Monographie Athènes
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Monographie Athènes
ATHENES LA RESTRUCTURATION DU RESEAU DE TRANSPORT POUR LES JEUX OLYMPIQUES Mots clés : Intégration des systèmes de transport ; Planification ; Politique environnementale ; Projets de transports publics Monographie rédigée par Camille MARTINET et Julien ALLAIRE sur la base de l’intervention de Zoï CHRISTOFOROU, OASA / UNTA (conférence de Damas, 2010). Propriété intellectuelle de CODATU Dernière mise à jour : 17/08/2012 Athènes Athènes, a accueilli en 2004 les Jeux Olympiques. Le retour des Jeux en Grèce, berceau des Jeux antiques et des premiers Jeux modernes, a permis à l’aire métropolitaine d’Athènes, qui concentre près de la moitié du PIB du pays, de mettre en œuvre un véritable projet de requalification urbaine. LA RESTRUCTURATION DU RESEAU DE TRANSPORT POUR LES JEUX OLYMPIQUES Grèce Athènes Population : 11 316 000 hab. Population : 4 000 000 hab. Superficie : 131 957 km² Superficie : 400 km² Densité : 85,8 hab. / km² Densité : 10 000 hab. / km² Taux d’urbanisation : 61,40 % Longueur des lignes : (2010) Métro : 55 km Tramway : 27 km Parts modales : 1 VP : 53 % TP : 37 % MA : 10 % Taux de croissance annuel de la population urbaine (2005-2010) : 0,56 % PIB / habitant : 26 606,9 $ IDH : 0,861 / 1 Taux de motorisation : 455 véhicules pour 1 000 hab. Véhicules par kilomètre de route : 55 Accidentologie : 1,49 accident mortel pour 10 000 hab. Sources : Banque Mondiale – PNUD – Zoï Christoforou – UrbanRail.net – EPOMM 1 : VP : Voiture Particulière – TP : Transports Publics – MA : Modes Actifs Mots clés : Intégration des systèmes de transport ; Planification ; Politique environnementale ; Projets de transports publics D’après l’intervention de Zoï CHRISTOFOROU – OASA / UNTA (conférence de Damas, 2010). En 2004, pendant 16 jours, 301 événements ont été organisés dans la capitale grecque et 3,6 millions de spectateurs sont venus assister aux Jeux Olympiques. Pour accueillir cet évènement, la ville a développé un vaste programme de requalification urbaine : construction et réhabilitation des logements, mise en valeur de son patrimoine, développement d’infrastructures de transports et implantation de nouvelles structures sportives. Les questions d’infrastructures urbaines sont au cœur de la préparation des Jeux Olympiques. Le succès du déroulement de grands événements sportifs dépend de la réalisation et de la fiabilité de celles-ci. Ainsi, les Jeux ont joué le rôle d’ultimatum pour les autorités athéniennes. Athènes a connu une croissance urbaine très rapide au cours de la deuxième moitié du vingtième siècle. Depuis les années 1960, l’agglomération s’est étendue vers le sud et le nord sans référence à aucun document de planification et souvent de manière illégale. On estime ainsi qu’un quart des immeubles à Athènes ont été construits illégalement. Jusqu’à la deuxième moitié des années 1990 et le choix d’Athènes pour accueillir les Jeux Olympiques, les documents de planification sont généralement restés sans succès Depuis 1970, le taux de motorisation a très fortement augmenté dans la capitale hellène. En 2009, selon Eurostat 1, le taux de motorisation dans la région d’Athènes était de 650 véhicules pour 1 000 habitants. Très tôt les autorités nationales et locales ont cherché à lutter contre la pollution atmosphérique générée par le trafic automobile. Le Néfos, nuage de dioxyde de souffre, de monoxyde de carbone et d’ozone qui surplombe la ville située entre mer et montagne, fait de l’agglomération une des plus polluées d’Europe. Pour réduire les émissions polluantes, une circulation alternée appelée dactylio a été mise en place en 1982. Dans le centre-ville, sur 23 km², les voitures doivent circuler les jours pairs ou impairs en fonction de leur immatriculation. Cette mesure isolée n’a toutefois pas conduit aux résultats espérés en termes d’amélioration de la fluidité du trafic et de la qualité de l’air. Une augmentation très nette du nombre de taxis et de deux-roues motorisés autorisés à circuler dans la zone ainsi qu’une hausse rapide de la motorisation des ménages installés dans la zone pour disposer de deux voitures ayant des plaques paires et impaires, ainsi qu’une insuffisance de l’offre en transports collectifs et la quasiabsence de contrôle du stationnement n’ont pas permis de répondre aux objectifs 2. Figure 1 : Parts modales à Athènes. ORGANISATION DU SYSTEME DE TRANSPORT PUBLIC A Athènes, le réseau de transport public est composé de 7 modes de transport différents : bus de banlieue, taxi, train de banlieue, bus thermique, trolleybus, métro et tramway. Les bus de banlieue et les taxis dépendent du secteur privé alors que les autres modes de transport sont rattachés au Ministère des infrastructures, transports et réseaux via l’Organisation Hellénique des Chemins de Fer et l’Organisation des Transports Urbains d’Athènes (AUTO). L’AUTO est l’autorité compétente pour 1 http://epp.eurostat.ec.europa.eu/statistics_explained/index.php/Vehicle_fleet_statistics_at_regional_level/fr http://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=ECOPO_029_0053 2 planifier, organiser, contrôler et fournir les services de tous les modes de transport public, à la fois en surface et en souterrain. Les améliorations et modernisations des transports athéniens dans le cadre des Jeux se sont inscrites dans le plan « Attique SOS » lancé en 1994 par le ministère de l’Environnement. Ce dernier a mis en place de nombreuses mesures pour améliorer la qualité de l’air : création de couloirs de bus, mise en service de 17 kilomètres de ligne de métro, renouvellement du parc de bus et développement de lignes de trolleys, contrôle de la circulation automobile, etc. Au final, la modernisation des transports athéniens devait aboutir à une réduction de la pollution atmosphérique, à une amélioration de la sécurité routière et à l’introduction de nouvelles habitudes dans le domaine des transports 3. Les infrastructures de transports nécessaires à l’organisation des Jeux ont donc été intégrées dans la restructuration du système de transport de l’ensemble de l’Attique (région englobant Athènes). UN DEVELOPPEMENT SANS PRECEDENT DES INFRASTRUCTURES DE TRANSPORTS Elément central des projets d’aménagement depuis plus de 50 ans, le développement des transports en commun ne s’est jamais concrétisé avant la décision de faire de la ville d’Athènes l’hôte des Jeux. Les Jeux Olympiques d'été de 2004 ont été le plus grand défi dans l'histoire du système de transport d'Athènes. Tout le réseau de transport a été modernisé : 9,6 kilomètres de nouvelles lignes de métro, 23 kilomètres de lignes de tramway (2 nouvelles lignes) et 32 kilomètres de réseau ferroviaire de banlieue ont été mis en service pour l’occasion. En même temps 120 kilomètres de nouvelles routes ont été inaugurées et 90 kilomètres de routes existantes ont été rénovées 3. Le développement du réseau de métro Le réseau de métro d’Athènes comprenait 3 lignes dont la première a été construite en 1869. Il ne desservait qu’une petite partie de la ville. La modernisation du réseau de métro était nécessaire pour l’organisation des Jeux. Un vaste programme a été lancé visant à : l’accroissement de la vitesse, la modernisation du système de signalisation pour les trajets les plus fréquents, la modernisation des systèmes de sécurité et de télécommunication et la réfection des stations. De plus, des projets d’extension étaient indispensables pour relier le centre-ville aux sites olympiques situés au nord de la capitale. Ils ont permis de satisfaire les besoins des Jeux en desservant l’ensemble de la région de l’Attique ainsi que l’Aéroport International d’Athènes. La construction des extensions a été délicate : d’une part des sites archéologiques ont été découverts et d’autre part, il a été nécessaire de détruire une multitude de constructions illégales et des riverains ont intenté un recours devant les tribunaux. Tout ceci n’a cessé de freiner les travaux. Le coût de ces opérations est d’environ 2 milliards d’euros. Les lignes en service avant 2004 transportaient environ 530 000 usagers par jour ouvrable. Les extensions réalisées ont permis de gagner 150 000 usagers supplémentaires par jour. Les usagers des transports collectifs ont gagné un temps de trajet considérable. Lancés en 1991, les travaux se sont 3 http://thema.univ-fcomte.fr/IMG/pdf/These_Adeline.pdf poursuivis jusqu’en 2007 date à laquelle ont été inaugurées les dernières extensions de lignes. Le réseau compte actuellement 55 km et 52 stations. Par ailleurs, un train régional suburbain reliant le Pirée (au sud) à la gare centrale d’Athènes, puis à l’aéroport (à l’est) a été construit pour l’occasion. Figure 2 : Réseau de transport d’Athènes. Le tramway Le tramway a été mis en place afin de desservir les banlieues du sud-ouest de la capitale, là où sont installés plusieurs sites sportifs olympiques. Il permet d’atteindre la côte en 22 minutes au lieu de deux heures auparavant. Sa vitesse moyenne est de 25,5 Km/h alors que celles des automobiles et des taxis au sein d’Athènes est de 10 Km/h. Deux lignes ont été construites : l’une relie le centre d’Athènes à Glyfada, station balnéaire sur la côte ; l’autre rejoint la baie du Phalèdre où ont été situés deux des principaux pôles sportifs. La première étape de construction s’est achevée pour l’été 2004. 23 kilomètres ont été construits pour l’évènement (du fait des retards accumulés lors des travaux, le tramway a vu son tracé écourté d’une station vers le centre). A plus long terme, ce réseau desservira plus amplement le centre d’Athènes. Le tramway, qui avait été supprimé il y a 50 ans, est à présent un des moyens de transport sur lequel compte la ville afin de résoudre ses problèmes de congestion. Sa construction figure parmi les investissements soutenus par le Cadre Communautaire d’Appui de l’Union Européenne. En même temps, un semi-périphérique a vu le jour pour relier l’est à l’ouest de l’agglomération sans passer par le centre d’Athènes. D’une longueur d’environ 50 kilomètres, cet ouvrage encercle désormais la ville par le Nord depuis l’Aéroport International Venizélos à l’est. La réalisation de cette infrastructure a nécessité un budget de 950 millions d’euros. Avec le développement de ces projets, l’AUTO a amélioré la coordination entre les différents modes, en réduisant les temps d’attente. Elle a également mis en place un système de billettique intégrée et un centre opérationnel commun. Pour développer la multimodalité, des parcs relais ont été mis en place à 5 stations de métro et des efforts ont été faits vis-à-vis de l’information destinée aux voyageurs. LES BENEFICES DES NOUVELLES INFRASTRUCTURES PENDANT ET APRES LES JEUX Figure 3 : Tramway Athénien. Pendant les Jeux, l’accent a été mis sur la qualité de service du réseau de transport public. Une flotte de bus a été dédiée à la famille olympique et l’utilisation de certains couloirs leur a exclusivement été réservée. En parallèle, Athènes a mis en place des mesures de gestion du trafic grâce à la vidéosurveillance, à la coordination des feux aux carrefours, à des restrictions du stationnement et de la circulation à proximité des sites olympiques. Les livraisons et la collecte des déchets n’ont été autorisées que la nuit suivant des itinéraires planifiés. Pendant la compétition, les transports collectifs se sont montrés particulièrement performants. Ils ont représenté plus de 73 % des déplacements, soit 1,6 millions de déplacements sur les 2,17 millions au total. Les Jeux Olympiques ont permis aux Grecs de lancer des grandes réformes nécessaires à la politique urbaine dans la capitale. L’évènement a permis de structurer le développement de l’agglomération et de développer une offre de transport collectif nécessaire pour une agglomération de cette taille. Les autorités athéniennes s’étaient inspirées de l’exemple de Barcelone dans ce sens. Pour Zoï CHRISTOFOROU, outre les infrastructures et le système d’intégration tarifaire, les JO ont offert à Athènes une nouvelle culture de la mobilité urbaine. Quelques restrictions de circulation ont été maintenues et certaines lignes express de bus sont restées en circulation. Entre 2003 et 2006, les transports collectifs urbains ont gagné 10 % de part modale pour atteindre plus de 35 % en 2006. Depuis 2004, l’agglomération a continué à développer des projets : extension des voies réservées aux bus, des lignes de tramway dans le centre-ville et de métro vers les banlieues. La flotte de bus a été renouvelée et une réflexion est menée pour mettre en œuvre une tarification zonale. Ainsi, les Jeux ont constitué un catalyseur positif pour la capitale grecque, la rendant plus fonctionnelle pour les citadins, plus attrayante pour les touristes. Le développement d’une offre de transport pour les 16 jours de compétition a permis de structurer une planification urbaine de long terme. Les améliorations, modernisations ou créations d’infrastructures de transports ont créé une nouvelle organisation, qui à son tour a influencé le territoire en modifiant la desserte et l’accessibilité de certaines zones de l’espace athénien, ce qui a abouti à une nouvelle structuration de la région de l’Attique. Ainsi, selon l’écrivain grec Alexis Stamatis, « les Jeux Olympiques sont un cadeau tombé du ciel : une chance unique pour la ville de changer de visage … et les Grecs ne l’ont pas laissée passer ».