Ponere lectos, deos exponere. Le lectisterne, une image du

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Ponere lectos, deos exponere. Le lectisterne, une image du
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PONERE LECTOS, DEOS EXPONERE.
LE LECTISTERNE, UNE IMAGE DU PANTHÉON ROMAIN ?
Le terme d’image prend une signification particulière lorsqu’on envisage la sphère du
sacré. L’image du dieu ne s’impose pas d’elle-même dans une religion originellement
aniconique, telle du moins que la décrit Varron en ses Antiquités divines :
Les anciens Romains honorèrent pendant plus de cent soixante-dix ans des dieux
qui n’avaient pas de statues […]. Ceux qui, les premiers, érigèrent des statues divines,
firent disparaître la crainte de leurs cités et y introduisirent l’erreur 1.
Le rite du lectisterne, qui consiste à dresser en plein air des lits d’apparat (lectos sternere) autour d’un festin offert aux dieux, illustre, mieux que toute autre cérémonie,
le triomphe de l’anthropomorphisme romain. Aussi exceptionnel qu’éphémère (du
moins sous sa forme collective 2), le lectisterne bouscule les usages de la tradition
nationale et renouvelle le culte de divinités jusque-là accoutumées à la pénombre des
sanctuaires. Médiatrice entre l’homme et la puissance sacrée à laquelle elle prête ses
traits, l’image divine cristallise toutes les espérances en même temps que toutes les
dévotions d’un peuple qui, pour la première fois, offre l’hospitalité aux habitants du
ciel. Une démarche paradoxale, dans la mesure où, si le banquet revient à traiter les
dieux en hommes 3, le rite placatoire qu’il recouvre, lui, ne fait que réaffirmer leur
incontestable supériorité 4. Sans prétendre renouveler une question déjà largement
1.
2.
3.
4.
M. Terentius Varro. Antiquitates Rerum Diuinarum, B. Cardauns (éd.), Wiesbaden, Franz Steiner, 1976,
Tl. I, p. 22, 18 (59) : […] antiquos Romanos plus annos centum et septuaginta deos sine simulacro coluisse
[…] qui primi simulacra deorum populis posuerunt, eos ciuitatibus suis et metum dempsisse et errorem addidisse (repris chez Aug., ciu. 4, 31, qui ajoute, à propos de Varron : prudenter existimans deos facile posse in
simulacrorum stoliditate contemni / « jugeant avec bon sens qu’à travers la stupidité de ces statues, les dieux
peuvent être facilement méprisés »). Sur ces conceptions, voir Y. Lehmann, Varron théologien et philosophe
romain, Bruxelles, Latomus (Collection Latomus ; 237), 1997, p. 186 sq.
Pour une approche historique de la question, voir S. Estienne, « Vie et mort d’un rituel romain. Le lectisterne », Hypothèses, 1, 1997, p. 15-21.
Ce que lui reproche Augustin (ciu. 3, 17 : Lecti autem sternebantur in honorem deorum, unde hoc sacrum uel
potius sacrilegium nomen accepit / « on dressait toutefois des lits en l’honneur des dieux, de là ce nom sacré
ou plutôt sacrilège »). Voir L. Bruit, « Les dieux aux festins des mortels : théoxénies et xeniai », in Entre
hommes et dieux. Le convive, le héros, le prophète, A.-F. Laurens (éd.), Paris, Les Belles Lettres (Annales littéraires de l’université de Besançon), 1989, p. 20, qui évoque le passage d’une relation verticale avec le dieu
(sacrifice) à un « schéma horizontal ».
Comme le montre P. Veyne dans « Inviter les dieux, sacrifier, banqueter. Quelques nuances de la religiosité gréco-romaine », Annales, Histoire, Sciences sociales, 55, 2000, p. 14 sq., « l’anthropomorphisme n’abolit
Roma illustrata, P. Fleury, O. Desbordes (dir.), Caen, PUC, 2008, p. 143-156
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étudiée 5, nous voudrions nous attacher ici aux « images » du lectisterne, un terme
que nous entendrons dans toute sa polysémie. Quelle représentation du sacré donnent aux hommes ces dieux anthropomorphes ? Quelles sont les divinités conviées au
festin et quelles motivations fonctionnelles justifient leur mise en scène ? Dans quelle
mesure, enfin, le spectacle de ces figures individualisées offre-t-il, à lui seul, une image
du panthéon romain ?
Le festin solennel fait son apparition en 399 avant J.-C., dans une Rome accablée
et démunie. Comme le raconte Tite-Live, à la suite de variations climatiques brutales,
une saison chaude et malsaine avait succédé à un hiver très rigoureux et, avec elle, une
redoutable pestilentia que rien ne parvenait à faire cesser 6. Voyant en ce terrible fléau
l’expression de la colère divine, la cité s’en remit à l’expérience de ses prêtres : s’il est
probable que les pontifes furent appelés dans un premier temps à se prononcer, ceuxci durent avouer leur incompétence à endiguer le mal, et c’est aux duumvirs, gardiens
des Livres Sibyllins, que le Sénat fut contraint de recourir. Après avoir compulsé leur
recueil, les interprètes de la Sibylle préconisèrent alors la mise en œuvre d’un cérémonial jusque-là sans précédent :
Les duumvirs préposés aux fêtes religieuses firent un lectisterne pour la première fois
dans la ville de Rome : pendant huit jours, ils apaisèrent Apollon et Latone, Diane et
Hercule, Mercure et Neptune en leur dressant trois lits aussi somptueux qu’on le
pouvait alors. Les particuliers célébrèrent aussi cette fête. Dans la ville entière, les
portes des maisons étaient ouvertes et on permettait à tous sans distinction le libre
5.
5.
6.
nullement la supériorité des Immortels ». Lors du lectisterne, les dieux prennent l’apparence des hommes,
ils ne s’en rapprochent pas : il n’y a pas de communion entre hommes et dieux.
Nous renvoyons ici à la bibliographie : G. Wissowa, RE, XII, 1, col. 1108-1115, s. v. « Lectisternium » ; A. BouchéLeclercq, DA, III, 2, p. 1006-1012, s. v. « Lectisternium » ; J. Gagé, Apollon Romain. Essai sur le culte d’Apollon
et le développement du ritus Graecus à Rome, des origines à Auguste, Paris, De Boccard (Bibliothèque des
Écoles françaises d’Athènes et de Rome ; 182), 1955, p. 168-179, ainsi que de nombreuses études particulières :
F. Robiou, « Recherches sur l’origine des lectisternes », RA, 15, 1867, p. 403-415 ; O. Wackermann, Über das
Lectisternium, Königliches Gymnasium zu Hanau, 1888, p. 1-28 ; C. Pascal, « De lectisterniis apud Romanos », RFIC, 22, 1894, p. 272-279 ; J. Van Ooteghem, « Lectisterne et supplication », LEC, 32, 1964, p. 390-395 ;
B. Combet-Farnoux, Mercure romain. Le culte public de Mercure et la fonction mercantile à Rome de la
République archaïque à l’époque augustéenne, Rome, École française de Rome (Bibliothèque des Écoles
françaises d’Athènes et de Rome ; 238), 1980, p. 328 sq. et 394 sq. ; J.-P. Cèbe, « Considérations sur le lectisterne », in Hommage à J. Granarolo : philologie, littératures et histoire anciennes, R. Braun (éd.), Paris,
Les Belles Lettres (Annales de la Faculté des Lettres et Sciences humaines de Nice ; 50), 1985, p. 205-221 ;
M. Nouilhan, « Les lectisternes républicains », in Entre hommes et dieux…, p. 27-40 ; R. Carré, « Quand la
cité reçoit des dieux : les lectisternes à Rome au IVe siècle avant J.-C. », in Mythes et représentations de l’hospitalité, A. Montandon (éd.), Clermont-Ferrand, Presses universitaires Blaise Pascal, 1999, p. 67-102, et
maintenant l’excellent article de P. Veyne, « Inviter les dieux… », p. 3-42. Voir aussi M. Serres, Rome. Le
livre des fondations, Paris, Grasset, 1983, p. 195-230.
5, 13, 4 : Tristem hiemem siue ex intemperie caeli, raptim mutatione in contrarium facta, siue alia qua de
causa grauis pestilensque omnibus animalibus aestas excepit. Voir aussi Dion. Hal., 12, 8, 1 : jEn JRwvmh/
ceimw``no" genomevnou biaivou, ejvnqa hJ ejlacivsth ciw;n katenivfbh, oujk ejlavttwn h` n eJpta; podw``n to; bavqo" /
« Il y eut à Rome une terrible tempête, et là où il tomba de la neige, elle n’eut pas moins de sept pieds
d’épaisseur ». À la différence de Tite-Live, Denys évoque aussi la disette occasionnée par ce froid extrême,
alors que les pâturages et les arbres fruitiers sont gelés (12, 8, 2-3).
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usage de tout ce qu’on avait ; qu’on les connût ou non, on recevait indistinctement
les étrangers comme hôtes ; même avec ses ennemis, on s’entretenait avec douceur et
bienveillance ; querelles et procès faisaient trêve ; on ôta même aux prisonniers leurs
chaînes pour la circonstance, après quoi on se fit scrupule de remettre aux fers des
hommes envers lequels les dieux s’étaient montrés ainsi secourables 7.
Alors que, précisément, le dieu, à travers sa statue, échappe généralement aux
regards des mortels, les commensaux du lectisterne s’exhibent à la vue d’un peuple en
liesse. Parallèlement aux festivités du banquet divin qu’ils semblent démultiplier à
l’infini, des rites d’hospitalité, de partage et de fraternité joyeuse ont lieu dans toutes
les demeures aux portes grandes ouvertes. Banquet des hommes, banquet des dieux :
si le lectisterne n’est pas (comme on le dit parfois) un festin public – dans la mesure
où les prêtres et les sénateurs n’y prennent aucune part 8 – mais un festin en public, il
instaure néanmoins un exceptionnel climat de concorde entre les hommes et les
dieux de la cité. Concordia ou oJmovnoia, il ne nous appartient pas ici de développer
davantage ces aspects 9 et nous nous bornerons à remarquer le caractère spectaculaire
et convivial de cette cérémonie, en totale rupture avec les rites nationaux. Loin de
ménager les deniers publics, les gardiens des Livres Sibyllins n’hésitaient pas à recourir aux cérémonials les plus dispendieux au nom de la placatio deorum 10, et l’appréciation de Tite-Live – quam amplissime tum apparari poterat – suggère toute l’ampleur
que dut revêtir la cérémonie, sans rapport aucun avec la simplicité austère des rites
traditionnels. Le caractère novateur du lectisterne tient aussi à la charge émotionnelle
qu’il comporte et à la participation de toute la population, appelée à contempler les
dieux au banquet et à festoyer elle-même, en privé. Il semble bien qu’il faille reconnaître dans tous ces éléments l’influence de la religiosité grecque dont les duumvirs et
surtout leurs successeurs, les décemvirs, surent teinter, dès le IVe siècle avant notre
7. 5, 13, 6-8 : Duumuiri sacris faciundis, lectisternio tunc primum in urbe Romana facto, per dies octo Apollinem
Latonamque et Dianam, Herculem, Mercurium atque Neptunum tribus quam amplissime tum apparari
poterat stratis lectis placauere. Priuatim quoque id sacrum celebratum est. Tota urbe patentibus ianuis promiscuoque usu rerum omnium in propatulo posito, notos ignotosque passim aduenas in hospitium ductos
ferunt, et cum inimicis quoque benigne ac comiter sermones habitos ; iurgiis ac litibus temperatum ; uinctis
quoque dempta in eos dies uincula ; religioni deinde fuisse quibus eam opem di tulissent uinciri.
8. À la différence de l’epulum Iouis, lors duquel les sénateurs banquetaient au Capitole (Liv. 38, 57, 5 ; Gell.
12, 8, 2 ; Dio Cass. 39, 30, 4 ; 48, 52, 2). Sur la distinction entre repas des hommes et repas des dieux, cf.
P. Veyne, « Inviter les dieux… », p. 9-10.
9. Sur le banquet sacré, on se référera aux travaux de P. Schmitt-Pantel : La Cité au banquet. Histoire des repas
publics dans les cités grecques, Rome, École française de Rome (Collection de l’École française de Rome ;
157), 1992 et, pour le domaine romain, à ceux de J. Scheid, entre autres : « Sacrifice et banquet à Rome.
Quelques problèmes », MEFRA, 97, 1985, p. 193-206. Il faudrait également souligner la probable influence
du lectisterne sur le rituel des Saturnales, envisagée récemment par C. Guittard, « Les Saturnales à Rome :
du Mythe de l’Âge d’Or au banquet de décembre », Pallas, 61, 2003, p. 219-236. Voir aussi R.M. Ogilvie,
A Commentary on Livy, 1-5, Oxford, Clarendon Press, 1965, p. 357 sq.
10. Le rituel, plus élaboré encore, de la procuration de l’androgyne en est sans doute le meilleur exemple, avec
son gracieux cortège de vingt-sept jeunes filles chantant l’hymne sacré et accompagnant, depuis le temple
d’Apollon jusqu’à celui de l’Aventin, la procession grandiose venue apaiser Junon (Liv. 27, 37). Voir notamment J. Champeaux, « Pontifes, haruspices et décemvirs : l’expiation des prodiges de 207 », REL, 74, 1997,
p. 67-91.
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ère, les pratiques cultuelles. Sous cette coloration hellénisante, le lectisterne s’inspire
sans doute des théoxénies, banquets divins célébrés notamment à Pellène et à Delphes,
au Ve siècle avant notre ère 11, et, plus généralement, des rites d’hospitalité de la religion
grecque 12. Probablement nourri d’influences étrusques 13 autant que d’éléments du
substrat indigène 14, le lectisterne s’oppose en tout cas par sa forme même aux usages
de la plus ancienne religion de Rome.
Si, comme le rappelle volontiers Varron, l’archaïsme romain ne connaissait pas
les images divines, c’est des Grecs et des Étrusques que la cité tenait cet anthropomorphisme qui, selon l’antiquaire 15, devait pervertir le scrupule religieux 16. Une tendance
qui s’accentuera sous l’Empire, lorsque les sanctuaires s’empliront de statues au point
de devenir de véritables musées 17. Là est sans doute l’une des manifestations les plus
11. Les théoxénies delphiques étaient célébrées en l’honneur d’Apollon (cf. Schol. Pind., Ol., 3 ; Paus. 7, 27, 4 ;
Athen. 9, 372 a). Voir ici F. Deneken, De theoxeniis, diss. Berlin, 1881 ; F. Pfister, s. v. « Theoxenia », RE, XII,
A, col. 2256-2258 ; J.-M. Dentzer, Le Motif du banquet couché dans le Proche-Orient et le monde grec du VIIe
au IVe siècle avant J.-C., Rome, École française de Rome (Bibliothèque des Écoles françaises d’Athènes et
de Rome ; 246), 1982, p. 515. En second lieu, cf. J. Gagé, Apollon romain…, p. 173-177 ; J. Scheid, « Nouveau
rite et nouvelle piété. Réflexions sur le ritus Graecus », in Ansichten griechischer Rituale für W. Burkert.
Geburtstags-Symposium für Walter Burkert, Castelen bei Nasel (15 bis 18 März 1966), F. Graf (éd.), Stuttgart
– Leipzig, B.G. Teubner, 1998, p. 176.
12. Sur ce point, voir D. Gill, « Trapezomata : a neglected aspect of Greek sacrifice », Harvard Theological
Review, 67, 1974, p. 117-137 ; M.H. Jameson, « Theoxenia », in Ancient Greek Cult Practice from the Epigraphical Evidence (Proceedings of the Second International Seminar on Ancient Greek Cult organized by the
Swedish Institute at Athens, 22-24 November 1991), R. Hägg (éd.), Stockholm, Paul Aströms Förlag (Acta
Instituti Atheniensis Regni Sueciae, Series in-8°), 1994, p. 35-57 ; P. Veyne, « Inviter les dieux… », p. 4-9.
13. La fresque de la Tomba del Letto Funebre, à Tarquinies, représente une scène de banquet dont les lits
entourent un pulvinar central sur lequel reposent deux objets de forme ovale, symbolisant sans doute les
dieux ainsi honorés ; cf. F. Robiou, « Recherches sur l’origine des lectisternes », p. 408 ; F. Messerschmidt,
« Untersuchungen zur tomba del letto funebre in Tarquinia », Studi Etruschi, 3, 1929, p. 519-524. On notera
par ailleurs que les scènes de banquets représentées dans la céramique attique et corinthienne font plutôt
intervenir des hommes et que, lorsque les femmes y figurent, elles occupent souvent une place secondaire
(voir P. Schmitt-Pantel, « Le banquet et le “genre” sur les images grecques, propos sur les compagnes et les
compagnons », Pallas, 61, 2003, Symposium. Banquet et représentation en Grèce et à Rome, p. 83-95). La
présence conjointe d’un dieu et d’une déesse sur un même lit apparaît bien plus conforme aux coutumes
étrusques dont témoignent les célèbres sarcophages des musées du Louvre et de la Villa Giulia.
14. Voir notamment A. Bouché-Leclercq, « Lectisternium », p. 1007 sq. On ne manquera pas de rapprocher le
lectisterne de la daps, cette offrande de viande et de vin dont le paysan régalait Jupiter avant les semailles
(cf. Caton, agr. 132 ; Fest. 59, 48 L ; Ov., fast. 5, 511-518). À l’évidence, le cérémonial du lectisterne était mixte
(G. Dumézil, La Religion romaine archaïque2, Paris, Payot (Bibliothèque historique), 1987, p. 558 sq. ; J.-P. Cèbe,
« Considérations sur le lectisterne », p. 209 et note 34).
15. Relayé par W. Warde Fowler, The Religious Experience of the Roman People from the Earliest Times to the
Age of Augustus, Londres, Macmillan (The Gifford Lectures), 1911, p. 264 sq., qui évoque « the miserable
images of Graeco-Roman full-blown gods and goddesses reclining on their couches and appearing to partake
of dinner like a human citizen ».
16. M. Terentius Varro…, p. 31, 38 (37) : (regnante Numa) nondum tamen aut simulacris aut templis res diuina
apud Romanos constabat. […] nondum enim ingenia Graecorum atque Tuscorum fingendis simulacris urbem
inundauerant. Les premières statues sont faites d’argile ou de bois, et il n’y aura pas de statues de bronze
à Rome avant le second quart du Ve siècle avant J.-C. (cf. Plin., nat. 34, 15).
17. P. Gros, Aurea templa. Recherches sur l’architecture de Rome à l’époque d’Auguste, Rome, École française de
Rome (Bibliothèque des Écoles françaises d’Athènes et de Rome ; 231), 1976, p. 157 sq.
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exemplaires de l’hellénisation religieuse : à ces simulacra d’apparence humaine correspond une conception nouvelle du divin 18. C’est désormais un dieu qui se laisse
voir et, parfois, toucher, alors qu’à l’origine, nul, en dehors des prêtres et des aeditui,
n’était admis à franchir le seuil de l’édifice et à pénétrer dans la cella, l’étroite chapelle
où se dressait la statue de culte 19. On comprend alors quel bouleversement profond
opérait dans les consciences le spectacle du lectisterne, où les dieux traités en hôtes
recevaient l’offrande d’un festin. Il n’est guère aisé de savoir sous quelle forme se présentaient les commensaux divins, et l’on peut imaginer des statues portatives, en bois
ou en cire, à l’effigie de la statue cultuelle. À moins qu’il ne faille prendre à la lettre
Paul Diacre, lorsqu’il définit les struppi comme de modestes faisceaux d’herbe tressée
qui auraient tenu lieu de chef à chacune des divinités : « On donne le nom de struppi
aux faisceaux d’herbes que l’on dispose sur les pulvinars pour représenter la tête de
chaque dieu » 20. En rapprochant cette formule d’une autre glose de Festus où le struppus est bel et bien présenté comme une sorte de couronne 21, on serait tenté de voir
18. Sur la place des statues cultuelles, voir maintenant T.S. Scheer, Die Gottheit und ihr Bild. Untersuchungen
zur Funktion griechischer Kultbilder in Religion und Politik, Munich, C.H. Beck (Zetemata ; 105), 2000, et
S. Estienne, Les Dieux dans la Ville. Recherches sur les statues de dieux dans l’espace et les rites publics de
Rome, d’Auguste à Sévère Alexandre, thèse, Université Panthéon-Sorbonne – Paris I, 2000 (dactyl.), à paraître à Rome dans la Bibliothèque des Écoles françaises d’Athènes et de Rome.
19. Sen., epist. 41, 1 : Non sunt ad caelum eleuandae manus nec exorandus aedituus ut nos ad aurem simulacri,
quasi magis exaudiri possimus, admittat / « Rien ne sert de lever les mains au ciel, ni de supplier le gardien
du temple pour qu’il nous permette d’approcher l’oreille de la statue, comme pour être plus facilement
exaucés ». L’interdit sera pour ainsi dire levé à l’époque impériale et, dans le cadre de la piété individuelle,
on pourra pénétrer à l’intérieur du temple pour s’y asseoir et implorer les dieux ; voir P. Veyne, « La nouvelle piété sous l’Empire : s’asseoir auprès des dieux, fréquenter les temples », RPh, 63, 1989, p. 175-194 ;
S. Estienne, « Les “dévots” du Capitole. Le “culte des images” dans la Rome impériale, entre rites et superstition », MEFRA, 113, 2001, p. 189-210.
20. Paul. Fest. 472, 15 L : struppi uocantur in puluinaribus fasciculi de uerbenis facti, qui pro deorum capitibus
ponantur. Cf. J. Gagé, Apollon romain…, p. 175-176 ; L.R. Taylor, « The sellisternium and the theatrical
pompa », CPh, 30, 1935, p. 128-129 ; B. Gladigow, « Zur Iconographie und Pragmatik römischer Kultbilder »,
in Iconologia Sacra. Mythos, Bildkunst und Dichtung in der Religions- und Sozialgeschichte Alteuropas (Festschrift für Karl Hauck zum 75. Geburtstag), H. Keller, N. Staubach (éd.), Berlin, de Gruyter (Arbeiten zur
Frühmittelalterforschung ; 23), 1994, p. 22. Sur les représentations symboliques de la divinité, voir notamment D. Metzler, « Anikonische Darstellungen », Visible Religion, 4-5, 1985-1986, p. 96-113 : l’auteur recense
(p. 100 sq.) les différents objets pouvant matérialiser le dieu, et rien ici ne semble faire référence aux struppi.
21. Fest., 410, 6 L : stroppus est […] quod sacerdotes pro insigni habent in capite. Quidam coronam esse dicunt
aut quod pro corona insigne in caput inponatur […] et a Tusculanis quod in puluinari inponatur Castoris
struppum uocari / « On appelle “stroppus” […] ce que les prêtres portent sur la tête en guise d’insigne.
Certains disent qu’il s’agit d’une couronne ou de l’insigne que l’on pose sur la tête en guise de couronne
[…], et les habitants de Tusculum donnent le nom de “stroppus” à l’objet que l’on pose sur le pulvinar de
Castor ». Voir aussi Plin., nat. 21, 3 : Tenuioribus utebantur antiqui stroppos appellantes, unde nata strophiola /
« Les Anciens se servaient de couronnes minces, qu’ils appelaient “stroppes”, d’où vient le nom des strophioles » (trad. J. André, CUF, 1969). On désignait par le terme uerbenae des végétaux odoriférants, à
feuillage persistant, que les Anciens identifiaient tantôt à l’olivier, tantôt au romarin (Serv., ecl. 8, 65) ; elles
servaient notamment à couronner les fétiaux et à orner les autels. Cf. B. Liou, Une lecture religieuse de TiteLive I : culte, rites, croyances de la Rome archaïque, Paris, Klincksieck (Études et commentaires ; 105), 1998,
p. 206-207 ; G. Guillaume-Coirier, « L’ornementation végétale de l’autel dans le déroulement du sacrifice
romain », in Mélanges Carl Deroux, IV, Bruxelles, Latomus (Collection Latomus ; 277), 2003, p. 403-412.
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chez Paul Diacre une expression tronquée et de lire plutôt qui pro <coronis in> deorum capitibus ponebantur, « qui sont posés sur la tête des dieux en guise de couronnes ». Il faut noter que les deorum capita sont mentionnés chez Tite-Live, qui raconte
qu’en 179 avant J.-C., lors d’un lectisterne permanent, « les têtes des dieux, qui se
trouvaient sur les lits, s’étaient détournées » 22. Deorum capita quae in lectis erant : la
syntaxe livienne est sans équivoque, il y avait bien des têtes – ou plutôt des bustes –
sur les lits d’apparat ; et il n’y avait sans doute que ces bustes, qui, à eux seuls, représentaient les divinités 23. Une figuration rudimentaire, certes, mais qui permettait du
moins aux hommes de mettre un visage sur le nom de leurs dieux.
Il est incontestable en revanche que ces dieux avaient pris place, deux par deux,
sur des banquettes somptueusement décorées, les pulvinars, autour d’une table garnie de victuailles. On ne peut qu’être frappé par la théâtralité du cérémonial : Rome
régale ses dieux dans une sorte de temple à ciel ouvert 24, à travers une mise en scène
qui mêle étrangement réalité et artifice. Si les offrandes alimentaires sont bien réelles 25
– à tel point que des souris gloutonnes vinrent un jour goûter au festin 26 –, les destinataires, eux, ne sont présents qu’à travers leurs images, somptueusement installées sur
les puluinaria. Nous serions tentée de voir là une sorte de sacrifice grandeur nature 27,
figuration hyperbolique de l’offrande à la divinité : les dieux, présents physiquement
ou symboliquement, sont installés à la portée des hommes pour recevoir l’hommage
qui leur est dû 28. Une « mise en images » de l’acte rituel en même temps qu’une proximité exceptionnelle, quoique illusoire, avec le divin 29.
Restreindre le lectisterne à un spectacle cultuel, exhibition solennelle de dieux
anthropomorphes, équivaudrait cependant à passer outre à sa nature première :
comme tout acte rituel, il suppose une requête 30, et en tant que rite placatoire, il vise
22. 40, 59, 7 : in fanis publicis ubi lectisternium erat deorum capita quae in lectis erant auerterunt se. Le phénomène est d’ailleurs mis au rang des prodigia.
23. Cf. A. Bouché-Leclercq, « Lectisternium », p. 1011 ; J. Marquardt, Le Culte chez les Romains, I (= t. 12 du
Manuel des Antiquités romaines par T. Mommsen, J. Marquardt et P. Krüger), Paris, E. Thorin, 1889, p. 224 sq.
24. Cf. Fest., 476, 17 L.
25. Sur le type d’offrandes, cf. Dion. Hal. 2, 23, 5 (qui décrit plus probablement ici les lectisternes individuels,
qui avaient lieu dans les temples). Pour une approche plus générale, voir C. Goudineau, « IJ erai; travpezai »,
MEFRA, 79, 1967, p. 77-134. Les mensae dressées dans les sanctuaires portaient d’ordinaire des galettes, des
gâteaux, des fruits et des olives.
26. Voir Liv. 40, 59, 8 : Oleas quoque praegustasse mures in prodigium uersum est / « Le fait que des souris aient
goûté auparavant aux olives fut également tenu pour un prodige ».
27. Voir ici J. Scheid, Quand faire, c’est croire. Les rites sacrificiels des Romains, Paris, Aubier (Collection historique), 2005, p. 176.
28. Une posture qui ne remet pas en cause leur supériorité, dans la mesure où les hommes se contentent de
servir les dieux et d’assister à leur banquet. Déjà, dans le sacrifice public, le partage alimentaire avec les
dieux est inégal : ceux-ci reçoivent toujours la première part.
29. P. Boyancé, « Les implications philosophiques des recherches de Varron », in Atti del congresso internazionale di studi varroniani (Rieti, 22-26 settembre 1974), Rieti, Centro di studi varroniani, 1976, vol. I, p. 160.
P. Veyne, dans « Inviter les dieux… », p. 20, parle d’une « métaphore », transposition symbolique des rites
privés dans la sphère du sacré.
30. Cette idée est développée par B. Combet-Farnoux, Mercure romain…, p. 330-331.
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l’apaisement des dieux ainsi sollicités. Derrière les images divines, se devinent des
figures fonctionnelles, animées de pouvoirs spécifiques. Et justement, la principale
question posée par ce rite inaugural reste bien sûr la constitution de la « tablée » divine.
Si, comme nous l’avons vu, le caractère fondamentalement grec du cérémonial semble avéré, le choix des divinités elles-mêmes témoigne d’une tendance hellénisante.
Jupiter ou Saturne n’y ont pas leur place, alors même que les commensaux figurent
tous au rang des di peregrini, ces dieux récemment introduits à Rome et installés hors
du pomerium, le périmètre sacré de la cité romuléenne 31. Pour autant, la géographie
sacrée ne saurait constituer un critère déterminant, et il paraît plus probable que la
sélection ait été dictée par d’autres impératifs. Requise pour mettre fin à une pestilentia mortifère contre laquelle toutes les autres tentatives ont échoué, la cérémonie revêt
donc le statut d’un mode de procuration, destiné, non pas à « expier » à proprement
parler le prodige, mais surtout à apaiser les dieux qui en sont à l’origine. Répondant
à une situation de crise, la rupture de la pax deorum, la procuration devra à la fois être
adaptée au prodige qu’il s’agit de conjurer et, en même temps, dirigée vers les divinités concernées. Une adéquation bien difficile ici, dans la mesure où, comme le rapporte Tite-Live, non seulement on ne savait comment faire cesser l’épidémie, mais on
n’en connaissait pas l’origine : cuius insanabili perniciei […] nec causa nec finis inueniebatur, « Le fléau était sans remède et […] on n’en voyait ni la cause, ni la fin » 32.
On peut imaginer, en conséquence, que les prêtres durent à la fois écouter leur
intuition et procéder par tâtonnements pour adapter le rite au prodige. D’où peutêtre certains déséquilibres. Mais le choix des convives semble, à n’en pas douter, avoir
été ciblé : tous sont censés porter secours à une Rome mise à mal par la pestilentia et
affaiblie par les vicissitudes du climat. Présidant en quelque sorte le banquet, Apollon
et Latone constituent ici un couple de dieux guérisseurs 33, couple dominé par la figure
du dieu medicus dont la mère constitue seulement la parèdre. La présence d’Apollon
apparaît doublement justifiée, dans la mesure où le prodige relève des compétences
spécifiques du dieu, introduit dans des circonstances analogues une trentaine d’années
plus tôt 34, et aussi parce que les gardiens des Livres Sibyllins, à l’origine de la cérémonie, sont aussi préposés au culte apollinien. Le lectisterne se trouve ainsi placé sous le
signe double de la salubrité et de l’hellénisme religieux.
31. Cf. maintenant H. Cancik, « The Reception of Greek Cults in Rome », Archiv für Religionsgeschichte, 1 (2),
1999, p. 161-173.
32. 5, 13, 5.
33. Cf. Liv. 25, 12, 13.
34. La dédicace du premier temple d’Apollon, aux Prata Flaminia, datait de 431 avant J.-C. ; Rome en avait fait
le vœu deux ans auparavant, sur la prescription des duumuiri sacris faciundis, pour mettre fin à une épidémie (Liv. 4, 25, 3). Sur les attributions thérapeutiques du dieu, voir notamment Callimaque, Hymn. 2,
45-46 : ejk dev nu Foivbou / ijhtroi; dedavasin ajnavblhsin qanavtoio / « de Phoibos aussi les médecins tiennent la science de retarder la mort » (trad. E. Cahen, Paris, Les Belles Lettres (CUF), 19615) ; voir aussi
Verg., Aen. 12, 395-397. Cf. J. Gagé, Apollon romain…, p. 69-113 ; G. Dumézil, « Apollo Medicus », in Apollon
sonore et autres essais. Esquisses de mythologie, Paris, Gallimard (Bibliothèque des Sciences humaines),
1982, p. 36-41.
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Caroline Février
Comme pour compléter le couple précédent 35, une Diane qui a tout de l’Artémis
grecque prend place sur le second lit de table aux côtés du dieu Hercule. Si la présence
de la déesse se justifie par la volonté probable de reconstituer, d’une certaine façon,
la triade familiale Apollon-Léto-Artémis 36, le rôle d’Hercule apparaît moins obvie :
certains, comme G. Dumézil, ont voulu reconnaître en lui le dieu des marchands 37,
d’autres une divinité agraire 38 ; d’autres enfin l’interprètent comme un dieu guérisseur et purificateur – ce que suggère d’ailleurs l’épithète de Salutaris sous laquelle on
le vénérait parfois 39. Peut-être faut-il y voir plus simplement à la fois la plus ancienne
des divinités grecques introduites à Rome et l’Hercule victorieux qui, incarnant la
force et l’ardeur, pouvait délivrer Rome de tous ses maux.
Enfin, sur la dernière banquette de ce triclinium d’exception prend place Mercure, apparié pour la circonstance à Neptune. Contrairement aux divinités précédentes, on ne peut guère voir en celles-ci l’union improbable d’un Mercure hellénisé et
d’un Poséidon présidant aux échanges maritimes 40 : selon toute vraisemblance, ce
sont bien deux divinités romaines qui sont ici réunies : Mercure, le dieu romain du
commerce, et le vieux Neptune, protecteur des cours d’eau, l’un et l’autre veillant à
l’approvisionnement d’une Rome où venait de sévir la disette. Comme l’a mis en évidence C. Virlouvet, la concomitance ou la succession de ces divers fléaux était d’ailleurs
tout à fait courante dans l’Antiquité, sans que l’on soit réellement capable de déterminer lequel était la cause de l’autre 41.
35. Tite-Live, par une syntaxe plutôt ambiguë, semble suggérer une triade Apollon-Latone-Diane, effective à
l’époque augustéenne avec l’association d’Apollon, Léto et Artémis. Les trois divinités sont réunies sur la
fameuse Base de Sorrente, figurées à peu près telles que leurs statues les représentaient dans le sanctuaire
d’Apollon Palatin ; cf. Plin., nat. 36, 24 et 36, 32 – Pline mentionne aussi la présence de statues à l’effigie de
Latone et de Diane dans le temple d’Apollon Sosianus, c’est-à-dire le temple restauré des Prés Flaminiens :
cf. nat. 36, 34. Mais, comme l’a très bien montré M. Nouilhan (« Les lectisternes républicains », p. 28), il
s’agirait donc vraisemblablement d’un amalgame entre deux réalités cultuelles, peu compatible avec la
symétrie des lits de table : à l’évidence, l’heure n’était pas encore aux lectisternes individuels, et c’est par
couple que les dieux siégeaient au banquet.
36. J. Bayet a voulu reconnaître en elle une déesse des sources, bienfaisante et protectrice ; cf. Les Origines de
l’Hercule romain, Paris, De Boccard (Bibliothèque des Écoles françaises d’Athènes et de Rome ; 132), 1926,
p. 278 sq. À notre sens, c’est surtout en tant que sœur et parèdre d’Apollon qu’elle prend place au festin
sacré. La triade Apollon-Léto-Artémis était vénérée de longue date en Grèce, notamment à Claros : cf.
F. Chamoux, « Sculptures de Claros », CRAI, 1993, p. 815-817 ; M. Dewailly, « Le sanctuaire d’Apollon à
Claros : place et fonction des dieux d’après leurs images », MEFRA, 113, 2001, p. 365-366. Voir ici Paus., 1,
44, 2 ; 2, 24, 5 ; 8, 9, 1 ; 9, 22, 1 ; 10, 35, 4.
37. G. Dumézil, La Religion romaine archaïque2, p. 420-425.
38. Voir l’argumentaire développé par R.M. Ogilvie, A Commentary on Livy, 1-5, p. 656 sq.
39. Voir CIL VI 237 ; 338-339. C’est l’hypothèse défendue par J. Bayet, Les Origines de l’Hercule romain, p. 277284. Le savant souligne également l’association fréquente d’Aplu et Herclé autour du contrôle des eaux
guérisseuses en Grande Grèce et en Étrurie ; cf. Herclé. Étude critique des principaux monuments relatifs à
l’Hercule étrusque, Paris, De Boccard, 1926, p. 133 sq.
40. Voir A. Bouché-Leclercq, « Lectisternium », p. 1009, note 5 ; G. Wissowa, Religion und Kultus der Römer,
Munich, C.H. Beck (Handbuch der Altertumswissenschaft ; IV.5), 1971 (= 19122), p. 226 sq. ; R.M. Ogilvie,
A Commentary on Livy, 1-5, p. 656 ; G. Dumézil, La Religion romaine archaïque2, p. 439.
41. Voir J.-M. André, « La notion de Pestilentia à Rome : du tabou religieux à l’interprétation préscientifique »,
Latomus, 39, 1980, p. 3-16.
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Quoi qu’il en soit, l’assemblée des convives aurait ainsi été constituée, d’une part,
de dieux que nous pourrions qualifier de « grecs », dans la mesure où ils avaient été
plus ou moins récemment adoptés ou assimilés par Rome, et, d’autre part, de dieux
proprement romains. On ne saurait donc prétendre que le lectisterne de 399 avait
consisté à réunir des dieux hellénisés 42 : en fait, la composition même de la tablée correspondait à une association fonctionnelle. Un assemblage calculé de puissances divines qui sera reproduit à l’identique lors des lectisternes suivants, toujours prescrits
dans les mêmes circonstances : en 364, en 348, en 326 avant J.-C., c’est à chaque fois
une pestilentia qui entraîne la mise en œuvre de ce rite de procuration. La conjonction de divinités présidant respectivement à la santé, à la vigueur et à la prospérité
devait être suffisamment favorable pour qu’on ne jugeât pas nécessaire, les fois suivantes, de modifier l’ordonnancement du banquet ni d’élargir le cercle des convives :
pragmatiques autant que précautionneux, les Romains veillaient à réitérer scrupuleusement les rites dont ils avaient pu éprouver l’efficacité. Sans doute somptueux,
certainement dispendieux, les lectisternes du IVe siècle réussissaient pourtant à convoquer en une seule fois les forces utiles d’un panthéon en cours d’hellénisation, dans
une relative économie de moyens.
Plus magnifique encore que les précédents, le lectisterne célébré en 217 avant J.-C.
leur a souvent été opposé. Pour sa dernière apparition, le lectisterne collectif est célébré
avec une ampleur et une magnificence jusqu’alors inédites, en même temps qu’il perd
sa finalité prophylactique. Si la durée de la cérémonie est restreinte à trois journées
(au lieu de huit) et si la fête publique n’est plus accompagnée des rites d’hospitalité
qui caractérisaient les premiers lectisternes, ce ne sont plus trois, mais six banquettes
qui sont exposées en plein air, probablement au cœur de la Rome religieuse, c’est-àdire sur le Capitole. Les agapes de 217 réunissent les douze grands dieux de Rome, dont
les statues de bronze ornaient, déjà à l’époque de Varron, le Forum romain 43. Jupiter
et Junon, Neptune et Minerve, Mars et Vénus, Apollon et Diane, Vulcain et Vesta et
enfin Mercure et Cérès sont ainsi conviés à prendre place sur les lits d’apparat 44. On
42. Contra W. Warde Fowler, The Religious Experience…, p. 262 : « These are not functional numina, but foreigners whose ways were only known to the manipulators of the Sibylline utterances ».
43. Cf. rust. 1, 1, 4 : duodecim deos Consentis […] eos urbanos, quorum imagines ad forum auratae stant / « les
douze dieux Consentes […], ces dieux urbains, dont les images dorées se dressent au Forum » ; cf. également ling. 8, 71. Également CIL VI 102. Voir Aust, s. v. « Consentes », RE, IV, 1, col. 910 sq. ; S. Estienne,
« Statues de dieux “isolées” et lieux de culte : l’exemple de Rome », Cahiers du Centre Gustave Glotz, 8,
1997, p. 88 sq. ; G. Niedder, s. v. « Dei Consentes », in Lexicon Topographicum Vrbis Romae, E.M. Steinby
(dir.), vol. II, Rome, Quasar, 1993, p. 9 sq. L’invocation aux douze dieux était courante dans la comédie
latine ; cf. Plaute, Epid. 610-611 : Si undecim deos praeter sese secum adducat Iuppiter / ita non omnes ex cruciatu poterunt eximere Epidicum ; 675-676 : Duodecim dis plus quam in caelo deorumst immortalium / mihi
nunc auxilio adiutores sunt. Une inscription du IIe siècle avant J.-C. fait d’ailleurs état de théoxénies célébrées lors des fêtes de Jupiter Sosipolis à Magnésie du Méandre, en l’honneur de douze dieux dont les
xovana étaient installés sur trois banquettes ; cf. W. Dittenberger, Sylloge Inscriptionum Graecarum3, Leipzig,
Hirzel, 1917, 2, 589 (l. 40-45).
44. Liv. 22, 10, 9 : sex puluinaria in conspectu fuerunt. Ioui ac Iunoni unum, alterum Neptuno ac Mineruae, tertium Marti ac Veneri, quartum Apollini ac Dianae, quintum Vulcano ac Vestae, sextum Mercurio et Cereri.
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ne saurait nier qu’à cette date l’interpretatio Romana avait fait son œuvre : s’ils avaient
conservé leurs noms latins, les dieux romains avaient déjà emprunté aux dieux grecs
leurs attributions et leur mythologie, et tout se passait comme si Rome honorait un
panthéon qu’elle s’était depuis longtemps approprié et que célébrait déjà le vieil Ennius 45.
Comment expliquer cette volonté de recourir, simultanément, à tant de puissances et de compétences diverses ? S’il ne s’agit pas, comme en 399, d’un regroupement
sélectif en adéquation avec la crise prodigiale, on peut se demander quelles considérations ont pu prévaloir dans l’organisation des couples. Contrairement à la répartition adoptée lors des précédents lectisternes, les couples divins sont tous mixtes, et,
dans sa relation, Tite-Live accorde la préséance au dieu, toujours nommé avant la
déesse qui partage sa banquette. On peut ainsi supposer que les pulvinars aient été
répartis entre les figures masculines du groupe des Olympiens, citées par ordre d’importance : Jupiter, maître des cieux et de la foudre et souverain des dieux ; Neptune,
dieu tout-puissant de l’élément liquide ; Mars, dieu de la guerre ; Apollon, dieu de la
salubrité publique, mais aussi, déjà, de la victoire militaire 46 ; Vulcain et Mercure enfin,
dont les rôles apparaissent moins déterminants. Peut-être s’est-on alors employé à
leur associer la divinité féminine qui semblait leur correspondre le mieux ou, à défaut,
le moins mal. À cet égard, l’interpretatio semble avoir exercé son influence : JupiterZeus a dû appeler Junon assimilée à Héra, Apollon a retrouvé sa sœur Diane-Artémis ;
Mars-Arès, son amante Vénus désormais dotée des caractères d’Aphrodite. On a pu
chercher à réunir Neptune-Poséidon et sa grande rivale, Minerve, qui a tout de l’Athéna
grecque. Quant aux deux derniers couples, leur constitution reste problématique.
Faut-il y trouver, à chaque fois, une logique instrinsèque qui justifierait l’association
de Mercure à Cérès et celle du dieu du feu et de la déesse du foyer civique, réunis par
un même élément ? À moins que ces regroupements ne soient fortuits ?
De nombreux savants se sont essayés à l’exégèse de ce cérémonial pour le moins
énigmatique, proposant des interprétations souvent cohérentes, mais jamais pleinement satisfaisantes. Nous ne prétendrons donc pas résoudre de manière définitive
cette épineuse question. Tout au plus nous contenterons-nous de rappeler la visée
première de ce rite : apaiser les dieux d’une Rome anéantie par la défaite. Après les
procurations individuelles qui ont suivi la bataille de la Trébie et alors que les dieux
redoublent de fureur, les prêtres romains, désemparés, épuisent toutes les ressources
de leur arsenal expiatoire. En ce contexte critique, il paraît bien compréhensible que
les pontifes, gardiens fidèles de la tradition nationale, aient préféré s’effacer au profit
des décemvirs, dont les rites, plus élaborés, étaient jugés plus efficaces. Puisant dans
leur mémoire plus que dans les précieux volumes dont ils avaient la charge 47, les
45. Voir Ennius, frg. 240 Skutsch : Iuno Vesta Minerua Ceres Diana Venus Mars / Mercurius Iouis Neptunus
Volcanus Apollo ; également Apul., Socr. 121.
46. C’est sous cet aspect qu’il reçoit l’hommage des premiers Jeux Apollinaires, en 212 avant J.-C., institués –
comme le précise Macrobe, Sat. 1, 17, 25-27 – uictoriae, non ualitudinis causa ; voir aussi Liv. 25, 12, 15.
47. Sur la consultation des Livres et l’interprétation qu’en font leurs gardiens, nous renvoyons à nos deux articles où l’on trouvera l’essentiel de la bibliographie : « De l’usage des Livres : le décemvir, prêtre ou uates ? »,
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décemvirs décidèrent probablement d’adapter à la circonstance une cérémonie dont
ils avaient usé jusqu’alors avec parcimonie. Nous serions donc tentée de voir dans le
lectisterne « des douze grands dieux » une amplification des rites de 399.
Il ne s’est pas agi, loin s’en faut, de transposer dans le contexte militaire la portée
de la cérémonie, ce qui eût conduit les prêtres à ne convier au festin que des divinités
guerrières, toutes rassemblées autour de Mars et de Bellone, mais bien plutôt d’élargir le personnel divin à l’ensemble du panthéon romain. S’il s’avérait impossible de
réunir au centre de l’Vrbs la totalité des dieux de Rome, il était concevable en revanche de les honorer à travers leurs représentants les plus prestigieux. On sait que le
Romain précautionneux use et abuse volontiers, dans ses prières, de formules généralisantes – du type di deaeque omnes –, invocations concises et globales destinées à
n’omettre aucune divinité 48. On peut penser que ce même scrupule ait prévalu dans
l’organisation du lectisterne de 217 et que le groupe des douze Olympiens ait tenu le
rôle d’une délégation, censée représenter auprès des hommes la foule incommensurable des dieux romains. Comment expliquer, en ces conditions, l’association plutôt
improbable de certaines divinités ? Faut-il vraiment rechercher à toute force l’élément
de cohésion qui coordonne chaque couple ? À l’évidence, la principale préoccupation
des prêtres avait été de rendre hommage, simultanément, aux grands dieux du panthéon hellénisé : peu importait peut-être, en définitive, quelle place chaque dieu occupait, pourvu qu’ils y fussent tous 49. En oublier un ou deux aurait constitué le plus
grave des sacrilèges, réduisant à néant toutes les tentatives des prêtres pour réconcilier
Rome avec ses dieux.
Au cours de son histoire, la religion romaine n’a fait que se renouveler au contact
des pratiques étrangères, en s’enrichissant d’éléments nouveaux, mais sans jamais rien
retrancher de son substrat originel. On a tout lieu de penser que cette règle immuable
a bravé l’interpretatio et que les dieux indigènes ont pris les caractères de leurs homologues grecs sans pour autant perdre leurs attributions primitives. De là provient sans
doute cette double lecture que l’on peut tirer des associations divines 50. Lors de ce lectisterne grandiose, les Romains honorent autant Jupiter Optimus Maximus et Junon
souveraine que le couple qu’ils forment par analogie avec Zeus et Héra. Déjà réunis
dans le sanctuaire des Prés Flaminiens, Apollon et sa sœur Artémis sont aussi les dieux
48. Latomus, 61, 2002, p. 821-841 ; « Le double langage de la Sibylle. De l’oracle grec au rituel romain », in La
Sibylle. Parole et représentation, M. Bouquet, F. Morzadec (éd.), Rennes, Presses universitaires de Rennes
(Interférences), 2004, p. 17-27.
48. Voir ici C. Guittard, « Siue deus siue dea. Les Romains pouvaient-ils ignorer la nature de leurs divinités ? »,
REL, 80, 2002, p. 36 et note 65. Cf., par exemple, Verg., georg. 1, 21 : dique deaeque omnes, studium quibus
arua tueri / « Vous tous, dieux et déesses, qui vous attachez à veiller sur les pâturages » ; Liv. 1, 32, 9 : di […]
omnes caelestes, uosque, terrestres, uosque, inferni, audite / « Vous tous, dieux du ciel, vous, les dieux terrestres, et vous, les dieux des enfers, écoutez-moi ! ».
49. Cf. G. Dumézil, La Religion romaine archaïque2, p. 474.
50. Voir les remarques éclairantes que G. Dumézil (ibid.) formule à propos des procurations qui se succèdent
durant la seconde guerre punique : « Par ces tâtonnements mêmes, se précisent les grandes lignes de la
nouvelle théologie, du panthéon syncrétique qui achève de se constituer […] : sous des noms romains,
c’est bien souvent le dieu grec ou un dieu mixte qui est supplié ».
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de fécondité et de prospérité qui porteront tous les espoirs du peuple romain, dans le
Chant séculaire d’Horace 51. Derrière les amants mythologiques que sont devenus
Mars et Vénus, on reconnaîtra bien sûr le père de Romulus et la mère des Énéades : la
Vénus importée du mont Eryx, qui était aussi déesse de la victoire 52. Vulcain, le dieu
du feu dévorant 53 et protecteur des armes romaines 54 est ici associé à Vesta, déesse
romaine du foyer civique, protectrice de la Ville et des Pénates troyens, qu’il est difficile d’assimiler, dans ce contexte, à la falote Hestia sous l’apparence de laquelle elle
s’incarne pourtant 55. Ici, l’articulation fonctionnelle Vulcain-Vesta, spécifiquement
italique 56, semble s’imposer d’elle-même : il s’agissait sans doute à la fois de protéger
Rome contre le feu de la guerre et de préserver la flamme sacrée, symbole de l’intégrité de la Ville 57. Quant à Neptune, revêtu des attributions du farouche Poséidon et
associé à la Minerve guerrière, il continuera à garantir l’approvisionnement en eau de
la cité. Enfin, la formation du dernier de ces couples divins, qui associe Mercure à
Cérès, se justifie probablement par les risques de disette qu’encourait la Ville menacée
par l’ennemi carthaginois : il était donc naturel que Mercure, dieu romain du commerce, veille à l’approvisionnement de Rome aux côtés de la Cérès nourricière, mère
de toute fécondité.
Des compétences diverses et complémentaires qui préserveront l’intégrité de
Rome et de son peuple : les douze grands dieux de Rome réunis par le lectisterne ne
sont autres que les représentants du panthéon romain. À travers ces prestigieux convives, c’est l’ensemble des dieux de Rome que le peuple entend solliciter.
Donner un visage, prêter une image aux dieux est une manière de se les rendre à
la fois plus présents et plus proches. Le lectisterne se caractérise par un cérémonial
d’une solennité sans précédent, où les puissances divines prennent forme sous le
regard du peuple romain. Rite spectaculaire ou spectacle rituel, le festin des dieux
donne cependant à voir, par-delà la fascination des images, l’association efficace de
51. Carm. saec. 45-48 ; 65-72 et passim.
52. Voir à ce sujet les remarques de R. Schilling, La Religion romaine de Vénus depuis les origines jusqu’au
temps d’Auguste, Paris, De Boccard (Bibliothèque des Écoles françaises d’Athènes et de Rome ; 178), 19822
(19541), p. 207 sq. et 242-266. Sur Vénus Erycine, cf. G. Dumézil, La Religion romaine archaïque2, p. 470 sq.
53. Voir notamment Plaut., Epid. 673 sq.
54. Cf. J. Gagé, La Chute des Tarquins et les débuts de la république romaine, Paris, Payot (Bibliothèque historique), 1976, p. 118. Vulcain incarne également le feu ravageur susceptible de repousser l’ennemi. Sur les
attributions militaires du dieu, voir G. Dumézil, La Religion romaine archaïque2, p. 327 ; G. Capdeville,
Volcanus. Recherches comparatistes sur les origines du culte de Vulcain, Rome, École française de Rome
(Bibliothèque des Écoles françaises d’Athènes et de Rome ; 288), 1995, p. 416 sq.
55. Comme on le sait, l’aedes Vestae ne renfermait pas de statue (G. Radke, Zur Entwicklung der Gottesvorstellung und der Gottesverehrung in Rom, Darmstadt, Wissenschaftliche Buchgesellschaft (Impulse der Forschung ; 50), 1987, p. 37) : la déesse était représentée par la flamme perpétuelle qu’entretenaient les Vestales
(cf. Ov., fast. 6, 295-298).
56. G. Capdeville (Volcanus…, p. 422) montre ainsi qu’une association Héphaïstos-Hestia serait inconcevable.
57. Cf. G. Dumézil, Fêtes romaines d’été et d’automne, Paris, Gallimard (Bibliothèque des Sciences humaines),
1975, p. 61 (qui rapproche cette articulation d’une « théorie des feux terrestres »), et Mariages indo-européens,
Paris, Payot (Bibliothèque historique), 1979, p. 189-197.
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Ponere lectos, deos exponere. Le lectisterne, une image du panthéon romain ? 155
forces agissantes, convoquées simultanément pour le rétablissement de la pax deorum. Aux lectisternes célébrés pour la santé publique succède finalement une cérémonie organisée pour le salut public. En 217 avant J.-C., le lectisterne s’élargit aux
douze grands dieux de Rome. Qu’elles soient anciennes ou nouvellement acquises,
les attributions multiples de ces figures hellénisées sont autant d’échos aux divinités
mineures qui leur sont implicitement associées. Allongés en grand appareil sur leurs
banquettes, les dieux du lectisterne siégeaient au nom du panthéon tout entier.
À travers sa brève existence et son évolution, le lectisterne s’impose comme un
rite composite, qui mêle au faste dispendieux de l’hellénisme le pragmatisme romain :
la cérémonie gagne en ampleur et en magnificence, en même temps que sa destination évolue. Devenu un mode de procuration globale, le lectisterne alors à son apogée
illustre autant l’assimilation des dieux grecs que l’enrichissement perpétuel du rituel
romain 58. Mais sitôt intégré à la religion de Rome, il sera bientôt évincé par d’autres
innovations. Au risque de finir par donner raison au poète : « En vain le grand pontife
a fait un lectisterne… ».
Caroline Février
Université de Caen Basse-Normandie
58. Voir, avec la prudence qui est de mise, l’Histoire Auguste, où se trouve étonnamment mentionné un lectisterne célébré durant sept jours « selon le rite romain » (Aur. 13, 2 : celebrauit et Romano ritu lectisternia per
septem dies). Pour la discussion, nous renvoyons à notre thèse, Le Pontife et le Décemvir : l’expiation des
prodiges à Rome. Pratique et politique de deux grands collèges sacerdotaux, Université de Paris-Sorbonne –
Paris IV, 2001 (dactyl.), p. 679 sq. (à paraître).