes allant annoncer la blessure mortelle d’Ignacio à sa femme – ou à sa maîtresse officielle, la célèbre Argentinita. Les compagnes des toreros ont peur d’assister aux corridas. Elles attendent. Elles espèrent. A las cinco de la tarde.… (À cinq heures de l’après-midi…) La phrase hante et scande l’ouverture du poème chanté en espagnol sans surtitre. C’est par la musique, uniquement par la musique que Vicente Pradal veut faire entendre, comprendre, ressentir, le sang qui coule des paroles de García Lorca (mais sa propre traduction du texte est disponible). ¡Que no quiero verla !… (Non, je ne veux pas le voir !). La femme se révolte, elle refuse. Ce n’est pas lui, elle ne veut pas, ne veut rien admettre. Ya se acabó… (C’est fini…) Face à l’irrémédiable, que peut-elle faire ? Porque te has muerto para siempre, como todos los muertos de la Tierra… No te conoce nadie. No. Pero yo te canto. (Parce que tu es mort pour toujours, comme tous les morts de la terre… Nul ne te reconnaît. Non. Mais je te chante). Inoubliable chant qui s’enveloppe dans la musique de Vicente Pradal. Federico García Lorca Né le 5 juin 1898 à Fuentevaqueros en Andalousie, il fait ses études à Grenade où il rencontre le compositeur Manuel de Falla, puis à Madrid où il fait connaissance de Dali et Buñuel. En 1919, il écrit sa première pièce Le Maléfice de la phalène, et en 1927 connaît son premier succès avec Mariana Pineda. L’année suivante est publiée la première version du Romancero Gitano. Invité à l’université de Columbia en 1929, il écrit Un poète à New York, revient en 1931 à Madrid, fonde son théâtre ambulant, La Barraca, qui parcourt les campagnes. 1933 est son année de gloire avec Noces de sang qui triomphe à Buenos-Aires, La Savetière prodigieuse, Les Amours de don Perlimplin avec Bélise en son jardin, en 1934, Yerma et Llanto por Ignacio Sánchez Mejías. En 1935, Dona Rosita ou le Langage des fleurs, son dernier succès avant d’être fusillé par les franquistes. Vicente Pradal Né en 1957 à Toulouse, musicien, élève du guitariste flamenco Pepe Habichuela, il joue dans de nombreux concerts, y compris classiques, et dans La Savetière prodigieuse avec Jacques Nichet au Théâtre national de Toulouse. En 1994, à partir des poèmes de Jean de la Croix, il compose La Nuit obscure (Grand Prix de l’Académie Charles-Cros), et en 1996 Le Cantique spirituel. En 1998, Carmen Linares lui commande L’Apocalypse, la même année est créé Llanto por Ignàcio Sánchez Mejías. En 2000, lui sont commandés L’Amour de loin, et en Italie Les Filles d’Ismaël. En 2001, Michel Rostain crée à Quimper son Pelleas y Melisanda sur les poèmes de Pablo Neruda, et en 2004, le Romancero Gitano de García Lorca (présenté aux Abbesses). Michel Rostain Né en 1942, musicien et metteur en scène, il fonde en 1978 la compagnie Un théâtre pour la musique. Depuis 1995, il dirige la Scène nationale de Quimper-Théâtre de Cornouaille où il lui arrive de monter des classiques (Lucie de Lammermoor en 2001) mais principalement des œuvres contemporaines, dont certaines sont nées de ses commandes. Rhinocéros, ph. R. Senera La Visite de la vieille dame, ph. Enguerand répétition de L’heure où…, ph. M. Mustapic 1 2 4 3 + de 100 comédiens 1. David Ayala 2. Denis Lavant 3. Romane Bohringer 4. Marief Guittier 5. Hugues Quester 6. Alain Libolt 7. Serge Maggiani 5 6 photos D. Bengoa, Delahaye, Agence Corbis, X.DR, J.-P. Lozouet, Delahaye, R. Senera les comédiens Katherine Barker création JEAN AUDUREAU SERGE TRANVOUEZ DU 21 FÉVRIER AU 12 MARS mise en scène Serge Tranvouez scénographie Jean-Christophe Choblet lumières matthieu Ferry son Michel Zürcher costumes Zouzou Leyens musique Éric Vinceno avec Émilie Beauvais, Cécile Bournay, Frédéric Cherboeuf, Matthieu Cruciani, Victor De Oliveira, Yoann Demichelis, Amandine Dewasmes, Serge Gaborieau, Fabrice Gaillard, Julien Geskoff, Éric Laguigné, Laetitia Lemesle, Pierre Mignard, Raphaël Pigache, Valérie Thomas, Sandra Rebocho Il y avait une fois une femme, chef d’un gang de quatre garçons : ses fils. Improbable mais vraie, son histoire inspira à Roger Corman un film : Bloody Mama avec Shelley Winter, Robert de Niro y faisait ses débuts. Puis à Jean Audureau une pièce : À Memphis il y a un homme d’une force prodigieuse – créée par Antoine Bourseiller en 1966. Plus tard, il la reprit, la modifia, lui donna le nom de la femme : Katherine Barker. Certes, Audureau est loin de Corman, mais de L’Ange bleu à Mizoguchi en passant par Jean-Luc Godard, il était un amoureux du cinéma. Preuve en est la force des images que font naître ses mots. Metteur en scène, membre également de la commission d’aide à la création, Serge Tranvouez – qui dès son plus jeune âge se passionnait pour les poètes – eut ainsi l’occasion de lire le manuscrit, tomba sous le charme, au point de plonger dans l’œuvre entière de cet auteur rare. Dans son théâtre, et tout particulièrement ici, on navigue hors du réel. Les espaces oublient les frontières, les temps se croisent, les personnages vivent sous le regard de récitants qui, tels un chœur antique, décrivent et commentent leurs actes. Katherine Barker se dédouble, dialogue avec son enfance, avec cette petite fille qu’elle a été. Ce fut le point de départ de Serge Tranvouez. « Ces moments sont très importants, ils ouvrent une porte sur le monde d’Audureau, qui, à huit ans, avait écrit sa première pièce dans sa chambre tapissée de photos où il édifiait son royaume. Toujours, l’imaginaire des enfants l’a fasciné : ils savent faire vivre des rêves à travers lesquels leur pouvoir devient sans limites. Rien ne leur est impossible, rien ne les arrête. Rien n’arrête Audureau qui, avec une merveilleuse aisance, va et vient du lyrisme à la comédie. Le danger serait de se laisser envoûter par la beauté de son écriture. Il nous faut aller au-delà, entrer dans le tableau, en découvrir les champs névrotiques, la cruauté et la tendresse infinie que les enfants savent exiger. « Pour moi, l’histoire se passe dans la tête de Kate la fillette, comme si tout existait depuis toujours. D’ailleurs, entre elle et les récitants, la connexion est évidente. Ils participent d’un même monde qui, par glissements, de temps en temps, interfère avec celui des “vivants”. Deux modes de narration se reflètent, s’unissent, parfois s’opposent. Chaque scène offre sa théâtralité particulière. L’ensemble compose une sorte de fresque diversifiée, que l’on doit traverser sans perdre le fil. Il s’agit, ne l’oublions pas, d’une fable, un conte noir. « L’imaginaire de Kate la fillette, enfante Katherine la mère, femme en révolte absolue contre la société bien-pensante, contre la morale puritaine. Elle détourne la Bible, élève ses fils dans le culte du mensonge, du crime, d’une intégrale liberté, tout en sachant très bien qu’elle les envoie à la mort. Pareille à une Médée anarchiste, elle leur porte un amour viscéral, entier, quasi incestueux, une passion suicidaire. Elle possède la force et la fragilité des enfants qui ne connaissent pas de bornes à leurs désirs. » Chaleureuse Katherine Barker, couvant ses quatre fils au cœur d’une société fermée, au centre d’un monde obscur, mouvant, peuplé de personnages ambigus prêts à tous les échappatoires, à toutes les trahisons, et qui n’affirment leurs croyances que pour se fuir eux-mêmes. Courageuse Katherine Barker qui ose lutter pour ses rêves. Fascinante Katherine Barker. Jean Audureau Jean Audureau naît en 1932 à Cholet, meurt d’une pneumonie en janvier 2002 à Paris. Il y arrive dans les années 50 pour aller au théâtre et au cinéma, et y vit dans un quasianonymat. Il envoie À Memphis il y a un homme d’une force prodigieuse à plusieurs metteurs en scène renommés dont Antoine Bourseiller qui crée la pièce au Festival du Marais 1966. En 1970, Le Manteau d’Arlequin publie Le Jeune Homme que Pierre Debauche présente en 1972 à Nanterre. En 1983, JeanPierre Vincent, administrateur général de la Comédie-Française, profite des hésitations du comité de lecture pour monter Félicité (d’après Un cœur simple de Flaubert) avec Denise Gence. Beaucoup seront fascinés par Audureau, notamment Jean-Louis Thamin qui monte Katherine Barker et sa suite, Hélène, au CDN de Bordeaux. La dernière œuvre d’Audureau, L’Élégant Profil d’une Bugatti sous la lune (un rêve sur Gilles de Rais) n’a pas encore été portée sur scène. Serge Tranvouez Après une licence de Lettres Modernes, Serge Tranvouez se forme comme acteur à l’INSAS à Bruxelles, puis joue en Belgique et en Suisse. De retour en France, il fait trois rencontres déterminantes : Antoine Vitez, Didier Gabily et Joël Jouanneau. Avec Gabily, il participe à la fondation d’un groupe et joue dans Violences, Des cercueils de Zinc et Enfonçures. Avec Jouanneau, il est acteur (Par les Villages de Handke) ou co-metteur en scène (Lève-toi et Marche d’après Dostoïevski, Rimmel de Jacques Seréna). Avec sa compagnie, il s’attache d’abord à Claudel ; il monte Partage de Midi, puis sa traduction de L’Orestie d’Eschyle. En 1998, il est metteur en scène associé au TGP de Saint-Denis. Il y affirme son intérêt pour l’écriture contemporaine. Il crée successivement Gauche-Uppercut de Joël Jouanneau, Agar des Cimetières de Brahim Hanaï, Prométhée de Rodrigo García et deux pièces de Koffi Kwahulé, P’tite Souillure et Jaz. Il a aussi une activité régulière de pédagogue. Illuminations – Coloured plates création ARTHUR RIMBAUD THIERRY DE PERETTI DU 16 MARS AU 1er AVRIL mise en scène Thierry de Peretti assistant Ludovic Virot décor Rudy Sabounghi lumières Jean-Luc Chanonat costumes Caroline de Vivaise création sonore Sylvain Jacques vidéo David Bersanetti avec Marie Denarnaud, Alban Guyon, Thibault de Montalembert Les Illuminations : une quarantaine de courts fragments en prose et en vers libres. Ils se nomment Après le déluge, Barbare, Enfances, Vies I, II, III, Matinée d’ivresse, Départ… Commencés en 1873 – Arthur Rimbaud a dixneuf ans –, ils sont terminés deux ans plus tard et publiés une première fois en 1886, puis peu de temps après sa mort, en 1892 avec une préface de Verlaine : « […] D’idée principale, il n’y en a pas, ou du moins nous n’y en trouvons pas. De la joie évidente d’être un grand poète, tels paysages féeriques, d’adorables vagues amours esquissées, et la plus haute ambition (arrivée) de style : tel est le résumé que nous croyons pouvoir oser donner de l’ouvrage […] Si aujourd’hui Thierry de Peretti porte sur scène ces textes incandescents, c’est pour « passer du temps avec »: « Je cherchais aussi depuis longtemps à mettre sur scène un texte qui ne soit pas au départ écrit pour le théâtre. Je voulais trouver un ensemble de fragments ou de pièces où la langue serait “tout”. Parce que je me rends compte que c’est la seule chose qui m’intéresse vraiment au théâtre : apprendre à parler, apprendre à penser. « J’avais aussi l’idée “d’éclats” quelque chose qui ne serait pas “complet” et ne se soucierait que de perceptions, de lumière et de son. Et puis il y avait ces textes de Rimbaud qui ont toujours été près de moi. Mon père m’en parlait beaucoup lorsque j’étais enfant et quelques bribes d’Une saison en enfer refaisaient régulièrement surface dans mon esprit et donc Arthur Rimbaud évidemment ! « C’est la Saison que j’ai d’abord voulu mettre en scène, mais j’avais peur d’une identification, de céder trop facilement, à la part trompeuse d’autobiographie. C’est pourquoi j’ai choisi Illuminations, ces Coloured Plates, l’un des titres envisagés par Rimbaud. « Illuminations, c’est “tout, tout le temps”, la vie, l’œuvre, l’accomplissement et l’abandon, la “nouvelle harmonie” et le “nouvel amour”. « Illuminations pose surtout ce grand mystère, cette question centrale et périphérique à la fois : “De quoi cela parle-t-il ?”. Il y très peu de métaphores, tout est vrai, tout est illusion aussi, mais il faut tout prendre pour “argent comptant”, il faut croire à tout. Il faut y chercher ce qu’on ne trouvera de toute façon pas, Rimbaud ne dévoilera jamais ce dont il parle… « Alors comment mettre en scène de telles “pièces” ? Comment envisager le travail, les répétitions ? Par où commencer ? Que raconter aux acteurs qui ne soit pas immédiatement contredit par le texte ? « Il faut oublier les tactiques propres à la scène, chercher la perception juste, décider violemment d’un ordre (puisqu’il n’y en a pas) et en changer, trouver les “fréquences” sur lesquelles la voix et les mots se rencontrent, refuser l’harmonie et la fluidité, croire que des apparitions vont se faire et ouvrir les yeux. Il faut choisir de laisser vivre le plus longtemps possible les moments dont nous aurions, avec les acteurs, préalablement dessiné les contours et les suspensions. Guetter les relais qui peuvent se faire d’un texte à l’autre, obéir à l’intuition d’un ordonnancement caché et l’essayer sur le champ, chercher le point où l’écoute se tend, repérer l’endroit où elle s’est perdue, tenter de la prolonger le plus loin possible, muscler nos voix et nos intentions pour qu’aucun mot ne perde la multitude de directions que le poète lui a donnée. » Sur un plateau nu, deux hommes, une femme, leur corps, leur peau, leur voix, de la musique, des bruits, les paroles de Rimbaud : les Illuminations. Arthur Rimbaud Né à Charleville en 1854, fils d’une mère sans tendresse et d’un père militaire de carrière qui abandonne sa famille en 1860, il est élevé dans les règles religieuses les plus strictes, suit ses études jusqu’à l’âge de quinze ans. Très bon élève, mais mauvaise réputation. En 1871, il écrit Le Bateau ivre, rencontre Paul Verlaine, poète porté sur l’absinthe (alcool aujourd’hui interdit), qui laisse sa famille et sa femme enceinte pour partir avec lui en 1872 à Londres. Leur liaison dure un an et se termine dans la violence à Bruxelles. En 1873, paraît Une saison en enfer. En 1874, il se met à étudier les langues étrangères, de l’anglais au grec en passant par le russe et l’arabe. En 1876, il change de vie, s’en va au Moyen-Orient, travaille dans l’import-export, homme d’affaires aux occupations douteuses. Il n’écrit plus, c’est le silence jusqu’à sa mort à Marseille le 10 novembre 1891. Thierry de Peretti Après un passage au cours Florent, une bourse de la Villa Médicis hors les murs, Thierry de Peretti acteur joue Montherlant (La Ville dont le prince est un enfant), Claudel (Le Soulier de satin), Tchekhov (La Mouette) et bien d’autres. Au cinéma notamment avec Claude Berri (Lucie Aubrac), Vincent Ravalec (Une prière vers le ciel), Patrice Chéreau (Ceux qui m’aiment prendront le train), Orso Miret (Le Silence). Au théâtre, sa quatrième mise en scène, Le Retour au désert de Bernard-Marie Koltès, lui vaut le Prix de la révélation 2001 du Syndicat national de la Critique. Suivent en 2002 Valparaiso de Don de Lilllo, en 2004 Gengis parmi les pygmées de Gregory Motton au Vieux-Colombier où il revient avec Le Mystère de la rue Rousselet de Labiche. Entretemps, il a monté Richard II de Shakespeare au Théâtre de la Ville. Il vient de réaliser deux moyens-métrages pour le cinéma. Face de cuillère création LEE HALL MICHEL DIDYM DU 26 AVRIL AU 20 MAI texte français Fabrice Melquiot mise en scène Michel Didym scénographie Vincent Tordjman avec Romane Bohringer À cause de son visage rond, comme s’il se reflétait dans une cuillère, on l’appelle Face de cuillère. On la dit “attardée” mais elle est capable de faire de tête des calculs insensés, complètement inutiles. Elle n’a pas d’âge, elle n’est pas vieille, elle ne le sera jamais, à cause d’un cancer. Elle aime l’opéra, et sur un petit magnéto approximatif, écoute Callas. Elle écoute comme si elle voulait se noyer dans cette voix qui finit par envahir l’espace et l’esprit, dont le chant raconte des histoires « à propos de la mort et fait voir les choses comme elles sont ». À première vue, elles ne sont pas joyeuses, les choses, entre une mère alcoolique, un père lointain, un vieux docteur qui lui raconte le camp où sa mère à lui, a disparu… Ce genre de situation pourrait faire craindre le pire pathos, mais l’auteur de Face de cuillère est Lee Hall, scénariste de Billy Elliott (le petit prolo qui voulait danser). Anglais donc, c’està-dire peu enclin aux attendrissements surdramatisés. D’autre part, Face de cuillère est Romane Bohringer, fragile et indestructible, mystérieuse et irradiante. Enfin, la pièce a été adaptée par Fabrice Melquiot, pour le plus grand bonheur du metteur en scène Michel Didym. L’accueil unanime reçu par son spectacle Les animaux ne savent pas qu’ils vont mourir de Pierre Desproges, (donné à deux reprises aux Abbesses) prouve d’ailleurs qu’il sait mettre en valeur la dureté et l’ironie, l’insouciance heureuse des sujets graves : « L’intérêt du texte de Lee Hall tient dans l’étrange goût du bonheur qui s’en dégage. Et puis je trouve très importante la cohabitation de la parole dite et chantée, le va-et-vient entre ce qui se raconte de quotidien, de concret, et l’univers de vibrations, de trouble, d’émotions pures où nous entraîne la magie musicale. » Michel Didym est un chercheur de textes. Il a mis en mouvement “la Mousson d’été” pendant laquelle lectures et mises en espace d’inédits se succèdent, puis l’a prolongée et étendue à des publics plus adolescents, avec “la Mousson d’hiver”. C’est en cette occasion qu’il a rencontré Face de cuillère. Il est des moments où la violence de chocs affectifs qu’on est mal préparé à affronter, sensibilise aux souffrances et aux manières de les assumer. Alors Michel Didym a reçu en plein cœur le dialogue de la jeune fille avec sa maladie : « Ses paroles sont sans compromis et totalement généreuses. En quelque sorte, la maladie a développé son humanté, accéléré son appréhension du monde. Elle n’a plus le temps de se plaindre, de chercher des responsables, de se cacher derrière les mots, de se mentir. Elle possède la force de l’innocence et de la lucidité. Je sais, pour les avoir fréquentés, ce qui se passe dans les hôpitaux de gosses. On arrive avec nos pantoufles bordées de pathos et ils nous entraînent dans leurs jeux. J’ai été frappé aussi par ce personnage dont elle parle, le vieux docteur et les souvenirs du camp où les enfants dessinent des papillons sur les murs des chambres à gaz… Je pense à cette phrase magnifique : “On peut tuer les enfants, on ne peut pas tuer ce qu’ils ont dans la tête”. « Ce qui m’attache particulièrement ici, est la façon dont cette fille encore si jeune réussit à parler de la mort, à en évacuer l’angoisse. Elle est bien dans la vie, plus pour longtemps peut-être, mais complètement. Il ne s’agit pas de courage, mais de résistance au malheur. Un être humain debout, qui a beaucoup à nous apprendre. » Lee Hall Né en 1966 à Newcastle, il s’intéresse à l’écriture dramatique à Cambridge où il rencontre Stephen Daldry, futur réalisateur du scénario qui va le rendre célèbre : Billy Elliott (le petit prolo qui voulait danser), film à succès nominé aux Oscars en 2000. En attendant, en 1993 il va passer des vacances aux États-Unis, y tombe amoureux, reste un temps à New York. À son retour, il se lance dans la radio, connaît le succès en 1996 avec I luv you Jimmy Spud, devenu au cinéma Gabriel et moi (il y est question d’un garçon qui se lie avec l’ange Gabriel pour avoir des nouvelles de son père mort). En 1997, Spoon face Steinberg (Face de cuillère Steinberg, titre complet) confirme son talent et son succès. Il se partage entre radio et théâtre : en 1999, Cooking with Elvis, ou la Cuisine d’Elvis au Théâtre de poche Montparnasse 2003. Il traduit également Büchner (Léonce et Lena), Brecht (Mère Courage), Goldoni (Arlequin serviteur de deux maîtres), et aujourd’hui vit à Hollywood. Michel Didym Après des études à l’École supérieure d’art dramatique de Strasbourg, après un prix de la Villa Médicis hors les murs, en 1990, en sa Lorraine natale, il fonde la Compagnie Boomerang, avec laquelle il monte un répertoire d’auteurs contemporains, dont en 1994 au Théâtre de la Ville, Botho Strauss, Visiteur. En 1995, il crée la Mousson d’été qui tient ses assises en août à l’Abbaye des Prémontrés. En 1999, il met en scène Bernard-Marie Koltès : Sallinger aux Abbesses, La Nuit juste avant les forêts à Metz. Au Festival d’Avignon 2000, c’est Yacobi et Ledenthal de Hanoch Levin, en 2001 au VieuxColombier le Langue à langue des chiens de roche de Daniel Danis. Il fonde la MEEC (Maison européenne des écritures contemporaines), accompagnée d’une revue : TC (Temporairement contemporain). En 2002, il met en scène Serge Valletti et Christine Angot au Théâtre national de la Colline, en 2003 et 2004 aux Abbesses Les animaux ne savent pas qu’ils vont mourir. CINEMA/OPERA/CHANSON Wayn Traub HET TONEELHUIS une aventure, un parcours LUN. 6 ET MAR. 7 MARS 1.Maria Dolorès CINÉMA, OPÉRA, THÉÂTRE mise en scène Wayn Traub MER. 8 MARS 2.Jean-Baptiste reprise - CINÉMA, OPÉRA, THÉÂTRE mise en scène Wayn Traub LE SPECTACLE VEN. 10 ET SAM. 11 MARS 3.Jean-Baptiste création - RÉCITAL, PERFORMANCE musique Wim De Wild Wayn Traub chant avec 30 musiciens de l'Orchestre VRO (Vlaams Radio Orkest ) LE CONCERT Décidément, la création chorégraphique et théâtrale en Belgique n’en finit pas d’épater. Après Anne Teresa De Keersmaeker, Jan Fabre, Jan Lauwers et Wim Vandekeybus dans les années 80, les Ballets C. de la B. d’Alain Platel et consorts, puis le groupe tg Stan, la compagnie De Onderneming, la « fabrique » Victoria, Thomas Hauert et quelques autres (la liste est loin d’être exhaustive) les années suivantes, voici qu’un nouvel olibrius arrive sans crier gare. Comme beaucoup de ses prédécesseurs, Wayn Traub n’a pas vraiment un cursus cousu de fil blanc… Ni barre classique, ni conservatoire : aux années d’enfance confinées dans un internat catholique flamand, sanctionnées par la découverte adolescente des écrits d’Antonin Artaud et d’autres hérétiques, succéderont des études de cinéma et d’histoire de l’art. Une expérience de mime corporel plus tard, il rédige à 26 ans un Manifeste du théâtre de l’animalité (sa bible jusqu’à aujourd’hui) où l’impétrant proclame : « Le théâtre, c’est la métamorphose, la libération, le sacrifice de soi-même, c’est mourir afin de pouvoir recommencer de rien ». Son nom de naissance (Geert Bové) passe à la trappe, Wayn Traub (patronyme forgé à partir du nom de jeune fille de sa mère) passe à l’attaque. Exposition d’écussons, fusils et têtes de cerfs (au Vooruit de Gand, en 1999), solo de danse entouré de 40 chats, performances plutôt iconoclastes, création d’une pièce avec Jane Birkin, réalisation de courts métrages, « l’animal Wayn Traub » guette sa proie. Ce sera Maria Dolorès, en 2002. Du jamais vu ! Un étrange 3 théâtre psalmodié et chanté par deux actrices sorties d’un tableau gothique, une iconographie moyenâgeusement crépusculaire et, surplombant le tout, un film de long métrage absolument délirant qui enchevêtre la fiction et le réel, le mythe et le présent, dans un extraordinaire labyrinthe où aucun fil ne se perd tout à fait. Sur scène, une bergère de Dieu convaincue d’avoir vu la Vierge Marie, et une mère supérieure à qui on ne la fait pas. Sur pellicule, une Marie-couche-toi-là (mais pas seulement), comédienne suivie comme son ombre par une caméra indiscrète, entourée d’étonnants personnages : un obscur « poète des femmes » à la fatuité caverneuse, un vieux metteur en scène aux mains baladeuses, etc. Wayn Traub construit et découd ce labyrinthe de situations au fil d’un montage stupéfiant. On parlera, si l’on veut, de cinéthéâtre sans circonscrire tout à fait la vertigineuse mise en abîme d’une représentation proliférante. Jean-Baptiste (présenté au Théâtre de la Ville en juin 2005) vient confirmer et amplifier, dans les ressorts d’une fable composite, la prodigieuse capacité qu’a Wayn Traub de tracer un chemin novateur parmi les arts de la scène, et sa faculté à tisser l’étoffe d’une histoire, à mille lieues des habituelles ficelles narratives. Mais ce n’est pas tout. En filigrane de la « pièce » Jean-Baptiste, est née la « créature » JeanBaptiste, soit un chanteur au visage androgyne, à la voix de haute-contre, qui élève sur l’orchestration du compositeur Wim De Wilde la figure d’un artiste « mélancolique et solitaire ». Ce chanteur mystique et fictif, porteur d’un message d’amour et de charme, Wayn Traub envisage sérieusement de le faire grandir comme « un phénomène hors norme dans le paysage de la musique commerciale actuelle » parce que, dit-il, « nous sommes convaincus que le public éprouve le besoin de renouer avec des émotions nobles et sincères, de belles mélodies simples sur des arrangements solides, l’apport des compositions orchestrales et des artistes porteurs d’une vision… » Curé des arts, comme l’a qualifié la presse belge à ses débuts, Wayn Traub est-il est train de prêcher le vrai, ou bien la fiction a-t-elle d’ores et déjà commencé ? Toujours est-il que le « récital » de JeanBaptiste, chanteur rituel, est d’ores et déjà en chantier, avec orchestre d’une trentaine de musiciens et CD à la clé. En toute liberté, Wayn Traub nous mène en bateau dans de sacrés méandres… Jean-Marc Adolphe 2 photos Ph. Deprez 1 THÉÂTRE HORS LES MURS : AU THÉÂTRE PARIS-VILLETTE Toto le Mômo D’APRÈS ANTONIN ARTAUD DAVID AYALA mise en scène Jacques Bioulès et Lionel Parlier DU 4 AU 22 OCTOBRE d’après les textes préparatoires à la conférence du Vieux-Colombier, Histoire vécue d’Artaud Mômo, et des Cahiers de Rodez (extraits) imaginé et interprété par David Ayala lumières Serge Oddos, Jacques Bioulès C’est un grenier tout sombre, ou bien une cave. Un endroit secret, avec des lampes de toutes sortes qui dispersent des traces de lumières fantomatiques, avec des chaises creuses de toutes tailles, aux longues jambes filiformes. S’y asseoir représente un exploit. On peut y grimper, comme l’homme qui est là, et s’accroche, tente de s’y installer, passe au travers, affronte l’inconfort avec une patience animale. Tendre fauve perdu, il prend en lui les phrases magnifiquement bouleversantes, écrites il y a plus de soixante ans par Antonin Artaud alors qu’il préparait la conférence du 13 janvier 1947 au Vieux-Colombier, ce fameux soir où il quitta la scène au bout d’à peine une heure, face à un public on ne peut plus branché et déconcerté. Pour l’heure, c’est donc David Ayala qui, corps et âme, s’empare des mots d’Artaud. Non pas ceux de la conférence elle-même, mais ceux des brouillons, auxquels s’ajoutent plusieurs extraits des Cahiers de Rodez écrits pendant l’Occupation dans l’asile dirigé par le docteur Ferdière. David Ayala reprend son spectacle Toto le Mômo – créé en 1997, poursuivi jusqu’en 2000 – et retrouve ses metteurs en scène Jacques Bioulès et Lionel Parlier. Une sorte de retour sur soi après cinq ans de voyages chez d’autres auteurs. Mais avec celui-ci, les rapports sont différents, fraternels en somme. Il y a de quoi être surpris de la part d’un garçon tout ce qu’il y a plus sainement vivant, costaud, sans la moindre ressemblance physique avec l’image hallucinée d’Artaud : « Mais pour moi, il est un guide. Il m’a pratiquement initié à la littérature. Il me fascinait et en même temps me faisait peur. Je trouvais dans son écriture un formidable espace d’imagination et un rapport immédiat avec le corps, le corps en action. » Avant le théâtre, David Ayala pratiquait l’athlétisme. Il lui en est resté, sur scène, une sorte de tranquillité musclée, de douceur presque plus effrayante que la nervosité déjantée habituellement appliquée à Antonin Artaud. Les anecdotes ne manquent pas, c’est vrai, pour confirmer cette image. De son existence, on a surtout retenu les dérapages, les voyages, la drogue, les séjours en hôpitaux psychiatriques, les électrochocs, les délires, la quasiclochardisation intellectuelle – et matérielle – de cet homme réellement hors du commun, et qui ne pouvait rien faire que d’intense. C’est pourquoi justement, David Ayala et ses metteurs en scène ont voulu déborder la légende, et vraiment, faire entendre l’auteur : « Faire entendre le texte pour lui-même. J’y retrouve quelque chose de ma colère et je m’en sers pour la dire, mais à aucun moment je ne cherche l’incarnation. Je ne suis pas Antonin Artaud, je ne fais pas semblant de l’être. Il était unique, inoubliable, et avant tout un immense écrivain. Un jour, sur France Culture, dans un débat à propos du cinquantième anniversaire de sa mort, j’ai entendu quelqu’un dire que quand on ouvre les Cahiers de Rodez, on se trouve face à une somme littéraire faramineuse. À une page, on a l’impression de lire du saint Jean de la Croix, à la suivante Nietzsche, ensuite Baudelaire… C’est vrai. Son écriture est vertigineuse. Il invente, ne connaît pas de barrière, obéit à sa nécessité vitale : écrire, dire. » « La conférence du 13 janvier renversera les choses à condition d’évoquer le réel », écrivait Artaud. Et si ce soir-là il n’a pas été entendu, aujourd’hui est offerte l’occasion d’écouter Toto le Mômo. Antonin Artaud Né en 1895 à Marseille, Antonin Artaud y passe sa jeunesse. Dès 18 ans, et à plusieurs reprises, il est interné pour troubles mentaux avant de trouver une rémission sur la scène. Acteur avec Lugné Poe, Dullin, Pitoeff, au cinéma avec Dreyer, il écrit, rejoint les surréalistes, se passionne pour le théâtre balinais découvert à l’Exposition Coloniale de 1931, qui lui inspire son Théâtre de la Cruauté. En 1935, il part pour le Mexique. De 1939 à 1943, il est de nouveau interné. En 1944, paraît Le Théâtre et son double, où se cherche « la violence des peintures de Van Gogh ». 1947 est l’année de sa conférence au Vieux Colombier, et celle où il enregistre à la radio avec Roger Blin, Pour en finir avec le jugement de Dieu, longtemps interdit d’antenne. L’année suivante est celle de sa mort. David Ayala Né en 1969, élève au conservatoire de Montpellier, il entre aux Ateliers du Hangard, travaille avec de nombreux metteurs en scène, dont Lionel Parlier. Il est le Père Ubu avec Dan Jemmett, qu’il retrouve également dans Dog Face. En 1996, il fonde la Compagnie la Nuit remue, et se lance dans l’aventure de Toto le Mômo. Jacques Bioulès Né en 1941, il suit les cours de Jacques Lecoq, devient assistant d’Antoine Bourseiller, fait un stage avec Roger Planchon au TNP, fonde en 1965 le Théâtre du Hangar à Montpellier où il met en scène des auteurs de tous les temps et ses propres textes. Lionel Parlier Acteur, il joue Pinget, Claudel, Racine, Beckett. Metteur en scène, il monte Euripide, Synge, Ramuz, Molière… Et du théâtre musical, des opéras, en France et au-delà, notamment en Suisse. Depuis 1994, il dirige le Théâtre de l’Arc, atelier professionnel de recherche et d’expérimentation. DANSE ANNE TERESA DE KEERSMAEKER création 2006 AU THEATRE DE LA VILLE création PINA BAUSCH ANGELIN PRELJOCAJ création 2005 Les 4 Saisons… création Empty Moves (part I) - Noces AUX ABBESSES AKRAM KHAN SIDI LARBI CHERKAOUI ROBYN ORLIN VERA MANTERO Zero degrees Hey dude... I have talent... I'm just waiting for God... création création LLOYD NEWSON DV8 PHYSICAL THEATRE Just for show création EA SOLA Sécheresse et pluie Vol. 2 re-création GARRY STEWART AUSTRALIAN DANCE THEATRE Umwelt création WIM VANDEKEYBUS Puur création ODILE DUBOC Samanvaya Quando l’uomo principale è una donna reprise JEAN-CLAUDE GALLOTTA BALLET DE LORRAINE re-création PRIYADARSINI GOVIND création MARIA-KIRAN création re-création ALAIN PLATEL Vespers création Bhârata/Bach création RACHID OURAMDANE création PEEPING TOM D’avant JOSEF NADJ Le Salon FRANÇOIS VERRET Tokyo Musil Last Landscape JAN LAUWERS La Chambre d’Isabella Needlapb reprise GRACE ELLEN BARKEY création création AU THEATRE DE LA CITE INTERNATIONALE SIDI LARBI CHERKAOUI DAMIEN JALET LUC DUNBERRY JUAN KRUZ DIAZ DE GARAIO ESNAOLA reprise création EMIO GRECO Double points : + MEG STUART création DANSE HORS LES MURS AU CENTRE POMPIDOU Cover MARIE CHOUINARD création création CHRISTIAN RIZZO “Autant vouloir le bleu du ciel et m’en aller sur un âne.” AU THEATRE DE LA BASTILLE BORIS CHARMATZ SASHA WALTZ création 2005 création MERCEDES RUIZ bhârata natyam SANKAI JUKU USHIO AMAGATSU Chunking reprise ALARMEL VALLI MADHAVI MUDGAL Docteur Labus Rien ne laisse présager de l’état de l’eau création création 2006 Bâche JAN FABRE MAGUY MARIN création 2005 KOEN AUGUSTIJNEN Dibujos en el aire Held création 2005 Kinkan shonen création création Régi création Angelin Preljocaj, ph. J.-C. Carbonne DANSE AU THEATRE DE LA VILLE THEATRE DE LA VILLE • TARIF B Angelin Preljocaj BALLET PRELJOCAJ DU 27 SEPT. AU 8 OCT. 1er PROG. Les 4 Saisons… CRÉATION “chaosgraphie*” Fabrice Hyber musique Vivaldi, Les Quatre Saisons 12 danseurs * Écriture du chaos. DU 4 AU 15 AVR. 2e PROG. Empty Moves (part I) (2004) création sonore John Cage, Empty words 4 danseurs Noces (1989) musique Igor Stravinski, Noces 10 danseurs 20e anniversaire de la compagnie et ouverture de son nouveau lieu de création et de diffusion à Aix-en-Provence, le Pavillon noir. L’ÉPREUVE DU CORPS Une question, obstinée, exigeante, rôde à l’orée de toute nouvelle création d’Angelin Preljocaj : « Que peut le corps ? ». Écrire, les yeux grands ouverts sur le monde, dire ses tourmentes, ses fracas, ses beautés furieuses, avec le stylet du geste, la puissance expressive de la chair. Pour lui, la danse est un art de combat, un défi aux limites du corps, une plongée dans les failles du présent. Sans doute cette ardeur farouche fut-elle aiguisée par le destin de sa famille albanaise happée dans les violences de la guerre, et par l’opposition de ses parents à sa vocation. Ce fils d’émigrés a grandi en résistance, affûtant son style, racé, incisif, au fil d’un parcours initiatique transfrontière. Il commence par le classique, découvre le contemporain avec Karin Waehner, parfait son apprentissage aux ÉtatsUnis avec Merce Cunningham, puis, de retour en France, avec Viola Farber et Dominique Bagouet. Aujourd’hui, à la tête du Ballet Preljocaj, compagnie qu’il fonde en 1984, chorégraphiant pour les plus grands ballets mondiaux, cet amoureux insatiable du mouvement n’aime rien tant que s’aventurer sur des terres inconnues ou défier la tradition. Il ose se confronter aux chefs-d’œuvre du répertoire, qu’il expurge des dorures ternes de la convention pour en retrouver l’éclat tranchant. Artiste engagé, il n’hésite pas non plus à se frotter aux épines, même les plus aiguës, qui écorchent l’humain : le décervelage télévisuel (Personne n’épouse les méduses*), l’état d’urgence (Helikopter *), l’animalité du désir (Le Sacre du printemps*) la matrice de la vie (Near Life Experience*), la haine (N), l’infanticide (Le Songe de Médée)… Ses visions incandescentes déploient une danse vitale, essentielle, où la voracité des pulsions s’exaspère dans le dessin complexe d’une écriture rigoureusement ciselée. Pour le vingtième anniversaire de sa compagnie, installée à Aix-en-Provence depuis 1996, Angelin Preljocaj revient au Théâtre de la Ville qui accompagne ses créations depuis 1987. Le chorégraphe explore un des plus célèbres concertos : Les Quatre Saisons de Vivaldi. « Peut-on effacer ”l’entachement” qu’a connu cette musique, au final, si sensuellement météorologique ? » Avec la complicité du plasticien Fabrice Hyber, il creuse les zones d’ombre et les secrets de cette partition si souvent dévoyée en mélodie téléphonique. Jaillissement, exaltation, suspension, vibration… Ses Saisons brouillent les interférences et embrasent les forces tumultueuses qui régissent le cycle du temps. C’est également par la relecture d’un grand classique que s’ouvre le second programme : Noces, sur les notes enfiévrées de Stravinski. Créée en 1989, sa version, empreinte d’accents slaves, exacerbe la sauvagerie et le tragique de ces épousailles dominées par la brutalité machiste. Empty Moves (part I) (2004) joue en revanche sur l’essence du mouvement et la déstructuration du phrasé chorégraphique sur la musique répétitive de John Cage. Sensuel, pulsionnel ou abstrait, le corps reste au cœur de la bataille… Gwénola David * 10 coproductions et 3 accueils au Théâtre de la Ville. THEATRE DE LA VILLE • TARIF B DU 11 AU 16 OCT. Akram Khan Sidi Larbi Cherkaoui AKRAM KHAN DANCE COMPANY BALLETS C. DE LA B. Zero degrees CRÉATION duo dansé par Akram Khan et Sidi Larbi Cherkaoui musique Nitin Sawhney sculpteur Antony Gormley Souvent la danse est cette alchimie qui concilie des énergies opposées, opérant au cœur même du mouvement le mélange de matières en fusion. Il y faut, certes, de l’incandescence. Sidi Larbi Cherkaoui et Akram Khan ont l’un et l’autre ce tempérament et cette qualité. L’ardeur et la sveltesse se combinent en Sidi Larbi Cherkaoui dont l’expressivité est un feu à fleur de peau – feu à la fois noir et transparent dont il fait la sève d’une arborescence fluide. Akram Khan, simultanément formé au kathak indien et à la danse contemporaine, transporte pour sa part dans la syncope des rythmes la double énergie tranchante et veloutée qui forme la ligne claire d’un jeu avec la vitesse et qui, cependant, libère un temps cosmique délié de l’urgence. L’un et l’autre donnent ainsi consistance à une sorte de grâce contemporaine, non plus vécue comme une évasion hors de la chair mais au contraire scellée en son for intérieur : une grâce non plus éthérée mais exacerbée. Sur des musiques du compositeur Nitin Sawhney, forgeron d’un alliage sonore entre l’Orient et l’Occident, et dans le voisinage d’une sculpture de l’artiste britannique Antony Gormley, fasciné par le corps-environnement, Akram Khan et Sidi Larbi Cherkaoui ont décidé de faire pour la première fois, avec Zero degrees, œuvre commune. Le « degré zéro » est ici synonyme de matière originelle, encore indistincte ; source initiale et noyau commun d’antagonismes tels que « la vie et la mort, le clair et le foncé, l’ordre et le chaos ». Éclosion sans cesse recommencée du vivant dont les deux danseurs-chorégraphes apprivoisent, au-delà de leurs affinités et différences, l’exquise et troublante dynamique. Akram khan/S. L. Cherkaoui, ph. C. Van der Burght Jean-Marc Adolphe THEATRE DE LA VILLE • TARIF B DU 20 AU 29 OCT. Lloyd Newson DV8 Physical Theatre Just for show CRÉATION 10/11 danseurs avec le Festival d’Automne à Paris Le nom même de sa compagnie, DV8 (soit deviate/dévier en V.O.) créée en 1985, est une profession de foi : pour Lloyd Newson être sur scène signifie prendre des risques, qu’ils soient esthétiques ou physiques, brouiller les frontières entre danse et théâtre et, pardessus tout, faire passer des idées. Loin de son Australie natale où il étudia la psychologie puis la danse, Lloyd Newson impose son regard sur le monde, notre monde. Sa compagnie est à son image, protéiforme et engagée. On a pu découvrir dans de précédentes créations des jeunes partageant l’affiche en harmonie avec une vraie lady à l’âge respectable (Diana Payne-Myers) ou un danseur sans jambes (David Toole). Mais ces tranches de vie n’empêchent pas Lloyd Newson de se montrer tel qu’il est : un remarquable homme de théâtre doublé d’un cinéaste accompli. Au final, le but ultime de DV8 est toujours de toucher le public au cœur. Just for show est une nouvelle étape dans une œuvre riche de ces individualités réunies. Une dizaine de danseurs, des projections vidéos et du texte pour questionner une société du paraître où la forme est plus importante que le fond, où les mensonges joliment emballés cachent des vérités moins belles à (sa)voir. Lloyd Newson se demande enfin si l’apparence et les images n’ont pas pris le dessus sur le réel de nos vies. Il sait trop bien, médias aidant, qu’aujourd’hui chacun entend réécrire son histoire, du passé au présent. Ce futur vir- DV8, ph. J. Joyce Ea Sola, ph. Cl. Le-Anh tuel vaut-il le prix que certains sont prêts à payer ? On connaît l’habilité du chorégraphe à manier des sujets brûlants sans démagogie aucune, simplement avec le sens du corps en mouvement, parfait vecteur d’énergies qu’il redécouvre sans cesse. En exergue de Just for show, Lloyd Newson place cette phrase de Otto Rank : « To be able to live, one needs illusions », (Pour être capable de vivre, chacun a besoin d’illusions). Il est urgent de croire aux illusions de DV8 Physical Theatre. Philippe Noisette DV8 AU THÉÂTRE DE LA VILLE juin 97 Bound to please juin 99 The Happiest Day of my life oct. 03 Cost of living THEATRE DE LA VILLE • TARIF A DU 7 AU 10 NOV. RE-CRÉATION Ea Sola Sécheresse et pluie Vol. 2 avec le Ballet national de Hanoï 16 danseurs, 5 musiciens, 1 compositeur ENTRE MÉMOIRE ET DEVENIR En 1995, un insolite objet apparaît dans le paysage chorégraphique : Sécheresse et pluie, première création contemporaine vietnamienne signée Ea Sola. Un manifeste. Cette révolution est le fruit d’un long, patient et obstiné travail de reconstruction. Toute l’ambition artistique d’Ea Sola est liée à son pays, qu’elle a dû quitter adolescente avant de pouvoir y retourner au début des années 90, et d’initier ce délicat projet qui repose sur la mémoire collective d’un peuple et le traumatisme de la colonisation et des guerres qu’il a traversées. Durant quatre ans, la chorégraphe arpente son sol, à la recherche de ses origines et de la culture de son pays. Avec une vingtaine de femmes entre 50 et 70 ans, elle invente une façon de chorégraphier qui s’inspire des gestes de la terre et du rapport à la nature, des rituels et du théâtre traditionnel, mais aussi du Viêt-nam d’aujourd’hui et de sa modernité. Les « dames paysannes », qu’elle met en scène sont les figures anonymes d’un peuple, ces héros du quotidien, gardiens du temps aux portes du présent. Depuis, dix ans ont passé et les jeunes artistes vietnamiens ont grandi dans la paix. En choisissant de recréer cette pièce avec les danseurs du Ballet national de Hanoi, Ea Sola réalise un original travail de transmission autour de la mémoire de guerre et de la nonviolence. De l’image au corps, du mouvement à la voix, l’écriture de la pièce suit une même partition de musique traditionnelle. Mais arrangements sonores et projections visuelles évoquent un paysage différent. Dans ce volume 2, la chorégraphe interroge le nouveau Viêt-nam, ce qu’il advient de son identité et de son histoire sous l’influence de la « globalisation ». Les gestes évoluent sous un autre regard, celui de la jeunesse. Irène Filiberti EA SOLA AU THÉÂTRE DE LA VILLE mai 97 Il a été une fois mai 99 Voilà, voilà mai 01 Requiem Australian Dance Theatre, ph. L. Greenfield THEATRE DE LA VILLE • TARIF A DU 15 AU 19 NOV. Garry Stewart Australian Dance Theatre Held POUR LA 1 10 danseurs FOIS À PARIS RE pace du studio (et non sur scène), sur un immuable fond blanc, des danseurs épinglés en plein vol. Avec elle, l’éphémère devient icône, temps suspendu dans l’élan capturé. Délaissant l’espace minutieux de son studio de prise de vues, Lois Greenfield se risque ici sur le plateau, chasseresse de papillons-danseurs dont elle projette instantanément la vie aérienne. Au 1/2000e de seconde, la danse est ici ciselée à même l’énergie qui la propulse, impeccables et implacables figures d’un corps insatiable. J.-M. A. photographies en direct Lois Greenfield Sans forcer le cliché, on pourrait convenir qu’une certaine danse anglo-saxonne n’a pas renoncé à vouer un culte ici quelque peu tombé en désuétude (hors ballet classique) à la pure virtuosité du mouvement. De l’anglais Michael Clark, qui défraya la chronique à la fin des années 80 avec ses ballets à la touche punk, au nouveau prodige Russell Maliphant (qui a récemment enrôlé Sylvie Guillem) en passant par le turbulent Earl Lloyd Newson ; du canadien Édouard Lock, dont les folles vrilles jadis sublimées par Louise Lecavalier se sont récemment muées en vertigineuses figures sur pointes, à la vitesse ciselée d’un Akram Khan, ce sont là quelques exemples d’une danse prompte à se projeter dans l’inouï de la « performance » corporelle. C’est dans cette lignée à haute densité que s’inscrit, venu des antipodes, l’Australian Dance Theatre dirigé depuis 1999 par le chorégraphe Garry Stewart, féru de multimédias et de robotique. Avec des danseurs rompus aux techniques les plus spectaculaires (classique, contemporain, break, arts martiaux…), la chorégraphie devient ici l’époustouflante prouesse de corps montés sur ressorts, dont l’engagement physique est un défi audacieusement lancé à la gravité et à la pesanteur. Held, spectacle avec lequel l’Australian Dance Theatre aborde pour la première fois Paris, met en jeu toutes ces qualités sous le regard affûté de Lois Greenfield. Depuis près de trente ans, cette photographe américaine, habituée des pages du Village Voice, de Time ou de Rolling Stone, a forgé un style bien à elle, cadrant dans l’es- THEATRE DE LA VILLE • TARIF A DU 22 AU 26 NOV. Maguy Marin COMPAGNIE MAGUY MARIN – CENTRE CHORÉGRAPHIQUE NATIONAL DE RILLIEUX-LA-PAPE Umwelt 9 danseurs CRÉATION AU MIROIR DES SENS Depuis un quart de siècle, May B. de Maguy Marin, chef-d’œuvre de l’absurde contemporain inspiré de Beckett, aura tourné sur la planète entière. Au moment même où la carrière de ce spectacle s’arrête, Umwelt se hisse à présent au même niveau d’enjeu esthétique et philosophique. La chorégraphe y agit en artiste des défis, au prix de nouvelles batailles d’Hernani. En front de scène, un cordon produit seul, contre des cordes de guitare, un unique accord obsédant. La danse abandonne l’avant du plateau où peu à peu s’entassent des débris de chimères scénographiques. Mais c’est au fond, en lisière des coulisses, battant doucement dans un vent puissant, qu’est disposé un somptueux jeu de miroirs souples. Dans leurs interstices en mouvement, apparaissent et disparaissent les neuf interprètes. Ils orchestrent une fantastique pavane répétitive et furtive, incessant défilé de figures en mirage, saisissantes. L’œil capte des fragments, présences gommées, scènes enfuies, duos, trios, dans les atours du rêve, la gravité du sens et le miroitement des surprises. Ici la beauté ne peut que se montrer morcelée, défaite, au souffle d’une époque d’utopies ruinées et d’images vaines, et pourtant fascinante. Époque que nous passons « à jouer du possible sans le réaliser. À aller jusqu’à l’épuisement des possibilités. Un épuisement qui renonce à tout ordre de préférence et à toute organisation de but ou de signification ». Étourdissant d’intelligence, tourbillonnant d’élégance, éclatant de trempe, Umwelt tisse le réseau des illusions qui isole la splendeur des êtres dans un temps saturé de mondialité, miné de vacuité. Maguy Marin, ph. J.-P. Maurin Gérard Mayen THEATRE DE LA VILLE • TARIF B DU 29 NOV. AU 3 DÉC. Wim Vandekeybus ULTIMA VEZ- KVS (THÉÂTRE ROYAL FLAMAND, BRUXELLES) Puur 13 acteurs/danseurs CRÉATION musique David Eugene Edwards et Fausto Romitelli textes P. F. Thomése et Ultima Vez film de Wim Vandekeybus Étreintes survoltées, chevauchées ébouriffées, jaillissements charnels : la danse de Wim Vandekeybus exulte, bataille, s’abandonne. Elle trahit les émois de la chair, s’engouffre dans les abîmes de l’âme et soudain s’épanche en vertiges mélancoliques. Depuis presque vingt ans*, le chorégraphe d’Ultima Vez n’en finit pas de forer le vernis policé de la conscience pour caresser la part obscure qui nous agite : l’amour, le sexe, le rêve, la mort. Son écriture, onirique, puissante, suit les fougues de l’instinct animal, les blessures du désir, et s’ébat rageusement dans les fantasmagories d’un imaginaire luxuriant : le Flamand possède la magie insomniaque des conteurs… Mêlant la danse, le théâtre et le cinéma, il trame le secret du vivant en fictions heurtées de la destinée humaine où l’élan vital conjure la fièvre noire des visions du néant. Avec Puur, il puise dans les anciens mythes et excise les tumeurs sanieuses de notre époque : massacre d’innocents, purification ethnique, aliénation au pouvoir, souffrance du deuil, peur de l’inconnu… Autant de tragédies trop souvent silencieuses qui lacèrent l’humanité et ébranlent notre « innocence » au plus intime. La gestuelle sculptée par les vibrations intérieures des danseurs, les mots du Néerlandais P. F. Thomése, les sonorités ombrageuses de David Eugene Edwards (du groupe 16 Horsepower) tout comme les images projetées sur le plateau, tressent les fils d’une histoire universelle. Wim Vandekeybus (photographe de formation) réalise ici l’osmose entre la scène et l’écran. Puur, fresque crépusculaire pour 13 danseurs, tonne comme un acte de résistance G. D. face à la violence du monde. Wim Vandekeybus, ph. J.-P. Stoop * Un parcours que le Théâtre de la Ville accompagne depuis 1990. Sankai Juku, ph.T. Valès/Enguerand Odile Duboc, ph.Enguerand coule ? De l’abandon à la pesanteur où la verticale se source ? Des coulés et rebondissements en lesquels le groupe bouillonne ? Il faudra se rafraîchir, toujours et encore, à ce cours de la danse en sa course. G. M. THEATRE DE LA VILLE • TARIF B DU 15 AU 30 DÉC. Sankai Juku THEATRE DE LA VILLE • TARIF A DU 6 AU 10 DÉC. CRÉATION Odile Duboc CENTRE CHORÉGRAPHIQUE NATIONAL DE FRANCHE-COMTÉ-BELFORT Rien ne laisse présager de l’état de l’eau conception Odile Duboc et Françoise Michel 10 danseurs DU FLUX, DONT LA DANSE DÉCOULE « Elle est blanche et brillante, informe et fraîche, passive et obstinée dans son seul vice : la pesanteur […] […] Elle s’effondre sans cesse, renonce à chaque instant à toute forme, ne tend qu’à s’humilier, se couche à plat ventre sur le sol […] On pourrait presque dire que l’eau est folle, à cause de cet hystérique besoin de n’obéir qu’à la pesanteur… » Odile Duboc aime citer Francis Ponge, pour évoquer sa nouvelle grande pièce Rien ne laisse présager de l’état de l’eau. Elle n’est pas de ces artistes qu’impressionne la girouette des tendances. Croisant les lumières-univers de Françoise Michel, la chorégraphe invente des plastiques d’états de corps au monde, puisées à la pensée des éléments fondamentaux : air, terre, feu, et eau. Imperturbable et sûre, son œuvre parut abstraite quand la danse des années 80 se payait de surenchère visuelle. Intense et fine, elle paraît si dansante, quand la pensée chorégraphique s’est faite plus conceptuelle. Ainsi Odile Duboc articule-t-elle un propos dans son époque, comme un repère essentiel. Et on trouve quelque chose de la déferlante, dans l’allant des énergies nombreuses rassemblées pour de patients mois de préparatifs de Rien ne laisse présager de l’état de l’eau. Qu’en est-il du flux dont la danse dé- Ushio Amagatsu DU 15 AU 21 DÉC. 1er PROG. création 2005 CRÉATION 7 danseurs DU 27 AU 30 DÉC. 2e PROG. Kinkan shonen RE-CRÉATION (Graine de cumquat) Incontestablement, Ushio Amagatsu pose sur scène un geste artistique qui puise autant à la danse qu’à la poésie et à la philosophie. Le tout dans un même mouvement et l’évidence d’une pensée libre qui a trouvé dans la chorégraphie son mode majeur. C’est à travers le corps, instrument d’émotions aux mille nuances dont Ushio Amagatsu traverse les couches les plus intimes, qu’il a raffiné sa compréhension de lui-même et du monde. Ce maître du butô, mouvement chorégraphique japonais né dans les années 50, n’a de cesse depuis près de trente ans de nous transporter dans des sphères mentales et sensibles inexplorées. Pour ce nouveau programme, il reprend sa pièce fondatrice Kinkan shonen (Graine de cumquat), conçue en 1978, dans laquelle il rêvait du mystère des origines au diapason de son enfance passée au bord de la mer. Pour la première fois, il transmet son rôle, qu’il a découpé en trois partitions, à trois interprètes. Parallèlement, il propose une nouvelle pièce pour sept danseurs dont le titre, comme à son habitude, n’apparaîtra et ne sera connu que quelques semaines avant la création du spectacle. Plus que jamais proche de lui-même dans son absolue singularité, il y fouille cette notion fondatrice et insaisissable qu’est le temps. Chaque seconde, dans son intemporalité, représente à elle seule une goutte d’éternité dont Amagatsu compte bien extraire l’essence même d’un être au monde, ici et maintenant. Jeanne Liger Alain Platel, ph. X. DR nuances. Alain Platel, chorégraphe des polyphonies bigarrées, ne pouvait trouver là meilleure invitation à célébrer l’essence des singularités humaines, non comme division à l’infini d’identités irréconciliables, mais comme humus d’une appartenance commune, chorale, au mystère du monde. J.-M. A. ALAIN PLATEL AU THÉÂTRE DE LA VILLE fév. 96,97 La Tristeza complice mai 98 Iets op Bach fév. 00 Iets op Bach mai 00 Tous des indiens (Arne Sierens) THEATRE DE LA VILLE • TARIF A DU 28 FÉV. AU 4 MARS Marie Chouinard COMPAGNIE MARIE CHOUINARD THEATRE DE LA VILLE • TARIF EXCEPTIONNEL création 2005 CRÉATION 10 danseurs DU 16 AU 25 FÉV. Alain Platel BALLETS C. DE LA B. Vespers CRÉATION musique Monteverdi, Les Vêpres 10 danseurs/10 chanteurs et musiciens en coproduction avec l’Opéra national de Paris Avec un brio où grâce et trivialité imbriquent leurs racines, Alain Platel a déluré la danse contemporaine – comme seule avant lui, Pina Bausch l’avait entrepris –, faisant cabaret d’un théâtre des corps livrés à l’audace de leurs débords. En poète du désordre, il a semé pour longtemps, avec les fresques pagailleuses des Ballets C. de la B., l’insolente vitalité d’une humanité de bric et de broc. Il a trouvé le juste ton d’une théâtralité de la déglingue, heureusement affranchie, cependant, d’un réalisme social auquel certains esprits grincheux voulaient le réduire. Abordant enfin quelques-uns des sommets du répertoire musical, il a donné forme, sur le vif d’une verve expressive haute en couleur, à une sorte d’opéra contemporain fort éloigné des conventions du genre. Convoquant la musique de Purcell (transposée à l’accordéon) dans La Tristeza complice, il a réédité de semblables aventures en compagnie de Jean-Sébastien Bach avec le tumultueux Iets op Bach, puis de Mozart dans le récent – et tout aussi intrépide – Wolf. Sa prochaine création se profile dans les chaudes couleurs de Monteverdi. Le madrigaliste italien, précurseur de l’opéra au tournant des XVIe et XVIIe siècles, avait déjà inspiré voici quelques années le mémorable Ottone, Ottone d’Anne Teresa De Keersmaeker. La chorégraphe avait alors puisé dans Le Couronnement de Poppée les fils chatoyants d’une fresque riche en surprises. Alain Platel, pour sa part, jette l’ancre dans Les Vêpres de la Vierge, monument d’art sacré publié par Monteverdi à Venise en 1610. Sans affectation religieuse, gageons que le chorégraphe saura trouver la façon de transposer dans un certain paroxysme expressif les psaumes, antiennes et Magnificat qui charpentent ces Vêpres. Monteverdi y joue à merveille d’une palette où chœur et orchestre déposent de multiples Profondément païenne, parfois même hérétique ; animiste en diable et tellurique dans son énergie, Marie Chouinard peut à juste titre considérer la danse comme « un vibrant appel à la liberté d’être ». En d’autres circonstances, la formule semblerait banale, gratuitement incantatoire. Mais toute l’œuvre de la chorégraphe canadienne en dit au contraire la pertinence. De 1978 à 1990, c’est exclusivement en solo qu’elle élabore un vocabulaire tout à fait personnel, aux confins de la performance, faisant de son propre corps la forge malicieuse d’une beauté incandescente, catalysant un mouvement viscéralement organique. Consacrée à New York par un Bessie Award en 2000, après avoir constitué sa compagnie dix ans plus tôt, Marie Chouinard a su transmettre et communiquer à des interprètes totalement investis une vision de la danse profondément ancrée dans un corps souterrain, archaïque, qui continue de modeler nos pulsions de vie. Le Cri du monde, pièce cataclysmique, et Chorale, tout en cadence de souffles et de voix, sont deux des spectacles emblématiques grâce auxquels le public du Théâtre de la Ville a pu découvrir – et plébisciter – la densité d’un univers chorégraphique à nul autre pareil. Sans doute serat-on surpris d’apprendre que la prochaine création de Marie Chouinard, dévoilée à la prochaine Biennale de Venise, fera la part belle aux pointes de la danse classique. Sur les sonorités électroacoustiques de Louis Dufort, mais aussi sur les Variations Goldberg de Bach, la chorégraphe déploie une palette de variations sur « l’exercice de la liberté ». Entre ce qui entrave le mouvement et ce qui parfois le crée, la frontière est parfois ténue : pointes, donc, mais aussi prothèses, béquilles, harnais, cordes, figurent pour Marie Chouinard tout un attirail disciplinaire qui peut aussi devenir source de jeu et de plaisir. Avec une préoccupation constante qui traverse toute son œuvre : explorer, encore et toujours, le mystère insoluble du corps et du vivant, leurs fragrances à la fois subtiles et extravagantes, somptueuses et sauvages. J.-M. A. Marie Chouinard, ph. M. Chouinard Meg Stuart, ph. D. Meienberg THEATRE DE LA VILLE • TARIF A DU 15 AU 18 MARS Meg Stuart DAMAGED GOODS création 2006 CRÉATION musique Hahn Rowe 9 danseurs Il y a du corps, encore… Le cauchemar d’une société prophylactique, qui formerait autour des individus une bulle sanitaire les préservant de toute infection, de toute agression extérieure, de toute contamination, en bref de tout contact, tel que Meg Stuart et Benoît Lachambre l’évoquaient récemment dans une séquence de Forgeries, love and other matters, est un fantasme mortifère. Déjouer l’angoisse du contemporain, que trahissent les logiques sécuritaires qui hantent le champ politique comme l’espace intime, c’est ne pas craindre de s’y frotter. Si l’on a pu qualifier de « danse du désastre » les premiers spectacles de Meg Stuart, c’est bien que la chorégraphe américaine, aujourd’hui installée en Europe, choisissait de ne pas ignorer, dans sa quête de mouvement, les secousses, ravages et fragmentations à l’œuvre dans les sociétés modernes. Un corps ne se construit pas à l’exclusion de ce qui l’entoure. En danse, il en est tout particulièrement le réceptacle, parfois même le sismographe de tremblements encore souterrains. En leitmotiv d’un texte écrit pour la compagnie Damaged Goods, le critique et dramaturge Jeroen Peters interroge : « How to give discourse back to the body ? » (Comment restituer au corps son discours ?) Loin d’une « fiction abstraite » dont le corps serait l’essence désincarnée, Meg Stuart prône une « proximité sensorielle » avec ce qui affecte nos repères, paupérise nos expériences et désenchante nos horizons. Avec neuf danseurs, nomades du monde, qu’elle sédentarise à Berlin le temps volontairement long d’un laboratoire de création imprégné du dehors, Meg Stuart s’attaque aux peurs qui nous intoxiquent. Le meilleur remède n’est-il pas de s’auto-intoxiquer, par exemple en jouant à se faire peur, en ridiculisant la terreur et le sentiment de catastrophe, par une mise en scène exagérée des formes de la monstruosité ? Ce sont-là quelques-unes des pistes de jeu qu’explore aujourd’hui une Meg Stuart malicieusement sereine, critique et lucide mais cependant confiante dans une promesse de vie dont le corps demeure le laboratoire artisanal. J.-M. A. MEG STUART AU THÉÂTRE DE LA VILLE jan. 96 nov. 97 fév. 98 mars 99 fév. 02 juin 03 mars 05 No one is watching Crash Landing @ Paris Splayed mind out Appetite Alibi Visitors Only Forgeries, love and other matters (au Théâtre de la Cité Internationale) S. L. Cherkaoui, D. Jalet… ph. Enguerand THEATRE DE LA VILLE • TARIF B DU 4 AU 15 AVR. e 2 PROG. Angelin Preljocaj BALLET PRELJOCAJ Empty Moves (part I) (2004) création sonore John Cage, Empty words 4 danseurs Noces (1989) musique Igor Stravinski, Noces 10 danseurs voir article p. 22 piciennes. Sur une rotonde de briquettes trône l’ombre d’un échafaudage, métaphore de nos mémoires en chantier où se fondent vestiges d’avant et d’après : cette pièce collective oscillera entre désir de construction et tentation de déconstruction, entre ferveur sacrée et insolence profane. Les corps s’enroulent, se déplient, s’imbriquent et s’entrechoquent. Chacun apporte à la conversation son vocabulaire gestuel et son style chorégraphique. Duos magnétiques, figures giratoires, sauts élastiques se muent en postures christiques, tango voluptueux ou numéros de transformisme. D’avant procède par digressions et renversements au gré de cocasses saynètes : match de foot improvisé, défilé militant sous banderole ou encore procession de la mariée… Ce boy’s band audacieux singe avec humour les intégrismes et esquisse un tableau mosaïque bien de notre temps. G. D. THEATRE DE LA VILLE • TARIF B * D’avant a été coproduit et présenté par le Théâtre de la Ville en octobre 2002. DU 25 AU 29 AVR. Sidi Larbi Cherkaoui Damien Jalet Luc Dunberry Juan Kruz Diaz De Garaio Esnaola D’avant REPRISE BIS !!!! Ils sont quatre, personnalités pétulantes et danseurs talentueux qui se sont rencontrés à l’occasion d’une tournée. Présentation : Sidi Larbi Cherkaoui, Belgo-Marocain, et Damien Jalet, Belge, féru d’ethnomusicologie, issus des fameux Ballets C. de la B. ; Luc Dunberry, Canadien, et Juan Kruz Diaz de Garaio Esnaola, Espagnol, également chanteur, tous deux créatifs interprètes de Sasha Waltz. Et ces quatre-là prétendent former… Un « boy’s band médiéval » ! Projet un brin farfelu au premier abord. Mais ô combien réjouissant ! En témoigne le formidable succès lors de sa création au Théâtre des Abbesses*. Traversant le répertoire du VIIe au XIIIe siècle, le quatuor polyglotte conjugue en virtuose le chant a capella et la danse sous le signe de la fantaisie et du métissage. Ici, les inflexions méditerranéennes narguent les accents arabo-andalous, les chœurs grégoriens enlacent les mélodies galantes des chansons de cour. Nos trublions jouent autant des résonances entre les gestes et les vibrations de la voix qu’ils s’amusent à détourner imageries des bâtisseurs de cathédrale et figurines sul- THEATRE DE LA VILLE • TARIF B DU 3 AU 6 MAI REPRISE Jan Lauwers NEEDCOMPANY La Chambre d’Isabella 9 interprètes LE BONHEUR DES SENS À 94 ans, elle porte en elle un siècle d’histoire, une vie d’aventures. Elle a le ton léger, une présence souveraine, la voix rugueuse et le rire éclatant. Isabella Morandi, derrière ses lunettes noires, a perdu la vue mais ne manque pas de visions. Entourée de ses proches, elle est en visite parmi ses souvenirs, suivant le fil capricieux de sa mémoire. Reconstitution lacunaire que ses partenaires se chargent de compléter, contredire, embellir. Sentinelles attentives aux pièges de la fiction comme aux aspérités du réel, ils se relaient avec bonheur pour prendre en charge cette soudaine réapparition de la narration au théâtre. Une nouvelle voie ouverte par Jan Lauwers au sein d’une œuvre sertie de pertinences vagabondes, et qui vient encore creuser le langage polyphonique et en constant bouleversement du metteur en scène flamand. Dans ce rôle cousu main pour son talent, Viviane De Mynck est l’actrice au sens le plus incarné, fantasque, inattendu du terme. L’une Grace Ellen Barkey, ph. M. Vanden Abeele des muses de Jan Lauwers qui, depuis les débuts de la Needcompany qu’il dirige, partage cette recherche d’un théâtre de l’intuition aux multiples expressions. Par bribes, fragments, La Chambre d’Isabella * déploie le cours sinueux d’un récit charnel et fantaisiste. Entre fiction et réalité se dessine la biographie d’un personnage puissamment amoureux de la vie dont la naissance repose sur un secret, peut-être même un pieux mensonge. À la façon d’une partition musicale, texte, petites danses et chansons cisèlent les émotions, I. F. vers un théâtre de la félicité. Jan Lauwers, ph. M. Vanden Abeele * Coproduite et présentée la saison dernière au Théâtre de la Ville. THEATRE DE LA VILLE • TARIF A 23 ET 24 MAI Grace Ellen Barkey NEEDCOMPANY Chunking 6 danseurs CRÉATION D’origine indonésienne, Grace Ellen Barkey est une artiste européenne. Après une formation en danse à Amsterdam, elle a rejoint la Needcompany de Jan Lauwers, participant à la plupart de ses spectacles depuis 1986, y apportant une certaine nonchalance sensuelle, l’allant d’un jeu mutin, mais aussi la braise d’une intensité contenue. Cette « petite musique » intérieure, Grace Ellen Barkey lui a donné une singulière chambre d’écho dans les spectacles qu’elle a chorégraphiés et mis en scène au sein de la Needcompany, mais sous son propre nom, depuis 1992. Avec un zeste de joyeuse folie, elle a développé une forme de danse-théâtre totalement décomplexée, où tous les repères habituels (narratifs ou abstraits) ont volé en éclats. Ce fut d’abord sous l’apparence de fictions plus ou moins autobiographiques (One et Stories), puis en se saisissant de l’imaginaire du conte, que Grace Ellen Barkey a progressivement élaboré, la recette de fantasmagories pétillantes. Avec (And), que les spectateurs du Théâtre de la Ville ont pu découvrir en mars-avril 2004 au Théâtre de la Bastille, on se laissait aisément gagner par l’ivresse que procurait un cocktail délicieusement frappé où la danse, le théâtre et la musique concouraient à déborder la trame d’un conte chinois sur lequel régnait une princesse soucieuse de garder sa virginité. Dans Few things déjà, à partir du Mandarin merveilleux de Béla Bartók, un parfum d’Extrême-Orient distillait ses saveurs épicées. La création de Chunking pourrait bien se nourrir d’une telle veine, même si la chorégraphe signale juste, pour l’heure, que le titre de sa pièce est celui d’une ville en Chine. Mais chunking, ajoute t-elle, est aussi un terme de psychologie : « pour stocker les informations de façon sensée dans la mémoire, nous devons les diviser en morceaux (chunks) ». Dans la géographie mentale de Grace Ellen Barkey, l’inconscient est un volcan, et gare à l’éruption ! Il n’est pas sûr qu’à la fin de l’histoire, tous les morceaux soient recollés, mais même en miettes, le puzzle risque fort de ne pas être un jeu de patience. D’autant, nous dit-on, que le légendaire Kill your idols de Sonic Youth sera convoqué pour secouer les corps et faire pétiller leur voltage. J.-M. A. Sasha Waltz, ph. J.-P. Maurin THEATRE DE LA VILLE • TARIF A 25 MAI HORS ABONNEMENT Jan Lauwers NEEDCOMPANY Needlapb (2006) Il arrive parfois que le succès public de telle ou telle œuvre, et l’audience élargie qu’elle apporte à son auteur, soient fondés sur un malentendu : celui d’une « notoriété » à retardement, qui consacre des écritures novatrices alors que celles-ci commencent à se faner, ou en tout cas dont la fraîche vigueur des surgissements s’est muée au fil des ans en de reconnaissables figures de style. L’enthousiasme du public qui s’est porté la saison dernière, au Théâtre de la Ville, sur La Chambre d’Isabella de Jan Lauwers, échappe à un tel malentendu. Bien mieux, en n’étant soumis à aucun « racolage » médiatique ou publicitaire, ce succès aura témoigné, dans sa jeunesse même, de la force intacte d’un désir de théâtre renouvelé dans ses formes et ses contenus. Ce succès, enfin, avait ceci de réjouissant à Paris qu’il venait sceller une très longue fidélité entre le « théâtre d’art » de Jan Lauwers et le Théâtre de la Ville, qui a toujours soutenu et accueilli les réalisations du metteur en scène de la Needcompany depuis Need to know en 1987. En plus de quinze ans, le « théâtre postdramatique » de Jan Lauwers a fourni pas mal de bonheurs, dont la fougue était empruntée à la verve shakespearienne ou puisée aux sources d’un art de friction qui associe les bruits et les corps, les paroles et les mouvements, les musiques et les lumières. Plasticien d’origine, Jan Lauwers a conquis un épatant savoir-faire scénique. Mais le « savoir-faire » n’est pas une fin en soi. Et toujours l’artiste véritable devrait-il le risquer sur de nouveaux chemins. Renouant avec l’esprit de « nuits d’art » qu’il organisa alors qu’il sortait de l’École des Beaux-Arts d’Anvers, les Needlapb sont pour Jan Lauwers ce laboratoire vivant où prennent corps « des idées, des notes, des ébauches, des pensées éparses », sorte d’atelier généreusement ouvert au public des émulsions à venir. Jan Lauwers, ph. Needcompany J.-M. A. sion du précédent, l’examen d’une autre question, une rupture dans la continuité. Après avoir sondé les fissures d’une société allemande en proie au chamboulement de la réunification, elle s’éloigne du terrain sociopolitique et s’interroge sur ce qui fonde l’être : le corps, dont elle exprime tous les idiomes et les mélodies intimes dans une puissante trilogie (Körper, S et noBody *). Elle s’avance aussi vers une danse plus abstraite, qui trouve son plein épanouissement dans la pureté des Impromptus. La chorégraphe allemande n’en continue pas moins à empoigner le réel, à montrer les convulsions de notre temps, avec son style bien à elle, où se conjuguent force métaphorique des images, sculptées à même les corps, écriture ciselée du geste, fragilité et vigueur charnelle, trivialité et transcendance. Sa création 2005 s’aventure encore sur un autre territoire. Sasha Waltz veut travailler sur l’individu, tout en revenant à une dramaturgie plus théâtrale. Elle imagine un espace très concret, en permanente mutation, dans une atmosphère quasi surréelle : un lieu confiné de rencontres et de frottements des individualités. Comme toujours chez elle, l’improvisation se situe au cœur du processus de création. Avec sa nouvelle troupe permanente de 14 danseurs-chorégraphes, elle mène un laboratoire d’observation des métamorphoses de l’identité à l’épreuve de l’altérité. G. D. * Depuis 2000, le Théâtre de la Ville a présenté la majeure partie des créations de Sasha Waltz. THEATRE DE LA VILLE • TARIF B DU 30 MAI AU 10 JUIN THEATRE DE LA VILLE • TARIF B DU 10 AU 20 MAI CRÉATION Sasha Waltz SASHA WALTZ & GUESTS création 2005 14 danseurs Sasha Waltz a décidément l’âme nomade d’une exploratrice. Depuis plus de dix ans, elle compose par touches une œuvre polychrome qui puise dans des univers radicalement différents. De pièce en pièce, elle n’est ni tout à fait la même ni tout à fait une autre. Chaque spectacle vient comme la transgres- CRÉATION Anne Teresa De Keersmaeker ROSAS création 2006 15 danseurs tryptique sur la musique de George Benjamin, Dance Figures Béla Bartók, musique pour cordes, percussion et célesta Claude Debussy, Jeux Fase, en 1982 déjà, marquait le commencement infini d’un chemin déterminé, voire obsti- Pina Bausch, ph. L. Philippe A. T. De Keersmaeker, ph. P. Goethals né, où le corps joue dans la danse sa maîtrise et sa fougue. Ce chemin a posé ses premiers jalons dans les entrelacs répétitifs de Steve Reich, avant d’épouser les rythmes de Thierry De Mey, de voyager avec Bartók puis Mozart, Monteverdi, Ligeti et Ysaÿe, Bach, Miles Davis, et tout récemment la voix de Joan Baez, la scansion d’un raga indien et le jazz de John Coltrane. Défiant la doxa qui proclamait que la danse contemporaine s’était émancipée de la musique, Anne Teresa De Keersmaeker a au contraire renoué, entre danse et musique, un fructueux dialogue ; donnant à voir la musique, traduisant dans la forme chorégraphique – toute gorgée de ses élans et tourbillons, de son flux et de sa respiration – le patient tissage des structures et des émotions. Au fil des ans et des pièces, on aurait pu craindre qu’un certain savoir-faire dans l’ordre de la composition vienne étouffer l’aventure du « commencement infini ». Mais non : ce parcours est resté enjoué, et le dialogue des formes, toujours aussi vivant, demeure un chantier bien plus qu’un système de reproduction. Forcément, il y a un secret. Anne Teresa De Keersmaeker le livre bien volontiers, à l’approche de sa nouvelle création pour laquelle elle donne à nouveau rendez-vous à Béla Bartók (musique pour cordes, percussion et célesta), mais aussi à Debussy et à George Benjamin, un compositeur contemporain qui créera pour l’occasion Dance Figures. « La composition et le contrepoint, je ne m’en lasse pas. J’ai encore tellement de choses à faire et apprendre », confie-t-elle sans fausse modestie… La musique est pour elle, depuis longtemps, une ligne de cœur. Revenir inlassablement à ce que l’on aime et aimer le faire partager, fondent peut-être le plaisir et la nécessité du principe de répétition. Avec cette sublime qualité dont la danse cultiverait le désir : que la répétition soit chaque fois différente, qu’elle soit le ferment qui permette d’essayer de nouvelles rencontres. « Je n’ai encore jamais fait de chorégraphie sur des musiques pour orchestre à part La Nuit transfigurée de Schoenberg et Mozart avec Concert Arias », remarque Anne Teresa De Keersmaeker, et cette nouvelle création en sera, grâce à la résidence qui la lie à l’Opéra de la Monnaie, l’opportunité. Le chemin parcouru dessine le pas à venir. J.-M. A. THEATRE DE LA VILLE • TARIF EXCEPTIONNEL DU 17 JUIN AU 4 JUIL. Pina Bausch TANZTHEATER WUPPERTAL création 2005 CRÉATION résidence à Séoul Au fil des années, Pina Bausch a redessiné une carte du Tendre qui lui est personnelle, autant d’escales chorégraphiques au long cours. « On me demande parfois si je me sens européenne : mais je ne sais pas où sont les frontières, les limites », dit-elle. De l’Europe du Sud (Rome, Palerme et par extension Istanbul) à l’Amérique Latine (Rio de Janeiro ou Buneos Aires), la chorégraphe de Wuppertal, nomade des temps modernes, s’installe ainsi dans chacune de ces villes pour des résidences avec ses danseurs : il s’agit alors de s’imprégner des odeurs, des couleurs, des gestes d’une cité et de ses habitants. De retour en Allemagne, la compagnie se remet au travail pour enfin donner forme à ses miracles de représentations. Séoul, capitale d’une Corée du Sud entre miracle (mirage ?) high-tech et traditions redécouvertes, est cette nouvelle étape. D’un décor aux allures de glacier, imaginé par son complice Peter Pabst, la chorégraphe fait, par la magie de projections, une montagne fleurie, un bord de mer déchaînée, un feu d’artifices aussi. Portés par des mélodies coréennes et des tambours, les solos des danseurs, souvent longs, sont comme des respirations, artères qui irriguent une pièce d’une infinie richesse : peut-être l’une des plus ambitieuse de la troupe. On rit parfois à ces trouvailles – comme cette cordée d’alpinistes qui croise un couple de danseurs en pleine parade amoureuse –, on s’émerveille toujours à cette danse des signes où chaque détail touche au coeur. Apaisée, Pina Bausch raconte un peu de chacun à travers ces corps qui s’emboîtent, ces mains qui se frôlent, ces courses qui n’en finissent pas. Le mouvement ne fait qu’un avec une nature retrouvée, ici un tronc d’arbre, là des feuilles de salade : à un instant du spectacle, des oreillers se mettent à voler. Sans effets spéciaux. Une tête vient s’y poser. Comme si Pina Bausch détenait la clef de nos songes. Ph. N Koen Augustijnen, ph. Enguerand DANSE AUX ABBESSES Robyn Orlin ph. J.-P. Lozouet, Vera Mantero ph. X. DR improbable scénario taillé sur mesure pour une autre artiste iconoclaste, Vera Mantero, chorégraphe et performer portugaise qui a eu l’audace de demander une danse à Robyn Orlin. De la hardiesse et une même énergie de survie, jubilatoire et sauvage, animent les gestes des deux artistes qui ont décidé de créer ensemble cette pièce au sourire grinçant. Environnée d’objets particuliers, nécessaires et disponibles, Vera Mantero, poétesse du corps, dont les images cristallisent le fort impact physique, plastique et littéraire de ses propres pièces, se transforme à vue, sous le regard de la chorégraphe sud-africaine. I. F. LES ABBESSES • TARIF A DU 11 AU 15 OCT. LES ABBESSES • TARIF A Robyn Orlin Vera Mantero DU 2 AU 5 NOV. CITY THEATER & DANCE GROUP O RUMO DO FUMO Hey dude... I have talent... I'm just waiting CRÉATION for God... Hé mec… J’ai du talent… J’attends Dieu c’est tout… solo pour et avec Vera Mantero LE SOURIRE DES MOUTONS Mais qui donc connaît Nosingle Smau, cette femme de quarante-cinq ans, et la précieuse recette culinaire qui a fait sa réputation et changé sa vie ? Ce délicieux smiley, un mets exclusif à base de tête de mouton bouillie, qui la voit à l’aube de chaque matin prendre le train pour la ville et se procurer la friande marchandise qu’elle transporte dans un vieux chariot. Lucrative activité que ce commerce sans corps, boucherie de la pauvreté qui lui a permis d’abandonner sa cabane qui brûlait régulièrement l’obligeant sans cesse à tout recommencer, et de s’acheter une maison. Un luxe. Nosingle Smau peut être fière. Sans aucun doute, Robyn Orlin, aura tiré cette anecdote de son pays natal, l’Afrique du Sud. Intarissable source de création, de réflexion et d’engagement qu’elle met en jeu avec un humour décapant dans chacun de ses spectacles. Dans Hey dude… I have talent… I’m just waiting for God (traduire : « Hé mec… J’ai du talent… J’attends Dieu c’est tout »), l’incroyable histoire de Nosingle Smau devient un Koen Augustijnen BALLETS C. DE LA B. Bâche REPRISE D’UN TRIOMPHE composition, arrangement musical, piano Guy Van Nueten Steve Dugardin chant Koen Augustijnen, c’est d’abord, pour faire simple, une silhouette, un grand "brin" de garçon au sourire contagieux, que certains ne manquèrent pas de repérer dans les créations d’Alain Platel et des Ballets C. de la B. Au sein de ce collectif belge, Koen Augustijnen a su saisir l’opportunité offerte et présenter ainsi To Crush time puis Just another landscape for some juke-box money, premiers galops d’essai en tant que chorégraphe. Chez Koen Augustijnen, il y a cet art si délicat du télescopage, musical tout d’abord avec Bach, Schubert et du rock, chorégraphique ensuite, danse et haute voltige pour ainsi dire. Bâche, sa troisième pièce impose enfin son talent : une reprise ici-même aux Abbesses, une belle tournée européenne. Bâche est un quatuor d’hommes qu’accompagne la voix d’un ange, Steve Dugardin chantant Henry Purcell, et les harmonies de Guy Van Nueten. Koen Augustijnen a travaillé sur les peurs enfouies en chacun tout autant que sur une belle idée, celle d’une communauté au masculin. Bâche est ainsi traversé de moments de grâce brute : la procession d’un danseur sur le corps de ses compagnons d’un soir, un interprète qui se "pend" littéralement au cou de l’autre, décidé à ne pas le lâcher comme si sa vie Madhavi Mudgal et Alarmel Valli, ph. S. Anwar Ph. N. LES ABBESSES • TARIF A DU 11 AU 15 AVR. Alarmel Valli Madhavi Mudgal Samanvaya CRÉATION conception, chorégraphie et interprétation Alarmel Valli et Madhavi Mudgal avec 10 musiciens Du jamais vu ! Deux danseuses traditionnelles indiennes, deux stars incontestées de la scène chorégraphique, décident de partager le plateau le temps d’un spectacle. Il faut s’appeler Madhavi Mudgal et Alarmel Valli pour s’offrir cette parenthèse de jeu dans un emploi du temps qui laisse peu de place aux expériences inédites. Il faut aussi oser se confronter l’une à l’autre. Plus aventureuses dans l’âme que crispées sur leur territoire, les deux femmes ont sauté le pas et imaginé un dispositif spectaculaire qui les met respectivement en valeur tout en proposant des moments de dialogues. À main droite, Madhavi Mudgal ravit par la sensualité dégagée, sans l’ombre d’une coquetterie, avec laquelle elle fait décoller l’odissi, danse lyrique originaire de l’État d’Orissa (nord-ouest de l’Inde), vers des sommets de jouissance chorégraphique. Tout en mouvements de torse, rotations, bonds légers, l’odissi, inspiré par les mouvements de la végétation et des animaux, ruisselle comme de l’eau vive. À main gauche, Alarmel Valli, éblouissante interprète de bhârata natyam, sait aujourd’hui plus que jamais en extraire la saveur intime. Géométrique, tiré au cordeau, le bhârata natyam, né dans le Tamil-Nadu (sud-ouest de l’Inde), dessine une silhouette aux lignes limpides, ébranlée par les rythmes des pieds. On suspend son souffle pour savourer la rareté de ce face-àface qui ouvre les portes d’une étude comparée passionnante des deux styles de danse. J. L. LES ABBESSES • TARIF A DU 23 AU 27 MAI Mercedes Ruiz COMPAGNIE MERCEDES RUIZ Dibujos en el aire flamenco avec 2 guitaristes, 2 chanteurs et 2 percussionnistes Native de Jerez, Mercedes Ruiz est devenue à 25 ans le plus bel espoir du flamenco : dans son parcours sans faute, après le temps des cours qu’elle fréquente, vient, en 1986, Semilla flamenca d’Ana Maria Lopez, son premier engagement professionnel. On retrouve par la suite la danseuse en tournée avec Manuel Morao : elle séduit déjà par ce baile intemporel. Mercedes Ruiz n’en oublie pas ses racines et dès qu’elle le peut, fréquente les penas comme les festivals andalous, autant de retours aux sources. En 1998, on l’applaudit dans Vivencias d’Antonio El Pipo. Vont suivre deux rencontres d’importance : Eva Yerbabuena pour 5 Mujeres 5, puis Andrés Marín avec Más allá del tiempo, deux artistes flamencos passés par le Théâtre de la Ville. Il était temps alors pour Mercedes Ruiz de se présenter seule en scène : elle signe des spectacles remarqués, Dibujos en el Aire (dessins dans l’air) puis A Antonio Gades, hommage au célèbre maître, disparu il y a peu, qui aura marqué le flamenco de son empreinte, et Gestos de Mujer (Gestes de femme). De Mercedes Ruiz, on dit que sa siguiriya est fabuleuse : sa danse est alors épurée, lente et solennelle. Son allure, sa robe à traîne qu’elle semble manier avec une grâce irréelle, en font une reine flamenca à la distinction innée. Enfin son zapateado (la frappe des pieds au sol) remarqué pour sa virtuosité, en fait la digne héritière d’une grande lignée de puristes flamencos. Au Théâtre des Abbesses, écrin de rêve pour Mercedes Ruiz, elle nous offrira la primeur de sa dernière création où la passion de la danse s’accorde Ph. N. avec son tempérament flamenco. Mercedes Ruiz, ph. K. Handner en dépendait. Tayeb Benamara, Ghislain Malardier et Ted Stoffer, qui accompagnent Koen Augustijnen dans cette odyssée de poche, semblent à l’aise dans les extrêmes, laissant çà et là apparaître leur formation mêlée, classique, hip-hop, cirque ou contemporain. Guy Cools, le dramaturge de Bâche, les prend pour ce qu’ils sont, des sacrés tempéraments qui dansent et jouent comme ils respirent et, au final, nous bouleversent. J.-Cl. Gallotta, ph. L. Philippe Jan Fabre, ph. L. Philippe LES ABBESSES • TARIF A DU 30 MAI AU 3 JUIN REPRISE Jan Fabre TROUBLEYN Quando l’uomo principale è una donna solo dansé par Lisbeth Gruwez REPRISE D’UN CHEF-D’ŒUVRE ! Artiste polymorphe, Jan Fabre exhume au scalpel la beauté sauvage ligotée par les rets effarouchés de l’ordre moral et le parangon de nos icônes aseptisées. Provocateur ? Hérétique ? Oui, si l’on nomme ainsi ceux qui résistent à la normalisation de la pensée. Cet esthète frondeur exalte le corps et ses fureurs, ses interdits et ses ravissements, libérant les forces primordiales des censures (sensures ?) liquoreuses de la convention. Mais Jan Fabre est aussi un amoureux des femmes. Il sait leurs mystères, leurs batailles secrètes. Il en cerne les ombres et les éclats avec la finesse du peintre. Quando l’uomo principale è una donna *, solo dédié à la somptueuse Lisbeth Gruwez, une de ses danseuses favorites, joue sur les frontières incertaines de l’identité : « Quand l’homme principal est une femme. » Au plus intime de l’homme, la femme ? Créature bisexuée en veste et pantalon noir, Lisbeth Gruwez caresse crânement les billes sonores qui lui servent d’attributs virils, tandis que s’égrainent les accents italiens de Volare, ritournelle que Domenico Modugno composa dans les années 70 en hommage au saut dans le vide d’Yves Klein. Prélude railleur au prodigieux sabbat qui va suivre… L’androgyne étreint violemment le sol et s’emporte dans une danse effrénée entre les flaques d’huile d’olive que des bouteilles suspendues répandent goutte à goutte. Bientôt, la matière luisante couvre tout le plateau. L’hermaphrodite ôte le costume qui bride sa féminité : elle roule dans le liquide, glisse, s’ébroue, tournoie, sublimement nue, d’une nudité audelà du sexe, au-delà de la transgression. Ruisselante, sensuelle, l’énergie fulgurante et le geste sculpté, elle a la beauté libertaire d’une vierge guerrière, elle est la béance de G. D. l’origine du monde. * Créé en avril 2004 au Théâtre des Abbesses. LES ABBESSES • TARIF A DU 6 AU 17 JUIN Jean-Claude Gallotta Ballet de Lorraine Docteur Labus RE-CRÉATION 9 danseurs En 1988, le public passablement émoustillé découvrait Docteur Labus, nouvelle pièce de Jean-Claude Gallotta, ce franc-tireur de la danse installé à Grenoble, passé par le New York vivifiant des années 70 et qui osait réunir danseurs, acteurs et musiciens dans son groupe Émile Dubois. Ce docteur Labus, Gallotta l’avait paraît-il rencontré au Mexique : un drôle de gus, marié à 4 femmes en même temps dans 4 villages différents ! Labus lui raconta sa vie tumultueuse, ses passions, ses émois. Il en résulta un ballet avec des duos et pas mal de libertinage, une danse infiniment libérée des conventions, un hymne à la vie. Jean-Claude Gallotta y reviendra d’ailleurs en1996. Aujourd’hui, c’est au tour du CCN Ballet de Lorraine, sous la direction de Didier Deschamps, de se glisser dans la "peau" du Docteur Labus : des quatre actes de la chorégraphie d’origine, la fougue initiale est intacte. On retrouve ces pas de deux décalés, ces dialogues au corps, ces couples de danse jusqu’à « l’épuisement permanent des passions fugitives ». Les interprètes du Ballet de Lorraine se donnent tout entiers à cette partition de sens et de sueur, portés par la musique originale du tandem Henry Torgue et Serge Houppin. La compagnie installée à Nancy ne cesse de surprendre son monde, à l’aise dans les univers variés de Karole Armitage ou de Malou Airaudo, de Russell Maliphant ou du jeune Christophe Béranger. Ce Docteur Labus de Jean-Claude Gallotta, Claudio Brizi, ph. X. DR Maria-Kiran, ph. J. Gros-Abadie Priyadarsini Govind, ph. X. DR plus que bienvenu dans un répertoire en perpétuelle évolution, est de ces rencontres merveilleuses qui scellent l’histoire d’amour d’une Ph. N. compagnie et d’un chorégraphe. LES ABBESSES • TARIF A DU 27 AU 30 JUIN Priyadarsini Govind bhârata natyam 4 musiciens CRÉATION Encore peu connue en France, la danseuse indienne Priyadarsini Govind a des chances de ne pas le rester bien longtemps. Originaire de Tanjore, cette experte en bhârata natyam qui avait mis sa carrière entre parenthèses pour élever ses enfants, a raffiné depuis de longues années une virtuosité sans appel : la beauté abstraite de son geste possède un impact émotionnel fort. Sans doute, son besoin irrépressible de danser, son urgence à articuler dans un même élan sa vie d’artiste et de femme, chargent-ils son art d’une saveur toute particulière. Élève à Madras des gurus Swamimalai K. Rajarathnam et Smt. Kalanidhi Narayanan, elle se révèle aussi libre et vibrante dans le nritta (danse pure, très technique et d’une grande complexité rythmique) que dans l’abhinaya (danse expressive qui met en scène les différents personnages d’un poème). Face au plus ancien style traditionnel indien, né il y a quelque deux mille ans dans l’État du Tamil Nadu, dont les codes complexes et stricts exigent une précision imparable, sa rigueur et sa vivacité suggestive emportent le morceau. Pour son premier passage au Théâtre de la Ville, Priyadarsini Govind apparaît en solo. Elle a néanmoins demandé à sa complice et amie, la danseuse de bhârata natyam Élisabeth Petit, figure fameuse de la danse indienne en France, de l’accompagner dans l’élaboration du récital. Gageons que le regard affûté et généreux d’Élisabeth Petit saura mettre en valeur les nuances les plus fines de la singularité d’un J. L. talent. MUSIQUE/DANSE LES ABBESSES • TARIF A 13 ET 14 FÉV. Maria-Kiran Claudio Brizi claviorgan Bhârata/Bach CRÉATION une chorégraphie liturgique rencontre de deux grands arts savants et sacrés : les œuvres liturgiques et la danse bhârata natyam avec la participation de Gianfranco Borelli violon, alto Son talent saisissant allié à un esprit d’aventure aiguisé, distingue d’emblée Maria-Kiran parmi les jeunes interprètes de bhârata natyam. À 24 ans, cette danseuse classique indienne au style vif, dont l’élégance, résultat d’années d’apprentissage, s’affirme avec un subtil détachement, parsème sa carrière de jalons créatifs d’une puissante originalité. Dans ce duo intitulé Bhârata/Bach, elle partage le plateau avec le musicien italien Claudio Brizi, “claviorganiste”* et interprète fameux de Jean-Sébastien Bach. Sur une idée de Milena Salvini, directrice du Centre Mandapa à Paris, spécialiste des traditions indiennes et de la musique classique, cette pièce prend position sur un terrain inconnu : à l’intersection de la liturgie religieuse catholique et du déroulé d’un spectacle de bhârata natyam puisant ses sources dans l’hindouisme, de la musique de Bach et des rythmes d’une danse indienne vieille de plus de deux mille ans. Plus qu’une juxtaposition formelle, il s’agit d’une correspondance spirituelle entre les différentes étapes des deux cérémonies et surtout l’esprit qui en noue le sens profond. En complicité avec Claudio Brizi, les différents morceaux de Bach (cantates, messes et autres œuvres) déroulent le tapis sur lequel Maria-Kiran (chorégraphiée par Vidya) égrènera les moments-clefs d’un récital, évoquant l’ébranlement intime d’une âme en marche vers le divin, qu’on l’appelle Dieu ou Krishna. En quête d’une foi incarnée, Maria-Kiran et Claudio Brizi ouvrent un chemin J. L. résolument unique. * Claveciniste et organiste, Claudio Brizi a inventé le claviorgan, instrument qui associe au clavier du clavecin le dispositif des registres de l’orgue. MARIA-KIRAN AU THÉÂTRE DE LA VILLE bhârata natyam - solo bhârata natyam avec Shantala Shivalingappa Rachid Ouramdane, ph. Enguerand fév. 03 oct. 04 imagine déjà des frictions chorégraphiques riches de sens, un "en-commun" pour reprendre les termes d’Ouramdane, entre traditions brésiliennes et modernité actuelle. Un peu comme une continuité évidente dans cette histoire faite de partages et d’échanges qui scelle l’union fantasmée de la France et du Brésil. On retrouvera dans cette aventure quelques fidèles du créateur – Sophie Laly, Sylvain Giraudeau, Jean-Michel Hugo ou La Bourette – ainsi que des nouveaux venus Carlos Antônio dos Santos, Marcos Fauler Silva de Freitas, Wagner Schwartz et Pedro Pinto. C’est avec eux que Rachid Ouramdane entend élargir ces nouveaux horiPh. N. zons chorégraphiques. Rachid Ouramdane, ph. S. Laly DANSE HORS LES MURS CITÉ INTERNATIONALE • TARIF C DU 5 AU 10 JAN. Peeping Tom CIE PEEPING TOM Le Salon 4 danseurs-interprètes 1 mezzo-soprano et 5 musiciens CENTRE POMPIDOU • TARIF C DU 25 AU 29 JAN. Rachid Ouramdane ASSOCIATION FIN NOVEMBRE Cover 4 interprètes CRÉATION D’abord interprète remarqué auprès d’Emmanuelle Huynh, Hervé Robbe, Odile Duboc, Meg Stuart, Alain Buffard ou Christian Rizzo – des choix qui résonnent comme autant de partis pris forts –, Rachid Ouramdane a cofondé l’Association fin novembre en 1996 avec Julie Nioche, un « lieu de recherche et de production artistique qui place le corps au centre de leurs enjeux respectifs ». Les univers de Rachid Ouramdane sont riches de rencontres et d’ouvertures, notamment vers les nouveaux médias numériques. De ces perspectives singulières, un corps démultiplié mais également intime, Rachid Ouramdane fait ses sujets d’étude : on l’a vu à l’œuvre dans des projets comme, Au bord des métaphores, + ou – là ou Les Morts pudiques. Sa nouvelle pièce fait suite à des voyages au Brésil, pays de tous les possibles. Sensible à cette culture où cohabitent des rites anciens dans une société moderne aux influences occidentales, africaines et amérindiennes, le chorégraphe a invité des artistes brésiliens à penser avec lui le "métisse contemporain". On UNE PROFONDEUR FLAMANDE La vieille dame est emportée vers l’hospice mais son époux s’obstine, maladroit, splendide carcasse de noble ancêtre en déroute. Autour de lui tout lâche, inexorablement. Partage furtif des lambeaux de la prospérité passée. Improbables alliances nouées parmi les plus jeunes. Dans Le Salon, une époque s’éteint, au clair-obscur des maigres passions familiales. Un clan étouffe, tout en rendant ses derniers feux magnifiques, tels les chants bouleversants de la mezzo-soprano que compte l’équipe de Peeping Tom. Ce collectif d’artistes flamands est l’un des derniers satellites nés dans la galaxie scintillante des fameux Ballets C. de la B./Alain Platel, qui, à l’image d’un big bang permanent, n’a pas fini d’éclairer l’univers scénique européen. Plus particulièrement, chez Peeping Tom, une intense profondeur célèbre la séparation complice du théâtre et de la danse. Sans naturalisme, le premier est sobre, presque glaçant. Sans tapage, la seconde ouvre les brèches où vibre le trop plein des pensées claquemurées. Le geste crève la saturation de l’espace. On n’est pas près d’oublier l’incroyable épanchement d’interminables baisers, zigzaguant autour de têtes à la renverse qu’on croirait en train d’être dévissées des corps. Sourdes, des chutes convulsives fracassent au sol un monde épuisé d’apparences. Sous les ors fanés du Salon, se lit une dense poésie chorégraphique, étonnamment singulière. G. M. Peeping Tom, ph. X. DR François Verret, ph. S. Blum CITÉ INTERNATIONALE • TARIF C DU 14 AU 26 MARS Josef Nadj CENTRE CHORÉGRAPHIQUE NATIONAL D’ORLÉANS CITÉ INTERNATIONALE • TARIF C Last Landscape CRÉATION DU 2 AU 11 MARS François Verret COMPAGNIE F. V. Tokyo Musil CRÉATION mise en scène et jeu François Verret images Sylvie Blum, François Verret Comment figurer l’éclatement du moi, saisir l’énigme d’une relation amoureuse, d’une foule, d’une ville, la consistance d’une époque ? Chez François Verret, la perception du réel passe par ce questionnement incessant. Aux réponses définitives qui espèrent l’enclore dans des définitions, il préfère le principe d’incertitude, l’expérimentation, le déséquilibre fécond du doute. Autrement dit, scruter le rapport à la réalité, à ses lois, à ses évidences, tâtonner, toujours, encore, pour frôler l’ombre mouvante d’une vérité, irrémédiablement temporaire. C’est à cet exercice passionnant que nous convie le chorégraphe avec Tokyo Musil, tout à la fois journal intime d’un périple amoureux dans la capitale japonaise, exploration des visages du désir dans les paysages de notre hypermodernité et introspection sur les prismes de la subjectivité. Créé en marge de Chantier Musil *, traversée chorégraphique de L’Homme sans qualité de Robert Musil, ce carnet de voyage reprend les interrogations que distille le roman. Au départ, il y a le projet d’un film à réaliser à Tokyo, un homme et une femme dans une chambre d’hôtel, qui se livrent à l’expérience de l’« essayisme perpétuel » selon l’expression de Musil. Ils parlent, filment, se cherchent, s’aiment, se disputent… Comment capter le mouvement de la vie diffracté par le regard de nos affects ? Sur le plateau, des images tissent leurs récits sur trois écrans, se répondent ou s’ignorent, des paroles chuchotent des impressions, des gestes surgissent en échos : autant d’éclats d’un réel morcelé qui s’entrelacent pour recomposer le flux des sensations. François Verret, relié par des fils à un pantin, son double, mène la danse de cette méditation sensible et exigeante. G. D. * Coproduit et présenté au Théâtre de la Ville en novembre 2003. solo dansé par Josef Nadj musique en direct Vladimir Tarasov ENTRE MUSIQUE ET DANSE Last Landscape, ce « dernier paysage » créé par Josef Nadj, est le fruit d’une écoute extrême, un retour à l’essentiel : « Tout comme l’environnement sonore de la nature tient parfois de la symphonie, la musique en scène me semble être le plus juste rapport avec le mouvement ». Aussi le chorégraphe a-t-il imaginé un espace de partage entre Vladimir Tarasov, compositeur et percussionniste et lui-même, danseur mais aussi plasticien à ses heures. Dans le théâtre d’ombre et de métamorphose où se joue l’ensemble des pièces de Josef Nadj, un nouveau processus est à l’œuvre. Plutôt que de s’appuyer sur la vie et les textes d’auteurs choisis, genèse plus habituelle dans la démarche de l’artiste, le chorégraphe travaille exclusivement à partir du corps, de la perception et de la mémoire d’un lieu qu’il fréquente régulièrement : une terre presque vierge – si ce n’est les quelques animaux qui la visitent – proche de son village natal, en Voïvodine, ex-Yougoslavie. Du sol désertique et argileux jaillit parfois une source à l’origine de nombreuses légendes. Dans ce paysage austère, qui n’aurait accueilli que des peuples des temps lointains aujourd’hui disparus, nulle trace de civilisation. « Mais pour combien de temps ? », se demande l’artiste. Les deux silhouettes de clowns qui apparaissent au début de la pièce, ont un projet impossible : transposer le paysage en tableau, la scène en surfaces et volumes, s’attacher au geste du peintre, chorégraphier ces petits mouvements élémentaires, archaïques qui précèdent l’œuvre. Entre images et sons, la mise en scène de Josef Nadj parfois teintée d’ironie, multiplie les variations autour d’une intention qui tient de la démesure. Un autoportrait de l’artiste face au paysage. Le dernier. De la nature à la composition visuelle et musicale, tel est le propos de Last Landscape, énigmatique tableau vivant où se cristallisent différentes écritures mais aussi un mystère, celui de l’homme face à la création. I. F. Josef Nadj, ph. J. Nadj Christian Rizzo, ph. Enguerand l’espace, bien au-delà des habituelles "musique-et-lumières". Le performer fait bouger ces cadres. Prestidigitateur de l’existence, bricoleur génial d’une boîte à malices, artiste de l’escamotage et de la dissimulation, jouant de prothèses, de paillettes et de colifichets, il extrait la substance magnétique qui lui fait tutoyer le grandiose pathétique des émotions de star. À G. M. couper le souffle. Boris Charmatz, ph. S. Jayet Le spectacle a été présenté au CND en novembre 2004. CITÉ INTERNATIONALE • TARIF C DU 30 MARS AU 4 AVR. Christian Rizzo L’ASSOCIATION FRAGILE “Autant vouloir le bleu du ciel et m’en aller sur un âne.” performance Christian Rizzo traitement du son Gerome Nox installation lumières Caty Olive scénographie et objets Christian Rizzo DANS “PERFORMER” IL Y A FORMES Mais pourquoi les titres de pièces de Christian Rizzo sont-ils interminables ? Certes, parce que grand lecteur de littérature romanesque, il y puise ces phrases. Mais on aime aussi que ces amples formules suggèrent la mise en branle de forces au travail. Christian Rizzo est avant tout un performer. Il ne produit pas des pièces comme on organise une fabrication. Il met en place des éléments. Il permet que leur transformation opère. Il ne serait que l’un de ces éléments. Magicien quand même, exaltant le tourment baroque d’un principe créatif gaillardement mis en travers du cours de la destinée. Il ne faut donc pas considérer Autant vouloir le bleu et m’en aller sur un âne comme un solo de Christian Rizzo. C’est beaucoup plus vaste. Il en a fait la proposition. Volontiers plasticien, il en a architecturé les espaces insolites où il apparaît comme sur un plateauétabli, inséré dans un labyrinthe lié aux coulisses arrière. Et les lumières de Caty Olive, comme le son live somptueux de Gerome Nox, constituent des matières chorégraphiques. Elles façonnent physiquement THEATRE DE LA BASTILLE • TARIF C DU 29 MARS AU 8 AVR. Boris Charmatz ASSOCIATION EDNA Régi 3 danseurs CRÉATION avec Raimund Hoghe, Boris Charmatz et Julia Cima UNE RENCONTRE REMARQUABLE Régi. Chorégraphe : Boris Charmatz. Interprètes : Boris Charmatz, Julia Cima et Raimund Hoghe. Cette affiche se suffit de ce peu de mots pour signifier énormément. Pourtant insaisissable. Quelle fausse évidence travaille les promesses de cette rencontre remarquable ? Charmatz à l’écriture, c’est son rôle. Raimund Hoghe à l’interprétation, c’est exceptionnel. Mais tous deux sur le plateau, avec Julia Cima. Pas si simple, donc… Raimund Hoghe ? Artiste phénomène, voici plusieurs années qu’il inquiète et fascine, par la présence de sa morphologie contrefaite et la ritualisation de ses affects. Minimale et pourtant lyrique, il conduit sa cérémonie au MUSIQUE/DANSE CENTRE POMPIDOU • TARIF C 9, 10, 11 NOV. HORS ABONNEMENT Emio Greco Hanspeter Kyburz EMIO GRECO/PC Danse aveugle (1997) de Hanspeter Kyburz avec l’Ensemble intercontemporain (flûte, clarinette/clarinette basse, piano, violon et violoncelle) Double Points : + CRÉATION MONDIALE DE LA NOUVELLE VERSION chorégraphie Emio Greco et Peter Scholten solo Emio Greco musique Hanspeter Kyburz Ensemble interContemporain 6 musiciens direction Jean Deroyer et informatique musicale IRCAM avec l’IRCAM, l’Ensemble interContemporain, le Festival d’Automne à Paris, Les Spectacles Vivants-Centre Pompidou LA MUSIQUE DU CORPS Chez Emio Greco, chorégraphe italien et Pieter C. Scholten metteur en scène hollandais, chaque spectacle créé en tandem est un splendide défi poétique où se cristallise la danse, un langage en constante évolution. Au fil des ans, avec la série des Double Point 1 déclinant différents solos et duos sous forme d’essais chorégraphiques et des pièces de groupe comme Conjunto di Nero et Rimasto Orfano 2, les deux artistes ont patiemment creusé et poli une qualité de mouvement basée sur des correspondances de perception. Comme dans Bianco, Rosso ou Extra dry, leur première trilogie interrogeant les mystères du geste, cette réflexion est parfois simplement liée à une couleur. Plus récemment à un thème ou une musique, avec Orphée et Eurydice, leur premier opéra, créé en 2004. Minimale, condensée ou jaillissante, la danse fait naître des sensations, éprouver des émotions. Elle fait aussi de chaque création une aventure destinée à sculpter de médusantes fictions de chair. À l’origine de leur recherche, une question : « Où et quand le mouvement prend-il sa source ? ». Depuis la rencontre en 2004 avec le compositeur Hanspeter Kyburz, leur exploration du mouvement se poursuit avec un troisième complice. Né en 1960 au Nigéria, de parents suisses, celui-ci enseigne dans de nombreux studios d’électro-acoustique en Allemagne, Autriche et dans son pays d’origine. En parallèle, il a créé une dizaine d’œuvres depuis le début des années 90. Ses recherches portent sur la perception sensorielle et croisent des sources d’inspiration variées, sciences, littérature, cinéma. Double Point : +, nouveau dialogue entre danse et musique, met en scène les musiciens de l’Ensemble interContemporain et Emio Greco, dansant avec des capteurs fixés sur le corps. Des motifs sonores générés par les impulsions du mouvement sont intégrés à la composition. Immergée dans le monde des gestes, ses intuitions et ses visions, cette partition musicale et chorégraphique fait apparaître un nouveau réseau de signification. L’œuvre, paysage de mouvements dansés, crée en retour son propre environnement musical. Cet original travail d’échange en boucle précède une autre composition de Hanspeter Kyburz, Danse aveugle, pièce créée en 1997. Quintette de musique de chambre dont certains effets, rapidité et transformation, évoquent le mouvement d’une I. F. caméra. Double point 1 et 2, programme accueilli au Théâtre des Abbesses, en 2002. 2 Conjunto di Nero et Rimasto Orfano créations présentées au Théâtre de la Ville en 2003 et 2004. 1 Hanspeter Kyburz, ph. P. Gontier Emio Greco, ph. Henkwildschut comble d’une autofiction obstinée. Boris Charmatz ? Audacieux à qui tout sourit, il expérimente savamment une brillante déconstruction des ressorts de la représentation spectaculaire. Julia Cima ? Cette danseuse fine est une fidèle de ses recherches. Mais, impossible de chorégraphier Raimund Hoghe comme on le ferait de quiconque, fûtce le plus libre et sophistiqué des interprètes conceptuels. Depuis sa taille de nain émerge une démarche géante en singularité. Ne se présente-t-il pas au regard comme un medium spectaculaire en lui-même, une surface de projection, une énigme monumentale ? Peut-on seulement esquisser un cadre intellectuel préalable, qui résiste à l’impact de ce qu’il sera là, effectivement, sur le plateau ? Investir une présence immédiate, physiquement, et la déplier dans sa complexité à l’infini : le mouvement de la danse s’origine dans le vertige de cette définition. Où Charmatz G. M. bougera encore. MUSIQUE AU THEATRE DE LA VILLE GIL SHAHAM violon ITAMAR GOLAN piano TRULS MØRK violoncelle KATHRYN STOTT piano SCHUMANN - BEETHOVEN - CHOPIN - JANÁCEK DVORÁK - MOZART - PROKOFIEV KRONOS QUARTET piano HAYDN - SCHUMANN - RAVEL - BARTÓK DEZSÖ RÁNKI FELIPE PÉREZ SANTIAGO - GLENN BRANCA JIM THIRWELL… CAFÉ ZIMMERMANN MIDORI violon ROBERT MCDONALD BACH piano SCHUBERT - PROKOFIEV- BEETHOVEN FABIO BIONDI violon KENNETH WEISS clavecin BACH - BIBER - LOCATELLI JANA BOUSKOVÁ harpe MARIE-PIERRE LANGLAMET QUATUOR TAKÁCS MUZSIKÁS MÁRTA SEBESTYÉN Bartók et ses racines. Quand la musique populaire nourrit la musique savante harpe MOZART - C. P. E. BACH - DAMASE - RAVEL DE FALLA - BARTÓK QUATUOR TETZLAFF 3 CONCERTS EN 1 ALEXANDRA GROT HAYDN - SIBELIUS - SCHÖNBERG flûte REINECKE - STRAVINSKI - DOPPLER PETER LAUL AUX ABBESSES piano HAYDN - SCHUBERT QUATUOR ÉBÈNE BARTHOLD KUIJKEN flûte baroque EWALD DEMEYERE clavecin CARL PHILIPP EMANUEL BACH MOZART - WEBERN - HAYDN CÉLINE FRISCH MIKLÓS PERÉNYI violoncelle DÉNES VÁRJON piano BEETHOVEN - PROKOFIEV - SAINT-SAËNS DEBUSSY/ KOCSIS clavecin Aux sources du jeune Bach BACH - KERLL - BUXTEHUDE - FROBERGER FILOMENA MORETTI guitare SANZ - BACH - ALBENIZ - DE FALLA - TARREGA FRANK PETER ZIMMERMANN violon CHRISTIAN ZACHARIAS piano MOZART BANG ON A CAN ALL-STARS artiste invitée Iva Bittova violon PHILIP GLASS - JULIA WOLFE - FRED FRITH IVA BITTOVA TARIF D Dezsö Ránki, ph. X. DR Gil Shaham, ph. X. DR Café Zimmermann, ph. R. Davies MUSIQUE AU THEATRE DE LA VILLE SAM. 1er OCT. 17H GIL SHAHAM violon ITAMAR GOLAN piano DVORÁK : Romance en fa mineur op.11, version pour violon et piano MOZART : Sonate pour piano et violon en si bémol majeur, K 454 PROKOFIEV : Cinq Mélodies op. 35 Sonate pour violon et piano n°1 en fa mineur, op. 80 UN ANGE On le croirait descendu d’un tableau de Chagall : tout en fraîcheur, en tendresse. Il est joyeux, il est magique. Sa sonorité a les couleurs féeriques du peintre français d’origine russe. Son Stradivarius de 1699 aux nuances infinies peut, dit-il, en faire naître d’autres encore. Gil Shaham ne perdra jamais son âme d’enfant. Il a la grâce. Sur scène et dans la vie. C’est son sixième passage au Théâtre de la Ville où il est venu en 1992 pour la première fois. En janvier 2003, il donnait aux Abbesses un inoubliable concert avec Goran Söllscher à la guitare. À ses débuts, à l’âge de 17 ans (il en a maintenant 34), on disait déjà que la relève des Heifetz et autres Francescatti était assurée. Milstein, Stern sont également cités dans les récentes critiques de son dernier disque consacré à Prokofiev. Gil Shaham y interprète entre autres les deux œuvres qu’il joue en deuxième partie de son nouveau programme. En 1925, Prokofiev transcrit pour violon et piano les Cinq Mélodies sans paroles, dédiées à la cantatrice Nina Kochitz. La « diction » de Gil Shaham – c’est un violoniste conteur – y est parfaite. La Sonate n°1 opus 80 fut achevée en 1946. Selon le compositeur lui-même, « la bise souffle entre les tombes d’un cimetière dans l’andante assai tandis que l’allegro brusco » brosse une « bataille sur la glace et l’allegrissimo compte les morts ». Seul le troisième mouvement andante chante dans la sérénité. Une qualité que possède Gil Saham au plus haut degré. La Romance de Dvorák et la divine Sonate K 454 de Mozart l’exaltent. SAM. 19 NOV. 17H DEZSÖ RÁNKI piano HAYDN : Sonate en ut majeur, H XVI/48 SCHUMANN : Davidsbündlertänze (Danses des compagnons de David) op. 6 RAVEL : Valses nobles et sentimentales BARTÓK : Mikrokosmos – extraits En plein air, Sz 81 UN PRODIGE DEVENU ALCHIMISTE 1972 : Paris découvre médusé deux météores hongrois de 20 ans, Zoltán Kocsis et Dezsö Ránki. C’était au Théâtre de la Ville où les deux pianistes sont souvent revenus. Pour son treizième concert, Dezsö Ránki propose un programme sous le double signe de la danse et de l’introspection. L’andante con espressione de la Sonate en ut majeur H XVI/48 de Haydn a des allures de menuet, et le rondo de mouvement perpétuel. Le nom même de danse est dans le titre des Davidsbündlertänze de Schumann inspirées par son amour pour Clara. « Toujours à tout moment, plaisir et peine sont liés, restez pieux dans le plaisir et soyez prêts à affronter la peine », avait-il écrit en tête de ce fabuleux kaléidoscope d’états d’âme. « Le plaisir délicieux et toujours renouvelé d’une occupation inutile » d’Henri de Régnier semble curieusement répondre à cet exergue. Face aux réactions négatives provoquées par ses Valses nobles et sentimentales, Ravel avait malicieusement serti de cette phrase l’édition de 1911. Schubert fascinait le compositeur français, la valse viennoise aussi. Les danses et airs populaires d’Europe centrale ont obsédé Bartók. Merveilleusement diffracté, ce matériau irrigue la suite En plein air. « Des œuvres qui ne s’apprivoisent pas en une fois », estime Dezsö Ránki. Exigeant, intègre il ne les donne au public que quand « elles remontent d’elles-mêmes à la surface ». Celles de son programme n’ont pu le faire que par la plus subtile des alchimies. SAM. 3 DÉC. 17H CAFÉ ZIMMERMANN BACH : Concerto brandebourgeois n°4, en sol majeur, BWV 1049 Concerto pour clavecin, en ré mineur, BWV 1052 Concerto pour hautbois, en ut mineur, BWV 1053 Concerto pour deux violons, en ré mineur, BWV 1043 Canons TOUS AU CAFÉ ZIMMERMANN ! C’est la fête ! Pablo Valletti, Céline Frisch, fondateurs de l’ensemble créé en 1998, nous y invitent avec leur gentillesse et leur charme habituels : « Nous avons enregistré 3 des 6 disques de l’intégrale de la musique orchestrale de Bach. Pour les célébrer, nous avons choisi nos œuvres préférées, “Les best of” de nos dernières années. Nous voulions en faire une présentation colorée et varier les solistes. C’est évidemment ce que nous imaginons des fameux concerts du Café Zimmermann. » L’historique : celui de Leipzig qui accueillait les musiciens du Collegium Musicum que Bach dirigea entre 1729 et 1739, ainsi que les philosophes et les intellec- Fabio Biondi, ph. Th. Martinot Alexandra Grot, ph. P. Gérard Quatuor Takács 2004, ph. S. J. Sherman tuels de toute l’Europe, à l’époque des Lumières, dont l’époustouflante formation, pour la 3e fois au Théâtre de la Ville, ressuscite l’esprit. Champagne d’abord avec le Concerto brandebourgeois n°4! Puis l’étonnant BWV 1052, la référence en matière de concerto pour Schumann. « Une pièce de longue haleine, une des plus intenses qui puissent exister », pour Céline qui en est la soliste. Pour Pablo : « Une œuvre en avance sur son temps avec de grands moments presque minimalistes ». Le BWV 1053 fait chanter la voix du bien nommé hautbois d’amour. Poignante dans le douloureux siciliano. Le choix de la dernière œuvre d’un concert est toujours délicat. Ce sera le BWV 1043 : « Pour accéder au dialogue inspiré des deux violons, il faut avoir eu le temps d’être bien dans le langage ». Que Pablo ne s’inquiète pas. Dans l’ambiance, Céline et lui nous y plongent dès le premier accord. Muzsikás, ph. B. Kása SAM. 10 DÉC. 17H FABIO BIONDI violon KENNETH WEISS clavecin BACH: Sonate pour violon et continuo, en sol majeur, BWV 1021 Sonate n° 4 pour violon et clavecin obligé, en ut mineur, BWV 1017 BIBER: Passacaille en sol mineur, pour violon seul BACH: Sonate n°6 pour violon et clavecin obligé, en sol majeur, BWV 1019 Concerto italien pour clavecin, BWV 971 LOCATELLI: Sonate pour violon et continuo, en ré majeur, op. 6 n° 12 ÉLOGE DE L’ÉCHANGE Le radieux violoniste sicilien fait chaque année le bonheur du Théâtre de la Ville. Il y vient pour la seizième fois, la cinquième en duo. « Une alternance archinécessaire. L’Europa Galante occupe 80% de ma vie. C’est gigantesque. Je garde les 20% pour respirer. Mon ensemble a presque 17 ans et sa santé passe par le désir. Après chaque récital ou chaque production avec un autre orchestre, je reviens vers mes musiciens avec enthousiasme. » Le claveciniste Kenneth Weiss, professeur au CNSM de Paris, chef d’orchestre, fut de 1990 à 1993 l’assistant musical de William Christie. Il aime les voix. Cela s’entend. C’est un clavecin qui chante. En 1997, on put voir, ici même, au milieu des danseurs de Trisha Brown, l’artiste américain jouer avec les musiciens du Salon baroque l’Offrande musicale de Bach qu’avait chorégraphiée sa compatriote sous le titre MO*. Même expérience pour Fabio Biondi et Europa Galante dans Chair obscur de Régine Chopinot en 2002. De nature très différente, les deux interprètes ont en commun ouverture d’esprit et liberté. « Kenny ne se laisse pas apprivoiser, il propose, apporte. Immédiatement nous avons eu envie de jouer ensemble et Bach justement. » Ce récital, « conséquence d’un feeling épidermique très fort », montre un Bach tantôt allemand tantôt « à l’italienne » comme dans la Sonate BWV 1019 ou plus encore dans le Concerto italien. Et pour finir, histoire de « prouver que nous ne profitons pas de notre personnalité pour donner la même couleur à tout le répertoire », une sonate de Locatelli. Retour à l’italianité originelle. En toute haute voltige. * Musicalisches Opfer. SAM. 21 JAN. 17H QUATUOR TAKÁCS MUZSIKÁS MÁRTA SEBESTYÉN Bartók et ses racines Quand la musique populaire nourrit la musique savante Quatuor à cordes n°4 4 duos pour violons Sonatina Danses roumaines avec les mélodies d’origine JUBILATOIRE Il était une fois Bartók, l’un des plus grands compositeurs du XXe siècle, le plus grand de la Hongrie. Dès 1905, comme Kodály, il parcourt les campagnes de son pays pour y traquer chants, airs, rythmes et danses. Il en a collecté et transcrit plus de 10 000 qu’il gravait sur un phonographe nouveau-né de 50 kilos. Ce matériau innerve l’œuvre du maître, Muzsikás le connaît bien . Ces “musiciens du village” – du nom du célèbre groupe hongrois – ont repris le flambeau et sillonnent leur terroir dont ils enregistrent eux aussi sur place les nouveaux trésors. De formation classique, ces fous de musique traditionnelle mettaient en résonance, dans leur CD Bartók album sorti en mars 1999, trois duos pour violon de Bartók et les airs originels qui les nervurent. Un mois plus tard, ils en distillaient les saveurs fruitées, épicées, sur la scène du Théâtre de la Ville où ils reviennent pour la quatrième fois. Avec le Quatuor Takács, hongrois lui aussi, dont c’est le quinzième retour dans cette salle où il avait d’ailleurs donné une intégrale Bartók en 1991, ils vont encore plus loin. Le jeu de miroir amorcé au disque devient ici fabuleux et concerne trois autres œuvres de Bartók . De quoi s’enivrer de mélodies vocales ou instrumentales originelles de toute beauté que le génie hongrois transmute plus ou moins. Parfois méconnaissables comme dans son Quatuor n°4, toujours elles fulgurent. À la source de la musique, effaçant les frontières, ce concert emblématique du Théâtre de la Ville est incontournable. Quatuor Ebène, ph J. Mignot, Peter Laul © JVM Reportage pour flûte. Une bien jolie idée. Le quatuor de Mozart pour flûte, qu’elle jouera avec les Ébène, en est une autre. Dans son souffle tout deviendra lumière. SAM. 4 MARS 15H 3 CONCERTS EN 1 : ALEXANDRA GROT PETER LAUL piano QUATUOR ÉBÈNE flûte Alexandra Grot et Peter Laul REINECKE : Sonate Undine pour flûte et piano, en mi mineur, op. 167 STRAVINSKI : Le Chant du rossignol – extrait du 1er acte de l’opéra Jeu des princesses avec les pommes (Scherzo) – extrait de L’Oiseau de feu DOPPLER : Fantaisie pastorale hongroise, op. 26 Peter Laul HAYDN : Sonate n° 32, en sol mineur, H XVI/44 SCHUBERT : Sonate en la majeur, D 959 Quatuor Ébène MOZART : Quatuor n°1 pour flûte et cordes, en ré majeur, K 285 (avec Alexandra Grot) WEBERN : Six Bagatelles pour quatuor à cordes, op. 9 HAYDN : Quatuor en sol majeur, op. 76, n°1, Erdödy SURTOUT À NE PAS MANQUER ! La nouvelle édition de la réjouissante formule née en 1994, présente deux Russes sortis de la pépinière Juventus, où ils ont eu tout de suite envie de jouer ensemble, et un quatuor français. LA FLÛTE ENCHANTERESSE « C’était du soleil qui allait de la scène vers moi. Alors, je me suis levée pour mieux recevoir cette lumière très forte qui m’attirait. » Et la petite Alexandra de 8 ans qui découvrait James Galway, debout en plein parterre d’une salle de concert à Moscou, dit à sa maman : « Je veux être flûtiste. Faire comme lui ». Plus comme maman. Une maman concertiste avec laquelle elle a cependant continué l’étude du piano « car l’approche de la musique avec un instrument polyphonique est importante ». Deux ans plus tard, la jeune Russe donnait son premier récital ! Puis ce furent la célèbre École Gnessine d’enfants surdoués de Moscou, les compétitions internationales. En 1997, elle remporte le Concours des Jeunesses musicales à Bucarest. Pierre-Yves Artaud fait partie du jury. Sûr de « son talent exceptionnel », il la convainc de se présenter au redoutable concours d’entrée au CNSM de Paris où, admise à l’unanimité dans sa classe, elle obtient ses premiers prix. « Sa musicalité extraordinaire et sa maîtrise parfaite de l’instrument » transparaissent en filigrane de son programme. La sonate de l’Allemand Reinecke raconte avec lyrisme l’histoire d’Ondine, cruelle comme tous les contes. La Fantaisie pastorale hongroise tout en panache de Doppler, l’ami de Liszt, est un point final idéal. Entre ces deux œuvres du XIXe siècle, deux courtes pièces de Stravinski transcrites AU CŒUR DE LA TRADITION RUSSE Grand, massif, le jeune pianiste russe Peter Laul a dans sa présence la fluidité qui irise son nom d’origine estonienne. De ce corps-là, la musique jaillit puissante et mœlleuse. Le sympathique géant aux grands yeux verts est né à Saint-Petersbourg en 1977 dans une famille de musiciens. À 5 ans, il commence le piano. L’étude devient passion grâce à Alexander Sandler, son seul maître jusqu’à l’âge de 25 ans. Pour son premier concert au Théâtre de la Ville, Peter Laul a hésité entre ses deux compositeurs préférés. Schubert ? En 1997, il avait triomphé à Brême avec le prix spécial de la meilleure interprétation de Schubert. Scriabine ? Il a gagné le 1er prix du second Concours international Scriabine de Moscou en 2000. « L’incomparable », Schubert, l’emporte. « Je joue toutes ses sonates, celles de la fin de sa vie sont divines. » La grande Sonate D 959, en la majeur, écrite deux mois avant sa mort, possède la « pureté » que Peter Laul aime tant chez ce compositeur. Du désespoir absolu naît une joie surhumaine. Un testament. Avant d’en livrer sa propre version, Peter Laul donnera la Sonate H XVI/44 de Haydn, un autre Autrichien qu’il préfère à Mozart, « Parce que, comme Richter, je trouve ses chemins plus inattendus. » Avec esprit et intelligence, Peter Laul en a déjà enregistré les surprises dans l’un de ses deux premiers compacts. Chaque note y culmine, brille. C’est justement ce qu’il admire dans les interprétations du chef d’orchestre allemand Wilhelm Furtwängler. Pour lui, plus important encore que Richter, son aîné russe de génie. EXCEPTIONNEL Dense comme le bois dont il porte le nom, le Quatuor Ébène crée l’événement à Munich en 2004 : premier prix du Concours international de l’ARD, le prix du public, deux prix de meilleure interprétation et le prix de la Fondation Karl Klinger ! 22-26 ans ! Quatre tout jeunes gens débordants de vie. Une intensité présente dans la symbolique de leur nom, que l’altiste Mathieu Herzog aime développer : « Noble, imputrescible, l’ébène est le bois des sculptures africaines qui nous rappellent les musiciens de jazz. Utilisé dans beaucoup d’instruments classiques dont les nôtres, il fait ainsi le lien entre toutes les musiques ». Or Pierre, Gabriel, Mathieu et Raphaël n’ont pas de frontières. C’est en improvisant au conservatoire régional de Boulogne qu’ils ont eu envie de faire de la musique de chambre. Le jazz fait partie de leur travail de quatuor. Après Eros et Thanatos réalisé avec le tromboniste Daniel Casimir, ils ont en projet un disque de standards. « Pas typiquement français », dit-on d’eux. Et ça leur plaît. « Amoureux de l’école hongroise des cordes et de la musique en général », ils ont su se faire adopter par Gábor Takács à Genève et par le « redouté » György Kurtág à Budapest. Leur programme est viennois. « Nous avons un amour sans borne pour Haydn. Le Quatuor opus 76 n°1 est le deuxième que nous avons appris en particulier pour la beauté de son mouvement lent, une merveille. » Quant aux Bagatelles de Webern, « c’est l’aventure incroyable d’une espèce d’énorme symphonie de 3mm 30 de musique atonale écrite il y a 80 ans ». Et pour commencer, Mozart, un autre miracle. M. Perényi, ph. Birgit, F. P. Zimmermann, ph.Th. Martinot SAM. 11 MARS 17H MIKLÓS PERÉNYI violoncelle DÉNES VÁRJON piano BEETHOVEN : Sonate n°3, en la majeur, op. 69 PROKOFIEV : Sonate en ut majeur, op. 119 SAINT-SAËNS : Sonate n°2, en fa majeur, op. 123 DEBUSSY – KOCSIS : Petite Suite « ON NE VOIT BIEN QU’AVEC LE CŒUR. » Comme le Petit Prince de Saint-Exupéry, Miklós Perényi semble venir d’une autre planète. En coulisse, sur scène, il impressionne par son étrange présence aérienne. Même si cela a pris un certain temps, il est désormais considéré comme l’un des plus grands violoncellistes, plus encore, l’un des plus grands musiciens de notre époque. Il n’élève pas de loups, ne jette pas son instrument dans un lac ou ne joue pas devant le mur de Berlin. Il rayonne simplement à Budapest, dans son cercle d’amis qui le vénèrent, Zoltán Kocsis en tête. Inutile de passer au crible sa revue de presse : pas la moindre confidence personnelle. Musique, uniquement la musique. En 1986, Miklós Perényi, ce fils spirituel de Pablo Casals, bouleversait pour la première fois le Théâtre de la Ville. Aucune des œuvres de son nouveau programme, le neuvième, ne doublonne avec les précédents. Fidèle à luimême, détestant la routine, il fait de ce nouveau rendez-vous un moment unique. Et quel rendez-vous ! En compagnie de Dénes Várjon, un autre héritier de la tradition hongroise, il convie d’abord Beethoven, sa Sonate n°3, jubilatoire. Puis Prokofiev et sa sonate écrite en 1949, torrent fantasque qu’apaisent de soudains élans d’amour. Et, c’est presque un événement tant elle rarement jouée, la pourtant somptueuse Sonate n°2 de Saint-Saëns. Pour finir, l’adorable Petite Suite pour piano à quatre mains de Debussy transcrite par son ami Zoltán Kocsis. De l’Allemagne à la France en passant par la Russie, « Monsieur Perényi, s’il vous plaît, dessine-nous la musique ». SAM. 18 MARS 17H FRANK PETER ZIMMERMANN violon CHRISTIAN ZACHARIAS piano MOZART: Sonate en Sonate en Sonate en Sonate en mi bémol majeur, K 481 en sol majeur, KV 301 fa majeur, K 377 si bémol majeur, K 454 MOZART AU SOMMET Même classe. Même pureté. Christian Zacharias1 et Franck Peter Zimmermann 2 se connaissent depuis une vingtaine d’années . En trio, ils ont beaucoup joué avec Heinrich Schiff ; en duo, ils ont donné une intégrale Beethoven en 1999 et le pianiste–chef d’orchestre dirige parfois son ami violoniste. Mozart est au centre de leur vie. « Depuis l’âge de 3 ans, c’est le compositeur le plus Ch. Zacharias, ph. M. Vanappelghem Bang on a can all-stars, ph. N. Ruechel proche de mon cœur et de mon sang. Mozart, cela marche ou non, on se jette dans la musique et cela sonne naturel ou non. » Ce naturel dont parle le violoniste, le pianiste le possède plus encore aujourd’hui qu’à ses débuts : « Je me pose moins de questions. Maintenant c’est là, je fais. J’ai encore plus de plaisir à parler ce langage mozartien avec les autres. L’essence de Mozart, c’est le théâtre, le dialogue, un jeu de questions et de réponses ». Au centre justement de leur travail : « Nous avons plein d’idées. Christian a les siennes, moi les miennes. Nous les essayons. C’est passionnant mais pas toujours facile ! » De ces échanges naissent des interprétations fulgurantes. Elles vont jalonner le chemin même pris par Mozart. Deux grandes sonates de la maturité, K 481 et K 454, encadrent une sonate plus précoce K 301 « et la plus énigmatique de toutes, K 377, avec son petit tango dans le deuxième mouvement » qui réjouit tant Christian Zacharias. « Aujourd’hui il faut jouer demi nu ou avoir un visage de baby doll, regrette Frank Peter Zimmermann, c’est la maladie de notre temps : ce qu’il y autour de la musique est plus important que la musique elle même. » Tous les deux nous prouvent le contraire. Merci ! 1 2 12e concert au Théâtre de la Ville. 4e concert au Théâtre de la Ville. LUN. 27 MARS 20H30 BANG ON A CAN ALL-STARS PHILIP GLASS : Music in 5ths JULIA WOLFE : New York FRED FRITH : New York IVA BITTOVA : Elida artiste invitée Iva Bittova violon I. Bittova, ph. T. Beran Pour le quatrième passage des Bang on a can all-stars au Théâtre de la Ville, une soirée pas comme les autres ! On peut être sûr, pour commencer, que l’interprétation chauffée à blanc des unissons de la Music in 5ths de Philip Glass va décoiffer pas mal d’auditeurs. Composée en 1969, cette œuvre unique en son genre du minimalisme américain n’a été que rarement jouée en concert, tant elle constitue un défi que seuls des instrumentistes du niveau des Bang and a can all-stars sont capables de relever. Sur une battue radicalement régulière, le vertige excitant d’une perversion structurelle aussi insidieuse qu’implacable…. Après le 11 septembre, nombreux sont les jeunes compositeurs new-yorkais qui tiennent à manifester l’attachement qu’ils portent à leur ville. New York, tout simplement, est le titre de deux œuvres qui seront données en création française. La première, écrite par Julia Wolfe, grande prêtresse de Bang on a can dont elle est cofondatrice. La seconde, due à l’inspiration de Fred Frith, guitariste et bricoleur d’instruments, né dans le Sussex, qui a fait partie du légendaire groupe britannique Henry Cow avant de se fixer à New York et de se produire auprès de Bill Laswell et des Residents aussi bien que de John Zorn et Tom Cora. T. Mørk, ph. X. DR Kronos Quartet, ph. J. Blakesberg Événement, enfin, qui occupera toute la seconde partie du concert : le fruit de la collaboration de Bang on a can avec la chanteuse et violoniste tchèque Iva Bittova dont la personnalité fortement originale ne peut être comparée – en plus jazzy et folk, avec des accents tziganes – qu’à Meredith Monk, Nina Hagen ou Björk. Toute en nuances et quasi intimiste, la suite Elida tranche avec le répertoire habituel des fougueux Bang on a can allstars et montre que ces derniers ont plus d’une corde à leur arc. Daniel Caux SAM. 29 AVR. 17H TRULS MØRK violoncelle KATHRYN STOTT piano SCHUMANN : Trois Fantasiestücke, op. 73 BEETHOVEN : Sonate n° 5, en ré majeur, op. 102 n°2 CHOPIN : Sonate en sol mineur, op. 65 JANÁCEK : Conte (Pohadka) L’ÉTOILE DES NEIGES Il chante, il chante, le violoncelle de Truls Mørk. Un chant ample, libre. Tellement naturel. Comme celui de Fischer-Dieskau, modèle du grand artiste norvégien. C’est que, « du plus loin qu’il s’en souvienne, il entendait de la musique à la maison ». Ses parents étaient tous deux musiciens professionnels. À 7 ans, Truls Mørk apprend d’abord le piano avec sa maman dont il ne comble pas les attentes, puis, brièvement, le violon avec un professeur fantôme. Son papa décide alors de lui enseigner le violoncelle. Rencontre définitive entre l’instrument et l’enfant qui décide d’emblée de commencer par la Sonate en mi mineur de Brahms et la Première Suite de Bach et… y parvient. Force du désir personnel qui accompagne depuis toujours l’hyperdoué presque autodidacte. À 17 ans, il part en Suède à l’École de musique de la radio où l’excellent Frans Helmerson l’épanouit dans la liberté. Les premiers prix qui comptent, dont celui du Concours Tchaïkovski de Moscou, émaillent ses débuts internationaux. Au sommet de son art, le sympathique quadragénaire donne son premier concert au Théâtre de la Ville en compagnie de la pianiste anglaise Kathryn Stott, une exploratrice de musiques. Son Domenico Montagnana (Venise, 1723) un violoncelle rare que lui a acheté la SR-Bank de Norvège, va en voir de toutes ses sublimes couleurs : tendresse des Fantasiestücke de Schumann, profondeur de la 5e Sonate de Beethoven, passion de la Sonate de Chopin, féerie de Pohadka, ballade épique rarement jouée de Janácek. Le portrait de l’artiste. LUN. 15 MAI 20H30 KRONOS QUARTET FELIPE PÉREZ SANTIAGO : CampoSanto (Holy Ground) GLENN BRANCA: Light Field (In Consonance) JIM THIRLWELL : New York (programme en cours) Midori/R. McDonald, ph. X. DR Le retour annuel du Kronos Quartet est un rituel dont on ne saurait se lasser tant, à chaque fois, les quatre virtuoses californiens de l’archet s’ingénient à renouveler l’éventail des œuvres qu’ils donnent à entendre. Le nom de Glenn Branca fera ressurgir quelques images hautes en couleur dans la mémoire de ceux qui ont eu la chance d’assister à l’un des deux concerts que le luciférien new-yorkais avait donnés en 1988 et 1994 au Théâtre de la Ville avec son « mur de sons » de guitares électriques. Des concerts pour lesquels les termes de chamanisme et de transe restent les plus appropriés… C’est à partir du morceau Lightfield (In Consonance) – extrait de son disque culte pour guitares électriques, The Ascension – que, cette fois, il a conçu un arrangement pour le Kronos Quartet. On peut en attendre beaucoup si l’on se souvient du brio avec lequel le prince de la « No Wave » avait écrit la musique pour ensemble de cordes qui accompagnait certains moments cruciaux du film de Peter Greenaway, Le Ventre de l’architecte. Figure essentielle de la « musique industrielle » à Londres, puis à New York, qui a créé son propre label, Self Immolation, et dont l’art se veut, selon ses propres termes, un « cri de dégoût » contre la médiocrité ambiante, le multi-instrumentiste australien James Thirlwell, alias Foetus, n’a rien à envier à Glenn Branca en matière de subversion sulfureuse. Comment imaginer que le cauchemar du 11 Septembre puisse être absent de sa pièce New York ? C’est encore de la mort – mais envisagée cette fois de la façon ludique et bigarrée que veut la tradition populaire latino-américaine – qu’il sera question avec le CampoSanto (Holy Ground) du jeune compositeur mexicain Felipe Pérez Santiago. D. C. SAM. 20 MAI 17H MIDORI violon ROBERT MCDONALD piano SCHUBERT : Sonatine en ré majeur, D 384 PROKOFIEV : Sonate n°1, en fa mineur, op. 80 BEETHOVEN : Sonate n°7, en ut mineur, op. 30 n°2 FLAMME Fine, flexible, Midori flambe en scène. Évidente comme l’enfant prodige de 11 ans dont Zubin Mehta dirigea le premier concert. Généreuse jeune femme de 34 ans, rayonnante de vie. Celle qui apprit le violon avec sa maman, Setsu Goto, ne s’est pas contentée de cultiver son don exceptionnel. Convaincue qu’accéder à la musique est une chance, elle la donne aux enfants défavorisés ou malades. Elle passe un tiers de son temps dans le développement des associations qu’elle a créées dans ce but : Midori and Friends à New York où elle vit, et Music Sharing au Japon. “Partager la musique”, elle le fait bien sûr en jouant mais aussi en enseignant. Depuis 2004, on lui a confié la prestigieuse Heifetz Music Chair de l’University of Southern California. Elle lit « avec voracité », va au théâtre, prépare une thèse en psychologie. Et trouve encore le temps de tenir une sorte de chronique mensuelle sur son remarquable site internet. Fait étrange, sa trajectoire internationale passe rarement par la France. Son quatrième récital au Théâtre de la Ville, le premier eut lieu en janvier 1995, devient encore plus précieux. Midori a la grâce de la Sonatine de Schubert, l’âpre énergie de la Sonate n°1 de Prokofiev où elle voit « la prédiction du compositeur sur l’avenir de la musique soumis à de dures restrictions ». En novembre 1801, quelques mois avant de composer la Sonate en ut mineur de l’opus 30, Beethoven écrivait : « Pas de repos ! Je veux saisir le destin à la gueule. Il ne réussira sûrement pas à me faire courber la tête tout à fait ». Midori connaît bien cette force de caractère. Ravel et les Images hongroises de Bartók font partie de toutes celles que Stanley Chaloupka, ancien soliste du Los Angeles Philharmonic, réalisait pour pouvoir jouer avec sa femme, harpiste elle aussi. En solo, MariePierre joue une éblouissante Fantaisie pour clavecin de Carl Philipp Emanuel Bach qu’elle découvrit en 1995 dans la transcription et sous les doigts de Chantal Mathieu : « Un coup de foudre ». Seule à son tour, Jana Bousková « danse » la Vie brève de Manuel de Falla. Feu d’artifice. SAM. 5 NOV. 17H QUATUOR TETZLAFF HAYDN : Quatuor n° 33, en sol mineur, op. 20/3 SIBELIUS : Quatuor n° 4, « Voces Intimæ », en ré mineur, op. 56 SCHÖNBERG : Quatuor n°1, en ré mineur, op. 7 J. Bousková, ph. P. Skurn M.-P. Langlamet, ph. P. Gérard MUSIQUE AUX ABBESSES SAM. 8 OCT. 17H JANA BOUSKOVÁ harpe MARIE-PIERRE LANGLAMET harpe MOZART : Sonate pour deux pianos, en ré majeur, K 448, version pour 2 harpes C. P. E. BACH : Fantaisie pour clavecin, en mi bémol majeur, Wq 58 (transcription pour harpe de C. Mathieu) DAMASE : Sonatine pour deux harpes RAVEL : Le Tombeau de Couperin (transcription pour deux harpes de S. Chaloupka) DE FALLA : Danse espagnole n°1 de La Vida breve BARTÓK : Images hongroises (transcription pour deux harpes de S. Chaloupka) LE CHANT DES HARPES « Ce fut comme Noël » pour Marie-Pierre Langlamet, le jour où sa mère lui propose d’apprendre la harpe au conservatoire de Nice. Elle avait 8 ans et dans sa famille personne n’était musicien. « Maman avait bien vu que je l’avais adorée dans Les Aristochats. » La magie ancestrale de « l’instrument polyphonique par excellence » avait agi. À la même époque, à Prague, en Tchécoslovaquie, une autre maman, Libuse Vashalova, harpiste renommée, en enseignait les sortilèges à sa petite Jana âgée de 5 ans. Ainsi naquirent deux des plus belles étoiles de la harpe. Le Théâtre de la Ville où Marie-Pierre Langlamet, soliste de la Philharmonie de Berlin, vient pour la 5e fois avait déjà mis la harpe (et la flûte) au carré, en 2000, en conviant Jana Bousková avec Emmanuel Pahud et Mathieu Dufour. Les Abbesses sont idéales pour l’instrument cristallin au répertoire raffiné. À l’exception de la délicieuse Sonatine de Jean-Michel Damase, né en 1928, le programme se compose de superbes transcriptions. Le Tombeau de Couperin de QUATUOR D’INGRES Que fait le violoniste Christian Tetzlaff * quand il a du temps libre ? De la musique ! Avec sa sœur Tanja, Elisabeth Kuferrath, Allemande elle aussi et Hanna Weinmeister, Autrichienne. Quatre solistes qui se rencontrent en 1994 au Festival de musique de chambre de SaintGall et décident de jouer ensemble. Leur emploi du temps ne leur permet pas de le faire souvent. « 4 ou 5 concerts par an. C’est un hobby professionnel. » Et, mot cher au phénoménal violoniste, un plaisir : « Plaisir de dialoguer en concert, plaisir des œuvres. C’est dans le répertoire du quatuor que l’ont trouve les plus extraordinaires, les plus concentrées. » Pour qui a vu, senti, l’intensité physique de l’interprète, son engagement et en même temps son immense sobriété, l’adjectif n’est pas étrange. Et en parfaite adéquation avec les œuvres colossales de son nouveau programme. « Nous sommes tous unis dans l’amour du Quatuor n°1 opus 7 de Schönberg, le premier que nous avons joué ensemble. C’est un de nos préférés avec celui de Sibelius. » Fascinants en effet : « Écrits à la même époque, dans la même tonalité de ré mineur, ils viennent de deux mondes complètement différents. On y ressent l’atmosphère dramatique qui précède la première guerre mondiale. Mais si la charge émotionnelle est la même, la structure ne l’est absolument pas. » Celle, classique du Quatuor en sol mineur de Haydn est encore plus éloignée. Et pourtant, « on peut y entendre la même colère ». Et une autre de ces voix intimes dont le quatuor de Sibelius porte le nom. Bouleversantes Voces Intimæ. * Pour la quatrième fois au Théâtre de la Ville. SAM. 26 NOV. 17H BARTHOLD KUIJKEN flûte baroque EWALD DEMEYERE clavecin CARL PHILIPP EMANUEL BACH : Sonate en mi mineur pour flûte et basse continue, H. 551/W.124 Sonate en sol majeur pour flûte et basse continue, H. 554/W.127 Sonate en la mineur pour flûte seule, H. 562/W.132 (Berlin, 1747) Sonate en ré majeur pour flûte et basse continue, H. 561/W.131 Sonate en mi majeur pour flûte et clavecin obligé, H. 506/W.84 Sonate en la mineur pour clavecin, H. 247/W.57/2 Sonate en sol majeur pour flûte et basse continue, H. 564/W.133 Quatuor Tetzlaff, ph. A. Yanez B. Kuijken, ph. Th. Martinot “UN GÉNIE ORIGINAL” Difficile d’être un musicien lorsqu’on est le fils de Jean-Sébastien Bach ! Carl Philipp Emanuel, le deuxième des quatre qui relevèrent le défi, sut chercher et tracer son propre chemin. Les 7 œuvres choisies par Barthold Kuijken sont réparties sur plus de cinquante années et nous font revivre l’aventure créatrice de celui que l’on appelait à son époque, et à juste titre, un « Originalgenie ». Sept mondes à éclairer, de la précoce Sonate H 551, inspirée par l’opus 2 de Locatelli, au « dernier et inattendu coup de maître », la Sonate H 564, « toute nouvelle, fraîche, virtuose, pleine d’un humour à la Haydn ». Le grand flûtiste hollandais, quarante ans après le lancement de la révolution des baroqueux, dont il fut, avec ses frères, l’un des pionniers essentiels, continue de questionner ce répertoire avec passion (son légendaire « On n’en sait rien ! »). De quelles nouvelles lumières vat-il baigner son 9e concert au Théâtre de la Ville, le 3e dans l’écrin acoustique idéal des Abbesses ? Il revient avec Ewald Demeyere quie fut déjà son complice pour l’extraordinaire concert consacré aux sonates de JeanSébastien Bach en 2001. Au cœur de leur programme, ils ont installé deux œuvres solo : une fougueuse sonate pour clavecin qui convient bien « à la richesse émotionnelle et à l’esprit analytique » du jeune claveciniste belge ; et la Sonate H 562 qui « avec la Partita BWV 1013 de son père l’une des deux plus grandes pièces pour flûte seule de l’histoire de la musique avant le XXe siècle ». Ce chefd’œuvre pourra se refléter dans le miroir de Barthold Kuijken. Il est idéal. SAM. 28 JAN. 17H CÉLINE FRISCH clavecin Aux sources du jeune Bach BACH : Capriccio sopra la lontananza del fratello dilettissimo, BWV 992 Toccata en sol mineur, BWV 915 Preludio di Bach, en ut majeur, BWV 870b Praeludium et Partita del tuono terzo, BWV 833 KERLL : Canzona Suite en fa majeur Passacaglia BUXTEHUDE : Suite en ut majeur, Bux 226 FROBERGER : Toccata II et Suite II du livre de 1649 PETIT RUISSEAU* DEVIENDRA GRAND À la mort de leurs parents, Johann Christoph Bach recueille son petit frère Jean-Sébastien à qui il apprend la musique. La passion de l’enfant de 10 ans est extraordinaire. Dans une armoire simplement fermée d’un grillage, il découvre, émerveillé, un recueil d’œuvres pour clavier des compositeurs les plus célèbres de son temps : Froberger, Kerll… Son frère lui en refuse bizarrement l’accès. Mais sa petite main pouvait passer à travers les trous du treillis. Et, à la lueur de la lune, il n’avait même pas de bougie, Jean-Sébastien recopie le volume. L’aîné s’en aperçoit, confisque la reproduction. Jean-Sébastien ne la récupérera qu’après la mort de son frère. Pour son nouveau récital aux Abbesses, le Céline Frisch, ph. C. Ruban Filomena Moretti, ph. F. Ferri cinquième, Céline Frisch semble feuilleter quelques pages du précieux livre. La grande claveciniste française avait depuis longtemps envie de travailler sur la musique allemande du XVIIe siècle. En lisant des piles de partitions, elle découvre Kerll, organiste à la chapelle impériale de Vienne : « Au départ, il y a une pièce qu’on aime, c’est souvent un petit fil, mais en le tirant on trouve plein de connexions. » Elle rencontre alors Froberger, né à Stuttgart, grand voyageur pétri d’influences européennes, et Buxtehude, le grand maître de Lübeck. Ces compositeurs que Bach avait étudiés en cachette et qu’il admirait, elle les met en résonance. Les œuvres se répondent, bruissent d’échos. Comme cette « allemande de la Suite de Buxtehude qui évoque le premier prélude du 2e livre du Clavier bien tempéré dans une version de jeunesse ». Bach puisa à bien des fontaines. Fine sourcière aux yeux bleus, Céline nous y mène. * Bach en allemand. SAM. 1er AVR. 17H FILOMENA MORETTI guitare SANZ : Danzas Cerbantinas BACH : Partita pour violon seul, en ré mineur, BWV 1004 – version pour guitare ALBENIZ : Asturias ; Mallorca ; Sevilla DE FALLA : La cancion del fuego fatuo La danza del molinero ; Homenaje TARREGA : Traviata-fantaisie Recuerdos de la Alhambra ; Gran Jota DÉESSE « La guitare touche les cordes de l’âme ». Filomena Moretti en a la révélation dès l’âge de 5 ans quand ses parents lui offrent une guitare comme cadeau d’anniversaire : « Je n’en avais jamais vu. Cela a été un coup de foudre : je l’ai mise contre moi et j’ai vibré avec elle. C’est une sensation inoubliable. » Sa lumineuse trajectoire la conduit du conservatoire de Sassari en Sardaigne, « la plus belle des terres mais loin de tout », à Milan où elle devient l’âme de la guitare. Tendre, sensuelle ou sacrée, toujours profonde, Filomena s’adresse au cœur de qui l’écoute. Avec une élégance infaillible : « Maintenant la guitare est mon langage, ma parole, ma voix. » Une sonorité chaude qui sent bon l’Italie. Un naturel, une palette de couleurs et une intensité qui impressionnent. Pour un peu on parlerait de puissance : « La guitare ne joue pas fort mais loin. » Elle aime citer cette phrase de Segovia que seul un grand interprète peut faire sienne. Du XVIIe au XXe siècle, de Gaspar Sanz à Falla, la jeune femme effeuille une capiteuse anthologie, airs raffinés, canto jondo où crépite le feu des gitans, danses ibériques, cantilènes émouvantes comme ces Souvenirs de l’Alhambra de Tarrega. Et un diamant : la Partita pour violon seul BWV 1004 de Bach : « Cette musique est pour n’importe quel instrument. Il suffit de la respecter. » Absolue, Filomena rêve de jouer dans le noir : « La lumière aussi fait du bruit et quand on joue, on ne cherche pas le bruit. » Peut-être, mais ce serait dommage : elle est si belle ! MUSIQUES DU MONDE AU THEATRE DE LA VILLE RAJAN ET SAJAN MISRA GIRIJA DEVI Inde du Nord CHAURASIA Inde du Nord Inde du Nord chant khyal chant khyal flûte bansuri GIRIJA DEVI CHAURASIA Libye direction Hassan Araibi Inde du Nord raga-s du matin MEHR ET SHER ALI AND PARTY Pakistan KAUSHIKI CHAKRABARTY Inde du Nord IKHWANI SAFAA MUSICAL CLUB AUX ABBESSES GHOLAM DASTEGUIR HOMAYOUN Afghanistan rubâb CHOTA DIVANA qawwali chant khyal L’ENSEMBLE DE MALOUF DE LA GRANDE JAMAHIRIYA Zanzibar Rajasthan GHADA SHBEIR Liban chants syriaques ASHIQ HASSAN Azerbaïdjan iranien taarab de Zanzibar artiste invitée Bi Kidudé chant LJILJANA BUTTLER Bosnie Mostar Sevdah Reunion FARIDA PARVEEN Bangladesh chant USTAD BARE FATEH ALI KHAN Pakistan chant classique USTAD SHAFI Pakistan MOHAMMAD FAQIR SALAR AGHILI Iran chant musique soufie du Sind ENSEMBLE AL-KINDÎ ENSEMBLE IBN ARABI Syrie Maroc direction Ahmed El Kheligh musique arabo-turque de l’Empire ottoman ENSEMBLE SHOGHAKEN LIU FANG Chine pipa, guzheng Arménie ENSEMBLE SHAMS KADRI GOPALNATH saxophone Iran Hamid-Reza Nourbakhsh chant Kéykhosrow Pournazéri tanbur NASSIMA chant, mandol Algérie voix soufie, voix d’amour, six siècles de poésie soufie création PURBAYAN CHATTERJEE KALA RAMNATH Inde jugalbandi, duo de sitar-violon musique carnatique Inde du Sud CHANTS DE LA TIHAMA Yémen JAZZ AUX ABBESSES KURT ROSENWINKEL guitare Mark Turner saxophone Aaron Golberg piano Joe Martin contrebasse Ari Hoenig batterie TARIF D Girija Devi et Chaurasia, photos Sense World Music MUSIQUES DU MONDE AU THEATRE DE LA VILLE En ouverture de saison : deux grands maîtres, Girija Devi et Chaurasia pour un week-end musical exceptionnel VEN. 16 ET SAM. 17 20H30 • DIM. 18 SEPT. 11H VEN. 16 SEPT. 20H30 GIRIJA DEVI chant khyal Inde du Nord accompagnée au sarangi et tabla LE CHANT LUMINEUX ET POÉTIQUE DE LA DÉESSE DE BÉNARÈS Annonçant l’année dernière que vu son âge elle cesserait de tourner à l’étranger en 2005, on ne pouvait que rendre un hommage parisien à la légendaire Girija Devi, après déjà deux passages au Théâtre de la Ville (1992 et 2002). Immergée dès l’enfance dans le foisonnement intense de la vie religieuse et musicale de Bénarès, la dernière chanteuse courtisane de l’Inde dévoile son cœur. Concentrée, d’une élégance aérienne, le geste sûr, l’âme à nu, elle nous touche par sa voix éclatante, à la densité du cristal. Cette grande dame de soixante-quinze ans n’a pas cessé d’affiner son art pour atteindre le sommet. La sûreté des tempi et le sens d’une dramaturgie rythmique complètent ce tableau. Bien que merveilleuse chanteuse de khyal, Girija reste attachée aux nombreux genres réputés plus "légers" qui la situent dans la lignée des Siddeswari Devi et Begum Aktar, divines voix des années 50. On y décèle l’empreinte de la ville sainte dans l’expression dévotionnelle et romantique d’un art protéiforme touchant à bien des genres, où Girija Devi apparaît comme une interprète de génie. Ces genres, non plus faciles, sont plus réduits ou plus ramassés que le khyal : thumree romantique, chaiti et kajri, chants d’amour du printemps et de la mousson, dadra au thème érotique, holi, variété saisonnière du thumree, bhajan dévotionnel, tarana hypnotique, tappa, condensé redoutable de toutes les techniques vocales. Christian Ledoux SAM.17 SEPT. 20H30 RAGA-S DU SOIR CHAURASIA flûte bansuri Inde du Nord Sunil Avchat flûte bansuri Vijay Ghate tabla Bhavani Shankar pakhawaj Après deux saisons d’absence, voici Chaurasia de retour au Théâtre de la Ville. Le don du souffle l’habite et hante les âmes. Celui qui n’était en rien destiné à devenir musicien est la référence absolue dans un domaine dont il a fait un royaume partagé par tous ses fans et ses innombrables disciples à travers le monde. Impénitent globe-trotter, il a succédé à Ravi Shankar dans le rôle d’ambassadeur d’exception de la musique indienne. Les amples sonorités qu’il insuffle à sa flûte sont un don du ciel : une qualité sonore unique nous enveloppe, parfaitement ronde et ouatée, d’où ressort une chaleur irradiante teintée des couleurs les plus expressives. Dès l’attaque de la première note on ressent cette spiritualité qui va nourrir son art tout au long du concert. Initié au genre dhrupad, Chaurasia impose d’emblée sa marque, dans ces courtes figures oscillantes qui viennent chercher et recueillir l’essence et les secrets des raga-s, ou dans ces fines volutes qui viennent parcourir l’octave supérieure. Sa technique inouïe est son œuvre. Inlassablement, cet orfèvre promu génie a développé un jeu idéal pour imiter la voix au plus près, créant une architecture de la plénitude. Curieux, ouvert aux autres formes musicales, Chaurasia aime puiser dans les mélodies folkloriques, d’où sont issus bien des raga-s. Sa maîtrise de l’art savant et de ses sources indigènes en font l’artiste le plus populaire de son pays. C. L. DIM. 18 SEPT. 11H GIRIJA DEVI CHAURASIA RAGA-S DU MATIN chant khyal Inde du Nord flûte bansuri Avec la star Kishori Amonkar, Girija Devi sera la deuxième chanteuse à se produire au Théâtre de la Ville pour des raga-s du matin, et Chaurasia se sent honoré de partager ce concert avec son aînée qu’il admire depuis toujours. C. L. MEHR ET SHER ALI AND PARTY qawwali Pakistan 8 musiciens DANS LA PLEINE MATURITÉ DE LEUR ART ! Saison après saison, depuis 20 ans maintenant, le Théâtre de la Ville nous propose de nouvelles nuances du qawwali punjabi pakistanais. Durant de longues années, ce fut d’abord un lotus rare, trop vite englouti dans l’étang world : Nusrat Fateh Ali Khan. Puis dès 1999, vinrent les petits cousins prometteurs Rizwan et Muazzam Mubarak Ali Khan. En 2002, ce fut l’ébouriffant Asif Santoo Khan dont la carrière – toujours essentiellement enracinée dans les sanctuaires soufis – vogue dorénavant à plein vent. Vint ensuite, en 2003, l’imposant Badar Ali Khan, au style pleinement assumé. Et voici que cette saison, l’écheveau poursuit son lent déroulement : le Théâtre accueille en son sein les frères Mehr et Sher Ali. S’ils ne représentent pas le modèle de tous les qawwal-s punjabi-s (bien prétentieux serait celui qui se proclamerait "le meilleur" ou "la voix"…), le groupe des frères Ali s’est néanmoins érigé actuellement en l’une des références essentielles du qawwali punjabi. Une double coïncidence indiquait déjà un bon augure : tout comme le légendaire chanteur classique Ustad Bare Fateh Ali Khan – que nous aurons le privilège d’apprécier en mars prochain –, les deux frères prodiges sont issus de la féconde cité punjabie de Patiala ; et tout comme Nusrat, la famille Ali s’est établie à Faisalabad après la partition de 1947. Illustres voisinages… Mais leur renommée est d’abord due à leur talent personnel : les deux frères Mehr et Sher sont en effet deux qawwal-s exceptionnels qui jouent de leurs timbres complémentaires avec un brio consommé : voix ample et forte de Mehr, voix plus douce, presque féminine, de Sher, qui s’entrelacent aux rythmes magiques du tabla et aux reprises fringantes du chœur. Ainsi célébré, gageons que le divin amant sera bien présent dans la salle… K. Chakrabarty, ph. X. DR Mehr et Sher Ali, photos X. DR SAM. 8 OCT. 17H de pratique quotidienne témoignent d’une recherche de la perfection tonale, toute vouée à l’exploration émotionnelle et spirituelle des raga-s. La critique indienne, unanime, l’acclame et reconnaît en elle le meilleur espoir du chant khyal. Les éloges que lui ont adressés les grands maîtres sont éloquents, d’Alla Rakha, qui assure qu’elle vaut son fils Zakir Hussain, à Pandit Jasraj, tant ému par un concert qu’il voit en elle la seule personnalité capable de lui succéder. Kaushiki Chakrabarty s’initie à la musique dès l’âge de deux ans auprès de sa mère. À dix ans, honneur insigne, elle est admise comme disciple du légendaire pédagogue Jnan Prakash Ghosh qui n’a jamais eu une élève si douée. Devenu trop malade, il confie au père de son brillant sujet le soin de compléter son apprentissage. La jeune chanteuse se fait connaître en Inde et aux USA ces cinq dernières années. En janvier 2005, elle reçoit le BBC Award du meilleur CD de musique d’Asie. On décèle en elle une future Kishori Amonkar, la sensualité en plus. Son art est le fruit d’un mûrissement précoce extrêmement rare : il faut dire qu’elle est philosophe de formation et ne dédaigne pas écrire. Sa simplicité est aussi touchante que son art de capter l’attention des auditoires avec une délicatesse qui incite à une écoute où l’on se sent proche de l’artiste. La candeur de son regard attise l’intelligence et le cœur. C. L. SAM. 26 NOV. 17H IKHWANI SAFAA MUSICAL CLUB Zanzibar taarab de Zanzibar artiste invitée BI KIDUDÉ chant Pour la 1re fois en France Mohamed Ilyas premier violon, chant, chef d’orchestre Mohamed Othman violon Juma Haj violon Abdallah Mussa qanoun Moh’d Issa Matona oud, violoncelle Sadiq Juma accordéon Abdulaziz Yusuf guitare Juma Saidi basse Muhsin Aliy percussion Maulidi Mohamed Machaprala percussion, chant Rukia Ramadhani chant, chœur Fauzia Abdalla chant, chœur Empressons-nous de venir découvrir cette chanteuse de vingt-trois ans, fille d’Ajoy Chakrabarty, dont le célèbre chanteur déclare sans vouloir se vanter qu’elle est meilleure que lui ! Il n’a pas tort… La souplesse de sa voix de miel est hors norme et ses six heures En arabe, taarab signifie extase, béatitude, dans une acception profane qui renvoie davantage à la danse ou à la musique qu’aux émois mystiques. Depuis un siècle, le taarab est la principale musique populaire de la côte Swahili et de Zanzibar, petite île de légende Pierre-Alain Baud SAM. 15 OCT. 17H KAUSHIKI CHAKRABARTY chant khyal Inde du Nord accompagnée à l’harmonium et au tabla Ikhwani Safaa Musical Club, ph. X. DR Bi Kiduré, ph. X. DR SAM. 14 JAN. 17H FARIDA PARVEEN chant 5 musiciens « Quand la peur est absente, l’amour suffit. Le miel se cache au cœur de la fleur, mais l’abeille le sait… », nous murmurent les Baúls. Farida Parveen, issue d’un foyer familial "jamais à court d’amour" (S. Zakaria/M. Zaman) serait-elle donc abeille, extrayant des poèmes fleuris de Lalon Faqir le suc qu’elle transforme en miel apaisant l’âme ? Affectueusement surnommée « Farida apa » – sœur – par ses proches et ses admirateurs, Farida Parveen est une icône au Bangladesh, incarnation vive de l’âme d’une contrée dorée, passionnément aimée : « Amar shonar Bangla, ami tumay bhalo bashi…» « Mon Bengale doré, je t’aime tant… », nous chante ainsi Tagore. C’est à tout bout de “chant” que l’on retrouve cet amour pour la terre bengalie, pour cet horizon ample et calme, pour ce regard séculier et compassionnel sur le monde… Or l’abeille Farida a su trouver les intonations justes pour chanter cet infini d’amour, se muant au fil des ans en chantre incontesté de Lalon Faqir – ou Lalon Shah –, père de l’ancrage soufi des Baúls bengalis. À l’instar de Shah Latif dans le Sindh, la poésie de Lalon puisa dans les villages et les cœurs bengalis les mots simples dont il tira la substance essentielle, celle qui lie passion humaine et amour divin, humanité au quotidien et spiritualité aux horizons infinis… Farida Parveen, en harmonisant pour la première fois ces poèmes laissés sans notation, en a capté le suc musical. Saveur du miel, bonheur de l’écoute, plaisir du regard, confort de l’assise, il ne manquera que le parfum nocturne du jasmin pour transformer ce concert en fête des cinq sens… P.-A. B. Farida Parveen, ph. X. DR égarée dans l’océan Indien, au large des côtes tanzaniennes et kényanes. Créé en 1905 par le sultan de Zanzibar, l’Ikhwani Safaa Musical Club fête donc son centenaire en cette année 2005. Initialement, cette “Amicale fraternelle” (Ikhwani Safaa) ne comptait que des hommes et se produisait essentiellement à la cour du souverain et devant la bourgeoisie commerçante et arabophile. À partir de la fin des années 1920, grâce à la chanteuse Siti Bint Saad (18801950), les femmes ont peu à peu trouvé leur place dans le taarab – même si, aujourd’hui encore, elles sont essentiellement chanteuses ou choristes et ne jouent d’aucun instrument. Cette irruption des femmes établira définitivement le taarab comme musique populaire car il sera désormais chanté exclusivement en kiswahili (la langue première des Zanzibari), et non plus en arabe comme auparavant. Aux influences arabes originelles se sont mêlées petit à petit les racines africaines locales, des parfums indianisants apportés par les migrations transocéaniques, et même un soupçon de rythmes latinos à partir des années 1950. Invitée d’honneur de l’Ikhwani Safaa pour ce concert du centenaire, Bi Kidudé est la figure emblématique de la musique populaire zanzibari. Née Fatuma Baraka, son surnom Kidudé (“petite chose”) lui fut donné à sa naissance tant elle était une enfant fragile et menue. Bi veut simplement dire “Madame” en swahili. Cette Madame Piaf zanzibari, venue au Théâtre de la Ville en 1990, est aujourd’hui une nonagénaire extraordinairement alerte, déchirante et rayonnante d’énergie. Longtemps méprisée par une certaine aristocratie musicale en raison de ses origines modestes, elle jouit désormais d’une reconnaissance unanime et fervente – pour sa personnalité, pour sa voix, pour sa présence scénique et sa générosité, mais aussi parce qu’elle perpétue la tradition révoltée de Siti Bint Saad, qu’elle a connue et dont elle courait les taarab-s dès sa jeunesse. Francis Falceto Bangladesh Al-Kindî, ph. X.DR Ens. Shoghaken, ph. X.DR Ustad Shafi Mohammad Faqir, ph. P.-A. Baud versant – sindhi – de ce désert du Thar, dont est partie l’épopée gitane. Belle découverte, donc ! P.-A. B. LUN. 23 JAN. 20H30 USTAD SHAFI MOHAMMAD FAQIR musique soufie du Sind 6 musiciens Pakistan * Nom donné aux sanctuaires soufis dans le souscontinent indien. SAM. 28 JAN. 17H Voix du « dargah* aux tournesols » depuis des lunes, Ustad Shafi Mohammad Faqir nous rejoint enfin à Paris ! Faqir Mangalhaar, regard lumineux et sourire clair, Shafi entonne en effet depuis près de 30 ans le rituel du chant dans ce dargah des dargah-s situé à Jhok Sharif dans le Sindh méridional : celui du saint soufi et réformateur social Shaheed Shah Inayat, autre symbole de l’âme sindhie avec Shah Abdul Latif. Ici, pour le pèlerinage annuel, point de foule bruyante et affairée, si commune ailleurs : la plupart des pèlerins sont les Maîtres et les disciples des quelque soixante-dix sanctuaires affiliés au verdoyant mausolée de Shah Inayat. Signe de l’aura du lieu et de ses musiciens. Ustad Shafi Faqir n’est pas issu de Jhok. Il vient d’Umarkot, l’ancienne cité du désert du Thar, à quelques encablures du Rajasthan, là où vivent ses proches cousins Manganiyars. Mais que ce soit à Jhok ou Umarkot, là ou ailleurs, peut-être bien ici aussi à Paris, le sensuel velouté de sa voix ne peut qu’happer l’audience de sa magie, la transportant, voluptueux voyage, aux confins de l’âme nomade. Tapis volant vers 1001 nuitées de rencontres rêvées avec le Divin Amant… Étranges semi-retrouvailles, cependant, pour nous autres quelque peu accoutumés aux voix et vibrations des cousins de Shafi Faqir : les mélodies, les rythmes, certaines amorces dans la voix, le jeu instrumental, nous remémorent le Rajasthan tout proche. Et en même temps, la fougue, la nostalgie, la tendresse y sont d’une tout autre saveur, tout autre couleur, éveillant un tout autre bonheur… Après de superbes décennies de Rajasthan, le temps est venu, par la grâce de la voix caressante de Shafi Faqir, de lever un coin du voile qui couvre encore essentiellement l’autre ENSEMBLE AL-KINDÎ musique arabo turque de l’Empire ottoman Syrie création Julien Jalâl Eddine Weiss qânoun, direction Qadri Dalal oud Ziad Kadi Amin ney Adel Shams El Din riqq un chanteur alépin et un chanteur turc 3 instruments turcs (kamantché roumi, tanbur turc, kudum) târ azéri daf et tumbak persans Chaque rendez-vous avec l’ensemble Al-Kîndi et Julien Jalâl Eddine Weiss, son fondateur et directeur artistique, est l’occasion de superbes rencontres musicales. En témoigne cette nouvelle création qui marquera le 10e passage de l’ensemble au Théâtre de la Ville. Restés retranchés de part et d’autre des frontières imposées par les États nations pendant des siècles, les échanges culturels, artistiques et musicaux entre les pays situés de chaque côté de l’ancien Empire ottoman sont restés bien timides. Partant de l’idée que l’esthétique et les intervalles des musiques arabes, turques et persanes étaient sans doute fort semblables à la fin du XVIIe siècle, Julien Weiss a minutieusement travaillé sur un répertoire arabe ancien d’Alep, auquel il a mêlé une interprétation originale de pièces extraites des manuscrits de deux musiciens de Topkapi, la cour du palais du sultan. Ces deux personnages, hauts en couleur, érudits et raffinés, sont emblématiques d’Istanbul la cosmopolite : l’un, le prince chrétien moldave Dimitri Kantemir qui représente les terres suzeraines roumaines auprès de la sublime porte du même nom, Kremer et le saxophone de Jan Garbarek – kamancha, qânoun, tambour dhol, dham, flûte de berger shvi et deux voix. L’une féminine, l’autre masculine, tantôt solistes, tantôt réunies dans la complicité d’un duo, parfois a cappella… Pour porter noblement ce répertoire et le colporter de l’Arménie à l’Europe, en passant par la Russie et le Smithsonian Festival à Whashington. En attendant Paris. Jacques Erwan SAM. 25 FÉV. 17H ENSEMBLE SHAMS Iran HAMID-REZA NOURBAKHSH chant KÉYKHOSROW POURNAZÉRI tanbur LUN. 20 FÉV. 20H30 ENSEMBLE SHOGHAKEN 9 musiciens Arménie LA TRADITION RETROUVÉE Depuis la fin du XIXe siècle, les Arméniens ont recensé chants et airs de leur tradition : trente mille pièces sont ainsi répertoriées dans diverses archives. Cette richesse reposait initialement sur une musique modale et monodique propice à l’ornementation. Elle a ensuite connu quelques vicissitudes : occidentalisation, au XXe siècle, transcriptions polyphoniques, fossilisation et apprentissage académique imposé par les Soviétiques. À Erevan, l’Ensemble Shoghaken (source de lumière) fondé en 1991, figure à la pointe d’un mouvement né en Arménie post-soviétique, en faveur de l’usage de la tradition et d’une interprétation qui lui est conforme. L’écoute de sa musique justifie cette initiative. Le répertoire arménien recèle des chants religieux, dont certains notés depuis le Ve siècle (le christianisme est religion d’État depuis l’an 301), les chants poétiques des Ashug, ces troubadours dont la tradition se poursuit du XVIIe au XIXe siècle, ainsi que l’ensemble de la musique populaire. Celle-ci accompagne les temps de la vie et même la mort. Ses textes usent de la langue familière. Des éléments païens subsistent dans certains chants. Entre Anatolie et Caucase, ce répertoire varie. Entre est, fief du duduk, et ouest, royaume du oud, également. L’Ensemble Shoghaken puise dans ce riche patrimoine. Il interprète des œuvres héritées des Ashug tels que Sayat Nova (XVIIIe siècle) et Gusan Sheram (XIXe et XXe siècles), des chants de la tradition populaire (chants d’amour et de mariage, de travail et d’exil, berceuses, chants épiques et patriotiques) sublimes, déchirants et pathétiques, ainsi que quelques musiques rituelles. Le duduk est le souffle de l’âme, le shvi le chant de l’oiseau. Huit musiciens concourent à la beauté de l’entreprise : duduk-zurna , tenus par le fondateur du groupe – il a côtoyé le violon de Gidon Tahmourés Pournazéri tanbur Sohrab Pournazéri kamantché Hossein Rezaïna daf Shahab Parang tombak On serait tenté de croire que le virtuose du tanbur Kéykhosrow Pournazeri a voulu relever un véritable défi en donnant le nom de Shams à l’ensemble qu’il créa en 1980. Un nom qui exclut d’emblée toute médiocrité. Shams en persan ne signifie-t-il pas soleil ? N’est-ce pas aussi le nom du maître de Rumi, le plus renommé des poètes persans ? Pas facile non plus de porter le tanbur, ce luth très ancien à deux ou trois cordes et long manche, jusqu’alors confiné dans le cercle des derviches et le répertoire profane du Kurdistan iranien, au plus haut rang de la musique classique persane, à l’égal du târ. C’est pourtant le défi que l’ensemble Shams relève avec brio à chacun de ses concerts. Il faut dire que son fondateur, né en 1944 à Kermanshah dans le Kurdistan iranien, a de qui tenir. Comme son célèbre cousin Shahram Nazeri qu’il a accompagné sur la scène du Théâtre de la Ville en 1992, il aime s’entourer d’excellents musiciens, capables de distiller cet art intimement lié à la musique persane : l’improvisation et cette intimité si douce entre voix et instruments. Pour ce concert, Hamid-Reza Nourbakhsh, 40 ans, fin connaisseur des belles-lettres persanes, ancien élève de Shadjariane et directeur du conservatoire de musique de Téhéran depuis 1996, dialoguera avec les cinq instruments qui répondront aux accents de sa voix puissante, chaude et veloutée : deux tanburs, aux côtés de Kéykhosrow Pournazeri, son fils Tahmourès, 28 ans ; au kamantché, vièle à archet, son deuxième fils, Sohrab, 22 ans, élève de Nourbakhsh pour le chant ; au daf, grand tambourin, Hossein Rezaïna, 29 ans, élève de Bijan Kamkar et membre de l’ensemble Shams depuis 96 ; au tombak, percussion, Shahab Parang, 22 ans, qui a eu comme professeur un frère Kamkar. Jacqueline Magnier Hamid-Reza Nourbakhsh, ph. Kamrouz l’autre, le chantre juif polonais Albert Bobowski qui a été vendu comme esclave et converti sous le nom de Ali Oufki. Pour réussir ce pari original et ambitieux, Julien Jalâl Eddine Weiss souhaite réunir pour la première fois autour de l’ensemble arabe Al-Kîndi de grands maîtres turcs, azéris et persans qui laisseront une large place à l’improvisation. Ils feront résonner tanbur et kamantché ottoman aux côtés du ney, luth et qânoun arabes afin de retrouver l’interprétation la plus juste et la plus raffinée de la musique arabe, telle qu’elle devait être jouée à Alep durant l’âge d’or de l’empire ottoman. Une bien belle façon de réconcilier les traditions ! P. Chatterjee et K. Ramnath, © Sense World Music Nassima, ph. J.-P. Lozouet SAM. 25 MARS 17H NASSIMA chant et mandol Algérie voix soufie, voix d’amour, six siècles de poésie soufie création Noureddine Aliane oud Rachid Brahimdjelloul violon Pierre Rigopoulos daf Mustapha Belkaïd basse Kamel Labbaci ney Khalfa percussions Après deux concerts de chant arabo-andalou donnés Théâtre de la Ville dans une salle comble, Nassima la radieuse propose une création autour de poètes soufis qu’elle méditait avant même de s’installer en France. Il lui aura fallu l’éloignement du pays natal pour patiemment tisser sa toile : se procurer d’anciens recueils de poèmes, voire des copies de manuscrits provenant de diverses régions du monde arabe, tous les livres contenant des œuvres des grands poètes voyageurs, Ibn Arabi, le plus prolixe des auteurs du monde arabes, et Abou Madyane, tous deux Andalous du XIIe siècle. Sa surprise est la découverte des écrits de l‘émir Abdelkhader qui, au XIXe siècle, se considérait comme un disciple d’Ibn Arabi. Un autre Algérien d’importance retient son choix : Ahmed el Alaoui, maître à penser des confréries de Mostaganem. Au cours de ses lectures, elle découvre que certains poèmes anonymes qu’elle chante dans le répertoire andalou sont dus à Abou Madyane… La poésie, qui rend compte du vécu intérieur, partage avec la mystique une essence ineffable et symbolique. Les images poétiques les plus fortes retiennent l’attention de la chanteuse. Les chants des muezzins qui la fascinaient toute petite bourdonnent encore en elle tandis qu’elle compose, choisissant des modes et des rythmes propres à souligner la force expressive des poèmes. Après trois ans de travail pour aboutir, elle enregistre cette œuvre à paraître, et le résultat est magnifique. Sereine et irradiante de joie intérieure, Nassima a gagné son pari. C.L. SAM. 1er AVR. 17H PURBAYAN CHATTERJEE sitar KALA RAMNATH violon jugalbandi, duo de sitar-violon Inde du Nord Subhankar Banerjee tabla Popularisé par le violoniste V.G. Jog (voir les grandioses albums avec Bismillah Khan, shanaï et Vilayat Khan, sitar), comme par Ali Akbar Khan et Ravi Shankar, le jugalbandi, duo de solistes, genre apparu dans les années 50, jouit d’un attrait non encore démenti par le suspens qui en émane. Le public est féru d’entendre différentes combinaisons, même les rencontres entre musiques du Nord et du Sud. Faisant partie de la fine fleur de la jeune génération des instrumentistes du Nord très demandés, Purbayan Chatterjee et Kala Ramnath ont donné leur premier duo à Cap Town en 2003. Chacun appréciant la musique de l’autre, ils se sentaient en confiance pour mettre leurs jeux en harmonie. La seule méthode à appliquer dans un face-à-face d’instrumentistes (qui sont avant tout des solistes) est d’éviter les écueils, l’ego devant s’effacer pour laisser place à la liberté équitablement partagée d’un voyage musical dont on ne peut prédire les chemins de traverse qu’il va prendre. RAJAN ET SAJAN MISRA chant khyal Inde du Nord accompagnés au tabla et à l’harmonium Le duo Rajan et Sajan Misra est comparable par son impact esthétique à celui des légendaires Nazakat et Salamat Ali Khan qui défrayèrent la chronique dans les années 60. Ici, rigueur et flamboyance vont de pair dans l’art consommé de deux personnalités complémentaires. À Bénarès, ils côtoient les plus grands chanteurs et instrumentistes de ce sanctuaire millénaire où les distractions sont rares, et ont le loisir d’étudier et de pratiquer sans relâche avec leur père Hanuman Misra et leur oncle Gopal Misra, l’un des meilleurs joueurs de sarangi d’alors. Rajan le Magnifique et Sajan le Subtil ont créé un style sobre mais haut en couleur, où coule une sève spirituelle. Leur répertoire comprend nombre de compositions remarquables par la qualité des thèmes abordés (qui proviennent de l’hindouisme philosophique et religieux) comme par le choix des raga-s qui épousent l’aspect sacré du dhrupad, ancêtre hiératique du khyal. Après le bhara khyal, lent et majestueux, jaillissent des compositions plus vives où brille leur savoir-faire : improvisations mélodiques et rythmiques contrastées, oscillations puissantes et répétées, phrasés rapides comme des flèches. L’ambitus des basses aux aigus s’étire, la voix puissante de Rajan est portée au maximum, tandis que celle de Sajan lui répond dans des improvisations d’un style somptueux. Survient alors le tarana aux accents rythmiques jubilatoires, suivi d’un thumree romantique et d’un bhajan dévotionnel dédié à Krishna. L’adoration qu’expriment les frères Rajan et Sajan a fait son œuvre et LUN. 19 JUIN 20H30 L’ENSEMBLE DE MALOUF DE LA GRANDE JAMAHIRIYA direction Hassan Araibi Libye LE MALOUF EN HÉRITAGE. L’isolement rompu, à nouveau la Libye s’éveille. Son patrimoine musical est riche et recèle genres et styles divers. Appelée aussi là-bas malouf, la tradition arabo-andalouse s’y perpétue. L’Ensemble de malouf, fondé en 1964, en est l’un des fleurons, apprécié à l’intérieur du pays comme à l’extérieur. C’est un grand orchestre qui rassemble des musiciens amateurs, tous talentueux : oud, chant, ney, qânoun, violons, contrebasse et percussions. Il est dirigé par Hassan Araibi (oud et chant), par ailleurs directeur de l’Institut national de la musique orientale de Tripoli. C’est un homme de petite taille, portant l’habit traditionnel et coiffé du tarbouch. Depuis une cinquantaine d’années, il met son talent au service de la musique. Féru des traditions arabe et libyenne, il inscrit également au répertoire de l’Ensemble, outre le malouf, “chants ornés” et “mélodies arabes”. « J’ai, dit-il, hérité le malouf de mon grand-père, un sheikh tripolitain. » Il entreprend ensuite des études musicales au conservatoire de Tunis et approfondit ses connaissances. Il considère cependant que le système musical occidental ne convient guère à la musique arabe. « En Libye, observe-t-il, les nubas se distinguent de leurs sœurs tunisiennes, algériennes et marocaines par le rythme et l’ornementation. En revanche, les maqamat, les modes, sont les mêmes. » Une occasion rare de découvrir cette variante originale de la savante musique araboandalouse. J. E. Hassan Araibi, ph. J. Erwan LUN. 5 JUIN 20H30 nous mène à une sensation proche de la béatitude… Leur dernier concert, exceptionnel, au Théâtre de la Ville en mai 2004, enregistré en direct, sortira prochainement en CD dans la collection naïve-Théâtre de la Ville. C. L. Rajan et Sajan Misra, © Sense World Music Appartenant à la septième génération d’une famille de musiciens tamouls du Sud, Kala Ramnath a choisi la musique du Nord. Disciple remarquée de Jasraj, elle avait accompagné le légendaire chanteur au Théâtre de la Ville en 1996. Purbayan Chatterjee, Bengali de Calcutta, étudie avec son père sitariste, disciple d’Ali Akbar Khan et de Nikhil Banerjee. Pourvus d’un bagage musical exceptionnel et d’une fine sensibilité, d’une belle présence scénique, ces deux artistes prometteurs ont l’art de se compléter harmonieusement, prenant soin de jouer les mêmes versions des compositions choisies avec beaucoup d’allure. Un régal ! C. L. Gholam Dasreguir Homayoun, ph. Kamrouz K. Rosenwinkel, ph. Ian Gittler MUSIQUES DU MONDE AUX ABBESSES SAM. 1er OCT. 17H SAM. 15 OCT. 17H GHOLAM DASTEGUIR HOMAYOUN rubâb KURT ROSENWINKEL guitare 4 musiciens Afghanistan « C’est le chant de la porte qui ouvre sur le paradis. » Ainsi Rumi définit le secret de la mélodie du rubâb. Ce luth en bois de mûrier, à double caisse de résonance, muni de trois cordes mélodiques et douze à quinze cordes sympathiques, était particulièrement populaire à Hérat, au nord de l’Afghanistan, avant que les talibans ne le fassent taire. Mais en réalité, il ne s’est jamais tu. Quelques musiciens ont déjoué l’interdit, sortant dans la clandestinité les instruments qu’ils avaient réussi à dissimuler. D’autres ont choisi l’exil. C’est le cas du jeune Gholam Dasteguir Homayoun qui, en 1992, émigre au Pakistan avec toute sa famille. Depuis, il a ouvert à Peshawar l’une des rares écoles de musique afghane dans la région. Les sonorités du rubâb, aux accents indiens et pakistanais, tiennent du divin lorsqu’elles émanent de son doigté léger, tout en nuances. Avoir eu pour maître Ustad Mohammad Omar, le “sultan du rubâb” mort en 1980, n’est pas étranger à l’excellence de son jeu aérien. Au Théâtre de la Ville, chacune de ses apparitions fut très remarquée : en 2001, avec Gholam Mohammad Attai, rubâb ; en 2002, avec le chanteur Davoud Sarkhokh et dans un concert mémorable qui réunissait sept musiciens dont Abdol Pandchiri et Rahim Takhari, 70 ans. Pour ce sixième concert consacré à la musique afghane – le premier en 1995 et le second en 2001 en présence de l’inoubliable Ustad Rahim Khushnawaz au rubâb – le Théâtre de la Ville donne carte blanche à la jeune génération pour qu’à son tour, elle révèle ces “secrets du cœur” dont, une fois encore, parle si bien Rumi : « Ô son du rubâb, d’où viens-tu donc ? Plein de feu, plein de désordre et plein de trouble ! Tu es l’espoir du cœur et le messager de ce désert Tout ce que tu enseignes, ce sont les secrets du cœur. » J. M. JAZZ MARK TURNER saxophone AARON GOLDBERG piano JOE MARTIN contrebasse ARI HOENIG batterie C’est au début des années 90, aux côtés du vibraphoniste Gary Burton mais aussi et surtout au sein de l’Electric Be-Bop Band du batteur Paul Motian, que Kurt Rosenwinkel s’est pleinement révélé. Le guitariste américain, la trentaine passée, a très tôt fait ses classes de jazz sur les bancs du célèbre Berklee College of Music de Boston, pour mieux se frotter à la scène de la Grosse Pomme et voler de ses propres ailes. D’où quatre disques sous son nom en quatre ans sur le label Verve, dont le récent et très remarqué Deep Song, en quintette avec Joshua Redman, Brad Meldhau, Larry Grenadier et Ali Jackson. Plutôt « antiguitare zéro » qu’hyperguitariste, Kurt Rosenwinkel s’impose plus comme musicien et compositeur qu’instrumentiste virtuose. Une grande précision du phrasé, une belle liberté rythmique, une articulation exemplaire, un sens de la construction dynamique et de l’architecture complexe, Kurt Rosenwinkel est un guitariste exigeant, ondulant et chavirant. Sa musique, libre et rigoureuse, est fondée sur le geste et sa spontanéité. Son jeu allie subtilement les contraires, puissance et délicatesse, équilibre et mise en péril, souplesse et fermeté. À ses compagnons du jour, le saxophoniste ténor Mark Turner, le pianiste Aaron Goldberg, le contrebassiste Joe Martin et le batteur Ari Hoening, il offre un jeu limpide, dynamique et tout en nuances. Soit un quintette flamboyant qui maîtrise toutes les dynamiques du jazz, tendresse brûlante, intelligence des ruptures, entrelacs de virtuosités et de lyrismes, collision de traditions et d’improvisation. D’où une musique tout en turbulences contrôlées, spontanée et structurée, d’une grande et belle force d’expression. Franck Médioni Chota Divana, ph. H. Bozzi CHOTA DIVANA Rajasthan 9 musiciens et chanteurs LES ENFANTS DU RAJASTHAN Les musiciens et poètes des castes Manghaniyar et Langa du désert du Thar et de la région de Jodhpur, princiers, insolents de beauté et de virtuosité, possèdent la majesté de leur environnement : le Rajasthan (mot sanskrit signifiant Pays des princes). Cette définition s’applique aussi aux jeunes enfants de ces castes d’artistes qui portent déjà en eux l’une des traditions les plus brillantes du continent indien. L’ensemble Chota Divana (textuellement les petits Divanas, en référence à l’ensemble Divana formé, lui, d’adultes) fit son apparition dans le cadre de la célébration de l’an 2000. Cette année-là, le public français découvrait, notamment au Théâtre des Abbesses, ces enfants habités par cette brillance des yeux et des mots, par des vocalises suraiguës tentant de se frayer un chemin dans le labyrinthe d’une connaissance musicale complexe. Ces jeunes chanteurs, âgés alors d’une douzaine d’années, accompagnés de leurs aînés et maîtres, ont charmé par leur virtuosité espiègle et leur maîtrise de leur art, le public du Théâtre des Abbesses. Cette saison, de nouveaux enfants viendront à leur tour déclamer l’effervescence poétique de ces chants qui peuplent toujours l’existence rituelle et cyclique d’une vie qui s’abreuve encore au rythme de la nature, de la terre et des divinités. De l’ancienne formation, seul le jeune Gazi Khan Junior reviendra. Adolescent à l’époque, jeune adulte aujourd’hui, il suit les traces de son père décédé dans les années 80, Bungar Khan, considéré et adulé comme le plus grand chanteur de la caste des Manghaniyars. L’art du jeune Gazi Khan a atteint une étonnante maturité et, entouré de ses aînés, il s’impose aujourd’hui comme un futur grand maître. Il s’est imprégné des techniques vocales hallucinantes de son père ; sa voix en parfaite osmose avec le kamanchiya (la vièle des Manghaniyars) ou l’harmonium, s’élève, sinueuse et saccadée. Alain Weber SAM. 19 NOV. 17H GHADA SHBEIR chants syriaques Liban L’EXTASE SACRÉE Le syriaque appartient à la même famille que l’araméen. Du IIIe au XIIIe siècle, il devint la langue littéraire chrétienne. Ancien, son chant précède cependant l’avènement du christianisme. Il ne s’inscrit ni dans la tradition musicale arabe ni dans celle du chant grégorien. Profondément enraciné dans les civilisations du Proche-Orient, il s’est transmis oralement de génération en génération car il n’existait aucune notation. Ainsi les mêmes mots s’accommodent de diverses mélodies et une même mélodie s’acoquine à différents textes. Le chant syriaque est minimaliste : il se joue avec trois, quatre ou cinq notes. C’est généralement une forme brève, un chant simple et austère. On l’interprète a cappella. Cependant, il arrivait parfois qu’il soit accompagné d’instruments de percussions : clochette, hochet ou cymbales. Son rythme est libre, varié, et repose sur une structure simple. Sa densité est telle qu’il envoûte l’auditeur. Ghada Shbeir est née au Liban. À dix-sept ans, elle commence son apprentissage musical et intègre peu après l’université libanaise du Saint-Esprit de Kaslik (USEK). Quatre ans plus tard, elle obtient son diplôme. Tandis qu’elle suit des cours de chant, elle participe aussi à des concerts internationaux et interprète chants traditionnels et religieux. Elle est diplômée de chant et de musicologie de l’USEK. Elle enseigne au sein de cette université ainsi qu’au Conservatoire national et parcourt le monde. De la Pologne au Canada en passant par l’Italie et la Grande-Bretagne, elle offre ce chant hiératique, sobre et dépouillé. Sa voix nue éclate dans toute sa pureté et séduit d’emblée. Elle emporte l’âme dans une sorte d’extase sacrée. Le répertoire syriaque est composé de chants brefs, certains durent moins d’une minute. Il s’étend à un éventail de traditions religieuses chrétiennes : les rites maronite, orthodoxe, catholique, chaldéen et byzantin. Un chant profond qui invite au recueillement, procure la paix intérieure et réjouit l’âme. J. E. Ghada Shbeir, ph. X. DR SAM. 12 NOV. 17H ET LUN. 14 NOV. 20H30 Ashiq Hassan, ph. M. Karroubi semble avec lequel il effectue des tournées, a fondé une société d’édition et de diffusion de musique traditionnelle en 1995, et, en 1997, a ouvert une école pour encourager les jeunes à perpétuer et enrichir le patrimoine. « Je sais que parmi mon peuple, je suis écouté », chante Ashiq Hassan. Une parole qui passera les frontières pour venir jusqu’à nous. J. M. SAM. 4 MARS 17H ET LUN. 6 MARS 20H30 LJILJANA BUTTLER “The mother of Gypsy soul” MOSTAR SEVDAH REUNION ASHIQ HASSAN Azerbaïdjan iranien Ashiq Hassan Eskandari chant, sâz Ashiq Ashraf Hosseinpour chant, sâz Salman Pourmohammad bâlâban Ali Gharadâghi dâyrâ On connaît la république d’Azerbaïdjan qui s’étend au sud-ouest de la mer Caspienne et sur une partie du Caucase. On connaît moins l’Azerbaïdjan iranien, province située au nordouest de l’Iran, là où les frontières culturelles avec son voisin du même nom sont restées poreuses. Province atypique, l’Azerbaïdjan iranien possède, au côté du persan, sa propre langue, l’azéri. Elle est aussi terre des bardes âshiqs. Ces musiciens itinérants, conteurs d’épopées et de légendes, dastan, jouent un rôle social important : ils annoncent les nouvelles, participent aux festivités et autres grands événements de la vie. Shiq vient de l’arabe qui signifie “amoureux”. Pas étonnant que ces poètes aiment chanter la nature et les amours, possibles et impossibles. Accompagnés au sâz (luth de 8 à 12 cordes), au bâlâban (sorte de clarinette), au dâyrâ (percussion), ils sont une mémoire vivante dont on retrouvera l’écho sur la scène du Théâtre de Ville. Ashiq Hassan Eskandari, qui a donné son nom à l’ensemble, sera de ceux-là. Né en 1947, il gagne, encore enfant, Tabriz, la capitale de la province, pour devenir tisserand. Mais l’envie d’apprendre le chant le conduit à Téhéran où, deux ans durant, il travaille comme boulanger pour payer ses études musicales. En 1970, sa vie familiale le ramène à Tabriz où il peut enfin se consacrer à ce qui est devenu sa raison de vivre : l’art des bardes âshiqs. Depuis, il a créé, en 1985, un en- Ilijaz Delic chant avec guitares, accordéon, clarinette, violon, percussions Bosnie À soixante ans passés, “Lilli” Buttler est la figure incandescente du sevdah, genre populaire emblématique de l’ex-Yougoslavie, art de vivre et de sentir, à la fois blues et rythm & blues. Adulée dans son pays, cette grande revient de loin ! Née à Belgrade d’un accordéoniste virtuose et d’une chanteuse croate, la « Reine du blues de Mostar » est gitane. Elle joue même du piano, chante très tôt, et pieds nus : c’est dans sa nature. Cesaria Evora, qu’elle surpasse en charisme, a célébré la morna ; “Lilli” Buttler nous entraîne dans le maelström coloré du sevdah. Chez elle, l’amour, l’humour et la tragédie ne font qu’un. Pressentant le désastre à venir, elle s’installe en Allemagne avec ses filles. L’idole de toute la Yougoslavie des années 70, que l’on connaissait sous le nom de Ljiljana Petrovic, disparaît de la scène pendant dix ans, vivant de menus travaux pour survivre. Un jeune admirateur bosniaque recherche sa trace pendant deux ans et la convainc d’enregistrer un CD à Mostar, port adriatique dont elle aimait le pont médiéval alors reconstruit, et où elle vécut. La paix revenue, “Lilli” retourne régulièrement au pays où personne ne l’a oubliée, jusque dans les kafanas de Belgrade, ces cafés – restaurants prisés où l’on danse tard dans la nuit. Elle apparaît toute en rondeur, presque langoureuse, ses yeux étincelant. Sa voix androgyne et sensuelle nous rappelle celle de la Grecque Sotiria Bellou et de son vague à l’âme. Ses fins de phrases en soupirs évoquent l’envoûtante Oum Kalsoum. Tant d’émotion à fleur de peau nous fait revivre aussi le monde de Billie Holliday. C.L. Ljiljana Buttler, ph. X. DR SAM. 21 JAN. 17H USTAD BARE FATEH ALI KHAN chant classique 4 musiciens Pakistan Salar Aghili, ph. X. DR Dernier musicien de la cour du maharadjah de Patiala, incarnation vive de la flamboyance du khyal, brillantissime compositeur-interprète de Ragas and Saagas – album qui aura marqué bien des âmes vagabondes –, Ustad Bare Fateh Ali Khan nous offre un concert au Théâtre des Abbesses. Place donc au génie vocal ! Si Ragas and Saagas – conçu notamment avec le saxophoniste Jan Garbarek – indiquait l'à-propos contemporain du Maître, l'axe essentiel de son art demeure ce khyal dont il évoquera avec bonheur quelques arcanes veloutés. Un des rarissimes vieux maîtres encore en vie (et quelle vie ! Quel éclair dans son sourire ! Quelle vitalité dans son regard !), Ustad Bare Fateh Ali Khan incarne à la perfection les brillantes heures de la Patiala gharana, une des principales écoles du chant classique hindoustani... issue de l'exil amoureux de son arrière-grand-père Mian Kalu ! Cette école incorpore dans un saisissant maelström le style lyrique de Delhi, l'impulsivité de Gwalior, la saveur “dhrupadie” de Jaïpur, les taan-s tout en spirale de Rewa... Tout en s'appropriant l'empreinte des musiques populaires punjabies et celles d'autres régions de l'Inde du Nord... Génie ! Considéré comme une légende vivante, cette belle âme demeure pourtant trop mésestimée dans son pays. Refusant un exil économique souvent proposé, Ustad Bare Fateh Ali Khan bataille contre la disparition progressive de la sagesse musicale hindoustanie, essayant non seulement de la transmettre au mieux, mais aussi de la prolonger, de l'élargir vers de nouveaux horizons. Ses deux fils tentent de prendre le relais mais la modernité environnante peut être si fracassante... Ne manquez pas cette occasion rare – seul concert français, et peut-être européen – d'apprécier une voix, une présence d'exception. P.-A. B. Ustad Bare Fateh Ali Khan, ph. S. Kia SAM. 11 MARS 17H SAM. 18 MARS 17H SALAR AGHILI chant Hamed Fakouri târ Shervine Mohajer kamantché Mohsen Sadeghi ney Harir Shariat Zadeh daf Iran Que ceux qui douteraient encore de la vitalité de la tradition classique persane se rassurent : une nouvelle génération de musiciens prend la relève de leurs brillants aînés. En témoignent Salar Aguili et les quatre instrumentistes qui l’entoureront lors de ce concert unique. Les cinq trublions ont bien des points communs : une solide formation acquise auprès des plus grands maîtres, une fidèle amitié qui les unit depuis leur adolescence, l’audace et l’énergie d’une jeunesse – ils ont tous moins de 30 ans – qui les poussent à bousculer les règles de la tradition et à tirer profit des fructueuses rencontres musicales effectuées hors de leur pays natal. En 2002, le Théâtre de la Ville présentait Âvâyé Douste (la mélodie de l’ami), un ensemble de six jeunes musiciens, tous amis d’enfance. Fait exceptionnel en Iran, il regroupait une majorité de femmes et une seule voix masculine, celle de Salar Aguili, épousant à merveille les modulations du sétâr. À 28 ans, cet ancien élève de Mohammad Reza Shadjarian au conservatoire de Téhéran où il enseigne à son tour, chante avec autant de plaisir les grands classiques de la poésie persane, Hafez et Rumi, que les contemporains, Forough Farrokhzad et Akhavahe Salès. À 21 ans, il créait déjà un ensemble, Raz o Niaz, avec lequel il parcourt l’Europe. Avec lui : au târ (luth à manche court), Hamed Fakouri, un ancien élève de Dariush Tala’i, Lotfi et Hossein Alizadeh ; au kamantché (vièle à archet), Shervine Mohajer, un jeune virtuose prometteur ; au ney, cette flûte de roseau si chère au poète Rumi, Mohsen Sadeghi ; au daf (grand tambourin), Harir Shariat Zadeh, épouse de Salar Aguili, déjà présente en 2002 avec le groupe Âvâyé Douste. Jeunesse, harmonie et sensibilité pour un concert raffiné. J. M. Lui Fang, ph. A. Cronchaw, Froots Magazine UK2003 Ensemble Ibn Arabi, ph. X. DR LUN. 27 MARS 20H30 ENSEMBLE IBN ARABI Maroc chant, qânoun, oud, ney, violon, bendir Ahmed El Kheligh direction musicale LA VOIE DE L’AMOUR Le Maroc est un royaume où se perpétuent les traditions. L’Ensemble Ibn Arabi conjugue deux d’entre elles qui se mêlent dans le creuset de la musique : l’une, soufie, relève de la mystique, l’autre, arabo-andalouse, de la musique dite “classique”. Ainsi distille-t-il une musique subtile et raffinée. Le nom de la formation évoque un illustre soufi des XIIe et XIIIe siècles que ses pérégrinations ont conduit de l’Espagne, où il naquit, à la Syrie où il expira. Et c’est à partir du lieu de rencontre des adeptes d’une confrérie, une zaouia affiliée à la confrérie darqawiya, que s’est constitué l’Ensemble. Outre les noubas, longues suites instrumentales et vocales, le patrimoine arabo-andalou recèle bien d’autres trésors transmis oralement au fil du temps : style original de cantilation du Coran, chants à la gloire d’Allah et du Prophète, ainsi que ceux propres aux zaouia. L’Ensemble Ibn Arabi puise dans ce répertoire et interprète des pièces chantées au sein des zaouia dont les textes, des poèmes, sont l’œuvre de célèbres soufis : Ibn Arabi, bien sûr, mais aussi, Ibn Al Faridh, Al Shushtari, Al Harraq, ou encore Rabia Al Adawiya… En guise d’introduction à ces chants, il offre des improvisations instrumentales (taqsim) et des pièces vocales non rythmées en solo (mawwal). Les six membres de la formation (ney, oud, qânoun, violon, bendir et chant) ont fréquenté la même zaouia de Tanger et divers conservatoires marocains. Certains ont étudié la théologie. Directeur musical de l’Ensemble, Ahmed El Kheligh est une référence, la voix des musiques et chants soufis à Radio Méditerranée internationale. Tous artistes accomplis, ils ont visité divers pays dont la Libye et l’Inde et partagé le pain de l’amour : « L’amour n’est rien, s’il n’est pas celui qui anéantit », écrivait Ibn Al Faridh. Des mots que chante aujourd’hui la voix suave du jeune Abdellah al Mansour El Kheligh dans la plénitude de son art. J. E. LUN. 8 MAI 20H30 LIU FANG pipa, guzheng Chine LE CHANT DE L’ÂME Dans sa musique, il y a la turbulence des sons, les tempêtes d’accords et l’éloquence du silence. Et « derrière chaque note, il y a l’âme », dit Liu Fang. On ne saurait mieux affirmer la profondeur de son art. Celui du pipa, luth sans doute venu de Perse et mentionné déjà dans des textes deux siècles avant l’ère chrétienne. Depuis la dynastie des Tang (618907), inscrit dans un ensemble ou soliste, il conserve sa popularité. Caisse en forme de poire et manche court, tendu de quatre cordes, il compte trente frettes. Son jeu requiert une grande dextérité : la main droite dont chaque doigt est armé d’un plectre gratte les cordes, la main gauche court sur le manche et crée effets de tonalité et nuances. La maîtrise technique permet une virtuosité à caractère descriptif. Le répertoire de cette musique de divertissement, transmis de maître à élève au fil des siècles, se partage entre la musique dite « militaire » – elle décrit avec vigueur les combats légendaires – et la musique dite « littéraire » – elle s’inspire de poésie, de drames historiques et de paysages. La nature n’est-elle pas la muse éternelle des artistes chinois ? Clair de lune sur la rivière ou canards barbotant dans l’eau froide, Liu Fang crée des paysages sonores quasi cinématographiques. Et c’est à la peinture qu’elle se réfère pour expliquer le silence : « Dans la peinture chinoise, il y a des espaces vides qui concourent à l’harmonie. Ils permettent au spectateur de s’inscrire dans le tableau. C’est comme un dialogue. Ainsi, dans la musique, les vides sont l’espace laissé entre les notes et on réalise que le silence est plein de musique ». Liu Fang joue aussi du guzheng, une cithare sur table, tendue de vingt et une cordes, devenue, depuis le XIXe siècle, un instrument soliste. Sa main droite pince les cordes avec un plectre, la gauche les touche produisant ainsi la hauteur voulue et une variété de timbres. Talent précoce, Liu Fang, née à Kumming, province du Yunnan (Chine méridionale), donne son premier concert dès l’âge de neuf ans. Diplômée du conservatoire de Shangaï en 1993, elle a dix-sept ans et choisit de vivre au Canada. Elle poursuit depuis lors une carrière internationale et offre ainsi les joyaux de la musique classique traditionnelle chinoise. Son jeu brillant dérive de la douce floraison des tons aigus du pipa à l’orage de ces courses éclatantes dont l’intensité, dit-on, arracherait des larmes à un maître du flamenco ! J. E. Kadri Golpalnath, ph. X. DR SAM. 13 MAI 17H KADRI GOPALNATH saxophone, musique carnatique Kanyakumari violon Inde du Sud accompagné au thavil et à la guimbarde Fils d’un joueur de nadaswaram (hautbois des temples du Sud), Kadri Gopalnath découvre l’existence du saxophone en 1964 en assistant à un concert de l’orchestre privé du maharadjah de Mysore, dans l’État du Karnataka dont il est originaire. Le son le charme, la forme l’intrigue, d’autant plus qu’il ne connaît pas le nom de ce petit monstre mystérieux. Pris de passion, il se le procure six mois plus tard. Mais comment utiliser les clés alors qu’aucun instrument indien n’en possède ? L’adolescent têtu doit tout réinventer et passe trois années à maîtriser ses gammes sur une centaine de raga-s, sa mère lui prédisant qu’il va en mourir. Depuis, se faisant d’abord apprécier en jouant dans des temples et des petits cercles musicaux, Kadri a fait du chemin. Cet homme affable, aux yeux volontiers rieurs et pétillants de bonheur, bouge comme un diablotin : on voit qu’il aime la vie, qu’il la prend d’instinct à bras le corps. Aimé et respecté des musiciens traditionnels, il sait toucher toutes les générations par sa présence, son sens de l’invention, sa science rythmique évolutive et un son à la chaleur dorée. Les anciens reconnaissent son adhésion aux canons essentiels de la musique carnatique, avec sa vue élevée et universelle ; les jeunes s’enthousiasment à entendre la musique de leurs aînés suivre les chemins de la modernité. Devenu célèbre, Kadri se produit avec la violoniste Kanyakumari qu’on a pu déjà entendre au Théâtre de la Ville avec son ensemble instrumental Vadya Lahari, en compagnie d’une veena et d’un… nadaswaram, justement ! C.L. LUN. 12 JUIN 20H30 CHANTS DE LA TIHAMA Yémen DES TRADITIONS VIVANTES À l’ouest du Yémen, la province de la Tihama s’étend jusqu’aux rives de la mer Rouge. Fondé au XIIIe siècle, Bayt Al-Faqih est un gros bourg. Il abrite un marché connu des amateurs de café du monde entier depuis le début du XVIIIe siècle. chants de la Tihama, photos J. Erwan Ce jour-là, c’est l’heure du qat, ces feuilles légèrement euphorisantes mâchées tout au long de l’après-midi. Au siège de l’association culturelle locale, c’est aussi le temps de la musique. L’atmosphère est lourde et chargée d’humidité. Un homme appartenant à la tribu des Akhdâm, située au plus bas de la hiérarchie sociale, Sa’d Al-Yamani, interprète à voix nue un chant des parias, hobari, en une sorte de parler-chanter. Puis deux compères, que l’on dirait tout droit sortis d’un conte oriental, Hâmili’Ubayd Uthman et Yahya Habal, nouent un subtil dialogue : voix et flûte du berger se répondent. C’est le matwah, musique délicate et raffinée. Enfin, un soliste, auquel répond un chœur de quatre voix, offre quelques joyaux du shalla, ces chants d’amour courtois interprétés a cappella. Un répertoire que l’on entend, entre autres, lors des fêtes de mariage. Trois styles, puisés au cœur de la Tihama, que ces huit artistes yéménites offriront au public du Théâtre des Abbesses. J. E. NOVEMBRE 2005 calendrier SEPTEMBRE 2005 LU 12 MA 13 ME 14 JE 15 VE 16 SA 17 DI 18 LU 19 MA 20 ME 21 JE 22 VE 23 SA 24 DI 25 LU 26 MA 27 ME 28 JE 29 VE 30 THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES 20h30 20h30 William Burroughs… William Burroughs… William Burroughs… William Burroughs… 1er prog. 1er prog. 1er prog. 1er prog. William Burroughs… William Burroughs… William Burroughs… William Burroughs… OCTOBRE 2005 THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES 20h30 mat 15 h ◆ 20h30 mat 15 h ◆ SA 1 G. Shaham/I. Golan 17h Homayoun 17h Preljocaj 1er prog. William Burroughs… DI 2 Preljocaj 1er prog. ◆ William Burroughs…◆ LU 3 MA 4 Preljocaj 1er prog. William Burroughs… ME 5 Preljocaj 1er prog. William Burroughs… JE 6 Preljocaj 1er prog. William Burroughs… VE 7 Preljocaj 1er prog. William Burroughs… SA 8 Mehr et Sher Ali 17h Bousková/Langlamet 17h Preljocaj 1er prog. William Burroughs… DI 9 LU 10 MA 11 A. Khan/S. L. Cherkaoui R.Orlin / V. Mantero ME 12 A. Khan/S. L. Cherkaoui R.Orlin / V. Mantero JE 13 A. Khan/S. L. Cherkaoui R.Orlin / V. Mantero VE 14 A. Khan/S. L. Cherkaoui R.Orlin / V. Mantero SA 15 K. Chakrabarty 17h K. Rosenwinkel 17h A. Khan/S. L. Cherkaoui R.Orlin / V. Mantero DI 16 A. Khan/S. L. Cherkaoui ◆ LU 17 MA 18 La Visite de la vieille dame ME 19 La Visite… JE 20 Lloyd Newson/DV8 La Visite… VE 21 Lloyd Newson/DV8 La Visite… SA 22 Lloyd Newson/DV8 ◆ Lloyd Newson/DV8 La Visite… DI 23 La Visite… ◆ LU 24 Lloyd Newson/DV8 MA 25 Lloyd Newson/DV8 La Visite… ME 26 Lloyd Newson/DV8 La Visite… JE 27 Lloyd Newson/DV8 La Visite… VE 28 Lloyd Newson/DV8 La Visite… SA 29 Lloyd Newson/DV8 La Visite… DI 30 La Visite… ◆ LU 31 LES ABBESSES 20h30 mat 15 h ◆ 20h30 mat 15 h ◆ 1 2 3 4 5 DI 6 LU 7 MA 8 ME 9 JE 10 VE 11 SA 12 Girija Devi Chaurasia Girija Devi / Chaurasia 11h Preljocaj Preljocaj Preljocaj Preljocaj MA ME JE VE SA THEATRE DE LA VILLE DI 13 LU 14 MA 15 ME 16 JE 17 VE 18 SA 19 DI 20 LU 21 MA 22 ME 23 JE 24 VE 25 SA 26 Koen Augustijnen Koen Augustijnen Koen Augustijnen Quatuor Tetzlaff 17h Koen Augustijnen Ea Sola Ea Sola Ea Sola Ea Sola Marcia Hesse Marcia Hesse Marcia Hesse Chota Divana 17h Marcia Hesse Garry Stewart/ADT Garry Stewart/ADT Garry Stewart/ADT Garry Stewart/ADT Dezsö Ránki 17h Garry Stewart/ADT Chota Divana Marcia Hesse Marcia Hesse Marcia Hesse Marcia Hesse Ghada Shbeir 17h Marcia Hesse Marcia Hesse ◆ Maguy Marin Maguy Marin Maguy Marin Maguy Marin Ikhwani Safaa 17h Maguy Marin Marcia Hesse Marcia Hesse Marcia Hesse Marcia Hesse Kuijken/Demeyere 17h Marcia Hesse DI 27 LU 28 MA 29 Wim Vandekeybus ME 30 Wim Vandekeybus Mère & Fils DECEMBRE 2005 THEATRE DE LA VILLE 20h30 mat 15 h ◆ JE 1 Wim Vandekeybus VE 2 Wim Vandekeybus SA 3 Café Zimmermann 17h Wim Vandekeybus DI 4 LU 5 MA 6 Odile Duboc ME 7 Odile Duboc JE 8 Odile Duboc VE 9 Odile Duboc SA 10 F. Biondi/K. Weiss 17h Odile Duboc DI 11 LU 12 MA 13 ME 14 JE 15 Sankai Juku 1er prog. VE 16 Sankai Juku 1er prog. SA 17 Sankai Juku 1er prog. DI 18 Sankai Juku 1er prog. ◆ LU 19 MA 20 Sankai Juku 1er prog. ME 21 Sankai Juku 1er prog. JE 22 VE 23 SA 24 DI 25 LES ABBESSES 20h30 mat 15 h ◆ Mère & Fils Mère & Fils Mère & Fils Mère & Fils ◆ Mère & Fils Mère & Fils Mère & Fils e rvatoir Conse ur de Paris ie supér Mère & Fils Mère & Fils Mère & Fils Mère & Fils Mère & Fils Mère & Fils age ont m t n se ion ntio étit g Atte p é r ttin Ge LU 26 MA 27 ME 28 JE 29 VE 30 SA 31 DÉCEMBRE 2005/ suite THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES Sankai Juku Sankai Juku Sankai Juku Sankai Juku 2e prog. 2e prog. 2e prog. 2e prog. age ont tm n e s ion ttentio étit rép tting A Ge JANVIER 2006 THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES 20h30 mat 15 h ◆ 20h30 mat 15 h ◆ DI 1 LU 2 MA 3 ME 4 age ont m JE 5 et ns titio ros VE 6 é p ré inocé SA 7 Rh DI 8 LU 9 MA 10 ME 11 JE 12 Rhinocéros VE 13 Rhinocéros SA 14 Farida Parveen 17h Rhinocéros DI 15 Rhinocéros ◆ LU 16 MA 17 Rhinocéros ME 18 Rhinocéros JE 19 Rhinocéros VE 20 Rhinocéros SA 21 Takács/Muzsikás… 17h Rhinocéros DI 22 Rhinocéros ◆ LU 23 U. Shafi Mohammad Faqir MA 24 Rhinocéros ME 25 Rhinocéros JE 26 Rhinocéros VE 27 SA 28 Al-Kindî 17h DI 29 LU 30 MA 31 Antoine et Cléopâtre age ont tm n e s ion ttentio étit rép tting A Ge Getting attention Getting attention Getting Attention Getting attention Getting attention HORS LES MURS OCTOBRE 2005 PARIS-VILLETTE MA 4 ME 5 JE 6 VE 7 SA 8 DI 9 LU 10 MA 11 ME 12 JE 13 VE 14 SA 15 DI 16 LU 17 MA 18 ME 19 JE 20 VE 21 SA 22 Toto le Mômo Toto le Mômo Toto le Mômo Toto le Mômo Toto le Mômo Toto le Mômo ◆ Toto le Mômo Toto le Mômo Toto le Mômo Toto le Mômo Toto le Mômo NOVEMBRE 2005 CENTRE POMPIDOU 20h30 ME 9 Emio Greco/Hanspeter Kyburz JE 10 Emio Greco/Hanspeter Kyburz VE 11 Emio Greco/Hanspeter Kyburz Getting attention Getting attention Getting attention Getting attention Ashiq Hassan 17h Getting attention Getting attention ◆ Getting attention Getting attention Getting attention Getting attention Céline Frisch 17h Getting attention 20h30 mat 16 h ◆ Toto le Mômo Toto le Mômo Toto le Mômo Toto le Mômo Toto le Mômo JANVIER 2006 CITÉ INTERNATIONALE JE 5 VE 6 SA 7 DI 8 LU 9 MA 10 20h30 Peeping Tom Peeping Tom Peeping Tom Peeping Tom Peeping Tom CENTRE POMPIDOU Llanto… ME 25 JE 26 VE 27 SA 28 DI 29 en noir = théâtre, danse en rouge = musique 20h30 mat 17 h ◆ Rachid Ouramdane Rachid Ouramdane Rachid Ouramdane Rachid Ouramdane Rachid Ouramdane ◆ ME 1 JE 2 VE 3 SA 4 DI 5 LU 6 MA 7 ME 8 JE 9 VE 10 SA 11 DI 12 LU 13 MA 14 ME 15 JE 16 VE 17 SA 18 DI 19 LU 20 MA 21 ME 22 JE 23 VE 24 SA 25 FEVRIER 2006 MARS 2006/ THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES 20h30 mat 15 h ◆ Llanto… Llanto… Llanto… Llanto… Llanto… ◆ 20h30 mat 15 h ◆ Bang on a can all-stars L’heure … L’heure … L’heure … L’heure … 20h30 mat 15 h ◆ Ensemble Ibn Arabi Illuminations Illuminations Illuminations Illuminations 20h30 mat 15 h ◆ Antoine et Cléopâtre Antoine et Cléopâtre Antoine et Cléopâtre Antoine et Cléopâtre s ion étit rép tel Pla n i Ala Llanto… Llanto… Llanto… Llanto… Llanto… Maria-Kiran/C. Brizi Maria-Kiran/C. Brizi Alain Platel Alain Platel Alain Platel Alain Platel ◆ Ensemble Shoghaken Alain Platel Alain Platel Alain Platel Alain Platel Ensemble Shams 17h Alain Platel DI 26 LU 27 MA 28 Marie Chouinard er s ion ark étit rine B p é r the Ka Katherine Barker Katherine Barker Katherine Barker Katherine Barker Katherine Barker Katherine Barker MARS 2006 ME JE VE SA 1 2 3 4 DI 5 LU 6 MA 7 ME 8 JE 9 VE 10 SA 11 THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES 20h30 mat 15 h ◆ Marie Chouinard Marie Chouinard Marie Chouinard 3 concerts en 1 15h Marie Chouinard 20h30 mat 15 h ◆ Katherine Barker Katherine Barker Katherine Barker Ljiljana Buttler 17h Katherine Barker Wayn Traub 1er prog. Wayn Traub 1er prog. Wayn Traub 2e prog. Ljiljana Buttler Katherine Barker Katherine Barker Katherine Barker Wayn Traub 3e prog. Katherine Barker M. Perényi / D. Várjon 17h U. B. Fateh Ali Khan 17h Wayn Traub 3e prog. Katherine Barker DI 12 Katherine Barker ◆ LU 13 MA 14 ME 15 Meg Stuart JE 16 Meg Stuart Illuminations… VE 17 Meg Stuart Illuminations… SA 18 Zimmermann/Zacharias 17h Salar Aghili 17h Meg Stuart Illuminations… DI 19 Illuminations… ◆ LU 20 MA 21 Illuminations… ME 22 L’heure… Illuminations… JE 23 L’heure… Illuminations… VE 24 L’heure… Illuminations… SA 25 Nassima 17h L’heure… Illuminations… DI 26 L’heure… ◆ LU 27 MA 28 ME 29 JE 30 VE 31 suite AVRIL 2006 THEATRE DE LA VILLE 20h30 mat 15 h ◆ SA 1 Chatterjee/Ramnath 17h L’heure … DI 2 LU 3 MA 4 Preljocaj 2e prog. ME 5 Preljocaj 2e prog. JE 6 Preljocaj 2e prog. VE 7 Preljocaj 2e prog. SA 8 Preljocaj 2e prog. DI 9 Preljocaj 2e prog. ◆ LU 10 MA 11 Preljocaj 2e prog. ME 12 Preljocaj 2e prog. JE 13 Preljocaj 2e prog. VE 14 Preljocaj 2e prog. SA 15 Preljocaj 2e prog. DI 16 LU 17 MA 18 ME 19 JE 20 VE 21 SA 22 DI 23 LU 24 MA 25 Cherkaoui/Jalet… ME 26 Cherkaoui/Jalet… JE 27 Cherkaoui/Jalet… VE 28 Cherkaoui/Jalet… SA 29 Truls Mørk/Kathryn Stott 17h Cherkaoui/Jalet… DI 30 LES ABBESSES 20h30 Filomena Moretti 17h Illuminations… e toir aris rva de P e s r n Co érieu sup A. Valli/M. Mudgal A. Valli/M. Mudgal A. Valli/M. Mudgal A. Valli/M. Mudgal A. Valli/M. Mudgal e s ion llèr étit e cui p é r ce d Fa Face de cuillère Face de cuillère Face de cuillère Face de cuillère MAI 2006 LU 1 MA 2 ME 3 JE 4 VE 5 SA 6 DI 7 LU 8 MA 9 ME 10 JE 11 VE 12 SA 13 THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES 20h30 mat 15 h ◆ 20h30 mat 15 h ◆ Jan Lauwers Jan Lauwers Jan Lauwers Jan Lauwers Sasha Waltz Sasha Waltz Sasha Waltz Sasha Waltz DI 14 Face de cuillère Face de cuillère Face de cuillère Face de cuillère Face de cuillère Face de cuillère ◆ Liu Fang Face de cuillère Face de cuillère Face de cuillère Face de cuillère K. Gopalnath 17h Face de cuillère Face de cuillère ◆ MAI 2006/ LU 15 MA 16 ME 17 JE 18 VE 19 SA 20 DI 21 LU 22 MA 23 ME 24 JE 25 VE 26 SA 27 DI 28 LU 29 MA 30 ME 31 suite THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES 20h30 mat 15 h ◆ Kronos Quartet Sasha Waltz Sasha Waltz Sasha Waltz Sasha Waltz Midori/ R. McDonald 17h Sasha Waltz 20h30 mat 15 h ◆ Face de cuillère Face de cuillère Face de cuillère Face de cuillère Face de cuillère Grace Ellen Barkey Grace Ellen Barkey Jan Lauwers/Needlapb ire aris ato erv r de P s n Co érieu sup Mercedes Ruiz Mercedes Ruiz Mercedes Ruiz Mercedes Ruiz Mercedes Ruiz De Keersmaeker De Keersmaeker Jan Fabre Jan Fabre JUIN 2006 JE 1 VE 2 SA 3 DI 4 LU 5 MA 6 ME 7 JE 8 VE 9 SA 10 DI 11 LU 12 MA 13 ME 14 JE 15 VE 16 SA 17 DI 18 LU 19 MA 20 ME 21 JE 22 VE 23 SA 24 DI 25 LU 26 MA 27 ME 28 JE 29 VE 30 THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES 20h30 De Keersmaeker De Keersmaeker De Keersmaeker 20h30 mat 15 h ◆ Jan Fabre Jan Fabre Jan Fabre Rajan et Sajan Misra De Keersmaeker De Keersmaeker De Keersmaeker De Keersmaeker De Keersmaeker Pina Bausch Pina Bausch 17h Ensemble de Malouf Pina Bausch Pina Bausch Pina Bausch Pina Bausch Pina Bausch Pina Bausch Pina Bausch Pina Bausch Pina Bausch Gallotta/ B. de Lorraine Gallotta/ B. de Lorraine Gallotta/ B. de Lorraine Gallotta/ B. de Lorraine Gallotta/ B. de Lorraine Gallotta/ B. de L. ◆ Chants de la Tihama Gallotta/ B. de Lorraine Gallotta/ B. de Lorraine Gallotta/ B. de Lorraine Gallotta/ B. de Lorraine Gallotta/ B. de Lorraine ire aris ato erv r de P s n Co érieu sup Priyadarsini Govind Priyadarsini Govind Priyadarsini Govind Priyadarsini Govind JUILLET 2006 SA DI LU MA 1 2 3 4 THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES 20h30 Pina Bausch Pina Bausch 17h Pina Bausch Pina Bausch 20h30 HORS LES MURS MARS 2006 CITÉ INTERNATIONALE JE 2 VE 3 SA 4 DI 5 LU 6 MA 7 ME 8 JE 9 VE 10 SA 11 DI 12 LU 13 MA 14 ME 15 JE 16 VE 17 SA 18 DI 19 LU 20 MA 21 ME 22 JE 23 VE 24 SA 25 DI 26 LU 27 MA 28 ME 29 JE 30 VE 31 20h30 mat 15 h ◆ François Verret François Verret François Verret François Verret François Verret François Verret François Verret François Verret Josef Nadj Josef Nadj Josef Nadj Josef Nadj Josef Nadj ◆ Josef Nadj Josef Nadj Josef Nadj Josef Nadj Josef Nadj Josef Nadj ◆ Christian Rizzo Christian Rizzo AVRIL 2006 CITÉ INTERNATIONALE SA DI LU MA 20h30 1 Christian Rizzo 2 3 Christian Rizzo 4 Christian Rizzo MARS 2006 THEÂTRE DE LA BASTILLE 21h ME 29 Boris Charmatz JE 30 Boris Charmatz VE 31 Boris Charmatz AVRIL 2006 THEÂTRE DE LA BASTILLE SA DI LU MA ME JE VE SA 1 2 3 4 5 6 7 8 21h Boris Charmatz Boris Charmatz Boris Charmatz Boris Charmatz Boris Charmatz Boris Charmatz Boris Charmatz prix des places l’équipe Gérard Violette directeur Brigitte Giuliani assistante de direction ADMINISTRATION Michael Chase administrateur Marie-Christine Chastaing chef service paie Solen Le Guen adjointe de l'administrateur ARTISTIQUE Serge Peyrat Antoine Violette Jacques Erwan Georges Gara Soudabeh Kia directeur adjoint à la programmation directeur technique à la communication conseiller musiques du monde conseiller musique conseillère musiques du monde COMMUNICATION Anne-Marie Bigorne secrétaire générale Jacqueline Magnier relations presse, publicité et documentation Marie-Laure Violette relations presse, iconographie Elisa Santos invitations RELATIONS AVEC LE PUBLIC Lydia Gaborit responsable du service Florence Thoirey-Fourcade Corinne Soulié RELATIONS PUBLIQUES "JEUNES" (étudiants, enseignement…) Isabelle-Anne Person responsable du service Maud Rognion LOCATION Marie Katz Ariane Bitrin ACCUEIL Natacha Reese responsable du service responsable du service ACCUEIL DES ABBESSES (artistes et public) Delphine Dupont responsable du service TECHNIQUE Serban Boureanu Jean-Michel Vanson Jean-Marie Marty Claude Lecoq Jean-Claude Paton Manuel Sanchez Frédéric Duplessier Charles Deligny Didier Hurard Pierre Tamisier Alain Frouin Victor Koeppel Marion Pépin • programme distribué par les hôtesses • pourboire interdit • places numérotées (sauf exception) TARIF A théâtre, danse re NORMAL 1 cat. 23 e 2e cat. 16 e re e JEUNES 1 et 2 catégorie ..........11,5 e TARIF B théâtre, danse re NORMAL 1 cat. 26 e 2e cat. 17 e re e JEUNES 1 et 2 catégorie .............13 e TARIF C hors les murs NORMAL 1 seule catégorie........ 17/14 e JEUNES 1 seule catégorie.... 11,5/9,5 e TARIF D musique, musiques du monde, chanson NORMAL 1 seule catégorie............. 16 e JEUNES 1 seule catégorie............11,5 e TARIF exceptionnel re NORMAL 1 cat. 30 e 2e cat. 23 e re e JEUNES 1 et 2 catégorie............. 23 e JEUNES : moins de 27 ans ou étudiant (justificatif obligatoire) location COMMENT RÉSERVER ? • par téléphone 01 42 74 22 77 du lundi au samedi de 11h à 19h directeur technique directeur technique adjoint régisseur général directeur de scène sous-chef machiniste chef cintrier chef électricien sous-chef électricien chef accessoiriste chef service son régisseur du son régisseur du son chef habilleuse TECHNIQUE DES ABBESSES Alain Szlendak directeur technique Patrice Guillemot régisseur général Georges Jacquemart régisseur son ENTRETIEN SÉCURITÉ Jacques Ferrando chef de service Christophe Frade IMPRIMERIE Robert Ainaud ISSN 0248-8248 DIRECTION, ADMINISTRATION : 16 quai de Gesvres 75180 Paris Cedex 04, Tél. : 01 48 87 54 42 directeur de la publication : Gérard Violette maquette : Maurice et Juliette Constantin correcteur : Philippe Bloch Imprimerie STIPA : 8 rue des Lilas 93189 Montreuil Cedex Tél. : 01 48 18 22 50 • aux caisses : THEATRE DE LA VILLE 2 place du Châtelet, Paris 4 du mardi au samedi de 11h à 20h (lundi de 11h à 19h) LES ABBESSES 31 rue des Abbesses, Paris 18 du mardi au samedi de 17h à 20h • par correspondance : 2 pl. du Châtelet 75180 Paris Cedex 04 QUAND RÉSERVER ? • LOCATION PRIORITAIRE cartes places à 2, places aux jeunes : 28 jours à l'avance, jour pour jour (7 jours de location réservée) • LOCATION NORMALE 21 jours à l'avance, jour pour jour renseignements tél. 01 42 74 22 77 www.theatredelaville-paris.com individuels les abonnements jeunes THEATRE-DANSE • 4 spectacles minimum •10 spectacles minimum MOINS DE 27 ANS OU ÉTUDIANT * THEATRE-DANSE •3 spectacles minimum PASSEPORT MUSICAL • 8 places minimum, 4 programmes minimum PASSEPORT MUSICAL • 8 places minimum, 4 programmes minimum ▼ les abonnements individuels ● tarifs préférentiels abonnement ABONNEMENT TARIF A TARIF B TARIF C TARIF D TARIF EXC. ● THEATRE-DANSE MUSIQUE… 4 spect. 10 spect. jeune 3 spect. 1re catégorie 1re catégorie 1re catégorie 14,5 17 12,5 10 23 e e e e e 11,5 14 10,5 10 19,5 e e e e e 10 11,5 10 10 19,5 pass. mus. catégorie unique e e e e e 10 e - tarif normal 1re catégorie 23 26 17 16 30 e e e e e jeune tarif normal toutes catégories 11,5 13 11,5 11,5 23 e e e e e tarifs préférentiels hors abonnement 2 places à tarif préférentiel par abonné(e) sur tous les spectacles dans la limite des places disponibles. HORS ABONNEMENT THEATRE-DANSE 4 spect. 10 spect. ttes catégories ttes catégories TARIF A TARIF B TARIF C TARIF D 12,5 14 11,5 10 e e e e 12,5 14 11,5 10 e e e e MUSIQUE… jeune 3 spect. pass. mus. ttes catégories ttes catégories 10 11,5 10 10 e e e e 12,5 14 11,5 10 e e e e ● location 21 JOURS A L’AVANCE, JOUR POUR JOUR ● journal envoi à domicile du journal, 4 numéros par saison. ● librairie, disques tarifs préférentiels sur les disques et les livres. la carte (8 e) places aux jeunes1 ▼ la carte (22 e) places à 2 ● tarifs préférentiels cartes 2 places à tarif préférentiel sur tous les spectacles dans la limite des places disponibles. CARTES THEATRE-DANSE-MUSIQUE places à 2 places aux jeunes toutes catégories TARIF A TARIF B TARIF C TARIF D TARIF EXC. e e e e 23 e 12,5 14 11,5 10 toutes catégories e e e e 19,5 e 10 11,5 10 10 tarif normal jeune tarif normal 1re/2e catégorie toutes catégories 23/16 e 26/17 e 17 e 16 e 30/23 e e e e e 23 e 11,5 13 11,5 11,5 ● location prioritaire par correspondance : 5 SEMAINES, JOUR POUR JOUR avant celui de la représentation ; par téléphone et aux caisses : 28 JOURS, JOUR POUR JOUR avant celui de la représentation (7 jours de location réservée). ● journal librairie, disques 1 envoi à domicile du journal, 4 numéros par saison. tarifs préférentiels sur les disques et les livres. MOINS DE 27 ANS OU ÉTUDIANT: justificatif obligatoire relais Vous devenez relais en prenant l'initiative de regrouper au minimum 10 personnes intéressées à souscrire un abonnement au Théâtre de la Ville pour un minimum de 3 spectacles. Ces 10 personnes sont alors des abonnés relayés. Le relais a la possibilité de mêler public adulte et jeune dans un même abonnement et ainsi de bénéficier des tarifs relais et relais jeunes. les abonnements relais jeunes ▼ les abonnements relais MOINS DE 27 ANS OU ÉTUDIANT ● THEATRE-DANSE • 3 spectacles minimum, • 10 places minimum/spectacle THEATRE-DANSE • 3 spectacles minimum, 10 places minimum/spectacle PASSEPORT MUSICAL • 3 programmes minimum, • 10 places minimum/programme PASSEPORT MUSICAL • 3 programmes minimum, 10 places minimum/programme tarifs préférentiels abonnement relais ABT RELAIS THEATRE-DANSE MUSIQUE 3 spect. jeune 3 spect. pass. mus. TARIF A TARIF B TARIF C TARIF D TARIF EXC. 11,5 14 10,5 10 19,5 e e e e e 8 8 8 8 19,5 e e e e e pass. mus. tarif normal jeune 10 e - 8e - 23 26 17 16 30 e e e e e jeune tarif normal 11,5 13 11,5 11,5 23 e e e e e Si le relais a communiqué les coordonnées de ses abonnés relayés : ● tarifs préférentiels hors abonnement relais L’abonné relayé peut demander aux services relations publiques une carte d’abonnement personnalisée lui donnant l’avantage suivant : 2 places à tarif préférentiel par abonné(e) sur tous les spectacles dans la limite des places disponibles. HORS ABONNEMENT TARIF A TARIF B TARIF C TARIF D relais relais jeunes toutes catégories toutes catégories 12,5 14 11,5 10 e e e e 10 11,5 10 10 e e e e ● location 21 JOURS A L’AVANCE, JOUR POUR JOUR ● journal envoi à domicile du journal du Théâtre de la Ville à chaque abonné relayé les groupes jeunes 10 places minimum/spectacle MOINS DE 27 ANS OU ÉTUDIANT ▼ les groupes 10 places minimum/spectacle ▼ À partir du mois de septembre, la réservation pour les groupes est limitée aux spectacles ayant lieu en septembre-octobre dans la limite des places disponibles. Dès le mois de novembre, la réservation pour les groupes s’étend à tous les spectacles de la saison dans la limite des places disponibles. la carte liberté relais 40 e la carte Carte réservée aux comités d’entreprise et aux associations, qui permet de bénéficier de tarifs préférentiels et d’une réservation sans contrainte de nombre fixe de places par représentation, dans la limite des places disponibles (conditions particulières de location). ● tarifs préférentiels groupes et carte liberté relais THEATRE-DANSE- MUSIQUE TARIF A TARIF B TARIF C TARIF D groupes groupes jeunes carte liberté relais toutes catégories toutes catégories toutes catégorie 12,5 14 11,5 10 e e e e 8 8 8 8 e e e e 12,5 14 11,5 10 e e e e tarif normal jeune tarif normal 1re/2e catégorie toutes catégories 23/16 e 26/17 e 17 e 16 e 11,5 13 11,5 11,5 e e e e pour vous conseiller, vous renseigner, vous servir 2 RELATIONS AVEC LE PUBLIC RELATIONS PUBLIQUES “JEUNES” comités d’entreprise, associations, relais jeunes, étudiants, groupes d’amis enseignement Lydia Gaborit, responsable du service ; Isabelle-Anne Person Florence Thoirey-Fourcade ; Maud Rognion Corinne Soulié tél. 01 48 87 54 42 tél. 01 48 87 54 42 suivi personnalisé et mise en organisation de manifestations place d’actions pédagogiques autour des spectacles, forums, avec chacun des relais visites du Théâtre… intéressés souscription, choix des dates, règlements 2 LOCATION RELAIS Marie Katz, responsable du service ; Ariane Bitrin tél. 01 48 87 43 05 (ligne directe) - fax 01 48 87 09 81 renseignements, formulaires Formulaires d’abonnements individuels et relais : - dans le hall du Théâtre de la Ville ; - à télécharger sur www.theatredelaville-paris.com et à envoyer par correspondance; - envoi à domicile sur demande. 2 Jusqu’au 13 juillet et à partir du 26 août. théâtre et danse : partenaires au 30 avril THÉÂTRE DE LA VILLE RHINOCÉROS Production La Comédie de Reims, CDN – Théâtre de la Ville, Paris. ANTOINE ET CLÉOPÂTRE Production du Théâtre du Nouveau Monde, Montréal. L’HEURE OÙ NOUS NE SAVIONS RIEN L’UN DE L’AUTRE Coproduction Théâtre national de Belgrade – Théâtre Tattoo, Toulouse – Théâtre Garonne,Toulouse – Théâtre de la Ville, Paris – La Coupole, scène nationale de Sénart – MC2 Maison de la culture de Grenoble. Le Théâtre national de Belgrade est subventionné par le ministère de la Culture de Serbie. Le Théâtre Tattoo est subventionné par le ministère de la Culture – DRAC Midi-Pyrénées, le conseil régional MidiPyrénées et la ville de Toulouse. Avec l’aide de l’AFAA et du Centre culturel français de Belgrade. ANGELIN PRELJOCAJ LES 4 SAISONS… Coproduction Festival Montpellier Danse 2005 – Théâtre de la Ville, Paris. Avec le soutien des Nuits de Fourvière-département du Rhône. Résidence de création Théâtre de Nice. Le Ballet Preljocaj, centre chorégraphique national, est subventionné par le ministère de la Culture et de la Communication-DRAC PACA, la région Provence-AlpesCôte d’Azur, le département des Bouches-du-Rhône, la Communauté du Pays d’Aix, et la ville d’Aix-en-Provence et bénéficie du soutien de la Fondation BNP PARIBAS, l’AFAA-Association française d’action artistique-ministère des Affaires étrangères, le Groupe Partouche-Casino municipal d’Aix-Thermal. Le Ballet est hébergé à la Cité du Livre depuis 1996. EMPTY MOVES Commande et coproduction Biennale nationale de danse du Val-de-Marne. NOCES Commande de la Biennale nationale de la Danse du Val-de-Marne. Coproduction Maison des arts de Créteil – TNDI Châteauvallon, Toulon – Alpha-FNAC – Arsenal, Metz – Centre national des arts d'Ottawa – Compagnie Preljocaj. Avec l’aide à la création du conseil général du Val-deMarne, du ministère de la Culture et de la Communicationdirection de la musique et de la danse (Fonds de promotion chorégraphique), de l’Adami et de la SPEDIDAM. Avec le soutien du Théâtre du Merlan à Marseille et des services culturels de l'Ambassade du Canada. AKRAM KHAN/ SIDI LARBI CHERKAOUI ZERO DEGREES Production Akram Khan Company – Les Ballets C. de la B. Coproduction Sadler’s Wells, Londres – Teatro Comunale di Ferrara – TorinoDanza – deSingel, Anvers – Hebbel Theater, Berlin – Tanzhaus nrw, Düsseldorf – Théâtre de la Ville, Paris – Stadsschouwburg, Rotterdam – Wexner Center for the Arts – National Arts Centre, Canada. La compagnie Akram Khan reçoit l’appui de l’Arts Council England. Les Ballets C. de la B. reçoivent l’appui du ministère van de Vlaamse Gemeenschap, de la ville de Gand, de la Province Oost-Vlaanderen et de la Loterie nationale. LLOYD NEWSON/PHYSICAL THEATRE DV8 JUST FOR SHOW Coproduction Romaeuropa Festival et Accademia Filarmonica, Rome – National Theatre, London – Théâtre de la Ville, Paris – Festival d’Automne à Paris – Spielzeiteuropa/Berliner Festspiele, Berlin. Commande du Brighton Festival. Avec le soutien de la Calouste Gulbenkian Foundation et du Britisch Council. Un projet associé Artsadmin. EA SOLA SÉCHERESSE ET PLUIE VOLUME 2 Coproduction Théâtre de la Ville, Paris – Espace, Centre culturel français de Hanoi – Opéra Ballet du Viêt-nam – La Coupole, scène nationale de Sénart, Combs-la-Ville – Théâtre d'Angoulême, scène nationale – Le Grand Théâtre de Gronigen, Pays-Bas. GARRY STEWART/AUSTRALIAN DANCE THEATRE HELD Coproduction Adelaide Festival of Arts – Anchorage Concert Association. Avec le soutien de l’ARTSA, de l’Australian Council for the Arts et du department of Foreign Affairs and Trade. MAGUY MARIN UMWELT Coproduction Théâtre de la Ville, Paris - La Maison de la danse de Lyon - Toboggan de Décines – Centre chorégraphique national de Rillieux-la-Pape. La Compagnie Maguy Marin/Centre chorégraphique national de Rillieux-la-Pape est subventionnée par le ministère de la Culture et de la Communication-DRAC Rhône-Alpes, la région Rhône-Alpes, le conseil général du Rhône et les communes de Bron, Décines, Rillieux-laPape. Elle bénéficie également du soutien financier de l’AFAA pour ses tournées internationales et de la Délégation interministérielle à la ville. WIM VANDEKEYBUS PUUR Production Ultima Vez et KVS (Théâtre Royal Flamand, Bruxelles). Coproduction Festival d’Avignon – PACT Zollverein/ Choreographisches Zentrum ZNRW, Essen) – Théâtre de la Ville, Paris – Singapore Arts Festival – Cankarjev Dom, Ljubljana. Avec le soutien du programme Culture 2000 de l'Union européenne. ODILE DUBOC RIEN NE LAISSE PRÉSAGER DE L’ÉTAT DE L’EAU Coproduction Centre chorégraphique national de Franche-Comté, Belfort – Théâtre de la Ville, Paris - La Filature, scène nationale de Mulhouse. SANKAI JUKU CRÉATION 2005 Coproduction Théâtre de la Ville, Paris – Kitakyushu Performing Arts Center (Japon) – Sankai Juku, Tokyo. KINKAN SHONEN Production Sankai Juku, Tokyo. Sankai Juku bénéficie du soutien de Toyota et Shiseido. ALAIN PLATEL VESPERS Production de Les Ballets C. De la B. Coproduction Kunst-und Kulturprogram FIFA WM 2006 TM – La Monnaie/De Munt, Bruxelles – Le Grand Théâtre de Luxembourg – Opéra national de Paris – RUHRtriennale – Théâtre de la Ville, Paris – Staatsoper Unter der Linden, Berlin. MARIE CHOUINARD CRÉATION 2005 Production Compagnie Marie Chouinard. Coproduction Biennale de Venise – Centre national des Arts, Ottawa – Schlossfestspiele, Ludwigsburg – Théâtre de la Ville, Paris – Whitebird, Portland. Avec l’appui du festival international de danse ImpulsTanz, Vienne. MEG STUART CRÉATION 2006 Production Damaged Goods. Coproduction Volksbühne am Rosa-Luxemburg-Platz, Berlin – Théâtre de la Ville, Paris – Productiehuis Rotterdam-Rotterdamse Schouwburg, Rotterdam. Meg Stuart / Damaged Goods bénéficie de l'aide du Gouvernement flamand et de la Commission communautaire flamande. SIDI LARBI CHERKAOUI/DAMIEN JALET… D’AVANT Production Schaubühne am Lehniner Platz, Berlin. Coproduction Théâtre de la Ville, Paris – Les Ballets C. de la B. – Festival de Marseille – Le Carreau, Forbach. JAN LAUWERS LA CHAMBRE D’ISABELLA Production Needcompany. Coproduction Festival d’Avignon – Théâtre de la Ville, Paris – Théâtre Garonne, Toulouse – La Rose des Vents, scène nationale de Villeneuve-d'Ascq – Brooklyn Academy of Music, New York – Welt in Basel theaterfestival. Avec la collaboration du Kaaitheater, Bruxelles et de la Commission communautaire flamande de la Région Bruxelles-Capitale. Needcompany bénéficie de l’aide du ministère de la Communauté flamande et de La Loterie nationale. GRACE ELLEN BARKEY CHUNKING Production Needcompany. Coproduction PACT Zollverein, Essen – Festival de Marseille. Avec la collaboration du Kaaitheater, Bruxelles et de la Commission communautaire flamande de la Région Bruxelles-Capitale. Needcompany bénéficie de l’aide du ministère de la Communauté flamande et de La Loterie nationale. SASHA WALTZ CRÉATION 2005 Coproduction Théâtre de la Ville, Paris. ANNE TERESA DE KEERSMAEKER CRÉATION 2006 Production Rosas & De Munt/La Monnaie. Coproduction Théâtre de la Ville, Paris. PINA BAUSCH CRÉATION 2005 Coproduction LG Arts Center – Goethe Institut, Séoul. LES ABBESSES WILLIAM BURROUGHS Coproduction Théâtre Vidy-Lausanne E.T.E. – Théâtre de la Ville, Paris – Espace Jean Legendre, Compiègne. LA VISITE DE LA VIEILLE DAME Production Teatro Malandro. Coproduction Théâtre ForuMeyrin – Maison de la Culture de Loire-Atlantique – Théâtre de la Ville, Paris – Equinoxe, scène nationale de Châteauroux – La Comédie de Reims avec le soutien de Pro Helvetia, Fondation suisse pour la culture, et de la Loterie romande. Le Teatro Malandro est soutenu par le DIP de l'État de Genève et par la ville de Genève – Département des affaires culturelles. MARCIA HESSE Coproduction La Comédie de Reims-CDN – Théâtre de la Ville, Paris. MÈRE & FILS, COMÉDIE NOCTURNE Coproduction Théâtre de la Ville, Paris - Théâtre du Point du Jour, Lyon. Avec le soutien du Théâtre national populaire,Villeurbanne. LLANTO POR IGNACIO SÁNCHEZ MEJÍAS Coproduction Théâtre national de Toulouse MidiPyrénées - Scène nationale de Quimper - un Théâtre pour la musique – La Paloma. Avec la participation de la DRAC Midi-Pyrénées, la région Midi-Pyrénées, le conseil général de la HauteGaronne et la ville de Toulouse. Avec le concours de la Spedidam, la Fondation France Télécom et la Caisse d’épargne de Midi-Pyrénées. KATHERINE BARKER Production déléguée La Comédie de Reims, centre dramatique national. photos Birgit 2 théâtres THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES 2 PL. DU CHÂTELET PARIS 4 31 RUE DES ABBESSES PARIS 18 Coproduction Théâtre de la Ville, Paris – Comédie de Caen, centre dramatique national de Normandie – Comédie Saint-Etienne, centre darmatique national – Compagnie Maski Théâtre, compagnie dramatique conventionnée par la DRAC Ile-de-France. Avec le soutien de Regards et mouvements Hostellerie Pontempeyrat. Communication, aide aux compagnies chorégraphiques. ILLUMINATIONS - COLOURED PLATES Production déléguée Compagnie des Petites Heures, Paris. Coproduction Théâtre Vidy E.T.E., Lausanne – Théâtre de la Ville, Paris – Carré Saint-Vincent, scène nationale, Orléans – Comédie de Caen, centre dramatique national de Normandie – Compagnie Thierry de Peretti – ville d’Ajaccio/direction des Affaires culturelles. Avec le soutien de la collectivité territoriale de Corse. FACE DE CUILLÈRE Coproduction Théâtre de La Ville, Paris – Compagnie Boomerang. La Compagnie Boomerang est subventionnée par le conseil régional de Lorraine, La DRAC-Lorraine, et le conseil général de Moselle. ROBYN ORLIN/VERA MANTERO HEY DUDE... Coproduction City Theater & Dance Group – O Rumo do Fumo – Festival Danse à Aix – Impulstanz Wien – Théâtre de la Ville, Paris. Production déléguée City Theater & Dance Group / Damien Valette KOEN AUGUSTIJNEN BÂCHE Production Les Ballets C. de la B. Coproduction Théâtre de la Ville, Paris – Hebbeltheater, Berlin – Tanzhaus nrw, Düsseldorf – Kunstencentrum Vooruit, Gand – Göteborg Dance & Theatre Festival, Göteborg – La Rose des Vents, Villeneuve d’Ascq. Avec l’appui du ministère de la Communauté flamande, de la ville de Gand, de la province de la Flandre orientale et de la Loterie nationale. MERCEDES RUIZ DIBUJOS EN EL AIRE Production Arte y Movimiento Producciones S.L. JAN FABRE QUANDO L’UOMO PRINCIPALE È UNA DONNA Production Troubleyn/Jan Fabre, Anvers. Coproduction Théâtre de la Ville, Paris – deSingel, Anvers. Avec le support de Festival Iberoamericano de Teatro de Bogotá. Jan Fabre est artiste en résidence au deSingel, Anvers. Avec le soutien du Gouvernement de Flandre. J.-CL. GALLOTTA/BALLETS DE LORRAINE DOCTEUR LABUS Production CCN- Ballet de Lorraine. MARIA KIRAN/CLAUDE BRIZI BHÂRATA/BACH Production C.I.I.C. Avec la collaboration du Centre Mandapa. HORS LES MURS 4 THEATRES AU THÉÂTRE PARIS-VILLETTE 211 AV. JEAN JAURÈS PARIS 19 TOTO LE MÔMO Coproduction Compagnie La Nuit remue, Montpellier – Théâtre 95,Cergy-Pontoise – Théâtre du Hangar,Montpellier. Production déléguée Théâtre Vidy-Lausanne E.T.E. AU CENTRE POMPIDOU 19 RUE BEAUBOURG PARIS 4 RACHID OURAMDANE COVER Production Association fin novembre. Coproduction Théâtre de la Ville, Paris – Les Spectacles vivants, Centre Pompidou – Bonlieu, scène nationale d’Annecy – Festival international de danse de Cannes – Centre national de la danse, Pantin. Partenaires brésiliens: Biennale de Fortaleza, Centre Dragao do Mar / Gouvernement de l’État du Céara – secrétariat à la Culture. L’Association fin novembre est subventionnée par la DRAC Ile-de-France, ministère de la Culture et de la EMIO GRECO/HANSPETER KYBURZ DANSE AVEUGLE • DOUBLE POINT : + Coproduction Ircam – Ensemble InterContemporain – Festival d’Automne à Paris – Les Spectacles Vivants, Centre Pompidou – Théâtre de la Ville, Paris. En collaboration avec Emio Greco/PC. Avec le soutien de Pro Helvetia, Fondation suisse pour la culture. AU THÉÂTRE DE LA CITÉ INTERNATIONALE 17 BD JOURDAN PARIS 14 PEEPING TOM LE SALON Coproduction Tramway Glasgow City Council – La Rose des Vents, scène nationale de Villeneuve d’Ascq – Le Réseau France des CDC (Avignon, Dijon, Roubaix,Val-deMarne, Toulouse, Uzès). Avec le soutien du ministère de la Communauté flamande, de la Needcompany (Bruxelles), du Stadsschouwburg Kortrijk- ck*(Courtrai), des Ballets C. de la B. (Gand), Ballet Preljocaj (Aix-en-Provence), Compagnie Michèle Anne De Mey (Bruxelles). FRANÇOIS VERRET TOKYO MUSIL Production Compagnie FV Coproduction Grand Théâtre de la Ville de Luxembourg – La Halle aux Grains, scène nationale de Blois. Avec le soutien de L’Apostrophe, scène nationale de Cergy-Pontoise. La Compagnie FV est subventionnée par le ministère de la Culture et de la Communication-DRAC Ile-de-France. JOSEF NADJ LAST LANDSCAPE Coproduction Centre chorégraphique d’Orléans – Festival d’Avignon – Emilia Romagna teatro Fondazione (Modena). Le Centre chorégraphique national d’Orléans est subventionné par le ministère de la Culture et de la Communication-Direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles, la DRAC Centre, la ville d’Orléans, le conseil régional du Centre, le conseil général du Loiret. Il reçoit l’aide de L’AFAA (Association française d’action artistique, ministère des Affaires étrangères) pour ses tournées à l’étranger. CHRISTIAN RIZZO AUTANT VOULOIR LE BLEU DU CIEL … Production l’Association fragile. Coproduction Le Quartz, scène nationale de Brest – CCN de Franche-Comté à Belfort – CCN de MontpellierLanguedoc Roussillon – l’École supérieure des Beaux-Arts de Toulouse. L’Association fragile est subventionnée par la DRAC Ile-deFrance, ministère de la Culture et de la Communication . Avec le soutien de l’Espace des Arts de Colomiers, de la Chapelle St-Jacques à Saint-Gaudens, du Centre de développement chorégraphique Midi-Pyrénées et du Centre national de la danse, Pantin. AU THÉÂTRE DE LA BASTILLE 76 RUE DE LA ROQUETTE PARIS 11 BORIS CHARMATZ RÉGI Coproduction Théâtre de la Ville, Paris – Romaeuropa Festival, Rome – Les Subsistances, Lyon (résidence de création) – Centre chorégraphique national de Tours (accueil studio). Avec le soutien de la Fondazione Nuovi Mecenati de Rome, du Centre chorégraphique national de FrancheComté à Belfort, du Cultureel Centrum Maasmechelen et du Théâtre de la Bastille à Paris. Avec l’aide du Centre national de la danse, Pantin. photos couvertures : B. Conte, L. Philippe, Enguerand, K. Troussi, J. Joyce, Sense world music,J. Volek, P. Deprez, J.-P. Stoop, L. Greenfield, T. Vandecasteele, H. Bozzi, M. Chouinard,S. Anwar, J. Nadeau, Kamrouz, J.-P. Maurin, Manas, M. Karroubi, D. Port, X DR théâtre danse musique : partenaires radios Théâtre de la Ville 2 place du Châtelet Paris 4 01 42 74 22 77 theatredelaville-paris.com