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Les lésions cutanéomuqueuses du périnée
chez la femme (1 partie)
Dermatologic vulvar
and perineal diseases
re
■ B. Fatton*
RÉSUMÉ. Les lésions dermatologiques vulvopérinéales de la femme restent trop souvent méconnues des médecins et négligées des patientes, ce qui explique les retards de diagnostic et de prise
en charge. L’inspection est l’une des étapes essentielles du diagnostic : l’aspect, la topographie,
l’étendue, la chronicité ou la couleur des lésions sont les premiers éléments qui orientent le clinicien. Le caractère isolé ou multiple des lésions, l’évolution vers des formes ulcérées ou érosives,
l’aspect des bords, l’association à un prurit ou à des brûlures vulvaires sont des éléments discriminants majeurs. Le doute diagnostique impose la biopsie, qui est indispensable en cas d’érythroplasie, de leucoplasie, de lésion pigmentée isolée ou d’ulcération et d’érosions chroniques. Les
lésions précancéreuses doivent être dépistées et régulièrement suivies. Le lichen scléreux, dont on
connaît la fréquence chez la femme après la ménopause, doit toujours être traité et bénéficier d’une
surveillance à vie.
La vaginose bactérienne est l’affection vaginale la plus fréquente chez la femme. Les nitro-imidazolés restent le traitement de référence, mais les stratégies thérapeutiques qui favorisent la recolonisation vaginale par les lactobacilles sont actuellement très largement employées.
Mots-clés : Lésions vulvaires – Lichen scléreux – Leucoplasie – Vaginose.
ABSTRACT. Dermatological diseases of the vulva and perineum are too often misdiagnosed or unrecognised. These patients are neglected or initially incorrectly treated. Inspection is an essential part
of the diagnostic process: the shape, the morphology, the extent and the colour of the lesion as well
as its mode of onset are the first steps able to help the clinician for accurate diagnostic and management. Following this, the major discriminating factors include whether the lesion is isolated or
multiple, ulcerated or erosive, the features of the margins and whether it is associated with pruritus or a burning sensation of the vulva. Doubt about diagnostic or cases of erythroplasia, leucoplasia, isolated pigmented lesions, chronic ulcerated or erosive lesions require biopsy. Precancerous
lesions must be identified and reviewed regularly. Lichen sclerosus, known to be more frequent in
postmenopausal women, must always be treated and would benefit from lifelong follow-up.
Bacterial vaginosis is the most frequent vaginal disease. Treatment with metronidazole is very effective but use of lactobacilli is also a therapeutic concept.
Keywords: Vulvar diseases – Lichen sclerosus – Leucoplasia – Non specific vaginitis.
a pathologie vulvopérinéale est un motif
fréquent de consultation, et pourtant elle
est souvent “déroutante”, aussi bien pour la
patiente que pour le praticien : à la fois banalisée et méconnue, elle conduit souvent à des
errances diagnostiques et à des prises en charge
inadaptées. Le but de ce travail est d’essayer de
proposer une démarche décisionnelle simple et
L
* Unité d’urogynécologie maternité,
Hôtel-Dieu, CHU de Clermont-Ferrand.
E-mail : [email protected]
12
pertinente. Les pathologies tumorales avérées
seront exclues de notre propos et les mycoses
vaginales, détaillées dans un autre article de ce
dossier, ne seront pas développées ici.
En termes de pathologie dermatologique, l’inspection reste l’un des temps essentiels de l’examen. Ainsi, pour privilégier l’aspect pratique de
l’organigramme, nous avons choisi arbitraire-
Correspondances en pelvi-périnéologie - n° 1, vol. V - janvier/février/mars 2005
Périnée de la femme : maladies de la peau et des muqueuses
ment de séparer les pathologies qui “se voient”
de celles qui “ne se voient pas”, c’est-à-dire
celles pour lesquelles l’examen clinique est normal. Pour en faciliter l’exposé, nous avons choisi
de publier ce dossier en deux volets. Le premier
volet concernera les aspects physiologiques, les
lésions rouges, blanchâtres et pigmentées. Le
second volet, inséré dans un prochain numéro,
traitera des lésions papuleuses, pustuleuses,
érosives ou ulcérées et des lésions des plis. Il
établira une synthèse sur les lésions précancéreuses, dont le dépistage et la surveillance s’imposent. Enfin, il abordera les lésions qui ne se
voient pas et qui déroutent bien souvent le thérapeute.
Si l’inspection et l’analyse séméiologique sont
essentielles, il va sans dire, cependant, que l’interrogatoire est incontournable, précisant :
1. les symptômes associés : prurit, brûlure, douleur, dyspareunie, saignement, leucorrhées, etc. ;
2. la durée d’évolution : lésions aiguës, chroniques ou récidivantes ;
3. les circonstances d’apparition : facteurs
déclenchants éventuels, pathologies concomitantes ;
4. les thérapeutiques antérieures.
Figure 1.
Papillomatose
physiologique.
CE QUI SE VOIT
Figure 2. Les granulations physiologiques de Fordyce.
Figure 3. Aspect classique de candidose
vulvopérinéale.
Le choix d’un classement séméiologique fondé
sur l’aspect des lésions présente l’avantage
d’être précis et didactique, mais il suggère une
simplicité qui n’est que rarement la règle en pratique clinique, les lésions apparaissant le plus
souvent comme complexes et associant plusieurs aspects. La classification proposée, et ce
Figure 4. Vulve érythémateuse avec collerette desquamative en périphérie.
Figure 5. Candidose avec
atteinte des plis génitocruraux.
Correspondances en pelvi-périnéologie - n° 1, vol. V - janvier/février/mars 2005
malgré d’incontestables limites, a néanmoins
l’avantage de définir un organigramme, un
schéma diagnostique et une orientation thérapeutique hiérarchisés et cohérents.
Les aspects physiologiques (1, 2)
Il faut les connaître afin d’éviter des prises en
charge abusives et délétères.
✓ La papillomatose physiologique : elle se présente sous forme de petits papillomes “en doigt
de gant” situés à la face interne des petites lèvres
et au niveau du vestibule (figure 1), papillomes
dont la distribution est classiquement symétrique mais dont le diagnostic différentiel avec
des petits condylomes viraux est parfois difficile
à établir.
✓ Les grains de Fordyce : l’aspect est celui de granulations jaunâtres parfois très nombreuses disséminées sur le bord libre et le versant interne
des petites lèvres (figure 2). Il s’agit de glandes
sébacées ectopiques qui donnent parfois un
aspect irrégulier à l’épithélium ; la mise en tension de celui-ci fait saillir les petites glandes
jaunes et superficielles.
Les lésions rouges
On distingue les lésions avec ou sans vaginite
(1, 2).
✓ Lésions avec vaginite
• Les vulvovaginites infectieuses représentent
la plus habituelle des lésions rouges vulvopérinéales. Classiquement, l’aspect est celui d’un
érythème vulvaire débordant plus ou moins sur
le périnée et dont certaines nuances séméiologiques peuvent permettre d’orienter le diagnostic étiologique, qu’un prélèvement bactériologique confirmera.
– Les candidoses vulvovaginales (figures 3, 4
et 5), qui font l’objet d’un article spécifique dans
ce dossier, ne seront pas détaillées ici. L’érythème
est intense et surtout très prurigineux. La périphérie des lésions prend un aspect “émietté”, de
limites imprécises, avec de fréquentes lésions
cutanées à distance. Enfin, il existe dans les
formes classiques une vaginite intense avec leucorrhées abondantes et dépôts blanchâtres
muqueux. Dans les formes plus frustes, ces
dépôts ne peuvent se localiser qu’au niveau des
sillons interlabiaux. Cette forme classique de la
vulvovaginite candidosique ne constitue pas la
règle : des formes larvées, voire trompeuses
(aspect de lichénification, atteinte périphérique
prépondérante), ou encore l’association à d’autres
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dermatoses peuvent rendre le diagnostic plus
difficile.
– Les vaginites à Gardnerella vaginalis : le terme
de vaginite est impropre car, le plus souvent, il
n’y a pas d’inflammation locale et l’exsudat vaginal est pauvre en polynucléaires (3). Certains
préfèrent donc le terme de vaginose bactérienne : si Gardnerella vaginalis est fréquemment
isolé, d’autres espèces sont aussi incriminées et
fréquemment associées (bactéries anaérobies,
mycoplasmes, etc.). C’est l’affection vaginale la
plus courante chez la femme, deux fois plus fréquente que les mycoses vaginales. La prévalence
est de 5 % dans la population asymptomatique
et de 13 à 31 % chez les femmes enceintes (4).
Les leucorrhées sont abondantes, grisâtres et
malodorantes : ce caractère nauséabond est
d’autant plus prononcé que le milieu vaginal est
alcalinisé, notamment en période préovulatoire
ou prémenstruelle, après les rapports sexuels ou
en cas d’utilisation de savons à pH alcalin (1, 3).
Ces pertes donnent lieu de façon inconstante à
un prurit ou à des brûlures vulvaires modérées
(1). L’examen au spéculum révèle les pertes blanc
grisâtre homogènes et adhérentes aux parois
vaginales, parfois plus fluides au niveau du col.
Le traitement de choix fait appel aux nitro-imidazolés (Flagyl® ou Fasigyne®) par voie orale ou vaginale. Actuellement, cependant, la stratégie thérapeutique évolue et, plutôt que de recourir à
l’antibiothérapie, dont on connaît les effets sur
l’écologie bactérienne, on s’oriente vers des traitements qui ont pour objectif la recolonisation
vaginale par les lactobacilles (acidification du pH
vaginal par l’acide ascorbique, apport local d’une
association lactobacille-estrogènes, apport oral
d’une double souche de lactobacilles)(5).
– Les vaginites à Trichomonas : cette infection se
caractérise par la survenue assez brutale,
quelques semaines après le rapport contaminant, d’une leucorrhée liquide verdâtre et spumeuse associée à une dyspareunie ; peuvent
également survenir des saignements provoqués,
notamment postcoïtaux, voire des brûlures urinaires. Le parasite responsable est le Trichomonas vaginalis, protozoaire flagellé dont le réservoir naturel est le vagin (1, 3). Ainsi, l’inoculation
de titre élevé de Trichomonas dans le vagin de
femmes volontaires saines ne provoque que très
difficilement une infection. La transmission est
presque exclusivement sexuelle (3) ; il est cependant remarquable de constater que, après contamination, 50 % des femmes pourraient guérir
14
spontanément, ce qui rejoint les constations précédentes.
Outre les formes cliniques classiques (leucorrhée
typique, colpite punctiforme, algies pelviennes),
il existe des formes frustes : les formes asymptomatiques (10 à 15 % des cas) sont l’apanage
des femmes âgées ménopausées, le Trichomonas vaginalis étant particulièrement bien toléré
par les muqueuses atrophiques. L’association
avec d’autres maladies sexuellement transmissibles (MST) est possible, et il est alors classique
de traiter la trichomonase en première intention
(3). Le traitement de référence fait appel aux imidazolés, par voie générale ou locale, la voie orale
autorisant la prescription de schémas classiques
ou “minute” en une prise unique.
✓ Lésions sans vaginite
– Les vaginoses bactériennes, et particulièrement les vaginoses à Gardnerella vaginalis, déjà
abordées plus haut.
– Les dermites caustiques, les brûlures thermiques ou les lésions de radiodermite aiguë :
elles sont d’étiologies évidentes à l’interrogatoire. Elles prennent l’aspect d’un érythème aigu,
violent, douloureux, plus ou moins étendu et
œdémateux. Les lésions de toxidermie médicamenteuse, dont la forme classique est l’érythème
pigmenté fixe (1), sont souvent de diagnostic plus
difficile. Néanmoins, les dermites caustiques et
allergiques sont elles aussi parfois de diagnostic délicat, car, dans la majorité des cas, l’atteinte
est secondaire, avec, initialement, une vulvite
d’une autre origine sur laquelle vient se greffer
un incident iatrogène.
– L’eczéma de contact : l’aspect est celui d’un
érythème bien limité, souvent squameux, prurigineux, avec une topographie évocatrice. Le diagnostic de dermite de contact allergique est rare
et, dans la pratique courante, il est souvent posé
par excès. Il faut savoir y penser devant une dermatose vulvaire non améliorée par un traitement
bien conduit.
– L’eczéma atopique : une atteinte vulvaire est
possible, mais habituellement associée à
d’autres localisations cutanées, notamment
dans le cadre d’une dermite atopique généralisée. L’aspect est comparable à celui de l’eczéma
de contact, mais avec une topographie moins
évocatrice.
– Les érythèmes d’origine mécanique : ils sont
plus fréquents chez la femme jeune, dus à l’utilisation prolongée et abusive de produits hygié-
Correspondances en pelvi-périnéologie - n° 1, vol. V - janvier/février/mars 2005
Périnée de la femme : maladies de la peau et des muqueuses
6
.
7.
Figures 6 et 7. Lichénification avec
épaississement et accentuation du
quadrillage de la peau.
Figures 8. Psoriasis
étendu avec localisation
vulvaire.
Figures 9. Psoriasis
anovulvaire.
Figure 10.
Maladie
de Paget
avec aspect
érythémateux.
Figure 11. Lésion
érythémateuse
parsemée
d’îlots de
leucoplasie.
niques et de désinfectants locaux et au port
répété de protège-slips et de vêtements serrés
avec, en corollaire, une disparition du film hydrolipidique local. L’érythème qui en résulte est souvent diffus, fréquemment associé à des brûlures
ou à un prurit local, et il engendre une dyspareunie accentuée par la sécheresse vaginale.
Cette question spécifique de l’hygiène féminine
sera abordée dans un prochain dossier.
– La dermite séborrhéique : elle se présente sous
la forme d’une plaque érythémateuse claire avec
desquamation furfuracée, prédominant au
niveau des zones pileuses (pubis, grandes
lèvres). C’est une dermatose très fréquente, peu
prurigineuse, parfois fissuraire et qui se retrouve
préférentiellement chez les femmes à peau
claire. Sa constatation doit faire rechercher les
autres localisations de cette dermite séborrhéique, tels la racine des ailes du nez, les sourcils ou encore le cuir chevelu.
– La lichénification : elle atteint surtout les versants cutanés externes de la vulve et se révèle
être la conséquence directe et mécanique du
grattage (2). C’est une affection fréquente et
bénigne dont le signe d’appel constant est le prurit. L’aspect classique est celui d’un épaississement cutané, avec une accentuation du quadrillage de la peau et parfois un érythème sec et
autoentretenu (figures 6 et 7). Des lésions de
grattage sont fréquemment associées, et il est
habituel de constater une raréfaction des poils
sur la zone concernée. Des variations de couleur
sont possibles, avec soit un aspect rosé et
brillant, soit un aspect grisâtre, mais l’épaississement cutané est constant. Cette lichénification
peut survenir de façon primitive (prurit vulvaire
idiopathique) ou secondairement à une dermatose vulvaire prurigineuse. En cas de lichénification rouge, la recherche d’une mycose est licite,
éventuellement suivie d’un traitement antimycosique d’épreuve. Dans les autres situations, il
faut faire appel aux corticoïdes locaux jusqu’à
disparition des signes cliniques objectifs. Le
choix initial se portera sur les corticoïdes de
classe I pendant 2 à 3 semaines, puis sur un relais
avec des corticoïdes de classe II.
– Le psoriasis : cette maladie, dont on connaît le
retentissement sur la qualité de vie des patientes
(6), peut prendre des aspects quelque peu différents selon sa localisation. Classiquement, sur
les zones convexes comme les grandes lèvres,
les racines des cuisses ou le pubis, l’aspect est
celui de plaques bien limitées, rouge vernissé,
Correspondances en pelvi-périnéologie - n° 1, vol. V - janvier/février/mars 2005
avec desquamation en “taches de bougie” (7)
(figures 8 et 9). Les signes fonctionnels sont
rares et se résument souvent à un prurit modéré.
L’atteinte exclusive des plis génitocruraux, des
plis interlabiaux, du pli interfessier et du raphé
anovulvaire est décrite sous le nom de forme
“inversée” : dans cette forme, il existe fréquemment une perte de l’aspect squameux due au
frottement et à la macération ; de même, la fissuration au fond du pli est classique, parfois
génératrice de douleurs.
– Les érythroplasies : l’aspect est celui d’une
plaque rouge, brillante, localisée, qui correspond
sur le plan histologique soit à une lésion inflammatoire et bénigne (vestibulite inflammatoire),
soit à une lésion néoplasique (maladie de
Bowen, carcinome épidermoïde ou maladie de
Paget) : ces aspects imposent donc une biopsie.
– La maladie de Paget : la maladie de Paget vulvopérinéale est la plus fréquente des localisations
extramammaires et représenterait à elle seule
65 % des cas. Elle atteint essentiellement les
femmes âgées, après la ménopause. Son diagnostic est le plus souvent tardif en raison, d’une
part, du retard de consultation et, d’autre part,
d’une certaine méconnaissance du corps médical : l’âge habituel du diagnostic se situe en
moyenne entre 65 et 70 ans (1, 2, 8). Le symptôme révélateur est habituellement le prurit chronique, mais le diagnostic est rarement posé à ce
stade, la plaque rouge, squameuse et prurigineuse étant fréquemment confondue avec une
lésion de candidose ou d’eczéma. Le diagnostic
est souvent posé plus tardivement. La lésion est
classiquement unique, érythémateuse (figure 10)
mais non homogène, d’extension progressive, en
“tâche d’huile”. La plaque débute souvent sur la
grande lèvre, davantage sur le versant cutané que
sur le versant muqueux (8), et déborde sur les
régions adjacentes (pubis, périnée, marge anale,
etc.). La plaque est rarement de couleur uniforme
(1) : rouge sombre sur le versant cutané, elle est
parsemée d’îlots blancs de leucoplasie (figure 11)
et d’érosions rouges et suintantes ; sur le versant
muqueux, la couleur est rouge vif mais aussi d’allure bigarrée (2, 8). Ces caractères d’inspection
sont a priori peu spécifiques, ce qui explique les
errances diagnostiques, mais c’est l’aspect globalement “limité” de cette lésion qui doit attirer
l’attention.
La certitude diagnostique est obtenue sur les
données de la biopsie : l’épiderme épaissi
contient des cellules de Paget, volumineuses cel-
15
d o s s i e r
Figure 12.
Maladie
de Bowen.
Figure 13.
Maladie
de Bowen.
Figure 14.
Papulose
bowenoïde
de la marge
anale.
Figure 15.
Vitiligo.
Figure 16.
Aspect dépoli
blanc nacré
typique
de LSV avec
atrophie
vulvaire
associée.
Figure 17.
Aspect de LS.
16
lules mucipares à cytoplasme clair, disposées en
amas ou dispersées de façon diffuse au sein de
toute l’épaisseur de l’épithélium (8). Le traitement de choix est l’exérèse complète passant à
distance de la lésion : cette chirurgie est donc
fréquemment délabrante et nécessite une autoplastie locale ou une greffe cutanée (1, 8). Le pronostic de cette maladie est en corrélation étroite
avec l’existence ou non de cancers sous-jacents
ou associés (1) : ainsi, le pronostic est sombre
pour les patientes porteuses d’un cancer viscéral associé (4 à 35 % des cas) ou d’un adénocarcinome cutané annexiel sous-jacent, alors qu’il
reste bon en cas de localisation strictement cutanée de la maladie, ce qui concerne plus de la moitié des malades (2).
– La papulose bowenoïde et la maladie de
Bowen : la VIN (vulvar intraepithelial neoplasia)
III, ou dysplasie sévère de la vulve, est une pathologie rare et survenant préférentiellement chez
la femme âgée, même si l’incidence chez la
femme jeune semble en augmentation depuis
quelques années. Cette augmentation pourrait
être en rapport avec, d’une part, une meilleure
pertinence diagnostique et, d’autre part, une fréquence accrue des MST, notamment à human
papillomavirus HPV (9). Les facteurs incriminés
dans la dysplasie vulvaire sont le papillomavirus
humain, le tabagisme et le terrain immunodéprimé (9). Si la lésion histologique est identique,
trois maladies doivent être individualisées : la
papulose bowenoïde, la maladie de Bowen et la
dysplasie extensive de la vulve (2, 9), différentiables sur des notions cliniques.
La maladie de Bowen atteint surtout la femme
ménopausée. La lésion initiale est classiquement
une leucoplasie ou, plus rarement, une érythroplasie (1, 2), unifocale et monomorphe (figures 12
et 13).
La papulose bowenoïde touche plus volontiers
la femme jeune et sera décrite dans sa forme
classique dans le chapitre des lésions papuleuses. Cependant, la maladie peut parfois
prendre des aspects bien différents, véritables
placards érythro-leucoplasiques, voire érythroplasiques purs, très trompeuses (1). La lésion est
multifocale et polymorphe (figure 14).
La distinction entre papulose bowenoïde et maladie de Bowen est capitale pour orienter le traitement. Les potentiels évolutifs sont en effet différents selon les cas, avec un risque d’invasion
quasi nul dans la première situation et un risque
de cancer estimé entre 10 et 30 % en cas de maladie de Bowen (2). Le traitement fait appel à la chirurgie et au laser, selon des modalités et des indications variables selon les cas.
Les lésions blanchâtres
✓ La simple dépigmentation du vitiligo (figure 15)
L’aspect morphologique est normal à l’exception
d’une dépigmentation plus ou moins étendue et
symétrique, qui concerne préférentiellement les
zones externes de la vulve.
✓ L’aspect brillant
Le lichen scléreux vulvaire (LSV) : c’est la pathologie vulvaire la plus fréquente en périménopause. Mais le LSV atteint toutes les classes
d’âge à partir des premiers mois de la vie, et les
formes infantiles représentent 10 à 15 % des cas
(10). Le sex-ratio homme/femme serait de 1 sur
10 à 1 sur 15. Le maître symptôme est le prurit,
présent dans près de 75 % des cas ; s’il n’est
pas présent au moment de la consultation, l’interrogatoire retrouve habituellement des antécédents de phases prurigineuses. Ainsi, tout
prurit vulvaire prolongé doit faire évoquer un
LS. Le LS n’atteint jamais le vagin, ce qui permet le diagnostic différentiel avec les autres
dermatoses vulvaires à évolution atrophiante,
au premier rang desquelles on retrouve le lichen
plan.
Des brûlures vulvaires peuvent s’associer ou succéder au prurit, conséquence d’érosions secondaires. Chez les femmes sexuellement actives, la
dyspareunie est habituelle, également liée, le
plus souvent, aux érosions et fissurations, plus
rarement à la sténose orificielle des formes évoluées. Néanmoins, dans 15 à 18 % des cas, le LSV
est une découverte d’examen systématique, et
il reste difficile d’estimer la fréquence des LSV
asymptomatiques (2).
Les formes typiques associent muqueuse de couleur blanc nacré, atrophie des petites lèvres, qui
peuvent disparaître par synéchie avec les
grandes lèvres, et encapuchonnement du clitoris (figures 16 et 17). Les formes évoluées peuvent aboutir à une symphyse complète de l’orifice vulvaire (11).
À côté de ces tableaux assez évocateurs, il existe
des formes atypiques :
• Les formes sans atrophie, qui se limitent à une
blancheur nacrée et brillante, mais qui peuvent
aussi donner un aspect “soufflé” aux petites
lèvres (1, 2, 12).
Correspondances en pelvi-périnéologie - n° 1, vol. V - janvier/février/mars 2005
Périnée de la femme : maladies de la peau et des muqueuses
RÉFÉRENCES
BIBLIOGRAPHIQUES
L’essentiel des notions reprises ici sont
extraites de trois ouvrages de référence
que nous voulons citer tout particulièrement :
✓ Hewitt J, Pelisse M, Paniel B. Maladies de la vulve. Paris : Medsi, 1987.
✓ Lessana-Leibowitch M, De Belilovsky C. Pathologie vulvaire. Ed. laboratoire Janssen-Cilag.
✓ Machet L, Vaillant L. Dermatologie
en gynécologie obstétrique. Paris :
Masson, 2001.
1. Hewitt J, Pelisse M, Paniel B. Maladies de la vulve. Paris : Medsi, 1987.
2. Lessana-Leibowitch M, De Belilovsky C. Pathologie vulvaire. Ed. laboratoire Janssen-Cilag.
3. Quentin R, Lanotte P. Urétrites et
cervicovaginites. In: Machet L, Vaillant
L, eds. Dermatologie en gynécologie
obstétrique. Paris : Masson, 2001 : 295313.
4. Ralph SG, Rutherford AJ, Wilson
JD. Influence of bacterial vaginosis on
conception and miscarriage in the
first trimester: cohort study. Br Med J
1999;319:220-3.
5. Reid G, Bruce AW. Urogenital infections in women: can probiotics help?
Postgrad Med J 2003;79:428-32.
6. Menter A. The effect of psoriasis on
patients’ quality of life and improvements associated with alefacept therapy. J Cutan Med Surg 2004;
8(suppl.2):20-5.
7. Estève E. Psoriasis vulvaire. In:
Machet L, Vaillant L, eds. Dermatologie en gynécologie obstétrique. Paris :
Masson, 2001:255-7.
8. Body G, Perrotin F, De Poncheville
L, Bouquin R. Maladie de Paget de la
vulve. In : Machet L, Vaillant L, eds.
Dermatologie en gynécologie obstétrique. Paris : Masson, 2001:229-34.
Figure 18. Candidose sur LSV.
• Les aspects pigmenté, bulleux, vitiligoïde et
érythémateux, plus rares, sont trompeurs. Lorsqu’un érythème survient sur un lichen scléreux,
c’est sa topographie et ses caractéristiques qui
orientent le diagnostic : une candidose s’associe à un érythème diffus avec plaques rouges
superficielles (figure 18). Il faudra y penser plus
particulièrement chez une patiente qui décrit une
recrudescence du prurit sous traitement corticoïde adapté.
• Les formes hyperplasique et leucoplasique : la
muqueuse prend un aspect plus mat de couleur
ivoire ou jaunâtre et s’épaissit du fait d’une
hyperplasie épithéliale. Cet épaississement
résulte soit d’une lichénification, soit d’une leucoplasie, que de nombreux auteurs considèrent
comme un état précancéreux. Les LS hyperplasiques donnant à la peau un aspect plissé, quadrillé, parfois ponctué de nombreuses lésions de
grattage, donneront lieu à une biopsie s’il y a
doute, surtout en cas de persistance localisée
après traitement. Les lésions leucoplasiques ou
ulcérées suspectes seront biopsiées d’emblée
en plusieurs points, traitées et régulièrement surveillées. Elles siègent préférentiellement au
niveau de la région clitoridienne, des petites
lèvres et de la fourchette vulvaire. L’aspect est
habituellement celui d’une plaque blanche mais
mate, épaisse et bien localisée, ou d’une ulcération unique qu’il faudra “biopsier” sur sa périphérie. On admet que le risque de survenue d’un
cancer sur LSV traité est rare, n’excédant pas
4 % ; cependant, dans 60 % des cancers vulvaires, on retrouve un LSV non traité et mal suivi
(2, 13).
Sur le plan thérapeutique, on retiendra qu’il faut
traiter tous les LS, y compris s’ils sont asymptomatiques. Ce traitement fait appel aux corticoïdes de classe I. Les produits de référence sont
Dermoval® et Betnéval®, qui doivent être prescrits à raison d’une application par jour pendant
3 mois en traitement d’attaque et de 2 applications par semaine en traitement d’entretien. Le
recours aux corticoïdes de classe II ou III est également possible en traitement d’entretien, avec
des fréquences d’application augmentées : 1 jour
sur 2 ou tous les jours en fonction de la classe
choisie (13). Ce traitement est à poursuivre tant
que les symptômes persistent. La corticothérapie est rapidement efficace sur le prurit et fait
disparaître plus lentement les lésions blanchâtres. L’androgénothérapie locale, longtemps
préconisée, est aujourd’hui abandonnée du fait
Correspondances en pelvi-périnéologie - n° 1, vol. V - janvier/février/mars 2005
de son inefficacité et de ses effets indésirables
assez importants (signe de virilisation, voix
rauque, hirsutisme). La chirurgie doit être ciblée,
limitée aux exérèses des lésions suspectes et aux
gestes plastiques telles la vulvopérinéoplastie
ou la libération des brides séquellaires (1, 2, 12).
✓ L’aspect mat
Les formes de LSV avec épaississement épithélial diffus, que nous avons déjà évoquées plus
haut, entrent dans cette catégorie. Le LS hyperplasique prend un aspect blanc plus mat que le
LSV classique, avec une peau plissée, lichénifiée
et dont le quadrillage est plus marqué. La fréquence des lésions érosives de grattage complique encore le diagnostic. Devant ce tableau
clinique, la biopsie s’impose d’autant plus que
l’aspect persiste sous forme plus localisée après
traitement.
Les leucoplasies se présentent souvent sous la
forme d’une plaque blanche, épaisse, mate et
localisée, et imposent une biopsie : le terme de
leucoplasie est clinique et correspond histologiquement à une hyperplasie épithéliale qui peut
être soit bénigne, soit maligne. Ainsi, l’analyse
histologique différencie les formes avec atypies
cellulaires (maladie de Bowen, carcinome épidermoïde et maladie de Paget) de celles sans atypies (lichen plan localisé, condylomes).
Les lésions pigmentées
Elles sont le plus souvent asymptomatiques
(84 %), et cette notion plaide pour un examen
vulvaire systématique lors d’un bilan gynécologique de routine (2). Le meilleur élément d’orientation clinique reste le nombre de lésions : nous
reprendrons la classification proposée par le
département dermatologique de l’hôpital Cochin
(2). A priori, l’existence de lésions multiples est
un critère rassurant. La survenue des lésions sur
dermatose existante ou de façon isolée est aussi
un critère d’orientation diagnostique important.
De manière générale, on retiendra que l’analyse
histologique des lésions pigmentées est de règle
pour établir le diagnostic, toujours très difficile
par le seul examen clinique, et pour éliminer un
très redouté mélanome.
✓ Les lésions pigmentées multiples : la biopsie
permettra d’affirmer la nature de la lésion (2).
• Mélanose ou lentigos : c’est la plus fréquente
des pigmentations vulvaires (36 % des cas). Elle
se présente sous la forme de petites nappes pig-
17
d o s s i e r
Figure 19.
Condylomes
vulvaires.
Figure 20.
Condylomes
anovulvaires.
Figure 21.
Acanthosis
nigricans.
Figure 22.
Aspect
typique
d’angiokératomes.
Figure 23.
Mélanome
vulvaire.
Figure 24.
Verrue
séborrhéique.
Figure 25.
Verrue de la
grande lèvre.
18
mentées formées de petites macules plates, parfois confluentes, de pigmentation non homogène.
• Hypermélanose endocrinienne : la pigmentation de la zone génitale peut y être prédominante. Parmi les maladies endocriniennes en
cause, c’est la maladie d’Addison qui donne le
tableau de plis caractéristique. La localisation
est essentiellement cutanée, mais elle peut
déborder sur la muqueuse des petites lèvres.
• Dermatoses pigmentogènes : on citera surtout
le lichen scléreux, le lichen plan, la toxidermie
médicamenteuse ou la simple pigmentation
post-inflammatoire (2).
• Lésions HPV induites : c’est dans ce cadre nosologique que l’on retrouve la papulose bowenoïde
déjà évoquée plus haut et les condylomes. Les
condylomes peuvent être de trois types : acuminés (figures 19 et 20), papuleux ou plans. Les
condylomes acuminés en classique “crête de
coq” se présentent comme des lésions exophytiques porteuses de verrucosités kératosiques
en surface (1, 2). Les condylomes papuleux se
présentent comme des papules de couleur
rouge, isolées ou groupées en nappe. Les condylomes plans ont l’aspect de macules rosées, isolées ou concentrées. La grande fréquence des
condylomes chez les femmes jeunes impose un
dépistage et une surveillance régulière en cas de
diagnostic positif. La localisation cervicale, avec
un risque accru de dégénérescence sous forme
de néoplasie intraépithéliale, pose les problèmes
les plus importants ; les localisations vulvaires
sont un point d’appel essentiel pour la détection
des lésions du col et incitent à une surveillance
régulière.
• Acanthosis nigricans : l’hypermélanose est
diffuse, présentant une surface finement verruqueuse (figure 21). Son diagnostic doit se
prolonger par la recherche d’une néoplasie profonde, mais, à côté de l’acanthosis nigricans
paranéoplasique, il existe aussi des formes
bénignes, d’origine médicamenteuse ou endocrinienne le plus souvent.
• Pigmentation ethnique : comme on peut aussi
le constater dans la cavité buccale, certaines
macules pigmentaires multiples, congénitales, à
localisation vulvaire, peuvent être d’origine
raciale et familiale.
• Les angiokératomes (figure 22) : l’aspect est
celui d’excroissances rouges, violacées, d’origine vasculaire, et que d’aucuns considèrent
comme quasi physiologiques.
✓ Lésion pigmentée unique : l’exérèse limitée
d’emblée est la règle, car l’orientation clinique
est difficile.
• Lésion mélanique
– Naevus : l’aspect est celui d’une lésion brune,
légèrement papuleuse et bien limitée. Il faut
savoir que les naevus vulvaires ne risquent pas
plus de se transformer en mélanomes que les
naevus cutanés et que, à ce titre, il est inutile
d’alarmer la patiente après l’exérèse (2).
– Lentigo : il se présente sous la forme d’une
tache de pigmentation homogène, bien limitée,
impossible à distinguer d’un mélanome débutant ou d’un naevus.
– Mélanome (figure 23) : le diagnostic de mélanome vulvaire est difficile, car les critères diagnostiques classiques du mélanome font défaut.
On retiendra donc la nécessité d’un dépistage
systématique et l’exérèse de principe dès la
lésion. On différencie essentiellement deux
aspects cliniques, identiques à ceux de la peau
décrits par Clark : le mélanome à extension
superficielle ou superficial spreading melanoma
(SSM) et les mélanomes nodulaires, à extension
verticale d’emblée, dont le pronostic est plus
sombre (2, 14). Le lentigo malin, ou mélanome
sur mélanose précancéreuse de Dubreuilh
(LMM), serait plus rare.
La fréquence respective des différentes formes
histologiques varie selon les études : les formes
SSM seraient les plus fréquentes, avec des taux
atteignant 50 à 60 %, mais certaines séries font
état de chiffres nettement inférieurs, de l’ordre
de 4 % (14). Les formes nodulaires représenteraient 15 à 30 % des cas. Enfin, les formes lentigineuses, exceptionnelles pour certains,
seraient majoritaires dans certaines séries (1,
14, 15).
Le SSM se présente sous l’aspect d’une plaque
pigmentée à bords irréguliers. La teinte est parfois bleutée au début, puis polychrome, non
homogène. Après une phase horizontale de
croissance qui peut s’étaler sur plusieurs mois,
voire plusieures années, le SSM entame sa phase
d’invasion verticale.
Le mélanome nodulaire se présente comme une
tumeur noire, saillante, à contours mal définis,
parfois ulcérée et saignante. Les formes achromiques existent, mais elles sont exceptionnelles
au niveau vulvaire.
• Lésion non mélanique
– Verrue séborrhéique (figures 24 et 25) : elle
peut siéger n’importe où. La lésion est brune ou
Correspondances en pelvi-périnéologie - n° 1, vol. V - janvier/février/mars 2005
Périnée de la femme : maladies de la peau et des muqueuses
9. Body G, Perrotin F, De Poncheville
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noire, bien limitée, saillante, caractéristique lorsqu’elle parsemée de cônes cornés, mais, lorsqu’elle s’est développée sur le versant muqueux
de la vulve, la couche cornée épaisse disparaît,
ce qui rend le diagnostic plus difficile.
– Angiome thrombosé : la lésion est plutôt bleutée, dépressible, saignant facilement au contact.
– Kyste muqueux pigmenté : son aspect est celui
d’un nodule superficiel, lisse, de consistance
rénitente (contenu liquidien), dont le siège est
toujours vestibulaire.
– Épithélioma basocellulaire : il peut se présenter sous une forme pigmentée, pseudo-mélanome volontiers ulcéré (1).
CONCLUSION
Au terme de ce premier chapitre, il importe de
retenir que, devant toute lésion vulvopérinéale,
un interrogatoire complet, puis une inspection
rigoureuse s’imposent. Plusieurs critères seront
systématiquement évalués : topographie précise, caractère unique ou multiple des lésions,
coloration, aspect monomorphe ou polymorphe,
bords nets ou imprécis, essaimage à distance,
évolution aiguë, chronique ou récidivante, symptomatologie associée (prurit, douleur, leucorrhées, desquamation, etc.). Cette démarche doit
orienter le diagnostic et faire poser les éventuelles indications d’explorations complémentaires (analyse histologique, prélèvements vaginaux, typage viral, etc.).
D’une manière simplifiée, on retiendra :
• qu’il ne faut pas négliger, malgré son caractère
habituellement silencieux, la vaginose bactérienne, qui peut induire plusieurs types de com-
plications (récidives, risque majoré d’infections
urinaires et/ou pelviennes, plus grande vulnérabilité au VIH [16]). Chez la femme enceinte, son
implication est reconnue dans certaines complications comme les fausses couches du premier trimestre, la prématurité ou encore les
endométrites du post-partum (17). Sur le plan
thérapeutique, à côté de la classique antibiothérapie, l’évolution actuelle est de se tourner
vers les stratégies dites “probiotiques”, dont le
principe est de restaurer ou de maintenir la flore
vaginale ;
• qu’il faut “biopsier” :
– les lésions brunes isolées ;
– les lésions leucoplasiques ;
– les lésions érythroplasiques ;
– les lésions érosives ou ulcérées chroniques (qui
seront détaillées dans un prochain dossier).
Les carcinomes épidermoïdes de la vulve surviennent dans 90 % des cas sur dermatose préexistante, essentiellement sur lichen scléreux
hyperplasique (deux tiers des cas) ou sur maladie de Bowen (un tiers des cas) (2) : ainsi, le
lichen scléreux, dont on connaît la grande fréquence chez la femme après la ménopause, doit
être traité même dans ces formes peu symptomatiques ou asymptomatiques et doit bénéficier
d’un suivi prolongé, attitude qui reste la
meilleure garantie contre une éventuelle évolution péjorative.
■
Crédit photo : nous remercions tout particulièrement pour
leur aide à l’illustration de cet article les Drs Monique
Pelisse, du groupe hospitalier Cochin-Tarnier et Jacqueline
Raynal, de la maternité de l’Hôtel-Dieu, au CHU de ClermontFerrand, ainsi que le site Internet d’iconographie de l’université Paris-V : www.uvp5.univ-paris5.fr/UV_MED/AC
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Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés réservés pour tous pays.
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Correspondances en pelvi-périnéologie - n° 1, vol. V - janvier/février/mars 2005
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