1ere partie : donation de parts sociales et succession du donateur
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1ere partie : donation de parts sociales et succession du donateur
1ERE PARTIE : DONATION DE PARTS SOCIALES ET SUCCESSION DU DONATEUR Comme beaucoup de parents, et particulièrement ceux disposant d’un patrimoine important, Madame Jeanine H avait « réglé sa succession » avant son décès ; en effet, grâce à des donations faites à ses enfants, elle avait transmis une grande partie de son patrimoine, dans le but de gratifier ses enfants bien sûr, mais également dans un objectif de partage, pour éviter un quelconque conflit entre ceux-ci qui pourrait naître une fois les parents décédés. Un autre objectif était également poursuivi, parfois omis dans les rapports avec les tiers mais ouvertement et parfaitement abordé avec le Notaire : obtenir une transmission des biens aux enfants libre d’impôt et éviter au maximum le règlement de droits de transmission à titre gratuit. Dans le droit fiscal français, il apparait effectivement qu’en commençant à transmettre le plus tôt possible à ses enfants par des donations, puis en laissant s’écouler le délai de rappel fiscal, un parent puisse progressivement transmettre à ses héritiers son patrimoine en franchise de droits. Dans le dossier traité en l’espèce, Madame Jeanine H avait fait des donations, une à son fils Georges en 1983, et deux à sa fille Marie-Christine en 1995 et 2001. Elle a fait en 2006 une nouvelle donation en nue propriété à son fils Georges et à ses petites-filles, Camille, Marion et Héloïse, de parts sociales de la SCI qu’elle venait de constituer avec son époux, donation qui a été faite dans le but de transmettre la résidence principale grâce à la SCI et surtout de la transmettre en payant le moins de droits possible. Nous étudierons par conséquent en premier lieu la donation (Chapitre 1er). La transmission entre vifs n’a été que la première étape du transfert global du patrimoine aux héritiers, il convient donc par la suite d’étudier la dévolution successorale de la défunte et la transmission de son patrimoine à ses ayants-droit à travers le déroulement du dossier de succession et notamment le partage (Chapitre 2nd). 11 CHAPITRE 1ER : LA DONATION Afin d’anticiper tout problème éventuel dans le partage et l’attribution des biens dépendant de sa succession, ainsi que dans l’objectif d’éviter, ou en tout cas de réduire, la fiscalité à laquelle sera soumise la transmission de ses biens, Madame H a fait donation au profit de son fils Georges et de ses petites-filles Camille, Marion et Héloïse, filles de Georges, de la propriété de 2.991 parts sociales de la SCI qu’elle avait constituée avec son conjoint prédécédé, se réservant sa vie durant l’usufruit desdites parts. Il est ici précisé qu’en mai 1983, Madame Jeanine H avait déjà fait une donation en avancement de part successorale à Georges de la nue propriété d’une maison d’habitation située sur la Commune de Castelginest, et qu’en mars 1995 et 2001, Madame Jeanine H avait fait deux donations en avancement de part successorale à sa fille Marie-Christine de la pleine propriété d’une maison d’habitation et d’une parcelle de terre situées sur ladite Commune de Castelginest. Cette nouvelle donation ne vient donc que compléter les donations antérieures et parfaire la répartition des biens de la défunte entre ses ayants-droit, bien qu’elle n’ait pas disposé de tous ses biens avant son décès. Il convient d’abord d’étudier les modalités de la donation (section 1) puis les conditions propres à une donation de parts sociales c'est-à-dire l’agrément nécessaire à la transmission des parts (section 2), par la suite le calcul des droits de mutation et le coût de l’acte que devra supporter le donateur, c'est-à-dire les frais de notaire (section 3), et enfin les formalités préalables et postérieures inhérentes à un tel acte (section 4). 12 Section 1 : Les modalités de la donation Madame Jeanine H a fait donation le 8 juillet 2006 de la nue propriété de 2.991 parts sociales de la SCI, s’en réservant l’usufruit1 ; lesquelles parts ont été attribuées à Monsieur Georges H à hauteur de 1.992 parts, à Mesdemoiselles Camille, Marion et Héloïse H, chacune à hauteur de 333 parts, étant ici précisé que Héloïse H est mineure au moment de la donation. Une libéralité est l’acte par lequel une personne dispose à titre gratuit de tout ou partie de ses biens ou de ses droits au profit d’un tiers. Pour être valide, les conditions à respecter sont : - Le consentement du disposant et du gratifié, - La capacité de disposer pour le disposant et de recevoir pour le gratifié, - L’existence d’un objet déterminé et licite, - Enfin, la licéité de la cause. L’un des donataires étant mineur au jour de la donation, sont intervenus à l’acte les parents du mineur afin d’accepter en son nom la libéralité dans les modalités précisées ci-après. Toutes les conditions sont réunies en l’espèce et la validité de la donation n’est pas contestée. Par ailleurs, la libéralité peut-être stipulée avec charge, la charge étant une obligation imposée au(x) bénéficiaire(s) de la libéralité par le disposant. Il n’existe en l’espèce aucune charge à la libéralité. La donation étant faite dans des modalités différentes selon les gratifiés, il convient d’étudier en premier lieu la donation faite au profit de Georges (I) puis dans un second lieu la donation faite au profit des petites-filles (II) et enfin les modalités communes à tous les donataires (III). I) Donation faite au profit de Monsieur Georges H Cette donation a été faite en avancement de part successorale (A) dont le rapport doit être fait en valeur (B), la difficulté principale étant l’évaluation de ce rapport (C). A) une donation en avancement de part successorale La donation a été faite au profit de Monsieur Georges H en avancement d’hoirie, dit aujourd’hui en avancement de part successorale, ce qui veut dire que la donation doit être considérée comme une avance sur la succession du disposant. Lorsqu’une personne consent une donation, cette libéralité sera prise en compte lors du règlement de la succession du disposant si cette donation a été consentie en Article 949 du Code civil : « Il est permis au donateur de faire la réserve à son profit ou de disposer, au profit d'un autre, de la jouissance ou de l'usufruit des biens meubles ou immeubles donnés. » 1 13 avancement de part successorale, à travers le mécanisme du rapport, son objectif étant de rétablir l’équilibre et l’égalité entre les héritiers. En principe, toute donation entre vifs est stipulée rapportable à la succession du disposant, sauf si celui–ci en a disposé autrement, en vertu de l’article 843 du Code civil2. En l’espèce, la donation faite au profit de Monsieur Georges H l’a été en avancement de part successorale, celui-ci devra donc en faire le rapport à la succession. B) Un rapport en valeur Le bénéficiaire d’une telle libéralité doit en principe rapporter à la succession du disposant dont il est l’ayant-droit la valeur de la donation, rapport qui est fictif puisqu’il conserve le bien ; c’est sa valeur qui sera prise en compte dans le calcul de la masse successorale puis dans celui des droits de chaque ayant-droit. Le rapport d’une libéralité se fait par principe en valeur ; pour être fait en nature, c'est-à-dire remettre matériellement le bien en jeu dans le partage, le disposant doit l’avoir expressément prévu dans la donation ou le bénéficiaire doit le demander lors du partage (ce dernier choix n’est possible que si le bien est libre de toute charge et occupation de son fait – articles 858 et 859 du Code civil). En l’espèce, Madame Jeanine H n’a pas expressément prévu dans la donation un rapport en nature, le principe du rapport en valeur devra donc s’appliquer, sauf si Monsieur Georges H fait une demande de rapport en nature lors du partage. C) L’évaluation du rapport Les règles d’évaluation du bien rapporté sont prévues à l’article 860 alinéa premier du Code civil : le rapport est dû de la valeur du bien au moment du décès, selon son état à l’époque de la donation. Ces règles n’étant pas impératives, le donateur peut en disposer autrement dans l’acte de donation. En l’espèce, Madame Jeanine H n’a prévu aucune disposition contraire, le rapport s’effectuera donc selon les règles de droit commun. Les modalités de calcul seront étudiées ci-après dans le paragraphe consacré aux particularités du partage (page 47). II) Donation faite au profit des petites-filles : une donation hors part successorale A contrario, la donation faite au profit des petites-filles, Marion, Camille et Eloïse, a été faite expressément par préciput et hors part successorale, ses bénéficiaires seront Remarque : par opposition, les legs sont par principe considérés comme consentis hors part successorale. Entre vifs, seules les donations-partages et les donations consenties hors part successorale échappent au rapport. 2 14 dispensés de tout rapport dans la succession du disposant et la donation ne sera ainsi pas prise en compte dans le calcul et la répartition des droits. Cependant, au regard de la règle impérative du respect de la réserve héréditaire, Marion, Camille et Eloïse n’étant pas héritières réservataires de leur grand-mère, la donation que celle–ci leur a faite s’imputera sur la quotité disponible et sera susceptible de réduction en cas d’excès de ladite quotité. En l’espèce, la donation faite par Madame Jeanine H au profit de ses petites-filles ne représentant qu’une toute petite part de l’actif successoral, et Madame Jeanine H n’ayant consenti aucune autre donation en avancement de part successorale, celle–ci s’impute sur la quotité disponible mais ne la dépasse pas et n’est donc pas susceptible de réduction. Les petites-filles pourront profiter pleinement de la donation sans risque de la voir a posteriori amputée. III) Dispositions communes à tous les donataires Madame Jeanine H a par ailleurs stipulé dans la donation les conditions ordinaires et de droit en pareille matière, c’est-à-dire la réserve du droit de retour prévue aux articles 951 et 952 du Code civil (A), l’interdiction d’aliéner (B) sauf accord exprès du donateur, et la clause d’exclusion de communauté (C). A) Le droit de retour conventionnel La clause de droit de retour conventionnel énonce que la donation est conclue sous la condition résolutoire du prédécès des donataires, et le plus souvent de leurs descendants. La condition résolutoire est la condition par laquelle si elle se réalisait, l’acte serait annulé de plein droit et serait considéré comme n’avoir jamais existé. Une telle clause a pour objectif d’assurer la conservation des biens donnés dans la famille ; ainsi, si le donataire décède sans postérité, le bien revient au donateur. Le donataire peut en théorie exercer pleinement son droit de propriété sur le bien donné ; en réalité, cette liberté est limitée car il est très difficile de trouver un acquéreur pour des biens grevés d’un droit de retour, sauf si le donateur intervient à l’acte de cession pour renoncer expressément à ce droit. Si la clause résolutoire venait à se réaliser, le donateur redeviendrait alors propriétaire sans avoir à acquitter de droits de succession. Il serait logique que l’anéantissement de la donation entraîne la restitution des droits, solution qui n’a pas été adoptée par la Cour de cassation et l’administration fiscale3. Article 1961, premier alinéa, du code général des impôts : « les droits d'enregistrement ou la taxe de publicité foncière lorsqu'elle tient lieu de ces droits, ne sont pas sujets à restitution dès l'instant qu'ils ont été régulièrement perçus sur les actes ou contrats ultérieurement révoqués ou résolus par application des articles 954 à 958, 1183, 1184, 1654 et 1659 du code civil » (révocation pour cause d'inexécution des conditions, ingratitude, conditions résolutoires). Cass.com. 4-12-2007 n° 06-12.024 : RJF 4/08 n° 523. 3 15 B) L’interdiction d’aliéner La clause de retour conventionnel s’accompagne généralement d’une interdiction d’aliéner pendant toute la durée de la vie du donateur. La seule solution qui permet au donataire d’aliéner le bien donné est l’intervention à l’acte de cession du donateur, qui renonce à tout droit sur ses biens et donne son accord à la vente. La clause d’inaliénabilité est prévue à l’article 900-1 du Code civil qui précise que pour être valable, cette clause doit être temporaire et justifiée par un intérêt sérieux et légitime. Le caractère temporaire est validé lorsque la clause est stipulée pour la durée de la vie du donateur (Civ. 1ère, 8 janvier 1975). L’intérêt sérieux et légitime est accepté sous le motif de la conservation des biens dans la famille du donateur (Civ. 1ère, 20 novembre 1985) et pour l’efficacité du droit de retour conventionnel (Civ. 1ère, 15 juin 1994). En l’espèce, les conditions de validité de la clause d’inaliénabilité sont donc remplies. La clause d’interdiction d’aliéner s’accompagne généralement de la clause d’interdiction d’hypothéquer ; le donataire qui voudrait prendre une garantie sur le bien immobilier donné devrait alors également obtenir l’accord du donateur grâce à son intervention dans l’acte de prise de garantie. En cas de réversion d’usufruit éventuel prévu par le donateur lors de la donation au profit de son conjoint par exemple, le bénéficiaire de l’usufruit éventuel devra En l’espèce, Jacques X... a fait donation à sa fille, Florence X..., épouse Y... A..., en avancement d'hoirie, de la nuepropriété avec réserve d'usufruit d'actions de la société Holding Loste, en stipulant à son profit le droit de retour prévu par l'article 951 du code civil, en cas de prédécès de celle-ci. Florence Y... A... a elle-même fait donation à ses deux filles, Mmes Valentine Z... et Alexandrine Y... A..., de la nue-propriété d'une partie de ces actions. Florence Y... A... est décédée le 28 mai 2000. Par effet du droit de retour appliqué à la première donation, la seconde donation a été résolue. Mmes Valentine Z... et Alexandrine Y... A... ont demandé la restitution des droits acquittés au titre de la donation ; l'administration des impôts ayant rejeté la demande, elles ont fait assigner aux mêmes fins le directeur des services fiscaux de Paris Ouest devant le tribunal de grande instance ; L'arrêt a ordonné la restitution de la somme litigieuse. Or aux termes de l'article 1961 alinéa 1er du code général des impôts, les droits d'enregistrement régulièrement perçus sur les actes ou les contrats ne sont pas sujets à restitution lorsque ces actes ou contrats sont ultérieurement révoqués ou résolus en application des articles 954 à 958, 1183, 1184, 1654 et 1659 du code civil. L'article 1961 alinéa 1er du code général des impôts ne vise pas les articles 951 et 952 du code civil relatifs au droit de retour des biens donnés en donation en cas de prédécès du donataire. Ce droit de retour s'analyse comme une condition résolutoire de la donation telle que définie à l'article 1183 du code civil mentionné à l'article 1961 alinéa 1er. Si les restitutions des droits perçus sur les contrats résolus en application de l'article 1183 du code civil sont interdites conformément aux dispositions de l'article 1961 alinéa 1 er du code général des impôts, il est cependant admis que les résolutions légales puissent faire l'objet d'une restitution des droits ; à cet égard, la clause de retour prévue à l'article 951 du code civil ne s'analyse pas comme une résolution légale opérant de plein droit en dehors de toute initiative des parties mais comme une résolution conventionnelle librement stipulée par les parties bien que prévue par la loi ; ainsi la mise en jeu de la clause de retour entraîne la résolution de la donation sans restitution possible des droits d'enregistrement initialement acquittés. 16 également intervenir à l’acte de cession pour renoncer à son droit sur cet usufruit éventuel. En l’espèce, Monsieur Georges H et ses filles, bénéficiaires de la donation, devront, pour vendre leurs parts sociales, obtenir le consentement exprès de Madame Jeanine H, donatrice. Cependant, l’objet de la donation étant les parts de la SCI familiale, il était, au moment de la donation, fort peu probable que cette clause soit un jour mise en œuvre. Elle a été stipulée par prudence, le rôle de conseil du Notaire étant d’envisager toutes les situations. Il faudra cependant veiller à ce que cette clause ne résulte pas de la seule habitude rédactionnelle et soit utilisée sans frilosité et à bon escient de la part du Notaire. C) La clause d’exclusion de communauté Cette clause a le même objectif que le droit de retour conventionnel, savoir le maintien des biens dans la famille. En effet, cette clause a pour effet que le bien donné restera dans le patrimoine propre du donataire, même si celui-ci est marié sous un régime matrimonial absorbant tous les biens des conjoints, tel que la communauté universelle, ou adopte par la suite un tel régime. Les clauses d’inaliénabilité et d’exclusion de communauté sont considérées comme des charges de la donation, une charge étant une obligation imposée au bénéficiaire de la libéralité. Or, Héloïse était mineure lors de la donation et les mineurs sont frappés d’une incapacité d’exercice. Le représentant légal du mineur peut accepter seul au nom du mineur les donations non grevées de charges. En présence de charges et d’un mineur placé sous le régime de l’administration légale pure et simple, il faut l’accord des deux parents (celle du juge des tutelles et/ou du conseil de famille en cas d’’administration légale sous contrôle judiciaire ou de tutelle). En l’espèce, Héloïse était alors sous le régime de l’administration légale pure et simple, ses deux parents sont intervenus dans l’acte de donation pour l’accepter au nom de leur fille. 17 Section 2 : Les conditions statutaires à la transmission des parts : l’agrément Une société est fondée sur un contrat entre des personnes qui choisissent de s’associer ensemble dans un but commun, selon l’article 1832 du Code civil4. Dans les sociétés comprenant un fort intuitu personae5, telles que les sociétés civiles, il apparait logique que durant la vie de la société, les associés désirant céder leurs parts à un tiers puisse le faire mais avec un droit de regard des autres associés. Les parts sociales obéissent par conséquent à un régime spécifique quant à leur cession, que ce soit à titre gratuit ou à titre onéreux. On dit de ces parts sociales qu’elles ne sont pas librement cessibles. Les associés peuvent disposer des parts leur appartenant au profit de tiers, notamment par donation, sous réserve des dispositions légales prévues en matière d’agrément. L’agrément des donataires est généralement régi par les mêmes principes que pour les cessions à titre onéreux. Selon le principe énoncé à l’article 1861 du code civil, toutes les cessions de parts sociales sont soumises à la procédure de l’agrément, sauf les cessions consenties à des ascendants ou des descendants du cédant. Les dispositions légales ne sont pas d’ordre public et les associés peuvent en disposer autrement dans les statuts en prévoyant d’autres règles en matière de cession de parts sociales, et notamment écarter la libre cessibilité des parts entre ascendants et descendants. En l’espèce, les statuts de la SCI ont été rédigés par acte authentique et reçus le même jour un instant avant la donation par le même notaire. Il est expressément prévu dans cet acte la procédure de l’agrément en cas de donation de parts sociales. Il est prévu au paragraphe « Mutation entre vifs », l’agrément préalable par l’unanimité des associés pour la cession de parts quelle que soit la qualité du cessionnaire, et le cédant participe au vote. La procédure est la suivante : Dans le paragraphe « Procédure d’agrément », il est stipulé que le projet de cession avec la demande d’agrément doivent être notifiés par le cédant, par lettre recommandée avec avis de réception ou par un acte extrajudiciaire, à la société et à chacun des autres associés, avec indication du délai dans lequel la cession doit être régularisée, lequel délai ne peut être inférieur à trois mois à compter de la dernière en date des notifications. Article 1832 alinéa 1er du code civil : « la société est instituée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent par un contrat d’affecter à une entreprise commune des biens ou leur industrie en vue de partager le bénéfice ou de profiter de l’économie qui pourra en résulter. » 5 Définition : La personnalité de chaque associé joue un rôle déterminant dans la constitution, le fonctionnement et la dissolution de la société. 4 18 L’assemblée des associés doit alors se réunir sur convocation du gérant dans le délai d’un mois à compter de la notification du projet. A défaut, un associé peut luimême convoquer ou faire convoquer par mandataire de justice l’assemblée des associés. En cas d’agrément, la cession doit être régularisée dans le délai prévu. En cas de refus d’agrément, chacun des coassociés dispose d’une faculté de rachat à proportion du nombre de parts qu’il détenait au jour de la notification du projet. Cette procédure est longue et complexe. Une autre solution plus simple est possible, c’est celle qui a été adoptée en l’espèce. Dans l’acte de donation de parts sociales, Monsieur Raymond H, seul coassocié dans la SCI de Madame Jeanine H, est intervenu directement et expressément dans l’acte de donation afin d’accepter comme nouveaux membres de la société les quatre donataires, son fils Georges H, et ses petites filles Camille, Marion et Eloïse. Cette solution simple d’intervention du ou des coassociés à l’acte de donation est possible car le ou les associés donnent leur accord dans un acte authentique qui, par nature, est reçu par un Notaire qui, lui-même officier ministériel, s’est assuré de la compréhension et du consentement de ces derniers qui ainsi signent en connaissance de cause. Cette solution remplace la procédure d’agrément longue et complexe qui a été prévue dans les statuts dans le but de protéger les associés contre l’entrée dans la société d’éventuels indésirables. En l’espèce, la procédure d’agrément inscrite dans les statuts n’a pas été prévue pour jouer le jour-même lors de la donation, puisque, comme nous l’avons vu, elle a été facilement contournée grâce à l’intervention du coassocié dans la donation, mais pour le futur, au cas où un associé désirerait céder ses parts sans l’accord de ses coassociés. Les modalités légales et conventionnelles de la donation de parts sociales étudiées ci-avant sont bien évidemment très importantes, mais la plupart des clients d’un office notarial est intéressée par une autre question, beaucoup plus terre-à-terre et pécuniaire. 19 Section 3 : Les frais de Notaire Les frais de Notaire entendus au sens large, c'est-à-dire la somme totale versée au notaire pour la rédaction d’un acte, se composent de différents éléments : - le premier par son importance est sans aucun doute l’élément fiscal (I), c'est-àdire les droits entendus d’une manière générale que le Notaire doit reverser aux services fiscaux du fait de son rôle de collecteur d’impôts. Appelés débours, ces frais correspondent aux frais engagés pour le compte du client et aux divers impôts que le Notaire reverse à l’Etat. - le second est la rémunération à proprement parler du Notaire, appelée émoluments (II). I) La fiscalité applicable à la donation de parts sociales Les frais de Notaire, au sens précisé plus haut, comprennent en réalité plusieurs éléments : l’élément fiscal pur c’est-à-dire les droits d’enregistrement (A) et la taxe de publicité foncière et le salaire du conservateur en l’espèce leur absence (B). A) Les droits d’enregistrement 1) Le rappel fiscal des donations antérieures Le délai de rappel fiscal est la période pendant laquelle les actes de transmission à titre gratuit sont pris en compte d’une manière globale pour le calcul des droits de transmission. Par exemple, pour une donation faite le 31 mai 2012, le délai de rappel fiscal étant à cette époque de 10 ans, il convient de prendre en compte toutes les donations faites depuis le 1er juin 2002 entre les mêmes personnes pour calculer les abattements restants et les droits d’enregistrement. Le délai de rappel fiscal a subi de nombreuses évolutions au cours de ces dernières années, il était de : - 10 ans pour les actes passés jusqu’au 31 décembre 2005, - 6 ans pour les actes passés du 1er janvier 2006 au 31 juillet 2011, au jour de la réalisation de notre acte de donation, - 10 ans pour les actes passés du 1er aout 20116 au 17 août 2012, - 15 ans pour les actes passés depuis le 18 août 2012. Dans les déclarations fiscales relatées dans l’acte, le donateur a déclaré n’avoir consenti aucune donation au donataire au cours des six années précédant ledit acte. 6 Loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 - 1ère loi de finances rectificative pour 2011. 20 En effet, la précédente donation faite par Madame Jeanine H au profit de son fils Monsieur Georges H date de mai 1983, et est par conséquent trop ancienne pour être prise en compte dans le rappel fiscal. Concernant les petites-filles, Madame Jeanine H ne leur a jamais consenti de donation auparavant. 2) Le calcul des droits d’enregistrement Dans le cas d’une donation avec réserve d’usufruit, celle–ci bénéficie d’un régime fiscal très favorable. En effet, dans la mesure où seule la nue propriété est transmise, l’assiette des droits de transmission ne porte que sur ladite nue propriété. L’évaluation fiscale de l’usufruit et de la nue propriété est prévue à l’article 669 du Code général des impôts. En l’espèce, Mme Jeanine H était âgée au jour de la donation de 69 ans, son usufruit est alors évalué fiscalement à 40 % et la nue propriété à 60 %. Les parts sociales ayant été transmises en nue propriété, l’usufruit s’éteindra automatiquement et de plein droit au décès de la donatrice, usufruit et nue propriété seront réunis du même coup entre les mains des donataires, lesquels seront ainsi pleins propriétaires sans surplus de droits à payer à l’administration fiscale. Les donataires ont bénéficié pour cette donation des abattements prévus par les articles 777, 779, 780 et suivants, 790, 793 et suivants du code général des impôts. Monsieur Georges H a pu bénéficier d’un abattement de 50.000 €. Mesdemoiselles Camille, Marion et Eloïse, en tant que petits-enfants du donateur, ont bénéficié d’un abattement de 30.000,00 € chacune7. Etant attributaire chacune d’une valeur de 19.980 €, valeur inférieure au montant de l’abattement, aucun droit n’est perçu. Vous trouverez ci-dessous les tableaux de calcul des droits pour les quatre donataires : Monsieur Georges H VALEUR DONNEE CALCUL DES DROITS Tranches Jusqu'à 50.000 € De 50.001 € à 57.600 € De 57.601 € à 61.400 € De 61.401 € à 65.000 € De 65.001 € à 520.000 € TOTAL 7 119.520 Montant Abattement 7.600,00 3.800,00 3.600,00 54.520,00 12.204,00 Article 790 B du CGI valable au jour de la donation. 21 % 5 10 15 20 Total 380,00 380,00 540,00 10.904,00 Nombre d’enfants au-delà du 2ème 1 Réduction / enfant en sus du 2ème 610,00 Total réduction pour enfants 610,00 SOUS-TOTAL 11.594,00 Pourcentage taxable* 65% DROITS A PAYER 7.536,1 * Réduction de droits due à l’âge du donateur : 35 % si le donateur a moins de 70 ans, ce qui est le cas en l’espèce, 10 % si le donateur a entre 70 et 79 ans (article 790 du Code général des impôts en vigueur du 31 décembre 2005 au 31 juillet 2011). Mademoiselle Camille H VALEUR DONNEE CALCUL DES DROITS 19.980,00 NEANT Mademoiselle Marion H VALEUR DONNEE CALCUL DES DROITS 19.980,00 NEANT Mademoiselle Eloïse H VALEUR DONNEE CALCUL DES DROITS 19.980,00 NEANT Par conséquent, pour une valeur transmise en pleine propriété de 299.100 €, le montant des droits de transmission à titre gratuit s’est élevé à la somme de 7.536, 10 €. Concernant la prise en charge des droits de transmission, c’est en principe le bénéficiaire de la donation qui doit les payer. Cependant, ils sont souvent pris en charge par le donateur. La somme donnée en paiement des droits n’est pas considérée comme une donation et n’est donc pas taxée comme telle. Le montant des frais et droits payés par le donateur n’a pas à être ajouté à la valeur des biens donnés pour calculer l’impôt. Il ne doit pas non plus être rappelé à la succession du donateur ou lors d’une nouvelle donation8. Article 1712 du CGI : « Les droits des actes civils et judiciaires emportant translation de propriété ou d'usufruit de meubles ou immeubles, sont supportés par les nouveaux possesseurs, et ceux de tous les autres actes le sont par les parties auxquelles les actes profitent, lorsque, dans ces divers cas, il n'a pas été stipulé de dispositions contraires dans les actes. » Cet article admet que le donateur soit le redevable légal des droits. Par conséquent, les donataires n'étant plus les redevables légaux de l’impôt, la prise en charge de ces impôts par le donateur ne peut être considérée comme leur attribuant un avantage supplémentaire (cf. TGI de Paris 30 avril 1990 ,2ème chambre, Colonna de Giovellina, à la revue de jurisprudence fiscale 10/91 n° 1311). 8 22 B) L’absence de taxe de publicité foncière et de salaire du conservateur. Cette donation a pour objet la transmission de parts sociales, qui par définition sont des biens meubles ; elle ne doit donc pas être publiée à la Conservation des hypothèques qui n’est compétente que pour les actes ayant pour objet des droits ou des biens immobiliers. Par conséquent, aucune taxe de publicité foncière ni salaire du conservateur ne doit être supporté par les parties. Nous pouvons en déduire aisément l’avantage, certes patrimonial mais surtout fiscal, d’une telle transmission anticipée d’une partie du patrimoine. II) La rémunération du Notaire : les émoluments Ils sont formés d’émoluments d’acte et d’émoluments de formalités, auxquels s’ajoute la TVA au taux normal de 19,6 %. Les émoluments d’acte constituent la rémunération du Notaire pour le travail de préparation et de rédaction de l’acte. Dans une donation, les émoluments d’acte sont proportionnels à la valeur des biens donnés en pleine propriété, calculés selon un barème progressif. Les émoluments de formalités rémunèrent le Notaire pour l’accomplissement de certaines formalités liées à l’acte : la délivrance des états civils, attestations, copies d’actes. A chaque formalité correspond un certain nombre d’unités de valeur (UV) d’un montant actualisé de 3,90 €. Par exemple, une demande d’état civil est rémunérée 1 UV. Cependant, depuis quelques années, il existe un forfait fixe qui comprend les formalités les plus courantes. Au même titre que le Notaire doit rédiger l’acte et collecter l’impôt, il doit procéder à certaines formalités obligatoires. Dans le même sens, la doctrine fiscale estime que la prise en charge par le donateur dans l'acte de donation des frais et droits résultants de cette mutation n'entraine pas une perception complémentaire et distincte. Il n'y a donc pas lieu d'ajouter à la valeur des biens donnés le montant de ces frais et droits pour calculer l'impôt exigible (réponse ministérielle Geoffroy, Sénat 8 octobre 1975, p. 2835 n° 17406). Et cette règle s'applique même si l'acte de donation ne comporte aucune stipulation relative au paiement des droits et frais par le donateur, ce dernier se bornant par exemple à créditer ces sommes à son propre compte à l'étude du notaire rédacteur (Réponse ministérielle Du Luart , Sénat 10 décembre 1987, p. 1936 , n° 8078). 23 Section 4 : Les formalités y attachées Le contrat de donation est un contrat solennel. Il doit obligatoirement être constaté par acte notarié sous peine de nullité. Toutes les parties doivent signer l’acte, également sous peine de nullité. Par respect du principe du parallélisme des formes, en cas d’absence de l’une des parties à la signature, la procuration doit également être passée par acte authentique. En l’espèce, toutes les parties étaient présentes lors de la signature de l’acte authentique de donation. L’un des bénéficiaires étant mineur, il a été représenté par ses deux parents titulaires de l’autorité parentale, tous deux présents lors de la signature. Du fait de son caractère authentique et solennel, il existe des formalités obligatoires, en sus des formes requises pour la signature de l’acte, préalables (I) et postérieures (II). I) Formalités préalables Les formalités préalables communes à toutes les donations sont les suivantes : Demande de tous les extraits d’acte de naissance et de mariage de toutes les parties à l’acte, en ce compris les intervenants, ceci afin de vérifier que toutes les parties sont capables juridiquement de signer l’acte, ainsi que le régime matrimonial éventuel qui pourrait avoir un impact sur la propriété du bien. Demande au propriétaire actuel du titre de propriété, dans le but de vérifier les clauses mentionnées dans le titre qui pourraient limiter les pouvoirs du propriétaire pour disposer de ses biens ou toute autre clause qui pourrait avoir un impact sur la donation. Remarque : en présence des cessions de biens immobiliers ou de droits réels, il est indispensable de demander à la Conservation des hypothèques géographiquement compétente un état hypothécaire trentenaire dans le but de vérifier la chaîne des propriétaires et tout droit éventuel qui pourrait grever le bien objet du présent acte. Les formalités préalables spécifiques à une donation de parts sociales sont celles dues à la nature même de l’objet de la donation : la demande au Greffe du Tribunal de commerce des derniers statuts mis à jour, du kbis et de l’état complet des inscriptions. La donation des parts sociales ayant été en l’espèce réalisée le même jour un instant après la réalisation des statuts, les formalités préalables de la donation se sont confondues avec celle des statuts. II) Formalités postérieures 24 Les formalités postérieures sont nécessaires pour que la donation des parts sociales et donc le changement d’associés soient connus de tous : la société elle-même (A), l’administration fiscale (B) et les tiers (C). A) L’opposabilité à la société Afin d’être opposable à la société, la cession doit lui être signifiée par huissier ou être acceptée par elle dans un acte authentique ; les statuts peuvent prévoir d’autres formalités et remplacer la signification par un transfert des parts sur le registre des associés. A défaut du respect de ces formalités, le transfert est inopposable à la société sauf si les associés en ont eu connaissance et l’ont approuvé, par exemple dans la procédure d’agrément. Le gérant à l’inverse, peut se prévaloir de la non signification et exiger du cédant qu’il remplisse ses obligations d’associé. En l’espèce, la donation n’a pas été signifiée à la société car le gérant et les associés sont intervenus à l’acte authentique de donation et sont donc informés de ladite cession. B) L’enregistrement Les cessions de parts de sociétés civiles sont obligatoirement soumises à l’enregistrement, laquelle formalité doit être accomplie dans le délai d’un mois à compter de la date de l’acte. En cas d’acte notarié, le service des impôts compétent est celui de la résidence du notaire. En cas d’acte sous signatures privées, le service des impôts compétent est celui du domicile de l’une des parties à l’acte. Pour l’enregistrement d’une donation de parts sociales, le notaire doit envoyer au service fiscal de l’enregistrement une copie simple de l’acte, un extrait fiscal et un chèque correspondant aux droits éventuels. Les modalités de calcul des droits d’enregistrement et le montant de ses droits ont été étudiés ci-avant dans le paragraphe concernant le calcul des droits et le coût de l’acte. En cas de constitution de la société et de donation de parts sociales le même jour, ce qui est notre cas en l’espèce, les deux actes doivent être enregistrés (d’abord les statuts puis la donation dans le mois) en suivant la même procédure que citée précédemment, à ceci près que les statuts sont exonérés de droits d’enregistrement. Le service de l’enregistrement doit en retour faire parvenir au notaire la mention d’enregistrement. 25 C) L’opposabilité aux tiers En l’espèce, la société venant d’être créée, il convient bien évidemment d’accomplir les formalités nécessaires à la constitution de la SCI pour son immatriculation (insertion dans un journal d’annonces légales et envoi au greffe des différentes pièces nécessaires à son immatriculation). Dès que la société est immatriculée, à la réception du kbis, il convient de modifier les statuts pour y faire apparaitre les nouveaux associés et la nouvelle répartition des parts sociales, nouveaux statuts qui doivent être approuvés par le gérant. A réception des statuts approuvés, le notaire doit effectuer les formalités auprès du Greffe du Tribunal de commerce afin de rendre la donation de parts opposable aux Tiers. Les formalités tenant à la création de la société ont été accomplies en priorité ; le clerc aux formalités postérieures a réalisé par la suite les formalités postérieures relatives à la donation de parts. La société (ou le Notaire) doit déposer au Greffe du Tribunal de commerce différentes pièces nécessaires au greffier pour enregistrer les changements9. A défaut d’accomplissement de ces formalités, le cédant est considéré à l’égard des Tiers comme étant toujours propriétaire ; il reste notamment tenu des dettes sociales dans les mêmes proportions. Cependant, si les statuts mis à jour constatant cette cession ont été publiés, la cession est tout de même opposable aux tiers. Madame Jeannine G a réalisé cette donation en juillet 2006. Elle décède moins de quatre ans plus tard, en janvier 2010. La donation ne constituant que la première étape du transfert global du patrimoine aux héritiers, il convient par conséquent d’étudier désormais la suite du transfert de ce patrimoine par le règlement de la succession de Madame Jeanine H. - deux copies authentiques si l’acte est notarié avec la mention d’enregistrement annotée sur la première page, ou deux originaux si l’acte est sous signatures privées, - deux exemplaires des statuts mis à jour, - copies des cartes d’identité des nouveaux associés, - liasse fiscale (imprimé M3A en trois exemplaires) - et deux chèques d’un montant respectivement de 89,54 € et de 214,57 €. 9 26 CHAPITRE 2ND : LA SUCCESSION Madame Jeanine G veuve H est décédée en janvier 2010 à TOULOUSE, laissant pour lui succéder ses deux enfants issus de son union avec son conjoint prédécédé, Monsieur Georges H et Madame Marie-Christine H épouse C. La loi applicable est celle en vigueur le jour de l’ouverture de la succession, soit le jour du décès de la défunte, le lieu d’ouverture de la succession est le lieu du décès, soit Toulouse en France. Les ayants-droit de la défunte sont devenus le jour de son décès propriétaires à part entière et en indivision des biens dépendant de la succession. Par ailleurs, un point important, même s’il n’a pas posé de problème dans le règlement du dossier d’espèce, doit être traité : il convient pour le Notaire de vérifier si la réserve héréditaire des héritiers réservataires est respectée, la réserve héréditaire étant la part dont on ne peut priver un descendant du défunt, ce dernier-même ne pouvant en décider autrement (article 912 et suivants du Code civil). En l’espèce, le donateur avait deux enfants, tous les deux venant à sa succession, la quotité disponible est donc d’un tiers et la réserve globale de deux tiers, soit une réserve individuelle d’un tiers chacun (article 913 du Code civil). Selon les articles 919 et suivants du Code civil, lorsqu’une libéralité à titre gratuit, entre vifs ou à cause de mort, a été consentie au profit d’un héritier réservataire, afin de vérifier que cette donation n’entame pas la réserve des autres héritiers réservataires, la libéralité qui lui a été faite s’impute en priorité sur sa propre réserve héréditaire, puis si elle l’excède, subsidiairement sur la quotité disponible. En cas d’excès de la quotité disponible et donc d’impact sur la réserve des autres héritiers réservataires, cette libéralité sera réductible. En cas de libéralité faite hors part successorale à un héritier réservataire ou à un tiers, celle-ci s’impute sur la quotité disponible et est réductible en cas d’excès de ladite quotité disponible. Le calcul est établi de la manière suivante : La masse de calcul est composée de la somme des biens présents au jour du décès (en ce compris les legs), de laquelle on déduit le passif au jour du décès, et à laquelle on ajoute les donations fictivement rapportées (de la valeur au jour du décès selon l’état du bien au jour de la donation). Les valeurs utilisées sont celles portées dans la déclaration de succession, sauf celles marquées d’un astérisque * qui sont celles reprises dans le partage, à défaut d’information quant à leur valeur au jour du décès. 27 Biens présents : Parcelles de terre : 557.994 € Vieille maison : 357.000 € 57 parts sociales de la SCI : 9.405 € Mobilier : 9.360 € Voiture : 1.000 € Liquidités : 90.700 Actif brut : 1.025.459 € Duquel on déduit le passif : 12.400 Soi un actif net : 1.013.059 € Auquel on ajoute les donations antérieures : Au profit de Georges : Donation en date du 20 mai 1983 : 79.370 €* Donation en date du 8 juillet 2006 : 119.520 € Total : 572.905 € Au profit de Marie-Christine : Donation en date du 1er mars 1995 : 1.049.000 €* Donation en date du 6 mars 2001 : 59.000 €* Total : 1.108.000 € TOTAL MASSE DE CALCUL : 2.693.964 La réserve globale est de 2/3 soit : 1.795.976 La réserve individuelle est de 1/3 soit : 897.988 La quotité disponible est de 1/3 soit : 897.988 L’imputation des donations sur les réserves de chacun ou sur la quotité disponible peut se faire grâce au tableau suivant : Réserve Georges 897.988 Donation du 20 mai 1983 : 897.988 - 79.370 = 818.618 Cette donation n’excède pas la réserve individuelle de Georges Réserve Marie-Christine 897.988 28 Quotité disponible 897.988 Donation du 1er mars 1995 : 897.988 - 1.049.000 = - 151.012 Cette donation excède la réserve individuelle de Marie-Christine, il convient d’imputer l’excédent sur la quotité disponible 897.988 - 151.012 = 746.976 Cela n’excède la quotité disponible Donation 6 mars 2001 : 746.976 - 59.000 = 805.976 La réserve de Marie-Christine est épuisée, il convient d’imputer cette donation sur la quotité disponible qui ne l’excède pas. Donation du 8 juillet 2006 : 805.976 - 59.940 = 746.036 La donation faite aux petitesfilles n’excède pas la quotité disponible Donation du 8 juillet 2006 : 818.618 - 119.520 = 699.098 Cette donation n’excède pas la réserve individuelle de Georges En l’espèce, les libéralités faites au profit des héritiers réservataires et aux petites-filles de Madame Jeanine H n’excèdent pas les réserves héréditaires des héritiers réservataires ou la quotité disponible. Il n’existe aucune autre libéralité. Le règlement des successions relève de la compétence exclusive des Notaires qui doivent réaliser les différents actes nécessaires à la constatation de la transmission du patrimoine du défunt (section 1), succession dont le règlement s’achèvera par le partage des biens dépendant de la succession entre les héritiers (section 2). 29 Section 1 : Les différents actes de la succession Les actes nécessaires au règlement de la succession de Madame Jeanine H, traités dans l’ordre chronologique, sont les suivants : la notoriété (I), l’inventaire (II), l’attestation immobilière de propriété (III) et la déclaration de succession (IV – même si ce n’est pas un acte authentique à proprement parlé). I) L’acte de notoriété Le Notaire doit tout d’abord établir la dévolution successorale, c'est-à-dire déterminer les personnes qui succèdent au défunt. En l’espèce, il ne fait aucun doute quant à l’identité des héritiers de la défunte qui sont ses enfants, et rien ne laisse suggérer qu’elle aurait pu avoir d’autres enfants. Il résulte par ailleurs de la déclaration des ayants-droit et de la consultation du fichier central des dispositions de dernières volontés, dit Fichier Venelles, que le défunt n’avait pris aucune disposition de dernières volontés, la dévolution est donc légale, et non pas volontaire, et la succession ab intestat. A partir de ces éléments, il convient de dresser un acte destiné à constater la dévolution, l’acte de notoriété. A) Définition Aux termes de l’article 730-1 alinéa 3 du code civil, l’acte de notoriété « contient l’affirmation, signé du ou des ayant-droits auteurs de la demande, qu’ils ont vocation, seuls ou avec d’autres qu’ils désignent, à recueillir tout ou partie de la succession du défunt ». Cet acte doit être rédigé par le notaire ; il doit mentionner l’acte de décès du de cujus, faire mention des pièces justificatives, et le cas échéant des documents qui constatent l’existence de libéralités à cause de mort pouvant avoir une incidence sur la dévolution successorale. La dévolution successorale doit être prouvée et démontrée. Cet acte est rédigé par le notaire théoriquement à la demande de l’un des ayantdroits, en pratique il était fait systématiquement en présence d’ayant(s)-droit. En effet, depuis un arrêt de la cour de cassation du 18 février 1964 10, le notaire qui s’est dispensé de la rédaction d’un acte de notoriété pour passer un autre acte engage sa responsabilité. L’acte de notoriété emporte la preuve de la qualité de héritier, et fait foi jusqu’à preuve du contraire. Les héritiers désignés dans l’acte sont réputés à l’égard des tiers détenteurs des biens de la succession, en avoir la libre disposition et s’il s’agit de fonds, la libre disposition dans la proportion indiqué dans l’acte11. B) Formalités 1) Formalités préalables 10 11 Cass. Civ.1ère, 18 février 1964, Bull.civ.I n°94. Article 730-4 du Code civil. 30 Préalablement à la rédaction de l’acte de notoriété, il est indispensable de demander aux mairies des communes de naissance les extraits intégraux des actes de naissance des ayants-droit, et aux mairies des communes de mariage les extraits intégraux des actes de mariage de ceux-ci. Ceci afin de prendre connaissance, non seulement de l’intégralité de l’état civil de chaque ayant-droit (prénoms, nom de famille…) mais également de l’existence éventuelle d’une mention en marge de l’extrait d’acte de naissance telle que mariage, décès, mention au répertoire civile, changement de régime matrimonial. Il est par ailleurs indispensable d’aller rechercher sur le fichier central des dernières volontés, dit « fichier Venelles » (car il est situé dans la commune de Venelles dans les Bouches du Rhône), l’existence éventuelle d’une disposition de dernières volontés (telle que testament et donation au dernier vivant), la réponse dudit fichier devant être annexée à l’acte de notoriété. 2) Formalités postérieures Suite à la signature de l’acte de notoriété par tous les ayants-droit, le notaire doit envoyer à la mairie de la commune où est décédé le de cujus, la copie de l’acte de notoriété, ceci afin qu’il en soit fait mention en marge de l’extrait d’acte de décès. L’acte de notoriété doit par ailleurs être enregistré au service fiscal de l’enregistrement. C) Coût de l’acte Le coût de l’acte de notoriété comprend plusieurs éléments : - Un coût fiscal : lors de l’enregistrement de l’acte, le droit fixe est de 125 € en présence d’un conjoint survivant ou d’un testament, ou de 25 € en l’absence de conjoint survivant ou de testament. En l’espèce, le conjoint de Madame Jeanine H, Monsieur Raymond H, est prédécédé et il n’existe pas de testament, le droit fixe est donc de 25 €. - l’émolument du Notaire : encadré par la règlementation française, il est de 58,50 € HT, soit 69,97 € TTC. - Les débours pour les copies et formalités réalisées par l’office notarial. II) Inventaire, ouverture et clôture A) Définition L’inventaire est l’acte dans lequel le notaire énonce et liste les différents éléments d’actif et de passif : il commence par l’énumération et la prisée du mobilier puis l’analyse des titres et des papiers. Obligatoire dans un certain nombre de cas12, il n’est que facultatif en l’espèce. 12 L’inventaire est obligatoire dans les cas suivants : acceptation d’une succession à concurrence de l’actif net (article 789 du code civil), En présence d’un exécuteur testamentaire (article 1029 alinéa 2 du Code civil), En cas de succession vacante ou en déshérence (articles 809-2 et 811-1 du Code civil), à la demande des descendants en cas de conjoint survivant optant pour l’usufruit (article 600 du code civil), 31 Dans la déclaration de succession, le mobilier peut être évalué forfaitairement à 5 % de l’actif brut successoral, selon l’article 764 du Code général des impôts. Si le notaire constate que la valeur réelle totale du mobilier excède ou est manifestement inférieure à ce forfait, il doit réaliser l’inventaire et évaluer au plus juste la valeur de chaque élément mobilier. En présence de meubles exceptionnels tels que des œuvres d’art, le notaire peut confier l’inventaire à un commissaire priseur ou faire appel à un expert. Les formes à respecter pour la réalisation de l’inventaire sont prévues aux articles 1328 à 1333 du Code de procédure civile. En l’espèce, le notaire a réalisé lui-même l’inventaire de l’intégralité du mobilier. En cas d’impossibilité matérielle d’inventorier la totalité des biens meubles le même jour, l’inventaire peut être réalisé en plusieurs dates : par un premier acte qui constate l’ouverture de l’inventaire et énonce une partie des biens mobiliers, puis un second acte qui énonce le reste des biens mobiliers et constate la clôture de l’inventaire ; ce qui fut notre cas en l’espèce. B) Coût de l’acte L’inventaire doit indiquer l’heure du commencement et celle de la fin ainsi que le nombre de vacations, en vue de la perception des droits d’enregistrement et du calcul des émoluments. Le calcul des droits d’enregistrement est basé sur le nombre de vacations de trois heures. L’inventaire par acte notarié doit être enregistré dans le délai d’un mois en vertu de l’article 635 du Code général des impôts. L’émolument de base du notaire pour l’inventaire est de 78 € HT, soit 93,29 €. III) Attestation immobilière de propriété A) Définition L’attestation immobilière de propriété est l’acte par lequel le notaire constate le transfert de propriété des biens et droits immobiliers aux ayants-droit du de cujus suite à son décès. Cet acte est obligatoire en présence de biens immobiliers. Il existe une dérogation à cette obligation : en cas de partage signé et publié dans les dix mois du décès, il n’est pas nécessaire de faire une attestation immobilière de propriété. Ce ne fut pas le cas en l’espèce. En l’espèce, préalablement à l’énonciation des biens immobiliers dépendant de la succession, les ayants-droit ont déclaré accepter ladite succession (la notoriété signée auparavant par les ayant-droits n’emportant pas acceptation de la succession). - à la demande des héritiers en cas d’exercice par le conjoint survivant de son droit viager au logement (article 764 alinéa 4 du Code civil), par les administrateurs légaux en cas de recueil par un enfant mineur de biens mobiliers (article 503 alinéa 1 du Code civil), par le tuteur sur les biens mobiliers du majeur sous tutelle (article 503 alinéa 1 du Code civil), Par le mandataire lors de la prise d’effet du mandat de protection futur (article 486 alinéa 1 du Code civil). 32 Le notaire énonce ensuite les différents biens immobiliers ayant appartenu à la défunte (désignation des biens, références cadastrales, document d’arpentage le cas échéant), ainsi que l’effet relatif, l’évaluation et l’origine de propriété de chacun des lots. Il est ici précisé, comme nous le verrons plus en détail ci-après, que les ayantsdroit ont fait appel à un expert pour évaluer les biens dépendant de la succession, décidant d’un commun accord de s’en tenir à cette expertise. B) Formalités 1) Formalités préalables Les formalités préalables à accomplir pour la rédaction de l’attestation immobilière de propriété sont la demande et la réception des états civils comme cela est le cas pour la notoriété, mais surtout la demande et la réception d’un état hypothécaire trentenaire et des titres de propriété. Un état hypothécaire trentenaire doit être demandé à tous les bureaux des hypothèques dans le ressort desquels se trouvent des biens immobiliers dépendant de la succession, état hypothécaire réel et personnel. Il convient de vérifier dans ce document non seulement l’effet relatif mais également l’intégralité de la chaîne de propriété depuis les 30 dernières années, ce qui permettra notamment la rédaction de l’origine de propriété. L’état hypothécaire informe également son lecteur de l’existence des droits réels et inscriptions pouvant grever le bien tels qu’une servitude, que ce soit le fond dominant ou le fonds servant, un usufruit ou des hypothèques. Le titre de propriété renseigne également le clerc rédacteur de l’attestation immobilière sur tout droit réel pouvant exister sur le bien. En l’espèce, les biens dépendant de la succession étaient libres de toute inscription. 2) Formalités postérieures L’attestation immobilière de propriété est un acte soumis à la formalité fusionnée, c'est-à-dire que les formalités de l'enregistrement et de la publicité foncière sont fusionnées pour les actes publiés au fichier immobilier en vertu des articles 647 et suivants du Code général des impôts. L'enregistrement des actes soumis à cette formalité et assujettis obligatoirement à la publicité foncière résulte de leur publicité. La formalité fusionnée doit être requise dans le délai d'un mois à compter de la date de l'acte en vertu de l’article 635 du Code général des impôts, au bureau des hypothèques de la situation de l'immeuble. A l’époque de la signature de l’attestation immobilière, le délai de publication au bureau des hypothèques était de deux mois, il est passé à un mois le 1er janvier 2012. Lorsque les immeubles sont situés sur le ressort de différents bureaux des hypothèques, la publication doit être effectuée sur chacun des bureaux compétents ; il convient alors de choisir sur lequel des bureaux la publicité sera requise un premier. 33 En l’espèce, tous les biens dépendant de la succession étaient situés à Castelginest, commune située dans le ressort du 1er Bureau de la Conservation des Hypothèques de Toulouse. C) Coût de l’acte Le coût que représente l’attestation immobilière de propriété comprend différents éléments : - L’aspect fiscal : La taxe de publicité foncière correspond à un droit fixe de 125 €. Le salaire du conservateur est de 0,10 % ayant pour assiette la somme des valeurs des différents biens immobiliers dépendant de la succession, avec un minimum de 15 €. - L’émolument du Notaire se calcule comme suit : Jusqu'à 6.500,00€ 2,00% De 6.501 à 17.000€ 1,10% De 17.001 à 30.000€ 0,75% Au dessus de 30.001€ 0,55% Barème progressif calculé hors taxe, auquel s'ajoute la TVA au taux de 19,6 %. - Les débours du Notaire : copies, états hypothécaires, formalités diverses. IV) Déclaration de succession A) Définition Bien qu’elle fasse partie de façon à part entière du règlement de la succession et qu’elle soit rédigée par le notaire, la déclaration de succession n’est pas un acte authentique. Il s’agit d’un formulaire fiscal (cerfa numéro 2705), auquel sont tenus héritiers et légataires même si aucun droit n’est du, ceux-ci étant tenus de la déposer aux services fiscaux dans les six mois du décès. Pour les successions en ligne directe et celles entre époux ou partenaires pacsés, elle n’est nécessaire que si l’actif brut successoral dépasse le montant de 50.000 €, pour les autres successions, lorsque l’actif brut successoral est supérieur à 3.000 € (article 800, I du Code général des impôts, applicable à compter du 1er janvier 2006). B) Contenu de la déclaration La déclaration doit mentionner tous les renseignements nécessaires au calcul des droits de mutation et au contrôle de ces éléments par l’administration fiscale, notamment : - Les éléments relatifs à l’état civil du défunt et de ses héritiers et/ou légataires, - Les dispositions testamentaires le cas échéant, et les éléments relatifs au régime matrimonial sous lequel le défunt était marié, - Les donations que le défunt avait pu consentir à ses successibles, 34 - L’énumération et l’estimation détaillée des biens dépendant de la succession, notamment les immeubles avec tous les éléments permettant de les identifier, Tous les éléments de passif, c'est-à-dire les valeurs dont le défunt était redevable au jour de son décès, et leurs justificatifs, Les contrats d’assurance-vie éventuels souscrits par le défunt. Le notaire doit veiller au respect de l’obligation déclarative qui porte sur les donations antérieures quelle que soit leur date. En effet, l’obligation déclarative ne doit pas être confondue avec celle du non rappel fiscal des donations antérieures. En l’espèce, le notaire a rappelé dans la déclaration toutes les donations qui avaient été faites par le défunt dans les 6 années précédant son décès, délai de rappel fiscal en vigueur au jour du décès. Il a ensuite listé la totalité des biens mobiliers et immobiliers dépendant de la succession, la somme de ces évaluations formant l’actif brut successoral. L’évaluation des biens composant l’actif successoral Le principe est que l’assiette des droits de succession est la valeur des biens transmis. Les biens transmis doivent être estimés à leur valeur vénale réelle au jour du décès. Concernant les immeubles, la règle d’évaluation est prévue à l’article 761 du Code général des impôts : les immeubles, quelque soit leur nature, sont estimés d’après leur valeur vénale réelle au jour du décès. Il existe des exceptions à ce principe, en cas d’adjudication dans les deux années précédant le décès ainsi qu’un abattement de 20 % sur la valeur vénale réelle de la résidence principale du défunt (article 764 bis du Code général des impôts). En l’espèce, le défunt n’était pas propriétaire de sa résidence principale, il n’y a donc pas lieu d’appliquer l’article 764 bis du Code général des impôts. Concernant les meubles, les règles d’évaluation sont différentes selon la nature du meuble : - Pour les meubles incorporels, le Code général des impôts fixe un principe général d’évaluation et deux règles d’évaluation particulières pour les valeurs mobilières cotées et les créances à terme. En vertu de l’article 758 du Code général des impôts, le principe est que la valeur assiette de l’impôt est déterminée par la déclaration détaillée et estimative des parties. En l’espèce, il n’existait pas dans la succession de valeurs mobilières cotées ni de créances à terme, il n’est donc pas nécessaire de les traiter ici. 35 - Pour les meubles corporels, prévus à l’article 764 du Code général des impôts, le mode d’évaluation est différent selon le type de meubles corporels. Concernant les meubles meublants, leur valeur doit être déterminée par le prix exprimé dans l’acte de vente lorsque la vente a eu lieu publiquement dans les deux années du décès, à défaut de vente publique par l’estimation contenue dans un inventaire dressé dans les cinq ans du décès, à défaut par la déclaration détaillée et estimative des parties. Dans cette dernière hypothèse, la valeur des meubles meublants ne peut être inférieure à 5 % de l’actif brut. Il existe également une règle particulière concernant l’évaluation des bijoux, pierreries, objets d’art ou de collection. Aucun de ces objets n’existant dans la succession en l’espèce, il ne sera pas traité de cette question. Pour les meubles corporels autres que ceux cités précédemment, leur valeur est déterminée par le prix exprimé dans l’acte de vente lorsque la vente a eu lieu publiquement dans les deux années du décès, à défaut de vente publique par l’estimation contenue dans un inventaire dressé dans les cinq ans du décès, à défaut par la déclaration détaillée et estimative des parties. La succession de Madame Jeanine H comprenant un certain nombre d’éléments d’actifs, il est nécessaire d’étudier l’évaluation de certains d’entre eux : - « Les 57 parts sociales de 165 € chacune de la société civile immobilière dont le siège social est à CASTELGINEST (Haute Garonne), au capital de 304800 €, identifiée au SIREN sous le n°++++. La valeur desdites parts, à raison de 165 € la part, s'élève à la somme de 9.405,00€ Ci ........................................................................................................ 9.405,00 € » Etant des meubles incorporels, le principe est que la valeur est déterminée par la déclaration détaillée et estimative des parties. S’agissant d’une société civile immobilière, la valeur de la société et donc de ses parts sociales doit être déterminée en fonction des biens immobiliers dont la société est propriétaire, déduction faite du passif dont elle est redevable. Lors de la création de la société et de la donation de parts sociales en juillet 2006, la part sociale était estimée à 100 €. Depuis lors, des modifications ont été effectuées sur les biens immobiliers dont est propriétaire la SCI, dont une division parcellaire résultant d’un document d’arpentage. Par ailleurs, la SCI a vendu une partie des parcelles dont elle est propriétaire pour un prix de 62.960 €, prix intégralement converti en une obligation de faire. Cette obligation de faire, ainsi que nous l’étudierons plus en détail en seconde partie, correspond à la réalisation de travaux qui vont apporter une plus-value aux biens restant à appartenir à la SCI. Cette plus-value doit être prise en compte dans l’évaluation de la valeur de la société et donc de ses parts sociales. Il est ici précisé que la SCI n’est débitrice d’aucun passif. Les ayants-droit ont en l’espèce, décidé d’évaluer la valeur des parts sociales au jour du décès à une valeur forfaitaire de 165 € la part, soit une plus-value de 65 € depuis la création de la société, valeur qui sera par ailleurs reprise dans le partage. 36 - « Un tènement immobilier sis à CASTELGINEST cadastré section XX n° +++ pour 49 a 32 ca, d'une valeur de 557.994,00€ Ci ........................................................................................................ 557.994,00 € » La déclaration de succession fait état des biens immobiliers existant au jour du décès du défunt. Ce tènement immobilier faisant partie de la succession de Madame Jeanine H au jour de son décès a été vendu quelques mois plus tard au profit d’une société HLM, dont l’acte de vente sera étudié en seconde partie. Concernant l’évaluation de ce tènement immobilier dans la déclaration de succession, les ayants-droit ont choisi de se référer au prix de vente, l’immeuble n’ayant pas subi de modifications entre le jour du décès et le jour de sa vente. Il s’agit effectivement de ce qu’il y avait de plus juste pour déterminer la valeur vénale réelle de l’immeuble. - « Un immeuble sis à CASTELGINEST (Haute Garonne), dont la désignation est la suivante : un bâtiment élevé d'un étage sur rez-de-chaussée, avec combles perdus, composé de deux appartements, de type T4 chacun, et portant le numéro 19. Estimé à la somme de 264.000,00€ Ci ........................................................................................................ 264.000,00 € » - « Un immeuble sis à CASTELGINEST (Haute Garonne), dont la désignation est la suivante : une vieille maison sans usage contigüe à la précédente, avec un garage portant le numéro 21. Estimé à la somme de 93.000,00€ Ci ........................................................................................................ 93.000,00 € » Ces immeubles sont traités ensemble dans les différents actes relatifs à la succession, ils n’ont subi aucune modification depuis le décès de Madame Jeanine H, si ce n’est une modification parcellaire relatée dans l’attestation immobilière de propriété. Comme cela est prévu à l’article 761 du Code général des impôts, les immeubles sont estimés d’après leur valeur vénale réelle au jour du décès. En l’espèce, les parties ont décidé de fixer d’un commun accord la valeur vénale réelle des biens immobiliers aux valeurs ci-dessus mentionnées. Suite à l’établissement de l’actif successoral, le notaire a énuméré les différents éléments de passif dépendant de la succession au jour du décès du défunt, et notamment les impôts que le défunt n’avait pas encore payé et dont il était redevable tels que taxe foncière, taxe d’habitation et impôt de solidarité sur la fortune ; la somme de ces montants formant le passif de succession. L’actif net successoral, déterminé par la soustraction du passif de succession sur l’actif brut successoral, est ensuite réparti entre les ayants-droit selon leur quotepart dans la succession. En l’espèce, l’actif net successoral est dévolu pour moitié à chacun des deux enfants de la défunte, Monsieur Georges H et Madame Marie-Christine H épouse C. 37 La déclaration de succession doit se terminer par la déclaration de sincérité. C) Coût de l’acte 1) La fiscalité applicable à la déclaration de succession Lors du dépôt du formulaire fiscal de déclaration de succession, il convient de déposer également le règlement des droits correspondants, ainsi qu’il a été énoncé précédemment. Il est nécessaire par conséquent d’en faire le calcul. L’actif net successoral, obtenu par la soustraction du passif de succession sur l’actif brut successoral, détermine la masse taxable qui est elle-même répartie entre les ayants-droit selon leur quotepart dans la succession. Pour chaque ayant-droit est déterminée sa quotepart ; en l’espèce, il y a deux héritiers en ligne directe, chacun a par conséquent droit à la moitié de ladite masse fiscale. De chacune des quoteparts est ensuite déduit l’abattement légal applicable à l’ayant-droit au jour du décès du de cujus (prévu à l'article 779-I du CGI). En l’espèce, ce sont des héritiers en ligne directe, l’abattement légal est à l’époque du décès de Madame Jeanine H de 156.974 euros par enfant. Lors de la déduction de l’abattement légal, il est obligatoire de déduire de cet abattement légal le montant des abattements déjà utilisés lors de libéralités ayant été consenties avant le décès du défunt. Il est donc nécessaire de rappeler les donations antérieures. Le rappel fiscal des donations antérieures Dans la déclaration de succession, il est obligatoire d’énoncer les donations antérieures éventuelles et de déduire de l’abattement légal, le montant des abattements déjà utilisés lors de transmissions à titre gratuit entre mêmes personnes ayant eu lieu dans le délai de rappel fiscal, en vertu de l’article 784 du Code général des impôts ; ce délai était fixé à l’époque du décès de Madame Jeanine H à six ans. En l’espèce, Madame Marie-Christine H épouse C n’avait été bénéficiaire d’aucune donation de la part de sa mère dans les six années précédant son décès, les donations qu’elle lui avait consenties datant de 1995 et 2001. Concernant les donations antérieures faites par la défunte au profit de son fils Guy, la première datant de 1983 est trop ancienne et n’est donc pas fiscalement « rappelée », la seconde datant de 2006 a été faite moins de 6 ans avant le décès de Madame Jeanine H le 23 janvier 2010 et doit donc être prise en compte dans le calcul des droits de mutation a titre gratuit. Pour calculer le montant de chaque quotepart et par la suite fixer le montant des droits de succession et notamment déterminer si l'abattement subsiste en tout ou partie, 38 il est tenu compte de la valeur du bien au jour de la donation13, le changement de valeur du bien donné n’est pas pris en compte dans le calcul. Les effets du rapport fiscal sont favorables aux héritiers ; en effet, dans le cas où une donation a été faite à une époque où l'abattement légal était inférieur à son niveau actuel, le supplément d'abattement ne se trouve pas réduit ou même supprimé par l'accroissement de la valeur du bien depuis la donation, mais bénéficie entièrement aux héritiers. Remarque : cette règle du rapport fiscal des donations antérieures ne doit pas être confondue avec celle du rapport des donations (article 843 du Code civil). En application des règles du droit civil, les donations en avancement de part successorale doivent être rapportées, c'est-à-dire ajoutées à l'actif successoral, pour déterminer le montant des parts héréditaires ; elles seront déduites par la suite de la part du bénéficiaire de manière à ne pas être taxées deux fois à l'impôt de mutation à titre gratuit14. S'agissant de la liquidation des droits de succession, les biens rapportés sont déduits de la part de l'héritier qui a effectué le rapport à concurrence de celui-ci, en vertu de la règle non bis in idem, principe qui interdit de taxer la même matière imposable par le même impôt (même cause d'imposition) et par la même autorité. Le calcul des droits de succession par ayant-droit : Monsieur Georges H : Ainsi, en l’espèce, Monsieur Georges H doit se voir déduire le montant de l’abattement déjà utilisé lors d’une précédente donation de l’abattement global dont il bénéficie. L’abattement subsidiaire est ensuite déduit de sa quotepart pour donner le montant taxable, montant auquel il convient d’appliquer le barème progressif des droits de succession, tel qu’il est ci-dessous mentionné. Sa quote-part est de .............................................................506.033 Assiette taxable .....................................................................506.033 Abattement et réduction Abattement légal.............................................................. - 156.974 Abattement global utilisé ....................................... NEANT Abattement déjà utilisé ...................................................... 50.000 Abattement subsidiaire ....................................................106.974 Montant taxable ....................................................................399.059 DROITS A PAYER ................................................................... 78.033 13 14 Documentation fiscale, document de base 7 G 245 n°8. Documentation fiscale, document de base 7 G 2412 n° 3. 39 7.953 ..................... à .................... 5% = ........................ 398 3.977 ..................... à ................. 10% = ........................ 398 3.767 ..................... à ................. 15% = ........................ 565 383.362 ................ à ................. 20% = .................. 76.672 Total ............................... ................................. .................. 78.033 NET A PAYER ........................................................................... 78.033 Madame Marie-Christine H épouse C : En revanche, Madame Marie-Christine H épouse C n’ayant bénéficié d’aucune libéralité de la part de son parent décédé dans les 6 années précédent le décès, bénéficie de l’intégralité de l’abattement en ligne directe. Malgré ledit abattement, le montant taxable reste important et doit être soumis au barème progressif des droits de succession, tel qu’il est ci-dessous mentionné. Sa quote-part est de .............................................................506.033 Assiette taxable .....................................................................506.033 Abattement et réduction Abattement légal.............................................................. - 156.974 Abattement global utilisé ........................................ NEANT Montant taxable ....................................................................349.059 DROITS A PAYER ................................................................... 68.033 7.953 ..................... à .................... 5% = ........................ 398 3.977 ..................... à ................. 10% = ........................ 398 3.767 ..................... à ................. 15% = ........................ 565 333.362 ................ à ................. 20% = .................. 66.672 Total ............................... ................................. .................. 68.033 NET A PAYER ........................................................................... 68.033 2) La rémunération du Notaire La rémunération du notaire est composée de différents éléments calculés sur l'actif brut successoral. - Les émoluments du notaire hors taxes sont proportionnels à l’actif brut successoral et sont répartis de la manière suivante : Jusqu'à 6.500,00 € 1,60% De 6.500 à 17.000 € 0,88% De 17.000 à 30.000 € 0,60% Au dessus de 30.000 € 0,44% Barème progressif calculé hors taxe, auquel s'ajoute la TVA au taux de 19,6 %. - Le notaire prélève également des frais pour les formalités qu’il a réalisées, les frais de copies et ses débours. 40 D) Le paiement des droits Les droits de succession sont payés par les héritiers ou légataires. En pratique, le notaire prélève directement sur les fonds dépendant de la succession qu’il détient en sa comptabilité, le montant des droits qu’il verse à l’administration fiscale en même temps que le dépôt de la déclaration. Les cohéritiers redevables de droits de succession sont solidaires pour le paiement des droits et des pénalités (article 1709 du Code général des impôts). Les débiteurs des droits de succession peuvent demander un crédit de paiement : un régime de paiement différé et fractionné applicable aux transmissions d’entreprise ou de droits sociaux dans une société non cotée, un régime de paiement fractionné applicable en principe à toutes les mutations par décès, le régime des paiements différés pour les successions comportant la dévolution de biens en nue propriété. En l’espèce, les fonds détenus par le Notaire en sa comptabilité étaient suffisants pour régler les droits de succession en un seul versement. La déclaration de succession n’ayant pu être déposée aux services fiscaux dans les six mois du décès, le notaire avait procédé au règlement d’un acompte de 180.000 €. Le montant des droits de succession n’étant que de 147.845 €, l’administration fiscale a dû restituer la différence aux héritiers. La réponse de l’administration fiscale Les sanctions encourues en cas de défaut ou de production tardive de la déclaration sont prévues à l’article 1728, 2 du Code général des impôts. L’administration fiscale a jusqu’au 31 décembre de la troisième année qui suit celle du dépôt de la déclaration de succession, pour reprendre la déclaration ; en cas de déclaration non souscrite ou d’omission de biens ou de droits dans la déclaration, l’action de l’administration se prescrit le 31 décembre de la sixième année qui suit celle du décès15. E) Formalités 1) Formalités préalables Les formalités préalables à accomplir pour la rédaction de la déclaration de succession sont les demandes de renseignements à tous les créanciers et débiteurs que pouvait avoir le défunt, savoir : établissements financiers, caisses de retraite, services fiscaux, compagnies d’assurance… Ces différents organismes doivent informer le notaire de l’existence de toutes les sommes qui pouvait être dues au défunt ou par le défunt au jour de son décès. Si le défunt avait souscrit un contrat d’assurance-vie, la compagnie d’assurance doit informer le notaire de tout contrat souscrit et mentionner notamment la date de conclusion du contrat et les primes versées après 70 ans. Il est également nécessaire d’obtenir la copie des cartes grises ou certificats d’immatriculation des véhicules dans le défunt était propriétaire. 15 Articles L180 et L186 du Livre des Procédures Fiscales. 41 En présence de biens immobiliers, il convient d’obtenir les titres de propriété et un état hypothécaire trentenaire sur chacun des biens immobiliers, documents que le notaire détient déjà pour la rédaction de l’attestation immobilière de propriété. L’état hypothécaire ayant une durée de validité de seulement deux mois, il convient régulièrement d’en demander la prorogation à la Conservation des hypothèques qui a délivré l’état initial. 2) Formalités postérieures La déclaration de succession est déposée en double exemplaire au service des impôts du domicile du défunt dans les six mois suivant la date du décès lorsque le décès s’est produit en France métropolitaine (article 641 du Code général des impôts), le délai étant porté à deux ans en cas de décès en France d’Outre-Mer ou en Corse. Le dépôt de la déclaration de succession doit être accompagné du règlement des droits de succession le cas échéant. Suite au règlement de la succession à proprement parler, et puisque « nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision » selon l’article 815 du Code civil, il a été procédé au partage des biens dépendant de ladite succession. 42 Section 2 : Le partage Monsieur Georges H et Madame Marie-Christine H épouse C, frère et sœur, n’ont pas souhaité rester dans l’indivision née du décès de Madame Jeanine H, leur mère, ils ont par conséquent procédé au partage de l’indivision successorale. La problématique principale d’un partage est de satisfaire les demandes de toutes les parties, tout en privilégiant un règlement amiable du partage et en respectant le principe d’égalité entre les copartageants. Nous verrons en l’espèce comment les parties sont parvenues à un tel accord amiable sur la répartition des biens de la succession en étudiant tout d’abord la définition et les formalités du partage (I), puis les opérations du partage (II), les particularités de ce partage (III), le coût de l’acte (IV) et enfin les effets du partage (V). I) Définition et formalités Le code civil traite du partage aux articles 816 et suivants du code civil. A) Définition Le partage est le contrat par lequel des coïndivisaires divisent entre eux les biens indivis, en déterminant à qui revient chaque bien ou chaque part ; c’est l’opération par laquelle l’indivision cesse et les titulaires de droits indivis deviennent propriétaires de droit divis. Le droit de provoquer le partage appartient aux indivisaires, il s’agit d’un droit discrétionnaire et imprescriptible. L’acte du partage est généralement le dernier acte à intervenir dans le règlement de la succession. Certaines conditions peuvent faire obstacle au partage : - en cas de convention d’indivision entre indivisaires ; - en cas de sursis au partage (article 820 du code civil) : si la réalisation du partage risque de porter atteinte à la valeur des biens indivis, ou si l’un des indivisaires ne peut reprendre l’entreprise dépendant de l’indivision que dans un certain délai, pour une durée maximale de deux ans ; - en cas de maintien dans l’indivision : une décision judiciaire peut empêcher le partage pour protéger le conjoint survivant ou un enfant mineur. Le tribunal fixe les conditions de fonctionnement et la durée de l’indivision ; - en cas d’attribution éliminatoire ou de partage partiel, lorsqu’un indivisaire veut quitter l’indivision mais que ses coïndivisaires veulent demeurer dans l’indivision (article 824 du code civil). 43 En l’espèce, aucune de ces conditions n’est présente et les héritiers ont décidé ensemble de procéder au partage. Nous pouvons retenir en l’espèce trois caractéristiques majeures du partage ayant été effectué entre les héritiers de Madame Jeanine H : il s’agit d’un partage amiable (1), total (2) et pur et simple (3). 1) Un partage amiable Le partage peut être amiable ou judiciaire. Le partage amiable est celui dont la forme et les modalités ont été choisies par les parties. Le partage judiciaire intervient lorsque l’un des coïndivisaires refuse de consentir au partage, lorsque l’un des indivisaires proteste sur la manière de procéder au partage ou de le terminer, ou enfin lorsqu’un partage amiable n’a pas été autorisé ou approuvé en présence d’un mineur ou majeur protégé, défaillant, présumé absent, ou hors d’état de manifester sa volonté16. En l’espèce, Monsieur Georges H et Madame Marie-Christine H épouse C, seuls coïndivisaires, présents et capables, sont tous les deux d’accord sur le principe et les modalités du partage. 2) Un partage total Il peut être total, c’est-à-dire comprendre tous les indivisaires et tous les biens dépendant de la succession, ou partiel, c’est-à-dire laisser dans l’indivision certains biens ou certaines personnes. En l’espèce, les héritiers de Madame Jeanine H ont décidé de ne laisser aucun bien dans l’indivision et procéder au partage de la totalité des biens ayant appartenu à leur mère. 3) Un partage pur et simple Le partage est dit pur et simple lorsque chaque copartageant reçoit en nature dans son lot l’équivalent de ses droits dans la masse à partager. Le partage est dit avec soulte lorsque l’un ou plusieurs des copartageants reçoit dans son lot des biens pour une valeur supérieure à ses droits dans la masse à partager, ce dernier doit alors verser aux autres copartageants une somme correspondant à la différence entre les droits de chaque copartageant et la valeur des biens que chaque copartageant a effectivement reçue. Article 840 du code civil : « Le partage est fait en justice lorsque l'un des indivisaires refuse de consentir au partage amiable ou s'il s'élève des contestations sur la manière d'y procéder ou de le terminer ou lorsque le partage amiable n'a pas été autorisé ou approuvé dans l'un des cas prévus aux articles 836 et 837 ». 16 44 En l’espèce, Monsieur Georges H et Madame Marie-Christine H épouse C, copartageants, ont tous les deux été allotis à hauteur de leurs droits dans le partage, il n’y a donc pas lieu au versement d’une soulte ni d’une part ni de l’autre, le partage est ainsi pur et simple. B) Forme et formalités Le partage amiable n’est soumis à aucune forme particulière, le partage verbal est admis même si fortement déconseillé. Le partage amiable doit cependant être obligatoirement fait par acte authentique dans le cas où il contient des immeubles ou des droits immobiliers puisqu’il doit être publié à la Conservation des hypothèques. Le partage de biens immeubles est soumis à la formalité fusionnée, alors que les partages de meubles sont présentés uniquement à la formalité de l’enregistrement. En l’espèce, le partage contenant des biens immobiliers, il a été nécessaire de le constater par acte authentique puis de le publier à la Conservation des hypothèques compétente. II) Les opérations de partage Le partage est composé d’opérations de liquidation visant à établir les droits de chacun indivisaire : tout d’abord la fixation de la jouissance divise (A), puis l’établissement de la masse à partager (B) et des droits des parties (C), les attributions (D) et les conditions générales du partage (E). A) La jouissance divise La jouissance divise est la date à laquelle chaque copartageant a eu la jouissance exclusive d’un bien de l’indivision. Cette jouissance divise peut-être antérieure au partage, cette date doit alors être mentionnée dans l’acte. Les biens sont évalués à la date de la jouissance divise. Par conséquent, en cas de jouissance divise antérieure au partage, c’est cette date qui doit être retenue pour apprécier la valeur vénale réelle des biens partagés. En l’espèce, la date de la jouissance divise a été fixée d’un commun accord par les copartageants à la date du partage, ceux-ci disposent donc de la jouissance et de la propriété exclusive des biens qui leur ont été attribués à compter de la date du partage. Par ailleurs, les biens partagés doivent avoir leur valeur appréciée au jour du partage. B) L’établissement de la masse à partager La masse à partager ou masse partageable correspondant à la masse des biens indivis. L’indivision comprend des valeurs d’actif et de passif. 45 En vertu de l’article 825 du code civil, « La masse partageable comprend les biens existant à l'ouverture de la succession, ou ceux qui leur ont été subrogés, et dont le défunt n'a pas disposé à cause de mort, ainsi que les fruits y afférents. Elle est augmentée des valeurs soumises à rapport ou à réduction, ainsi que des dettes des copartageants envers le défunt ou envers l'indivision ». Les biens existant à l’ouverture de la succession sont les biens dont le défunt était propriétaire au moment de son décès, en ce non compris les biens dont il a disposé à cause de mort par testament. Les biens subrogés sont ceux qui ont fait l’objet d’une subrogation réelle, telle qu’une créance ou indemnité qui remplace un bien indivis (indemnité d’assurance, prix d’un immeuble…) de même pour les biens acquis en emploi ou remploi de biens indivis. Les fruits et revenus des biens indivis sont par exemple les loyers, un fermage, une récolte… Les valeurs soumises à rapport sont les donations rapportables, c'est-à-dire les donations faites en avancement de part successorale aux héritiers aujourd’hui copartageants, et les valeurs soumises à réduction sont les donations dont le montant excède la quotité disponible et qui sont par conséquent réductibles pour le surplus (article 924 du code civil). Les dettes des copartageants envers le défunt ou l’indivision correspondent aux valeurs qui étaient dues le cas échéant par un ayant-droit au de cujus avant son décès, et aux valeurs qu’un indivisaire a encaissé ou perçu pendant l’indivision mais qui aurait dû profiter à l’indivision. Les biens sont estimés selon leur état à la date de la jouissance divise. La plusvalue ou moins-value intervenue pendant la période de l’indivision est opposable aux copartageants, sauf si elle est due à l’un des indivisaires. Ce dernier sera alors créancier ou débiteur de l’indivision. Lorsqu’un bien a été cédé pendant la période de l’indivision, la valeur à prendre en compte dans la masse partageable est le prix de vente. En l’espèce, la masse à partager comprend des biens présents, savoir : des parts sociales de la SCI, deux créances de travaux (obligation de faire), des biens immobiliers et un prix de vente ; et les donations rapportables dont ont bénéficié les copartageants préalablement au décès. La composition de l’actif de la masse à partager étant l’un des éléments les plus intéressants dans ce dossier, il sera traité de manière plus approfondie dans le paragraphe suivant consacré aux particularités du partage. 46 La masse partageable s’entend d’une valeur nette, il faut donc déduire de l’actif brut le passif, savoir : - Les dettes du défunt, - Les dettes de l’indivision, c’est-à-dire celles engagées pour la conservation ou la gestion des biens indivis, - Les moins-values affectant les biens indivis, Il ne dépend de l’indivision aucun passif en l’espèce. C) L’établissement des droits des parties Le principe est qu’il y a autant de lots que de copartageants, c’est le partage par tête. Cependant en cas de représentation, le partage se fait par souche, c’est-à-dire que les représentants de l’héritier prédécédé ne comptent que pour l’héritier représenté. Les représentants de l’héritier prédécédé reçoivent ensemble leur lot qui doit faire l’objet d’une répartition distincte entre eux. En l’espèce, les copartageants sont au nombre de deux, sont présents et non pas représentés ; il y aura lieu à un partage par tête, leurs droits sont égaux, il y aura donc deux lots égaux correspondant à la moitié de la masse à partager. D) Les attributions L’opération des attributions correspond à la répartition des biens compris dans la masse à partager entre les copartageants. Chaque copartageant est alloti en priorité des donations dont il a été préalablement le bénéficiaire. Le rapport de ces donations étant fait en valeur, le donataire conserve la propriété des biens donnés et la valeur des biens donnés s’impute sur les droits du donataire-copartageant dans le partage, il s’agit d’un rapport en moinsprenant. Ensuite, chacun des copartageants est alloti selon son choix des différents biens compris dans la masse à partager dans la limite de ses droits. En cas de dettes envers l’indivision, le copartageant débiteur est alloti de sa dette. Lorsque l’un ou plusieurs des copartageants reçoivent un lot supérieur à leurs droits dans le partage, ils doivent reverser aux copartageants qui reçoivent un lot inférieur à leurs droits la différence grâce à une soulte, de manière à ce que tous les copartageant reçoivent la même chose et ainsi conserver leur égalité. 47 La solution à privilégier est bien évidemment d’aboutir à une égalité parfaite entre les copartageants, c’est-à-dire qu’ils reçoivent tous dans le partage des biens suffisants correspondant à leurs droits et ainsi éviter une soulte17. En l’espèce, Monsieur Georges H s’est vu alloti de la quasi-totalité des biens de la masse à partager, en sus des donations qu’il avait préalablement reçues de Madame Jeanine H, et Madame Marie-Christine H épouse C a été allotie en sus de ses donations antérieures, d’une partie du prix de vente d’un immeuble, de manière à ce que tous les deux soient allotis d’une valeur totale égale à leurs droits. L’égalité entre les copartageants est parfaite, le partage a eu lieu sans soulte de part ni d’autre. E) Les conditions générales du partage Les conditions relatées dans l’acte de partage fixent les conditions dans lesquelles les copartageants vont prendre la possession divise des biens. Sont donc précisés, savoir : - les éléments relatifs à la propriété et à la jouissance du bien, - les éléments relatifs aux règles d’urbanisme applicables aux immeubles compris dans le partage, en l’espèce la dispense d’urbanisme, - ainsi que les conditions d’usage et de droit en pareille matière, telles que les garanties en matière de partage, la confusion des dettes et des attributions, la contenance et l’état des biens, l’assurance incendie, les impôts et charges et les servitudes pour les immeubles. Les parties ont également convenu d’une clause de règlement définitif et de décharge réciproque, c’est-à-dire qu’elles fixent expressément dans l’acte le principe selon lequel ce partage est convenu à titre ferme et irrévocable, sans possibilité de le remettre en cause à l’avenir. Ces clauses sont d’usage en pareille matière et n’appellent aucune remarque particulière en l’espèce. Le réel intérêt rencontré dans ce partage porte sur l’évaluation des biens présents et des donations antérieures. Par principe, le paiement de la soulte se fait comptant en vertu de l’article 832-4 du code civil et est garanti par le privilège de copartageant (article 2374-3° du code civil). Les copartageants peuvent cependant convenir amiablement de délais de paiement. Alors, les dispositions relatives à la revalorisation des soultes payables à terme s’applique (lorsque la valeur des biens mis dans le lot du débiteur a augmenté ou diminué de plus du quart par suite des circonstances économiques, la soulte augmente ou diminue dans les mêmes proportions, sauf accord contraire des parties). Egalement, des intérêts sont dus dans trois hypothèses : Lorsque les copartageants ont convenu d’un taux d’intérêt applicable en cas de paiement à terme, En cas de sommation au débiteur de payer la soulte (article 1153 du code civil), En cas de délais de paiement affectant une fraction de la soulte suite à l’attribution préférentielle du logement au conjoint survivant ou d’une petite exploitation agricole. 17 48 III) Les particularités du partage Le partage réalisé entre Monsieur Georges H et Madame Marie-Christine H épouse C a pour particularité essentielle l’évaluation des biens faisant partie du partage. Afin de reconstituer la masse partageable, il convient d’évaluer non seulement les biens présents (A) mais également réévaluer les biens donnés lors des donations antérieures (B). A) Evaluation des biens présents Pour le partage, la valeur retenue est celle des biens au jour de la jouissance divise, celle-ci coïncide avec celle du partage si aucune autre date n’est retenue dans l’acte de partage. En l’espèce, la date de jouissance divise expressément fixée par les copartageants est la date du partage. Le solde des parts sociales de la SCI familiale non donné par Monsieur et Madame H lors de l’acte du 8 juillet 2006. Sur les 3.048 parts composant le capital social, 2.991 parts ont été données à Monsieur Georges H et à ses filles lors de la donation du 8 juillet 2006 ; il reste donc 57 parts détenues en indivision par les consorts H, dont 48 parts dépendaient de l’indivision ayant existé entre Monsieur et Madame Raymond H et 9 parts ayant appartenu personnellement à Madame Jeanine H. Lors de la constitution de la société, la valeur unitaire de la part sociale était de 100 €. Dans la succession ainsi que dans le partage, les 57 parts sont évaluées à une valeur globale de 9.405 € soit une valeur unitaire de 165 €. Cette évaluation a été faite par l’expert mandaté par les copartageants, évaluation adoptée par ces derniers. Elle est due à la hausse régulière des prix de l’immobilier entre 2006 et 2011 ainsi qu’à la plus-value qui sera apportée par les travaux devant être réalisés sur les biens immobiliers dont la SCI est propriétaire, tel que cela est expliqué ci-dessous dans la partie consacrée aux créances de travaux. Les biens immobiliers situés sur la commune de Castelginest. Ces biens immobiliers sont composés d’un bâtiment à usage locatif composé de deux appartements et d’une vieille maison contiguë sans usage. Ces immeubles ont respectivement été évalués : le bâtiment à usage locatif à une valeur de 264.000 € et la vieille maison contiguë à une valeur de 93.000 €, dans la succession ainsi que dans le partage. 49 Cette évaluation relativement importante compte tenu de l’état des immeubles, proposée par l’expert et adoptée par les copartageants, est due à la plus-value qui sera apportée par des travaux devant être réalisés par la société HLM en paiement d’une partie du prix de la vente intervenue entre les consorts H et ladite société le 22 octobre 2010 tel qu’il est précisé ci-après. Le prix tiré de la vente de biens immobiliers Lors de la vente du 22 octobre 2010, une partie du prix a été stipulée payable comptant : d’un montant global de 620.954 €, la somme de 530.000 € a été payée comptant aux consorts H et quittancée à l’acte. Depuis l'arrêt Chollet contre Dumoulin du 5 décembre 1907, la Cour de cassation en chambres réunies considère qu'en cas d'aliénation d'un bien indivis, la créance qui remplace l'immeuble aliéné dans la masse indivise devient elle-même un effet de succession, le prix de la vente étant ainsi subrogé aux biens ayant appartenu au défunt. Cette somme ayant été payée en contrepartie de la vente de bien dépendant de l’indivision successorale existant entre Monsieur Georges H et Madame Marie-Christine H épouse C, cette somme vient enrichir l’indivision et fait donc partie de la masse partageable aux présentes. Deux créances de travaux constatés dans l’acte de vente par les consorts H au profit de la société HLM. Dans la vente réalisée le 22 octobre 2010 par la SCI familiale et les consorts H au profit de la société HLM, une partie du prix de vente a été stipulée payable comptant et le solde converti en deux obligations de faire, l’une au profit de la SCI et l’autre au profit de l’indivision. Tel que cela est ci-après plus précisément expliqué (Deuxième partie, chapitre 1er, paragraphe II), les obligations de faire consistent en la réalisation de travaux sur des immeubles appartenant respectivement à la SCI et à l’indivision. Ces obligations de faire ont été évaluées selon leurs coûts dans l’acte de vente et ces évaluations sont reprises telles quelles dans le partage, soit 62.960 € pour la créance de travaux devant être réalisés au profit de la SCI, et 27.994 € pour la créance de travaux devant être réalisés au profit de l’indivision. Ces obligations de travaux portent sur les biens immobiliers appartenant à la SCI familiale et à l’indivision existant entre les consorts H tel que nous l’avons vu précédemment. A l’époque du partage, ces travaux n’ont pas encore été réalisés, l’expert a donc dû évaluer la plus-value probable qui sera apportée par ces travaux dans le futur. Depuis l'arrêt Chollet contre Dumoulin du 5 décembre 1907 cité ci-avant, de même que pour le prix de vente qui entre dans l’indivision par subrogation du bien 50 vendu, la créance de travaux consentie en paiement du prix de vente, et par conséquent la plus-value résultant de la réalisation de ces travaux, profitent également à l’indivision. Par ailleurs, il convient de prendre en compte le fait que la plus-value apportée sur ces immeubles bénéficiera à l’attributaire copartageant des créances de travaux et corrélativement à l’attributaire desdits immeubles, les créances devant être attribuées à l’attributaire des immeubles auxquels elles se rattachent. En l’espèce, le solde des parts sociales de la SCI familiale a été attribué à Monsieur Georges H avec la créance relative aux travaux à réaliser sur les biens appartenant à la SCI, ainsi que les biens immobiliers situés à Castelginest avec la créance relative aux travaux à réaliser sur ses biens. Le notaire en charge du partage a dû étudier cette question avec les copartageants, leur précisant les conséquences de l’attribution des immeubles et des créances s’y rattachant, ainsi que la plus-value en découlant. Le notaire a bien évidemment privilégié une évaluation amiable entre les copartageants, auquel ceux-ci sont parvenus grâce à l’expert. Les parties ont ainsi évalué les immeubles avec leurs plus-values futures à une somme forfaitaire d’un commun accord. Juridiquement, les travaux non exécutés au moment du partage ne sont pas censés être pris en compte dans l’évaluation de l’immeuble sur lequel ils doivent être exécutés. Cependant, l’obligation de réaliser des travaux est née avant le partage. Cette obligation de faire étant qualifiée de créance certaine, ces travaux seront réalisés par le débiteur de l’obligation, la plus-value apportée par ces travaux aux immeubles est par conséquent certaine. Il s’agit non seulement d’évaluer la créance de travaux en elle-même tel que cela est précisé précédemment, mais aussi la plus-value apportée aux immeubles du fait de ces travaux. L’évaluation des biens immobiliers est basée sur le marché. L’expert a donc du estimer la valeur qu’auraient eu les biens immobiliers sur le marché si les travaux étaient déjà réalisés. Les parties ont par ailleurs décidé, si les travaux apportaient dans le futur une plus-value supérieure à l’évaluation faite dans le partage, de s’en tenir d’ores et déjà et définitivement à la valeur adoptée dans le partage. B) Evaluation des donations rapportables Comme cela a été vu ci-avant dans le chapitre premier - première section, toutes les donations faites au profit des ayants-droit l’ont été en avancement de part 51 successorale. Ces libéralités seront donc prises en compte lors du règlement de la succession du disposant grâce au mécanisme du rapport. Ce rapport doit être effectué en valeur (valeur vénale à laquelle est estimé le bien rapporté au jour du partage), valeur qui sera prise en compte dans le calcul de la masse partageable puis dans celui des droits de chaque ayant-droit. Concernant la possibilité de faire un rapport en nature, le bénéficiaire de la donation peut au moment du partage le demander (ce dernier choix n’est possible que si le bien est libre de toute charge et occupation de son fait – articles 858 et 859 du Code civil). En l’espèce, les donataires n’ont pas fait cette demande, le rapport des donations s’effectuera par conséquent en valeur. Lorsque le rapport se fait en valeur, la valeur des biens donnés est une indemnité qui sera comprise dans le partage. Cette indemnité sera attribuée au donataire qui a reçu le bien, et prendra par conséquent moins dans le partage, d’où l’expression de rapport en moins prenant. Au jour du décès, les donataires étaient toujours en possession des biens donnés, ceux–ci n’ayant été ni vendus, ni donnés, ni perdus. Concernant les règles d’évaluation des biens rapportés prévues à l’article 860 alinéa premier du Code civil, le rapport est dû de la valeur du bien au jour de la jouissance divise, en l’espèce du partage, selon son état à l’époque de la donation. Ces règles n’étant pas impératives, le donateur peut en disposer autrement dans l’acte de donation. En l’espèce, Madame Jeanine H n’a prévu aucune disposition contraire, les rapports s’effectueront donc selon les règles de droit commun. Il convient par conséquent d’évaluer la valeur des biens au moment du partage. Il existe plusieurs solutions pour fixer leur valeur : - Les ayants-droit fixent une valeur forfaitaire, - A défaut de pouvoir fixer une valeur forfaitaire, les ayants-droit peuvent demander une évaluation à leur Notaire ou à un expert et la respecter, - Les ayants-droit n’arrivent pas à se mettre d’accord, le conflit sera alors réglé au tribunal. La solution privilégiée par le Notaire est bien évidemment un accord amiable, ce qui est possible dans la plupart des familles quand ses membres s’entendent bien. En l’espèce, les ayants-droit, Monsieur George H et Madame Marie-Christine H épouse C, ont choisi de faire appel à un expert judiciaire agréé par la Cour d’Appel et la Cour de Cassation de manière à fixer la valeur des biens présents et des donations 52 antérieures. Les copartageants ont par la suite décidé de respecter l’évaluation de l’expert et de s’en tenir aux valeurs qu’il a retenues, ceci dans un souci de conciliation et de bonne entente dans la famille, afin d’éviter tout conflit futur éventuel entre eux. 1) Donations faites au profit de Monsieur Georges H Donation du 20 mai 1983 en avancement de part successorale de la moitié indivise en nue propriété d’une maison d’habitation. Dans cet acte, les droits immobiliers donnés ont été évalués à la somme de 123.814,00 francs, soit une contre-valeur en euros de 18.875,32. A la suite à l’évaluation de l’expert, laquelle a été suivie par les copartageants, le rapport a été évalué forfaitairement à la somme de 79.390,00 euros au jour du partage. Donation du 8 juillet 2006 en avancement de part successorale de la nue propriété de parts sociales de la SCI familiale. Les éléments de calcul à prendre en compte pour l’évaluation d’une société civile immobilière et de ses parts sociales sont les suivants : Afin d’estimer la valeur de parts sociales d’une société civile immobilière familiale, il est nécessaire de prendre en compte la totalité des actifs que détient la société au moment de la donation, en l’espèce la résidence principale de ses associés, et de déduire les passifs desquels la société est débitrice au moment de la donation, tels qu’un prêt pour l’acquisition de biens immobiliers ou des travaux par exemple. En l’espèce, la société n’était redevable d’aucun passif. La valeur de la société et de ses parts sociales correspond par conséquent à la somme de ses actifs. Dans le cas de la donation de parts sociales, le patrimoine immobilier étant détenu à travers une société, une décote peut être opérée sur la valeur de ce patrimoine. Dans le cas d’une société à caractère familial, une décote d’au moins 10 % peut généralement être pratiquée. Une décote supérieure peut également être envisagée pour prendre en compte le caractère minoritaire d’une participation dans la société. La chambre commerciale de la Cour de cassation a en effet admis dans un arrêt du 6 mai 2003 une décote de 15 % au titre du statut d’associé minoritaire18. Cass.com. 6-5-2003 n° 748 F-D : RJF 8-9/03 n° 1056, N° de pourvoi : 01-13118. Dans cette espèce, suite au décès de M. X... le 28 février 1993, la succession X... a été assujettie aux droits d'enregistrement ; qu'estimant insuffisante la valeur vénale attribuée aux actions de la Société Aturine de bois et matériaux (SABM) et aux parts sociales de la SCI du Tursan mentionnée dans la déclaration de succession, l'administration fiscale a procédé à un redressement après majoration de leur valeur vénale respective ; que les héritiers de M. X... ont contesté le redressement et saisi la commission départementale de conciliation ; qu'à la suite de l'avis rendu par la commission, l'administration fiscale a émis un avis de mise en recouvrement ; qu'agissant pour le compte de la succession, Mlle Marie-Sophie X... a fait assigner le directeur des services fiscaux des Landes afin d'obtenir l'annulation de la décision de rejet de sa réclamation et de la procédure de redressement ainsi que la décharge des impositions litigieuses ; que le tribunal de grande instance a dit que la procédure de redressement était régulière en la forme, rejeté la demande en tant qu'elle portait sur la partie du redressement relative à la SCI du 18 53 A contrario, nous pouvons déduire de cet arrêt que, du fait du statut largement majoritaire d’un associé, une prime de majorité peut être appliquée sur la valeur des parts. L’équilibre entre les ayants-droit de la succession est alors rétabli par la réévaluation des parts tenant à la prime de majorité. Ceux-ci ont décidé de réévaluer ces parts en prenant en compte le fait que Monsieur Georges H en détient la grande majorité, majorité absolue qui permet à son propriétaire de diriger de fait la société et d’avoir sur cette SCI les plus grands pouvoirs. En l’espèce, les parts avaient été évaluées lors de la donation à la somme de 119.520,00 euros. Dans le partage, compte tenu de la prime de majorité dont bénéficie Monsieur Georges H, associé largement majoritaire, ainsi que la plus-value qui sera apportée par les travaux devant être réalisés sur les biens immobiliers dont la SCI est propriétaire, le rapport a été fixé forfaitairement par les parties suite à l’évaluation de l’expert à la somme de 493.515,00 euros au jour du partage. 2) Donations faites au profit de Madame Marie-Christine H épouse C Donation du 1er mars 1995 en avancement de part successorale de la pleine propriété d’une maison à usage d’habitation. Dans cet acte, les droits immobiliers donnés ont été évalués à la somme de 900.000,00 francs, soit une contre-valeur en euros de 137.204,12. A la suite à l’évaluation de l’expert, laquelle a été suivie par les copartageants, le rapport a été évalué forfaitairement à la somme de 1.049.000,00 euros au jour du partage. Donation du 6 mars 2001 en avancement de part successorale de la pleine propriété d’une parcelle de terre. Tursan et, ordonnant une expertise afin de déterminer la valeur de l'action de la SABM, sursis à statuer sur ce point ; que Mlle Marie-Sophie X... a relevé appel du jugement ; Sur le premier moyen, les ayants-droit intervenant en cause d'appel, font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande en décharge des droits supplémentaires au titre de la succession de leur père, alors que l'avis de la commission départementale de conciliation doit, à peine de nullité de la procédure d'imposition, être motivé ; qu'il résulte des propres mentions de l'arrêt attaqué que la commission s'est contentée d'indiquer dans ses deux avis, son mode de calcul, sans préciser ni ce qu'il fallait entendre par la valeur vénale des parts sociales, ni les raisons pour lesquelles elle rejetait les évaluations contenues dans la déclaration de succession, et adoptait celles de l'administration fiscale ; Qu’en considérant néanmoins les deux avis de la commission départementale comme étant suffisamment motivés, la cour d'appel a, selon le moyen, violé les articles R. 60-3 et L. 80-CA du Livre des procédures fiscales ; Mais la Cour de cassation estime que l'avis de la commission départementale de conciliation doit être motivé de manière à permettre aux parties, à défaut d'accord, de poursuivre utilement leur discussion devant le juge au vu des éléments qu'elle a pris en considération ; qu'après avoir relevé que la commission avait pris comme base la valeur retenue par l'administration, à laquelle elle avait ensuite apporté des correctifs consistant à déduire, pour l'évaluation des actions de la SABM, une certaine somme au titre de la cession d'un établissement et, s'agissant de la SCI du Tursan, le montant des emprunts restant dus au jour du décès ainsi que 15 % d'abattement au titre du statut d'associé minoritaire, la cour d'appel a pu en déduire que les avis de la commission avaient été suffisamment motivés ; la Cour de cassation estimant ainsi que le moyen n'est pas fondé. 54 Dans cet acte, les droits immobiliers donnés ont été évalués à la somme de 500,00 francs, soit une contre-valeur en euros de 76,22. A la suite à l’évaluation de l’expert, laquelle a été suivie par les copartageants, le rapport a été évalué forfaitairement à la somme de 59.000,00 euros au jour du partage. La valeur des biens ayant pu être fixée et les donations antérieures ayant pu être réévaluées, les biens ont été attribués aux parties selon leurs droits et selon leur volonté. L’évaluation des biens et des donations antérieures ont permis de déterminer la masse partageable ainsi que le coût de l’acte qui en découle. IV) Coût de l’acte Le coût de l’acte de partage supporté par le client comprend plusieurs éléments : le droit de partage (1), le salaire du conservateur (2), les émoluments du notaire (3) et ses débours (4). 1) Les droits d’enregistrement ou taxe de publicité foncière Le tarif des droits d’enregistrement ou de la taxe de publicité foncière applicable aux partages purs et simples était fixé à 1,1 % au moment de la signature de l’acte. Il est fixé à 2,5 % depuis le 1er janvier 2012, selon l’article 746 du Code général des impôts (loi de finance rectificative pour 2011). L’assiette du droit de partage est le montant de l’actif net partagé. Les donations faites en avancement de part successorale et rapportées au partage sont également assujetties au droit de partage, de même que le rapport des dettes, dès l’instant où ces donations n’ont pas fait l’objet d’un partage préalable. La valeur imposable est constituée par la valeur vénale réelle des biens partagés, déduction faite du passif, appréciée à la date de l’acte de partage. En cas de date de jouissance divise antérieure, la valeur est appréciée à la date de cette jouissance divise. Au titre du passif, peuvent notamment être déduits : - Les droits de mutation par décès et les frais de l’acte de partage, - Les dettes du défunt envers les héritiers, les legs particuliers de sommes, les récompenses dues par la succession à la communauté le cas échéant. En l’espèce, les droits d’enregistrement de 1,10 % en vigueur au jour de l’acte de partage ont été prélevés sur l’actif net partagé constitué de la somme des biens indivis, addition faite des rapports dus par les copartageants et déduction faite des frais de partage. 2) Le salaire du conservateur 55 Le salaire du conservateur des hypothèques lors de la publication de l'acte à la conservation des hypothèques était de 0,10 % de l’actif net partagé. 3) Les émoluments du notaire La rémunération du notaire est composée de différents éléments calculés sur l'actif brut successoral. Les émoluments du notaire hors taxes sont proportionnels à l’actif brut successoral et sont répartis de la manière suivante : Jusqu'à 6.500,00 € 4,784% De 6.501 à 17.000 € 1,9734% De 17.001 à 30.000 € 1,3156% Au dessus de 30.001 € 0,9867% Barème progressif calculé hors taxe, auquel s'ajoute la TVA au taux de 19,6 %. 4) Les débours du Notaire Le notaire prélève également des frais pour les formalités qu’il a réalisées, les frais de copies et ses débours. Le partage a des effets civils et pécuniaires : civils pour la répartition des biens entre les copartageants et pécuniaires pour le paiement de taxes et la rémunération du notaire, comme nous l’avons vu ci-avant. La répartition des biens n’est pas le seul effet civil du partage. V) Les effets du partage Les effets du partage sont au nombre de deux : l’effet déclaratif du partage (A) et la garantie des lots (B). A) L’effet déclaratif du partage Le partage a un effet déclaratif : chaque copartageant est réputé être propriétaire du bien indivis dont il est l’attributaire depuis l’ouverture de la succession, c’est-à-dire le jour du décès ; il est par conséquent censé n’avoir jamais été propriétaire des autres biens dépendant de la succession, en vertu de l’article 883 du code civil. Toutefois, l’effet déclaratif du partage a ses limites : les actes réalisés sur un bien pendant l’indivision selon les règles de l’indivision sont opposables à l’attributaire de ce bien, a fortiori les actes réalisés en violation des règles de l’indivision lui sont inopposables sauf s’il en est l’auteur. L’effet déclaratif du partage ne s’applique pas non plus aux fruits et revenus des biens indivis qui viennent enrichir l’indivision. B) La garantie des lots 56 Cette garantie joue lorsque l’attributaire d’un lot subit un trouble ou une éviction qui procède d’une cause antérieure au partage (article 884 alinéa 1er du code civil). Il doit s’agir d’un trouble ou d’une éviction de droit et non de fait. L’allocataire reconnaît le droit du tiers dès lors que ce droit est incontestable. En cas de doute, il peut obtenir de ses copartageants qu’ils reconnaissent le droit du tiers, ou il peut contester les droits du tiers et appeler en garantie ses copartageants. La garantie est bien évidemment exclue lorsque les troubles ou l’éviction résultent d’une faute de l’allocataire en question. La garantie peut être écartée par une clause expresse dans l’acte de partage, elle doit alors désigner le bien et la cause d’éviction. Le délai de prescription de l’action en garantie est de deux ans à compter de la découverte du trouble ou de l’éviction. La garantie des lots a pour effet d’obliger personnellement chaque copartageant à indemniser le copartageant évincé à proportion de son émolument. La perte est évaluée au jour de l’éviction. Le montant du préjudice est réparti entre tous les copartageants, y compris celui évincé. La créance du garanti est assortie du privilège de copartageant (article 2374-3° du code civil). En l’espèce, la garantie des lots n’a jamais été mise en œuvre, les copartageants n’ayant jamais subi de trouble ou d’éviction sur les biens dont ils ont été les attributaires. Pour conclure, le règlement de la succession d’une personne dans une situation familiale simple peut s’avérer difficile. En effet, propriétaire d’un patrimoine important, cette personne a anticipé le règlement de sa succession en disposant de son vivant de ses biens en faveur de ses héritiers. Cependant, le règlement de la succession puis le partage notamment à cause du rapport des donations et de l’évaluation des biens présents, a été compliqué dans son objectif de réaliser une répartition amiable et égalitaire des biens. Grâce à la bonne entente des copartageants et à la compétence du notaire et de l’expert, cet accord amiable a pu être conclu, réalisant ainsi un partage définitif accepté par toutes les parties, solution idéale qui malheureusement n’est pas toujours obtenue. A côté des questions de droit de la famille vu ci-avant dans le premier chapitre, ce dossier s’est révélé très intéressant grâce à deux ventes réalisées par les consorts H au profit d’une société HLM en vue de la construction de logements à loyer modéré. 57 2EME PARTIE : VENTES DE TERRAINS A UNE SOCIETE D’HABITATIONS A LOYERS MODERES Dans le dossier étudié en l’espèce, sont intervenues deux ventes : la première directement par Madame Jeanine H au profit d’une société HLM, la seconde par les héritiers de Madame Jeanine H et la SCI familiale au profit de cette même société HLM. Il est par conséquent intéressant d’étudier dans un premier chapitre les éléments importants des actes de ventes d’immeubles, puis dans un second chapitre les éléments importants spécifiques à une vente à un organisme HLM. CHAPITRE 1ER : LES ACTES DE VENTE… Section 1 : La rédaction des actes Dans les deux cas, l’objet des ventes est des terrains moyennant un prix. Ces deux actes qui semblent aux premiers abords similaires, sont en réalité très différents. En effet, le premier acte de vente réalisé le 3 juillet 2006 est un acte de vente commun, tout à fait similaire à d’autres actes de vente du même type, dont il faut tout de même relever certains points. Le second acte de vente quant à lui, réalisé le 22 octobre 2010 par les héritiers de Madame H et la SCI familiale, présente un intérêt particulier pour plusieurs points. C’est pourquoi nous verrons dans un premier paragraphe les points intéressants communs aux deux ventes (I) puis dans un second paragraphe les éléments présentant un intérêt particulier dans la vente par les héritiers de Madame Jeanine H et par la SCI familiale (II). I) Les éléments intéressants communs aux deux ventes à la société HLM Les éléments suivants ne sont pas propres à ce dossier, ils se retrouvent en effet systématiquement dans les autres actes en pareille matière. Cependant, ils présentent un intérêt spécial pour le rédacteur de l’acte qui doit y attacher une attention particulière. Le premier est la représentation d’une société (A) et le second est l’établissement de l’effet relatif et la rédaction de l’origine de propriété (B). A) La représentation d’une Société Une société étant une personne morale, elle ne peut pas elle-même être physiquement présente à la signature d’un acte. Elle doit par conséquent être représentée par une personne physique. 58 Le rédacteur de l’acte doit être en possession du pouvoir au terme duquel ladite personne physique pourra représenter la société. Le type de pouvoir dépend de la forme sociale et des dispositions statutaires de la société relatives à sa représentation. Dans les grandes structures, le Notaire doit pouvoir reconstituer toute la chaîne des pouvoirs, de l’organe dirigeant au représentant signataire de l’acte. En l’espèce, s’agissant d’une société anonyme, les actionnaires à travers le conseil d’administration ou le directoire et le conseil de surveillance, doivent donner leur aval à une telle opération. Le pouvoir résulte alors d’une délibération de l’organe dirigeant. Les statuts peuvent cependant prévoir autrement la répartition des pouvoirs, et par exemple donner le pouvoir au président ou à un directeur de représenter la société pour un tel acte. Le pouvoir dont a alors besoin le rédacteur de l’acte se trouve dans les statuts dont il doit déjà être en possession. En l’espèce, les personnes physiques ayant représenté la société HLM lors de la signature des deux actes de vente ont reçu les pouvoirs de signer au terme de délibérations du conseil d’administration, pièces qui ont été annexées aux actes. B) L’établissement de l’effet relatif et la rédaction de l’origine de propriété La rédaction de l’effet relatif est capitale dans l’acte car il est indispensable à sa publication. En effet, le conservateur a besoin de cet élément pour publier l’acte, à défaut ou en cas d’erreur, ledit acte fera l’objet d’un rejet ou d’un refus selon les cas. L’effet relatif doit relater l’origine de propriété immédiate du ou des biens objet de l’acte. Il doit mentionner le type de transfert de propriété, le notaire qui a constaté le transfert de propriété, la date à laquelle s’est opéré le transfert de propriété, et les références de publication de l’acte constatant le transfert de propriété à la Conservation des hypothèques compétente. Il est par ailleurs parfois nécessaire de rappeler dans le paragraphe concernant l’effet relatif les modifications cadastrales intervenues sur les parcelles objet de l’acte entre l’effet relatif immédiatement antérieur et la signature des présentes, ceci afin de pouvoir reconstituer l’historique de chaque parcelle. L’effet relatif est également la base de la rédaction de l’origine de propriété. Cette dernière doit mentionner toute la chaîne de propriété concernant les parcelles objet de l’acte pour les 30 années précédant ledit acte. Le rédacteur doit reconstituer tous les maillons de la chaîne, en ce compris le sort de tous les droits réels que des tiers auraient pu avoir sur les biens. Lorsque cette origine de propriété est particulièrement complexe, notamment en cas de succession de nombreux propriétaires, de succession, d’indivision ou de démembrement de propriété par exemple, le rédacteur de l’acte peut choisir de relater 59 l’origine dans un ordre chronologique, ceci afin d’en faciliter la lecture et la compréhension ; tel que ce fut le cas dans l’acte de 2006. Lorsque cette origine de propriété est plus simple, le rédacteur peut choisir de la relater dans un ordre anti chronologique ; tel que ce fut le cas dans l’acte de 2010. L’origine de propriété est relatée en seconde partie de l’acte, elle est donc pas indispensable pour sa publication. Cependant, elle sert à démontrer la continuité de la chaîne de propriété trentenaire et le droit de propriété actuel des vendeurs aux présentes. Elle sera par ailleurs réutilisée dans les actes devant être réalisés à l’avenir par les futurs propriétaires. À ces éléments communs dans le cadre de la vente de biens immobiliers, il est nécessaire d’étudier les éléments particuliers à la seconde vente, qui peuvent également se retrouver dans certains actes de vente. II) La vente par les héritiers du donateur et la SCI familiale Cet acte est original par certains points qui, bien que non exceptionnels, méritent d’être mentionnés et approfondis : les parcelles vendues viennent d’être créées au terme d’un document d’arpentage (A). Le prix payé en contrepartie des parcelles ne l’a pas été en totalité en argent, une partie de ce prix a été converti en une obligation de faire (B). Les vendeurs ayant conservé une partie des parcelles dont ils sont propriétaires, ils ont convenu avec l’acquéreur de différentes servitudes à leur profit (C). Enfin, pour pouvoir mettre en œuvre leur projet de construction de logements sociaux, l’acquéreur a dû obtenir certaines autorisations d’urbanisme (D). A) Le document d’arpentage Le document d’arpentage sert à assurer l'identification des nouvelles parcelles issues d'une division et la mise à jour du plan cadastral. Le document prend la forme de la reproduction du plan cadastral, sur lequel les limites nouvelles sont reportées. L'établissement des documents d'arpentage est à la charge des demandeurs. Il est confié obligatoirement à des géomètres-experts. Le document d’arpentage ne constitue pas un titre de propriété : bien que le géomètre-expert mentionne sur le plan le nom de la personne a qui est destinée la parcelle divisée, le document d’arpentage n’a pas pour effet de transférer la propriété. Pour cela, l’indivision cadastrale et le transfert de propriété doivent être constatés dans un acte authentique puis publié à la conservation des hypothèques compétente. 60 En l’espèce, plusieurs parcelles ont fait l’objet d’une division, parmi les nouvelles parcelles, certaines ont été cédées à la société HLM et d’autres ont été conservées par les vendeurs. Le notaire a également rappelé dans l’acte l’identité du géomètre-expert qui a réalisé le document d’arpentage et les références dudit document. Le document d’arpentage a été publié à la conservation des hypothèques compétentes avec l’attestation immobilière de propriété suite au décès de Madame Jeanine H et signée un instant avant l’acte de vente, afin de constater « officiellement » les modifications cadastrales auprès de la Conservation des hypothèques, de laquelle découlera l’information aux différents services publics et fiscaux. B) La conversion d’une partie du prix en une obligation de faire Le contrat de vente est un contrat synallagmatique (les parties ayant des intérêts opposés doivent exécuter des prestations qu'elles se doivent réciproquement) à titre onéreux (il existe une contrepartie) et commutatif (les avantages réciproques qu’échangent les parties sont équivalents). Couramment, la contrepartie d’un contrat à titre onéreux est un prix, c'est-à-dire une contrepartie financière. Cependant, les parties peuvent convenir ensemble de n’importe quel type de contrepartie, c’est le principe du contrat consensuel, la rencontre des volontés. En l’espèce, les parties ont convenu qu’une partie du prix serait pécuniaire et payé comptant au moment de la signature de l’acte authentique, et que l’autre partie du prix serait transformé en une obligation de réaliser des travaux, c'est-à-dire une obligation de faire. Une "obligation" est un terme désignant le lien de droit créé par l'effet de la loi ou par la volonté de celui ou de ceux qui s'engagent, en vue de fournir ou de recevoir un bien ou une prestation19. Il ne faut pas confondre objet et obligation. Dans un contrat de vente, l’objet de l’obligation principale du vendeur est de livrer la chose et l’objet de l’obligation principale de l’acquéreur est de payer le prix, quel qu’il soit. L’objet de l’obligation doit être déterminé et licite. L’obligation de faire est, comme son nom l’indique, l’obligation positive de faire quelque chose, d’accomplir une prestation. Cette obligation est opposée en droit aux obligations de ne pas faire (s’abstenir de faire quelque chose) et de donner (transférer 19 http://www.dictionnaire-juridique.com/definition/ 61 un droit réel). Le Code civil dans ses articles 1101 et 112620 utilise le type d’obligation comme critère de classification. Les effets des obligations de donner, de faire et de ne pas faire sont prévus aux articles 1136 et suivants du Code civil. Cette distinction a une importance certaine : - en cas de mise en jeu de la responsabilité contractuelle du débiteur de l’obligation : le débiteur d’une obligation de donner ou de ne pas faire est soumis à une obligation de résultat, alors que le débiteur d’une obligation de faire est soumis à une obligation de moyen, - en cas d’exécution forcée, - et dans la recherche d’un préjudice suite au non respect de cette obligation, cette preuve doit être rapportée dans les cas d’obligation de faire ou de donner, le Code civil dispensant de rapporter une telle preuve dans le cas de non exécution d’une obligation de ne pas faire21. En l’espèce, une partie du prix a été convertie en une obligation de réaliser des travaux. Il s’agit d’une obligation de faire, pour la réalisation de laquelle l’acquéreur, débiteur de l’obligation, a une obligation de moyen, et non pas de résultat. En cas d’inexécution, le créancier de l’obligation peut obtenir l’exécution forcée de l’obligation ou être autorisé à exécuter l’obligation à la place du débiteur aux dépens de ce dernier, mais seulement si l’obligation n’a aucun caractère personnel pour le débiteur : « la force obligatoire du contrat implique le droit pour le créancier d'obtenir l'exécution en nature des obligations contractuelle […] à moins, hypothèses rarissimes, de mettre en péril l'intégrité physique ou la liberté du débiteur 22». En l’espèce, si la société HLM n’exécutait pas son obligation de faire, celle-ci ne présentant aucun caractère personnel, le créancier de l’obligation, c'est-à-dire Monsieur Georges H et Madame Marie-Christine H, pourrait obtenir son exécution forcée. En cas de conflit, afin de prouver qu’il a exécuté son obligation, le débiteur de l’obligation devra prouver qu’il a mis tous les moyens en œuvre pour l’exécution de son obligation, sans la garantir ; il peut s’exonérer de toute responsabilité en cas de non exécution de son obligation s’il peut prouver une cause étrangère qui ne lui est pas imputable, ou en cas de force majeure ou de cas fortuit. Article 1101 : « Le contrat est une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s'obligent, envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose. » Article 1126 : « Tout contrat a pour objet une chose qu'une partie s'oblige à donner, ou qu'une partie s'oblige à faire ou à ne pas faire. » 21 Article 1145 : « Si l'obligation est de ne pas faire, celui qui y contrevient doit des dommages et intérêts par le seul fait de la contravention. » 22 « Les obligations contractuelles de faire à caractère personnel », Etude rédigée par Audrey Lebois, Maître de conférences à l'IEP de Rennes, La Semaine Juridique Edition Générale n° 47, 19 Novembre 2008, I 210. 20 62 Du fait de ces conséquences importantes en cas de non exécution, il est nécessaire pour le rédacteur de l’acte de vente d’être le plus précis possible dans la rédaction de son obligation de faire, de prévoir toute situation possible afin de les prévenir et d’en informer le mieux possible les parties. C) La constitution de servitudes : accès, passage et stationnement, et écoulement des eaux pluviales Une servitude de droit privé est une charge supportée par un immeuble bâti ou non (appelé fonds servant) appartenant à une personne privée, pour l’usage ou l’utilité d’un autre immeuble (appelé fonds dominant) appartenant à une autre personne. Les servitudes constituent un droit réel immobilier, accessoire du droit de propriété. Elles sont intrinsèquement liées à l’immeuble. L'accord des propriétaires suffit pour la créer mais il est nécessaire de recourir à un acte authentique pour que la servitude soit publiée à la Conservation des hypothèques et devienne ainsi opposable aux tiers et notamment aux propriétaires successifs du fonds servant. Les servitudes légales ont pour origine la loi, ce sont par exemple la servitude de vue (distances à respecter par rapport à la limite séparative), la servitude légale de passage (un fonds enclavé a droit à un passage sur le fonds voisin)… Les servitudes établies « par le fait de l'homme » sont diverses : - par titre ou conventionnelles. - acquises par usucapion23, si elles sont continues et apparentes. - ou par destination du père de famille (implicite). Il existe de nombreuses servitudes classées selon leur nature continue (l’usage est ou peut être continuel sans avoir besoin du fait actuel de l’homme - article 688 alinéa 2 du code civil) ou discontinue (qui ont besoin du fait actuel de l’homme pour être exercées - article 688 alinéa 3 du code civil). En France, elles sont définies pour la plupart par le code civil (art. 637 et suivants)24, mais également dans d'autres textes (code de l'urbanisme, code Forestier, code Rural…). L'usucapion est une règle selon laquelle toute personne qui a disposé d'un bien ou d’un droit immobilier pendant plusieurs années, sans en être réellement propriétaire, peut par prescription acquisitive ou usucapion en acquérir la propriété (article 2258 et suivants du Code civil). 24 Article 637 : « Une servitude est une charge imposée sur un héritage pour l'usage et l'utilité d'un héritage appartenant à un autre propriétaire ». Article 686 : « Il est permis aux propriétaires d'établir sur leurs propriétés, ou en faveur de leurs propriétés, telles servitudes que bon leur semble, pourvu néanmoins que les services établis ne soient imposés ni à la personne, ni en faveur de la personne, mais seulement à un fonds et pour un fonds, et pourvu que ces services n'aient d'ailleurs rien de contraire à l'ordre public. L'usage et l'étendue des servitudes ainsi établies se règlent par le titre qui les constitue ; à défaut de titre, par les règles ciaprès ». 23 63 L'étendue et les modalités d'exercice des servitudes conventionnelles sont définitivement fixées par le titre qui les institue et ne peuvent être modifiées que d'un commun accord entre les propriétaires des fonds dominant et servant. Le propriétaire du fonds dominant, bénéficiaire de la servitude, ne doit rien faire qui aggrave la situation du fonds servant. Le propriétaire du fonds servant doit avoir une attitude purement passive : il doit laisser la servitude s'exercer sans y apporter d'entrave. En l’espèce, vendeurs et acquéreur, personnes privées, ont convenu d’un commun accord de différentes servitudes dans un acte authentique, il s’agit par conséquent de servitudes de droit privé et conventionnelles. La première est une servitude de passage, d’accès et de stationnement, dont le fonds dominant, c’est-à-dire celui qui profite de la servitude, appartient aux consorts H, et dont le fonds servant, c’est-à-dire celui qui supporte la servitude, appartient à la société HLM aux termes de l’acte de vente. C’est une servitude discontinue. Les parties, grâce à la plume du notaire, ont convenu ensemble des modalités d’exercice de cette servitude ; pour la servitude d’accès et de passage, elles ont prévu notamment les frais d’entretien et de réparation qui seront à la charge du propriétaire du fonds servant ; concernant la servitude de stationnement, les parties ont également convenu des modalités de création des emplacements à la charge du fonds servant, et des modalités d’entretien et de réparation à la charge du fonds dominant. La seconde est une servitude d’écoulement des eaux pluviales des garages, dont le fond dominant est une parcelle appartenant à la SCI venderesse, et dont le fonds servant appartient à la société HLM aux termes de l’acte de vente. Vendeurs et acquéreur ont également convenu dans l’acte des modalités de mise en œuvre de cette servitude, ainsi que la participation forfaitaire et proportionnelle du propriétaire du fonds dominant aux frais d’entretien et de réparation du réseau de canalisation assurant l’écoulement des eaux pluviales. Ces servitudes ont été consenties à titre réel et perpétuel, ce qui implique qu’elles seront transmises aux propriétaires successifs des fonds, servant et dominant, sans limitation de durée. Aucune indemnité n’a été consentie ni acceptée de part et d’autre pour la constitution de ces servitudes. Une valeur fictive a été donnée à ces servitudes afin de pouvoir évaluer le salaire du Conservateur des hypothèques25. Le salaire proportionnel du Conservateur est évalué à 10 % de l’évaluation du droit réel, avec un minimum de 15 euros. 25 64 La constitution de ces servitudes fait partie intégrante de la négociation ayant eu lieu entre vendeurs et acquéreur. Ces éléments ont été pris en compte par les vendeurs qui ont fait la demande et par l’acquéreur qui a décidé de consentir de telles servitudes à de telles conditions. Nous pouvons supposer que ces servitudes ont influencé les vendeurs dans leur volonté de vendre à cette société. D) Autorisations d’urbanisme : permis de construire et permis d’aménager Le permis de construire : Le permis de construire est un procédé de police administrative, dont la réglementation est d’ordre public. Il s’agit d’un acte administratif individuel à caractère réel, car il autorise une construction déterminée sur un terrain donné (c’est ainsi qu’en cas de changement de constructeur, il suffit de demander le transfert du permis de construire et non pas la délivrance d’un nouveau permis). Le permis de construire n’est accordé que si les constructions projetées sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires en la matière. L’objet premier du permis de construire est donc d’assurer le respect des règles d’urbanisme. L’autorisation d’urbanisme à obtenir dépend du type de travaux selon qu’il s’agit de constructions neuves ou de travaux sur des constructions existantes. Pour les constructions neuves, le Code de l’urbanisme énumère les opérations soumises à déclaration préalable et celles dispensées de formalités ; les constructions soumises à permis de construire sont celles qui ne sont pas mentionnées. Pour les travaux sur des constructions existantes, le Code énumère expressément ceux soumis à permis de construire. En l’espèce, s’agissant de la construction de deux bâtiments collectifs à usage de logements, l’autorisation d’urbanisme à obtenir pour la réalisation d’un tel projet est effectivement le permis de construire. Le permis d’aménager : Les aménagements regroupent les lotissements, les terrains de camping et des parcs résidentiels de loisirs, et les installations de toute nature affectant l’utilisation du sol. Ces aménagements sont soit dispensés de toute formalités, soit soumis à déclaration préalable, soit soumis à permis d’aménager. Les aménagements soumis à permis d’aménager sont définis à l’article R421-19 du Code de l’urbanisme ; sont compris notamment les lotissements ayant pour effet, sur une période de moins de 10 ans, de créer plus de deux lots à construire, lorsqu’ils prévoient la réalisation de voies ou espaces communs, ce qui est le cas en notre espèce. L’ordonnance du 8 décembre 2005 portant réforme des autorisations d’urbanisme et entrée en vigueur le 1er octobre 2007, défini une procédure unique applicable aux demandes de permis de construire, d’aménager et de démolir et aux déclarations préalables, avec quelques variantes selon le type d’autorisation. 65 Cette procédure est prévue aux articles L423-1 et R423-1 et suivants du Code de l’urbanisme. Lorsque des travaux de construction doivent être réalisés de manière accessoire dans le cadre d’une opération soumise au permis d’aménager, la demande de permis d’aménager doit porter à la fois sur l’aménagement et les constructions. Le permis d’aménager délivré autorisera également les constructions, le permis de construire n’est alors pas nécessaire. En l’espèce, le maître d’ouvrage a fait des demandes de construire et d’aménager séparées et a ainsi obtenu des permis propres à chaque projet. En effet, la construction de deux bâtiments collectifs n’est pas considérée comme la réalisation de travaux accessoires à l’opération soumise au permis d’aménager, elle nécessite donc un permis de construire à part entière. Section 2 : Les formalités I) Les formalités préalables Les formalités préalables pour les ventes reposent sur une base commune à tous les types de vente, avec certains éléments particuliers pour les ventes de terrains. Comme pour tous les actes authentiques, il est nécessaire de demander les états civils des parties (acte de naissance et mariage) afin de connaître l’identité complète du client ainsi que d’éventuelles entraves à sa capacité de disposer ou d’acquérir, ainsi que les éléments sociaux pour les personnes morales (statuts, pouvoirs, kbis, état des inscriptions) afin de vérifier que la personne physique représentant la société a les pouvoirs de signer un acte en son nom et pour son compte et que la situation juridique ou financière de la société ne l’empêche pas de s’engager ainsi (procédures collectives). Il convient également de se procurer le modèle un, c’est-à-dire le relevé cadastral mentionnant les références cadastrales, le lieudit et la superficie, ainsi que le plan cadastral. S’agissant d’un terrain, il n’y a pas lieu aux différents diagnostics sauf le plan de prévention des risques naturels et technologiques, dit PPRN. Il peut s’avérer également utile de demander un certificat d’urbanisme informatif même si un permis de construire a été obtenu. Le certificat d’urbanisme renseignera le rédacteur d’un éventuel droit de préemption urbain. Concernant un autre droit de préemption, il convient de vérifier si celui de la SAFER s’applique. Pour le savoir, il est nécessaire de connaître le type de règles d’urbanisme applicable dans la commune du bien (POS, PLU, carte communale ou non, zone), des seuils minimum de surface étant nécessaires pour que le droit de préemption 66 de la SAFER s’applique, et ces seuils étant différents selon le département, la zone et la règle d’urbanisme applicable. Par ailleurs, de même que pour tous les actes portant sur un bien immobilier, il est indispensable de demander un état hypothécaire trentenaire réel et personnel à la Conservation des hypothèques géographiquement compétente, ainsi que le titre de propriété, pour les raisons que nous avons vu précédemment dans la succession. II) Les formalités postérieures Une fois l’acte de vente signé par toutes les parties et le Notaire et la minute arrêtée, cette dernière est mise au Répertoire de l’étude, c’est-à-dire qu’elle est inscrite sur le registre des actes signés à l’étude. Le comptable procède aux différents mouvements comptables : virement du prix de l’acquéreur au vendeur avec retenue du prorata de taxe foncière ainsi que du loyer et des charges de copropriété le cas échéant, remboursement éventuel d’un prêt, paiement du syndic de copropriété avec envoi de la notification pour les lots de copropriété. La minute et le dossier sont par la suite transmis au clerc aux formalités postérieures qui établira le répertoire, c’est-à-dire un condensé des éléments essentiels de l’acte conservé à l’étude qui serait nécessaire au cas où la minute viendrait à être détruite ou perdue. Le clerc procède par la suite à la publication de l’acte à la ou les Conservations des hypothèques compétentes : il envoie, par courrier ou par téléacte26, la copie pour publier accompagnée de toutes ses annexes et du montant des droits de transmission à titre onéreux, des extraits d’actes et bordereaux d’inscription, la formalité fusionnée permettant l’enregistrement et la publication en même temps à la Conservation des hypothèques. Le clerc établit différentes copies : une copie authentique pour l’acquéreur, une copie simple pour le vendeur et le notaire en concours le cas échéant, une copie hypothécaire pour la publication et un extrait d’acte pour le cadastre. Il demande enfin un état hypothécaire sur formalités. En cas d’inscription hypothécaire révélée par l’état hypothécaire telle qu’un privilège de prêteur de deniers ou une hypothèque en cours de validité, il convient de procéder à sa mainlevée : le clerc rédacteur aura au préalable demandé au prêteur le montant des sommes restant dues au titre du prêt garanti, appelé décompte de remboursement anticipé, ou une lettre certifiant le remboursement total du prêt. 26 Téléacte est la possibilité de dématérialiser tous les échanges des études avec la conservation des hypothèques. 67 En cas de remboursement anticipé, le notaire aura procédé audit remboursement grâce au prix suite à la signature de la vente. Pour faire la mainlevée, le clerc doit obtenir également le pouvoir de la banque pour faire ladite mainlevée. Une fois tous les éléments réunis, le clerc pourra rédiger l’acte de mainlevée, le vendeur ayant donné pouvoir à un clerc de l’étude dans l’acte pour signer l’acte de mainlevée éventuelle. 68 CHAPITRE 2ND : … A UNE SOCIETE HLM Une habitation à loyer modéré est un logement géré par un organisme d’habitations à loyer modéré, public ou privé qui bénéficie d’une financement public partiel, direct (subventions) et/ou indirect (crédits d’impôts, exonérations fiscales…). En France, 4,3 millions de ménages vivent en HLM à la fin des années 2000, soit près de 10 millions d’habitants. Près d’un tiers a été construit après 1985. La densité de logements sociaux en métropole, relativement stable depuis 5 ans, est de 70,1 logements pour 1 000 habitants au 1er janvier 2010. La région Midi-Pyrénées a l’une des plus faibles densités de logements sociaux (40 à 52 logements sociaux pour mille habitants en Haute-Garonne au 1er janvier 2010). En l’espèce, la société anonyme a acquis les terrains des consorts H pour y construire des logements à loyer modéré. Bien que les HLM fassent partie intégrante du paysage urbain et qu’ils soient souvent dans les médias et les conversations, nous connaissons mal ces organismes et les particularités liées à leurs opérations. C’est pourquoi nous étudierons en premier lieu les particularités juridiques d’une vente à une société HLM (section 1) puis les particularités fiscales d’une telle cession (section 2), bien qu’intrinsèquement liées. Section 1 : Les particularités juridiques d’une vente à une Société HLM Juridiquement, les HLM sont « des habitations collectives ou individuelles, urbaines ou rurales, répondant aux caractéristiques techniques et de prix de revient déterminées par décision administrative et destinées aux personnes et aux familles de ressources modestes27. » Leur statut et leur réglementation se trouvent dans le livre IV du Code de la Construction et de l’habitation, aux articles L411 et suivants dudit Code. L’article L411-2 prévoit expressément que les sociétés anonymes d’habitations à loyer modéré, tel que cela est le cas en notre espèce, sont comprises dans les organismes d’habitations à loyer modéré auquel s’applique le Livre IV du Code de la Construction et de l’Habitation, et bénéficient d’exonérations fiscales et d’aides spécifiques de l’Etat au titre du service d’intérêt général défini comme : « la construction, l'acquisition, l'amélioration, l'attribution, la gestion et la cession de logements locatifs à loyers plafonnés, lorsqu'elles sont destinées à des personnes dont les revenus sont inférieurs aux plafonds maximum fixés par l'autorité administrative… » L’objet des sociétés anonymes d’habitations à loyer modéré est prévu à l’article L422-2 du Code de la Construction et de l’habitation, il comprend notamment : « réaliser, 27 Article L411-1 du Code de la construction et de l’habitation. 69 dans les conditions fixées par leurs statuts, principalement en vue de la location, les opérations prévues à l'article L. 411-1 ». Deux dispositifs juridiques principaux existent et sont spécifiques aux organismes d’habitations à loyer modéré, ce sont le fonds de garantie (I) et le prêt locatif à usage social (II). I) Le fonds de garantie Dans le chapitre « Prêts et concours financiers divers aux organismes d’habitations à loyer modéré » du Code de la construction et de l’habitation, il est prévu à l’article L431-1, que « lorsque le paiement des annuités afférant au remboursement des prêts consentis aux organismes d'habitations à loyer modéré n'est pas garanti par une collectivité locale, […], la créance en principal, intérêts et accessoires de l'Etat ou des établissements prêteurs qui lui sont substitués, est garantie par une hypothèque légale sur les immeubles » au profit de l'Etat ou des établissements prêteurs substitués. A compter du 1er janvier 1986, la Caisse de Garantie du Logement Social, puis la Caisse des Dépôts et Consignations depuis le 1er janvier 1996, furent subrogées dans les hypothèques prises par les sociétés de crédit immobilier comme garantie des prêts qu'elles consentent. Ces subrogations peuvent se substituer en partie à l’hypothèque légale. Par ailleurs, lorsque le fonds de garantie apportait sa garantie, il pouvait demander que soit inscrite à son profit une hypothèque légale qui s'étend aux biens immobiliers acquis ou édifiés à l'aide de prêts qu'il a garantis. Cependant, depuis l'entrée en vigueur de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain (loi SRU entrée en vigueur le 1er juin 2001), aucune nouvelle inscription d'hypothèque légale ne peut être demandée au profit du fonds de garantie. Lorsqu'elle consent elle-même un prêt pour la construction, l'acquisition ou l'amélioration de logements locatifs sociaux, la CDC peut inscrire, en garantie de sa créance en principal, intérêts et accessoires, une hypothèque légale sur les immeubles faisant l'objet du prêt. Ces dispositions s'appliquent également lorsque la créance est née avant l'entrée en vigueur de la loi SRU du 13 décembre 2000. II) Le prêt locatif à usage social Le prêt locatif à usage social (PLUS) est un mode de financement extérieur destiné aux organismes de logement social et aux sociétés d'économie mixte. Il permet de financer : l'achat de terrain et la construction de logements neufs ; l'acquisition et l’amélioration de logements anciens ; la transformation de locaux en logements locatifs. 70 Ces constructions entrent alors dans la catégorie des logements sociaux par le biais d'une convention passée avec l'État. Fin 2009, au sein du parc existant, 39 % des logements ont bénéficié d’aides financières de l’Etat pour la réhabilitation et 29 % de PLA. La part de logements ayant bénéficié d’un PLUS, créé en remplacement du PLA à partir de septembre 1999, ne cesse de progresser, pour atteindre 8 % du parc en 2009 contre 6 % en 2007. La création du PLUS Le prêt locatif à usage social a été créé par le décret n°99-794 du 14 septembre 1999, publié au Journal officiel du 15 septembre 1999. Il remplace les Prêts locatifs aidés (PLA) et Prêts locatifs aidés à loyer minoré (PLA-LM). L’objectif social du PLUS La mise en place du PLUS doit donner aux bailleurs sociaux les moyens, notamment juridiques, de répondre aux exigences de mixité sociale, en leur permettant d’accueillir des ménages avec des ressources différentes dans les mêmes immeubles et de mieux maîtriser les loyers. Les opérations financées par le PLUS doivent accueillir au moins 30 % de locataires dont les revenus sont inférieurs à 60 % du plafond des ressources (selon le type de logement et la zone géographique) et 10 % de locataires dont les revenus sont supérieurs de 20 % maximum audit plafond. Les logements sociaux ainsi réalisés sont accessibles à 75 % de la population. Distributeur et taux du PLA Le prêt locatif à usage social est exclusivement distribué par la Caisse des Dépôts. Son taux est indexé sur celui du Livret A, majoré de 0,60 % : En 1999, il était de 3,45 %. En 2012, avec un taux du Livret A à 2,25 %, le taux du PLUS était donc à 2,85 %. Au 1er février 2013, le livret A est passé à 1,75 %, ce qui a fait passer le taux du PLUS à 2,35 %. Conditions du PLA Une convention est obligatoirement passée entre l’Etat et le bénéficiaire. Elle fixe le loyer maximum, avec un plafond modulé selon le type de logement et la zone géographique. Les locataires sont soumis à un plafond de ressources dépendant de la composition du foyer et de la zone géographique. Les locataires sont éligibles à l’aide personnalisée au logement (APL), en application de l'alinéa 3 de l’article L.351-2 du code de la construction et de l’habitation. Les conditions d’habitabilité inhérentes au PLUS 71 Des normes minimales d’habitabilité sont définies par arrêté du ministère chargé du logement. Celles-ci comprennent : - des normes générales relatives à la sécurité, à la salubrité et à l’équipement de l’immeuble (étanchéité, parties communes et canalisations) - et des normes relatives à la sécurité, à la salubrité et à l’équipement des logements (normes dimensionnelles, ouverture et ventilation, installation de la cuisine ou du coin cuisine, installation du gaz et de l’électricité, équipement sanitaire et chauffage). Les textes définissant les conditions d'attribution du PLUS Ce sont les articles R.331-1 à R.331-28 du code de la construction et de l’habitation, l'article 17 de la loi de finances pour 1997 et l'article 14 de la loi de finances pour 1998. S'appliquent également les décrets n° 99-864 et 99-865 du 7 octobre 1999 (publiés au Journal officiel du 8 octobre 1999) et la circulaire 99-71/UC/FB/DH du 14 octobre 1999. Les subventions découlant du PLUS Pour les opérations de construction neuve, définies à l'alinéa 2 de l'article R.33115 a) du code de la construction et de l’habitation, le taux de subvention est fixé à 5 %, pouvant être porté à 6,5 % par dérogation préfectorale. Pour les opérations d’acquisition-amélioration, définies à l'alinéa 3 de l'article R.331-15 a) du code de la construction et de l’habitation, le taux de subvention est de 10 %, pouvant être porté à 11,5 % par dérogation préfectorale. Le calcul des assiettes de subventions et de fixation des loyers est basé sur la règlementation de la surface utile28. Les avantages financiers et fiscaux liés au PLUS Les opérations bénéficient du taux de taxe sur la valeur ajoutée à 5,5 % pour la construction ou la réalisation des travaux, si ceux-ci sont éligibles aux catégories de travaux retenus par le décret du 30 avril 1998 (travaux d’amélioration, de transformation ou d’aménagement de logements locatifs sociaux). Elles sont exonérées de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) pendant quinze ans. Cette durée d’exonération est portée à 25 ans pour les logements locatifs sociaux construits sur la période du plan de cohésion sociale 2005-2009. En application de l’article R.331-1 du code de la construction et de l’habitation, l'octroi d'un PLUS s'accompagne d’un prêt de la Caisse des dépôts et consignations 28. Articles R. 331-10 et 353-16-2° du CCH : "La surface utile est égale à la surface habitable du logement, telle que définie à l’article R. 111-2 du CCH, augmentée de la moitié de la surface des annexes définies par arrêté du ministre chargé du logement". Voir le guide de la surface utile : http://www.dguhc-logement.fr/infolog/filog/guide_surface_utile.pdf 72 (CDC), au taux de 4,3 %, d’une durée de 50 ans, assorti d’un préfinancement. Le montant du prêt ne peut dépasser, déduction faite de la subvention de l’Etat, l’assiette de subvention définie à l’article R.331-15 du code de la construction et de l’habitation et calculée selon des modalités fixées par arrêté. Intrinsèquement liées aux dispositions juridiques, les spécificités fiscales liées à une vente à une société HLM sont très importantes. Section 2 : Les particularités fiscales d’une vente à une Société HLM Les dispositions fiscales essentielles dans le cadre de ventes de terrain à bâtir à une société HLM sont l’exonération de la taxe de publicité foncière et la réduction du salaire du conservateur (I), l’imposition sur les plus-values (II) et enfin la taxe sur les cessions de terrains devenus constructibles (III). I) L’exonération de taxe de publicité foncière et la réduction du salaire du Conservateur En vertu de l’article 1049 du code général des impôts en vigueur depuis le 1er juillet 1979, l’acquéreur étant une société anonyme d’habitations à loyer modéré, la cession est exonérée de taxe de publicité foncière. Aux termes de l’article 882 du code général des impôts (abrogé par l’ordonnance du 10 juin 2010, entré en vigueur au 1er janvier 2013, et remplacé par l’article 881 L 1° du code général des impôts), le salaire du Conservateur des hypothèques est réduit de moitié lorsque les formalités hypothécaires intéressent les organismes d’habitations à loyer modéré. II) La taxation des plus-values Dans la première vente datant du 3 juillet 2006, par Madame Jeanine H au profit de la société HLM, la venderesse bénéficie de l’exonération des plus-values conformément à l’article 150 VC I du code général des impôts alors en vigueur. Cet article prévoyait alors un abattement de 10 % pour chaque année de détention au-delà de la cinquième, ce qui revient à une exonération totale au bout de 15 ans. En l’espèce, la venderesse était propriétaire des biens immobiliers vendus depuis 1968 et 1989, soit depuis plus de 15 ans. Si la vente était réalisée aujourd’hui, le vendeur ne pourrait plus se prévaloir d’une exonération totale au bout de 15 ans, le nouvel article 150 VC du code général des impôts, entré en vigueur le 7 mai 2012, institue en effet un nouvel abattement progressif à partir de la cinquième année de détention pour aboutir à un abattement total au bout de 30 ans. En l’espèce, la venderesse aurait donc été imposable pour la partie des biens immobiliers dont elle est propriétaire depuis 1989. 73 Hypothèse : si cette vente avait été signée le 3 juillet 2013 et non pas le 3 juillet 2006, quel aurait été le montant de l’impôt sur la plus-value payé par le vendeur ? Trois huitièmes des biens vendus proviennent d’un partage datant de 1968, dont les faits générateurs sont antérieurs, soit depuis plus de 30 ans ; cette partie est exonérée d’impôt sur les plusvalues. Cinq huitièmes des biens vendus appartenaient à la venderesse par suite d’un décès survenu le 1 er juin 1986, il y a moins de 30 ans. Cette partie de la vente est par conséquent soumise à l’imposition sur les plus values. Le calcul s’établit comme suit : Prix de vente : 5/8 X 1.000.000 = 625.000 € Prix d’acquisition : 2.007.025 francs soit environ 305.969 € Auquel on ajoute les dépenses de construction : forfait 15 % = 45.895 € Nous ne pouvons ajouter les frais d’acquisition à défaut d’information quant au montant des frais réels payés lors d’une acquisition à titre gratuit. Total = 351.864 € Plus-value brute = 273.136 € Abattement pour durée de détention au-delà de la 5ème année : 22 ans soit 76 % d’abattement = 207.583 € Plus-value imposable : 65.552 € 19 % d’imposition + prélèvements sociaux = 33,5 % Montant de l’impôt : 21.960 € Taxe sur les plus-values supérieures à 50.000 € : 2 % de la plus-value, soit : 1.311 TOTAL A PAYER : 23.271 € Un autre motif d’exonération aurait alors pu être soulevé par le notaire, ce qu’il a fait dans la seconde vente intervenue le 22 octobre 2010. En effet, les vendeurs, en l’espèce les consorts H et la SCI familiale, ne sont propriétaires des biens immobiliers vendus que depuis une relativement courte période, ne pouvant ainsi prétendre à aucune exonération due à la durée de détention. Cependant, la vente a été consentie au profit d’un organisme d’habitations à loyer modéré, organismes pour lesquels le code général des impôts prévoit une exonération totale. Selon l’article 150 U 7° du code général des impôts en vigueur au moment de la vente, ne sont pas imposables les plus-values réalisées lors de cessions à titre onéreux de biens immobiliers « […] qui sont cédés avant le 31 décembre 2011 à un organisme d'habitations à loyer modéré, […] »29, ce qui fut notre cas en l’espèce. Article 150 U du CGI : « I.-Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices agricoles et aux bénéfices non commerciaux, les plus-values réalisées par les personnes physiques ou les sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 ter, lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou de droits relatifs à ces biens, sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH. Ces dispositions s'appliquent, sous réserve de celles prévues au 3° du I de l'article 35, aux plus-values réalisées lors de la cession d'un terrain divisé en lots destinés à être construits. II.-Les dispositions du I ne s'appliquent pas aux immeubles, aux parties d'immeubles ou aux droits relatifs à ces biens : […] 7° Qui sont cédés avant le 31 décembre 2011 à un organisme d'habitations à loyer modéré, à une société d'économie mixte gérant des logements sociaux, à l'association mentionnée à l'article L. 313-34 du code de la construction et de l'habitation, aux sociétés civiles immobilières dont cette association détient la majorité des parts pour les logements visés 29 74 Nous pouvons en déduire a contrario, que les ventes consenties à des organismes HLM à compter du 1er janvier 2012 ne bénéficient plus de cette exonération et sont désormais soumises au droit commun. Alors que la France est confrontée un réel problème de logement, nous pouvons nous questionner sur l’opportunité d’une telle imposition qui ralentira sans aucun doute l’enthousiasme des propriétaires à vendre leurs terrains, et par là-même la construction de logements sociaux. Le Gouvernement français avait prévu d'aller encore plus loin dans la taxation des plus-values immobilières pour les terrains à bâtir dans le cadre de la loi n°20121509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013. L'article 15 de la loi de finances 2013 prévoyait en effet de supprimer l'abattement pour durée de détention pour les terrains à bâtir. Cette suppression avait pour objectif d'inciter les propriétaires de terrains à bâtir à vendre ces biens sans attendre une baisse de l'impact fiscal. Il était également prévu de remplacer pour les terrains à bâtir l'imposition de base des plus-values immobilières au taux fixe de 19% par le barème progressif de l'impôt sur le revenu. Cet article de la loi a été déclaré non conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel par une décision du 29 décembre 2012. Le Conseil constitutionnel a notamment estimé que la réforme de l'imposition des plus-values immobilières sur les terrains ferait peser sur les contribuables en France une charge excessive. Le Président de la République a promis lors d’un discours énoncé le 21 mars 2013, un nouveau revirement fiscal en confirmant le projet de suppression des abattements pour durée de détention sur les plus-values de cession des terrains constructibles, mesure prévue initialement pour 2013 mais retoquée fin 2012 par le Conseil Constitutionnel. Le retour de cette mesure s'appliquerait à toutes les cessions intervenues à compter du 1er janvier 2014. Les plus-values sur des cessions résultant de promesses de vente enregistrées jusqu'au 31 décembre 2013 conserveraient donc le bénéfice du régime actuel d'abattement. Pour rappel, les plus-values réalisées sur les terrains à bâtir sont actuellement taxées à 19%. En y rajoutant les prélèvements sociaux (15,5%), le taux d’imposition atteint toujours 34,5%. Les propriétaires bénéficient, par ailleurs, d’un abattement sur la au 4° de l'article L. 351-2 du code de la construction et de l'habitation ou à un organisme bénéficiant de l'agrément relatif à la maîtrise d'ouvrage prévu à l'article L. 365-2 du code de la construction et de l'habitation. 8° Qui sont cédés avant le 31 décembre 2011 à une collectivité territoriale, à un établissement public de coopération intercommunale compétent ou à un établissement public foncier mentionné aux articles L. 321-1 et L. 324-1 du code de l'urbanisme en vue de leur cession à l'un des organismes mentionnés au 7° ; en cas de non respect de cette condition dans un délai d'un an à compter de l'acquisition des biens, la collectivité territoriale ou l'établissement public de coopération intercommunale compétent reverse à l'Etat le montant dû au titre du I ; ce délai est porté à trois ans pour les cessions réalisées par un établissement public foncier au profit de l'un des organismes mentionnés au 7°. » 75 plus-value pour durée de détention : de 2% par an entre la sixième et la dix-septième année de détention, puis de 4% par an au-delà de la dix-septième année, et enfin de 8 % chaque année au-delà de vingt-quatre ans. Ce qui conduit donc à une exonération totale au bout de 30 ans. III) Les taxes sur la cession de terrains devenus constructibles Les cédants de terrains à bâtir peuvent se voir appliquer sur leur prix de vente deux autres taxes lorsque le terrain est devenu constructible : A) L’article 1529 du CGI La première est celle de l’article 1529 du CGI, en vertu duquel, « I. - Les communes peuvent, sur délibération du conseil municipal, instituer une taxe forfaitaire sur la cession à titre onéreux de terrains nus qui ont été rendus constructibles du fait de leur classement par un plan local d'urbanisme ou par un document d'urbanisme en tenant lieu dans une zone urbaine ou dans une zone à urbaniser ouverte à l'urbanisation ou par une carte communale dans une zone constructible. […] II.-La taxe s'applique aux cessions réalisées par les personnes physiques et les sociétés et groupements, soumis à l'impôt sur le revenu afférent à la plus-value dans les conditions prévues à l'article 150 U, […]. Elle ne s'applique pas : a. aux cessions mentionnées aux 3° à 8° du II de l'article 150 U ; b. aux cessions portant sur des terrains qui sont classés en terrains constructibles depuis plus de dix-huit ans […] ». Le texte applicable à la taxe sur la cession de terrains devenus constructibles renvoie au texte applicable en matière d’imposition sur les plus-values. Le 7° du II de l’article 150 U énonce que ces dispositions ne s'appliquent pas aux immeubles, aux parties d'immeubles ou aux droits relatifs à ces biens : « Qui sont cédés avant le 31 décembre 2011 à un organisme d'habitations à loyer modéré, […] ». Ainsi, les organismes HLM bénéficiaient de la même exonération que pour l’impôt sur les plus-values ; celle-ci a cessé fin 2011, les cessions sont donc soumises au droit commun des taxes sur la cession de terrains devenus constructibles depuis le 1er janvier 2012. En l’espèce, cette taxe ayant été créée par la loi du 21 décembre 2006, elle n’existait pas lors de la première vente en juillet 2006 ; la seconde vente était quant à elle exemptée, tant en raison de la qualité du cessionnaire, que parce que le terrain était classé constructible depuis plus de 18 ans. En conclusion, la même question quant à l’opportunité de l’abrogation d’une telle mesure se pose, abrogation qui, en imposant plus fortement le cédant, tout comme l’imposition sur les plus-values, freinera voire dissuadera le propriétaire de vendre. 76 B) L’article 1605 nonies du CGI Cette seconde taxe sur la cession de terrains devenus constructibles est prévue à l’article 1605 nonies du CGI, le I énonce : « Il est perçu une taxe sur la cession à titre onéreux des terrains nus ou des droits relatifs à des terrains nus rendus constructibles du fait de leur classement, postérieurement au 13 janvier 2010, par un plan local d'urbanisme ou par un autre document d'urbanisme en tenant lieu, en zone urbaine ou à urbaniser ouverte à l'urbanisation ou par une carte communale dans une zone où les constructions sont autorisées ou par application de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme. » Cette taxe se cumule avec la première taxe sur les cessions de terrains devenus constructibles quand leurs champs d’application respectifs se recoupent, c'est-à-dire pou les terrains nus devenus constructibles du fait de leur classement par un plan local d'urbanisme ou par un document d'urbanisme dans une zone urbaine ou dans une zone à urbaniser ouverte à l'urbanisation ou par une carte communale, depuis le 13 janvier 2010, avec la délibération du conseil municipal, instituant la taxe forfaitaire de l’article 1529. Cette taxe ne souffre aucune exception, aucun régime de faveur n’a été prévu pour les organismes HLM. Cette taxe ne s’appliquait pas en l’espèce : elle n’existait pas encore au moment de la première vente en juillet 2006, et elle ne s’appliquait pas non plus à la seconde vente en octobre 2010, le terrain ayant été classé constructible avant le 13 janvier 2010. Découlant en partie de la fiscalité des cessions à des organismes HLM, il convient d’examiner le coût que représentent ces cessions pour les parties. Section 3 : la taxation des actes I) La taxe de publicité foncière La taxe de publicité foncière est perçue lors des mutations à titre onéreux de bâtiments de plus de cinq ans ou de terrains à bâtir lorsqu'ils sont destinés par des particuliers à la construction d'habitation. Elle est calculée sur l'assiette du prix de vente - ou de la valeur vénale du bien - et payée par l'acquéreur. Son taux est de 5,09 %. Pour les autres opérations, la taxe est de 0,7 % et est soumise au prélèvement de 2,14 % pour frais d'assiette et de recouvrement, soit un total de 0,715 %, depuis le 1er janvier 2011. Ce taux s’applique aux : - ventes d'immeubles neufs qui supportent déjà la TVA immobilière; 77 - inscriptions à la conservation des hypothèques telles que les hypothèques; achats effectués en vue de la revente par un marchand de biens. Comme nous l’avons vu ci-avant, l’acquéreur étant une société anonyme d’habitations à loyer modéré, la cession est exonérée de taxe de publicité foncière, en vertu de l’article 1049 du code général des impôts. En vertu de l’article 1594-0 G du CGI, une personne assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée, acquéreur d’un terrain à bâtir, peut voir son opération d’acquisition exonérée de taxe sur la publicité foncière ou de droits d’enregistrement, si elle prend l’engagement de construire un immeuble neuf ou de remettre l’immeuble acquis à neuf dans un délai de quatre ans. L’opération est alors soumise un droit d’enregistrement fixe de 125 €. L’acquéreur doit justifier, à l’issue du délai de quatre ans, qu’il a rempli son engagement de construire ou de rénover. En l’espèce, la société HLM a pris cet engagement dans la vente de 2010, bien qu’il ne soit pas nécessaire, l’opération étant déjà exonérée de taxe de publicité foncière du fait de la qualité de l’acquéreur. II) Le salaire du conservateur De même, aux termes de l’article 882 du code général des impôts, le salaire du Conservateur des hypothèques est réduit de moitié lorsque les formalités hypothécaires intéressent les organismes d’habitations à loyer modéré. Le conservateur des hypothèques a été supprimé par l’ordonnance du 10 juin 2010 (art. 6) entrée en application le 1er janvier 2013, et son salaire a été remplacé par la contribution de sécurité immobilière (codifiée sous l’article 879 du CGI) : Cette contribution est due à l'Etat pour l'accomplissement des formalités d'enregistrement et de publicité foncière. Elle est fixée au taux proportionnel de 0,10 % du prix du bien, avec un minimum de 15 €. Devenu l’article 881 L 1° du CGI, la réduction de la contribution de sécurité immobilière continue d’exister au profit des organismes HLM dans les mêmes conditions. III) La TVA Depuis la réforme de mars 2010, pour déterminer le régime fiscal d’une acquisition immobilière et savoir si l’opération est soumise à la taxe de publicité foncière et à la taxe sur la valeur ajoutée, il faut combiner deux critères : - la qualité des parties. La loi distingue les personnes qui sont assujetties à la TVA dans le cadre de l’exercice d’une activité économique (professionnels de l’immobilier, entreprises, etc.), 78 et les non-assujettis (particuliers) qui réalisent des opérations qui sont en principe en dehors du champ d’application de la TVA immobilière. - la nature du bien acquis. Par exemple, les règles applicables à la vente d’un terrain à bâtir (terrain sur lequel le droit de l’urbanisme permet l’édification de constructions) ne sont pas les mêmes que celles applicables à la vente d’un immeuble neuf (achevé depuis moins de 5 ans). En matière d’acquisition de terrain à bâtir, il faut distinguer deux cas : - le terrain est vendu par un particulier : Le vendeur n'est pas assujetti, la cession du terrain à bâtir est hors champ d'application de la TVA, quelle que soit la qualité de l'acheteur. Comme par le passé, seuls les droits d’enregistrement sont exigibles. - le terrain est vendu par un professionnel : Le vendeur est assujetti, il doit payer la TVA (en principe au taux de 19,6 %). Dans les deux cas, l'acheteur paie les droits de mutation au taux normal (5,09%). S'il est assujetti, il peut bénéficier du taux réduit de 0,715% s'il prend l'engagement de revendre le terrain dans les cinq ans, ou du taux fixe de 125 € s'il prend l'engagement de construire dans les quatre ans. La loi est applicable à toutes les ventes conclues depuis le 11 mars 2010. En l’espèce, le terrain est vendu par un particulier (la SCI n’est pas considérée comme un professionnel de l’immobilier et donc comme un professionnel) et n’est pas assujetti. Le vendeur ne paie donc pas de TVA. L’Acquéreur doit payer les droits de mutation à titre onéreux, mais, comme nous l’avons vu ci-avant, l’acquéreur étant une société anonyme d’habitations à loyer modéré, la cession est exonérée de taxe de publicité foncière. IV) Les émoluments du notaire La rémunération du notaire est strictement réglementée et fait l’objet d’un tarif. Ce tarif a été fixé par le décret du 8 mars 1978, puis modifié par les décrets des 16 mai 2006, 21 mars 2007 et 17 février 2011. Les émoluments proportionnels sont calculés en appliquant un taux à la valeur énoncée dans l’acte. Ce taux est dégressif et est affecté d’un coefficient en fonction de la nature juridique de l’acte. Ces actes sont classés dans le décret. Les émoluments de formalité qui accompagnent souvent la réalisation d’un acte sont évalués aussi en unités de valeur (UV) en fonction du type d’acte. Depuis le décret du 16 mai 2006, l'UV est égale à 3,65 € HT (exemples : copie authentique, copie sur papier libre…) 79 V) Les débours du Notaire Le notaire prélève également des frais pour les formalités qu’il a réalisées et ses débours. Ce sont les sommes acquittées par le notaire pour le compte de son client et servant à rémunérer les différents intervenants et/ou à payer le coût des différents documents, ainsi qu’à régler les frais exceptionnels engagés à la demande du client (ex. certains frais de déplacement). 80 CONCLUSION En conclusion, des mécanismes juridiques mais surtout fiscaux existent bel et bien en France concernant la création de logements sociaux. Ces mécanismes ont pour but d’en faciliter la création, d’inciter les promoteurs et organismes HLM à se lancer dans de tels projets. Cependant, comme nous l’avons vu, la tendance actuelle est de remettre en cause ces avantages, essentiellement fiscaux, pour permettre à l’Etat de gagner de l’argent et combler son fameux déficit public ; ce qui en soi n’est pas répréhensible, au contraire, mais qui aurait des conséquences néfastes pour la création de logements sociaux, notamment le ralentissement des ventes de terrains à des sociétés HLM par des particuliers. L’Etat doit ici faire un choix : adopter des mesures fiscales visant à rembourser le déficit public, bien que insuffisantes pour le combler, ou créer du logement social pour les milliers de personnes qui en ont besoin. D’autres dispositifs spécifiques au logement social existent et n’ont pas été traités dans ce rapport car ils interviennent après la vente du terrain à l’organisme constructeur. Ce sont les éléments relatifs à la vente des logements sociaux aux particuliers eux-mêmes. 81 BIBLIOGRAPHIE Manuels : AUBY, PERINET-MARQUET, NOGUELLOU, Droit de l’urbanisme et de la construction, par J.-B. AUBY, H. PERINET-MARQUET et R. NOGUELLOU, coll. Domat, éd. Montchrétien Lextenso, 8° éd., 2008. FERRAN, Le notaire et le règlement de la succession, Guide pratique, par F. FERRAN, éd. Litec, 2ème éd., 2005. GENTILHOMME, HERAIL, FOUCHE et SOLLET, Fiscalité des mutations à titre gratuit et des partages, par R. GENTILHOMME, M. HERAIL, E. FOUCHE et A. SOLLET, éd. Defrénois Lextenso, 2010. GRIMALDI, Droit Civil, Libéralités partages d’ascendants, par M. GRIMALDI, éd. LITEC, 2000. MALAURIE, Les Successions Les Libéralités, par P. MALAURIE, éd. Defrénois, 2010. MEMENTO PRATIQUE Francis Lefebvre, Patrimoine, éd. MEMENTO PRATIQUE Francis Lefebvre 2009-2010. MEMENTO PRATIQUE Francis Lefebvre, Droit de la famille, éd. MEMENTO PRATIQUE Francis Lefebvre 2010-2011. MEMENTO PRATIQUE Francis Lefebvre, Urbanisme Construction, éd. MEMENTO PRATIQUE Francis Lefebvre 2008-20090. MORIN et VION, Recueil de solutions d’examens professionnels, Tome 2, Droit de la famille, par R. CRONE, B. GELOT et L. RICCO, éd. Defrénois Lextenso, 13° éd., 2010. Codes : Code civil, éditions Dalloz, 2012. Code de l’urbanisme et de la construction, éditions Dalloz, 2012. Code général des impôts, éditions Dalloz, 2012. Revues juridiques : SEMAINE JURIDIQUE GENERALE et NOTARIALE Sites internet : www.legifrance.gouv.fr http://www.notaires.paris-idf.fr http://doc.impots.gouv.fr 82 ANNEXES 1) 2) 3) 4) 5) Donation en date du 8 juillet 2006 Déclaration de succession en date du 25 mai 2011 Partage en date du 25 mai 2011 Vente en date du 3 juillet 2006 Vente en date du 22 octobre 2012 83