I. LA RECHERCHE DES FONDS PAR LE NOTAIRE - cridon nord-est

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I. LA RECHERCHE DES FONDS PAR LE NOTAIRE - cridon nord-est
CRIDON Nord-Est
CHRONIQUE COMMENTEE
DÉTERMINATION DE L’ACTIF SUCCESSORAL :
LA BOÎTE À OUTILS DU NOTAIRE SE COMPLÈTE
Les difficultés de recherche des éléments constitutifs de l’actif successoral limitent
parfois considérablement le travail du notaire chargé du règlement d’une
succession.
Si la communication des données bancaires au notaire se faisait jusqu'à présent
sans trop de difficultés, la solution était toute autre pour les contrats d’assurancevie, le notaire se heurtant au silence des organismes d’assurance.
La loi n° 2014-617 du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux
contrats d'assurance vie en déshérence, publiée au Journal officiel du 15 juin 2014,
offre de nouveaux outils au notaire chargé du règlement d’une succession.
La donne est désormais modifiée, deux instruments, les fichiers FICOBA et
FICOVIE devenant désormais les aides indispensables des notaires.
Réciproquement, des informations devront être transmises aux assureurs, afin de
faciliter la recherche des bénéficiaires des contrats d’assurance-vie.
I. LA RECHERCHE DES FONDS PAR LE NOTAIRE
Entrée en vigueur : 1er janvier 2016.
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9 rue de Puébla. B.P. 51212 - 59013 Lille cedex. Téléphone: 03 28 38 18 38 - Télécopie 03 20 30 64 92
A. L’accès étendu aux données relatives aux comptes bancaires
Jusqu’à présent, en cas de litige, par exemple dans le cadre d’un divorce ou du
règlement contentieux d’une succession, le juge pouvait ordonner à
l’administration fiscale, sur le fondement de l’article L. 143 du Livre des Procédures
Fiscales, la communication de toutes données utiles à son règlement.
Mais en l’absence de tout contentieux, l’accès à ce fichier restait impossible.
Une jurisprudence récente du Conseil d’Etat a néanmoins offert aux héritiers d’une
personne décédée un droit d’accès personnel au fichier FICOBA concernant
l’identification du ou des comptes bancaires détenus par cette dernière (Conseil
d’Etat n° 339147, 29 juin 2011, 9ème et 10ème sous-section réunies, Ministère du
budget, des comptes publics et de la réforme de l’Etat contre consorts A). Les
informations recensées dans FICOBA sont celles relatives à l’établissement teneur
du compte, au compte, à son ouverture ou sa clôture et à l’identité du titulaire. Le
notaire chargé du règlement d’une succession peut obtenir les mêmes
renseignements à la condition de disposer d’un mandat en ce sens du ou des
héritiers.
La jurisprudence est désormais reprise par la loi nouvelle : le notaire chargé
d’établir l’actif successoral en vue du règlement de la succession demande à
l’administration fiscale et obtient de celle-ci la communication des informations
détenues par celle-ci, afin d’identifier l’ensemble des comptes bancaires ouverts
au nom du défunt (art. L. 151 B LPF).
Le présent de l’indicatif employé par le texte (« demande et obtient ») laisse penser
que l’interrogation de l’administration fiscale sera désormais une obligation et non
une faculté pour le notaire chargé du règlement d’une succession. Il s’agit à tout le
moins d’une précaution particulièrement recommandée.
La même faculté appartiendra aux héritiers, même en l’absence de toute
désignation de notaire, afin de faciliter le règlement des « petites » successions.
Quels sont les justificatifs à fournir ?
Aucun justificatif n’est imposé par les textes.
Toutefois, l’article L. 151 B précité autorisant « le notaire chargé d'établir l'actif
successoral en vue du règlement de la succession pour laquelle il a été mandaté » à
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faire une telle demande, il est possible qu’un mandat des héritiers soit en pratique
exigé.
S’agissant d’une simple information donnée au notaire et aux héritiers, un mandat
unanime ne semble pas être nécessaire. La signature d’un tel mandat sera
probablement à l’avenir un préalable indispensable à l’ouverture d’un dossier de
succession.
Quel sera le résultat de l’interrogation ?
L’encours des comptes bancaires ne figurant pas au fichier FICOBA, l’interrogation
de celui-ci permettra au moins de connaitre la liste des établissements bancaires
détenant des comptes au nom du défunt.
Une fois ces informations obtenues, le notaire pourra, ainsi que cela est déjà
habituellement fait, obtenir des différents établissements financiers concernés les
éléments concernant le montant des comptes bancaires au jour du décès.
La mention, après interrogation du fichier FICOBA, d’un compte clôturé après le
décès incitera le notaire diligent à se rapprocher de la CDC pour obtenir la
communication des informations détenues par celle-ci, afin d’identifier l’ensemble
des comptes bancaires ouverts au nom du défunt (cf. note à paraître dans notre
prochaine Newsletter du 7 octobre, relative aux comptes en déshérence, autre
volet de la loi n° 2014-617 du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et
aux contrats d'assurance vie en déshérence, publiée au Journal officiel du 15 juin
2014).
B. L’accès restreint aux données relatives aux contrats
d'assurance-vie et de capitalisation
Si les assureurs ont l'obligation d'informer l'administration fiscale de l'existence de
contrats d'assurance-vie et de capitalisation, l’accès à ces informations était jusqu'à
présent refusée au notaire, malgré l'intérêt évident de ces renseignements pour le
règlement de la succession.
Un des apports essentiels de la loi est l’accès offert au fichier national des contrats
d'assurance-vie, dénommé FICOVIE.
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Créé par la loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour
2013 et accessible à compter du 1er janvier 2016, ce fichier recense l’ensemble des
informations transmises par les assureurs relatives la souscription et le dénouement
des contrats de capitalisation ou des placements de même nature, c’est-à-dire :
1° Pour les contrats d'assurance vie non rachetables souscrits depuis
le 20 novembre 1991, le montant cumulé des primes versées entre le
soixante-dixième anniversaire du souscripteur et le 1er janvier de
l'année de la déclaration, lorsque ce montant est supérieur ou égal à
7 500 € ;
2° Pour les autres contrats, quelle que soit leur date de souscription,
le montant cumulé des primes versées au 1er janvier de l'année de la
déclaration et la valeur de rachat ou le montant du capital garanti, y
compris sous forme de rente, à la même date, lorsque ce montant ou
cette valeur est supérieur ou égal à 7 500 € (art. 1649 ter, CGI).
Les notaires peuvent désormais obtenir communication des renseignements
détenus par l’administration fiscale sous certaines conditions :
-
Le notaire chargé du règlement de la succession pourra obtenir
communication des renseignements relatifs aux contrats de
capitalisation souscrits par le défunt. Le mandat l’autorisant à agir
au nom des ayants droit doit être joint à la demande.
S’agissant d’une simple information donnée au notaire et aux héritiers, un mandat
unanime ne semble pas être nécessaire. La signature d’un tel mandat sera
probablement à l’avenir un préalable indispensable à l’ouverture d’un dossier de
succession.
-
Le notaire mandaté par le bénéficiaire éventuel d’un contrat
d’assurance-vie dont le défunt était l’assuré obtient communication
des renseignements relatifs aux seuls contrats dont le mandant est
bénéficiaire. Le mandat l’autorisant à agir au nom du bénéficiaire
éventuel est joint à la demande.
Lorsque le bénéficiaire sera nominativement désigné, aucune difficulté de
communication ne devrait se présenter. Mais quid lorsque la clause bénéficiaire
sera non pas nominative mais indirecte ? Par exemple, un héritier pourrait-il obtenir
communication des éléments relatifs à un contrat d’assurance-vie dont la clause
bénéficiaire est « les héritiers de l’assuré » ? Malgré le silence du texte, la réponse
devrait indéniablement être positive. Bien évidemment, la demande supposera la
preuve de la qualité d'héritier du demandeur, par exemple par la production d'un
acte de notoriété, d'un certificat d'hérédité ou de toute autre pièce idoine.
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Les effets de la loi restent cependant bien limités.
Il n’existe malheureusement aucune disposition similaire pour les contrats
d’assurance-vie non dénoués, malgré un intérêt indéniable pour la pratique
notariale. L’inclusion dans l’actif commun de la valeur de rachat des contrats
d’assurance-vie non dénoués au jour de la dissolution de la communauté, pourtant
imposés tant par la jurisprudence Praslicka (Cass. civ. 1ère, 31 mars 1992, JCP N
1992, II, 376, n° 9, note SIMLER) que la réponse ministérielle Bacquet du 29 juin
2010, se heurte souvent au secret professionnel invoqué par les assureurs.
De même, le notaire, mandaté par un ayant droit non bénéficiaire du contrat
d’assurance-vie pourrait-il avoir connaissance des éléments relatifs aux contrats
d’assurance-vie souscrit par le défunt ? L’interrogation est essentielle : si les
contrats d’assurance-vie sont par principe transmis hors succession, c’est à la
condition que les primes versées ne soient pas exagérées (art. L. 132-12 et -13,
C. ass.). Les cohéritiers ont ainsi intérêt à connaître le montant des primes versées
et le nom des bénéficiaires, afin de pouvoir solliciter le rapport et/ou la réduction
de ces primes. En particulier, la jurisprudence retient qu’un héritier réservataire a
droit à la communication de ces éléments, pour s’assurer qu’il n’existe pas
d’atteinte à sa réserve (v. not. CA Poitiers, 2 juillet 2003, Dr. Fam. février 2004, n°
23, note Bernard Beignier). La loi nouvelle permet-elle cette communication ?
Assurément non, seul le bénéficiaire du contrat d’assurance-vie, ou le notaire
mandaté à cet effet par le bénéficiaire éventuel, pourront interroger
l’administration fiscale.
Les informations souhaitées ne pourront être obtenues que sous le coup de la
sanction au titre du recel successoral ou de communauté à l’égard du souscripteur
ou du bénéficiaire des contrats, ou à la faveur d’une demande de levée judiciaire du
secret des assureurs pour obtenir les informations souhaitées.
II. LA TRANSMISSION DES INFORMATIONS AUX ASSUREURS
Entrée en vigueur : 1er janvier 2015.
Afin de faciliter la recherche des bénéficiaires de contrats d’assurance-vie non
réclamés, la loi nouvelle offre aux assureurs de nouveaux outils.
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L’organisme d’assurance pourra obtenir, dès le 1er janvier 2015, auprès de l’autorité
compétente une copie intégrale de l’acte de décès. L’acte de décès mentionnera, le
cas échéant, le nom du notaire ayant pu dresser un acte de notoriété (art 730-1,
C. civ.).
L’assureur pourra alors s’adresser directement au notaire chargé du règlement de
la succession afin d’obtenir les informations nécessaires à l’identification des
ayants droit de l’assuré décédé (art. L. 166 E LPF).
Cette disposition est également applicable dès le 1er janvier 2015.
Bien que la loi ne le précise pas clairement, il s’agit sans aucun doute d’une
autorisation légale de communiquer ces renseignements, dérogeant au secret
professionnel auquel est astreint le notaire.
Cette levée n’est cependant pas totale : seuls les contrats d’assurance-vie dont le
bénéficiaire est « l’ayant droit de l’assuré décédé » peuvent faire l’objet d’une
demande de renseignements. Tel ne sera pas le cas, par exemple, d’un contrat
d’assurance-vie dévolu au petit-fils du défunt, en présence du fils vivant et
acceptant. Le petit-fils n’étant pas alors un ayant-droit, le secret professionnel
devrait prévaloir.
Enfin, la demande d’information devra émaner de l’assureur, qui aura l’obligation
de joindre à sa demande « un certificat établissant son obligation vis-à-vis de l’ayant
droit du défunt, bénéficiaire du contrat d’assurance sur la vie ». Si le contenu de ce
« certificat » n’est pas détaillé par la loi, il est raisonnable de penser que le
document contiendra la clause bénéficiaire du contrat d’assurance-vie, permettant
de vérifier que le bénéficiaire est bien un ayant-droit du défunt.
Enfin, l’assureur pourra dans tous les cas, que le bénéficiaire soit ou non un ayantdroit, obtenir directement auprès de l’administration fiscale les coordonnées des
personnes physiques concernées. Cet accès aux données détenues par
l’administration fiscale n’est toutefois applicable qu’à compter du 1er janvier 2016.
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CRIDON Nord-Est
DEMANDEUR
DETENTEUR DE
L’INFORMATION
Comptes bancaires
Notaire chargé de la
succession
Ou ayant droit
Administration fiscale
Comptes bancaires déposés à la
CDC
Notaire chargé de la
succession
Ou ayant droit
CDC
Mandat des ayants
droit
Art. L. 312-20 CMF
Contrats de capitalisation
Notaire chargé de la
succession
Administration fiscale
Mandat des ayants
droit
Art. L. 151 B 2° LPF
Contrats d’assurance-vie
dénoués
Notaire mandataire d’un
bénéficiaire éventuel
Administration fiscale
Mandat du bénéficiaire
éventuel
Art. L. 151 B 3° LPF
INFORMATION DEMANDEE
JUSTIFICATIF
TEXTE
Art. L. 151 B 1° LPF
Art. L. 132-27-2 c.
ass.
Contrats d’assurance-vie non
réclamés entrant dans l’actif
successoral
Notaire chargé de la
succession
CDC
Copie intégrale de l’acte de
décès
Assureur
Etat civil
Art. L. 166 E LPF
Coordonnées des bénéficiaires
d’une assurance-vie
Assureur
Administration fiscale
Art. L. 166 E LPF
Coordonnées des ayants-droit,
bénéficiaires d’une d’assurancevie
Assureur
Notaire
Mandat des ayants
droit
Certificat établissant
l’obligation vis-à-vis de
l’ayant droit
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Art. L. 223-25-4 c.
mut.
Art. L. 166 E LPF
CRIDON Nord-Est
Lille, le 23 septembre 2014
Sandrine Le Chuiton
Consultante au CRIDON Nord-Est
© CRIDON Nord-Est // newsletter 23.09.2014
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