Le Journal de l`Institut Curie - n°66

Transcription

Le Journal de l`Institut Curie - n°66
JIC66_1COUV_SR2VD
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LE JOURNAL
DE
L’INSTITUT CURIE
COMPRENDRE POUR AGIR CONTRE LE CANCER
ENTRE NOUS
Des jardins
pour faire reculer
le cancer
ACTUALITÉS
Rendre les cellules
plus réceptives aux rayons
DOSSIER
Découvrir
et soigner
La logique du transfert
# 66 - JUIN 2006 - 1,25 € - ISSN 1145-9131
reJIC66_2-3_SR4VD
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ACTUALITÉS
INSTITUT CURIE
SOMMAIRE
ÉDITORIAL
p. 5
Les bienfaits
du sport confirmés
FICHE PRATIQUE
h
Dossier médical personnel :
p. 7
le futur carnet
de santé numérique
h DOSSIER
p. 8
Noak/Le bar Floréal/IC
DÉCOUVRIR
ET SOIGNER,
LA LOGIQUE
DU TRANSFERT
Grâce à vous
p. 10
L’Institut Curie investit
près de 8 millions d’euros en 2006
Décryptage
p. 12
Le brevet, ange gardien
de l’invention
Le XV de France aux côtés
de l’Institut Curie
Les jonquilles ont fleuri
pour faire reculer le cancer
Rétrospective
Marie Curie, la première
« professeure » à la Sorbonne
1. Cellule de bibliométrie (Inserm).
p. 16
Amélie Mauresmo, marraine de l’Institut Curie
p. 17
p. 19
C. Pereira/Institut Curie
ENTRE NOUS
h
Initiatives
Depuis 2004, la championne de tennis apporte bénévolement
son soutien aux chercheurs, aux soignants de l’Institut Curie et,
plus encore, aux malades du cancer. Marraine de l’Institut, elle
«espère pouvoir leur donner du courage et un peu de bonheur» et
assure qu’ «il faut toujours aller de l’avant, se battre. Parfois, on est
moins motivé et, à d’autres moments, on reprend confiance en soi».
LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE COMPRENDRE POUR AGIR CONTRE LE CANCER EST ÉDITÉ PAR L’INSTITUT CURIE - 26, RUE D’ULM, 75248 PARIS CEDEX 05 - FAX: 01 43 25 17 56 - [email protected]
- WWW.CURIE.FR - DIRECTEUR DE LA PUBLICATION: PR CLAUDE HURIET - RÉDACTRICE EN CHEF: NATHALIE BOISSIÈRE - RÉDACTION: JÉRÉMY LAVALAYE, MARIE-LAURE MOINET, CLÉMENCE MUSA,
FABIEN RIVENET - ICONOGRAPHIE: YASMINE BENZOUGAR, CÉCILE CHARRE (01 44 32 40 51) - DONS ET ABONNEMENTS: YOVAN VUJOSEVIC (01 44 32 40 80) - ONT PARTICIPÉ À CE NUMÉRO:
ALAIN AURIAS, EMMANUEL BARRILLOT, ALAIN BOUQUET, JACQUES CAMONIS, DR JÉRÔME COUTURIER, PR JEAN-MARC COSSET, DR OLIVIER DELATTRE, EMMANUELLE DEPONGE, DR FRANCOIS DOZ,
MARIE DUTREIX, NATHALIE HUCHETTE, DR ALAIN LIVARTOWSKI, DR SYLVIA NEUENSCHWANDER, FRANK PEREZ, DR SOPHIE PIPERNO-NEUMANN, DR XAVIER SASTRE, FRÉDÉRIC SAUDOU, SIMON SAULE,
DR GUDRUN SCHLEIERMACHER, DR DOMINIQUE STOPPA-LYONNET, JEAN PAUL THIERY, JEAN-LOUIS VIOVY – LE SOMMAIRE, LES TITRES, CHAPÔS, INTERTITRES, ILLUSTRATIONS ET LÉGENDES SONT
DE LA RESPONSABILITÉ DE LA RÉDACTION EN CHEF ET N’ENGAGENT PAS LES AUTEURS - PHOTO DE COUVERTURE : NOAK/LE BAR FLORÉAL/INSTITUT CURIE - ABONNEMENT POUR 4 NUMÉROS/AN :
5 € - CRÉATION ET RÉALISATION : L’AGENCE CITIZEN PRESS (01 53 00 10 00) - FABRICATION : TC GRAPHITE (PARIS) – IMPRESSION : LA GALIOTTE PRENANT - 70/82 RUE AUBER, 94400 VITRY-SURSEINE - NUMÉRO DE COMMISSION PARITAIRE : 0907H82469 - DÉPÔT LÉGAL DU NO 66 : JUIN 2006 - CE NUMÉRO A ÉTÉ IMPRIMÉ À 150 000 EXEMPLAIRES.
02,
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
,TECHNOLOGIE
h Sous la direction d’Emmanuel
Barillot, une vingtaine de personnes
développent des outils et des logiciels
au sein de l’Unité de bio-informatique
de l’Institut Curie.
L’Unité de bio-informatique,
«marché aux puces» de l’Institut Curie
C
réée en 2003 et entièrement
dédiée à la cancérologie, l’Unité de
bio-informatique de l’Institut Curie
regroupe les compétences d’une vingtaine
d’ingénieurs, informaticiens, physiciens
et mathématiciens. La recherche sur
le cancer nécessite en effet le recours à
des technologies de pointe pour analyser
les gènes responsables du développement
cancéreux; elle utilise aussi des outils
informatiques adaptés pour interpréter
ces résultats. L’automatisation
des techniques en biologie génère des
quantités considérables de données
qui, pour être exploitées efficacement,
doivent être analysées, comparées
et archivées. Telle est la mission des bioinformaticiens de l’Institut Curie.
Afin d’étudier l’ensemble des données
recueillies, ils développent des outils
informatiques, par exemple des logiciels
appropriés pour interpréter les résultats
des analyses faites grâce aux puces
à ADN. Sous l’aspect d’une simple lame
de microscope, ces laboratoires
miniatures permettent aux médecins et
aux chercheurs d’étudier simultanément
des centaines de gènes, voire le génome,
c’est-à-dire la totalité des gènes contenus
dans une cellule, soit près de 30 000
chez l’homme. L’un de ces programmes,
baptisé Maia, permet déjà une analyse
automatisée, fiable et rapide des données
de ces puces et de quantifier l’état
et l’activité des gènes (voir l’encadré).
D’autres logiciels développés à l’Institut
Curie établissent la carte génétique
des tumeurs et désignent les régions du
génome où les altérations sont les plus
significatives. Généralement ce sont elles
qui contiennent les gènes qui permettront
aux chercheurs d’imaginer de nouvelles
méthodes de diagnostic ou de traitement.
Par ailleurs, en collaboration avec l’équipe
CNRS de François Radvanyi, implantée
à l’Institut Curie, les bio-informaticiens
viennent de mettre au point le système
Ittaca. Ce dernier associe Internet à un
logiciel d’analyse pour permettre l’accès
aux données de la littérature scientifique
disponible sur les sites Web spécialisés
dans le monde entier. Les ordinateurs
des chercheurs corrèlent les données
cliniques et génomiques qu’ils obtiennent
avec les résultats de leurs confrères
internationaux. En émergence depuis
les années 1990 en Europe, la bioinformatique est désormais essentielle
Avec des données de plus en plus
nombreuses et complexes, l’informatique
est devenue aussi indispensable
aux chercheurs que l’imagerie.
pour établir notamment la carte d’identité
moléculaire unique et spécifique à
chaque tumeur. Une donnée qui devrait
améliorer le diagnostic, le pronostic
et le traitement de tous les cancers.
Fabien Rivenet
MAIA, UN OUTIL PARTAGÉ AVEC LE MONDE ENTIER
Maïa était chez les Hindous, ainsi que dans l’Antiquité et selon la tradition basque,
la déesse de la Terre. Depuis peu, Maia est également l’acronyme de l’anglais
Microarray Image Analysis pour analyseur d’image de micropuce, un logiciel
développé par le bio-informaticien Eugène Novikov et ses collaborateurs
du Département de transfert de l’Institut Curie. Régulièrement mis à jour, il est
gracieusement mis à la disposition de la communauté scientifique internationale.
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
,03
A. Lescure/Institut Curie
p. 4
Dans un environnement scientifique exceptionnel, l’Institut
Curie continue de développer ses nombreux atouts :
• Celui de s’appuyer sur la collaboration constante
et fructueuse des chercheurs et des médecins.
L’Institut Curie peut ainsi accompagner et anticiper
les mutations et les évolutions des sciences du vivant
et accélérer la mise à disposition des découvertes pour
Pr Claude Huriet
les patients et la communauté médicale.
président de
•
Son statut de fondation, qui lui offre une diversité des
l'Institut Curie
ressources, issues à la fois de l’État et de la générosité
publique. Sans cette dernière, l’acquisition de technologies innovantes,
le développement de la recherche clinique et l’amélioration de la qualité
de l’accueil des patients ne resteraient que des vœux pieux.
• Sa politique scientifique, qui soutient les disciplines émergentes
(bio-informatique, nouvelle imagerie scientifique et médicale, radiothérapie
ultraprécise, etc.) et l’accueil des jeunes chercheurs motivés et entreprenants.
• Le volume important de ses publications dans les meilleures revues scientifiques
internationales, reflet en France et à l’étranger de l’excellence de ses équipes
et de ses collaborateurs. Une étude récente vient d’ailleurs de placer
le Centre de recherche de l’Institut Curie parmi les tout premiers au monde
dans le domaine de la cancérologie1.
• La grande compétence et la rigueur de ses médecins et chercheurs reconnues
à titre individuel par des institutions prestigieuses. Ainsi, le « chasseur d’images
scientifiques » Jean-Baptiste Sibarita vient d’être récompensé par la médaille
de cristal du CNRS et, ce mois-ci, l’immunologiste Sebastian Amigorena sera
reçu solennellement à l’Académie des sciences, le biologiste cellulaire Michel
Bornens devrait se voir décerner le prix Alexandre-Joannidès de l’Académie
des sciences et, à la généticienne Geneviève Almouzni, sera remis le Grand prix
de la Fondation Simone et Cino del Duca de l’Institut de France.
Pluridisciplinarité, dynamisme, qualité des travaux et excellence de toutes
les équipes créent les conditions propices à l’innovation scientifique
et permettent à l’Institut Curie de témoigner jour après jour de sa volonté de
comprendre pour « prendre le cancer de vitesse ».
h
Actualités générales
p. 3
A. Lescure/Institut Curie
L’Unité de bio-informatique,
« marché aux puces »
de l’Institut Curie
Une molécule antirejet
contre la maladie de Huntington
L’excellence, une condition
nécessaire à l’innovation
Noak/Le bar Floréal/Institut Curie
ACTUALITÉS
h
Institut Curie
reJIC66_4-7_BAT
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ACTUALITÉS
ACTUALITÉS
INSTITUT CURIE
GÉNÉRALES
,MÉDICAMENT
DIM/Institut Curie
h
L’imagerie médicale est l’examen clé
pour diagnostiquer une tumeur musculaire
ou du système nerveux chez l’enfant.
04,
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
contre la maladie de Huntington
au risque cancérogène
Grâce à la molécule FK506, la protéine malade,
la huntingtine (en rouge), devient moins toxique.
À
l’Institut Curie, des chercheurs
du CNRS et de l’Inserm viennent
de montrer qu’un médicament évitant
le rejet des greffes pourrait également
traiter la maladie de Huntington.
Comme les maladies d’Alzheimer ou de
Parkinson, cette pathologie se caractérise
par la mort prématurée des neurones.
Chez les patients venant de subir une
F. R.
Source: The Journal of Neuroscience, février 2006.
Rendre les cellules
plus réceptives aux rayons
n radiothérapie, pour améliorer
l’action des rayons sur les cellules
malades, les médecins utilisent
parfois des molécules appelées
radiosensibilisateurs. À l’Institut Curie,
le radiobiologiste Vincent Favaudon et
son équipe Inserm travaillent à mettre
au point des substances qui sensibilisent
les cellules à l’action destructrice
des rayons. C’est en étudiant la Parp,
une protéine intervenant dans la
réparation et la réplication de l’ADN, qu’ils
ont découvert que d’autres molécules
’Organisation mondiale de la santé
(OMS) a déclaré que les bénéfices
de la pilule contraceptive l’emportaient
sur les risques cancérogènes, précisant
que « plusieurs de [nos] équipes évaluent
régulièrement la sécurité et la balance
risques-bénéfices des contraceptifs oraux.
Elles en ont conclu que, pour la plupart
des femmes, les bénéfices pour la santé
excèdent clairement les risques. » L’OMS
fait suite aux déclarations du Centre
international de la recherche contre le
cancer qui a annoncé, en juin 2005, que
les pilules estroprogestatives devaient
augmentent fortement le nombre de
cassures de l’ADN constatées après
irradiation. Cette découverte suggère que
ces molécules pourraient être efficaces
lors des radiothérapies des tumeurs en
croissance rapide, c’est-à-dire celles dont
les cellules connaissent un fort taux de
division. La radiothérapie est utilisée dans
le traitement de plus de la moitié des
cancers, et les cas face auxquels elle a été
inefficace sont encore trop nombreux.
F. R.
Source: Molecular Cancer Therapeutics, mars 2006.
consacre une
exposition à
Pierre Curie,
célèbre physicien
disparu il y a tout
juste cent ans.
Le Panthéon, où reposent
les cendres de Pierre et Marie
Curie, célèbre au travers d’une
exposition l’un des plus brillants
physiciens français. À 20 ans,
il découvre avec son frère
la piézoélectricité (propriété
toujours utilisée par nos
montres à quartz, par exemple),
en donne l’explication théorique
(le « principe de Curie »), mène
des expériences très délicates
sur le magnétisme (« loi et
température de Curie »), avant
d’entrer dans la légende avec
sa femme pour leur découverte
de la radioactivité.
Jérémy Lavalaye
,CANCER DU SEIN
Les bienfaits du sport
précisés
ans un récent sondage1, 84 % des
Français citent l’exercice physique
comme moyen de lutte contre le cancer
du sein. Preuve que les messages de
prévention ne sont pas vains. Une équipe
Inserm à l’Institut Gustave-Roussy
(Villejuif) vient de définir plus
précisément l’intensité, la fréquence
et le type d’activité bénéfique contre
le cancer du sein, afin d’aider les femmes
à adapter leur comportement.
L’étude2 démontre que le risque de
cancer du sein diminue d’autant plus que
l’intensité et la durée de l’activité sont
importantes. Par exemple, les femmes
qui déclarent plusieurs heures
hebdomadaires d’activité soutenue
(jogging, natation, tennis, vélo…) voient
leur risque de cancer du sein diminuer de
38 % par rapport à celui des femmes peu
ou pas sportives. Les auteurs de l’étude
PIERRE CURIE,
UN PRÉSENT
POUR L’AVENIR
H Le Panthéon
être officiellement considérées comme
des substances cancérogènes pour
certains types de cancers, comme ceux
du sein, du foie et du col de l’utérus.
Par ailleurs, les représentants
de sociétés savantes françaises ont
tenu à souligner qu’après 40 ans,
une méthode de contraception non
hormonale peut être envisagée.
Ils ont également rappelé que la pilule
diminue de moitié le taux de cancer
de l’endomètre et de l’ovaire.
h «Pierre Curie, l’homme,
le scientifique». Du 15 juin au 31 octobre,
crypte du Panthéon, Paris 5e.
D
,RADIOTHÉRAPIE
E
L
EXPOSITION
ACJC
greffe, la molécule FK 506 permet de
diminuer le risque de rejet. Or, d’après les
chercheurs du laboratoire Signalisation
intracellulaire et mort neuronale, elle
permet également de bloquer la toxicité
de la protéine mutante responsable de
la maladie de Huntington. Les chercheurs
ont pressenti le fort potentiel de
cette molécule, au point de la tester
rapidement comme traitement potentiel
de la maladie de Huntington.
Cette pathologie touche actuellement
6 000 personnes en France et les experts
estiment que les porteurs du gène
responsable de la huntingtine mutante,
qui n’ont pas encore développé la
maladie, sont deux fois plus nombreux,
ce qui porte le nombre de malades
actuels et potentiels à 18 000. Les
résultats sont évidemment très attendus.
CONFÉRENCES
P. Lombardi/Institut Curie
F. R.
Source: European Journal of Radiology,
13janvier 2006.
Pilule: des bénéfices supérieurs
h
Assurant leur mission de
diffusion des connaissances,
les médecins du Département
d’imagerie médicale de
l’Institut Curie ont tenu à faire
le point sur les examens
à réaliser pour établir
un diagnostic des tumeurs
des tissus mous, comme
celles touchant les systèmes
musculaires et nerveux
des enfants. Après l’examen
clinique, la radiographie
et l’échographie permettent
de déterminer avec fiabilité
le caractère bénin ou malin de
la tumeur. Dans certains cas,
l’IRM (imagerie par résonance
magnétique) peut se révéler
nécessaire pour une évaluation
plus fine. Cette étape
diagnostique est indispensable
pour décider s’il y a lieu, ou non,
de pratiquer un prélèvement
à l’aiguille afin de définir sans
équivoque la lésion. Il est en
effet crucial que le diagnostic de
ces tumeurs soit d’emblée fiable
pour que les médecins puissent
orienter au plus vite l’enfant
vers un centre assurant la prise
en charge pluridisciplinaire
indispensable aux traitements
anticancéreux, et augmenter
ainsi ses chances de guérison.
EN BREF
Une molécule antirejet
R. Pardo/UMR146-Institut Curie
COMMENT ÉTABLIR
UN DIAGNOSTIC
SANS ÉQUIVOQUE
h
EN BREF
IMAGERIE MÉDICALE
,CONTRACEPTION
Quelques heures hebdomadaires
de sport et le risque de cancer s’éloigne,
une étude de l’Inserm vient de le confirmer.
soulignent que « même chez les femmes
présentant des antécédents familiaux ou
d’autres facteurs de risque de cancer du
sein, la pratique régulière d’une activité
physique soutenue favorise une baisse non
négligeable du risque de cancer du sein. »
J. L.
1. Étude TNS Sofres.
2. Cancer Epidemiology, Biomarkers & Preventions,
janvier 2006.
« CANCER,
PARLONS-EN »
Tout au long de l’année, la Maison
des cancérologues de France
propose au grand public
des conférences sur le cancer.
Au programme en juin :
- le 13, « Les cancers cutanés :
prévention et dépistage » ;
- le 20, « Soigner son image,
à l’écoute des hommes
et des femmes » ;
Après une interruption cet été,
le cycle reprendra en septembre.
h
83 bd Vincent-Auriol, Paris 13e.
Renseignements et inscriptions:
08 11 46 03 03 – www.santea.com
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
,05
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Page 6
FICHE PRATIQUE
ACTUALITÉS
GÉNÉRALES
Dossier médical personnel :
le futur carnet de santé numérique
,SOINS ESTHÉTIQUES
«Le nombre de cancers induits
par l’amiante ne cesse d’augmenter,
malgré son interdiction en France,
en 1997», souligne le rapport1 de la
Mission d’information de l’Assemblée
nationale sur les risques et
les conséquences de l’exposition
à l’amiante. Les experts proposent
des recommandations sanitaires,
médicales, techniques, juridiques
et économiques afin qu’une telle
situation ne se reproduise plus.
Les pouvoirs publics ont mis en place
plusieurs mesures parmi lesquelles
le droit à un suivi médical
personnalisé pour les personnes
ayant été exposées à l’amiante
et un renforcement des contrôles
des bâtiments contenant de
l’amiante. Enfin, en septembre 2005,
les ministères chargés du Travail,
de la Santé et de l’Écologie ont
créé l’Agence française de sécurité
sanitaire de l’environnement
et du travail (Afsset) pour notamment
améliorer la prévention des risques
auxquels sont exposés les
professionnels qui interviennent
sur l’amiante.
1. Disponible sur www.sante.gouv.fr
Se réconcilier
avec son corps,
surtout à l’hôpital
S. Laure/Institut Curie
L’AMIANTE, TOUJOURS
D’ACTUALITÉ
S
i la chimiothérapie et la radiothérapie
sont des traitements de plus en
plus efficaces, leurs effets secondaires,
comme la perte des cheveux, des
sourcils ou des cils, le changement
de la qualité des ongles ou de la texture
de la peau, constituent un écueil difficile
à surmonter, tant physiquement que
moralement.
Afin de changer cette situation, quelques
établissements de santé, dont l’Institut
Curie, proposent des soins esthétiques
ou des conseils. Leur objectif est de
réconcilier la personne avec son corps,
les soins esthétiques devenant un
complément précieux du traitement
médical. En effet, les malades expliquent
que le temps d’un soin, ils se sentent des
femmes ou des hommes à part entière.
Des spécialistes (esthéticiennes,
coiffeurs…) prodiguent, à l’hôpital ou
à l’extérieur, des conseils pratiques sur
les techniques de maquillage adaptées
à la situation des malades, mais aussi
sur les façons de nouer un turban, sur
h
EN BREF
ENVIRONNEMENT
Quand la maladie malmène le corps, prendre soin
de soi peut être un réconfort, loin d’être anecdotique.
le choix d’une perruque ou d’une
prothèse mammaire.
Ces initiatives, encore trop peu
nombreuses, sont, en majorité,
le résultat de démarches individuelles,
associatives ou de mécénat. Leur
développement apparaît pourtant
vraiment nécessaire et est réclamé
par le Plan cancer depuis trois ans.
06,
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
prêts et aux assurances. Lancée en
Rhône-Alpes, cette initiative baptisée
« Pour une citoyenneté retrouvée »
regroupe des volontaires formés à ces
questions, des médecins et des courtiers
d’assurance liés à l’association par une
charte éthique. Le demandeur bénéficie
d’une expertise anonyme et gratuite
de sa situation et d’un accompagnement
dans toutes les phases de sa recherche.
Plusieurs centaines de dossiers ont déjà
L’Institut Curie,
hôpital pilote
médicaux et d’y donner accès
aux médecins qu’elle consulte.
Le DMP devrait ainsi concourir
à limiter les prescriptions redondantes,
aider les médecins à éviter
les interactions médicamenteuses…
Aujourd’hui en cours d’expérimentation,
le DMP doit encore surmonter
quelques difficultés techniques
et financières. Une fois généralisé,
il devrait simplifier le parcours
de soins du patient.
Printemps 2006 : début de la phase
d’expérimentation du dossier médical
personnel unique. L’Institut Curie y
participe avec d’autres établissements
et des réseaux de soins, en
collaboration avec un des hébergeurs
habilités. Son hôpital est fort d’une
expérience de plusieurs années sur
la mise à disposition informatisée
du dossier d’établissement auprès
de ses médecins correspondants.
Jérémy Lavalaye
Le dossier médical personnel (DMP)
est accessible à l’hôpital.
Le personnel médical et soignant
peut le consulter et le mettre
à jour avec l’accord du patient.
h Quelques contacts utiles:
• La liste des douze centres de beauté Cew France
implantés dans des hôpitaux: cew.asso.fr
• Les Espaces rencontres et information (Eri)
de la Ligue contre le cancer organisent des ateliers
«beauté»: renseignements auprès des Comités
départementaux de la Ligue.
• L’Embellie, un magasin entièrement consacré
aux femmes atteintes de cancer et à leur entourage,
premier lieu du genre en France:
29 bd Henri-IV, Paris 4e. Tél.: 01 42 74 36 33.
www.embellieboutique.com
Une association qui assure
onstruire un projet, acheter un
logement, obtenir un prêt, autant
de démarches dont sont trop souvent
déboutées les personnes atteintes
de cancer ou de pathologies
à risques aggravés. Depuis seize ans,
cette exclusion sociale est combattue
par l’association Vivre avec. Créée par
des malades, elle propose désormais
un service d’information et de conseil
par téléphone qui facilite l’accès aux
L’informatisation du dossier médical
personnel (DMP), prévue d’ici 2007, vise
à favoriser la coordination et la continuité
des soins et à améliorer, sous le contrôle
du patient concerné, la communication
des informations médicales entre les
professionnels de santé qui le soignent.
Le DMP, unique pour chaque personne,
centralisera à terme l’ensemble des
données médicales (comptes rendus de
consultation ou d’opération, imagerie
médicale…) et lui permettra, lorsqu’elle
le souhaite, de consulter ses antécédents
J. L.
,ACCÈS À L’EMPRUNT
C
DOSSIER MÉDICAL
été traitées. Par ailleurs, signe que les
choses évoluent face aux revendications
des patients, des spécialistes de
la protection des personnes comme
SwissLife proposent des produits conçus
exclusivement pour les personnes
ayant eu un cancer1.
J. L.
1. Lire aussi Le Journal de l’Institut Curie, mars 2006.
L’archivage informatisé des informations
médicales du patient est disponible sur Internet.
Contrôle et sécurisation du DMP. Une procédure
garantit la confidentialité des informations
médicales de chacun, conformément aux droits
des patients dans le domaine des données
personnelles de santé.
Le DMP est utilisable
par d’autres médecins.
Lors d’une consultation
chez un autre médecin (un
spécialiste, par exemple)
ou en cas d’urgence
lors d’un déplacement,
ce dernier peut avoir
accès aux informations
médicales et les mettre à
jour, toujours sous réserve
de l’autorisation du patient.
Le DMP est la propriété du patient. D’ici à fin
2007, chacun devrait pouvoir consulter
son dossier informatisé1 depuis tout ordinateur
relié à Internet (domicile, cybercafé, hôpital,
etc.). À tout moment, le malade a la liberté
(et est le seul à l’avoir) de donner accès
à son dossier, de refuser ou de résilier
ce droit. Il peut le déléguer au médecin
qui le suit régulièrement. Seuls des
professionnels de santé (médecins, soignants)
peuvent être autorisés par le patient
à accéder à son DMP.
Un médecin désigné par
le patient peut intervenir dans le
DMP. Lors de chaque consultation,
le DMP est complété par le
médecin traitant. Cela lui donne
une vue d’ensemble actualisée du
parcours médical de son patient.
1. D’ores et déjà, le patient peut avoir accès au dossier détenu par tout acteur de santé (établissement hospitalier, cabinet médical, etc.)
après en avoir fait la demande écrite. Le délai de mise à disposition est limité par la loi à un mois maximum.
Illustrations : E. Lamoglia/Institut Curie
reJIC66_4-7_BAT
Philippe Rizand, directeur des Systèmes d’information et de l’Informatique à l’Institut Curie.
h 0821 21 80 08 (0,12 euro TTC/min).
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
,07
reJIC66_8-15_SR4VD.qxd
6/06/06
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Page 8
DOSSIER
DÉCOUVRIR ET SOIGNER,
LE TRANSFERT
h
Noak/Le bar Floréal/Institut Curie
Les chercheurs côtoyant régulièrement des médecins sont naturellement
amenés à « élargir leur horizon » vers les attentes des patients.
«
La recherche translationnelle est une passerelle entre
les découvertes ou les inventions et les applications
médicales. Elle repose sur la concertation entre médecins,
chercheurs, ingénieurs, techniciens… Quand tous
ces acteurs ont la chance de travailler dans un même
environnement, comme c’est le cas à l’Institut Curie, les
progrès s’en trouvent accélérés, au bénéfice des patients.
08,
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
L
e transfert, c’est le laboratoire qui se
transporte dans le monde réel des
malades », résume le Pr Thierry Philip,
cancérologue et chercheur à Lyon1.
Cependant, cette conversion n’est pas
immédiate : ainsi, treize ans séparent la découverte
de la pénicilline (1928) de sa première application
(1941). Et ce n’est qu’après plusieurs étapes de
perfectionnement que la première greffe de moelle
osseuse – en 1957, à l’Institut Curie – a donné
naissance à une véritable discipline désormais
appelée immunothérapie.
Mettre la science
au service de l’homme
De fait, la continuité de la recherche et du soin a
toujours été à la base du fonctionnement de l’Institut
Curie. Né sous ces doubles auspices (lire l’encadré
ci-contre), il a évolué en restant fidèle à sa mission,
inscrite à l’article 1 de ses statuts : « Mettre
la science au service de l’homme pour l’aider à
lutter contre les maladies, et tout particulièrement
le cancer. » Mieux encore, la pluridisciplinarité
joue « dans l’intérêt de la science et des malades ».
Le Pr François Doz, pédiatre, le confirme : « Un
anesthésiste-réanimateur orientera le chimiste et le
physicien vers la mise au point de cathéters bactéricides [NDLR : pour limiter le risque de complications infectieuses lors d’une opération] ». Autre
exemple, suggéré par Emmanuelle Deponge, chargée
d’affaires à la Direction de la valorisation et des
relations industrielles : « Il nous arrive d’élargir la
portée d’un brevet sur les travaux d’un chercheur
grâce à la participation d’un médecin dont l’horizon
est orienté vers les patients. » « Le transfert ■ ■ ■
1. Directeur du Centre régional de lutte contre le cancer
Léon-Bérard (Lyon). Auteur de Vaincre son cancer, Éd. Milan.
2. Directeur de laboratoire à l’université Paris-VI
et chef du Département d’immunologie à l’Hôpital
européen Georges-Pompidou (Paris).
Le 5e arrondissement de Paris,
relais d’expériences
Noak/Le bar Floréal/Institut Curie
« Le transfert, c’est typiquement la mise au point
d’un test de routine à partir d’une découverte »,
explique le Pr Hervé Fridman2, artisan en 1993 du
premier laboratoire français de transfert en cancérologie, le laboratoire Garet, à l’Institut Curie. «Par
exemple, grâce à des techniques sophistiquées,
nous venons d’identifier une substance dans certaines tumeurs du côlon et du rectum retirées à des
patients. Sa présence dans la tumeur est synonyme
de bon pronostic pour le malade. Il nous faut désormais mettre au point un test d’analyse simple pour
la rechercher chez les patients. Il faudra ensuite
déterminer à partir de quelle quantité la présence
de cette molécule est significative, s’assurer que le
test est accessible et applicable par les médecins…
L’avantage de l’Institut Curie dans cette étape est
qu’il dispose sur place des bio-informaticiens et
autres ingénieurs capables d’exploiter la masse de
données générée.» En effet, en France, peu de structures peuvent faire le lien direct entre leurs chercheurs dans leurs laboratoires et leurs médecins au
chevet des malades à l’hôpital.
h
LA LOGIQUE DU TRANSFERT
Sur les hauteurs de la montagne Sainte-Geneviève, le quartier «savant» de
Paris, chercheurs et médecins échangent pour le plus grand bénéfice des patients.
Quand l’Université de Paris et
l’Institut Pasteur décident, en 1909,
d’implanter l’Institut du radium1
au cœur de Paris, ils prévoient
deux laboratoires, l’un pour la
recherche, l’autre pour l’application
médicale. Le premier sera dirigé
par Marie Curie, prix Nobel
de physique 1903, le second par
le radiobiologiste Claudius Regaud.
Entre les deux, un jardin propice
aux échanges féconds. Cet
état d’esprit perdure, et c’est
quotidiennement que chercheurs
et soignants continuent à
se rencontrer à l’Institut Curie.
Tout comme au sein de l’association
de la Montagne-Sainte-Geneviève,
fondée en 1993 avec les fleurons
de ce quartier parisien, pépinière
de prix Nobel : après les Curie et
Joliot-Curie, Pierre-Gilles
de Gennes, Georges Charpak
et Claude Cohen-Tannoudji.
Physicochimiste à l’École
supérieure de physique et chimie
industrielle, Jean-Louis Viovy
rejoint l’Institut Curie en 1995.
« Je désirais mettre ma “boîte
à outils” au service de la biologie
médicale », avoue-t-il avec
modestie. Il y trouve matière,
et un écho enthousiaste de la part
du Dr Dominique Stoppa-Lyonnet,
du Service de génétique oncologique
à l’Institut Curie, confrontée
au diagnostic des prédispositions
héréditaires au cancer du sein.
Sans attendre, il met au point un
outil moins cher, plus accessible et
surtout cinq fois plus rapide que
les pratiques usuelles. Une société,
Fluigent, accélérera le transfert
de la méthode. Si la validation en
cours se confirme, la méthode
pourra ainsi être utilisée en routine
à l’hôpital dès 2007, réduisant
le délai d’attente de réponse
de deux mois à… une semaine !
Elle facilitera aussi la recherche
de prédisposition à un
cancer pédiatrique de l’œil,
le rétinoblastome.
M.-L. M.
1. L’Institut Curie naîtra plus tard
de la fusion de l’Institut du radium
et de la Fondation Curie créée en 1920.
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
, 09
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DOSSIER
DOSSIER
LE TRANSFERT
LE TRANSFERT
h
A. Lescure/Institut Curie
Nombreux sont les médecins qui, comme le Dr Olivier Delattre, rejoignent tous ceux qui œuvrent pour faire
aboutir des programmes de recherche biomédicale, sans jamais oublier leur serment d’Hypocrate.
Anatomopathologie
Discipline médicale
qui étudie les
modifications de
structure et de forme
des tissus et des
organes provoquées
par une maladie.
Génomique
Étude des gènes.
Protéomique
Étude de l’expression
des gènes, à l’origine
des protéines, et de
leurs interactions,
permettant de
mieux comprendre
le fonctionnement
de la cellule.
10,
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
■ ■ ■ réunit deux mondes différents : celui des
chercheurs, projetés dans l’avenir, et celui des
médecins, happés par l’urgence du présent. Les
uns travaillent sur les cellules ou sur des modèles
de laboratoire, les autres sont sollicités par des
patients… Et le dessinateur Plantu a habilement
croqué cette discipline en glissant une souris de laboratoire dans un lit d’hôpital », relève Jean Paul
Thiery, responsable du Département de transfert,
développement technologique et préclinique créé
fin 2003. Son objectif ? Donner un nouvel élan à
cette étape de transition. Ses moyens ? Le partage
fructueux des idées et des plates-formes technologiques de l’Institut Curie au service de projets
portés conjointement par des médecins et des
chercheurs.
Augmenter la place du transfert s’impose à tous.
Pour quatre raisons :
> La médecine se «scientifise». Les moyens
diagnostiques de la lutte contre le cancer – imagerie, biologie, anatomopathologie – et thérapeutiques – chirurgie, traitements médicaux et radiothérapie – sont « révolutionnés » par les disciplines
en -ique: génomique, protéomique, physique, bioinformatique, robotique.
GRÂCE
À VOUS
L’Institut Curie
investit près de
9millions d’euros en 2006
Sur les 60 millions d’euros consacrés
en 2006 à la recherche, la recherche
translationnelle bénéficie de 9 millions.
Depuis 2003 à l’Institut Curie, elle dispose
d’un département structuré et doté
d’un budget que lui envient les spécialistes
français et européens.
Ce dernier a d’ailleurs augmenté
de 85 % en trois ans grâce à la générosité
des donateurs. Les frais de « démarrage » liés
aux gros équipements et aux aménagements
des plates-formes technologiques
en représentent encore près d’un quart.
Ceci va sans compter le million d’euros issu
des dons et legs qui, chaque année depuis 2003,
permet aux médecins et infirmières de se
réserver du temps pour développer des projets
de recherche clinique, sans nuire à la prise
en charge de leurs patients au quotidien.
Bien analyser les cellules
De nouvelles questions taraudent les scientifiques.
Que dérègle ce gène dans la cellule? Peut-on trouver
une parade ? C’est typiquement le genre de sujets
explorés par la plate-forme Biophenics. Parfois,
on arrive à neutraliser les cellules cancéreuses
grâce à des protéines issues du ou des gène(s)
« malade(s) ». Le cas d’école est la protéine ErbB2,
un récepteur membranaire en surnombre dans
25 % des cancers du sein. La contre-attaque existe :
un médicament appelé trastuzumab (connu sous le
nom commercial d’herceptine). Un missile ciblé,
efficace chez de nombreuses patientes, mais…
inefficace chez d’autres. L’avenir du médicament
s’est joué, on le voit, grâce à la bonne analyse des
cellules des patientes afin de les associer ou non aux
essais cliniques ! Le rôle de la recherche translationnelle est d’optimiser cette classification. De
même que l’identification des microbes a boule-
3. Cofondateur en 1998 de l’Unité « Pathologie moléculaire
des cancers », dirigée par le Dr Olivier Delattre.
4. Lire le dossier thématique « La traque des
micrométastases » (vente par correspondance).
À l’Institut Curie, la biologie est
tellement intégrée à la pratique
médicale dans la prise en charge
du neuroblastome (un cancer
de l’enfant) que la pédiatre
Gudrun Schleiermacher a
tout naturellement tenu à faire
sa thèse dans le laboratoire
du Dr Olivier Delattre.
« Savoir comment traiter les tumeurs
pédiatriques implique de connaître
les derniers résultats de la
recherche, explique-t-elle.
Le neuroblastome touche surtout
des enfants de moins de cinq ans.
Il se loge dans l’abdomen, le cou,
le thorax. Il peut être agressif
ou régresser spontanément. Il peut
aussi resurgir loin de la tumeur
initiale quelques années après
alors que l’enfant semble guéri.
On voudrait tant comprendre les liens
entre les paramètres biologiques
et les caractères cliniques. »
L’un d’entre eux a déjà été
découvert. C’est la répétition
anormale – plus de cent copies
au lieu de deux –, d’un gène
appelé n-myc. D’autres signatures
génétiques, encore à l’étude,
pourraient compléter l’information.
« L’objectif du transfert est
de pouvoir explorer le génome
des cellules tumorales avec la
G. Schleiermacher & coll./U509 Inserm-Institut Curie
Une « désescalade
thérapeutique » grâce
aux traitements sur mesure
h
Micrométastases
Cellules isolées qui
peuvent constituer
les signes précurseurs
de métastases,
c’est-à-dire de
foyers cancéreux
secondaires. Les
scientifiques sont
désormais capables
d’en détecter une
parmi un million
de cellules dans
le sang et la moelle
osseuse ! Cela
devrait permettre de
surveiller le risque de
récidive ou l’efficacité
d’un traitement.
Depuis que l’on sait que les cancers prennent
naissance dans nos gènes – même s’ils ne sont que
rarement héréditaires – et depuis que le génome
humain a été séquencé, la carte d’identité génétique des cancers est le Graal de l’oncologue. En
identifiant tous les gènes en cause et leurs anomalies, elle révolutionne la logique actuelle de classification des tumeurs, parfois aussi leur évaluation
pronostique et le choix thérapeutique.
Prenons l’exemple du sarcome d’Ewing, un cancer rare survenant chez l’enfant et le jeune adulte,
d’origine le plus souvent osseuse. Sa « signature »
génétique a été identifiée en deux étapes à l’Institut Curie par des médecins convertis à la recherche.
En 1983, le cytogénéticien Alain Aurias3 découvre
la cause de ce cancer, un remaniement spécifique
entre deux chromosomes qui fusionnent. Moins de
dix ans plus tard, le pédiatre Olivier Delattre identifie le gène né de cette fusion. Des ingénieurs
mettent alors au point une méthode de détection de
ce gène. Elle est désormais utilisée pour poser tout
diagnostic du sarcome d’Ewing. Belle réussite de
transfert parmi d’autres. Aujourd’hui, l’Institut
Curie est également le centre de référence pour la
détection dans le sang et la moelle osseuse des
micrométastases de cette tumeur4.
Reconnaître les anomalies
génétiques de chaque tumeur permet
d’offrir aux patients des traitements
mieux adaptés.
plus grande résolution possible »,
résume le Dr Olivier Delattre. « Et en
une seule étape, ajoute Gudrun
Schleiermacher. Quand un test fiable
permettra de préciser si l’évolution
sera grave ou non, on écartera
d’emblée le traitement lourd et ses
risques de séquelles pour 85 % des
enfants atteints de neuroblastome ! »,
espère cette jeune pédiatre. Son
vœu est raisonnable, car une telle
désescalade est déjà amorcée face
à certaines tumeurs du cerveau
(les gliomes)1 par exemple.
M.-L. M.
1. Lire Le Journal de l’Institut Curie,
mars 2006.
versé la classification des maladies infectieuses, la
génomique est un des outils qui permettent de faire
la différence entre certaines tumeurs longtemps
confondues avec d’autres. «Nous nous situons entre
la découverte de Louis Pasteur et l’usage
Mieux classer les tumeurs des antibiotiques», explique le Pr Thomas
pour personnaliser Tursz, directeur de l’Institut GustaveRoussy (Villejuif).
les traitements Dans l’Unité du Dr Olivier Delattre à
l’Institut Curie, on a récemment montré que les pertes concomitantes de
parties de chromosomes sont un facteur de très bon
pronostic dans les cancers du cerveau (gliomes).
Le test est désormais « transféré » puisque ■ ■ ■
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
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DOSSIER
DÉCRYPTAGE
LE
LES
TRANSFERT
12-25 ANS
BREVET
Le brevet, ange gardien de l’invention
Le brevet d’invention est le moyen le plus sûr de protéger une invention contre le vol.
C’est une arme économique qui protège l’inventeur et son employeur, leur assure des revenus
et prouve leur dynamisme dans le domaine de l’innovation. Ce contrat conclu avec l’État leur garantit
un monopole d’exploitation temporaire, en échange de la publication de l’invention.
Gros plan sur les différentes étapes qui permettent de breveter une innovation médicale.
e dépôt d’un brevet permet de protéger l’exploitation
des inventions issues de la recherche fondamentale,
de transfert ou clinique, tout en préservant le droit
des inventeurs et des institutions impliquées. En échange,
le brevet contribue à organiser la diffusion, l’utilisation,
le développement et l’exploitation commerciale des inventions.
Pour qu’une invention soit déclarée brevetable
par les autorités compétentes, il faut qu’elle réponde
principalement à trois critères :
• La nouveauté. Originale et novatrice, l’invention
ne doit pas avoir été dévoilée par quiconque.
• L’inventivité. Un spécialiste ne doit pas pouvoir déduire
ou « réinventer » l’invention de façon évidente à partir de
ses connaissances et de ce qui est déjà en vue. Une invention
n’est pas la découverte d’un élément biologique qui,
à la différence d’une invention, existe, qu’il ait été découvert
ou qu’il soit encore méconnu.
• L’application industrielle. L’invention doit avoir au moins
une application concrète.
1
2. Expertise. Des experts déterminent
si l’invention répond aux critères
de brevetabilité et vérifient qu’elle
n’est pas déjà connue du public.
Ils réfléchissent aussi aux besoins
auxquels répondrait l’invention
et aux pays concernés.
h
L
A. Lescure/Institut Curie
1. Invention. Un scientifique
ou une équipe mettent au point
un nouveau procédé technique résultant
d’une invention.
Afin de limiter
au maximum les effets
secondaires, les patients
les moins graves peuvent
aujourd’hui bénéficier
de traitements moins
lourds. La désescalade
thérapeutique est l’un des
objectifs des cancérologues
comme le Dr Gudrun
Schleiermacher.
2
Brevetables?
Non brevetables?
EN EUROPE, SONT BREVETABLES :
g Les produits chimiques, biologiques, etc. ;
g Les procédés de purification, de préparation, de sélection, etc. ;
g Les applications : produits ou procédés connus mais « dédiés »
à une nouvelle application, thérapeutique par exemple.
4
NE SONT PAS BREVETABLES :
g Les découvertes ;
g Les créations esthétiques ;
g Les inventions contraires à l’ordre public et aux bonnes mœurs ;
g Les logiciels ;
g Les variétés végétales, les races animales et les procédés
essentiellement biologiques pour obtenir des végétaux ou des animaux ;
g Le corps humain, ses éléments, ses produits, son clonage et l’utilisation
d’embryons humains à des fins industrielles ou commerciales.
5
> Des plates-formes de haute techno-
4. Publication du brevet. Elle survient
dix-huit mois après le dépôt de la
demande de brevet. C’est une publication
accessible à tous, comme un journal
scientifique.
5. Diffusion de l’invention. Même
brevetée, une invention reste utilisable
librement à des fins de recherche.
En revanche, son exploitation
commerciale est sujette à des
accords (cession de licences, etc.).
Pendant vingt ans maximum, l’invention
est ainsi protégée de toute concurrence
industrielle. Le brevet tombe ensuite
dans le domaine public. L’invention peut
alors être librement exploitée à
des fins commerciales (par exemple,
les médicaments génériques).
GRÂCE
À VOUS
Illustrations : E. Lamoglia/Institut Curie
3
Jérémy Lavalaye
3. Demande de brevet. Elle décrit
l’invention, définit le périmètre du
monopole souhaité (activité diagnostique
et/ou pronostique et/ou thérapeutique)
et les pays concernés. Pendant une
année, les inventeurs peuvent conforter
leur procédé avec de nouveaux résultats.
Il est aussi possible d’étendre la zone
géographique de demande de brevet.
La recherche d’entreprises intéressées
par l’invention peut être lancée.
FLORENCE LAZARD, DIRECTEUR DE LA VALORISATION, INSTITUT CURIE.
LE JOURNAL DE
12 , L’INSTITUT CURIE
utilisé depuis cette année en neuro-oncologie à l’hôpital parisien de la Pitié-Salpêtrière. Autre
exemple d’actualité : à la lumière de la découverte
d’une nouvelle signature génétique, des spécialistes des sarcomes (cancers de la « charpente » du
corps : os, muscles…) des centres de lutte contre
le cancer français réévaluent les différentes tumeurs
des tissus mous. Outil de diagnostic et de pronostic, ce gène est également la cible de deux
nouveaux candidats-médicaments actuellement en
cours d’essais cliniques.
■■■
logie sont indispensables. Elles sont de plus
en plus nombreuses. Ainsi, au Centre Léon-Bérard
à Lyon, un institut de chirurgie expérimentale a
ouvert ses portes il y a tout juste un an pour
mettre au point, grâce à l’imagerie médicale, des
techniques chirurgicales plus efficaces et moins
invasives, comme la destruction de tumeurs du
foie en empruntant les vaisseaux sanguins ou
par ultrasons.
À l’Institut Curie, la plate-forme Biophenics, le
fleuron du Département transfert installé en mai
2005, a coûté près d’un million d’euros. « C’est le
prix à payer pour analyser d’énormes ■ ■ ■
L’efficacité des perles de cristal
La jeune association
Les Bagouz’ à Manon
met toute son énergie pour
faire avancer la recherche
sur le neuroblastome.
En fabricant et vendant des
bijoux en perles de cristal,
elle a rassemblé 17 000 euros
en 2005, au profit du laboratoire
Pathologie moléculaire des
cancers dirigé par le Dr Olivier
Delattre et spécialisé notamment
dans ce cancer de l’enfant.
Ces fonds ont permis de financer
un poste d’attaché de recherche
clinique, indispensable pour
que les essais cliniques, étape
succédant au transfert, soient
menés dans de bonnes conditions.
D’ores et déjà, un nouveau
versement est prévu d’ici la fin
2006 afin de poursuivre cet élan.
Rappelons qu’Anne Herbert a créé
cette association en janvier 2005,
après le décès de sa fille Manon,
survenu deux ans plus tôt,
des suites d’un cancer. C’est en
se souvenant de la passion
de sa fille pour les perles
qu’Anne Herbert a eu cette idée.
« Elle voulait monter un stand
de bagues devant la bijouterie
de ses grands-parents », raconte
Anne. Depuis, avec sept mères
d’enfants dont certains ont
connu la maladie, elle fabrique
ces bijoux, les vend dans des
entreprises ou lors d’événements
organisés en particulier
par l’Institut. Devant le succès
rencontré, l’association envisage
même d’organiser des ventes
à domicile.
Jérémy Lavalaye
h
Les Bagouz’ à Manon
06 08 01 00 90
Vente en ligne:
www.lesbagouzamanon.
medicalistes.org
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
, 13
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DOSSIER
DOSSIER
LE TRANSFERT
LE TRANSFERT
quantités de données », prévient Jacques
Camonis, médecin-chercheur, pilote et cofondateur
avec Franck Perez de cette plate-forme. En tant
qu’outil de recherche fondamentale, elle permettra
de découvrir le rôle d’un gène dont l’altération mène
au cancer, ou celui d’une molécule sur les fonctions
cellulaires liées au cancer: multiplication, mobilité,
perte de spécialisation, etc. Les premières molécules
étudiées seront bien sûr celles disponibles dans
la chimiothèque de l’Institut Curie, qui compte
8000 substances chimiques candidats-médicaments.
Biophenics permettra, par ailleurs, de valider une
piste thérapeutique ou de sonder les effets secondaires d’un candidat-médicament. Deux robots à
haut débit se partagent cette activité dite postgénomique.
■■■
> L’importance de la générosité publique
et de l’investissement privé. Le transfert se
situe entre la recherche fondamentale, financée
majoritairement par l’État, et la recherche clinique,
dépendante du secteur privé industriel. En 2006,
l’Institut Curie lui dédie plusieurs millions d’euros grâce à ses donateurs (lire p. 10), et établit des
partenariats avec des industriels (Affymetrix, Servier, etc.). Il assure également un soutien stratégique
En Europe, plusieurs institutions ont fait de
la recherche translationnelle une priorité de la
recherche contre le cancer. Ainsi à Stockholm,
en Suède, à Heidelberg, en Allemagne
ou à Londres, en Angleterre, des centres de
recherche de haut niveau, en partenariat étroit
avec des services hospitaliers, connaissent
de beaux résultats de diffusion des découvertes.
Une voie qui a donc fait ses preuves et dont
l’Institut Curie fut un précurseur.
aux start-up, quatre jeunes entreprises nées de la
synergie entre chercheurs et médecins de l’Institut Curie. La création de start-up permet de lever
des fonds chez des investisseurs pour assurer le développement nécessaire et accélérer la mise au point
d’outils d’analyse, de diagnostic ou de pronostic,
de médicaments… Sans ces leviers, les objectifs
ne resteraient que des rêves. Il en est ainsi de Fluigent (lire encadré p. 9) et DNATherapeutics, deux
start-up dont la dernière est née d’un programme
financé par les donateurs de l’Institut, qui rappro-
50000 échantillons au profit de la recherche
LE JOURNAL DE
14 , L’INSTITUT CURIE
cible et d’imaginer un médicament potentiel…
Actuellement indépendantes et réparties
dans différents hôpitaux, leur accréditation
et leur centralisation « virtuelle » – réseaux,
catalogues communs – sont en cours au niveau
local et national. Celle de l’Institut Curie,
sans doute la plus importante en France dans
le domaine de la cancérologie, contient plus
de 50 000 échantillons liés aux pathologies
cancéreuses. Elle s’enrichit chaque année
de près de 3 000 échantillons : tissus tumoraux
et tissus sains (pour les comparaisons),
plasmas, sérums, moelles osseuses, cellules,
matériels génétiques, etc.
M.-L. M.
h
Même après leur traitement, des patients
participent encore à la recherche. Conservés dans
les centres de ressources, des fragments de leur
tumeur opérée permettent, avec leur accord,
d’imaginer des tests de diagnostic ou de pronostic
innovants ou de nouvelles stratégies de traitement.
C. Charré/Institut Curie
À l’occasion d’un geste chirurgical,
les tumeurs sont analysées par l’œil expert
des anatomo-pathologistes afin de poser
un diagnostic biomédical immédiat. Dans
la mesure du possible, un fragment de tissu
est conservé au froid pour d’éventuelles
analyses complémentaires qui pourraient se
révéler nécessaires au cours de l’évolution de
la maladie. Avec le consentement du patient,
une partie de ces échantillons peut également
servir à des travaux de recherche.
Annotés d’informations cliniques, les produits
biologiques dérivés des échantillons
sont précieux. La traçabilité de ces spécimens,
depuis leur collecte jusqu’à leur préparation,
leur qualité ainsi que celle des données
médicales qui leur sont associées font
la richesse d’une biobanque. Les différentes
collections (ou -thèques) sont un élément
clé du transfert. Elles permettent de mieux
comprendre les mécanismes du cancer, ses
origines génétiques, de découvrir une nouvelle
cha en 2001 la biologiste Marie Dutreix, spécialiste
génétique de la rétine. « C’est difficile de faire le
de la réparation de l’ADN, et le Pr Jean-Marc Cosgrand écart entre la cellule et les soins thérapeuset, chef du Département de radiothérapie. Les radiotiques ou palliatifs », avoue le Dr Sophie Pipernothérapeutes ont soulevé un problème: la «radioréNeumann, spécialiste du mélanome choroïdien, la
sistance », qui désigne l’insensibilité
tumeur oculaire la plus fréquente et qui
Favoriser
de certaines tumeurs à la radiothérapie.
s’étend une fois sur deux au foie.
Marie Dutreix a apporté sa solution: des le partage des idées « Alors qu’ensemble, on se pose les
«appâts» qui neutralisent les enzymes
bonnes questions », rassure-t-elle. On
et des outils
de réparation du génome, celles-là
la croit volontiers. Avec le Dr Jérôme
même qui font échouer la radiothérapie (lire aussi
Couturier, cytogénéticien, et grâce aux fragments
p. 4). Testée chez l’animal, l’injection d’appâts moléde tumeur conservés à l’Institut Curie (lire encaculaires juste avant la radiothérapie équivaut à muldré ci-contre), le trinôme vient de mettre au jour
tiplier par dix la dose d’irradiation sans dommage
une nouvelle piste. Affaire à suivre…
pour les cellules saines alentours. Une formidable
Qu’elle soit fondamentale ou clinique, la recherche
piste que la société espère transformer rapidement
puise sa force dans la pluridisciplinarité. Quand une
en essai clinique.
institution comme l’Institut Curie lui installe des
passerelles, cela ne peut aller que mieux.
> Un espace de concertation est nécessaire pour renforcer et accélérer le transfert. « Le
Marie-Laure Moinet
chercheur veut comprendre, le médecin veut
soigner », rappelle Simon Saule5, spécialiste de la
5. Chef de l’équipe « Régulations cellulaires et oncogénèse »
CNRS-Institut Curie.
H
Quand le transfert
s’empare d’une
découverte, c’est
que ses experts
ont pressenti une
application médicale.
Ils donnent ce coup
de pouce afin d’arriver
plus vite à imaginer
des essais cliniques
organisés avec la
participation des
patients et grâce,
parfois, à l’intervention
de partenaires
industriels.
Face au cancer :
le transfert en Europe
A. Lescure/Institut Curie
h
LA RECHERCHE
CLINIQUE, OBJECTIF
DU TRANSFERT
En France, peu de
structures peuvent tisser
des liens directs entre
chercheurs et médecins
comme le fait l’Institut
Curie. Et pourtant, cela
représente sans doute
l’un des meilleurs modèles
à suivre afin que les
découvertes soient le plus
rapidement possible
transposées en médecine.
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
, 15
reJIC66_16-19_SR3VD
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ENTRE NOUS
ENTRE NOUS
INITIATIVES
INITIATIVES
,ÉVÉNEMENT
VOTRE FONDATION
L’Institut Curie dispose de l’expertise, des structures et des ambitions nécessaires pour « prendre
le cancer de vitesse ». La continuité de la recherche et des soins dans un même lieu, unique en son
genre, stimule l’innovation, favorise les échanges et le travail commun des chercheurs, médecins
et soignants pour accélérer la mise à disposition des nouveaux traitements aux patients. Notre volonté
de progresser est encouragée par le soutien et la générosité de nos donateurs, testateurs et partenaires.
LES JONQUILLES ONT FLEURI
POUR FAIRE RECULER LE CANCER
,RUGBY
L. Martines/Institut Curie
LE XV DE FRANCE AUX CÔTÉS DE L’INSTITUT
CURIE CONTRE LES CANCERS DE L’ENFANT
LE JOURNAL DE
16 , L’INSTITUT CURIE
M. Hantz
h
tourné avec l’équipe de France de rugby
à Marcoussis, et l’acteur Christophe
Malavoy lui a bénévolement prêté sa voix.
Le message a été diffusé gracieusement
plus de 150 fois à la télévision, puis dans
les salles de cinéma des réseaux UGC
et MK2-Gaumont. Le spot radio, également enregistré par Christophe Malavoy,
est passé plusieurs centaines de fois
sur les ondes. Les magasins Sport 2000
ont aussi participé à l’opération en distribuant des coupons d’appel au don.
L’intégralité des fonds collectés participera au financement de la recherche en
pédiatrie à l’Institut Curie.
h
C. Charré/Institut Curie
P. Lombardi/Institut Curie
Grâce à la générosité des donateurs, ce sont
près de 80 000 euros qui vont contribuer à soutenir
la lutte contre le cancer.
P. Derewiany
Parce qu’il faut rester positif face à la maladie,
l’opération « Des jardins pour la Vie, une Jonquille
pour Curie » était ponctuée d’animations festives.
h
80 009 spectateurs ! Le Stade de France
a battu son record d’affluence lors de la
rencontre France-Angleterre du Tournoi
des VI Nations. Un match de choix, joué
au profit de l’Institut Curie. Sous la clameur du public, le jeune Clément, 12 ans,
soigné à l’Institut Curie, accompagné du
capitaine de l’équipe de France de handball, Jackson Richardson, a apporté le
ballon ovale pour le coup d’envoi.
Tout a commencé lorsque la Fédération
française de rugby a choisi de s’associer
à l’Institut Curie. Le mythique Stade de
France a ensuite rallié la cause, ainsi que
d’autres partenaires comme la Société
générale, Truffaut et le groupe France
télévisions.
Les joueurs du XV de
France ont marqué leur
engagement en arborant sur leur maillot une
jonquille, symbole de la
lutte contre le cancer. À
plusieurs occasions, le
présentateur du Stade
de France, Marc Maury,
a invité les spectateurs à
télécharger une jonquille
sur leur mobile ou à faire
un don au profit de l’Institut Curie.
Celui-ci souhaitait faire
connaître au plus grand
nombre son objectif,
« Gagner le match contre
les cancers de l’enfant ».
Un spot TV a donc été
Clément, 12 ans, soigné à l’Institut
Curie, était soutenu par le handballeur
Jackson Richardson pour donner
le coup d’envoi de ce match de rugby,
joué en faveur de l’Institut Curie.
Découvrez les spots « Ensemble,
h
gagnons le match contre les cancers de
l’enfant », les coulisses du tournage
et tous les partenaires sur le site Internet :
rugby.curie.fr
e mois de mars est celui du printemps, mais aussi celui de l’Institut
Curie. Du 22 au 26 mars dernier, le
Panthéon s’est paré de jaune et de vert, invitant chacun à cueillir, en échange d’un don,
une jonquille, symbole de l’espoir dans la
lutte contre le cancer.
Cette troisième édition « Des Jardins pour
la Vie, une Jonquille pour Curie » a ravi ses
fidèles. Pour la première fois, la fête se
déroulait sur cinq jours. La journée inaugurale, un mercredi, était naturellement
dédiée aux enfants.
Les visiteurs ont voyagé à travers le temps
dans les quatre « Jardins pour la Vie » : des
chaises longues comme en plein été, des
vignes bordelaises, synonyme de vendange
automnale, des sapins enneigés pour l’hiver,
et bien sûr les quelque 60 000 jonquilles de
printemps. « C’est un moment exquis pour
une cause des plus importantes, cet événe-
L
ment est magique et donne encore plus envie
de se mobiliser », confie Josiane, fidèle
soutien de l’Institut Curie. Et de poursuivre :
« L’année prochaine, pour compléter mon
obole, je serai bénévole. »
Près de 80 000 euros ont été collectés, en
incluant les sommes reversées par les
magasins Truffaut de toute la France qui
vendaient en parallèle des jonquilles au
profit de l’Institut. Les fonds ont été affectés à la plate-forme d’imagerie scientifique
de l’Institut qui doit s’équiper d’un microscope dit confocal, une technologie de
pointe qui permet de s’affranchir des
limites de la microscopie classique pour
obtenir une image plus précise que jamais.
Cette année encore, « Des Jardins pour la
Vie, une Jonquille pour Curie » ont permis
une mobilisation contre le cancer dans l’espoir. Rendez-vous l’année prochaine…
LE JARDIN EN LIGNE
Ceux qui n’ont pu se déplacer peuvent
toujours visiter le jardin virtuel et
le fleurir de jonquilles, au prorata
du don qu’ils souhaitent faire au profit
de la recherche contre le cancer.
h jonquille.curie.fr
GÉNÉROSITÉ
Partenaires
Ces entreprises et institutions
soutiennent l’Institut Curie :
Truffaut, Monum, SwissLife, RATP,
Aéroports de Paris, Zelphis, Lu.
Clémence Musa
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
, 17
reJIC66_16-19_SR3VD
6/06/06
12:25
Page 18
ENTRE NOUS
ENTRE NOUS
INITIATIVES
RÉTROSPECTIVE
, IL Y A 100 ANS
,HISTOIRE D’UN SOUTIEN
APRÈS LE DEUIL,
MARIE CURIE, LA PREMIÈRE
EN BREF
MAINE-ET-LOIRE
LA « COURSE DE TIMO »
CONTRE LES CANCERS
DE L’ENFANT
À vos chaussures de sport !
Le 2 juillet prochain, à Seichessur-le-Loir (Maine-et-Loire),
se déroulera une grande
manifestation sportive afin de
récolter des fonds au profit de
P. Lombardi/Institut Curie
Propos recueillis par Jérémy Lavalaye
h Réagir
BP 7- 25430 Sancey
[email protected]
chanteuse lyrique Cécile Éloir,
et l’Orchestre à cordes de la
Garde républicaine ont apporté
leur soutien à l’Institut Curie,
le 18 mars dernier. Leur
émouvante interprétation
du Concerto pour violon en
mi majeur de J.-S. Bach et
du Stabat Mater de Pergolèse
a généré une recette d’un peu
plus de 4 100 euros reversés
au profit de l’Institut.
h
LA FERTÉ-SOUS-JOUARRE
PARIS
UNE GRANDE VOIX
POUR L’INSTITUT CURIE
En l’église Saint-Étienne-duMont à Paris, l’association Lyre
et Muses, sous l’impulsion de la
LE JOURNAL DE
naires financiers. Nous sommes en contact
avec de grands patrons de l’horlogerie
suisse : ils pourraient financer la bourse
d’études d’un doctorant qui effectuera sa
thèse à mi-temps entre Bâle (Suisse) et
Paris à l’Institut Curie.
Je sais bien que notre contribution reste
minime face aux besoins réels de la
recherche, mais je garde ce sentiment que
“des petits ruisseaux, naissent les grandes
rivières”. »
la recherche sur les tumeurs
cérébrales de l’enfant, menée
à l’Institut Curie. Soutenus par
les élus locaux, des athlètes
de haut niveau et de nombreux
partenaires, Carole et
Jean-Michel Durand lancent
un appel à tous les sportifs
pour participer à cette course
en mémoire de leur fils
Timothé, décédé à l’âge de six
ans, en juillet 2005.
Inscription: assoc.wanadoo.fr/
marathonduloir/
contacts/timo/timo1.htm
18 , L’INSTITUT CURIE
Thierry Sauvanet n’a de cesse de poursuivre
le combat contre le cancer, en soutenant
l’Institut Curie.
LA 4E VENTE AUX ENCHÈRES
RAPPORTE 25 000 EUROS
Dimanche 2 avril, 14 h 30,
à la mairie de la Ferté-sousJouarre, en Seine-et-Marne, le
marteau de maître Bardin
résonnait pour la quatrième
vente aux enchères que
ce commissaire-priseur
organisait au profit
de l’Institut Curie. Comme
le souligne le triple champion
olympique Jean-Claude Killy,
parrain de l’opération, « les
pièces et documents proposés
ont justifié les très beaux
coups de cœur ». En effet,
parmi tous ces lots,
des souvenirs d’événements
sportifs exceptionnels tels que
le maillot de champion du
monde de cyclisme Louison
Bobet, le film officiel en
35 mm du match de football
France-Italie de 1948, ou le
Pedestrian, statuette en régule
de la fin du XIXe siècle. Avec
les 35 000 euros déjà reversés
à l’Institut Curie grâce
aux ventes précédentes, les
60 000 euros sont maintenant
dépassés.
Novembre 1906, dans un modeste amphithéâtre de la Sorbonne
se déroulait un événement historique pour les femmes et la
science : Marie Curie prenait la relève de son mari Pierre Curie.
Une femme enseignait pour la première fois à la Sorbonne.
n traversant la rue Dauphine à Paris,
le 19 avril 1906, Pierre Curie meurt
renversé par un camion à chevaux. Sa
veuve, Marie Curie, physicienne nobelisée,
est choisie pour prendre sa succession à la
Sorbonne. Elle donne son cours inaugural
le lundi 5 novembre 1906. Une étudiante
témoignera plus tard : « Dès avant midi, plusieurs centaines de personnes s’attroupaient
sur la place de la Sorbonne devant les grilles
closes. On les avait ouvertes vers une heure,
le public s’était rué et, en cinq minutes, l’amphithéâtre de physique était archicomble. Les
portes avaient été refermées, et une foule
imposante attendait patiemment devant elles
qu’un miracle se produisît ; mais il n’y eut pas
de miracle : les haut-parleurs n’existaient pas
encore ! Pendant tout le cours, le public se
montra attentif, déférent, et même profondément ému. On y voyait des gens du monde, des
artistes, des reporters, des photographes, des
personnalités françaises et étrangères, beaucoup de jeunes femmes de la colonie polonaise, et aussi quelques étudiants. (…) Mme Curie
avait exprimé le désir que son installation se
fît sans apparat. À l’heure dite, elle entra,
presque furtivement ; une énorme ovation la
salua. Elle nous apparut très pâle, le visage
impassible, toute mince dans sa robe noire. (…)
Marie Curie, d’une voie nette, toute unie, prononce simplement ces mots, qui reprennent
le cours de Pierre Curie à l’endroit où il l’a
laissé: «Lorsqu’on envisage les progrès qui ont
été accomplis en physique depuis une dizaine
d’années, on est surpris du mouvement qui
E
s’est produit dans les idées sur l’électricité et
sur la matière... » Dans le recueillement général, Marie Curie poursuit son cours ; son débit,
un peu précipité au début par une émotion
qu’elle contenait de toute sa volonté, devient
plus lent (…) ; les plus profanes sont émerveillés. » 1 Et ils avaient de quoi ! Pour la première fois, la Sorbonne accueillait une femme
parmi ses Maîtres. Marie Curie a ouvert une
nouvelle voie pour les femmes : celle de l’enseignement supérieur et de la recherche.
ACJC
C
également : le capitaine de l’équipe de
football de Sochaux, Mickaël Isabey, et le
champion de France de cyclocross, Francis
Mourey, sont les deux parrains de notre
association. Toute l’année, nous collectons des fonds sur des marchés, des
foires… Dans notre région, les cérémonies
religieuses qui ponctuent la vie sont autant
d’occasions de soutenir notre association.
Nous organisons aussi des soupers dansants dont les bénéfices sont entièrement
reversés à Réagir.
En deux ans, grâce à ces manifestations
familiales et locales, nous avons déjà versé
plus de 45 000 euros au profit de la lutte
contre les cancers de l’enfant, menée à
l’Institut Curie.
Afin d’aller plus loin, nous sommes à la
recherche aujourd’hui de nouveaux parte-
À LA SORBONNE
h
omment réagir lorsque l’on perd son
fils âgé de six ans ? Sans cesse, nous
nous sommes posé cette question,
consciemment et inconsciemment, après
le départ de notre Quentin, mort d’un cancer des glandes surrénales en septembre
2003. Avec ma femme, nous ne voulions pas
baisser les bras. Nous avons alors décidé
de poursuivre le combat que nous avions
déjà mené à ses côtés, en créant l’association Réagir. Elle s’est fixée pour mission de lutter contre les cancers pédiatriques aux côtés de l’équipe de recherche
du Dr Olivier Delattre à l’Institut Curie.
Aujourd’hui, notre association compte plus
de 500 membres et mobilise nombre de
personnes. Je suis heureux de voir que
même les jeunes se sentent concernés.
Des sportifs célèbres nous accompagnent
« PROFESSEURE »
« Lorsqu’on envisage les progrès qui ont
été accomplis… » C’est par ces mots que
Marie Curie reprit, à la Sorbonne, le cours
que son mari décédé avait laissé en suspens.
Nathalie Huchette,
Musée Curie, Institut Curie
h Lire aussi :
1. « 50e anniversaire du cours de Marie Curie
à la Sorbonne », Revue des Sévriennes, 1957,
Archives du Musée Curie.
Marie Curie, portrait intime d’une femme
d’exception, de Barbara Goldsmith, Éd. Dunod,
juin 2006, coll. « Quai des Sciences ».
EXPO
IRÈNE CURIE, UNE FEMME
AUX MULTIPLES ENGAGEMENTS
Le 17 mars 1956, Irène Curie décède. La France
lui réserve des obsèques nationales. Elle était
l’« héritière » de son père, Pierre Curie, et de
sa mère, Marie Curie. Elle aussi Prix Nobel
et directrice du laboratoire de physique et de chimie
à l’Institut Curie, mais également sous-secrétaire
d’État à la Recherche scientifique, commissaire
à l’énergie atomique et professeur à la faculté des
sciences. À l’occasion du cinquantième anniversaire
de sa disparition, une exposition photographique
lui rend hommage.
ACJC
«
h
Président de l’association franc-comtoise Réagir,
Thierry Sauvanet témoigne de son investissement pour la
recherche sur les cancers de l’enfant menée à l’Institut Curie.
B. Orny/Réagir
POURSUIVRE LE COMBAT
h Exposition en plein air : du 15 juin au 30 juillet 2006,
angle des rues d’Ulm et Pierre-et-Marie-Curie, Paris 5e.
LE JOURNAL DE
19 , L’INSTITUT CURIE