Le deuil dans la fratrie - Réseau Vivre Son Deuil Grand Sud

Transcription

Le deuil dans la fratrie - Réseau Vivre Son Deuil Grand Sud
ACCOMPAGNER LE DEUIL
DANS LA FRATRIE
Cécile Séjourné
FEVSD
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L’enfant et la mort : contexte et représentations
Le deuil dans l’enfance
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La conception de la mort chez l’enfant en fonction des âges
Les particularités du deuil chez le jeune
Les complications
Le deuil dans la fratrie
Accompagner la fratrie en deuil : quelques repères,
quelques outils
Cécile Séjourné
L’enfant et la mort : contexte
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LA FIN DE LA PROXIMITÉ AVEC LES MORTS DE LA
FAMILLE
Progrès médical, allongement de la durée de la vie, recul de la
mortalité infantile
 Changements de mode de vie
 Généralisation de la mort hospitalière
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-> les enfants côtoient peu le mourir « pour de vrai »
Cécile Séjourné
L’enfant et la mort : contexte
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DEFICIT DE TRANSMISSION CULTURELLE DE LA
MORT CHEZ LES NOUVELLES GENERATIONS
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Moindre pratiques des rites funéraires
Conspiration du silence plus qu’un discours sur la mort ( fin du
monopole du discours religieux)
L’adulte rencontre la mort à l’âge moyen de 35 ans
->Des adultes démunis au niveau des mots et des gestes
Des parents qui traversent l’épreuve du deuil pour la première
fois en même temps que leurs enfants : sans recul ni expérience
Cécile Séjourné
L’enfant et la mort : contexte
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UNE EXHIBITION DE LA MORT MEDIATIQUE
La valorisation du sensationnel
 La suprématie de l’image
 La mise en scène des sentiments
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Et Pourtant !
 Les morts violentes ne représentent que 7% des décès
 La maladie grave (cancer) : 1ère cause de mortalité
devant les accidents de transports chez les 5-14 ans
Cécile Séjourné
L’enfant et la mort : contexte
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UNE MORT DESINCARNEE
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L’enfant a perdu toute familiarité avec la réalité de la mort.
Il ne connait que la mort aseptisée et filtrée par des écrans : ceux
des télévisions, des ordinateurs, de ses jeux vidéo.
Ses héros, bons ou méchants, ont plusieurs vies, ne meurent pas
mais évoluent. Comme si la vie avait perdu de sa radicalité et de son
irréversibilité.
->Une mort en 3D ?: la mort pour de vrai (celles des animaux), la mort
pour de loin (celle des écrans ,des stars), la mort pour de faux (celle
des jeux).
Cécile Séjourné
L’enfant et la mort : représentations
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DES ADULTES DEMUNIS, ANIMES DE FAUSSES
CROYANCES
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Il faut préserver le plus longtemps possible l’enfant du
malheur et donc de la mort ( mot « mort » non prononcé,
mort cachée, annonce différée ou cause déguisée, enfants
écartés des lieux de fin de vie ou des cérémonies…).
L’enfant est trop petit pour comprendre et pour avoir des
souvenirs, cela ne sert à rien de lui parler.
L’enfant manifeste peu de chagrin, cela ne sert à rien de
l’inquiéter davantage.
Cécile Séjourné
L’enfant et la mort : représentations
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DES ENFANTS ACULTURES, ANIMES DE CROYANCES
INFANTILES
la mort n’est pas naturelle (on ne meurt pas, on est tué )
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la mort est réversible (on meurt et on revient)
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Qui a tué?
Moi?
Pourquoi ne revient-il pas?
Pourquoi m’a-t-il abandonné?
la mort est contagieuse (la mort s’attrape)
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Qui va être le prochain?
Moi?
Cécile Séjourné
Accompagner un enfant en deuil,
c’est reconnaitre son chagrin,
lui parler à hauteur d’enfant,
et lui tenir la main
pour qu’il ne vive pas plus tard chaque nouvelle
séparation comme un abandon.
Cécile Séjourné
PARTICULARITES DU DEUIL CHEZ L’ENFANT
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Le deuil se pose comme une aberration car il constitue une
véritable interférence dans son développement
Le déroulement du deuil chez le jeune dépend étroitement
de celui de son entourage.
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Enfin, le deuil chez le jeune est pluriel.
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Le deuil dans la fratrie : un deuil encore trop peu reconnu.
Cécile Séjourné
SPECIFICITES DU TRAVAIL DE DEUIL
CHEZ L’ENFANT
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Sur le plan de la douleur
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Sur le plan du processus du travail du deuil
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L’enfant «agit» sa souffrance plus qu’il ne la verbalise
Les manifestations de son chagrin sont à éclipse
Le mouvement de régression alterne avec son envie d’être
grand plus vite
La reconnaissance de la réalité de l’absence est plus lente et
évolue selon un mode fluctuant.
Elle passe par le dialogue avec un frère imaginaire.
La culpabilité
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Elle est massive
Cécile Séjourné
LE CHEMIN DU DEUIL CHEZ L’ENFANT
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Phase de sidération :
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Phase de vécu dépressif :
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Souvent différée, remplacée par une forme d’anesthésie
affective (protection du parent) ou une indifférence affichée
(mécanisme de survie de l’adolescent).
Elle peut surgir quand les parents vont mieux, à l’occasion
d’un nouveau décès ( animal de compagnie…)
Elle se manifeste par intermittence, au travers du corps et du
comportement. Cf. une hyperactivité réactionnelle.
Phase de restructuration :
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Reportée à l’âge adulte à l’occasion d’un nouveau deuil, d’une
séparation, de l’accès à la
parentalité…
Cécile
Séjourné
LES COMPLICATIONS
Les facteurs de complication :
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la nature du lien : le lien fraternel teinté d’ambivalence, de passion
et de rivalité
l’âge du défunt : plus le défunt est jeune, plus le sentiment
d’injustice est grand.
Les circonstances de la perte : l’enfant est sensible aux violences
faites au corps (accidents…),au caractère inattendu , au secret. Le
suicide .La MIN.
Les circonstances de vie : relations en construction par essence,
période de crise (9ème mois, opposition des 24 mois, entrée en crèche, à
l’école, adolescence…), lors de de réaménagements de vie
(déménagements, recomposition familiale), deuils répétés…
l’absence de rituels
l’interdit des émotions
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 Le deuil est toujours compliqué chez l’enfant .
Cécile Séjourné
LES COMPLICATIONS
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Les manifestations du chagrin :
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Déni (absence transitoire de manifestation du chagrin)
Troubles du sommeil (peur de s’endormir, du noir, cauchemars...)
Troubles de concentration, de mémorisation
Dépendance anxieuse ( agrippements affectifs, attitude de collage)
Culpabilité intense et auto reproches (mise en échec scolaire, recherche
de punitions par la provocation, accidents à répétition)
Hyper-vigilance, hyperactivité, agressivité, comportement destructeurs
(signes de dépression ou de deuil empêché)
Conduites régressives (énurésie, langage bébé, retour au biberon...)
 On doit s’inquiéter quand ces complications s’enkystent.
Cécile Séjourné
LE DEUIL DANS LA FRATRIE
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Un deuil sous-estimé, voire non reconnu
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Les manifestations du chagrin sont différentes donc peu
repérées
Un deuil minimisé à tort par rapport à celui des
parents
« Moi, on ne m’a jamais demandé comment j’allais » Marie
Fuguain, Michel Lafont, 2012.
Cécile Séjourné
LE DEUIL DANS LA FRATRIE
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Un deuil marqué par une double peine
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Le concept de la mère morte ( cf. A. Green):
« Je suis morte le jour de la mort de Laurette » cf. Marie Fuguain, citant sa
mère.
La fratrie doit faire momentanément le deuil de parents
indisponibles psychiquement.
 La fratrie est souvent face à des parents qui se demandent:
- pourquoi et comment survivre à leur enfant décédé?
- Comment rester parent des enfants survivants?
- Comment redevenir « un bon parent » pour ceux qui
suivent…
-… et comment rester parent de l’enfant mort ?
 La fratrie est souvent face à des parents qui oscillent entre sous
et sur protection parentale. La séparation du couple est
fréquente.
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Cécile Séjourné
LE DEUIL DANS LA FRATRIE
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Un deuil réactivé à chaque moment de la vie
A chaque nouvelle étape de la vie familiale ( premiers
pas, entrée au collège, bac, études secondaires, mariage
etc…),le manque et l’absence de l’enfant ressurgit comme
une ombre.
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Un héritage familial à la fois tronqué et lourd
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Que faire de la place laissée vacante, des objets, du prénom…
Comment s’autoriser à vivre plus longtemps, plus âgé, plus de
choses? (l’importance des dates anniversaires, des âges, des
évènements familiaux…)
Cécile Séjourné
LE DEUIL DANS LA FRATRIE
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Un deuil marqué par des angoisses de mort +++
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L’enfant prend « précocement » conscience de l’universalité de
la mort avec cette mort « injuste » qui va à l’encontre de la
logique des âges.
La mort en pénétrant le monde de l’enfance se rapproche
dangereusement de lui :
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son sentiment d’invincibilité est entamé, sa toute puissance
narguée
sa peur de la contagion est exacerbée
sa croyance dans le pouvoir de protection de ses parents mis à
mal
Cécile Séjourné
LE DEUIL DANS LA FRATRIE
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Un deuil marqué par l’ambivalence et la culpabilité
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Le lien fraternel est teinté d’ambivalence :
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amour/haine; rivalité/ écrasement ; jalousie/ déni;
Idéalisation/rejet ; Identification/différenciation
La rupture du lien est teintée de culpabilité:
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Eprouvé de soulagement ;sentiment d’être le méchant
coupable ; syndrome du survivant et dévalorisation
Cécile Séjourné
LE DEUIL DANS LA FRATRIE
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Un deuil qui provoque un bouleversement identitaire
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Le rang et la place dans la fratrie
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Important dans la construction identitaire. Cf. Adler ( l’aîné,
l’enfant du milieu, le petit dernier)
La perte de la fratrie:
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La solidarité fraternelle
L’étayage dans les moments difficiles
Le support identificatoire
Cécile Séjourné
LE DEUIL DANS LA FRATRIE
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Un deuil qui n’est pas nommé
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Pas de mots pour désigner ce statut d’endeuillé (ni veuf, ni
orphelin)
Difficulté à dire sa place, le nombre de frères et sœurs
Un deuil souvent privé de rituels
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Les enfants ne sont pas toujours associés à l’au-revoir (visites
à l’hôpital, au funérarium) ni aux obsèques.
Comment poursuivre les commémorations sans faire ombrage
à la fratrie survivante?
Cécile Séjourné
« Il faut faire du noir une couleur de
lumière . »
Clémence Boulouque, Mort d’un silence
Cécile Séjourné