Place, Fonction, Rôle des grands-parents

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Place, Fonction, Rôle des grands-parents
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Place, Fonction, Rôle des grands-parents
Par Annie DUPAYS, psychologue Association Vivre En Famille
Un petit préambule concernant l'intitulé de cette intervention :
Trois mots: Place, Fonction, Rôle.
Ces termes bien que proches, ne sont pas pour autant synonymes
- La place d'un individu se trouve là où le sens commun le situe (la place d'un parent est
auprès de ses enfants par exemple) il y a une notion d'évidence mais aussi d'habitude qui
entre en compte.
- La fonction évoque une qualification plus forte, imposée par la société, voire par la loi (la
fonction parentale implique mais surtout oblige à la protection de son enfant). Il y aura
critique, jugement si l'individu ne fait pas ce qu'on attend de lui.
- Le rôle serait davantage un espace d'intervention où la notion de libre-arbitre intervient,
mais la personne a le choix de se conformer ou pas à ce qu'on attend de lui.
Quoi qu'il en soit, dans l'imaginaire collectif un Grand Parent a un «rôle", une "fonction",
une "place" que l'on projette comme bonne, généreuse, altruiste. On appelait souvent
autrefois les Grands Mères : Bonne …
Cette vision idéale mais stéréotypée d'une mamie ou d'un papi gâteau ne convient pas, ne
convient plus au monde dans lequel nous vivons.
Il s'agit d'une vision obsolète qui a naturellement évolué au rythme du changement de
société, la recherche actuelle de l'épanouissement personnel (et cela même quand on est
grands-parents) a modifié la relation entre les générations.
Ces changements inéluctables des Grands Parents confrontés aux attentes des jeunes
Parents, vont entraîner des difficultés, des malentendus, des incompréhensions.
La grand-parentalité est un cycle de vie à regarder sous différents angles :
Celui du celui du grand parent,
du jeune parent
et celui du petit enfant quand il sera en âge d'identifier son entourage familial.
On devient grand parent :
Nos enfants sont donc devenus parents, il y a un profond changement qui s'opère des deux
côtés et qui va modifier les attentes et les attitudes des uns envers les autres.
Une fois devenu Grand Parent, nous devons quitter notre fonction parentale, en tout cas la
considérer autrement, nos enfants sont en quelque sorte parvenus "à notre niveau" et nous
devons accepter cela, nous n'avons plus qu'un rôle consultatif.
A l'arrivée du bébé la Grand Mère doit éviter de dire "mon bébé", il ressemble à mon fils,
c'est davantage d'ailleurs la façon dont ces petites phrases sont dites qui peuvent faire mal
Intervention à la Maison des Familles Six Fours -07 octobre 2014-
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que les mots en eux mêmes, de plus le côté possessif est souvent mal vécu par les bellesfilles envers les belles-mères notamment.
Toute critique, tout conseil un peu trop appuyé, risque d'être mal vécu par le jeune parent
qui a besoin de s'affirmer et de prendre confiance dans sa place de parent.
Il faut savoir s'effacer (éviter les "faut faire comme ci ou comme ça").Savoir rester vigilant
pour ne pas imposer ses codes, ses valeurs, accepter de laisser nos enfants devenus parents,
vivre et "marcher avec leur temps", bref respecter la différence de générations (jeux vidéo,
alimentation, horaires de coucher etc.…).
Le parent doit rester le parent, il est préférable de se taire (sauf cas graves naturellement).
Les Grands Parents ne doivent donc pas se substituer aux parents, il leur faut trouver la
juste place, discuter de leurs limites, savoir les poser pour qu'ils ne soient pas utilisés non
plus uniquement pour le confort personnel des parents (baby-sitting etc.…).
Certains GP ne supportent pas de devoir s'effacer devant leur enfant, ils se positionnent
avec le petit enfant comme le parent, si le jeune parent est trop soumis, qu'il n'arrive pas à
s'opposer à son parent, il y aura forcément une crise dont le petit enfant fera les frais.
Beaucoup de difficultés surgissent, peu après une naissance, alors qu'il s'agit tout de même
d'un événement heureux.
Mais c'est un passage de vie, une transition, où il faut savoir négocier, changer ses
habitudes, redéfinir justement les rôles que l'on tenait auparavant.
Les Grands Parents vont occuper une place affective importante mais ils doivent rester à
une place secondaire, sous peine de susciter des rivalités, des jalousies, des disputes
familiales interminables.
Particulièrement quand on observe les relations croisées :
les relations belle-fille/belle mère, gendre/beau père, les relations entre les deux bellefamille ; les repas de famille pour faire plaisir à l'un ou l'autre des parents, ce qui va les
obliger à faire un choix, à entrer en conflit de loyauté avec son conjoint ou sa conjointe si les
liens sont plus proches avec l'une des familles au détriment de l'autre.
A ces configurations déjà complexes, s'ajoute aussi de plus en plus des nouveaux grandsparents : les Grands Parents par "alliance" du fait de l'augmentation des familles
recomposées. On peut se retrouver avec 2 ou 3 Grands Mères ou Grands Pères selon le
nombre de nouvelles unions. Il peut se poser les mêmes problèmes d'intégration que ceux
que rencontre l'enfant ou l'ado quand l'un de ses parents se remarie.
Chaque famille va avoir des habitudes culturelles, éducatives, affectives différentes,
pourquoi l'une serait mieux que l'autre pour le petit enfant ? (fêter Noël ou non etc.…) Il
faudrait les considérer comme un enrichissement pour le petit enfant, mais ça demande
beaucoup de tolérance et ça oblige à parler, échanger autour de ces ressentis que souvent
la gêne, voire la honte, empêchent d'énoncer.
Ce changement en "interne" doit s'accorder avec la personnalité du grand parent, à chacun
son style, il existe des Grands Parents pantouflards, d’autres hyperactifs qui ont la
bougeotte, ceux qui sont à la retraite, d'autres encore en activité, il n'existe pas un
stéréotype de grand parent.
Certains ne vont pas apprécier d'être devenus Grand Parent, ça les vieillit, ça les rapproche
de leur fin de vie, ou bien ils attendaient enfin d'être tranquilles sans les enfants pour
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voyager, pour avoir du temps pour eux etc. … et l'arrivée de petits enfants contrarie leurs
projets.
Là, va intervenir le regard extérieur et l'idée convenue que l'on se fait d'un Grand Parent et
donc la peur de la critique, Le qu'en dira-t-on peut les contraindre à tout accepter, alors
qu'ils n'en ont pas envie. Il faut donc oser désacraliser la fonction d'un grand parent.
- L'utilité d'un Grand Parent est naturellement avant tout la tendresse, l'amour, les câlins
(surtout de la naissance jusque vers 5 ans) puis la transmission d'une mémoire familiale
(surtout tangible entre 4 et 12 ans), c'est grâce à lui que le petit enfant s'inscrit dans une
lignée, une filiation, une histoire familiale qui sera la sienne, qui le différencie et qui lui
donne une identité bénéfique à son développement identitaire et affectif. En outre les
jeunes enfants aiment entendre les histoires du passé, les anecdotes relatives à l'enfance de
son père ou sa mère, ce qui lui permet une meilleure compréhension et affiliation envers ce
parent.
- Le Grand Parent a aussi une utilité pédagogique importante, il va apporter au jeune un
autre aspect de la fonction éducative d'un ainé. Etant normalement, moins impliqué que le
parent, avec davantage de distance émotionnelle, il ne va pas chercher comme peut l'être le
parent à être pris au sérieux par crainte de ne pas être respecté, il aura donc davantage de
recul sur les résultats scolaires, les fréquentations etc.… (film La Boum, qui illustrait bien la
grande confiance petite fille-grand -mère pendant le conflit ado-parents).A cette période
justement (12-18 ans) le Grand Parent va être diplomate, bien plus que les parents qui sont
trop impliqués, l’ado peut se confier davantage.
Le Grand Parent doit savoir prendre et garder sa place sans qu'il y ait présence excessive,
sans disqualifier les parents, sinon il s'immisce dans la vie du couple et il y a risque
d'éclatement du couple.
On devient Parent :
Cette responsabilité nous tombe dessus sans qu'on y soit vraiment préparé. Chaque parent
certes, doit faire l'apprentissage de la paternité ou de la maternité tout seul mais on
s'attend toujours sans parfois oser le demander, à pouvoir compter sur son ou ses parents.
La primo pater-mater-nité est une période délicate pour tout un chacun s'il y a bien un
moment dans la vie où il faut aider son enfant c'est celui là.
Le jeune parent, selon son degré de maturité, peut être très insécurisé, manquant de
confiance en lui est angoissé par la tâche. Si cette aide ne vient pas ou qu'il y a un
désinvestissement flagrant après l'excitation de la naissance, il y aura une énorme
déception. Le parent peut se sentir rejeté, abandonné, et des conflits latents non résolus
peuvent resurgir.
A cette demande implicite de réassurance s'ajoute le fait qu'on a tous beaucoup de mal à
"voir nos parents vieillir" cela peut être compris comme un refus d'imaginer de les perdre
un jour, mais par conséquent on peut être amené à trop les solliciter, s'ils refusent parce
qu'épuisés ça peut provoquer de la colère, un ressentiment contre ce qui va être pris pour
de l'ingratitude.
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Au parent de comprendre et d'accepter que s'il est légitime d'attendre un soutien de ses
parents ou beaux-parents, cela ne doit pas être automatique, obligatoire et considéré
comme un dû.
Au parent d'intégrer, de comprendre que ce que le Grand Parent "donne" au petit enfant, il
le lui donne aussi à lui d'une certaine manière. Que l'implication du Grand Parent envers le
petit enfant lui permet de réparer ce qui a pu être mal géré entre eux autrefois.
Quand le Grand Parent a en charge et sous sa responsabilité (vacances, mercredis…) le petit
enfant, le parent doit absolument échanger et trouver un accord concernant les règles
éducatives et limites à instaurer, les exigences. Ne pas hésiter à en parler très clairement
sans se montrer rigide et inflexible (l'enfant a besoin de limites, de repères, d'autorité
même chez le Grand Parent, il ne peut pas faire n'importe quoi).
Chacun qu'il s'agisse du Grand Parent ou du Parent doit prendre sa place et respecter celle
de l'autre.
La naissance d'un petit enfant sert de révélateur, elle aura un rôle fédérateur si les rapports
antérieurs étaient bons, à contrario il y a un risque d'aggravation quand des malentendus ne
sont pas résolus, mais l'arrivée d'un enfant est toujours une chance à saisir pour faire
évoluer, voire transformer des liens parent-enfant qui n'étaient pas harmonieux.
Du côté du petit enfant :
Pour lui, avoir un Grand Parent ne signifie pas forcément être gardé par lui chaque mercredi
ou vacances Le lien peut se créer différemment, sous de multiples formes : voyages, visites
culturelles, sorties diverses, apprentissage de cuisine, musique etc.… ; l'enfant va intérioriser
une image d'un membre de la famille qui a deux générations d'écart avec lui, important à
vivre pour lui, ça lui donne notion de temporalité, ça aide à la création de souvenirs
échangés et partagés. L'enfant va apprendre aussi aux côtés de son Grand Parent un rythme
différent, plus lent que celui de ses parents, il apprendra à être plus tolérant, plus indulgent.
Et ce, même si on habite loin
Se poser des Questions ?
Quel type de Grand-mère/Grand Père j'aimerais être ?
Comment je vois mon rôle auprès de mes petits-enfants ? Comment est-il, si c'est déjà le
cas.
Jusqu'où je peux aller dans les commentaires sur mes petits enfants avec mes enfants ?
Ce que j'ai aimé, moins aimé chez mes propres Grands Parents ?
Ce que je garde d'eux ?
Ce que j'aimerais que mes petits enfants gardent de moi ?
Qu'est-ce que je peux apporter à mes petits enfants ?
On ne devrait pas avoir BESOIN de voir ses petits-enfants mais ENVIE
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