Molière - Zéro de conduite

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Zéro de conduite .net
Lʼactualité éducative du cinéma
Dossier pédagogique
n Français
Molière
Un film de Ariane Mnouchkine
France, 1978
DVD Bel Air Classiques – CNDP
Dossier réalisé par Marion Roche
pour Zérodeconduite.net, Novembre 2013
Ce dossier est strictement réservé aux établissements acquéreurs du DVD Molière auprès de
l’Agence Cinéma Education, 3 rue Louis Loucheur 75017 Paris
http://www.zerodeconduite.net/boutique
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1 Dossier pédagogique Molière
INTRODUCTION
SOMMAIRE
120 comédiens, 600 participants, 1 300 costumes, 220 décors, 2 ans de travail, 4 heures de
film... le Molière d’Ariane Mnouchkine est une œuvre à l’ambition démesurée. Le film fut très
mal reçu par la critique lors de sa présentation au festival de Cannes : on lui reprocha ses
longueurs, la théâtralité de certaines scènes, et surtout le point de vue atypique qu’il proposait
sur le grand homme de la littérature française1. Et pourtant : la splendeur de l’image, le travail
des corps, la créativité de la mise en scène, les moments de grâce offerts, comme l’envol du
théâtre ou les gondoles vénitiennes traversant les Alpes enneigés, font la richesse et la beauté
de cette œuvre, tandis que le regard porté sur Molière, sa troupe et son siècle rend son
propos original et stimulant.
Comme elle l’explique dans l’entretien proposé dans ce DVD, Ariane Mnouchkine a en effet
souhaité retracer la vie de Molière en l’inscrivant fortement dans son contexte social et
historique. De Molière, elle dit avoir retenu l’homme, plutôt que le génie, et elle ne cherche
pas à donner un point de vue scolaire sur l’ensemble de son œuvre : Molière est ici un
personnage, humain, charnel, et non un monument littéraire ; un chef de troupe, compris à
travers ses relations avec ses partenaires, et non un homme de plume solitaire abordé à la
seule lumière de ses écrits. Du siècle, elle offre une image épique, multiplie les tableaux, les
scènes de foule, donnant corps et vie au siècle de Molière, au peuple des rues de Paris et
des campagnes françaises, à la cour du roi et à ses acteurs : l’abondance et la précision des
décors et costumes y contribuent sans pour autant figer le film en une simple reconstitution
historique. Ariane Mnouchkine parvient ici, bien souvent à travers le regard de son héros et
les gestes, les scènes qu’il observe, à rendre compte de moments de vie, d’émotions, et à nous
les rendre proches, malgré leur éloignement dans le temps.
Ariane Mnouchkine dit avoir voulu faire un film populaire, et non un film d’érudition2. On
rejoindra ce point de vue, dans la mesure où elle s’affranchit du discours didactique ou de
l’hagiographie obligée, et qu’elle privilégie un aspect spectaculaire (au service du plaisir du
spectateur), qui repose peu sur les dialogues, mais énormément sur la dimension visuelle, et
sait créer des émotions variées et intenses chez le spectateur.
Il ne s’agit évidemment pas pour autant d’un pur divertissement : ce film est porteur d’une
certaine vision du peuple et du théâtre, d’un message politique sur les liens entre les deux,
et sur la place de l’artiste dans sa société. Né, selon Ariane Mnouchkine, à un moment où la
troupe du Théâtre du Soleil était en perte de repères, ce projet a été une sorte de manifeste
pour refonder les valeurs communes du groupe ; il a permis aussi de donner un écho plus
vaste à sa foi en ce que le théâtre peut être, et en ce qu’il peut apporter au cinéma.
Introduction
p. 2
Dans les programmes
p. 3
Fiche technique du film
p. 4
Séquencier
p. 5
n Activité 1 : Questionnaire de visionnage (collège) p. 11
Éléments de correction
p. 13
n Activité 2 : Questionnaire de visionnage (lycée) p. 15
p. 17
n Activité 3 : Regard sur Molière, regard de Molière
p. 22
p. 24
n Activité 4 : Un homme ancré dans son siècle p. 28
p. 30
n Activité 5 : Un film à la gloire du théâtre p. 32
p. 35
Pour aller plus loin
p. 37
On pourra se référer à ce sujet au reportage d’Antenne 2 du 19 septembre 1978 cité dans la sitographie finale de ce dossier, ainsi qu’à l’entretien avec Ariane Mnouchkine proposé en bonus du
DVD. Le film (et la pièce) de Philippe Caubert, Les Marches du palais, raconte cet épisode cannois malheureux et ses suites pour Ariane Mnouchkine et son acteur principal.
1
2
Voir l’interview de l’émission Ciné-regards du 31 mai 1978 mentionnée dans la sitographie finale de ce dossier.
DANS LES PROGRAMMES
Enseignement
Niveau
Dans les programmes
n Français
6ème
Initiation au théâtre
5ème
Théâtre : la comédie
Lecture de l’image : représentation de l’époque classique
Histoire des arts : axe « Art, Etats et pouvoirs »
4ème
Théâtre : faire rire, émouvoir, faire pleurer
Seconde
La tragédie et la comédie au XVIIème siècle : le classicisme
Première
Le texte théâtral et sa représentation, du XVIIème siècle à nos jours
FICHE TECHNIQUE DU DVD
Molière
Un film de Ariane Mnouchkine
Avec : Philippe Caubère (Molière), Joséphine Derenne (Madeleine Béjart), Brigitte Catillon (Armande Béjart), Jean-Claude Penchenat (Louis XIV), Roger Planchon (Colbert), Daniel Mesguich (Monsieur, frère du roi), Jean Dasté (le grand-père de Jean-Baptiste)...
Année : 1978
Langue : Français
Pays : France
Durée : 244 minutes
Editeur : Bel Air Classiques - CNDP
Bonus du dvd : Entretien avec Ariane Mnouchkine, juin 2004 (46 min.), réalisé par Catherine Vilpoux ; Commentaire du film par
Ariane Mnouchkine
Synopsis : Le film début en 1632, alors que le jeune Jean-Baptiste n’a que 10 ans. Nous découvrons ses jeux, assistons à son premier
traumatisme, la mort de sa mère, puis suivons son éducation à travers les fêtes de rue et le théâtre populaire, loin de l’avenir de
tapissier du roi que son père avait souhaité pour lui. Après l’échec de sa première troupe, l’Illustre-Théâtre, fondée à Paris avec la
famille Béjart, il part sur les routes de France, se confronte à la misère du peuple, et comprend peu à peu la force et l’intérêt de la
comédie, fait évoluer le genre, se découvre dramaturge, prenant petit à petit la tête de la troupe. Suscitant souvent l’ire des dévots,
mais trouvant des protecteurs puissants, il parviendra à trouver le succès à Paris, et deviendra même l’organisateur des fêtes royales
à Versailles, avant de perdre un peu de son crédit : Tartuffe donne l’occasion aux dévots de demander à Colbert d’intervenir, Lulli le
trahit, et des problèmes divers naissent au sein de la troupe. Usé, vieilli, un an après la mort de sa partenaire de toujours, Madeleine
Béjart, Molière meurt à la fin de la quatrième représentation du Malade imaginaire.
CHAPITRAGE DU DVD
Attention : le début des chapitres tels qu’ils sont définis dans le DVD est légèrement décalé avant ou après ce que l’on pourrait considérer comme le début d’un cha-
pitre du strict point de vue narratif.
Chap.
DVD
Minutage
Descriptif
Pistes pédagogiques
Séquencier DVD 1 : Première époque
1
00:00:00
Prologue : 17 février 1673 : derniers préparatifs avant l’entrée en scène de Molière pour son dernier spectacle.
« Générique » (titre du film et voix off).
Axe d’étude 1, activité 3 :
Regard sur Molière, regard
de Molière
2
00:03:31
La bataille des enfants : jeu de cartes, jugement et condamnation de Jean-Baptiste, et mise en scène de sa
délivrance.
Axe d'étude 1, activité 3 :
de Molière
3
00:09:14
Le catéchisme des pouilleux : vision de la misère du peuple (les poux, la crasse) et obscurantisme de l'Eglise
(refus des avancées scientifiques).
Le peuple
4
00:12:48
La bagarre des charretiers : scènes de rue à la sortie du catéchisme ; lutte de préséance entre les cochers de
deux nobles, et révolte du peuple, qui repousse les deux voitures et embourbe l'une. Course-poursuite : l'un
des valets poursuit Jean-Baptiste, jusqu'à ce qu'il rejoigne une femme, visiblement riche, qui l'embrasse sur le
front : le valet s'éloigne alors, prenant conscience avec nous de la classe sociale de l'enfant.
5
00:20:38
Une berceuse : Jean-Baptiste rentre chez lui, et chasse son frère de sa place aux pieds de sa mère ; moment
de tendresse entre la mère et le fils, qui entonnent ensemble une chanson douce, jusqu'à ce que le père chasse
Jean-Baptiste pour prendre sa place à son tour, et terminer la chanson avec sa femme.
6
00:23:38
La fête des rois chez les Poquelin.
CHAPITRAGE DU DVD
7
00:30:49
La mort de la mère de Jean-Baptiste : invasion de la maison par des médecins inquiétants ; puis retour de
l'école des enfants le jour suivant et décès (sous-entendu) de la mère.
8
00:42:00
Jean-Baptiste ne veut pas être tapissier : cérémonie d'intronisation à la charge de tapissier, puis déjeuner
familial et colère du père face au refus de Jean-Baptiste de dire ce qu'il compte faire de sa vie. Départ pour
Orléans, pour des études de droit.
9
00:47:07
Les dévots d'Orléans : fondation de la Compagnie du Saint-Sacrement à Orléans ; énoncé d'interdits divers,
dont celui du Carnaval pour les étudiants. Rébellion chantée des collégiens, pendant que les dévots se réfugient dans la prière.
10
00:53:54
Le carnaval : malgré les imprécations des dévots et du chef de la sécurité, le peuple fête le carnaval ; libération des collégiens, molestation des collecteurs des impôts ; puis répression sanglante par les soldats.
11
01:10:47
La rencontre avec Madeleine : en échappant aux soldats, Jean-Baptiste assiste par hasard à une représentation théâtrale, et découvre ainsi Madeleine Béjart, sur scène.
A la fin de la représentation, Jean-Baptiste reste quelques instants seul dans la salle, puis sort ; ayant aperçu
les acteurs à leur toilette, il est invité par Madeleine à les rejoindre. Il quitte ensuite les lieux avec elle, tandis
qu’un char en feu traverse les rues d’Orléans.
12
01:17:39
« Je serai acteur » : déjeuner familial au cours duquel Molière annonce à son père ses intentions professionnelles. Colère du père.
13
01:20:27
Naissance de l’Illustre-Théâtre : chez les Béjart, lecture des statuts et fondation de l’Illustre-Théâtre ; on devine
que Jean-Baptiste est devenu l’amant de Madeleine, qui apparaît un bébé dans les bras.
Préparation de la salle pour leur spectacle ; débat sur la pertinence du choix d’une tragédie au lieu d’une
comédie ; annonce de l’arrivée de Descartes à Paris, tandis que Jean-Baptiste est parti chercher un fauteuil
chez son père, ce qui occasionne une dispute entre les deux hommes.
14
01:26:28
« Descartes est à Paris » : la troupe (dont Molière, ainsi nommé pour la première fois) assiste à la lecture par
Descartes de passages de la première des Méditations métaphysiques. Annonce de son départ pour la Suède,
afin d’échapper au poids de la police française.
Le jeu théâtral
Le jeu théâtral
CHAPITRAGE DU DVD
15
01:28:18
Un nouveau roi : annonce de la mort du roi (Louis XIII) et de la régence de la reine (Anne d’Autriche) ;
présence de Mazarin, et de Louis XIV, jeune enfant.
16
01:29:52
Des débuts difficiles : présence du père de Molière (accablé) et de la servante de la maison Poquelin (encourageante) lors d’une représentation de la troupe, une tragédie dans laquelle Molière joue ; les spectateurs
quittent peu à peu la salle au fil de la représentation.
Le soir même, les comédiens de l’Hôtel de Bourgogne se réjouissent du four de leurs concurrents.
Les nombreux créanciers se présentent lors d’une nouvelle représentation ; Molière cherche à leur parler, mais
il est jeté en prison. Il en sort grâce à l’intervention de son père ; nouvelle dispute entre eux. La troupe quitte
alors Paris, avec l’aide et la bénédiction du père de Jean-Baptiste.
17
01:36:50
À la découverte du Royaume de France : cherchant à rejoindre la troupe de Charles Dufresne, protégée par le
duc d’Epernon, les comédiens sont confrontés à la misère des campagnes françaises ; des villageois dévorent
leurs chevaux, poussés par la famine.
Le peuple
18
01:44:29
La troupe de Monsieur et Madame Dufresne : arrivés près de Toulouse, les comédiens retrouvent la troupe des
Dufresne, dans un moment de fête, perturbé par le vent : le plateau s’envole ; les Dufresne parviennent malgré
tout à transformer l’accident en spectacle comique, pour le plus grand plaisir de Madeleine. Dufresne présente
ensuite sa troupe aux nouveaux-venus. Les deux troupes repartent ensemble sur les routes.
La vie d’une troupe
Séquencier DVD 2 : Deuxième époque
1
00:00:00
Joies et peines de la troupe : scènes de voyage et de représentations comiques ; débat de Molière, qui veut
jouer des tragédies, avec Dufresne, qui sait qu’elles ne sont pas appréciées du public dans les villages ; échec
de Molière lors d’une tentative ; Madeleine lui apprend ensuite des rudiments de la commedia dell’arte.
Scènes d’amour entre différents membres de la troupe. Infidélités de Molière (avec Melle de Brie, puis la
future Marquise Du Parc) ; alternance avec des scènes de voyage.
Cours de création dramatique de Dufresne à Molière : les difficultés de la comédie.
Enterrement de l’enfant du couple Du Parc ; le prêtre fait sortir les comédiens du cimetière.
Nouvelles scènes de voyage. Armande grandit, de même que Louis XIV.
Nouveau débat entre Molière et Dufresne autour des genres.
La vie d’une troupe
CHAPITRAGE DU DVD
2
00:01:34
Monsieur le Prince de Conti : rencontre de Charles Coypeau d’Assoucy, musicien vagabond, qui se joint à eux
et leur donne des nouvelles de Paris, notamment de la fin de la Fronde ; peu après, lors d’une représentation,
les gens du prince de Conti viennent chercher la troupe pour jouer au château, tout proche. Molière hurle sa
joie de pouvoir enfin abandonner leur répertoire de farces.
Arrivée au château ; présentation de la troupe au Prince, qui les ignore, sauf Marquise ; il recommande
ensuite à Molière de le faire rire.
Présentation par un Molière très hésitant de sa pièce, L’Etourdi ou les Contretemps, à la troupe, très dissipée.
Scènes de la vie de la troupe au château : Molière écrit, et l’un des membres rédige une lettre, où il s’inquiète
de la possible influence des dévots sur M. de Conti. Retour de Conti, effectivement transfiguré, qui chasse les
comédiens et brûle ses livres au nom de la religion. Un de ses proches promet de l’aide à Molière lors de leur
arrivée à Paris.
3
00:27:51
Retour à Paris. Sous la protection de Monsieur, Frère du roi : aux abords de Paris, Coypeau les quitte. La
troupe est ensuite présentée à Monsieur, qui les prend sous sa protection et les engage à jouer à la cour dix
jours après.
4
00:31:57
Première représentation devant le roi : agitation en coulisse, puis représentation d’une tragédie ; c’est un
échec, entre ennui et moqueries du public, et colère de Dufresne face au choix fait par Molière du genre tragique. A l’entracte, la troupe lui ordonne de revenir à la comédie.
Il joue donc une comédie (Le Docteur amoureux ?), qui plaît unanimement. Le roi leur accorde la salle du Petit
Bourbon en partage avec les comédiens italiens.
5
00:38:56
Retrouvailles avec le maître Scaramouche : à l’arrivée au théâtre, Molière présente ses respects à Scaramouche, et les troupes fraternisent.
6
00:41:06
La troupe à l’épreuve de la gloire : nombreux succès, dont les titres défilent à l’écran, mais aussi jalousies et
dissensions sur le partage des rôles, et départ du couple Du Parc.
Le jeu théâtral
CHAPITRAGE DU DVD
7
00:44:27
Molière et Armande : fatigué de ses querelles, Molière rentre dans ses appartements, somptueux ; Armande
l’y rejoint ; premier baiser entre eux.
Banquet de fête pour le retour des Du Parc et lecture de leur contrat ; Molière en profite pour demander à la
troupe une part supplémentaire pour sa femme : on comprend qu’il parle d’Armande. Silence gêné autour de
la table, souffrance de Madeleine ; elle réclame le paiement d’une dette ancienne pour des costumes, ce que
Molière refuse de payer. Après le départ des autres, Madeleine et Molière finissent par fondre en larmes dans
les bras l’un de l’autre.
8
00:56:42
A l’école des femmes : scène de mariage forcé entre une toute jeune femme et un barbon ; Molière y assiste ;
interrogé par deux précieuses après la cérémonie, il dit vouloir peindre les travers de son temps ; elles l’engagent donc à s’attaquer à plus grave que leurs ridicules.
Axe d’étude 3, activité
1 : Une œuvre théâtrale
engagée
Lors des saluts à la fin de L’Ecole des femmes, on entend des réactions violentes du public. De même, au
cabaret, Molière est harcelé (en chanson et par des invectives) par les détracteurs de la pièce ; certains lui
reprochent son mariage avec Armande, présentée comme la fille de Madeleine. On devine à la fin de la
séquence qu’Armande trompe son mari.
9
01:10:21
Le Tartuffe et les dévots : dans le bureau de Colbert, deux dévots demandent l’interdiction de Tartuffe par le
roi ; Colbert refuse de leur répondre.
10
01:12:05
Une répétition à Versailles : Molière fait répéter à La Grange, et surtout à Armande, La Princesse d’Elide ; le
texte semble permettre aux deux époux de se dire leur relation amoureuse complexe.
11
01:17:44
Le Tartuffe et la censure : Colbert reçoit Molière pour lui signifier son intention de faire interdire la pièce, eu
égard au contexte religieux de l’époque ; Il double également sa pension. Molière annonce qu’il fera appel
au roi.
Débats en réunion de troupe autour du texte : tous redoutent les effets de la pièce, et proposent des coupures
et réécritures diverses. Molière refuse, et sort.
Louis XIV et les arts
CHAPITRAGE DU DVD
12
01:21:16
Préparatifs pour les fêtes du roi : promenade dans les jardins de Versailles, feux d’artifice, animaux exotiques,
jets d’eau, musique... Molière obtient la protection du roi pour son Tartuffe, et ce dernier commande une
pièce commune à Molière et Lulli.
13
01:27:05
Le Tartuffe et le roi : à la fin de la représentation, le roi retient ses applaudissements ; la troupe attend ensuite
son jugement, dans l'anxiété. Le roi arrive.
14
01:33:13
Le cadeau de la République de Venise : la traversée des Alpes enneigées par les gondoles vénitiennes.
15
01:40:06
Le rêve de Louis XIV : au son de la musique de Lulli ; celui-ci cherche à obtenir du roi la mainmise sur toute la
création musicale.
16
01:42:54
Les recettes baissent... : Molière parle à La Grange des difficultés qu’il rencontre (trahisons de Racine et Lulli,
désaffection du roi...) ; il envisage d’abandonner, mais La Grange lui rappelle que les recettes de Georges
Dandin baissent ; Molière parle alors du projet suivant : L’Avare.
17
01:48:46
« Nous nous sommes bien amusés » : travail sur Le Malade imaginaire : Molière à sa table de travail, puis
élaborant avec Madeleine la scène entre Toinette et Argan.
18
01:51:29
Madeleine est morte : réveil en sursaut de Molière, qui découvre le cadavre de Madeleine, morte dans la nuit.
Arrivée des gondoles à Versailles.
19
20
01:58:00
La quatrième représentation du Malade imaginaire : Molière seul face à son miroir, maquillé, répète une
scène ; derniers préparatifs et début du spectacle ; malaise de Molière sur scène.
de Molière
La mort de Molière : trajet en voiture puis montée des escaliers de son domicile, entouré de la troupe qui le
porte, tandis que se succèdent des images heureuses du passé.
de Molière
Générique de fin.
Molière
Un film de
Ariane Mnouchkine
Questionnaire de visionnage :
La biographie de Molière à travers le film
Activité 1
France, 1978
(niveau collège)
1. Le film débute en :
a. 1612
b. 1622
c. 1632
alors que le jeune Molière a ….... ans.
2. Molière meurt en ................., après une représentation de sa dernière pièce : …......................…
3. Le vrai nom de Molière est …............................................
4. Un événement traumatisant marque l’enfance de Molière : …......................................... Pour Ariane Mnouchkine, c’est à cette occasion
qu’il rencontre des personnages qu’il moquera beaucoup dans ses futures comédies : les …......................................
5. Le père de Molière exerçait la profession de :
a. marchand-tapissier, valet de chambre du roi
b. Maître des Eaux et Forêts
c. comédien.
6. Molière accepte-t-il de suivre la voie professionnelle tracée par son père ? …............. Quelles sont les deux décisions qu’il lui annonce
lors des deux repas familiaux mis en scène dans le film ? …................................................................................................
7. En 1643, Molière fonde avec Madeleine …................ , ses frères et quelques autres comédiens, une compagnie théâtrale appelée :
a. L’Illustre-Compagnie, b. L’Illustre-Théâtre, c. L’Illustre-Troupe.
8. Cette compagnie a-t-elle du succès ? …........ Pourquoi Molière est-il jeté en prison ? ..........................................................
Quelle décision la troupe prend-elle alors ? …..........................................
Molière
Activité 1
Un film de
Ariane Mnouchkine
France, 1978
(niveau collège)
9. A leur retour à Paris, en 1658, lors de leur première représentation devant Monsieur, frère du roi, leur protecteur, et le roi lui-même, la
pièce présentée plait-elle au public ? …...... S’agit-il du répertoire habituel de la troupe ? ….......
Quelle solution trouvent-ils alors ? …........................ Qu’obtiennent-ils ? ….................................
10. Malgré leurs succès, quelles difficultés rencontrent alors Molière et sa troupe ? Citez-en trois :
a ….....................................................
b …..................................................... c ….....................................................
11. Par ailleurs, deux pièces de Molière provoquent des scandales : lesquelles ?
a ….....................................................
b ….....................................................
12. Quel artiste célèbre rencontre-t-il à Versailles, lors des divertissements royaux dont il a la charge ? …..........................
Que leur demande le roi ? …....................................
13. Plusieurs événements assombrissent la fin de carrière de Molière : qui le trahit ? …................... Qui meurt ? ….......................................
Leur dernière pièce, Georges Dandin, est-elle un succès ? …......
14. Malgré cela, et ses déclarations à La Grange dans le film, est-il prêt à abandonner le théâtre et sa troupe ? …......
Quels indices nous le montrent ? ….......................................................................
ÉLÉMENTS DE CORRECTION
Note aux enseignants : si l’enseignant ne souhaite pas montrer l’intégralité du film aux élèves, il pourra se référer aux chapitres indiqués dans le corrigé pour élaborer un
parcours de visionnage autour de la biographie de Molière.
1. Le film débute en : c.1632, alors que le jeune Molière a 10 ans. Cf. DVD 1, chapitre 2.
2. Molière meurt en 1673, après une représentation de sa dernière pièce : Le Malade imaginaire. Cf. DVD 1, chapitre 1, DVD 2, chapitres 19 et 20.
3. Le vrai nom de Molière est Jean-Baptiste Poquelin. Cf. DVD 1, chapitres 2 et 8.
4. Un événement traumatisant marque l’enfance de Molière : la mort de sa mère Pour Ariane Mnouchkine, c’est à cette occasion qu’il rencontre des personnages qu’il
moquera beaucoup dans ses futures comédies : les médecins. Cf. DVD 1, chapitre 7.
5. Le père de Molière exerçait la profession de : a. marchand-tapissier Cf. DVD 1, chapitre 8.
6. Molière accepte-t-il de suivre la voie professionnelle tracée par son père ? Non Quelles sont les deux décisions qu’il lui annonce lors des deux repas familiaux mis en
scène dans le film ? Il lui annonce ne pas vouloir être tapissier et part faire des études de droit à Orléans, puis avoue son souhait d’être acteur. Cf. DVD 1, chapitres 8 et 12.
7. En 1643, Molière fonde avec Madeleine Béjart , ses frères et quelques autres comédiens, une compagnie théâtrale appelée : b. L’illustre-Théâtre. Cf. DVD 1, chapitre 13.
8. Cette compagnie a-t-elle du succès ? Non Pourquoi Molière est-il jeté en prison ? il est emprisonné pour dettes Quelle décision la troupe prend-elle alors ? Ils décident
de quitter Paris pour rejoindre la troupe itinérante des Dufresne dans le Sud de la France. Cf. DVD 1, chapitres 16, 17, (18), (DVD 2, chapitre 1).
9. A leur retour à Paris, en 1658, lors de leur première représentation devant Monsieur, frère du roi, leur protecteur, et le roi lui-même, la pièce présentée plait-elle au
public ? Non S’agit-il du répertoire habituel de la troupe ? Il s’agit d’une tragédie, et non d’une comédie, qui ennuie le public Quelle solution trouvent-ils alors ? Ils décident
alors de revenir au genre comique, avec succès Qu’obtiennent-ils ? Le roi leur offre donc une salle, celle du Petit-Bourbon, en alternance avec les comédiens italiens. Cf.
DVD 2, chapitre 4.
10. Malgré leurs succès, quelles difficultés rencontrent alors Molière et sa troupe ? Citez-en trois : Des jalousies naissent entre les comédiens pour le partage des rôles dans
les pièces écrites par Molière ; les Du Parc choisissent de partir pour rejoindre une autre troupe ; Molière abandonne Madeleine pour sa fille (sœur?) Armande, bien plus
jeune, suscitant la jalousie de la première. Cf. DVD 2, chapitres 6 et 7.
11. Par ailleurs, deux pièces de Molière provoquent des scandales : lesquelles ? L’Ecole des femmes et Tartuffe. Cf. DVD 2, chapitres 8, 9, 11, 12.
12. Quel artiste célèbre rencontre-t-il à Versailles, lors des divertissements royaux dont il a la charge ? Le musicien Lulli Que leur demande le roi ? Louis XIV leur demande
de s’associer dans un spectacle commun : ainsi naîtront leurs comédies-ballets. Cf. DVD 2, chapitre 12.
13. Plusieurs événements assombrissent la fin de carrière de Molière : qui le trahit ? Lulli et Racine Qui meurt ? Marquise du Parc (puis Madeleine, peu après) Leur dernière
pièce, Georges Dandin, est-elle un succès ? Les recettes de Georges Dandin baissent. Cf. DVD 2, chapitres 16 et 18
14. Malgré cela, et ses déclarations à La Grange dans le film, est-il prêt à abandonner le théâtre et sa troupe ? Non Quels indices nous le montrent ? Il a déjà une pièce
à proposer pour remplacer Georges Dandin, L’Avare, et malgré la maladie qui le ronge, il jouera jusqu’à sa mort sa dernière création, Le Malade imaginaire. Cf. DVD
2, chapitres 16 et 19.
Molière
Activité 2
Un film de
Ariane Mnouchkine
France, 1978
(niveau Lycée)
1. Quel est le véritable nom de Molière ?
2. Quelles sont ses dates de naissance et de mort ?
3. Quel était le métier de son père ? Quel aurait dû être le sien ?
4. A quel milieu social appartient-il ? Quels milieux sociaux fréquente-t-il ?
5. Quelles études Molière a-t-il fait ? Où ?
6. Quelles futures cibles de Molière Ariane Mnouchkine nous montre-t-elle dès cette première partie du film ?
7. Quels indices nous donne-t-elle concernant la formation de son goût pour le théâtre ?
8. Comment se nomme la troupe de théâtre qu’il a fondée avec les Béjart et quelques autres comédiens en 1643 ?
9. Pourquoi partent-ils jouer à travers toute la France ?
10. Quels genres de pièces jouent-ils alors ? D’après Ariane Mnouchkine, cela convient-il à Molière ?
11. Au cours de son existence, la troupe de Molière obtiendra la protection de différentes personnes. Nommez-les.
12. Que se passe-t-il lors de la première représentation de la troupe devant la cour, au Louvre ?
13. A quelles difficultés, intérieures ou extérieures à la troupe, les comédiens vont-ils se heurter, malgré leurs succès ?
14. Quelles sont les occupations de Molière à Versailles ?
15. Qui est Jean-Baptiste Lulli ?
Molière
Activité 2
Un film de
Ariane Mnouchkine
France, 1978
(niveau Lycée)
16. Quelles œuvres de Molière sont évoquées dans le film ? Sur lesquelles la réalisatrice insiste-t-elle ? Vous semble-t-il y avoir des oublis ?
17. Citez quelques acteurs de la troupe de Molière.
18. Quel état d’esprit semble animer Molière à la fin de sa carrière, selon Ariane Mnouchkine ?
19. Dans quelles circonstances Molière meurt-il ?
20. Quelle image de Molière Ariane Mnouchkine nous donne-t-elle à travers ce film ?
Note aux enseignants : si l’enseignant ne souhaite pas montrer l’intégralité du film aux élèves, il pourra se référer aux chapitres indiqués dans le corrigé pour élaborer un
parcours de visionnage autour de la biographie de Molière.
1. Quel est le véritable nom de Molière ?
Jean, dit Jean-Baptiste, Poquelin. Cf. DVD1, chapitres 2 et 8.
2. Quelles sont ses dates de naissance et de mort ?
1622 (le film débute en 1632, alors que Jean-Baptiste a 10 ans)-1673. Cf. DVD 1, chapitres 1 et 2.
3. Quel était le métier de son père ? Quel aurait dû être le sien ?
Son père était marchand-tapissier, valet de chambre du roi ; il aurait souhaité que son fils reprenne son commerce et sa charge. Cf. DVD 1, chapitre 8.
4. À quel milieu social appartient-il ? Quels milieux sociaux fréquente-t-il ?
La famille Poquelin appartient à la bourgeoisie aisée (on le constate aux costumes, à la maison familiale, d’évidence grande et confortable, mais également du fait de la
présence de serviteurs, et de plusieurs médecins au chevet de la mère de Jean-Baptiste) ; Ariane Mnouchkine nous montre néanmoins Jean-Baptiste très fréquemment mêlé
au peuple des rues de Paris ou d’Orléans. Il y a là un choix politique de la part de la réalisatrice ; elle a en effet choisi de mettre en avant cet aspect d’un artiste proche
du peuple, et elle n’illustre en revanche pas du tout les études que Molière semble avoir effectuées au collège de Clermont (actuel lycée Louis-le-Grand), parmi la riche
bourgeoisie, voire la noblesse parisienne. Cf. DVD 1, chapitres 2, 3 et/ou 4, (5), 7, 8, 10.
5. Quelles études Molière a-t-il fait ? Où ?
Dans le film, ayant refusé de devenir tapissier comme son père, Jean-Baptiste est envoyé à Orléans pour des études de droit.
Sur ce point, comme sur celui de son éducation en général, les sources sont peu nombreuses, et les témoignages peu fiables : on ne sait donc pas (et d’ailleurs, Ariane
Mnouchkine ne s’y aventure pas) si le jeune homme a effectivement pris ces études au sérieux, ni s’il les a jamais menées à terme ; par ailleurs, le passage, très probable,
de Jean-Baptiste par le collège de Clermont à Paris n’est pas évoqué.
La scène du carnaval à Orléans est donc vraisemblable, mais rien n’en atteste la véracité : la réalisatrice reconstitue ici une enfance et une adolescence réalistes à partir
des maigres sources disponibles, en y introduisant des éléments propres à son imaginaire et à sa vision de l’oeuvre moliéresque. Cf. DVD 1, chapitres 8, 9 (10).
6. Quelles futures cibles de Molière Ariane Mnouchkine nous montre-t-elle dès cette première partie du film ?
Dans ce début de film, Ariane Mnouchkine fait apparaître deux groupes de personnages qui nourriront l’imaginaire de Molière, et concentreront une grande partie de
ses critiques sociales : les médecins, d’une part, créatures caricaturales et inquiétantes au chevet de la mère de Jean-Baptiste (leurs rires déplacés face à la maladie et au
malheur, leurs visages rougis par l’alcool, les gros plans sur la nourriture qu’ils dévorent, semblent trahir la vision cauchemardesque que l’enfant peut en avoir conservée
tout autant que les stéréotypes qu’il développera dans ses pièces futures), et les dévots, d’autre part, auxquels Ariane Mnouchkine consacre toute une séquence, figures
inquiétantes, associées aux règles et aux interdits, et ridicules, croyant pouvoir mettre un frein à la liesse du carnaval et à la volonté du peuple. Il est évident que rien dans
les recherches historiques autour de la vie de Molière ne peut venir corroborer ces rencontres ; Ariane Mnouchkine fait ici travail d’interprétation, de recréation, à partir
de l’oeuvre du dramaturge, plus qu’à travers des éléments concrets de sa biographie. En convoquant dès le début du film ces deux cibles futures du comique moliéresque,
elle les présente comme des éléments essentiels de la formation affective et intellectuelle du jeune homme, et justifie ainsi une orientation future du dramaturge et de ses
œuvres vers la critique sociale. Cf. DVD 1, chapitres 7 et 9 (10).
7. Quels indices nous donne-t-elle concernant la formation de son goût pour le théâtre ?
Dans le même ordre d’idée, on constate que la réalisatrice a introduit dans son film différents éléments imaginaires par lesquels elle cherche à reconstituer ce qu’a pu
être la découverte et l’enchantement du théâtre pour Molière : au chapitre 2, c’est dans la mise en scène d’une tragédie épique que Jean-Baptiste et son ami résolvent
leur différent préalable (on remarquera d’ailleurs que comme dans le théâtre élisabéthain ou pré-classique en France, la mort, spectaculaire et délectable à leurs yeux,
intervient sur scène, et que le rôle féminin est tenu par Jean-Baptiste) ; au chapitre 7, le grand-père des enfants les emmène à la foire Saint-Germain assister au spectacle
de Scaramouche pour apaiser leur deuil (et c’est la comédie qui, ici, par la présence de la mort sur scène, devient moyen de catharsis) ; enfin, aux chapitres 10 et 11, c’est
le bonheur du carnaval, burlesque, de ses déguisements et de ses masques, et la beauté de la tragédie et de la rencontre avec Madeleine qui nous sont donnés à voir.
On notera ici la primauté qu’Ariane Mnouchkine donne aux formes populaires dans cette formation théâtrale. On sait par ailleurs que Jean-Baptiste a beaucoup fréquenté,
grâce à son grand-père, les salles de théâtre parisiennes (l’Hôtel de Bourgogne et celui du Marais), et qu’il a été sensibilisé très jeune à la tragédie et aux institutions
théâtrales de son époque : la réalisatrice choisit de ne pas montrer cet aspect-là de l’apprentissage du futur dramaturge. On se souviendra qu’elle-même prône un théâtre
populaire, festif, et loin des institutions... Cf. DVD 1, chapitres 2, 7, 10, 11.
8. Comment se nomme la troupe de théâtre qu’il a fondée avec les Béjart et quelques autres comédiens en 1643 ?
Il s’agit de l’Illustre-Théâtre. Cf. DVD 1, chapitre 13.
9. Pourquoi partent-ils jouer à travers toute la France ?
La troupe connaît des difficultés diverses, et fait faillite (Molière sera d’ailleurs emprisonné pour dettes) ; ils décident donc de rejoindre une troupe itinérante dirigée par
des amis de Madeleine, les Dufresne, et protégée par le duc d’Epernon, dans le Sud de la France. Cf. DVD 1, chapitres 16 et 17 (18).
10. Quels genres de pièces jouent-ils alors ? D’après Ariane Mnouchkine, cela convient-il à Molière ?
Dans le film, la troupe se consacre à des pièces comiques inspirées de la farce et de la commedia dell’arte. Charles Dufresne explique en effet au jeune Molière que la
tragédie n’est pas adaptée aux publics de ces régions. Les débats entre les deux personnages sont pourtant nombreux, et l’on voit un Molière rétif à la comédie, ayant du
mal à en maîtriser le jeu (c’est Madeleine qui doit lui enseigner cet art), et cherchant sans cesse à revenir à la tragédie (au chapitre 1, il reçoit des pommes pourries du
public campagnard ; au chapitre 2, il espère présenter des tragédies à leur nouveau protecteur, le prince de Conti (à tort, celui-ci lui intimant de l’amuser) ; et devant le
roi encore, il choisit de présenter une œuvre tragique, avant de se résoudre à revenir à la comédie).
Historiquement, il est sûr que la troupe se fait connaître petit à petit par les formes légères ; néanmoins, il est probable qu’elle jouait tout type de pièces. Surtout, le film
condense en quelques scènes une errance très longue sur les routes de France (une douzaine d’années), et ne peut rendre compte d’évolutions collectives et individuelles
nombreuses : difficile d’établir avec certitude ce que Molière pensait des différents genres et de leur intérêt. En tout état de cause, Ariane Mnouchkine montre le lent
cheminement de Molière vers l’acceptation de ses talents comiques et vers une stratégie d’acteur et d’écrivain qui lui permettront de se positionner par rapport aux autres
troupes à leur retour à Paris, processus décrit également dans la biographie d’Alfred Simon qui semble lui avoir servi de document de travail. Cf. DVD 2, chapitres 1, 2 et 4.
11. Au cours de son existence, la troupe de Molière obtiendra la protection de différentes personnes. Nommez-les.
Il s’agit du Prince de Conti, qui se séparera de la troupe pour des raisons religieuses (il deviendra dévot et opposé au théâtre), puis de Monsieur, frère du roi, qui leur
ouvrira les portes de la cour. Cf. DVD 2, chapitres 2 et 3.
12. Que se passe-t-il lors de la première représentation de la troupe devant la cour, au Louvre ?
La troupe présente une tragédie (Nicomède de Corneille), sans succès, puis décide de proposer un divertissement comique : la salle entière rit. Ariane Mnouchkine suggère
que le choix de la tragédie est celui de Molière, et que c’est Dufresne qui le convainc de revenir au comique ; pour Alfred Simon, en revanche, il n’était pas envisageable
de jouer autre chose qu’une tragédie devant le roi, et il ne s’agissait donc pas d’un caprice de Molière, mais d’une contrainte sociale. Quoi qu’il en soit, le roi décide
d’accorder une salle de représentation à la troupe, celle du Petit-Bourbon, en partage avec les comédiens italiens. Cf. DVD 2, chapitre 4.
13. A quelles difficultés, intérieures ou extérieures à la troupe, les comédiens vont-ils se heurter, malgré leurs succès ?
La troupe enchaîne les succès (Les Précieuses ridicules...), mais des jalousies naissent entre les comédien(ne)s pour le partages des rôles dans les pièces écrites par Molière,
et les Du Parc choisissent de partir (brièvement) pour rejoindre une autre troupe.
Molière quant à lui abandonne Madeleine pour sa fille (ou sa sœur?) Armande, bien plus jeune, suscitant la jalousie de son amante et partenaire depuis vingt ans.
Enfin, certaines pièces de Molière créeront de véritables scandales : L’Ecole des femmes, d’une part, et Tartuffe, surtout, qui provoquera l’ire des dévots, des dissensions
au sein de la troupe sur les risques à prendre pour faire exister cette pièce, et des tentatives de censure au plus haut niveau de l’Etat (Colbert, notamment). Cf. DVD 2,
chapitres 6, 7, 8, 9, 11.
14. Quelles sont les occupations de Molière à Versailles ?
Il est en charge des divertissements royaux ; on le voit répéter des pièces avec ses comédiens, mais également organiser les fêtes dans les jardins. Cf. DVD 2, chapitres
(10) 12.
15. Qui est Jean-Baptiste Lulli ?
Lulli est un musicien et compositeur d’origine italienne, qui va petit à petit, par talent et intrigue, dominer la vie musicale sous le règne de Louis XIV. Il créera avec Molière
le genre des comédies-ballets (La Princesse d’Elide, Le Bourgeois gentilhomme...), puis se brouillera avec lui. Cf. DVD 2, chapitres 12, 15, 16.
16. Quelles œuvres de Molière sont évoquées dans le film ? Sur lesquelles la réalisatrice insiste-t-elle ? Vous semble-t-il y avoir des oublis ?
On assiste à la lecture de la première pièce écrite par Molière devant la troupe, L’Etourdi ou les Contretemps (chapitre 2) ; Le Docteur amoureux est mentionné lors de
la représentation devant le roi ; plusieurs succès (Les Précieuses ridicules, Sganarelle ou le Cocu imaginaire, L’Ecole des maris...) défilent à l’écran au chapitre 6. Le film
s’attarde ensuite sur plusieurs œuvres présentées comme centrales : L’Ecole des femmes (chapitre 8) et Tartuffe (chapitres 9, 11, 13) pour les scandales qui les accompagnent, La Princesse d’Elide lors d’une belle scène de répétition et de dialogue amoureux entre Molière et Armande (chapitre 10), et évidemment Le Malade imaginaire
lors des séquences finales. Georges Dandin et L’Avare sont également nommées au chapitre 16. Il n’était évidemment pas possible de citer toutes les œuvres dans le film ;
on peut cependant noter certaines absences marquantes : Dom Juan (même si on peut penser que la scène avec le mendiant au chapitre 13 en est une réminiscence) ou Le
Misanthrope. Ariane Mnouchkine explique dans l’entretien qui accompagne le film qu’elle a souhaité ne pas mettre l’accent sur l’écrivain, et ne pas faire un film scolaire,
qui décrirait toute l’oeuvre du dramaturge, mais privilégier les liens de l’homme avec sa troupe et avec son temps : dès lors, elle a choisi de traiter les comédies qui faisaient
écho aux problèmes sociaux de l’époque, et de mettre de côté les pièces plus « métaphysiques » ; par ailleurs, Le Misanthrope apparaît selon elle dans le film à travers
la représentation de la vie de Molière lui-même, à la fin de sa vie. Cf. DVD 2, chapitres 2, 4, 6, 8, 9, 10, 11, 13, 16, 17, 19.
17. Citez quelques acteurs de la troupe de Molière.
On peut retenir au premier chef Madeleine Béjart (et ses frères), co-fondateurs de l’Illustre-Théâtre et partenaires de longue date ; Charles Dufresne ; le couple de Brie ;
Marquise du Parc et son mari ; Armande Béjart ; ou encore La Grange, devenu le bras droit de Molière à la fin de sa carrière. Cf. DVD 2, chapitres 2, (3), 6, 7, 16...
18. Quel état d’esprit semble animer Molière à la fin de sa carrière, selon Ariane Mnouchkine ?
Au chapitre 16, Molière se dit usé et fatigué : les querelles autour de L’Ecole des femmes et surtout de Tartuffe semblent l’avoir atteint ; il mentionne également les trahisons
de Racine ou Lulli, qui ont su obtenir toutes les faveurs du roi, ou le décès de Marquise du Parc (et la mort de Madeleine vient renforcer cette mélancolie). Par ailleurs, il
semble vouloir confier la direction du théâtre à La Grange et prendre sa retraite ; néanmoins, face aux problèmes de recettes de Georges Dandin, il se dit immédiatement
prêt à écrire une nouvelle pièce. Par ailleurs, il exprime des doutes concernant ses capacités d’écrivain à Madeleine au chapitre 17 : il s’accuse d’avoir copié les autres, et
de ne pas parvenir à mener à bout Le Malade imaginaire. Ariane Mnouchkine a donc fait de son Molière un misanthrope (cf. question 16), vieilli et mélancolique. Alfred
Simon corrobore cette vision : la maladie qui accompagnera les dernières années de Molière se double selon lui d’un état dépressif chronique, alimenté par les chagrins
personnels et les tracas professionnels nombreux qui le hantent. Cf. DVD 2, chapitres 16 et 17.
19. Dans quelles circonstances Molière meurt-il ?
Le 17 février 1673, à l’issue de la quatrième représentation du Malade imaginaire, Molière meurt d’une probable rupture de l’artère pulmonaire, conséquence d’une
longue maladie des poumons. Cf. DVD 2, chapitres 19 et 20.
20. Quelle image de Molière Ariane Mnouchkine nous donne-t-elle à travers ce film ?
On peut noter que, à de rares exceptions près, Ariane Mnouchkine met davantage l’accent sur l’art de comédien et de chef de troupe de Molière que sur l’écriture (rapidement évoquée aux chapitres 2 et 16 (DVD 2) et un peu plus développée au chapitre 17 dans une belle scène de co-création avec Madeleine) : elle-même femme de
théâtre, à la tête d’une troupe de comédiens, et metteur en scène, elle choisit de mettre en avant cet aspect chez son héros.
Par ailleurs, cela renforce la dimension humaine du personnage : elle n’a pas cherché à en faire un personnage solitaire et héroïque, un génie, mais au contraire à montrer
combien il est le produit de ses rencontres amicales, amoureuses et professionnelles, et de son siècle : qu’il est un homme de son siècle.
Ainsi, les scènes dialoguées sont relativement peu nombreuses, et Molière n’en est pas toujours le centre ; la réalisatrice a en revanche multiplié les scènes de groupe, de
foule, les passages où l’on voit la troupe ou le peuple en action (lors de la bagarre des charretiers, de la fête des rois, du carnaval, lorsque le théâtre des Dufresne s’envole
ou que la troupe doit pousser les chariots sur les routes de France...) dans lesquelles, bien souvent, Molière n’est qu’observateur ; et l’homme Molière n’attire finalement
pas plus la sympathie du spectateur que plusieurs figures très solaires, comme le père et le grand-père, ou Madeleine, pour ne citer qu’eux.
On perçoit ses petitesses (son entêtement initial dans la tragédie, ou encore sa cruauté à l’égard de Madeleine, lorsqu’il annonce maladroitement son mariage avec
Armande) autant que son courage (lorsqu’il défend Tartuffe face à Colbert, à sa troupe, ou au roi), sa détresse en fin de vie autant que son talent et son aptitude à mener
la troupe vers le succès : Ariane Mnouchkine a cherché à représenter un homme, c’est-à-dire à recréer ce qu’ont pu être ses jeux d’enfant ou ses joies et soucis d’adulte,
à oublier le monument historique pour donner chair à son personnage.
Molière
Activité 3
ANALYSE DE SéQUENCES :
REGARD DE MOLIÈRE, REGARD SUR MOLIÈRE
Un film de
Ariane Mnouchkine
France, 1978
(niveau Lycée)
1. Visionnez le prologue du film (chapitre 1).
- Que nous montre le premier plan du film ? Qu’est-ce que cela suggère sur les intentions d’Ariane
Mnouchkine dans son œuvre ?
- Quelle première image avons-nous de Molière dans ce film qui lui est consacré (commentez le
choix du cadrage, ainsi que son apparence physique, ses gestes...) ?
- Que pensez-vous du rôle et de la place des dialogues dans ce prologue ?
2. Visionnez le chapitre 2, la bataille des enfants. A votre avis, est-ce un épisode marquant de la biographie de Molière ? Qu’est-ce que
cette séquence apporte au film et à notre perception du personnage ?
Molière
Activité 3
ANALYSE DE SéQUENCES :
REGARD DE MOLIÈRE, REGARD SUR MOLIÈRE
(niveau Lycée)
3. Visionnez les deux derniers chapitres du film (19 et 20, DVD2).
- Que regarde Molière dans tout le début du chapitre 19 (01:51:30 à 01:55:45) ?
- Comment son malaise nous est-il rendu visible dans la fin de cette séquence ?
- Comment Ariane Mnouchkine a-t-elle choisi de mettre en scène la mort de Molière (chapitre 20) ?
Un film de
Ariane Mnouchkine
France, 1978
1. Visionnez le prologue du film (chapitre 1).
- Que nous montre le premier plan du film ? Qu’est-ce que cela suggère sur les intentions d’Ariane
Mnouchkine dans son œuvre ?
Le film s’ouvre sur un plan fixe montrant un théâtre vide, avant représentation ; c’est dans ce cadre que nous allons rencontrer Molière. Cela illustre la volonté d’Ariane Mnouchkine de faire un film sur le théâtre et ses acteurs, plutôt que sur un
dramaturge : ce qui l’intéresse, ce sont le jeu, la mise en scène, la vie du spectacle, la dynamique d’une troupe. Dès lors, elle
choisit de montrer Molière en tant qu’homme de théâtre, ce que suggère ce choix de décor initial, plutôt que dans la solitude
créatrice de l’écrivain. On note néanmoins l’aspect très sombre de ces premières images, le silence et le vide : nous sommes
au crépuscule de la vie de Molière, loin de la vivacité que le film va s’attacher à rendre dès le chapitre suivant.
- Quelle première image avons-nous de Molière dans ce film qui lui est consacré (commentez le choix
du cadrage, ainsi que son apparence physique, ses gestes...) ?
Après le plan fixe sur le théâtre vide, nous suivons une servante qui arrive et rejoint Molière derrière la scène. La caméra
s’arrête à distance, derrière les piliers qui séparent l’arrière-scène de la salle, en contrebas : nous restons au parterre, hors
de l’action, comme les spectateurs que nous sommes. Le sur-cadrage offert par les piliers, ne laissant qu’un champ très limité
à notre vue, l’effet de profondeur de champ, contribuent à mettre le personnage à distance : nous l’observons en cachette,
sans avoir de place dans cette intimité qui nous est suggérée.
Nous le voyons en effet assis seul, toussant, puis revêtant son costume pour le spectacle du jour avec l’aide de la servante,
tout ceci sans parole. Nous percevons néanmoins, à travers ses gestes et leur lenteur, la maladie et la vieillesse, et une forme
de mal-être.
Ce début est donc intriguant : il suscite notre désir d’approcher de Molière, de participer, de comprendre son intimité, d’abandonner cette position de voyeur qui est la
nôtre ici ; mais il surprend également par le choix de donner à voir à l’orée du film la fin de la vie de Molière, d’en révéler l’issue, comme pour supprimer toute forme de
suspens, nous libérer d’une attente stérile, et nous rendre disponibles à ce que la réalisatrice veut réellement nous montrer : non pas la stricte biographie d’un homme, mais
des moments de vie du théâtre, de sa troupe et de son siècle.
- Que pensez-vous du rôle et de la place des dialogues dans ce prologue ?
Les dialogues sont très limités, et Molière ne se voit attribuer qu’une phrase, prononcée hors-champ, et prise au milieu du dialogue de la servante et La Grange : ceci
contribue également à étonner le spectateur en ce début de film.
Les deux personnages rejoignent à cet instant la position qui était la nôtre précédemment : au parterre, spectateurs-voyeurs de Molière se préparant. Ils sont au centre de
l’image, mais restent des personnages secondaires (ce que la plongée renforce), tandis que la caméra se refuse à nous montrer le héros éponyme du film.
Le dialogue le concerne, mais ne lui est pas adressé : il nous apporte à nous des informations sur la date (17 février, dont nous savons qu’elle est celle de sa mort), sur la
raison de l’absence des comédiens (partis à une célébration pour commémorer la mort de Madeleine l’année précédente), sur la représentation à venir, et sur son état de
santé ; il joue donc un rôle informatif. Mais au-delà ce cet aspect, Ariane Mnouchkine met ici en scène le regard porté sur Molière, nous invite à y prêter attention à travers
la position de ces deux personnages, nos doubles dans le film.
Dans le même temps, elle nous impose de détourner notre regard de Molière pour regarder autour de lui : il n’est pas le seul centre d’intérêt du film, et ne nous est pas présenté
comme héros ; le ton peu amène qu’il emploie à l’égard de ceux qui s’inquiètent de lui renforce cette impression : l’empathie du spectateur ira plutôt à ses proches qu’à lui.
Une voix off prend ensuite le relais pour compléter les informations (la quatrième représentation du Malade imaginaire, le 17 février 1673) et introduire le début du film,
en analepse : 1632, Jean-Baptiste a dix ans.
2. Visionnez le chapitre 2, la bataille des enfants. A votre avis, est-ce un épisode marquant de la biographie de Molière ? Qu’est-ce que cette
séquence apporte au film et à notre perception du personnage ?
Il est évident que cet épisode est le fruit de l’imagination de la scénariste et réalisatrice du film, et non un élément historique attesté. Il est néanmoins probable que JeanBaptiste, comme tous les enfants de toutes les époques, avait des camarades de jeu, et que ces jeux pouvaient parfois virer à la bagarre. Il s’agit donc d’une séquence
vraisemblable, sinon véridique.
Le choix de donner à voir ce passage peut toutefois paraître étonnant : la voix off vient par exemple d’évoquer la naissance de Molière, 10 ans plus tôt, fait historique
plus marquant, sans doute, plus pertinent dans la biographie de l’écrivain, que ses jeux d’enfant. Ariane Mnouchkine choisit pourtant de nous introduire dans la vie de son
personnage par ce biais : c’est la première séquence du film à proprement parler.
C’est que plusieurs éléments en font en réalité l’intérêt. D’abord, bien que des détails nombreux (les accessoires et costumes, notamment) renvoient au XVIIème siècle, cette
séquence semble viser à nous amuser (les excès des paroles d’enfants, la parodie de procès et les peines envisagées...), nous attendrir, faire écho à notre propre expérience enfantine, et combler ainsi le fossé des siècles entre les personnages et nous. Cela rend le propos du film plus actuel, malgré sa dimension historique.
Par ailleurs, les jeux eux-mêmes sont intéressants. Le jeu de cartes, d’abord, qui suscite la bagarre : l’enjeu financier qui y est attaché est déjà un indice de la question des
classes sociales qui sera développé dans les séquences suivantes : c’est parce que le bourgeois Jean-Baptiste ne peut honorer son pari auprès de ses camarades du peuple
que la bataille commence (même si il est évident qu’il ne s’agit en réalité que d’un prétexte, et que les tensions sont plus jouées que ressenties). La parodie de procès,
ensuite, et surtout le passage final au cours duquel Jean-Baptiste et son ami improvisent un pastiche de comédie héroïque, sont fondamentaux car ils disent déjà quelque
chose du positionnement de Molière par rapport à ce qui l’entoure et par rapport au théâtre.
Si lors du procès ou au début de l’intervention de son ami, il est passif, spectateur volontaire de l’action lancée par les autres enfants (on remarque d’ailleurs le montage
alterné des plans mettant en regard l’action du preux chevalier imaginaire et le visage captivé de Jean-Baptiste qui suit tous ses gestes des yeux), il devient enfin acteur
lorsque, délivré, il prend sur lui de changer le scénario prévu, et de donner à son personnage un rôle héroïque. Cette évolution semble être celle qui guidera Jean-Baptiste
tout au long du film : observateur attentif des scènes de la vie quotidienne, de la rue, des êtres, de ses proches, des comédiens avec lesquels il vit, avant de s’en nourrir et
de devenir acteur et metteur en scène par lui-même.
Par ailleurs, on perçoit déjà des goûts esthétique théâtraux chez le jeune garçon ; et il n’est sans doute pas inintéressant qu’Ariane Mnouchkine lui fasse effectuer son
premier choix artistique pour un rôle de femme qui prend les armes pour défendre son amour, et meurt héroïquement. En effet, on peut peut-être y voir déjà la trace d’un
féminisme de Molière (à nuancer toutefois à la lecture de ses œuvres : si Agnès conquiert le droit de choisir son amant, les précieuses, qui cherchent à égaler les hommes
en savoir et en prestige, seront toujours déconsidérées dans son théâtre), qu’Ariane Mnouchkine illustrera par la suite dans son film. Surtout, ce refus d’attributions genrées
figées, le jeu sur les ambiguïtés, fait écho au théâtre du dramaturge favori d’Ariane Mnouchkine, Shakespeare (dans le théâtre élisabéthain, les rôles féminins étaient tenus
par des hommes, et, de plus, les comédies shakespeariennes usent souvent de personnages travestis, redoublant les doutes et les quiproquos), mais aussi aux créations du
théâtre du Soleil : premier parallèle suggéré entre ce Molière et sa créatrice.
NB : on pourra, pour compléter cet aspect, montrer aux élèves les chapitres 7 (la mort de la mère de Molière, séquence au cours de laquelle les enfants, et Jean-Baptiste
en premier lieu, sont spectateurs de la comédie des médecins chez eux, puis de Scaramouche et de l’homme-volant), 10 (le carnaval, auquel Jean-Baptiste assiste, émerveillé), 12 (la rencontre avec les acteurs, surpris au bain par un Jean-Baptiste curieux et maladroit) du DVD1, qui illustrent cet apprentissage par le regard du jeune homme
(noter la quasi-absence de dialogues au cours de toutes ces scènes) ; et les chapitres 1 et 2 du DVD2, qui montrent ses premières tentatives pour devenir acteur, puis chef
de la troupe (son apprentissage de la commedia dell’arte avec Madeleine, sa première lecture de l’Etourdi...). De retour à Paris, l’apprentissage sera terminé : Molière
sera désormais pleinement moteur de l’action, et non plus en retrait.
3. Visionnez les deux derniers chapitres du film (19 et 20, DVD2).
- Que regarde Molière dans tout le début du chapitre 19 (01 : 51 : 30 à 01 : 55 : 45) ?
Il se regarde se maquiller, se costumer, répéter son rôle ; puis il inspecte sa troupe, corrige des détails de costume ; et il observe, enfin, la salle et les spectateurs présents :
tout indique une maîtrise complète par le regard de tous les aspects du spectacle, une capacité à incarner tous les rôles, spectateur, acteur et chef de troupe, afin de garantir
la perfection de ce qui va être montré. On note donc que le parcours d’une vie, d’une formation par le regard, s’achève ici : tandis qu’au départ, nous étions placés en
position de spectateurs par rapport à lui, au parterre de cette même salle de théâtre dans laquelle s’achève le film, la perspective est ici retournée : c’est Molière qui nous
regarde, ou en tout cas, qui regarde ses spectateurs.
- Comment son malaise nous est-il rendu visible dans la fin de cette séquence ?
C’est à travers les regards sur lui, dans une sorte d’inversion par rapport au début de la séquence, que nous percevons la situation : il n’est plus celui qui regarde, mais
celui qui est regardé. Alors que, suivant le regard de Molière, nous scrutions les spectateurs dans la salle, un mouvement parti de cette même salle nous ramène dans les
coulisses, pour observer l’acteur sur scène. Les plans sur lui (souvent de trois-quart dos, au milieu de l’agitation de la farandole finale) alternent avec les plans serrés sur
les visages inquiets de ses proches. Molière perd alors son statut de chef et de moteur de l’action : premier signe de la mort qui vient.
- Comment Ariane Mnouchkine a-t-elle choisi de mettre en scène la mort de Molière (chapitre 20) ?
De nouveau, comme dans la plus grande partie du film, les dialogues sont minimaux, et le sens de la scène passe essentiellement par les gestes et mouvements. Cette
séquence-ci est particulièrement marquante, car elle repose sur le contraste entre Molière et ses proches.
Eux sont pris dans l’action vaine, la volonté de vitesse qui ne sert à rien (La Grange croit ainsi absurdement pouvoir repousser la mort par la course des chevaux : « Il meurt,
plus vite les chevaux, il meurt ! »), la fuite impossible devant la mort, ce que symbolise évidemment la scène des escaliers : filmant en plans fixes (de très légers mouvements
invitent à penser que la caméra est portée à l’épaule) les comédiens qui miment le mouvement de l’ascension mais en restant sur place, Ariane Mnouchkine a trouvé une
métaphore visuelle forte pour représenter l’impuissance de la troupe face à la disparition de leur chef. Leurs visages, filmés au plus près, témoignent de leur douleur.
La musique choisie pour accompagner cette séquence, la « Frost scene » extraite de l’opéra de Purcell King Arthur, scande ces mouvements sur le plan rythmique, tandis
que la tonalité dramatique et les paroles semblent rendre compte de la détresse de l’homme mourant (What power art thou, who from below / Hast made me rise unwillingly and slow / From beds of everlasting snow? / See’st thou not how stiff and wondrous old / Far unfit to bear the bitter cold, / I can scarcely move or draw my breath?
/ Let me, let me freeze again to death).
Molière, face à cette agitation, est de fait déjà absent : porté par les chevaux puis par ses proches, passif, il n’est plus maître de son corps ni de ce qui l’entoure ; il est
plongé dans son passé, dont il revoit des scènes en inserts : le carnaval d’Orléans au cours duquel il rencontre Madeleine, la troupe sur les routes enneigées de France,
Armande, Madeleine, et sa mère, enfin, qui le couronne le jour de la fête des rois.
Le choix de ces images contribue à nous rendre Molière profondément humain et touchant au moment de sa mort : ce qu’il retient de sa vie, ce ne sont pas les fastes et les
triomphes, mais les bonheurs simples et partagés avec sa troupe ou les femmes de sa vie.
Cette mise en scène tragique permet donc à la réalisatrice de nous montrer un Molière pathétique et touchant, et la ferveur de ses proches, son caractère fédérateur : c’est
ce visage qu’Ariane Mnouchkine veut que l’on conserve de son personnage.
Molière
Activité 4
Un homme ancré dans son siècle
Un film de
Ariane Mnouchkine
France, 1978
I/ Parcours thématique : Le peuple (niveau lycée)
1. Visionnez le chapitre 3 (le catéchisme des pouilleux). Quelle image de l’Eglise et du peuple nous est donnée ?
2. Ecriture d’invention : Visionnez le chapitre 17 (à la découverte du Royaume de France). Vous rédigerez la lettre que Madeleine adresse à
sa tante restée à Paris pour lui décrire la misère rencontrée sur les routes de France (vous vous inspirerez de tout ou partie des éléments présents dans cette partie du film). Votre courrier comprendra une part narrative et descriptive, mais n’oubliez pas de rendre compte également
des sentiments et opinions de Madeleine sur ce qu’elle voit, et de son point de vue sur le peuple.
2 bis. Ecriture d’invention : Visionnez le chapitre 17 (à la découverte du Royaume de France). Vous rédigerez la lettre dans laquelle Ariane
Mnouchkine explique cette séquence à ses comédiens avant le tournage : vous y décrirez les éléments et événements essentiels (ne vous perdez pas dans les détails), mais surtout, vous y exposerez vos intentions de réalisatrice (qu’avez-vous voulu raconter au spectateur, délivrer
comme message, à travers ce passage?).
Molière
Activité 4
Un homme ancré dans son siècle
Un film de
Ariane Mnouchkine
France, 1978
II/ Parcours thématique : Louis XIV et les arts (histoire des arts collège)
1. Visionnez l’entrevue entre Molière et Colbert (chapitre 11, DVD 2, de 01:17:44 à 01:19:04). Quels indices soulignent la dépendance,
voire la soumission, de l’artiste à l’égard du pouvoir ?
2. Visionnez les chapitres 12 et 14, consacrés aux préparatifs des Fêtes du roi (DVD 2). Citez toutes les attractions imaginées par Molière et
les autres artistes de Versailles pour divertir le roi.
3. Regardez attentivement la fin du chapitre 12 (à partir de 01:23:16) et le chapitre 15 (DVD 2). Quel semble être le rôle de l’art et des
artistes à Versailles ?
I/ Le peuple (niveau lycée)
1. Visionnez le chapitre 3 (le catéchisme des pouilleux). Quelle image de l’Eglise et du peuple nous est donnée ?
L’Eglise n’est pas présentée sous son meilleur jour : le catéchisme consiste en la simple répétition par les enfants de phrases et proverbes en latin (dont certains semblent
bien éloignés de la question religieuse : Si cantes asino, crepitus tibi reddet ab ano, par exemple...), puis en une lecture très conservatrice par le curé, en faveur du pouvoir royal, et reniant les avancées scientifiques (circulation sanguine découverte par Harvey, et mouvement des astres autour du soleil par Galilée). Par ailleurs, l’insistance finale du curé sur l’idée de punition divine en réponse à la bêtise d’un jeune enfant paraît disproportionnée et peu compatible avec le message d’amour que veut
être le catholicisme. En résumé, l’Eglise est vue comme aliénante, utilisant Dieu au profit d’elle-même et des puissants, et obscurantiste.
Le peuple, ici représenté en majorité par des enfants, présente en revanche plusieurs visages. La misère est évidente, à travers la crasse, les poux, le manque d’hygiène
en général ; mais le regard de Jean-Baptiste (et le nôtre, la caméra adoptant bien souvent son point de vue) s’arrête sur certaines scènes (la mère épouillant tendrement
son enfant), certains visages (celui de la jeune femme au bonnet), en révélant ainsi la beauté sereine. Enfin, si les enfants semblent répéter de façon bien disciplinée les
proverbes du curé, sans réfléchir, on note toutefois leur capacité de résistance : passive, quand il s’agit juste d’attendre que la séance se termine, ou plus active, quand
un jeune enfant choisit de déféquer dans le lieu saint.
Ariane Mnouchkine nous convie donc à rejoindre ici la cause de ce peuple si vivant et drôle, par opposition à la caricature religieuse que le curé incarne.
Cette insolence du peuple, sa vivacité, son refus de se laisser écraser par les puissants, sont également mis en scène dans le film lors de la bagarre des charretiers (chapitre 4) ou du carnaval (chapitre 10) : si Ariane Mnouchkine nous montre bien la misère du peuple, la boue, la crasse dans laquelle il vit, elle cherche surtout à nous
présenter une image d’un peuple rebelle, sûr de lui-même, joyeux (lors de la fête des rois ou carnaval), et plus puissant que les puissants. En cela, on peut lire dans cette
vision du peuple de Paris (ou d’Orléans) au XVIIème siècle un message politique de la réalisatrice, une utopie. Jean-Baptiste n’apparaît plus ici qu’à titre de témoin de son
époque : la réalisatrice a voulu montrer dans quel contexte l’homme de théâtre et l’écrivain évoluait. Pour elle, il est le fruit de son siècle, et plus précisément (et c’est en
cela qu’il s’agit d’une interprétation de sa part) de la fréquentation du peuple (cf. axe d’étude 1, activités 1 et 2 : La biographie de Molière).
II/ Louis XIV et les arts (histoire des arts collège)
1. Visionnez l’entrevue entre Molière et Colbert (chapitre 11, DVD 2, de 01:17:44 à 01:19:04). Quels indices soulignent la dépendance,
voire la soumission, de l’artiste à l’égard du pouvoir ?
Colbert incarne ici l’autorité du pouvoir politique sur l’artiste : cela est visible à plusieurs niveaux. D’abord, il est question d’interdire une pièce, Tartuffe (ou au moins
d’encourager le roi à le faire), pour ne pas mettre en péril le pouvoir royal : l’art est donc subordonné à des préoccupations politiques, et est donc soumis à la censure.
L’artiste est également lié au roi par l’argent : Colbert mentionne ici la « pension » touchée par Molière, c’est-à-dire son salaire en tant que comédien du roi ; c’est donc le
signe de sa dépendance vis-à-vis de celui qui le paie. Enfin, cette soumission forcée de l’artiste au pouvoir se manifeste dans les attitudes de Molière : il reste debout, face
à Colbert assis derrière son bureau et des attributs de son autorité (encrier, cassette...), fait une révérence sans un mot face à la décision concernant sa pièce, et n’ose
finalement qu’un mot, l’appel au roi, pour la défendre : tout suggère son infériorité face au ministre. On pourra, pour compléter cette question, visionnez également les
scènes montrant les relations de Molière et sa troupe avec ses mécènes et protecteurs (chapitres 2, 3, 4 du DVD 2 notamment).
2. Visionnez les chapitres 12 et 14, consacrés aux préparatifs des Fêtes du roi (DVD 2). Citez toutes les attractions imaginées par Molière et
les autres artistes de Versailles pour divertir le roi.
La liste est longue : les divertissements sont nombreux, et tous plus somptueux et originaux les uns que les autres. Les feux d’artifice, d’abord, semblent déjà impressionnants dans le film, mais Molière en demande le double : les Fêtes du roi se doivent d’être grandioses, sans commune mesure. Des bougies et flambeaux doivent éclairer
les jardins de Versailles. Une parade d’animaux exotiques (éléphant, chameau...) est prévue. Les fontaines des jardins sont mises en eau, et organisées de façon à créer
une musique aux oreilles du promeneur. A cela s’ajoutent les créations musicales de Lulli, et théâtrales de Molière. Symbolisant cette démesure, la traversée des Alpes
enneigées par les gondoles vénitiennes donne lieu à une longue et très belle séquence : pour le seul bon plaisir du roi et pour célébrer sa grandeur, on fait franchir des
montagnes à des bateaux, tirés à bras d’homme, dans la neige et dans le froid, sans souci de l’ampleur des moyens nécessaires et de l’absurdité du but.
3. Regardez attentivement la fin du chapitre 12 (à partir de 01:23:16) et le chapitre 15 (DVD 2). Quel semble être le rôle de l’art et des
artistes à Versailles ?
Le rêve de Louis XIV qui débute le chapitre 14 est tout à fait parlant : au son de la musique de Lulli, c’est de gloire dont il rêve. Ce lien entre le développement des arts et
le prestige de celui qui en est le mécène est d’ailleurs souligné par les artistes eux-mêmes, qui en font un objet de flatterie afin d’obtenir des privilèges : ainsi, Lulli n’hésite
pas à se recommander lui-même, afin, selon lui, de donner à son souverain une musique représentative de son pouvoir.
L’art devient donc ici purement un art de cour et de courtisans : tous font assaut de servilité, refusant de donner leur avis sur les travaux des autres (ainsi de Molière, au
sujet du débat entre les jets d’eau de Le Nôtre et la musique de Lulli), se pliant aux désirs du souverain (Lulli et Molière devant donc s’atteler à une pièce commune pour
satisfaire le bon plaisir du roi), recherchant sa protection (comme Molière avec son Tartuffe) ; et tous manoeuvrent et flattent afin d’obtenir les bonnes grâces de ce souverain omnipotent : Le Nôtre cherche à évincer Lulli en faisant taire sa musique, tandis que ce dernier tente d’obtenir la mainmise sur l’ensemble de la production musicale
royale. Molière n’est pas en reste, qui sait flatter le roi et esquiver sa question afin de s’éviter des rancoeurs et de s’assurer la bienveillance du roi à l’égard de Tartuffe.
L’art est donc ici conditionné par l’habileté sociale et courtisane.
Molière
Activité 5
Un film à la gloire du théâtre
Un film de
Ariane Mnouchkine
France, 1978
I/ Analyse de séquence : Une œuvre théâtrale engagée (niveau lycée) : chapitre 8, DVD 2 (jusqu’à 01:03:34)
1. Comment la réalisatrice nous fait-elle percevoir l’injustice du mariage qui ouvre cette séquence ?
2. La manière dont Ariane Mnouchkine reconstitue ici la genèse de L’École des femmes vous semble-t-elle réaliste ?
3. Quel est l’intérêt pour la réalisatrice et le spectateur du débat entre Molière et les deux précieuses ?
Molière
Activité 5
Un film de
Ariane Mnouchkine
France, 1978
II/ Ecriture d’invention : La vie d’une troupe (niveau lycée)
Visionnez les chapitres 18 du DVD 1 et 1 du DVD 2 : soyez attentifs aux différents événements et à la routine de la vie de la troupe sur les
routes, aux relations entre les personnages, à ce que vous percevez de leurs sentiments sur leur quotidien.
Vous rédigerez ensuite le journal intime de Molière décrivant les quinze premiers jours sur les routes après les retrouvailles avec les
Dufresne. Vous évoquerez à la fois les succès et les difficultés rencontrées sur scène et en-dehors, les détails de votre quotidien, mais aussi
vos ressentis face à la vie que vous menez avec vos compagnons.
Molière
Activité 5
Un film de
Ariane Mnouchkine
France, 1978
III/ Ecriture d’invention : Le jeu théâtral (niveau lycée)
Visionnez la séquence de la représentation devant le roi (chapitre 4 du DVD 2), et éventuellement le spectacle de Scaramouche (chapitre 7,
DVD 1, à partir de 00:37:56) et celui de Madeleine (chapitre 11, DVD 1), pour mieux percevoir les caractéristiques du jeu tragique et de la
commedia dell’arte.
Vous imaginerez ensuite la lettre écrite par le roi à sa maîtresse pour lui décrire le spectacle auquel il vient d’assister : vous y insisterez sur
les caractéristiques de la mise en scène et du jeu des acteurs, ainsi que sur vos réactions en tant que spectateur face aux deux pièces qui
vous ont été présentées par Molière et sa troupe.
I/ Analyse de séquence : Une œuvre théâtrale engagée (niveau lycée) : chapitre 8, DVD 2 (jusqu’à 01:03:34)
1. Comment la réalisatrice nous fait-elle percevoir l’injustice du mariage qui ouvre cette séquence ?
Ariane Mnouchkine a délibérément forcé le trait dans ce passage : le spectateur ne peut qu’être scandalisé par la différence d’âge entre les deux époux, la contrainte exercée sur la mariée, le simulacre de dot, ou le contraste entre la violence visiblement exercée sur la jeune femme et l’indifférence avec laquelle l’Eglise bénit cette union.
Ce qui frappe en premier lieu dans cette scène est effectivement l’écart d’âge entre les époux : la mariée est extrêmement jeune, et surtout, le marié apparaît comme
une caricature de vieillard de comédie. Son maquillage (le visage entièrement blanc que l’on retrouvera dans le film lors des préparatifs de Molière pour Le Malade
imaginaire, dans lequel il joue un autre barbon, Argan), la perruque, l’attitude, les mimiques, en font un personnage ridicule et inquiétant, qui semble échappé d’une
pièce de Molière dans la réalité reconstituée par Ariane Mnouchkine (ce procédé apparaissait déjà avec les médecins au chevet de la mère du jeune Jean-Baptiste au
chapitre 7 du DVD 1).
Malgré cela, la séquence ne relève pas de la comédie : les invités et l’institution soutiennent les prétentions du barbon, et aucun valet ou soubrette ne semble prêt à venir
en aide à la malheureuse jeune femme.
Tout pointe en effet vers l’idée de contrainte, de sévérité, de violence : violence physique, évidemment, puisque la jeune femme est traînée jusqu’à l’autel, puis brutalisée pour qu’elle accepte de prendre pour époux l’homme qu’on lui a imposé (et ce sont alors plusieurs mains qui s’abattent sur elle, la serrent, l’oppressent, brisent sa
coiffe, comme si la société toute entière la condamnait à ce mariage) : les plans très rapprochés rendent alors d’autant plus sensible cette agressivité à son encontre ;
mais violence symbolique également à travers le faste, le rite, l’institution. En effet, on perçoit toute l’hypocrisie de l’Eglise et des familles dans cette scène : hypocrisie de
la dot (une maigre pièce de monnaie, qui montre bien que la famille de la jeune femme a vendu sa jeunesse au vieillard, l’a sacrifiée à des intérêts financiers), hypocrisie du rite, fastueux, et du discours qui l’accompagne, se poursuivant malgré la tentative de rébellion de la jeune femme et la violence qui s’ensuit à son égard, faisant
semblant d’ignorer le faux-semblant et la contrainte, et cautionnant ainsi l’inacceptable.
On remarquera enfin que le prêche ne concerne que les devoirs de la femme et les qualités qu’on attend d’elle, renforçant encore le déséquilibre, la différence de statut,
entre les deux époux.
2. La manière dont Ariane Mnouchkine reconstitue ici la genèse de L’École des femmes vous semble-t-elle réaliste ?
Nous avons déjà noté que dans la première scène, un personnage, celui de l’époux, semblait appartenir par son aspect caricatural à un autre univers : celui du théâtre,
de la commedia dell’arte ou des comédies de Molière. D’autres éléments (âge du vieillard, violence physique en gros plans...) relèvent également d’une forme de grossissement proche des procédés de la parodie, de la farce, du théâtre comique.
Les deux personnages féminins rencontrés ensuite semblent également échappés des Précieuses ridicules ou des Femmes savantes : elles en font d’ailleurs elles-mêmes la
remarque, en se référant aux écrits de Molière à leur dépens. Néanmoins, ces deux femmes n’ont ici rien de ridicule, au contraire : elles font preuve d’esprit, d’ironie,
d’intelligence stratégique, et de persuasion. Ce sont elles qui suscitent chez Molière la décision de s’emparer de la cause des femmes dans sa pièce suivante.
Le traitement de ce passage – évidemment imaginaire : nul ne peut réellement reconstituer les mécanismes et événements qui ont mené Molière à écrire L’Ecole des
femmes, et on ne trouve pas trace ici des sources littéraires qu’il a exploitées pour cette pièce – est donc intéressant car il mêle habilement éléments réalistes, faits socio35 Dossier pédagogique Molière
logiques avérés (les mariages contraints, les précieuses), et éléments issus de l’univers théâtral moliéresque. Ariane Mnouchkine parvient ici à montrer qu’il existe une
continuité chez l’auteur entre ce qu’il observe et ce qu’il donne à voir, entre la réalité et la fiction, tout en interrogeant l’efficacité et l’intérêt du grossissement parodique
dans la peinture de la société.
3. Quel est l’intérêt pour la réalisatrice et le spectateur du débat entre Molière et les deux précieuses ?
Il permet de faire entendre une réflexion sur le rôle du théâtre selon Molière, et sans doute Ariane Mnouchkine elle-même.
En effet, le dialogue commence par l’idée selon laquelle le monde, la société, est un théâtre : la cérémonie qui vient de se dérouler peut offrir autant d’intérêt à l’observateur des choses humaines qu’est Molière que ce qu’il donne à voir sur scène ; le théâtre et le monde se font écho, le premier doit être le reflet du second.
Cette conception suggérée par l’une des deux précieuses est reprise par Molière, qui affirme : « Il est vrai que je veux toujours, sans vaine complaisance, peindre ce
que je vois, dire ce que je pense ». Cette phrase un peu grandiloquente (et que les précieuses louent d’ailleurs – avec peut-être une pointe d’ironie face à la préciosité
qu’il déploie ici) résume pourtant un aspect important du théâtre de Molière (et du théâtre en général) pour Ariane Mnouchkine : son rôle est de rendre compte du
monde tel qu’il est, et de prendre parti ; c’est en cela que le théâtre a une dimension politique selon elle. C’est à cette prise de conscience que les précieuses invitent ici
Molière : si le rire peut corriger les mœurs et mettre à nu la vérité des choses et des êtres, alors le dramaturge se doit de l’utiliser pour des causes réellement signifiantes.
Ce dialogue est assez frappant, car les précieuses semblent ici porter la parole de la réalisatrice, et susciter chez Molière une évolution vers un théâtre plus engagé.
La suite du film illustre en effet les combats pour L’Ecole des femmes et Tartuffe, corroborant cette lecture de la carrière et de l’œuvre de Molière, qu’il faudra peut-être
pourtant nuancer : toutes les œuvres de Molière, et notamment dans la suite de sa carrière, ne peuvent être considérées comme politiques (et on a d’ailleurs vu (axe
d’étude 1, activité 2) que la réalisatrice avait sciemment laissé de côté certaines pièces, moins politiques, plus métaphysiques, pour rendre son propos plus cohérent).
Leur inscription dans le contexte social, dans les mœurs du temps, reste néanmoins réel, et c’est ce qu’Ariane Mnouchkine s’est attachée à montrer.
NB : pour mettre en avant la dimension engagée de l’oeuvre de Molière vue par Ariane Mnouchkine, un parcours autour des dévots et de Tartuffe est également possible : chapitre 9 du DVD 1 et chapitres 2, 9, 11, 13 du DVD 2.
POUR ALLER PLUS LOIN
Bibliographie
Autour d’Ariane Mnouchkine et du Théâtre du Soleil :
L’Art du présent, PASCAUD Fabienne, Paris, Plon, 1995.
Rencontres avec Ariane Mnouchkine, dresser un monument à l’éphémère, FERAL, Josette, Montréal, XYZ Éditeur, 1995.
Trajectoire du Soleil autour d’Ariane Mnouchkine, FERAL Josette, Paris, Éditions Théâtrales, 1998.
Filmographie
Les Marches du palais (sixième épisode du Roman d’un acteur), DARTIGUES, Bernard, CAUBERE, Philippe, 1997.
Sitographie http://www.ina.fr/video/CAB7801214401/extrait-moliere-video.html
Journal de 20H d’Antenne 2, 19 septembre 1978 : reportage sur les polémiques déclenchées par le film après le festival de Cannes et lors de sa sortie en salles.
http://www.ina.fr/video/I00019659
Ciné-regards, 31 mai 1978 : Ariane Mnouchkine parle de son film.

Molière - Zéro de conduite

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