Facteurs de risque de décès et d`excès de mortalité chez les adultes

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Facteurs de risque de décès et d`excès de mortalité chez les adultes
INT J TUBERC LUNG DIS 16(12):1649–1656
© 2012 The Union
Facteurs de risque de décès et d’excès de mortalité chez
les adultes atteints de tuberculose à l’Ouest du Kenya
A. H. van’t Hoog,*† J. Williamson,*‡ M. Sewe,* P. Mboya,§ L. O. Odeny,* J. A. Agaya,* M. Amolloh,*
M. W. Borgdorff,†¶ K. F. Laserson*‡
* Kenya Medical Research Institute, Centers for Disease Control and Prevention Research and Public Health
Collaboration, Kisumu, Kenya ; † Academic Medical Centre, University of Amsterdam, Amsterdam, The Netherlands ;
‡ Center for Disease Control and Prevention, Center for Global Health, Atlanta, Georgia, USA ; § Kenya Ministry of
Health, Division of Leprosy, Tuberculosis and Lung Diseases, Kisumu, Kenya ; ¶ Public Health Service, Department of
Infectious Diseases, Amsterdam, The Netherlands
RÉSUMÉ
Evaluer l’excès de mortalité et les facteurs de risque de décès au cours du traitement de la tuberculose
(TB) dans l’Ouest du Kenya.
M É T H O D E S : Nous avons prélevé les données de surveillance et comparé les taux de mortalité au cours du traitement
TB avec la mortalité toutes causes provenant d’une surveillance de la population en matière de santé et de démographie afin d’obtenir des ratios de mortalité standardisés (SMR). Les facteurs de risque de surcroît de mortalité ont été
obtenus dans un modèle de survie relative et, pour les décès au cours du traitement, dans un modèle proportionnel de
régression des risques.
R É S U LTAT S : Le taux brut de mortalité au cours du traitement TB est de 18,0 (IC95% 16,8–19,2) pour 100 annéespersonne. Le SMR standardisé pour l’âge et le sexe est de 8,8 (IC95% 8,2–9,4). Le surcroît de mortalité est plus élevé
chez les patients TB séropositifs pour le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) (ratio de surcroit de risque
[HR] 2,1 ; IC95% 1,5–3,1) et plus faible chez les patients de sexe féminin ou ayant commencé le traitement au cours
d’une année ultérieure. La mortalité est élevée chez les patients dont le statut VIH est inconnu (HR 2,9 ; IC95% 2,2–
3,8) ou, chez les séropositifs pour le VIH, sans traitement antirétroviral (TAR) (HR 3,3 ; IC95% 2,5– 4,5) ou dont
on ne sait pas s’ils sont sous TAR (HR 2,8 ; IC95% 2,1–3,7). La fraction de mortalité attribuable à la réalisation incomplète des tests VIH et du TAR est de 31% (IC95% 15– 45) par comparaison avec les patients séropositifs sous
TAR.
C O N C L U S I O N : L’accentuation de la réalisation des tests VIH et du TAR pourrait réduire davantage la mortalité au
cours du traitement TB, et cela d’une valeur estimée de 31%.
M O T S - C L É S : excès de mortalité ; Kenya ; tuberculose ; VIH
OBJECTIFS :
LA TUBERCULOSE (TB) fait partie des causes principales de décès prématuré au niveau mondial, particulièrement chez les personnes des groupes d’âge
économiquement productif dans les pays à revenus
faibles et moyens.1 Une réduction de 50% des taux
de décès d’ici 2015 par comparaison avec les niveaux
de 1990 est une des cibles2 fixées pour contribuer
aux Objectifs de Développement du Millénaire pour
l’éradication de la pauvreté.3 En 2009, on estime la
mortalité à 1,7 million de décès TB parmi lesquels
0,38 million chez les personnes infectées par le virus
de l’immunodéficience humaine (VIH) ;4 la mortalité
chez les patients TB a baissé d’environ 35% depuis
1990. Cette réduction n’est pas observée dans la région d’Afrique où le VIH contribue à une incidence et
à une mortalité élevées de la TB.5–7 Les interventions
TB-VIH recommandées par la Stratégie Stop TB depuis 2004 comportent les tests VIH chez les patients
TB comme préalable important nécessaire pour offrir
aux patients TB infectés par le VIH les interventions
de réduction de la mortalité, y compris la prophylaxie des infections opportunistes comme le traitement préventif au cotrimoxazole (CPT) et la thérapie
antirétrovirale combinée (TAR),8,9 mais l’adoption de
ces mesures n’est pas encore optimale.4
Dans la plupart des populations où le fardeau de
la TB et du VIH est élevé, l’estimation de la mortalité
TB comporte plusieurs limitations.10 La faiblesse ou
l’absence de statistiques de mortalité empêche une
mesure directe des causes de décès.10 Les estimations
indirectes de la mortalité se basent sur l’incidence
de la TB qui est incertaine et sur le taux de létalité
Auteur pour correspondance : Anja van’t Hoog, Academic Medical Centre, Department of Clinical Epidemiology, University of Amsterdam, PO Box 22660 Amsterdam 1100 DD, The Netherlands. Tel : (+31) 20 566 2349. Fax : (+31) 20 691
2683. e-mail : [email protected], [email protected]
[Traduction de l’article : « Risk factors for excess mortality and death in adults with tuberculosis in Western Kenya » Int J
Tuberc Lung Dis 2012; 16(12): 1649–1656. http://dx.doi.org/10.5588/ijtld.12.0135]
2
The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease
(CFR).10,11 Le CFR est défini comme la proportion de
patients TB qui décèdent à cause de la TB. Toutefois,
habituellement, seul est disponible le risque de décès
toutes causes au cours du traitement antituberculeux,12
ce qui inclut le décès pour d’autres causes. Une estimation de l’excès de mortalité fournit un ajustement
pour la mortalité de base qui varie en fonction de la
structure d’âge de la population, de la prévalence
du VIH ainsi que de l’accès aux soins de santé pour la
population et de leur qualité. Toutefois, des taux de
mortalité stratifiés fiables provenant d’une population générale comparable sont nécessaires mais peuvent ne pas être disponibles dans les contextes à ressources limitées.
Dans la présente étude, nous avons évalué l’excès
de mortalité TB par rapport à la mortalité toutes
causes dans une population de la même région géographique de l’Ouest du Kenya où la TB et le VIH
sont très prévalents,13,14 en même temps que les facteurs de risque d’excès de mortalité. La population de
comparaison est suivie par le Système de Surveillance
de la Santé et de la Démographie (HDSS) qui fournit
des détails sur la démographie de la population dans
les zones où les données provenant des registres d’état
civil et des statistiques des services de santé sont médiocres.15 Nous avons évalué également les facteurs
de risque de décès au cours du traitement antituberculeux afin d’identifier les facteurs qui pourraient réduire la mortalité dans cette population et dans les
populations similaires.
MÉTHODES
La population de l’étude provient d’une zone à prédominance rurale dans la Province de Nyanza, à
l’Ouest du Kenya. La prévalence du VIH chez les sujets âgés de 15 à 64 ans y était de 14,9% en 2007,14
et les déclarations de TB correspondaient approximativement à 431 pour 100.000 habitants.16
Patients tuberculeux
Les patients de l’étude proviennent d’une zone incluse
dans les anciens districts de Bondo et de Siaya, dont
la population totale est d’environ 800.000 habitants,
le taux des services de diagnostic TB de 2,5/100.000
habitants et celui des services de traitement TB de
7,8/100.000 habitants.17 On a extrait rétrospectivement dans le registre des services de santé les informations enregistrées en routine sur les patients TB
provenant du Programme National de Lutte contre la
TB (Division de la Lèpre, de la Tuberculose et des
Maladies pulmonaires [DLTLD]), respectivement en
2006, 2007 et 2008. Pendant la totalité de la période
d’étude, le régime standard de traitement pour les
adultes a comporté l’isoniazide et l’éthambutol pendant 8 mois, complétés par la rifampicine et le pyrazinamide au cours des 2 premiers mois. Le traitement
a été prolongé en cas d’interruption. Les interventions
TB-VIH ont comporté des tests VIH à l’initiative du
pourvoyeur de soins chez les patients TB, introduits à
partir de 2005,17 et l’extension des soins et des traitements du VIH pendant la même période18 dispensés
dans des dispensaires spécifiques pour les soins VIH.
Dans les registres TB les infirmières enregistrent
l’information, y compris l’âge, le sexe, la date du début du traitement, le type de TB et le type de patient
(nouveau cas, rechute), les résultats des frottis de crachats, le statut VIH et si oui ou non on a administré
le CPT. Au cours des visites suivantes, les registres
sont mis à jour avec les dates des visites hebdomadaires (au cours de la phase intensive), les mois où le
patient consulte le dispensaire pour y chercher les
médicaments (au cours de la phase de continuation)
et dans quelle mesure le patient est oui ou non sous
TAR. Les résultats finaux du traitement sont déterminés par le coordinateur de district du DLTLD.
Ce protocole a été approuvé par le comité d’éthique
(ERC) de l’Institut Kényan de la Recherche Médicale
(KEMRI) et a reçu la dénomination de non-recherche
de la part des US Centers for Disease Control and
Prevention (CDC). Un consentement éclairé n’a pas
été exigé.
Système de surveillance de la santé et de
la démographie dans la population
Pour déterminer l’excès de mortalité chez les patients
TB, nous avons comparé leurs taux de mortalité TB
avec les taux de mortalité toutes causes dans la population HDSS qui comportait la population de trois
zones contiguës couvrant approximativement un quart
des anciens Districts Bondo et Siaya.19 Les zones Asebo
et Gem ont été incluses respectivement depuis 2001
et depuis 2002,15 et la zone Karemo (District Siaya)
depuis 2007. Dans les ménages HDSS, 63% dépendent
principalement de l’agriculture de subsistance alors que
90% n’ont pas accès à des sources d’eau potable.19 Depuis 2008, on a introduit progressivement dans la zone
HDSS des conseils et des tests VIH (HBCT) à domicile.20 L’information sur le statut VIH obtenue au cours
de l’HBCT a été reliée à la base de données HDSS.
Le protocole HDSS a été approuvé par le KEMRI
ERC et par le comité institutionnel d’évaluation
du CDC. Les participants ont donné un consentement éclairé.
Critères d’exclusion et durée du suivi
Nous avons exclu les patients âgés de <15 ans ou
dont l’âge était inconnu car chez les jeunes enfants, le
diagnostic de TB est moins certain21 et le calcul des
taux de mortalité plus complexe.22 Les patients dont
les données concernant le sexe, le type de TB ou le
type de patient étaient manquantes ainsi que ceux
« venus d’ailleurs » ont été eux aussi exclus (Figure),
ces derniers en raison des incertitudes concernant
leur durée d’observation sous traitement et des biais
potentiels de survie.
Chez les patients TB, la durée de l’analyse coïncide
avec la durée de suivi du traitement, calculée à partir
Excès de mortalité chez les patients TB au Kenya
3
Figure Sélection des patients TB. * Dénominateur pour tous les pourcentages en dessous de ce cadre. † Le temps de suivi correspond
au temps qui sépare la date du début du traitement et la date du résultat. Lorsque n’importe laquelle de ces dates fait défaut ou comporte des erreurs évidentes de saisie ou d’enregistrement, les adaptations ont été réalisées comme décrit dans la section Méthodes.
Une date de début du traitement a été obtenue dans >99% des enregistrements. Une date de fin du traitement a été obtenue à
partir de la « date de résultat » pour 64% des enregistrements, pour 26% à partir du dernier mois de visite de la phase de continuation et pour 9% sous forme de la dernière date de visite au cours de la phase intensive. Si la durée du suivi qui en résulte était égale
à zéro ou non calculable, les enregistrements ont été exclus ou les valeurs estimées comme décrit dans la Figure. TB = tuberculose.
des informations disponibles dans les registres. Le
temps de suivi se termine à la date du résultat, à la dernière visite notée et au plus tard à 305 jours (10 mois)
afin de tenir compte des interruptions de traitement.
Pour les enregistrements dont le temps de suivi dépassait 305 jours, le résultat du traitement a été décrit
comme « toujours sous traitement » quel que soit le résultat dans le registre. Pour le traitement des données
manquantes, on a adopté les ajustements suivants
(Figure) : lorsque les dates du début et de la fin du
traitement n’étaient pas disponibles ou comportaient
des erreurs évidentes, elles ont été estimées à partir
des dates de visite enregistrées au cours de la phase
intensive et des mois de visite au cours de la phase
de continuation. Lorsque les enregistrements n’indiquaient pas clairement la durée du suivi, les hypothèses suivantes ont été adoptées : 1) si le résultat du
traitement était la guérison, un traitement terminé ou
l’échec, on a supposé une durée standard de 8 mois
de traitement (243 jours) ; 2) lorsque le résultat était
décès, « perdu de vue » ou transfert, ou lorsque seule
la date du début du traitement était enregistrée, on a
supposé que la visite de début du traitement avait eu
lieu mais non la première visite hebdomadaire de
suivi, que le résultat était survenu au cours de la première semaine, et on a admis une durée de 4 jours
(moitié du nombre de jours jusqu’à la prochaine visite de suivi) ; 3) si le résultat final faisait défaut, l’enregistrement a été exclu.
On a calculé les taux annuels de mortalité toutes
causes chez les résidents HDSS âgés de ⩾15 ans (n =
175.037) pour les années 2006, 2007 et 2008. Afin
d’estimer l’effet du VIH sur l’excès de mortalité chez
les patients TB, nous avons utilisé les données de
33.926 résidents HDSS (19%) qui ont participé au
HBCT en 2008 et 2009. Parmi ceux-ci, 4.944 (14,6%)
étaient infectés par le VIH.
Analyse statistique
On a utilisé la régression de Poisson pour calculer les
taux de mortalité pour 100 personnes-années (pa) et
les intervalles de confiance (IC) à 95% correspondants.
4
The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease
Nous avons calculé les ratios standardisés de mortalité (SMR) grâce à une standardisation directe pour le
sexe et les catégories d’âge, pour l’année de calendrier
et le statut VIH et nous avons calculé les différences
stratifiées de taux de mortalité entre les patients TB et
la population HDSS.
Nous avons utilisé un modèle de survie relative
pour estimer les ratios d’excès de risque (eHR), qui
sont similaires aux « hazard ratios (HR) » de Cox mais
ajustés pour la mortalité de base attendue. L’avantage
de cette technique est que ni l’information sur la cause
du décès, ni le fait de savoir dans quelle mesure l’excès de mortalité est attribuable directement ou indirectement à l’affection ne sont nécessaires.23,24 Le
nombre de décès parmi les patients TB dans chaque
strate démographique a été modélisé au moyen d’un
modèle linéaire généralisé avec une structure d’erreur
de Poisson se basant sur les données globales, avec
compensation pour les décès attendus dans les strates
similaires de la population HDSS. La probabilité
de décès pour chaque strate HDSS de sexe, d’âge et
d’année de calendrier a été calculée sous forme du
nombre de décès divisé par la population au milieu
de l’année dans chaque groupe d’âge d’un an. On suppose que les excès de risque sont constants au cours
des périodes de temps pré-spécifiées,23 que nous avons
adoptées comme étant d’un an. Afin d’évaluer l’eHR
en association avec le VIH, nous avons dû nous limiter aux données concernant les résidents HDSS dont
le statut VIH était connu grâce au HBCT. La durée
pendant laquelle le statut VIH était connu était disponible pour 22.487 personnes-années (pa) de suivi,
ce qui a donné en moyenne l’équivalent de 0,7 pa/
résident, qui est similaire à la moyenne disponible par
résident pendant 1 an dans l’ensemble de la population HDSS. La probabilité de décès, en fonction de
l’âge, du sexe et du VIH, a été estimée comme décrit
plus haut, mais en considérant comme population du
milieu de l’année la population du 1er janvier 2009.
Les facteurs de risque de décès au cours du traitement antituberculeux ont été examinés dans des modèles de risques proportionnels de Cox univariés et
multivariés. Les patients qui n’étaient pas décédés
ont été censurés comme décrit dans le paragraphe
« Exclusion et durée du suivi ». Les interactions avec
le statut VIH et le sexe ont été examinées. Les variables ont été introduites dans le modèle multivarié
lorsque le P du modèle univarié était < 0,20. Lors de
l’inspection visuelle des courbes de survie log-minus
log, on n’a pas trouvé de preuves que l’hypothèse de
proportionnalité des risquessoit violée pour aucune
des covariables. On a utilisé SAS 9.2 (SAS institute
Inc, Cary, NC, USA) pour les analyses statistiques.
RÉSULTATS
Au cours de la période 2006–2008, les services de
santé des Districts Bondo et Siaya ont enregistré
10.876 patients âgés de ⩾15 ans pour un traitement
antituberculeux. Parmi ceux-ci, 1.495 (14%) ont été
exclus (Figure). Les distributions de l’âge, du sexe, du
type de patient, du district et du résultat du traitement ont été similaires pour les patients inclus et
Tableau 1 Comparaison entre les patients TB âgés de
⩾15 ans inclus ou exclus de l’analyse
Inclusion
Caractéristique
n
Tous les patients
9.381
Sexe
Féminin
4.987
Masculin
4.394
Manquant*
0
Age, années
15–24
1.853
25–34
3.323
35– 44
2.060
45–54
1.098
55–64
592
⩾65
455
Statut VIH
Négatif
1.597
Positif
5.258
Inconnu
2.526
TAR chez patients
infectés par le VIH
VIH positif,
avec TAR
1.171
VIH positif,
sans TAR
1.231
VIH positif,
TAR inconnu
2.856
Type de TB
TBP à frottis positif 3.301
TBP à frottis négatif
ou non exécuté 4.198
TB extrapulmonaire 1.882
Pas de données*
0
Type de patient
Nouveau
8.460
Retraitement/
rechute
921
Inconnu ou venu
d’ailleurs*
0
Année du début du
traitement
2006
3.129
2007
3.196
2008
3.056
District
Bondo
3.931
Siaya
5.450
Résultat du traitement*
Traitement terminé/
guérison
5.585
Abandon
1.051
Décès
849
Echec
25
Transfert
482
Pas d’information* 1.389
Exclusion
%
de la
rangée
%
de la Total
rangée n
n
86
1.495
86
87
0
824
670
1
14
13
100
5.811
5.064
1
0,15*
86
85
87
88
87
88
299
574
317
156
86
63
14
15
13
12
13
12
2.152
3.897
2.377
1.254
678
518
0,21
88
87
83
210
765
520
12
13
17
1.807 <0,001
6.023
3.046
86
190
14
1.361
89
152
11
1.383
87
423
13
3.279
89
400
11
3.701
87
88
0
610
261
224
13
12
100
4.808
2.143
224
95
432
5
8.892
95
46
5
967
0
1017
100
1.017
87
88
84
478
444
573
13
12
16
3.607 <0,001
3.640
3.629
86
87
659
836
14
13
4.590
6.286
0,11
90
88
90
96
91
71
645
143
98
1
50
558
10
12
10
4
9
29
6.230
1.194
947
26
532
1.947
0,36*
Valeur
de P
14 10.876
0,06
0,03*
0,89*
* Pour les calculs des valeurs P, les catégories des critères d’exclusion ont été
exclues.
TB = tuberculose ; VIH = virus de l’immunodéficience humaine ; TAR =
traitement antirétroviral ; TBP = tuberculose pulmonaire.
Excès de mortalité chez les patients TB au Kenya
exclus. Chez les patients exclus, le nombre de valeurs
manquantes pour le VIH était plus élevé et provenait
plus souvent de la cohorte de 2008 (Tableau 1).
Sur les 9.381 patients TB inclus dans l’analyse, 840
(9%) sont décédés, parmi lesquels 466 (55,5%) au
cours des 2 premiers mois de traitement. Le taux
brut de mortalité au cours du traitement a été de
18,0/100 personnes-années (IC95% 16,8–19,2 ; Tableau 2). Le taux de mortalité standardisé pour l’âge
et le sexe a été de 8,8 (IC95% 8,2–9,4). Les ratios de
taux de mortalité des patients TB par rapport à la population HDSS ont été les plus élevés dans le groupe
des patients âgés de 15 à 24 ans et ont décru avec l’accroissement de l’âge. La différence de taux augmentait
avec l’âge et était la plus importante chez les patients
de sexe masculin âgés de ⩾65 ans (36,3/100 a/p ;
IC95% 30,8–41,9). Si l’on ne tient compte que des
personnes dont le statut VIH était connu, le SMR
VIH a été de 4,3 (IC95% 4,0–4,7), et la différence de
risque chez les patients TB non-infectés par le VIH
était de 6,3/100 personnes-années (IC95% 5,5–7,2).
L’infection par le VIH a constitué un facteur de
risque d’excès de mortalité après ajustement pour
le sexe et l’âge (eHR 2,1 ; IC95% 1,5–3,1 ; Ta-
5
bleau 3). On observe moins d’excès de mortalité
chez les patients TB de sexe féminin par comparaison à ceux du sexe masculin (eHR 0,78 ; IC95%
0,59–1,0 après ajustement pour le VIH ; eHR 0,75 ;
IC95% 0,52–1,1 après ajustement pour l’âge et
l’année calendaire). Dans les modèles avec ajustement
pour les autres variables, l’âge n’est pas associé avec
un excès de mortalité. La mortalité a décru entre 2006
et 2008 dans la population HDSS ainsi que chez les
patients TB qu’ils soient ou non infectés par le VIH,
ainsi que chez les patients dont le statut VIH était inconnu (données non présentées). Par comparaison
avec 2006, l’excès de mortalité est significativement
plus faible chez les patients commençant le traitement
antituberculeux en 2007 (eHR 0,65 ; IC95% 0,43–
0,96) et en 2008 (eHR 0,40 ; IC95% 0,24–0,69).
On trouve au Tableau 4 les facteurs de risque de
décès au cours du traitement pour l’ensemble des patients TB. La mortalité est plus faible chez les patients
de sexe féminin, mais ceci n’est significatif que chez
les patients infectés par le VIH (HR ajusté [aHR]
0,64 ; IC95% 0,54–0,76 ; données non présentées).
Bien qu’il y ait quelques interactions entre le sexe
et d’autres facteurs de risque, le aHR évolue dans la
Tableau 2 Taux de mortalité chez les patients TB, ratios standardisés de mortalité (SMR) et différences de taux de mortalité
Caractéristique
Patients TB Décès
n
% observés
Tous les patients
9.381 100
Age, années
Femmes
15–24
1.255
13
25–34
1.738
19
35– 44
943
10
45–54
529
6
55–64
299
3
⩾65
223
2
Hommes
15–24
598
6
25–34
1.585
17
35– 44
1.117
12
45–54
569
6
55–64
293
3
⩾65
232
2
Standardisé pour
âge et sexe
Année du début du
traitement
2006
3.129
33
2007
3.196
34
2008
3.056
33
Année du début du
traitement
standardisé
Statut VIH
Négatif
1.597
17
Positif
5.258
56
Inconnu
2.526
27
Standardisé pour le VIH
(exclusion des ‘inconnus’)
a/p
Taux de
Mortalité
mortalité/
HDDS/
100 a/p (IC95%) 100 a/p
Décès
attendus
SMR (IC95%)
Différence de
taux/100 a/p
(IC95%)
840
4.679
18,0 (16,8–19,2)
1,87
87,5
9,6 (9,0–10,3)
16,1 (15,7–16,5)
76
142
88
39
15
26
617
874
495
276
156
108
12,3 (9,8–15,4)
16,3 (13,8–19,2)
17,8 (14,4–21,9)
14,1 (10,3–19,4)
9,6 (5,8–16,0)
24,2 (16,5–35,5)
0,59
1,84
1,67
1,60
2,09
5,99
3,7
16,1
8,3
4,4
3,3
6,4
20,8 (16,4–26,0)
8,8 (7,5–10,4)
10,7 (8,5–13,1)
8,9 (6,3–12,1)
4,6 (2,6–7,6)
4,0 (3,0–6,5)
11,7 (11,1–12,4)
14,4 (13,4–15,4)
16,1 (14,9–17,3)
12,5 (11,0–14,1)
7,5 (5,2–9,8)
18,2 (13,5–22,9)
30
142
132
75
30
45
291
779
544
284
154
102
10,3 (7,2–14,7)
18,2 (15,5–21,5)
24,3 (20,5–28,8)
26,4 (21,1–33,1)
19,5 (13,6–27,9)
44,2 (33,0–59,2)
0,34
2,02
2,82
3,06
3,14
7,88
1,0
15,7
15,3
8,7
4,8
8,0
30,6 (20,7– 43,7)
9,0 (7,6–10,7)
8,6 (7,2–10,2)
8,6 (6,8–10,8)
6,2 (4,2–8,9)
5,6 (4,1–7,5)
10,0 (9,3–10,7)
16,2 (15,1–17,3)
21,4 (19,9–23,0)
23,4 (21,2–25,5)
16,4 (13,5–19,3)
36,3 (30,8– 41,9)
95,6
8,8 (8,2–9,4)
36,3
29,0
27,0
9,9 (8,9–11,0)
9,4 (8,3–10,6)
7,7 (6,7–8,9)
92,4
9,1 (8,5–9,7)
10,6
125,2
6,1 (4,7–7,8)
4,1 (3,8– 4,5)
135,8
4,3 (4,0– 4,7)
840
359
272
209
1.607
1.616
1.456
22,3 (20,1–24,8)
16,8 (14,9–19,0)
14,4 (12,5–16,4)
2,26
1,80
1,85
840
65
517
258
582
859
2.681
1.139
7,6 (5,9–9,7)
19,3 (17,7–21,0)
22,6 (20,0–25,6)
1,24*
4,67*
20,1 (19,3–20,9)
15,0 (14,3–15,7)
12,5 (11,8–13,2)
6,3 (5,5–7,2)
14,6 (12,9–16,3)
* Basé sur 22.487 pa de suivi avec les résultats VIH connus chez 33.926 (19%) des résidents HDSS âgés de ⩾15 ans dont le statut VIH était connu à partir des
conseils et tests VIH à domicile en 2008 et 2009. Parmi ceux-ci, 4.944 (14,6%) étaient infectés par le VIH.
TB = tuberculose ; SMR = ratio standardisé de mortalité ; pa = personnes-années ; IC = intervalle de confiance ; HDSS = Heath and Demographic Surveillance
System ; VIH = virus de l’immunodéficience humaine.
6
The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease
Tableau 3 Facteurs de risque d’un excès de mortalité chez
les patients TB
A Modélisation avec le
sexe, l’âge et l’année
de début du traitement
(sans ajustement pour
le VIH)*
eHR (IC95%)
B Modélisation avec le sexe,
l’âge et le VIH, tous les
patients TB dont le statut
VIH est connu combinés
pour 2006–2008†
eHR (IC95%)
Sexe
Femmes
Hommes
Age, années
15–24
25–34
35– 44
45–54
55–64
⩾65
Année du
début du
traitement
2006
2007
2008
Sexe
Femmes
Hommes
Age, années
15–24
25–34
35– 44
45–54
55–64
⩾65
Statut VIH
Négatif
Positif
0,75 (0,52–1,1)
1
1
0,80 (0,51–1,3)
1,0 (0,61–1,6)
0,86 (0,46–1,6)
0,38 (0,10–1,4)
0,51 (0,09–3,1)
0,78 (0,59–1,0)
1
1
1,0 (0,70–1,5)
1,1 (0,77–1,7)
0,82 (0,47–1,4)
0,59 (0,26–1,4)
1,5 (0,66–3,2)
1
2,1 (1,5–3,1)
1
0,65 (0,43–0,96)
0,40 (0,24–0,69)
* Données de population HDSS pour 2006–2008 utilisées pour en extraire la
mortalité dans la population.
† Données HDSS dont le statut VIH est connu en 2008/2009, utilisées pour
calculer la mortalité dans la population.
TB = tuberculose ; VIH = virus de l’immunodéficience humaine ; eHR = ratio
d’excès de risque ; IC = intervalle de confiance ; HDSS = Health and Demographic Surveillance System.
Tableau 4
même direction. Quatre-vingt-cinq pour cent de l’ensemble des décès de 2006 et 77% de ceux de 2008
sont survenus chez les patients dont le statut VIH
était inconnu ou, s’ils étaient infectés par le VIH,
chez ceux qui n’étaient pas sous TAR ou dont on ne
savait pas qu’ils étaient sous TAR. La mortalité est
élevée chez les patients dont le statut VIH est inconnu (HR 2,9 ; IC95% 2,2–3,8) ou chez les patients infectés par le VIH mais non sous TAR (HR
3,3 ; IC95% 2,5–4,5) ou dont on ignorait s’ils étaient
sous TAR (HR 2,8 ; IC95% 2,1–3,7). Si l’on considère uniquement les patients de sexe masculin infectés par le VIH, ces derniers aHR sont plus élevés,
respectivement 4,5 (IC95% 3,0–6,8) et 3,5 (IC95%
2,4–5,1). Parmi les patients du sexe féminin et infectés par le VIH sous TAR, le aHR est de 1,6 (IC95%
0,99–2,5) par comparaison avec les patients de sexe
féminin non infectés par le VIH. Lorsqu’on limite
l’analyse aux patients TB non infectés par le VIH
(données non présentées), la mortalité augmente avec
l’âge, n’est pas différente en fonction du sexe (aHR
1,0 ; IC95% 0,62–1,7), et les facteurs de risque
de décès puissants sont le retraitement (aHR 3,0 ;
IC95% 1,6–5,7) ainsi que la TB extrapulmonaire
(aHR 5,1 ; IC95% 2,4–10,9).
Facteurs de risque de décès chez les patients sous traitement TB
Tous les patients
Sexe
Féminin
Masculin
Age, années
15–24
25–34
35– 44
45–54
55–64
⩾65
Statut du VIH et du TAR
VIH négatif
VIH positif avec TAR
VIH positif, sans TAR
VIH positif, TAR inconnu
Statut du VIH inconnu
Type de TB
TBP à frottis positif
TBP à frottis négatif ou non exécuté
TB extrapulmonaire
Type de patient
Nouveau
Retraitement
Année du début du traitement
2006
2007
2008
District
Bondo
Siaya
Taux de
mortalité/
100 a/p (IC95%)
Patients
Décès
Suivi
pa
9.381
840
4.679
18,0 (16,8–19,2)
4.987
4.394
386
454
2.525
2.154
1.747
3.039
1.840
984
547
384
106
284
220
114
45
71
1.597
1.171
1.231
2.856
2.526
Ratio de risque
Univarié
Ajusté (IC95%)
15,3 (13,8–16,9)
21,1 (19,2–23,1)
0,73
1
0,74 (0,65–0,85)
1
908
1.653
1.039
559
310
209
11,7 (9,6–14,1)
17,2 (15,3–19,3)
21,2 (18,5–24,2)
20,4 (17,0–24,5)
14,5 (10,8–19,5)
33,9 (26,9– 42,8)
1
1,5
1,8
1,8
1,3
2,9
1
1,2 (0,99–1,5)
1,5 (1,2–1,9)
1,6 (1,2–2,0)
1,2 (0,86–1,7)
3,1 (2,3– 4,2)
65
94
140
283
258
859
652
612
1.417
1.139
7,6 (5,9–9,7)
14,4 (11,8–17,6)
22,9 (19,4–27,0)
20,0 (17,8–22,4)
22,6 (20,0–25,6)
1
1,9
2,9
2,6
2,8
1
2,0 (1,5–2,8)
3,3 (2,4– 4,5)
2,8 (2,1–3,6)
2,8 (2,1–3,7)
3.301
4.198
1.882
238
417
185
1.699
2.070
910
14,0 (12,3–15,9)
20,1 (18,3–22,2)
20,3 (17,6–23,5)
1
1,4
1,4
1
1,5 (1,2–1,7)
1,5 (1,3–1,9)
8.460
921
722
118
4.235
444
17,1 (15,9–18,3)
26,6 (22,2–31,8)
1
1,5
1
1,6 (1,3–1,9)
3.129
3.196
3.056
359
272
209
1.607
1.616
1.456
22,3 (20,1–24,8)
16,8 (14,9–19,0)
14,4 (12,5–16,4)
1
0,8
0,6
1
0,7 (0,6–0,9)
0,6 (0,5–0,7)
3.931
5.450
327
513
1.907
2.771
17,1 (15,4–19,1)
18,5 (17,0–20,2)
1
1,1
TB = tuberculose ; pa = personnes-années ; IC = intervalle de confiance ; VIH = virus de l’immunodéficience humaine ; TAR = traitement antirétroviral (traitement combiné) ; TBP = TB pulmonaire.
Excès de mortalité chez les patients TB au Kenya
7
Tableau 5 Fractions attribuables en raison de l’adoption incomplète des tests VIH et de l’TAR
chez les patients tuberculeux
Statut du VIH et
du TAR
VIH négatif
VIH positif, avec TAR
VIH positif, sans TAR
VIH positif, TAR inconnu
Statut VIH inconnu
VIH positif et statut VIH
inconnu combinés
Patients
Décès
n (%) de tous n (%) de tous
les patients
les décès aHR
Fraction
attribuable
% (IC95%)
aHR
Fraction
attribuable
% (IC95%)
1.597 (17)
1.171 (12)
1.231 (13)
2.856 (30)
2.526 (27)
65 (8)
94 (11)
140 (17)
283 (34)
258 (31)
1
2,0
3,3
2,8
2,8
Point de départ
51 (32–64)
70 (59–78)
64 (52–72)
64 (53–73)
1
1,6
1,4
1,4
Point de départ
38 (20–52)
26 (6– 42)
28 (8– 43)
7.784 (83)
775 (92)
2,8
64 (54–72)
1,5
31 (15– 45)
VIH = virus de l’immunodéficience humaine ; TAR = traitement antirétroviral (traitement combiné) ; aHR = ratio de
risque ajusté : IC = intervalle de confiance.
Sur les 6.855 patients TB dont le statut VIH est
connu, 5.258 (79%) sont infectés par le VIH, parmi
lesquels des informations sur le CPT sont connues
chez 4.469 (85%) ; parmi ceux-ci, 4.302 (96%) avaient
effectivement reçu le CPT. La proportion de patients
TB dont le statut VIH est inconnu a diminué, passant
de 33% en 2006 à 24% en 2008, et la proportion de
patients infectés par le VIH chez qui le fait d’être sous
TAR est enregistré a augmenté de 18% à 26%. Les
deux tendances sont similaires chez les hommes et
chez les femmes (données non présentées). Si l’on
suppose une prévalence du VIH similaire chez les
patients dont le statut VIH est inconnu, on conclut
qu’approximativement 20% des patients TB infectés
par le VIH ont été enregistrés comme étant sous TAR
en 2008.
Si l’on rassemble les patients TB dont le statut VIH
est inconnu et positif, la fraction de mortalité attribuable à une adoption incomplète des tests VIH et du
TAR a été de 64% (IC95% 54–72) par comparaison
avec les taux de mortalité chez les patients non infectés par le VIH, et de 31% (IC95% 15–45) par comparaison avec les patients infectés par le VIH sous TAR
(Tableau 5).
DISCUSSION
Cette étude démontre que chez les patients TB sous
traitement dans l’Ouest du Kenya, le risque de décès
est 8,8 fois supérieur à celui de la population générale
après standardisation pour le sexe et l’âge et 4,3 fois
supérieur après standardisation pour le VIH. Après
ajustement pour le sexe et l’âge, le risque de décès des
patients TB infectés par le VIH est accru par comparaison avec les personnes infectées par le VIH de la
population générale, alors que l’excès de mortalité est
plus faible chez les patients TB de sexe féminin ou
chez ceux qui ont commencé le traitement au cours
de la dernière année. Parmi les patients TB, on trouve
de puissants facteurs de risque de décès, en l’occurrence le fait que le statut VIH soit inconnu et, en cas
d’infection par le VIH, le fait de ne pas être sous TAR
ou de ne pas être connu comme étant sous TAR. Les
décès, parmi les patients dont le statut VIH est positif
ou inconnu, pourraient être réduits d’environ 31% par
l’amélioration de l’adoption des tests VIH et du TAR.
Cette fraction pourrait être plus élevée si le TAR était
mis en route plus précocement.
Entre 2006 et 2008, on note une diminution de la
mortalité et de l’excès de mortalité chez les patients
TB, probablement expliquée par l’introduction et l’extension rapide des tests VIH à l’initiative des pourvoyeurs de soins, du CPT et du TAR chez les patients TB du Kenya et par l’expansion des services de
soins et de traitement du VIH dans la région.18 Cette
décroissance est comparable aux taux décroissants
de mortalité TB-VIH dans d’autres pays d’Afrique où
l’épidémie de VIH est généralisée.25
La mortalité chez les patients TB non-infectés par
le VIH est toujours appréciable, bien que plus faible
que dans certaines autres régions,7 et sa décroissance
pourrait être le reflet des efforts nationaux pour l’amélioration des soins TB. Une réduction de l’incidence
de la TB dans la population pourrait éviter davantage
ces décès. Comme dans d’autres études, la mortalité
chez les patients TB plus âgés est très élevée, en partie
du fait des comorbidités.7,26
Les observations de cette étude viennent renforcer l’objectif mondial de mise sous TAR d’ici 2015 de
100% des patients TB infectés par le VIH4 et des appels croissants27 à une initiation précoce du TAR au
cours du traitement TB à des niveaux plus élevés de
CD4.28 Nos données ne permettent pas d’analyser le
moment où le TAR a été mis en route par rapport
au traitement antituberculeux. La faible proportion
de patients TB enregistrés comme étant sous TAR peut
s’expliquer également par la priorité données aux individus dont l’immunodépression est la plus avancée,9
et par lamise en route du TAR reportée au moment
du traitement antituberculeux ou jusqu’à l’achèvement de la phase intensive de 2 mois pour éviter les
inconvénients d’une administration simultanée des
traitements TB et VIH.29,30 De plus, l’accès des patients au TAR pourrait avoir été compromis par le
fait que les services TB-VIH ne sont pas totalement
intégrés et que les services de traitement du VIH ne
sont pas aussi décentralisés que les services de traitement antituberculeux.31
8
The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease
Bien qu’on ait trouvé un taux de mortalité plus
élevé chez les patients TB de sexe masculin dans
d’autres études,7,26 dans notre étude, la mortalité
n’est pas différente en fonction du sexe des patients
TB dont le statut VIH est négatif ou inconnu. Dans ce
type de population, l’adoption des tests et du traitement VIH est plus élevée parmi les femmes.20 Les références à partir des dispensaires VIH ne diffèrent
pas par sexe (données non présentées) mais un
nombre plus élevé de patients TB de sexe féminin
pourrait déjà avoir été sous TAR avant le diagnostic
de la TB, ce qui contribue à un excès de mortalité
plus faible chez les femmes ainsi qu’à une mortalité
plus faible chez les patients TB de sexe féminin sous
TAR. La précocité du dépistage du VIH et de la mise
en route du TAR pourrait non seulement prévenir la
transmission du VIH et de Mycobacterium tuberculosis,27 mais également réduire la mortalité TB chez
les personnes infectées par le VIH chez qui une TB se
développe.6
Cette étude a plusieurs limites. Dans les registres
des services de santé de routine, il y a des données
manquantes. Cela pourrait entrainer principalement
une sous-estimation de la mortalité chez les patients
TB et une sous-estimation du risque associé à l’absence d’adoption des tests VIH et du TAR pour les
raisons suivantes : chez les patients inclus, on a supposé que la mortalité était similaire à celle des patients qui étaient perdus de vue (11%) ou transférés
(5%), alors que l’ajustement pour le décès dans ces
derniers groupes a augmenté de 24% le CFR rapporté
dans une étude au Viet Nam.32 L’adoption effective
des tests VIH et du TAR peut avoir été sous-déclarée
en raison de la séparation physique des dispensaires
TB et VIH. Les TB à frottis négatif, diagnostiqués sur
une base clinique, pourraient comporter certaines erreurs de classification33,34 et, si l’on se limite aux patients TB à frottis positif, le risque de décès a été plus
élevé chez les patients dont le statut VIH était inconnu ou positif. L’inclusion des décès TB dans les
taux de mortalité toutes causes sous-estime l’excès de
mortalité, sous-estimation que l’on estime à <5%.
L’effet du VIH sur l’excès de mortalité devrait être
interprété avec quelques précautions. Comme les patients TB infectés par le VIH sont prioritaires pour le
TAR, on doit s’attendre à un meilleur accès au TAR
chez les patients TB par rapport aux individus de la
population générale infectés par le VIH, ce qui entrainerait une sous-estimation de l’effet du VIH. Toutefois, l’effet pourrait être une surestimation si, par comparaison aux patients TB, l’immunodépression était
moins avancée ou la proportion de sujets sous TAR
était plus élevée dans la population HDSS dont le statut VIH était connu. Cette dernière hypothèse pourrait s’appliquer puisque nous n’avions des données
HDSS que depuis 2008 et 2009, moment où en général l’accès au TAR était meilleur qu’en 2006.18 Toutefois, lorsqu’on se limite aux patients TB de la seule
année 2008, le SMR VIH n’est que légèrement plus
bas (3,6 ; IC95% 3,0–4,2) et le eHR est réduit de
<10%. De plus, dans les HDSS, moins de la moitié
des individus infectés par le VIH avaient recouru
aux soins dans les 6 mois après l’HBCT.20 L’effet du
VIH peut être en partie le reflet d’une utilisation plus
faible du TAR en raison du délai de mise en route du
TAR en présence de TB.
Un meilleur suivi de l’impact des interventions TB
et VIH sur la mortalité au niveau de la population
pourrait être obtenu par l’inclusion dans l’infrastructure HDSS d’une liaison prospective des données
démographiques et des données cliniques TB et VIH
et par des efforts pour améliorer la qualité des registres
de surveillance de la TB. Au niveau des programmes,
grâce à l’utilisation croissante des registres électroniques de TB,35 les répartitions des patients TB et des
décès en fonction du statut VIH et TAR pourraient
être des indicateurs utiles pour le suivi des décès TB
et VIH.
En conclusion, parmi les facteurs de risque de décès
chez les patients TB de l’Ouest du Kenya, les effets de
l’âge, du sexe et du déclin de la mortalité au fil du
temps sont au moins partiellement dues aux tendances existantes dans la population générale. L’extension jusqu’à 100% de l’adoption des tests VIH et
du TAR chez les patients TB pourrait encore réduire
les décès d’au moins 31% chez les patients TB dont le
statut VIH est positif ou inconnu et de plus encore si
le TAR était mis en route plus précocement.
Remerciements
Les auteurs remercient le personnel des dispensaires TB et les coordinateurs de district TB, le Kenya Medical Research Institute (KEMRI)/
US Centers for Disease Control and Prevention (CDC) Research, le
personnel du Public Heath Collaboration ainsi que la branche TB
et en particulier la branche du Health and Demographic Surveillance
System (HDSS). Cet article est publié avec l’approbation du Directeur actuel de KEMRI. KEMRI/CDC HDSS est un membre du réseau INDEPTH (International Network of field sites with continuous Demographic Evaluation of Populations and Their Health).
Ce travail a bénéficié du soutien de la KEMRI/CDC Research
and Public Health Collaboration ainsi que de l’Academic Medical
Center de l’Université d’Amsterdam.
Les vues exprimées dans ce manuscrit ne représentent pas nécessairement les vues officielles du Département de la Santé et des
Services Humains, ne mentionnent pas les noms commerciaux
des médicaments et n’impliquent pas l’approbation des pratiques et
organisations commerciales par le gouvernement des Etats-Unis.
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