Comportement alimentaire du chat

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Comportement alimentaire du chat
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Encyclopédie de la
Nutrition
Clinique Féline
Pascale Pibot
DMV, Responsable des
Éditions Scientifiques,
Communication,
Groupe Royal Canin
Vincent Biourge
Denise Elliott
DMV, PhD,
Dipl. ACVN, Dipl.
ECVCN
Directeur Scientifique
Nutrition-Santé pour
le Centre de Recherche
Royal Canin
BVSc (Hons) PhD,
Dipl. ACVIM,
Dipl. ACVN
Directrice
Scientifique
Royal Canin aux
États-Unis
Ce livre est reproduit sur le site d'IVIS avec l'autorisation de Royal Canin. IVIS remercie Royal Canin pour son soutien.
Debra HORWITZ
DMV, Dipl. ACVB
Yannick SOULARD
Eng
Ariane JUNIENCASTAGNA
Comportement
alimentaire
du chat
Eng
Comportement
1. Facteurs affectant le comportement alimentaire du chat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 441
2. Description du comportement alimentaire du chat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 448
3. Déterminisme et régulation de la consommation alimentaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 454
4. Troubles du comportement alimentaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 458
5. Consommation d’eau chez les chats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 466
Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 469
Questions fréquemment posées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 470
Références . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 472
Informations nutritionnelles Royal Canin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 474
439
Comportement
alimentaire du chat
Debra HORWITZ
DMV, Dipl. ACVB
Debra Horwitz est diplômée du collège vétérinaire de l'Université du Michigan. Après avoir exercé plusieurs années en clientèle généraliste,
elle a peu à peu limité son activité à la pathologie comportementale des animaux de compagnie. Elle est devenue membre de l’American
College of Veterinary Behaviorists en 1996. Debra Horwitz exerce aujourd’hui dans sa clientèle privée de cas référés et consulte également dans le cadre du Veterinary Information Network (VIN). Elle fait régulièrement des conférences en Amérique du Nord ainsi que
dans d'autres pays. Elle est éditeur et auteur de plusieurs livres traitant du comportement des chiens et des chats. Debra Horwitz est également présidente de l’American College of Veterinary Behaviorists (2006-2008).
Yannick SOULARD
Ingénieur en agriculture et ayant obtenu un mastère de gestion de l'innovation en biotechnologie et agro-industrie, Yannick Soulard rejoint
la filiale canadienne de Royal Canin en 1999 en tant que support technique pour l'équipe commerciale. Il prend en suite en charge la formulation des aliments pour l’Amérique du Nord jusqu'en 2001. De retour au Centre de Recherche de Royal Canin (Aimargues, France),
il s’occupe du développement de l'appétence pendant 6 ans. Il est aujourd’hui responsable de l'unité de recherche en Nutrition.
Ariane JUNIEN-CASTAGNA
Diplômée de l'Université de Technologie de Compiègne en 1996 (génie des procédés agro-alimentaires), Ariane intègre Royal Canin en
1997, où elle travaille d'abord en production. Elle rejoint le Centre de Recherche en 1997 où elle travaille d'abord au pilote industriel.
Depuis 2001, elle est en charge des projets de développement liés à l’appétence.
L
e comportement alimentaire comprend de nombreuses
phases : depuis la recherche de nourriture, sa reconnaissance,
son acceptation jusqu’à son ingestion. Il commence donc avec
l’exploration et se termine avec la déglutition. Si le comportement
alimentaire est très bien étudié chez les animaux de rente,
les données relatives aux animaux domestiques sont cependant
souvent empiriques ou anthropomorphiques. La plupart des
études scientifiques disponibles ont été principalement réalisées
par les fabricants d’aliments pour animaux.
Comportement
Les habitudes sociales et le comportement alimentaire des chats
diffèrent beaucoup de ceux des chiens. Les besoins nutritionnels
particuliers et le mode de vie des chats sont à l’origine d’un type
de communication différent à l’intérieur de l’espèce ainsi qu’entre
les chats et leurs propriétaires. Il est plus facile de bien répondre
aux exigences nutritionnelles des chats si l’on connaît leurs
attentes en matière d’environnement alimentaire et si l’on
comprend comment ils communiquent à l’intérieur
d’une structure sociale donnée.
440
1 - Facteurs affectant le comporrtement alimentaire du chat
1 - Facteurs affectant le comportement
alimentaire du chat
Déterminants héréditaires
> Aspects sensoriels
Le goût chez le chat
Chez le chat, le goût est présent 5 jours avant la naissance (Beaver, 1980) et est l’objet d’une maturation. La sensibilité gustative concerne les 4 saveurs de base, avec des degrés de réactivité classés comme
suit (selon la réaction du chat lors de simple application sur la langue de vinaigre, sel, quinine, sucre…):
acide > amer > salé > sucré
(Le chat domestique n’est ni attiré, ni repoussé par le goût sucré et par le pouvoir sucrant des édulcorants).
La connaissance du goût a progressé grâce à l’étude des signaux neurologiques véhiculés par les nerfs
crâniens après stimulation des bourgeons du goût par différentes substances. Trois nerfs crâniens sont
impliqués dans le goût. Les nerfs faciaux, en particulier la corde du tympan (chorda tympani) ont été
particulièrement étudiés. Les recherches sur le goût ont ainsi donné naissance à plusieurs théories. Par
exemple, Boudreau (1973, 1977) suggère qu’il existe chez le chat des systèmes récepteurs spécifiques
pour la saveur acide, pour les acides aminés et pour les nucléotides. Cette théorie n’est pas confirmée
par d’autres auteurs.
Le nombre de bourgeons du goût est estimé à environ 475 chez le chat (Figures 1 et 2): c’est bien
moins que chez le chien (1700) et que chez l’homme (9000). Chez le chien, les cellules gustatives se
renouvellent en moyenne tous les 4 jours. Il n’existe pas de données chez le chat, mais le délai est sans
doute du même ordre. Ces données sont importantes pour anticiper la récupération de l’appétit consécutive à une blessure de l’épithélium buccal.
FIGURE 1 - LOCALISATION DES RÉCEPTEURS DU GOÛT
FIGURE 2 - DIFFÉRENTS TYPES
SUR LA LANGUE DU CHAT
DE RÉCEPTEURS GUSTATIFS
1. Papilles foliées
2. Papilles circumvalées
3. Papilles coniques
4. Papilles filiformes
kératinisées
H+
Na+
Amer
Membrane
cellulaire
Umami
Sucré
(inactif)
K+
Acide
Les récepteurs du goût
ne sont pas répartis
uniformément sur
la langue. Ils sont
principalement
concentrés sur deux petites
protubérances, appelées
“organes foliacés”.
Le sens du goût du chat semble
similaire à celui des autres
mammifères à l’exception d’une
insensibilité à la saveur sucrée,
due au fait qu’un des gènes
encodant pour les récepteurs au
sucre (Tas1r3) est déficient
(pseudogène). La délétion
observée dans la séquence Tas1r2
des chats empêche la synthèse
du récepteur au goût
sucré (Li et coll, 2006).
441
Comportement
Salé
1 - Facteurs affectant le comporrtement alimentaire du chat
Goût amer
Le goût amer est produit par une grande variété de composés (tanins, alcaloïdes, acide malique, quinine, acide phytique, acides aminés [tryptophane, isoleucine, leucine, arginine, phénylalanine], etc.).
Le chat est très sensible à l’amertume (Houpt, 2005). Il la détecte à une plus faible concentration que
le chien. Il peut repérer une substance amère à une dilution quatre cents fois plus forte que celle perçue par les hamsters (Carpenter, 1956; Houpt, 1991). Cette sensibilité lui permet d’éviter de consommer beaucoup de substances toxiques (comme la strychnine), qui sont souvent amères. Les composés
de cette catégorie déclenchent d’ailleurs facilement des aversions.
Goût sucré
Le chat ne semble pas s’intéresser aux aliments sucrés: les récepteurs sont désactivés car le gène correspondant a été remplacé par un pseudogène (Brandt, 2006), lors des processus d’adaptation phylogénique (Li et coll, 2006). Le chat a tendance à rejeter les sucres de synthèse comme la saccharine ou le
cyclamate car ils sont perçus comme étant amers (Bartoshuk et coll, 1975). Le goût sucré de l’antigel
attire les chiens mais pas les chats. Ces derniers peuvent quand même s’intoxiquer mais c’est généralement en nettoyant leurs pattes après avoir marché dans le produit.
Goût acide
Les saveurs acides sont largement utilisées par les fabriquant d’aliments pour chats: de nombreux produits industriels disponibles contiennent en effet de l’acide phosphorique. Une consommation excessive d’aliments acides et riches en phosphore doit cependant être évitée chez les chats dont la fonction
rénale est perturbée.
Goût salé
La perception est plutôt positive chez le chat et peut stimuler la consommation d’aliment ou d’eau. Des
essais anciens ont montré que des récepteurs gustatifs réagissent à l’eau distillée. Ces réponses électrophysiologiques sont en fait le résultat d’un phénomène adaptatif entraînant une neutralité perceptive
du goût à la salive saline.
Acides aminés
Les bourgeons gustatifs connectés au nerf facial sont très sensibles aux acides aminés: un acide aminé
isolé est capable de stimuler les fibres nerveuses du goût. Cette spécialisation semble être liée à une
adaptation au régime carnivore, riche en protéines (Bradshaw et coll, 1996).
FIGURE 3 - CIRCULATION DE L’AIR DANS LES CAVITÉS NASALES DES CHATS
Contrairement au goût,
il n’y a pas de spécialisation
des récepteurs olfactifs.
Aucune donnée publiée ne
prouve qu’une exposition
prolongée à une odeur en
particulier augmente le seuil
de détection chez les chats.
Comportement
1. Nasopharynx
2. Sinus frontal
3. Volutes de l'ethmoïde
4. Cornet nasal dorsal
5. Méat nasal moyen
6. Cornet nasal ventral
7. Méat nasal ventral
8. Narine
La sensibilité orale n’est pas seulement d’ordre gustatif:
la perception somesthésique (via les ligaments dentaires
ou par le nerf lingual) est également importante pour
apprécier la granulométrie et la température de l’aliment. En cas de maladie parodontale ou à la suite de
modifications liées à l’âge, les sensations buccales peuvent être modifiées par des lésions gingivales ou dentaires, affectant ainsi l’appétence d’un aliment.
La perception gustative d’un l’aliment n’est pas simplement due à la détection de ses différentes propriétés
organoleptiques : les messages sensoriels se coordonnent pour créer une image cérébrale qui est comparée à
des schémas de préférences innés ou acquis (Gallouin,
1987). Il n’existe pas de données spécifiques à ce sujet
chez le chat.
Olfaction du chat
L’olfaction est présente chez le chaton nouveau-né et
augmente jusqu’à l’âge de 3 semaines. Le chat est moins
sensible que le chien aux odeurs. Il possède moins de cel-
442
1 - Facteurs affectant le comporrtement alimentaire du chat
lules olfactives (60 à 70 millions par rapport aux 80-220 millions du chien), même si leur densité au
sein de la muqueuse est du même ordre. Certaines études suggèrent que seulement 1% des composés
volatils entrent dans la muqueuse nasale (Figure 3), mais aucune donnée ne concerne directement le
chat.
Le chat est très sélectif et précautionneux. L’olfaction est LE facteur clé qui conditionne l’appétence
d’un aliment. Une anosmie entraîne l’arrêt de la consommation alimentaire et cette anorexie dure aussi
longtemps que le chat ne retrouve pas son odorat (May, 1987). Le renouvellement de la muqueuse
olfactive et le retour de l’appétit demandent 4 à 5 jours.
L’éventail d’odeurs perçues par le chat est large mais certaines sont particulièrement attractives pour
lui:
- origine minérale: eau de javel
- origine végétale: herbe à chat, bois d’olivier, valériane, asperge, menthe, papyrus, clou de girofle,
mimosa
- origine animale: phéromones (bien qu’elles n’aient aucune signification avec la nourriture, mais uniquement une signification territoriale ou sexuelle), foie, viande, viscères, etc.
Une capacité à détecter un composé particulier ne signifie pas que l’odeur associée soit préférée et
aucune donnée n’existe sur les variabilités individuelles. Certaines odeurs inhabituelles ou l’émission
de phéromones entraînent un comportement spécifique, appelé réaction de Flehmen, pendant laquelle
le chat retrousse sa lèvre supérieure et inspire l’air à travers l’organe voméro-nasal (organe de Jacobson) situé dans le palais dur.
Les fabricants d’aliments pour animaux travaillent bien sûr beaucoup sur les composés volatils capables
de séduire à la fois les chats (lorsqu’ils approchent de leur bol) et les propriétaires (lorsqu’ils ouvrent le
sac de croquettes). Mais ce domaine de recherches reste très confidentiel et encore peu publié.
Vision du chat
Lott-Brown et coll. (1973) montrent que les chats sont incapables de différencier des longueurs d’onde
comprises entre 520 et 570 mm. Ils ne peuvent donc reconnaître le blanc du jaune ou du vert. Pour le
chat, il s’agit de la même « tonalité ». En revanche le rouge et le bleu sont clairement distingués. En
conséquence, la couleur des aliments est plus importante pour le propriétaire que pour le chat.
La vision du chat est très panoramique et mieux adaptée à distinguer les mouvements que les différences de ton. Ceci est d’une grande aide pour la prédation.
> Aspects comportementaux
Le réflexe de succion apparaît vers le
50e jour de gestation et disparaît au
cours du 23e jour d’existence.
Expérience prénatale
Certaines préférences sont acquises très tôt au cours de
l’existence, même pendant la gestation. Les fœtus
sont entourés par le liquide amniotique dont certains
composés sont assimilés in utero (Thorne, 1994).
Ceci est permis par un système gustatif fonctionnel
dans les derniers jours de la gestation (Tichy, 1994).
© Yves Lanceau/RC/British Shorthair
Grâce à un réflexe d’enfouissement qui persiste jusqu’au
8e jour après la naissance, les chatons nouveau-nés choisissent
une mamelle pendant les deux premiers jours d’existence. Ceci diminue la compétition dans la portée et stimule le démarrage de la tétée
(Foucault, 1992). A ce stade, les stimuli thermiques (issus de la peau) et
olfactifs (obtenus à partir des sécrétions des glandes de Montgomery
situées autour des mamelles) sont les plus importants.
443
Comportement
Comportement de succion
1 - Facteurs affectant le comporrtement alimentaire du chat
Jusqu’au 10e jour après la naissance, le comportement alimentaire est d’abord basé sur la stimulation
orale fournie par le lait. Progressivement, les stimuli péri-oraux prennent de l’importance dans les mécanismes régulateurs (quel que soit la quantité d’aliment ingéré). L’effet de la distension stomacale apparaît en effet vers l’âge de 3 semaines seulement.
Le temps accordé à la tétée évolue au cours du premier mois selon un schéma relativement constant.
De 10 % du temps pendant les 2 premières semaines, le temps de tétée augmente jusqu’à 60 % à 3
semaines puis revient aux alentours de 10 % à la fin du premier mois (Foucault, 1992). Les chatons
nouveau-nés passent d’ailleurs également du temps à téter sans absorber de liquide.
Les liens des chatons avec la mère autour de la nourriture évoluent aussi beaucoup au cours du temps.
Pendant la première quinzaine, 75 % des succions sont initiées par la mère. Pendant les deux semaines
suivantes, la proportion chute de 50 à 5 %. La mère commence ensuite à éviter ses chatons et leur
accorde seulement 20 % de son temps. Le sevrage qui commence va impliquer des bouleversements
comportementaux et digestifs.
Pendant la lactation, la composition du lait varie avec le régime de la mère. Les chatons peuvent
développer certaines préférences à ce moment de leur vie mais peu d’articles décrivent ce phénomène (Thorne, 1994). La période de sevrage a en revanche été mieux étudiée.
Comportement alimentaire au sevrage
Lorsqu’ils prennent leur premier repas solide, les chatons imitent le comportement de la chatte, même
si cet aliment est inhabituel pour les chats (Wyrwicka et Chase, 2001). Les préférences alimentaires ne
sont donc pas toutes innées et les influences sociales après la naissance jouent un rôle important.
Des chatons au sevrage, dont les mères sont conditionnées à manger des bananes (normalement non
consommées par les chats!), marquent une préférence pour cet aliment même s’ils ont accès à une
nourriture plus conventionnelle, comme des croquettes (Wyrwicka et Long, 1980). Les chatons tendent
à imiter tous les détails du comportement alimentaire de leur mère: ils préfèrent manger dans la même
assiette et à l’endroit exact où elle a mangé. Il existe aussi une corrélation entre le niveau de consommation alimentaire de la mère et celle de ses chatons. Dans l’essai cité ci-dessus, les chatons qui mangent le moins de bananes sont ceux dont la mère en a également mangé le moins. Les préférences alimentaires acquises pendant le sevrage persistent chez les chatons même après le sevrage et la séparation maternelle. Elles restent sensibles jusqu’à l’âge de 4 à 5 mois (Wyrwicka et Long, 1980).
Les chatons sont de même plus enclins à manger un aliment
nouveau en présence de la mère (Bateson, 2000). Un autre
essai illustre l’importance du rôle de la mère dans l’acceptation de la nourriture par les chatons (Wyrwicka et Chase, 2001). Dix-neuf chatons de
quatre portées sont étudiés. Dix chatons
mangent en présence de leur mère,
neuf en son absence. Le temps d’acceptation d’un nouvel aliment est différent
entre les deux groupes:
Le moment où un chaton consomme
son premier repas solide marque
un point de départ important pour
son comportement alimentaire futur,
particulièrement si cela se passe
en présence de la mère.
Comportement
- pour les chatons mangeant en présence de leur
mère, 5 heures suffisent pour qu’ils acceptent de
manger un nouvel aliment.
- en revanche, il faut 4 à 8 jours aux chatons
séparés de leur mère pour consommer le
nouvel aliment.
Le stress de la séparation peut de
toute évidence intervenir
dans l’acceptation d’une
situation nouvelle.
© Yves Lanceau/RC/Mau Égyptien
444
Les chatons nourris par intubation gastrique ont une expérience gustative très limitée en comparaison
de ceux nourris par voie orale. Lorsque des chatons préalablement nourris par sonde stomacale sont
soumis à des exercices comportementaux dont la réussite est récompensée par de la nourriture, ils réussissent moins vite et refusent même de manger la récompense (Stasiak et Zernicki, 2000). L’absence d’expérience alimentaire précoce influence donc le comportement alimentaire futur. Les expériences sensorielles ou digestives initiales sont à l’origine d’une variabilité individuelle des préférences alimentaires. L’apprentissage entraîne un rejet des aliments dangereux ou déplaisants et pousse à rechercher
des aliments intéressants d’un point de vue nutritionnel ou sensoriel.
© Royal Canin
Différences individuelles et raciales
Comparer l’appétence de deux
aliments implique de proposer aux
chats le choix entre deux gamelles.
Il arrive que certains chats choisissent
toujours un côté, peu importe l’aliment
à l’intérieur. Certains chats seraient
donc gauchers et d’autres droitiers !
Le sexe n’a pas d’effet connu sur la perception alimentaire chez le chat, même si le comportement alimentaire est affecté indirectement par la compétition territoriale entre chattes et par la saison de reproduction chez les mâles.
1 - Facteurs affectant le comporrtement alimentaire du chat
Une bonne partie des habitudes alimentaires se mettent donc en place avant l’âge de 6 à 8 semaines.
L’éducation alimentaire doit donc se faire pendant cette période. Pendant les premières semaines qui
suivent l’adoption, il est recommandé de distribuer aux chatons le même aliment que celui qu’ils recevaient à l’élevage pour faciliter l’adaptation à la maison. Quelques apprentissages sont encore possibles
le 3e mois.
La race peut avoir une certaine influence, bien que cela reste difficile à prouver et demeure certainement un terrain de recherche future.
Le comportement alimentaire se modifie beaucoup moins avec l’âge que chez le chien (Peachey et Harper 2002). Il faut attendre un âge avancé pour que l’accumulation des expériences alimentaires et le
déclin des capacités olfactives et gustatives tendent à rendre le chat plus difficile. Des inversions de
préférences peuvent même se manifester.
Facteurs environnementaux
> Environnement social
Le chat est un chasseur solitaire, mais les sujets errants qui vivent en ville tendent à se rassembler dans
des zones d’alimentation et de reproduction. Le concept de territoire existe chez le chat même si
son périmètre varie dans le temps et dans l’espace. Un chevauchement de territoire est possible
entre deux individus mais à des moments différents de la journée. La vie dans une zone donnée est
donc régie par un véritable agenda spatio-temporel de dominance au sein des différents territoires.
Puisque la hiérarchie dépend de la place et du moment, on parle de dominance relative. Des réactions d’agressivité et des bagarres peuvent se produire.
En collectivité, une certaine compétition peut exister. Les bagarres sont
cependant rares si la nourriture est disponible en grandes quantités.
Contrairement au chien (Tableau 1), le chat ne semble pas obéir à des règles
sociales strictes au moment des repas: ils mangent généralement seuls
et ne semblent pas affectés par la présence d’un congénère (Houpt,
Chien
Carnivore strict
Omnivore
12 à 20 repas/jour
1 à 3 repas/jour
Mange le jour comme la nuit
Mange pendant la journée
Consommation régulière
Glouton
Repas sans valeur sociale
Repas avec valeur sociale
Comportement
Chat
© Yves Lanceau/RC/Chat européen
TABLEAU 1 - PRINCIPALES DIFFÉRENCES ENTRE
LES COMPORTEMENTS ALIMENTAIRES CANIN ET FÉLIN
445
1 - Facteurs affectant le comporrtement alimentaire du chat
2005). Certains chats acceptent de partager leur gamelle avec un autre chat, alors que d’autres s’assoient calmement et attendent leur tour. Les femelles en chaleur ont le droit de manger en premier.
Cependant, certaines études suggèrent qu’il existe des rapports hiérarchiques dans les foyers où cohabitent plusieurs chats: les chats mieux placés dans la hiérarchie tendent à écarter les autres de la nourriture (Knowles et coll, 2004). Lorsque des groupes de chats sont nourris ad libitum seulement 20 % des
repas (définis comme tels s’ils sont séparés d’au moins une minute), se font en duo (Mugford, 1977).
Pour les propriétaires de chats vivant à l’extérieur, le repas est un moment privilégié pour les contacts.
Bien souvent, la personne qui nourrit l’animal a des relations sinon meilleures du moins plus faciles
avec lui. Geering (1989) montre que nourrir le chat contribue à renforcer le lien avec lui, mais ce n’est
pas suffisant pour le conserver. D’autres interactions, (caresser, toiletter, jouer, parler) sont nécessaires
au maintien d’un lien nouvellement établi (Bateson et Turner, 1989).
Lorsqu’il s’agit d’un chat restant à l’intérieur, le rythme des repas reflète souvent le style de vie du propriétaire. Deux ou trois repas sont souvent donnés pendant la journée: le matin avant d’aller travailler,
le soir au retour, et le dernier juste avant d’aller se coucher afin de garder le chat silencieux!
L’acceptation de l’aliment est largement conditionnée à l’environnement psychologique, affectif et
matériel du chat (Figure 4). Wolter (1982) mentionne divers facteurs susceptibles de modifier le comportement alimentaire: tension entre les membres d’une famille, changement de luminosité, bruit soudain du matériel HiFi, nouvelle odeur du produit servant à nettoyer la gamelle, arrivée d’étrangers, etc.
La qualité de l'aliment n'est alors pas en cause. Observer le comportement alimentaire d’un chat en
période de convalescence peut également entraîner le refus de l’aliment ou une moins bonne acceptance. Cette situation se produit aussi lorsque le propriétaire vient d’acheter un nouvel aliment (nouvelle marque ou variété) et veut vérifier si l’animal l’accepte bien. En présence d’une anorexie, il est
important d’analyser tous ces facteurs simples et souvent ignorés. Les troubles du comportement alimentaire sont détaillés à la fin de ce chapitre.
> Environnement physique
FIGURE 4 - FACTEURS CONTRIBUANT À L’ACCEPTATION DE L’ALIMENT
Animal
(race, individu…)
Aliment
(saveur, texture…)
Comportement
Environnement
(homme, habitat…)
446
Les chats ont besoin de se sentir en sécurité dans
leur environnement. Les propriétaires doivent
donc leur permettre d’extérioriser leur éthogramme normal: manger, dormir, jouer, et s’assurer que le chat a la possibilité de se cacher et de
se mettre en position de retrait en cas de stress.
Lorsque le mobilier de l'habitation où vit le chat
est intégré et que tout est très bien rangé, le chat
dispose de très peu d'endroits où se cacher en cas
de danger. En conséquence il se retrouve exposé
et vulnérable. Il faut donc veiller à favoriser son
bien-être en aménageant spécialement son environnement. Celui-ci doit être constant et prévisible pour lui, à la fois en terme de structures physiques et d’odeurs; l’accès à des plateformes de
repos en hauteur et à des places sécurisées diminue le risque de voir apparaître des comportements soupapes visant à soulager l’anxiété, tels
que l’excès de toilettage et la surconsommation
alimentaire. Si tous les meubles de la maison sont
intégrés, il est souhaitable de fixer des étagères
pour le chat ou de libérer une partie d’un placard
ou d’un rangement afin de lui offrir un endroit où
il se sent en sécurité (Dehasse et coll, 1993).
Lorsque des études sont réalisées sur les préférences et les réactions alimentaires des chats (Van den Bos
et coll, 2000), deux types de réponses comportementales sont observés, pouvant être reliés aux résultats d’appétence observés. Un chat qui est attiré par l’aliment offert commence souvent par lécher et
renifler le bol, se lécher les babines et se toiletter la face. En revanche, si l’aliment proposé est peu
attractif, le chat lèche et/ou renifle l’aliment et se lèche le nez. L’appétit du chat influence son choix
surtout s’il s’agit d’un aliment peu attractif qui n’est consommé qu’en cas de faim prononcée; à l’inverse, un aliment très appétent est en général goûté même si le chat n’a pas faim.
La néophilie est la préférence pour un
aliment jamais ou non récemment
consommé. Ce comportement est relativement fréquent chez les carnivores,
particulièrement chez les chats et les
chiens. La néophilie permet aux animaux de diversifier leur régime et d’obtenir un meilleur équilibre nutritionnel.
Après avoir mangé, la plupart des chats se toilettent, quelle que soit l’appétence de l’aliment. Ceci est
considéré comme un réflexe neurophysiologique inné car l’alimentation par sonde gastrique entraîne
le même comportement post-prandial, alors que les lèvres et les joues ne sont pas salies.
Les chats préfèrent souvent manger un nouvel aliment plutôt qu’un aliment familier. L’intensité du comportement néophilique dépend de l’appétence relative des aliments proposés et de la durée de l’exposition à l’aliment habituel. Si le nouvel aliment est moins appétent que l’aliment habituel, l’effet dure
peu. Vingt quatre chatons ont reçu le même aliment pendant 16 semaines puis ont eu le choix pendant
plusieurs jours entre cet aliment et un autre d’appétence équivalente. Le premier jour, les chatons ont
systématiquement choisi le nouvel aliment. Passé le deuxième jour, la différence de consommation entre
les deux produits n’était plus significative (Mugford, 1977). L’effet nouveauté dure donc seulement
quelques jours (rarement plus de 5 à 6 jours), après quoi la préférence alimentaire se stabilise.
1 - Facteurs affectant le comporrtement alimentaire du chat
Influence de l’aliment sur
le comportement alimentaire
A la maison, les changements alimentaires réguliers pratiqués par beaucoup de propriétaires entraînent
l’augmentation de la consommation par le chat, celle-ci étant favorisée par le renouvellement et l’alternance des régimes (Rabot, 1994). Ce phénomène est appelé métaphilie (du grec, meta: « transformation ») et correspond à l’effet produit par le régime “cafétéria”. Cette tendance comportementale
incite d’ailleurs certains fabricants à proposer des conditionnements multi-portions contenant plusieurs
variétés.
Il faut garder en mémoire qu’un changement d’aliment peut s’accompagner d’une suralimentation temporaire après introduction du nouveau régime. Dans le premier mois, le chat peut manger jusqu’à 100
kcal/kg. Puis l’effet se dissipe et la consommation se stabilise autour de 60 kcal/kg après deux mois
(Nguyen et coll, 1999). Il est donc important qu’après avoir changé l’alimentation de leur chat, les propriétaires mesurent la quantité de nourriture consommée pour contrôler que l’apport calorique est adéquat.
Un propriétaire peut choisir de ne pas tenir compte de cette tendance naturelle à la néophilie et de
donner toujours le même aliment à son chat. Il est cependant possible qu’il observe alors un phénomène de lassitude, associé à une diminution de l’appétence (même si l’aliment est complet et bien équilibré). Ce comportement rappelle l’état de ‘satiété orale’ constaté chez l’homme (manger trop souvent
du chocolat ou des huîtres peut diminuer leur attrait). D’un autre côté, choisir de trop varier l’alimentation du chat et le nourrir avec un régime omnivore « humanisé » peut faire naître un état de néophobie et conduire au refus de nourriture.
Comportement
Certains événements particuliers peuvent entraîner l’apparition d’une aversion alimentaire acquise visà-vis d’un aliment donné. Ce phénomène est discuté plus loin.
447
2 - Description du comportement alimentaire du chat
2 - Description du comportement
alimentaire du chat
Prédation et chasse
Contrairement au chien domestique, la morphologie du chat domestique n’est pas éloignée de celle de
ses ancêtres sauvages. Cependant, des différences de taille entre leurs proies respectives ont entraîné
l’apparition de certaines différences comportementales: par exemple, les chats domestiques utilisent
moins leurs incisives, les repas sont plus fréquents et ils consomment généralement leurs proies en commençant par la tête, alors que les gros félins mangent les viscères en premier.
> Instinct de chasse ou comportement acquis ?
Le comportement de prédateur est inné: tous les chats savent instinctivement comment chasser, mais
l’apprentissage intervient également. L’approche et la poursuite sont stimulées par les congénères de
portée. Le comportement de chasse est plus susceptible d’être observé chez les chatons ayant une mère
qui chasse. Les chatons apprennent à attraper et tuer les mêmes proies que leur mère (Bateson et Bateson, 2002).
La mère incite normalement à ses chatons à chasser à partir du sevrage selon un programme bien établi:
- 4e semaine: la mère apporte des morceaux de viande aux chatons
- 5e semaine: elle mange des proies mortes devant ses chatons
- 6e ou 7e semaine: elle les laisse manger les proies tuées
- 8e semaine: elle apporte une proie vivante pour que les jeunes chasseurs apprennent à tuer.
Les premières sessions de chasse commencent à 3 mois. A 4 mois, ce sont des chasseurs confirmés. L’absence d’expérience de la prédation ne semble pas affecter les capacités motrices mais révèle souvent
des problèmes dans la sélection des proies. Un chaton doit savoir qu’il peut manger une souris. Si cela
n’est pas acquis avant l’âge de 3 mois, le chat peut rester impuissant face à une proie non reconnue.
Cependant, même les chats qui n’ont pas eu l’occasion de chasser pendant leur jeune âge peuvent
apprendre à devenir des chasseurs efficaces.
Le chat domestique appartient à la
famille des Félins ; Felis catus est un
carnivore strict.
Il a été parfois dit que donner à manger à un chat peut réduire son désir de chasser mais cette observation est controversée. Les chats nourris à la maison passent moins de temps à chasser que ceux qui
ne reçoivent rien, mais tous chassent même si le nombre de proies réellement prises et consommées
est difficile à quantifier (Fitzgerald et Turner, 2000).
Session de chasse
Les sessions de chasse peuvent durer 30 mn, sur des distances allant
de 600 à 1800 m à l’intérieur du territoire du chat. Une variation
évidente existe entre les individus: par exemple, les mâles chassent
plus longtemps et vont plus loin que les femelles.
© J.-P. Lenafant/RC/Chat des forêts norvégiennes
Comportement
Contrairement aux chiens qui chassent en horde, les chats sauvages
sont des chasseurs solitaires et opportunistes. Ils attrapent de petites
proies qu’ils mangent seuls. Des études montrent qu’ils ratent souvent leurs proies: seulement 13 % des proies chassées seraient réellement prises (Kays et DeWan, 2004). Chaque succès représente
environ 3 à 5 essais infructueux (Fitzgerald et Turner, 2000). Un chat
apporte à la maison en moyenne 0,7 proie par semaine (Woods et
coll, 2003).
Dans des conditions naturelles, les chats passent deux tiers de leur
temps de veille à chasser et leur comportement se décompose en
plusieurs séquences:
448
Le chat enterre rarement sa prise en vue d’une consommation ultérieure. Il mange plutôt rapidement
et régurgite ensuite poils et os. Le nettoyage des proies est plutôt sommaire, à moins qu’elles ne soient
volumineuses (pigeons ou jeunes lapins). Le chat casse les os et les mastique avec ses prémolaires volumineuses. Il peut manger une souris entière en moins d’une minute: il commence par la tête et progresse vers la queue (Case, 2003). Ceci découle logiquement de la méthode de mise à mort, pendant
laquelle le cou est rompu. Cette technique est également à relier à un comportement adaptatif, qui
sécurise la capture de la proie et l’ingestion.
© C. Chataignier
Pendant le déroulement de l’action de chasse, les
différentes séquences sont de moins en moins modifiables en fonction de l’expérience du chat et de son
environnement. Les premières étapes (recherche,
approche et suivi) sont flexibles car le félin doit
s’adapter à différentes situations. Les dernières
étapes (attaque et morsure) sont plus stéréotypées
afin d’assurer une capture et une mort efficace, et
donc la survie de l’individu.
2 - Description du comportement alimentaire du chat
- suivre la proie
- l’approcher et la poursuivre
- l’attraper en bondissant (leur corps est à ras du sol
et ils avancent lentement vers la proie, marquant
une pose avant l’attaque)
- tuer par morsure au cou, après un éventuel combat
- le repas a rarement lieu sur le lieu de capture (pour
des raisons de tranquillité).
Les chats errants chassent tous les
2 à 3 jours, alors que les félins
domestiques peuvent chasser tous
les jours.
Leyhausen (1979) (cité par Rabot, 1994) montre que la séquence complète de chasse est régie par différents stimuli qui accroissent progressivement la motivation.
- L’intérêt du chat est d’abord éveillé par des stimuli auditifs (grattements, grincements), qui permettent au chat de localiser précisément la proie. En pratique vétérinaire, le grattage de la table de consultation est d’ailleurs souvent le meilleur moyen d’attirer l’attention de l’animal.
- La visualisation de mouvements rapides entraîne l’approche. Néanmoins un chat expérimenté sait
reconnaître une proie immobile et l’attaquer.
- La capture s’enclenche sur la base d’indices visuels et olfactifs plus précis. Elle est aussi stimulée par
des critères tactiles.
Les études de Leyhausen semblent indiquer que la capture de la proie, sa mise à mort et sa consommation sont des actions indépendantes. La capture et la mise à mort semblent également indépendantes
de la faim. En revanche, si la faim est présente, la séquence de chasse est complète car cette dernière
pousse le chat à la consommation.
Chaque étape induit la suivante, ce qui permet la succession de toutes les séquences par des stimuli différents. La faim ne déclenche pas la recherche de proie mais augmente la probabilité de mise à mort.
La satiété n’inhibe pas le sacrifice.
Comportement
Le chat domestique chasse souvent mais mange rarement sa proie. Le système des phases indépendantes
proposé par Leyhausen explique que les chats qui viennent d’être nourris peuvent manifester toutes les
séquences de chasse sauf l’ingestion. Certaines étapes peuvent être répétées et le propriétaire peut assister à un jeu prédateur cruel, durant lequel la proie est toujours vivante et secouée dans tous les sens.
Le fait de rapporter la proie au propriétaire peut être interprété à tort comme une preuve de lien quasimaternel.
> Les proies les plus fréquentes
Chaque prise représente un petit pourcentage des besoins énergétiques quotidiens du chat (la valeur
calorique d’une souris est estimée à 30 kcal). Il est possible de trouver jusqu’à 12 petites proies dans l’es449
2 - Description du comportement alimentaire du chat
tomac d’un individu errant. Ceci représente un comportement adaptatif en prévention des périodes de
disette. Les chats continentaux chassent essentiellement de jeunes lagomorphes et des rongeurs. Les
oiseaux suivent dans la liste puis viennent les reptiles. Les chats qui vivent sur des îles s’intéressent
principalement aux rats, aux souris et aux oiseaux de mer.
Les chats sont des chasseurs versatiles et généralistes. Ils peuvent facilement varier les types de proie
en fonction de l’évolution écologique. Ils peuvent même se contenter d’une alimentation domestique
en période difficile. Sur certaines îles, la prédation des félins a été incriminée dans de l’extinction de
certaines espèces, par Bateson et Turner (1989). Les études axées sur l’effet de la prédation sur la faune
sauvage sont cependant limitées, et il n’est pas clair si l’extrapolation de ces données à la population
féline globale est juste.
> Comment limiter le comportement de prédateur des chats
domestiques
Il est tentant d’essayer de diminuer le comportement prédateur des chats domestiques, normal mais
souvent angoissant pour le propriétaire. Si 6 chats sur 10 (aux Etats-Unis) et la plupart des chats de
race soient maintenus à l’intérieur sans possibilité de chasser, en Europe beaucoup de chats ont accès
à l’extérieur (7/10) et peuvent ainsi tuer de jeunes rongeurs ou oiseaux. Les propriétaires trouvent souvent ce comportement indésirable surtout lorsqu’il s’applique à des oiseaux chanteurs et/ou lorsque les
proies sont rapportées à la maison.
Le moyen de prévention le plus facile est de garder le chat à l’intérieur ou de choisir un chaton issu
d’une mère qui ne chasse pas (pour obtenir un individu inexpérimenté). Le port d’un collier à cloche
diminue également le niveau de la prédation en faisant tout simplement fuir les proies. Une étude de
Nelson et coll. (2005) s’est attachée à comparer plusieurs types de colliers sur la réduction de la prédation des chats en Angleterre: celle-ci n’est pas significativement différente entre les colliers à une
cloche, deux cloches ou les colliers équipés d’un autre objet sonore.
Le chat est domestiqué depuis presque 6000 ans mais n’a pas perdu son exceptionnelle aptitude à chasser grâce à l’indépendance des séquences de prédation. Les félins peuvent facilement retourner à l’état
sauvage et survivre sans l’intervention de l’homme.
Comportement
TABLEAU 2 - TYPES D’ALIMENTATION DU CHAT
Méthode
Avantages
Inconvénients
Repas séparés
Le propriétaire a le contrôle
sur le moment du repas
et/ou de la quantité de
nourriture quotidienne.
Généralement le chat reçoit
2-3 petits repas à des heures
définies.
- Permet au propriétaire de
suivre la consommation
alimentaire
- Favorise le suivi de la santé
du chat
- Permet à tous les chats
d’accéder à la nourriture
- Renforce le lien avec le
propriétaire
- Certains chats réclament de
la nourriture en dehors des
périodes de repas
- Rythme alimentaire parfois
différent de celui du chat
Alimentation en libre service
La nourriture est disponible
tout le temps.
- Permet au chat de réguler
lui-même sa consommation
- Favorise le comportement
naturel du chat (multiples
petits repas quotidiens)
- Pas de contrôle de la
consommation alimentaire
- Peut entraîner
surconsommation et obésité
- Pas d’interaction avec
le propriétaire
- Permet la consommation
de multiples petits repas
quotidiens
- Renforce le lien avec le
propriétaire
- Peut entraîner
surconsommation en
l’absence de contrôle
- Certains individus ne
mangent pas assez.
Alimentation mixte
Croquettes en libre service,
aliment humide une à deux
fois par jour sous la forme de
repas.
450
Alimentation domestique
Les chats passent 1 à 2% de leur temps de veille à manger.
L’alimentation peut se faire soit d’une manière contrôlée
(sous la forme d’un repas), soit en libre service. Indépendamment du mode d’alimentation choisi, il est utile de respecter un rythme régulier et des rituels alimentaires
(Tableau 2).
> Situation de l’aire d’alimentation
L’organisation territoriale de la vie du chat doit être prise en
considération. Pour lui, chaque endroit est dévolu à une fonction définie (manger, se reposer, jouer, éliminer) et ces fonctions ne se mélangent pas. Vous ne mangeriez pas au milieu
de l’entrée du métro ou dans les toilettes: c’est pareil pour les
chats (Figure 5).
La gamelle doit être petite, pour contrôler la consommation
et permettre de fréquents remplissages. Il est nécessaire de la
nettoyer régulièrement afin d’éviter les odeurs et pour des raisons d’hygiène. Dans les maisons où vivent plusieurs chats,
chacun doit posséder sa propre gamelle. Des interactions agonistiques entre colocataires peuvent en effet empêcher certains d’avoir accès à l’aliment, entraînant perte de poids et
FIGURE 5 - DISTANCE MINIMALE ENTRE LA ZONE DU REPAS,
LA ZONE D’ÉLIMINATION ET LA ZONE DE REPOS
Aire de repos
> Le repas
Lorsque les propriétaires de chats distribuent l’aliment sur un
mode fractionné, ils peuvent soit contrôler la durée du repas,
soit la taille de ce dernier. C’est la technique la mieux adaptée à la distribution d’aliments en boîte, pour respecter la fraîcheur et la sécurité alimentaire. Sinon, l’aliment qui reste
dans la gamelle pendant des heures perd de son appétence et
induit le développement de risques bactériologiques. Pour
prévenir ce problème, les industriels proposent maintenant
des présentations en portions uniques. Puisque les chats mangent de multiples petits repas lorsqu’ils chassent, la plupart ne
se satisfont pas d’un seul repas. Si un propriétaire choisit de
nourrir son chat en limitant le temps d’accès à l’aliment, deux
repas par jour minimum doivent être proposés. Cependant,
une augmentation de la fréquence des repas peut aider à
contrôler la faim et diminuer le comportement de réclamation. Il est étonnant de voir que les chats apprennent vite à
détecter quand ils peuvent recevoir des extras alimentaires..
Ils associent facilement certains événements (coupure publicitaire à la télévision ou bruit des assiettes que l’on range dans
la machine à laver) à une probabilité de récompense.
50 cm
minimum
50 cm
minimum
2 - Description du comportement alimentaire du chat
parfois des problèmes pathologiques. De plus, puisque les
chats ne partagent pas toujours leur espace de manière égale,
les gamelles d’eau et d’aliment doivent être réparties dans
tout l’environnement, en fonction des endroits où les individus passent le plus clair de leur temps. La litière devrait être
placée loin de la gamelle.
Nourriture
Litière
50 cm
minimum
L’aire d’alimentation doit être calme (pas à côté d’une machine à laver)
et à bonne distance de la litière.
Alimentation fractionnée
- Avec une alimentation limitée dans le temps, la nourriture est laissée à disposition pendant un temps
donné, puis enlevée et rien d’autre n’est donné jusqu’au prochain repas. Avec cette méthode, la plupart des chats nécessitent 30 à 60 minutes par repas (Case, 2003).
- Avec une alimentation quantitativement limitée, la ration préconisée est placée dans un bol et, une
fois consommée, aucune autre nourriture n’est distribuée jusqu’au prochain repas. Lorsque le chat est
tout seul, le contrôle de la quantité permet de contrôler le poids tout en le laissant manger plusieurs
repas par jour, ce qui ne peut se concevoir avec une alimentation limitée dans le temps.
La distribution en repas séparés permet au propriétaire de mesurer combien le chat consomme pendant
24 heures. La consommation de nourriture est souvent un bon marqueur de la santé et permet au propriétaire d’évaluer son bien-être. Si plusieurs chats cohabitent, l’alimentation fractionnée permet au
propriétaire de détecter des problèmes de santé ou des tensions sociales entre les individus. Le repas
permet également une interaction entre le propriétaire et l’animal plusieurs fois par jour, renforçant
ainsi leurs liens.
Alimentation en libre-service
Comportement
En cas d’alimentation en libre-service, l’aliment reste disponible en permanence pour que le chat puisse faire plusieurs petits repas répartis sur une période de 24 heures. Suivant les observations, les félins
prennent spontanément entre 8 et 16 petits repas au cours de la journée. Le fait que le chat grignote
de petites quantités de nourriture à de multiples occasions est lié à son évolution vers un modèle d’alimentation opportuniste.
Cette méthode se base sur la capacité du chat à s’auto-réguler. C’est alors la meilleure option lorsque
l’aliment est proposé en croquettes. En revanche, lorsque l’aliment est très appétent, le chat tend à sur451
2 - Description du comportement alimentaire du chat
consommer et tend à devenir obèse. De plus, le libre service ne permet pas au propriétaire d’évaluer la
quantité quotidienne ingérée surtout en présence de plusieurs individus. Une baisse de la consommation entraînant une perte de poids peut ne pas être remarquée pendant quelque temps. Ce type d’alimentation limite également les interactions entre l’animal et son propriétaire.
Certains propriétaires combinent l’alimentation en libre-service (croquettes) et la distribution de
repas séparés (aliments humides). Le lien social est renforcé autour de la distribution de l’aliment, bien
que cet effet soit bien moins important que chez le chien. Le chat est invité à manger l’aliment humide comme un “plus” à la ration normale de croquettes répartie au cours de la journée. Dans certains
cas l’apport énergétique devient largement excessif. Le praticien doit donc garder à l’esprit que certains
chats ont du mal à réguler leur consommation alimentaire lorsqu’ils reçoivent deux types différents de
nourriture: un contrôle strict des quantités distribuées et de la composition nutritionnelle des deux
types d'aliment est vivement recommandé.
> Influence du propriétaire sur le comportement alimentaire du chat
Puisque la plupart des chats domestiques ne chassent pas pour survivre, la faim les pousse à capter l’attention des personnes de l’entourage pour obtenir à manger. Vocalises et frottements sur des objets ou
sur les jambes font partie de ce comportement de sollicitation Souvent, si quelqu’un se dirige vers le
lieu de stockage ou de distribution de l’aliment, le chat court dans cette direction ou évolue entre les
jambes. Ces opportunités d’interaction sont sans doute à l’origine d’une relation de proximité plus
importante entre le chat et la personne qui le nourrit (Geering, 1989).
Les propriétaires interprètent souvent à tort les vocalises et les manifestations de leur chat comme un
comportement visant à réclamer de la nourriture. En répondant de cette manière à la sollicitation de
l’animal, ils mettent en place un puissant processus d’apprentissage. Le chat traduit en effet l’attitude
du propriétaire comme une récompense à ses vocalises et à sa recherche d’attention. Ce type de comportement devient alors plus fréquent et plus marqué. Ce type d’incompréhension est à l’origine d’un
stress pour les propriétaires et ouvre la porte aux problèmes d’obésité avec son cortège de maladies associées. Les propriétaires doivent apprendre que lorsque l’aliment est fourni et consommé en quantité
normale, ils ne doivent pas encourager les comportements interactifs par de la nourriture. Mieux vaut
trouver une activité alternative comme le jeu ou le toilettage.
FIGURE 6 - COMPORTEMENT ALIMENTAIRE DU CHAT
SUR UNE PÉRIODE DE 24 HEURES
Ingéré
55,2 g/chat
(10-100)
Fréquence des repas
9,7 repas
(1-19)
Temps
18’09’’
(4’-34’)
Durée des repas
1’55’’/repas
(36’’-4’07’’)
Taille du repas
6,0 g/repas
(2,8-17,4)
Comportement
Vitesse d’ingestion
4,7 g/minute
(1,8-18)
Le comportement alimentaire des chats vivant en groupe est étudié en utilisant une
balance électronique avec un accès contrôlé par une puce électronique. Ce système rend
possible le suivi en temps réel du profil de consommation de chaque chat : nombre, taille
et durée des repas sont enregistrés (entre parenthèses : moyenne-extrêmes). Les données
sont collectées chez 8 chats domestiques adultes (2 à 3 ans), nourris ad libitum avec le
même aliment sec pendant 17 jours. (Source : Centre de Recherche Royal Canin ;
données internes, 2004)
452
> Observations concernant
le comportement alimentaire
du chat
Beaucoup d’études nutritionnelles ont cherché à identifier les
facteurs qui affectent la quantité de nourriture ingérée par les
chats. La régulation de l’ingestion est un phénomène complexe et toujours mal compris. La fréquence et la taille des
repas représentent deux des paramètres clés du suivi du comportement alimentaire.
Nombre de repas quotidiens
Chaque chat a sa propre façon de répartir ses repas au cours
de la journée. Il lui faut généralement 3 semaines pour établir
un mode de vie stable. Lorsque l’aliment est en libre-service,
il fait de 3 à 20 repas par jour (Kane et coll, 1981; Houpt,
2005), suivis d’autant prises hydriques (Mac Donald et coll,
1984). En élevage, lorsque les chats sont nourris ad libitum
avec des croquettes, la consommation alimentaire est influencée par le nycthémère: la consommation alimentaire pendant
la nuit est souvent inférieure à celle du jour, mais pendant la
nuit, les repas sont plus importants et plus longs (Kane et coll,
1981; Centre de Recherche Royal Canin: données internes,
2004).
La taille du repas augmente si l’appétence de l’aliment
est améliorée (particulièrement le premier repas), ou
lorsque la distribution en rations séparées laisse place
à l’alimentation ad libitum. La durée moyenne d’un
repas est d’environ 2 minutes (Figure 6). La rapidité
de consommation est un critère important pour le propriétaire, mais elle est en réalité plus dictée par la structure physique de l’aliment que par la flaveur. Pour les
croquettes, la vitesse d’ingestion varie de 2 à 4
grammes par minute. Pour un produit humide, de 4 à
8 gr/min.
Les études réalisées au Centre de Recherche de Royal
Canin illustrent comment le nombre de repas, la quantité de nourriture ingérée et la rapidité d’ingestion peuvent significativement varier en fonction de la race,
pour des chats hébergés dans les mêmes conditions
d’environnement et partageant le même passé nutritionnel (Tableau 3). La fréquence des repas est le paramètre qui varie le plus: elle est nettement plus élevée
chez le Bengale. Le Maine Coon a tendance à faire les
plus gros repas et le Persan les plus petits. Chez ce dernier, la durée moyenne du repas est deux fois plus élevée par rapport à la moyenne des autres races étudiées
(3’27’’ contre 1’49”) (Centre de Recherche Royal Canin:
données internes, 2004).
TABLEAU 3 - DIFFÉRENCES DE COMPORTEMENT ALIMENTAIRE
ENTRE LES CHATS DE RACE ET LES CHATS EUROPÉENS
(Centre de Recherche Royal Canin : données internes)
Consommation
globale
Fréquence
des repas
Taille
du repas
Durée
du repas
Bengale
+
+
=
=
Maine Coon
+
+
+
=
Siamois
+
+
=
=
Persan
=
+
-
++
Birman
=
=
=
=
Race
2 - Description du comportement alimentaire du chat
Taille, durée du repas
et rapidité d’ingestion
+ Statistiquement plus élevé chez les chats de race par rapport aux chats européens
- Statistiquement plus faible
= Pas de différence significative (p > 0.05)
Un groupe de 68 chats d’âge et de sexe différents (Européens : 30 ; Persan/Exotic
Shorthair : 8 ; Siamois/Oriental : 8 ; Maine Coon : 9 ; Bengale : 7 ; Birman : 6) sont
suivis pendant 8 jours avec un accès libre à la nourriture pendant 18 heures. Ils font
en moyenne 12,2 repas d’environ 5,3 g. En moyenne, les animaux mangent
59,7 g/chat/jour et passent 23 minutes à manger. Ces résultats masquent de réelles
différences interraciales.
FIGURE 7 - MODES DE PRÉHENSION DES CHATS
Types de préhension
Le mode de préhension de l’aliment peut expliquer la
vitesse de consommation alimentaire chez les chats.
Le chat a une petite bouche et de petites dents: les
canines servent à attraper la proie et les carnassières à
déchirer la chair. La dentition est peu adaptée pour
écraser et mâcher de la nourriture (Case, 2003).
Mode supralingual
Mode sublingual
Mode labial
Des études innovantes conduites par Royal Canin en collaboration avec l’École Nationale Supérieure
des Arts et Métiers (ENSAM) en France montre que les chats ont trois méthodes distinctes pour saisir des croquettes. La méthode la plus fréquente est appelée préhension labiale: le félin prend les croquettes avec les incisives, sans utiliser la langue. La deuxième méthode implique la face dorsale de
la langue pour attraper la nourriture : elle est appelée préhension supralinguale. Avec la troisième
méthode, le chat applique la face ventrale de la langue sur la croquette et la retourne: c’est la préhension sublinguale (Figure 7).
En filmant les chats par dessous lorsqu’ils mangent sur une surface vitrée, Royal Canin a découvert que
certaines races utilisent plus volontiers un type de préhension qu’un autre. Par exemple, les races brachycéphales comme les Persans ont des difficultés à attraper les croquettes avec leurs dents, à cause de
l’anatomie de la face et des mâchoires. Dans 80 % des cas, les Persans utilisent leur langue plutôt que
les dents ou les babines pour attraper une croquette.
Comportement
La mastication est assez sommaire chez le chat. La configuration des articulations de la mâchoire ne
permet que des mouvements verticaux. Un chat casse souvent une croquette en seule fois ou l’avale
entière. C’est souvent le cas chez les individus souffrant de douleurs dentaires, qui évitent de casser les
croquettes entre leurs dents, les avalent directement, quitte à les régurgiter peu de temps après.
453
3 - Déterminisme et régulation de la consommation alimentaire
Un chat nourri avec des aliments humides se sert beaucoup de sa langue comme une cuillère. Sa surface rugueuse attrape facilement les morceaux de pâtée ou les boulettes.
La connaissance de ces paramètres est importante pour le choix d’un type d’aliment adapté à un chat
particulier.
3 - Déterminisme et régulation
de la consommation alimentaire
Stimuli externes : sélection de l’aliment approprié
Les chats sont sensibles à l’odeur, la forme, la texture et l’appétence de leur nourriture (Tableau 4).
> Odeur
L’odeur de l’aliment est un paramètre clé pour les chats: la présence de graisses rances peut stopper la
consommation, indépendamment du goût ou de la valeur nutritionnelle. C’est le critère majeur de la
sélection alimentaire. Lorsque différentes odeurs sont diffusées par séquences autour des gamelles de
croquettes, le nombre des repas augmente et la consommation est plus importante pendant les phases
de diffusion.
Les chats préfèrent les aliments à température ambiante ou proches de la température corporelle (aux
alentours de 40 °C). Le réchauffement facilite en effet la volatilisation des composés aromatiques et
s’approche de la température des proies. En pratique, passer l’aliment de 20 à 40°C peut faire augmenter
la consommation de nourriture de 80 %. La préhension et la mastication entraînent aussi naturellement un réchauffage de l’aliment. Attention donc à la faible appétence que pourrait avoir une barquette tout droit sortie du réfrigérateur!
La perception des odeurs a enfin probablement lieu par voie rétronasale bien qu’aucune étude scientifique n’ait pu en cerner l’importance.
> Forme
TABLEAU 4 - LES ÉTAPES SUCCESSIVES
Comportement
DE LA CONSOMMATION ALIMENTAIRE CHEZ LE CHAT
Étapes
Sens
utilisé
Caractéristiques
de l’aliment
analysées
par le chat
Moyens
d’améliorer
l’appétence
de l’aliment
1 Sélection
Odorat
Odeur
Choix et qualité des
ingrédients. Arômes et
matières grasses en enrobage
2 Préhension
Toucher
Taille, forme,
texture
Technologie de préparation :
broyage, cuisson, séchage
3 Mastication
Goût
Goût
Qualité
des ingrédients
Réactions
physiologiques
Sécurité
alimentaire
Qualité nutritionnelle
des produits finis
4 Digestion
454
La facilité de préhension de l’aliment est importante à considérer. La forme des croquettes détermine les lignes de cassure et leur aptitude à être rapidement dirigées vers les pré-carnassières où elles
sont cassées avant d’être avalées. Le rapport surface/
volume défini par telle ou telle forme est aussi plus
ou moins favorable à la perception de l’odeur.
> Texture
Certaines études suggèrent que les préférences alimentaires peuvent varier entre les chats d’intérieur
et ceux vivant libres en milieu rural (Bradshaw et
coll, 2000). Ces derniers préfèrent la viande crue
alors que les premiers aiment mieux des aliments
plus durs ou plus secs (comme les croquettes). Ces
données reflètent des expériences acquises différentes et/ou de la néophobie vis-à-vis d’un aliment
très nouveau (comme de la viande crue pour les
chats d’intérieur). Les félins habitués à une certaine
texture ou une forme particulière de croquettes peuvent effectivement refuser un nouvel aliment qui
vient perturber leurs habitudes.
3 - Déterminisme et régulation de la consommation alimentaire
Les aliments pour chats se présentent surtout sous deux formes, sèche ou
humide. Les chats apprécient aussi bien la “texture craquante” des croquettes sèches que la forte teneur en eau (75-80%) des aliments en boîtes
mais, contrairement aux chiens, ils délaissent en général les croquettes
réhydratées.
Les aliments secs offrent certains avantages au propriétaire:
• ils sont faciles à conserver
• ils peuvent être distribués en libre service, facilement et sans souci de
gaspillage
• leur consommation peut ralentir le dépôt de la plaque dentaire et du
tartre par effet de brossage mécanique de la mastication (voir chapitre
10). Certains aliments secs sont d’ailleurs aussi formulés spécifiquement
pour favoriser l’hygiène dentaire.
Les aliments humides constituent quelquefois un régime complet. Le plus
souvent, ils sont offerts en guise de compléments. Les ingrédients sont formulés dans une mêlée, additionnée d’eau. L’humidité du produit final
atteint parfois 85 %. Cette forte teneur en eau limite la densité énergétique et encourage la consommation en volume sur le long terme. Beaucoup de chats apprécient ce type d’aliments à cause de leurs
fortes teneurs en eau, en matières grasses et en protéines (Case, 2003). La prise alimentaire est dictée
par la texture du produit.
© Royal Canin
Certains chats marquent une préférence pour des formes données de croquettes, sans doute en fonction de la sensation en bouche et de leur rapport surface/volume (Crane et coll, 2000). Les félins délaissent ainsi souvent les croquettes cassées qui traînent au fond de la gamelle ou que le
propriétaire donne lorsqu’il vide le fond du sac.
Le texturomètre est utilisé pour
mesurer la résistance de la croquette
à la force des dents et des mâchoires du
chat. Des modules interchangeables
imitent la forme et la taille des dents en
fonction de la taille et de l’âge du chat.
- Les produits émincés fins sont consommés rapidement, sans interruption: le chat reste courbé sur la
gamelle et ne relève pas la tête. Les propriétaires peuvent associer ce comportement à une bonne
appétence mais la raison est plus mécanique que sensorielle.
- Les produits en gelée poussent les chats à ingérer de gros morceaux. Ils doivent les mâcher un peu et
lèvent leur tête juste pour avaler. Certains propriétaires pensent que leur chat est moins enclin à manger. D’autres ont le sentiment que le chat apprécie sa nourriture, la goûte tranquillement et les remercie par un regard et un léchage de babines!
Les aliments semi-humides sont le plus souvent proposés comme des récompenses (friandises) plutôt
que comme des aliments complets. Leur texture est intermédiaire entre celle des aliments secs mais et
des aliments en boîtes. Ils n’ont pas besoin d’être réfrigérés et peuvent être stockés longtemps. Certains
conservateurs utilisés peuvent nuire à l’appétence.
Les rations ménagères sont généralement déconseillées pour les chats car il est difficile d’équilibrer
correctement un tel régime.
> Goût et composition de l’aliment
L’appétence de l’aliment est indispensable pour qu’il soit accepté, à la fois par le chat et par le propriétaire. Malgré beaucoup de publications concernant les goûts alimentaires supposés, les préférences
des chats sont plus orientées vers les nutriments que vers les ingrédients. La qualité et la fraîcheur des
composants sont néanmoins importants.
Comportement
De nombreuses techniques ont été développées (hydrolyse enzymatique, fermentation, etc) pour produire des arômes naturels très efficaces qui, appliqués de manière homogène dans l’enrobage des croquettes, permettent d’augmenter significativement leur appétence (Figure 8). Il est difficile de développer plus ce sujet car la confidentialité est la règle chez les experts en appétence et les différents fabricants d’aliments.
455
3 - Déterminisme et régulation de la consommation alimentaire
FIGURE 8 - PRINCIPALES TECHNOLOGIES UTILISÉES
DANS LE DÉVELOPPEMENT DES ARÔMES
1. les hydrolysats sont souvent obtenus à
partir de protéines de volaille chauffées
et acidifiées. Les enzymes sont utilisées
pour décomposer la protéine en
peptides ou autres composés appétents,
plus ou moins volatils.
2. Les réactions de Maillard sont bien connues
et utilisées pour aromatiser de nombreux
produits (café, biscuits, viandes rôties etc),
dés lors que des acides aminés peuvent
réagir avec des sucres.
Protéines animales
ou végétales
Hydrolyse
enzymatique
Sucres
+
Acides
aminés
Chaleur
Brunissement
du produit et
formation
d’arômes
Peptides
Le chat est attiré par les protéines
(surtout les protéines hydrolysées
d’origine animale et parfois végétale comme le soja) ainsi que par les
matières grasses. Certains ingrédients comme les levures et des
acides spécifiques sont également
appréciés des félins.
Plus encore que la sélection des
sources, la protection des matières
grasses contre l’oxydation est très
importante. Les lipides peuvent également influencer l’appétence en
modifiant la texture de l’aliment.
L’effet négatif des acides gras à
chaîne courte ou moyenne (acide
caprylique, huile de noix de coco,
etc.) sur l’appétence est parfois
incriminé (Mac Donald et coll,
1985) mais ce handicap peut être
compensé par une très bonne appétence des autres ingrédients.
L’appétence est trop souvent incriminée dans le développement de l’obésité féline. En réalité, la
concentration énergétique de l’aliment joue un rôle plus important que l’appétence. Un chat stérilisé
et inactif qui a accès à un aliment de forte concentration énergétique prend inévitablement du poids.
La prévention doit se baser sur l’encouragement du chat à bouger et sur le choix d’une alimentation
quantitativement et qualitativement appropriée.
Un chat a du mal à limiter sa consommation alimentaire si les croquettes sont très riches en matières
grasses. Les animaux nourris à volonté avec un aliment contenant 20 % de matières grasses développent plus de réserves adipeuses que lorsque le taux de matières grasses est divisé par deux, indépendamment du statut sexuel: mâle ou femelle, entier ou castré (Nguyen et coll, 1999).
Éléments de régulation de la faim
L’appétence globale de l’aliment est cruciale, mais la faim est une condition sine qua non pour que le
chat mange.
> Principes généraux
La fourniture d’énergie est contrôlée par des processus de régulation homéostatique de la prise alimentaire et des dépenses corporelles, ou des deux. L’approvisionnement en nutriments de l’organisme
doit être constant. En revanche, la prise alimentaire est un comportement discontinu et périodique.
Un système de régulation à moyen et long terme existe donc, qui implique les réserves corporelles (adipeuses essentiellement). Tout est fait pour éviter la perte tissulaire et pondérale.
Comportement
Il existe plusieurs mécanismes de contrôle de la consommation alimentaire:
- mécanismes comportementaux: habitudes et apprentissages comme le conditionnement sensoriel ou
métabolique
- mécanismes nerveux : mastication favorisant la satiété orale, dilatation de l’estomac pour la satiété
physique
- mécanismes métaboliques : théorie glucostatique à court terme, théorie lipostatique à long terme.
La théorie glucostatique chez le chat
Un faible taux de glucose dans les cellules hypothalamiques déclenche la faim (Rowland, 1985).
456
3 - Déterminisme et régulation de la consommation alimentaire
La théorie lipostatique
Le rôle endocrinien des cellules adipeuses est beaucoup étudié depuis ces dernières années. Beaucoup
de cytokines sont identifiées comme agissant sur le métabolisme de l’insuline, l’inflammation etc. Parmi
elles, la leptine, l’hormone de la satiété découverte en 1994, est clairement impliquée dans la régulation de l’appétit (Bouret et coll, 2004) mais les études font défaut chez le chat.
Un signal de satiété ne peut suffire à lui seul à contrôler l’équilibre corporel qui est le résultat d’une
série de points de contrôle séparés, agissant sur une échelle de temps différente. Les animaux contrôlent leur consommation alimentaire à travers 3 types de nutriments majeurs:
- l’eau
- le sodium (tous les autres minéraux sont consommés en relation avec la concentration énergétique)
- les nutriments apportant de l’énergie.
Si la formulation est correcte et si la distribution alimentaire est bien adaptée à l’éthogramme du chat,
la régulation énergétique est alors efficace.
Il a été suggéré que les chats privés de nourriture sont plus sensibles aux propriétés organoleptiques d’un
aliment qu’à sa valeur nutritionnelle. Ceci pourrait représenter un exemple de mécanisme adaptatif
protecteur pour les animaux qui recherchent désespérément de la nourriture: ils deviendraient ainsi
plus discriminants pour éviter les risques d’empoisonnement. Pour les animaux bien nourris, l’appétence et la valeur nutritionnelle de l’aliment sont largement prises en compte dans le processus de régulation.
D’un point de vue pratique, la seule façon de contrôler que la régulation alimentaire est efficace
consiste à vérifier la stabilité du poids corporel. Une grande variabilité inter-individuelle existe. Une
analyse des publications existantes montre des conclusions parfois contradictoires. Il est surtout important de faire une évaluation critique des processus de régulation dans le temps, en distinguant ceux du
début (réaction initiale de l’animal à un aliment donné), dans la durée (modification constante dans
un sens) et à la fin (atteinte d’un nouvel équilibre).
> Régulation énergétique
De nombreuses études ont exploré l’intérêt de la dilution calorique de l’aliment. Elles ont entraîné des
conclusions contradictoires, souvent liées à la méthode utilisée (ajout de cellulose, d’eau, d’argile).
Dans des conditions très stables, le chat semble capable de contrôler sa prise alimentaire en relation
avec la densité calorique (plus précisément en relation avec la densité calorique de la matière sèche).
Ce mécanisme démarre après 2 ou 3 jours et s’installe en 3 ou 4 semaines (Rowland, 1981). La taille
du repas est le paramètre le plus modifié, la fréquence éventuellement. Mais un régime domestique de
type « cafétéria » (comportant des variations quotidiennes de l’appétence des aliments et de leurs taux
POURQUOI CERTAINS CHATS AIMENT-ILS TANT LE POISSON ?
Dans son environnement désertique d’origine, le poisson n’est pas disponible. D’où vient donc cette
attirance des chats pour la chair de poisson – au point que certains rôdent autour des bassins et se
régalent d’un poisson rouge ou d’une jeune carpe koï ?
457
Comportement
En Asie, les habitudes alimentaires sont très centrées sur les matières premières marines largement présentes dans l’alimentation humaine.
© É. Malandain
Le poisson est une source de protéines. Historiquement, les chats ont su se montrer opportunistes et
ont appris à profiter des restes de découpe des poissons qu’ils pouvaient trouver sur les quais lorsque
les bateaux revenaient au port. Au temps de la marine à voile, les voyages étaient longs et il fallait protéger les provisions de céréales des souris et des rats. Les chats étaient donc embarqués pour limiter
cette population de rongeurs indésirables. Une fois leur mission accomplie, les navigateurs leur manifestaient probablement leur gratitude en leur donnant du poisson.
4 - Troubles du comportement alimentaire
de matière sèche) perturbe cette régulation naturelle. Ceci se produit typiquement lorsque le propriétaire alterne entre la distribution d’aliments secs et humides, en utilisant des produits de nombreuses
marques ou variétés.
> Régulation protéique
Chez le chat, contrairement à l’homme ou au chien, les protéines entraînent une augmentation de la
consommation alimentaire (Servet et coll, 2008). Diminuer la quantité de protéines (en les substituant
par des fibres) est une stratégie originale pour limiter la consommation spontanée. Ces observations
peuvent être utiles dans la formulation des aliments pour chats obèses (voir chapitre 1).
Certains acides aminés spécifiques, comme le tryptophane, pourraient affecter le comportement général (agression, excitabilité ou modulation territoriale chez le chien) (Bosch et coll, 2007). Une relation
pourrait ainsi exister entre l’absorption de tryptophane par le cerveau et le niveau glucidique dans l’aliment. Toutefois une modification de ce dernier entraîne souvent une modification concomitante du
taux de protéines, qui peut à son tour également affecter le comportement. L’importance de la composition de l’aliment en nutriments précurseurs de neurotransmetteurs (la choline pour l’acétylcholine, la
tyrosine pour les catécholamines et le tryptophane pour la sérotonine) n’est pas encore éclaircie et
nécessite plus de travaux scientifiques, chez le chat en particulier.
> La satiété physique
Nepeta cataria (herbe à chat)
L’herbe à chat est en général très appréciée
des chats. Il s’agit d’un terme générique qui
concerne plusieurs espèces végétales dans
le commerce.
Chez le félin domestique, il est parfois avancé que les récepteurs de la satiété physique jouent un rôle
plus important que les mécanismes énergétiques pour réguler la prise de nourriture. Moins de 5 jours
après être passé d’une alimentation ad libitum à un repas unique d’une heure, un chat est en fait capable
de couvrir ses besoins énergétiques (Thorne, 1982; Finco et coll, 1986).
La hiérarchie des mécanismes de contrôle est logiquement liée au mode d’action: la satiété physique
agit à court terme et la satiété calorique à moyen terme. Le taux de matière sèche est en fait le pont
qui intervient à la fois dans le remplissage de l’estomac et dans l’approvisionnement en énergie.
Pendant le développement du chaton, la satiété orale est d’abord mise en jeu avant le développement de la satiété gastrique (Hinde, 1975): en d’autres termes, la consommation de lait
est moins importante que les mouvements de tétée pour réguler la tétée.
Chez le chat comme chez l’homme, le sommeil est augmenté après les repas. L’effet se voit 3
heures après l’ingestion. La latence est variable: plus vite il apparaît, plus longtemps il dure.
La médiation est d’origine endocrinienne; elle dépend des apports nutritionnels, du pH du
duodénum et de la vidange gastrique.
4 - Troubles du comportement
alimentaire
Dans l’esprit du propriétaire, le comportement alimentaire est associé à la santé, au bien-être
et au plaisir, particulièrement lorsque l’anthropomorphisme est fortement présent. Ceci est
probablement la raison pour laquelle les clients questionnent régulièrement les praticiens sur
la relation entre l’alimentation et certaines perturbations comportementales.
Troubles qualitatifs
© Olga Struk/Fotolia.com
Comportement
Nous distinguerons ici les troubles qualitatifs (ingestion de plantes, pica et mâchonnement de
laine, fixation sur un seul aliment, aversion acquise) des troubles quantitatifs (hyperorexie et
anorexie).
> Ingestion d’herbes, de plantes et d’herbe à chat
Les chats mangent fréquemment de l’herbe s’ils ont accès à l’extérieur ou bien ingèrent des
plantes d’intérieur. La consommation de végétaux peut être considérée comme un phénomène
458
4 - Troubles du comportement alimentaire
naturel qui facilite le vomissement et donc l’expulsion des boules de poil. Cela devient un trouble du
comportement lorsque certaines addictions surviennent, c’est-à-dire si un chat recherche systématiquement une plante particulière.
L’herbe à chat (Nepeta cataria) modifie souvent le comportement des chats même si 30 à 50 % des individus ne réagissent en fait pas. La réponse semble héréditaire et modifiée à la fois par l’âge et l’expérience (Beaver, 2003). Lorsqu’un chat sensible est exposé à cette plante, il va généralement la sentir,
la mâcher ou la manger. Il peut tenir l’herbe dans ses pattes si elle est fraîche. Les sujets exposés se roulent alors souvent dans la plante. Certains deviennent très excités, sautent et jouent. La séquence s’accompagne de mouvements de tête, du frottement des joues et du menton contre la plante, ainsi que
d’une salivation profuse. Ceci peut être perçu par un propriétaire inexpérimenté comme un comportement de chaleur. L’agitation dure 5 à 15 minutes et les chats semblent ensuite être réfractaires à l’herbe
pendant près d’une heure. C’est une sorte de phase de satiété suite à l’excitation. Le composé actif, ou
du moins le plus puissant, est la népétalactone, un terpénoïde particulièrement attirant pour les
femelles.
La valériane (Valeriana officinalis) produit des effets similaires à ceux de l’herbe à chat. Les individus
exposés se roulent sur les racines, urinent dessus et montrent des signes de réelle excitation. Après avoir
mâché la plante, le chat se roule aussi pendant 10 à15 minutes sur le sol, se frotte aux objets et manifeste un comportement d’œstrus.
L’actinidie (incluant la groseille à maquereau): lorsque l’on présente cette plante au chat, il s’arrête de
manger et peut même stopper toute activité sexuelle. Lorsqu’il en détecte l’odeur, il en recherche l’origine et se roule sur le dos dans un état quasi- extatique.
Le bois d’olivier
La plupart des chats aiment mâcher, lécher et se frotter contre des objets en bois d’olivier. La chair des
olives ne les attire pas, mais plutôt des composés contenus dans les noyaux.
Cette attirance pour les végétaux peut devenir problématique car beaucoup de plantes d’intérieur
contiennent des toxiques susceptibles d’affecter la santé du chat. De plus, la plupart des propriétaires
punissent leur animal quand il consomme des plantes. À terme, une relation de crainte peut d’ailleurs
s’installer entre le chat et son propriétaire. Le traitement consiste à fournir des végétaux consommables
en créant un jardin de plantes à chat (vendu dans beaucoup de magasins pour animaux) sans danger
pour l’animal. Les autres plantes doivent être placées hors de portée: soit en hauteur, soit dans une
autre pièce ou encore à l’extérieur. Dans certains cas, des répulsifs peuvent être préventivement vaporisés sur les végétaux (solutions à base de piment). Le comportement du chat peut aussi être corrigé en
l’aspergeant d’eau (pistolet pour enfants) au moment où il approche des plantes.
> Pica et comportement de mâchonnement de la laine
Pica
Le pica implique l’ingestion volontaire d’objets non alimentaires comme des vêtements, des fils électriques, la laine, le tissu, le carton, le plastique et beaucoup d’autres choses. Certains chats sont d’ailleurs
malheureusement victimes d’occlusion intestinale après avoir avalé ces objets.
Le pica représenterait 5 à 10 % des cas de troubles du comportement chez le chat. Il survient souvent
chez des animaux jeunes, actifs. Dans certains cas, une prédisposition génétique est suspectée mais non
encore confirmée (Beaver, 2003). Les chatons explorent oralement leur environnement jusqu’à l’âge
de 6 semaines: une absorption involontaire d’objets à cette période ne doit alors pas être considérée
comme du pica. Au-delà de cet âge, il faut être vigilant.
Comportement
L’origine du pica reste floue. Certains déficits minéraux ou vitaminiques ont été incriminés dans le
passé, mais l’amélioration considérable de la composition des aliments pour chats rend cette théorie
obsolète. Un parasitisme massif peut parfois expliquer le pica chez les individus vivant dans des fermes
et peu entretenus.
459
4 - Troubles du comportement alimentaire
Des maladies telles que la leucémie féline et l’immunodéficience féline doivent aujourd’hui être recherchées puisqu’elles peuvent entraîner des comportements anormaux. Chez le chien, le pica accompagne
souvent l’insuffisance pancréatique exocrine mais pas chez le chat (De Braekeleer et coll, 2000). Un tel
trouble peut parfois être favorisé par un environnement pauvre en stimuli, par l’éruption des dents ou
des douleurs dentaires, par des objets à l’odeur attractive ou enfin par le besoin d’attirer l’attention.
Ce trouble du comportement alimentaire se manifeste volontiers dans les situations de conflit et/ou
d’anxiété engendrées par des rivalités entre chats, des modifications des interactions sociales avec des
membres de la famille, un déménagement, etc. Avec le temps, le problème comportemental risque de
survenir plus fréquemment, dans des situations plus variées, et d’occasionner des troubles fonctionnels.
Le diagnostic d’un trouble compulsif doit être basé sur l’exclusion de tout autre trouble du comportement.
Mâchonnement de la laine
Ce comportement est considéré comme un trouble compulsif qui doit être distingué du pica sensu stricto (Luescher, 2002). Le mâchonnement de la laine survient quand un chat suce ou mâchonne des vêtements, généralement en laine. Le comportement peut toutefois s’orienter aussi vers d’autres tissus. Certains chatons sucent spontanément leur propre peau ou celle de leurs congénères. Plus tard, cette habitude peut se transférer à d’autres espèces, à des coussins ou aux vêtements du propriétaire. Dans des
conditions naturelles, les chatons peuvent téter leur mère jusqu’à l’âge de 6 mois. Le comportement de
mâchonnement de la laine pourrait ainsi apparaître lors de sevrage trop précoce, entre 6 à 8 semaines
(Houpt, 1982). Cette théorie n’a cependant pas vraiment démontrée. Un hyperattachement avec la
mère et/ou le propriétaire (fréquent chez les races orientales) peut également expliquer une partie du
problème.
© Renner/RC/Siamois
Comportement
Une prédisposition génétique
favorisant le mâchonnement de la
laine est suspectée chez le Siamois et
le Burmese car ces races sont fortement
représentés dans les cas apparaissant
avant l’âge de 8 mois.
460
Traitement
Qu’il s’agisse de pica ou de mâchonnement de la laine, le traitement inclut une combinaison des stratégies suivantes.
- Lorsque cela est possible, mettre tout simplement les objets visés hors de portée du chat peut suffire
(Houpt, 2005).
- Appliquer ou vaporiser un répulsif sur les objets
concernés (ail ou piment, aloès, quinine, parfums
forts); éviter par contre les détergents chlorés qui
attirent les chats.
- Essayer de rediriger l’animal vers d’autres objets, par
exemple vers différents types de distributeurs de croquettes.
- Proposer des activités alternatives au chat: possibilité de sortir se promener ou chasser.
- Rendre l’environnement plus prévisible et moins
anxiogène.
- Restructurer la relation avec le propriétaire, en
décourageant le syndrome d’hyper-attachement :
imposer des séparations régulières et de durée croissante avec le propriétaire, et ne permettre les
contacts physiques avec le chat que lorsque le propriétaire les initie (il doit ignorer les sollicitations de
son compagnon). L’observance de cette méthode est
difficile à obtenir mais elle est efficace.
- Dans certains cas, peut être mis en place un traitement psychotrope à base d’inhibiteurs sélectifs de la
recapture de la sérotonine (SSRI) comme la fluoxétine, ou bien un antidépresseur tricyclique (TCA)
comme la clomipramine (Luescher, 2002).
La néophobie constitue le contraire de la néophilie: elle correspond au rejet d’un aliment nouveau.
Ayant pour conséquence la “fixation des habitudes alimentaires”, la néophobie est souvent relatée par
les propriétaires de certains chats. Ce comportement fait partie d’une stratégie de sélection alimentaire.
Manger des aliments inconnus peut être risqué. Malgré tout, les carnivores sauvages montrent une tendance plus néophilique que néophobique (Thorne, 1982). Dans les conditions domestiques, la néophobie apparaît lorsque les repas sont servis dans des conditions inhabituelles (Thorne, 1982) ou si l’animal est stressé (Bradshaw, 1991).
Il arrive qu’un chat n’accepte de manger qu’un seul type d’aliment et rejette tous les autres. Ce comportement est peu probable si, pendant son jeune âge, il a consommé des aliments complets et équilibrés, de saveurs et de textures variées. La volonté d’essayer de nouveaux aliments et les préférences alimentaires peuvent ainsi être influencées par la mère et les conditions de sevrage: les chatons nourris
depuis le sevrage avec le même aliment à base de céréales le préfèrent à des boîtes de thon pourtant
classiquement considérées comme plus appétentes (Wyrwicka et Long, 1980). La néophobie et la non
reconnaissance du caractère comestible d’un aliment (Bradshaw et coll, 2000) existent à des degrés
divers. Plus le régime est stable, plus la néophobie est persistante.
TROIS TECHNIQUES POUR
TRAITER LA NÉOPHOBIE
Ces suggestions sont efficaces chez certains chats.
1. Continuer à proposer le nouvel aliment tous les jours pendant au moins
trois jours (produit frais à chaque
fois), même si le chat refuse au début.
2. Placer un morceau du nouvel aliment
dans la gueule du chat, pour qu’il
puisse le goûter.
3. S’il s’agit d’un produit humide, en
étaler un peu sur les pattes avant du
chat. Il aura tendance à se lécher et
pourra se familiariser avec l’aliment.
4 - Troubles du comportement alimentaire
> Fixation des habitudes alimentaires et néophobie
La modification du régime alimentaire d’un chat est parfois imposée par des raisons médicales. L’animal l’acceptera plus facilement si la texture et la présentation de l’aliment prescrit ressemblent à celles
de l’aliment habituel. La transition alimentaire doit se faire sur une semaine, en diminuant progressivement la proportion de l’aliment habituel dans le mélange des deux. Dans certains cas, proposer le
nouvel aliment à côté de l’ancien peut aussi faciliter le processus. Il est quelquefois nécessaire de substituer un aliment humide par un aliment sec ou inversement. Ceci est plus difficile car beaucoup de
chats ont des préférences marquées pour certaines formes et/ou textures alimentaires. Lorsque c’est possible, le réchauffage de l’aliment permet d’en rehausser les arômes en vue d’augmenter l’appétence.
Il faut généralement quelques jours pour surmonter une néophobie et que l’animal accepte de consommer le nouvel aliment (Cheney et Miller, 1997). Le sujet doit d’abord s’habituer à l’odeur et au goût.
Dans une étude chez le chat, Bradshaw (1986) montre que la néophobie disparaît après le 3e jour de
présentation d’un l’aliment à l’agneau. Elle réapparaît cependant trois mois après si les félins n’ont pas
régulièrement été exposés au nouvel aliment. Il est possible de lutter contre la néophobie en utilisant
de l’eau aromatisée avec le nouvel aliment. Le rejet est alors beaucoup moins fréquent que lorsque l’aliment est présenté seul.
Le passage à un nouvel aliment pendant des circonstances stressantes pour le chat (douleur, maladie,
éloignement du propriétaire, hospitalisation, etc.) augmente le risque de développement d’une néophobie (par un processus d’aversion acquise). Il est donc recommandé de toujours pratiquer une transition alimentaire dans un environnement sécurisant et gratifiant pour l’individu.
> Aversions acquises
L’aversion est une stratégie utilisée par les animaux pour éviter les aliments qui leur sont inadaptés.
C’est une forme de conditionnement négatif. Si l’odeur de l’aliment est associée à un stress, à une expérience déplaisante (hospitalisation, administration forcée ou cachée d’un médicament) ou à problème
digestif (intoxication, allergie), le produit est ensuite évité: ce phénomène s’appelle l’aversion (Cheney et Miller, 1997).
Comportement
Chez les chats, ce phénomène se met très vite en place. Un seul repas associé à une sensation négative
entraîne le refus de s’alimenter. Cette réaction peut persister pendant 40 jours (Bradshaw et coll, 1996)
voire davantage (Mugford, 1977). La seule odeur d’un aliment associé à des troubles digestifs peut
suffire. Les chats peuvent même refuser leur aliment habituel s’il est servi en présence de l’odeur d’un
autre produit pour lequel ils ont déjà développé une aversion (Mugford, 1977). En pratique, il vaut
donc mieux préparer les repas des animaux hospitalisés hors de leur présence car les odeurs qui circulent peuvent favoriser les réactions d’aversion.
461
4 - Troubles du comportement alimentaire
TABLEAU 5 - CRÉER DE BONNES HABITUDES
ALIMENTAIRES CHEZ LE PROPRIÉTAIRE ET CHEZ LE CHAT
1. Choisir un aliment approprié au stade de vie (chatons, chats adultes, chats
âgés), à l’activité physique et à l’environnement du chat
2. Proposer l’aliment dans une gamelle appropriée, dans un lieu sûr et calme
a. Si plusieurs chats sont présents, chacun doit avoir sa gamelle
b. Si des conflits sociaux existent entre certains chats, ceux-ci doivent être
nourris à des endroits différents
3. Calculer la quantité appropriée pour satisfaire les besoins nutritionnels
de chaque chat
4. Respecter l’horaire des repas
5. Éviter de répondre aux sollicitations excessives du chat si les besoins
nutritionnels sont couverts
6. Remplacer la distribution d’extras par le jeu, le toilettage
ou de l’attention
TABLEAU 6 - DIFFÉRENTES CAUSES DE POLYPHAGIE
D’après : Masson, 2004
Transitoire
Réactionnelle
Physiologique
Gestation
Lactation
Froid
Exercice
soutenu
Persistante
Induite
Prise de poids
Perte de poids
Psychologique
Médicaments
orexigènes
Dysrégulation
Métabolique
Forte appétence
de l’aliment
Acétate de
mégestrol
Réaction
du propriétaire
aux sollicitations du chat
Glucocorticoïdes
Lésions hypothalamiques
(exceptionnelles)
Diabète
Hyperthyroïdie
Malassimilation
Anticonvulsivants
Troubles quantitatifs
> Polyphagie
Il est crucial de se rappeler que nourrir est un acte gratifiant pour
le propriétaire. C’est le moment de la journée pendant lequel il
capte l’attention de son chat et le regarde. Mais le maître doit
aussi comprendre que le comportement alimentaire de son compagnon est différent de celui des hommes. Le chat aime les
contacts et apprécie la cuisine comme un lieu où il peut interagir socialement avec son propriétaire. Ces manifestations
sociales sont généralement interprétées par le possesseur comme
une demande de nourriture et non simplement comme une
recherche d’attention. Il fournit alors à l’animal trop de nourriture que celui-ci consomme volontiers. La plupart des chats
deviennent obèses car ils reçoivent une alimentation très appétente, riche en énergie, et dans une quantité qui dépasse leurs
besoins métaboliques. La prévention de l’obésité passe par la
mise en place de bonnes habitudes de rationnement
(Tableau 5).
Il est important de se rappeler que la castration est responsable
d’une diminution des dépenses énergétiques. L’équilibre énergétique est donc généralement perturbé après l’intervention et il
convient de modérer en conséquence les apports (de 15 à 20 %).
Causes pathologiques et médicales
Si le chat consomme une quantité excessive de nourriture sans
prendre de poids, il souffre probablement d’un problème métabolique (hyperthyroïdie, insuffisance pancréatique exocrine,
diabète sucré) ou d’un parasitisme massif, voire plus rarement
d’une tumeur cérébrale. Un bilan médical complet doit donc
être réalisé.
Certains traitements médicamenteux favorisent également la
polyphagie: le diazépam, l’acétate de mégestrol et les glucocorticoïdes (Tableau 6).
“Syndrome d’hypersensibilité/hyperactivité (HSHA)”
Dans ce syndrome, une consommation alimentaire excessive est due à un déficit d’auto-contrôle de la
part du chat. Les chatons griffent, mordent, courent et jouent constamment. Les propriétaires sont
impressionnés par la quantité de nourriture ingérée sans que leur jeune animal grossisse. Certains individus avalent même la nourriture très rapidement et la régurgitent ensuite. L’origine de ce syndrome se
situe souvent à un stade très précoce, vers la 5e-6e semaine de vie. Un syndrome HSHA peut s’installer chez un chaton abandonné et recueilli très tôt, qui n’a pas été suffisamment manipulé et n’a pas
bénéficié d’une bonne alimentation lors du démarrage (Beata, 2007).
Problèmes sociaux
La polyphagie peut traduire l’anxiété d’un chat qui vit dans un environnement surpeuplé où les relations sociales entre congénères sont conflictuelles et qui ne peut s’isoler pour s’alimenter. Certains chatons issus de portées nombreuses, où il existait une forte compétition pour accéder à la nourriture, gardent quelquefois l’habitude de manger beaucoup même s’ils vivent seuls ensuite.
Comportement
Si la polyphagie est due à des problèmes sociaux entre chats dans la maison, une modification de l’environnement s’impose. Les gamelles de nourriture et d’eau doivent être réparties dans les zones de la maison fréquentées par les animaux. Certains individus, plus agiles que d’autres, bénéficieront de l’apport
de nourriture dans des écuelles situées en hauteur pour leur permettre de s’isoler. Si un chat ingère
462
Anxiété
Sollicitation excessive de nourriture
Le comportement d’un chat qui quémande en permanence de la nourriture peut devenir très pénible
pour le propriétaire. Ceci est particulièrement difficile à gérer si le félin ne peut pas sortir ou si la nourriture doit être proposée sous la forme de repas ou de quantités quotidiennes fixées pour prévenir l’obésité. Pour capter l’attention de son maître, un chat utilisera différents moyens: il vocalise, il saute et
escalade les meubles, il court, et il peut même extérioriser des comportements destructeurs ou agressifs,
particulièrement lorsque le rythme précis des repas crée une certaine frustration. Ces manifestations
surviennent souvent pendant la nuit et réveillent les propriétaires qui finissent par donner à manger
pour avoir la paix. Lorsque le maître cède, son répit est de courte durée puisque son attitude crée un
renforcement positif chez le chat qui ne fait qu’exacerber les comportements indésirables.
© D. Horwitz
Plus généralement, la boulimie peut être considérée comme
une activité de substitution chez un sujet anxieux. Le chat
cherche de la nourriture en permanence. Dans ce cas, les
causes individuelles de l’anxiété doivent être prises en
compte (changement de rythme de vie ou d’organisation
territoriale, etc). Les traitements dépassent le cadre de ce
chapitre (Horwitz, et coll, 2002).
4 - Troubles du comportement alimentaire
constamment plus que sa ration, il faut définir des moments
dédiés aux repas pendant lesquels on prévoit de séparer les
congénères à afin de permettre à chacun de manger la quantité prévue.
Figure 9 - Exemples de
distributeurs de croquettes
Il faut expliquer aux possesseurs le moyen de prévenir cette dérive. Ils doivent d’abord comprendre que
les vocalises (même celles qui ont lieu dans la zone de préparation des repas) ne sont pas forcément des
demandes de nourriture. Dans certains cas, elles signifient juste que le chat a envie de jouer ou d’être
caressé. Si le propriétaire remplit la gamelle dès que l’animal se frotte contre ses jambes, il l’incite à
prendre quelques croquettes et faire un court repas. Ceci favorise le grignotage qui peut à la longue
favoriser l’obésité. Ce comportement peut ensuite devenir un rituel, selon le même processus de renforcement que celui détaillé dans le paragraphe précédent.
Nourrir le chat selon un protocole défini permet au propriétaire de contrôler la prise alimentaire. La
ration journalière adéquate doit être calculée. Dans certains cas, fournir des croquettes via un jouet distributeur (Figure 9) diminue le rythme de consommation, favorise la satiété et aide ainsi à diminuer
le comportement de sollicitation.
Figure 10 - Les chats doivent
être stimulés par des nouveaux jeux
© Chataignier
Globalement, deux méthodes principales
sont employées pour stopper les comportements de sollicitation excessive:
1. Processus d’extinction: ignorer le chat
et arrêter de le nourrir à la demande.
Lorsque le propriétaire met cela en pratique, l’animal intensifie généralement ses
463
Comportement
Des sessions ludiques quotidiennes limitent le risque d’obésité, même si les chats
peuvent se lasser et faire baisser l’intensité
du jeu au bout de quelques minutes. La
présentation d’un nouveau jouet peut à
nouveau stimuler l’animal à jouer (Hall et
coll, 2002) (Figure 10). L’exercice peut
également être encouragé en dispersant
plusieurs gamelles dans l’habitation, obligeant ainsi le chat à marcher pour manger.
4 - Troubles du comportement alimentaire
demandes pendant quelques jours, puis cesse progressivement. Cette phase d’intensification est difficile
à vivre pour le maître qui doit anticiper cette période pour rester ferme. Pour aider à surmonter cette
étape d’intensification, il est possible de confiner le chat dans un endroit où il ne sera pas entendu ou
bien inhiber son comportement grâce à un stimulus auditif qui le décourage de continuer.
2. Alimentation indépendante du propriétaire : des distributeurs électroniques peuvent être programmés pour proposer l’aliment à une heure précise de la journée et le chat apprend alors, jour après jour,
à attendre ce moment.
Ce sont les habitudes de l’animal et du propriétaire qui doivent changer pour arrêter le processus. Le
propriétaire doit profiter des différentes situations quotidiennes pour orienter son chat vers d’autres activités que l’alimentation, que ce soit des jeux, des caresses ou pourquoi pas des promenades.
> Chats difficiles
Beaucoup de possesseurs se plaignent que leur félin est difficile et mange peu. Les problèmes pathologiques à l’origine de la baisse d’appétit ne seront pas envisagés dans ce chapitre. Seuls les problèmes
comportementaux sont discutés, même si les chats dont l’appétit est diminué doivent subir un examen
médical et dentaire complets.
Dans certains cas, un individu peut refuser de s’alimenter de temps en temps simplement parce qu’il
est trop nourri, qu’il n’a pas faim et/ou qu’il s’autorégule. Beaucoup de nouveaux propriétaires ne savent
pas que le grignotage est un comportement naturel pour le chat. D’autres sujets deviennent difficiles à
la suite de changements alimentaires trop fréquents: ils ont appris qu’attendre sans manger conduit à
obtenir un autre aliment, peut-être plus apprécié. Il est important de prendre le temps d’expliquer aux
propriétaires que trop de changements ou de friandises peuvent être néfastes à leur chat.
Le poids d’un chat difficile doit être
mesuré. S’il est obèse et si aucune
maladie n’est suspectée, il est probable
que l’animal obtient de la nourriture
ailleurs (peut-être d’un voisin).
La première étape de vérification consiste à évaluer la quantité d’aliment fournie quotidiennement et
la ration réellement consommée. Ceci doit inclure les friandises et les restes de repas des propriétaires
donnés à l’animal. Ce dernier doit être pesé: il n’y a pas lieu de s’inquiéter pour les individus qui maintiennent leur poids normal au cours des semaines. L’indice de condition corporelle doit également être
évalué. Il est fréquent qu’un chat obèse soit également difficile: il s’agit alors plus d’un problème comportemental que d’un problème nutritionnel.
Les aliments à niveau élevé de matières grasses permettent de fournir plus de calories dans un volume
limité. Il faut éviter de trop observer le chat pendant
ses repas car cela l’encourage à continuer de rechigner à manger si celui lui permet d’attirer l’attention
de son propriétaire. Un suivi régulier du poids de
l’animal et des discussions avec son maître à propos
des progrès réalisés doivent être planifiés pour faciliter l’observance du programme.
© Royal Canin
Comportement
Une fois que les problèmes médicaux et dentaires
sont identifiés et traités le cas échéant, les stratégies
thérapeutiques comportementales peuvent être
appliquées. La quantité adéquate d’aliment à fournir
doit être calculée en fonction des besoins caloriques
quotidiens du chat. La ration idéale est souvent inférieure à ce que le propriétaire donne habituellement
et cette simple réévaluation peut aider à clarifier la
situation. Pour beaucoup d’individus, l’installation
d’une routine alimentaire est utile. La nourriture
doit être fournie à heure fixe dans un endroit calme
et chaque chat doit avoir sa propre gamelle. Il faut
limiter les friandises pour stimuler l’animal à manger son repas.
464
4 - Troubles du comportement alimentaire
> Anorexie
L’anorexie est une diminution de l’appétit. Elle est associée à de nombreuses maladies, traumatismes et
perturbations psychologiques. Lors d’anorexie complète, le chat ne mange pas du tout (on parle d’aphagie). Lors d’anorexie partielle, il mange un peu mais pas assez pour satisfaire ses besoins énergétiques.
Si l’anorexie constitue souvent le motif de consultation vétérinaire, elle résulte d’un trouble physique
ou comportemental. Elle peut être ainsi due à:
- un syndrome fiévreux ou au développement d’une tumeur (l’anorexie apparaît bien avant la destruction tissulaire et serait le résultat de la production de métabolites tumoraux)
- une maladie parodontale (douloureuse), des traumatismes de la face ou des mâchoires (entraînant une
impossibilité de manger)
- une baisse de l’olfaction (coryza): l’anorexie dure aussi longtemps que la muqueuse olfactive n’est pas
restaurée (le retour à la normale dure 4 ou 5 jours après la disparition de l’agent pathogène)
- un stress psychologique (dépression en réaction à l’absence du propriétaire, perte d’un compagnon
proche) ou physique (manipulations trop fréquentes) (Beaver, 2003): l’anorexie s’accompagne alors
d’un comportement de fuite, de souillures dans la maison, d’une inhibition du jeu et de l’exploration
- l’anxiété créée par un stress social (relations agonistes entre les chats, changements de rythme de vie,
nouveaux animaux ou nouvelles personnes dans la maison)
- l’anxiété développée à la suite d’un événement marquant (voyage en voiture ou en avion, séjour en
chenil, déménagement ou hospitalisation). Elle peut entraîner une aversion acquise associée à l’aliment donné à ce moment là. Elle peut aussi ne durer que quelques jours.
Les chats particulièrement anxieux peuvent se cacher et refuser de venir manger: l’anorexie est alors
simplement due au non-accès à la gamelle. Dans ce cas, il suffit généralement de rendre l’accès à l’eau
et à la nourriture aisé, si possible à proximité de l’endroit où ils se cachent. Ils ont l’habitude de compenser leur période d’anorexie par un énorme repas. Il est contre productif de les forcer à sortir de leur
cachette car cela peut renforcer l’anxiété et la perte d’appétit.
Dans les maisons où il y a plusieurs chats, une anorexie partielle peut se mettre en place si la situation
sociale crée de l’anxiété, du stress et des conflits. Si les gamelles de nourriture et d’eau ne sont pas réparties dans l’environnement, certains individus ne peuvent y accéder que furtivement, tout en risquant
d’être attaqués par les autres congénères présents sur leur territoire. Les propriétaires doivent être informés de la possibilité d’interactions agressives entre les chats même si elles ne sont pas évidentes à détecter. Dans de nombreux cas, les relations conflictuelles ne s’extériorisent pas par des manifestations classiques (crachements, grognements, poursuites et bagarres) mais seulement par la fixité du regard et le
blocage de l’accès aux ressources (Tableau 7).
Lorsque l’anorexie devient sévère, une intervention
médicale est souvent requise. Dans les stades précoces
TABLEAU 7 - STRESS SOCIAL CHEZ LE CHAT DOMESTIQUE
ET SES CONSÉQUENCES COMPORTEMENTALES
Problème
Conséquences
Solutions
Surpopulation féline
Le stress social entraîne
des problèmes d’alimentation
ou d’accès à la gamelle
Une gamelle par chat
et dans des lieux différents
Pas assez d’espace
pour tous les chats
Interactions agressives
et/ou bagarre possible
Créer des stations supplémentaires
en hauteur
Agressivité
entre chats
Poursuites, blessures, bagarres,
perte de poids secondaire à
un problème d’accès à la
nourriture ou d’anxiété
Créer des territoires séparés pour les
chats, peut-être avec des barrières.
Plusieurs points d’alimentation
répartis sur le territoire
Souillures dans la
maison
Détresse du propriétaire,
abandon du chat
Plus de litières dans de multiples
endroits (hygiène ?)
465
Comportement
Un chat aphagique pendant plus de 4 à 5 jours doit
bénéficier d’une intervention précoce. Proposer des
repas dans des endroits calmes et sombres peut aider
certains individus. L’usage de diffuseurs de phéromones
aide à calmer certains sujets et augmente la consommation de nourriture à la maison, à la chatterie ou à la
clinique. Griffith et coll (2000) montrent que les chats
exposés aux phéromones montrent un intérêt accru
pour la nourriture et le toilettage, qu’ils soient en
bonne santé ou malades. Dans la seconde phase de
cette étude, les mêmes sujets exposés aux phéromones
et à un chat porteur de ces substances consomment
significativement plus d’aliment par 24 heures que les
chats exposés seulement aux phéromones. Fournir des
endroits sécurisants, aménager des cachettes dans la
cage et utiliser des phéromones peut donc aider à stimuler l’appétit des félins hospitalisés ou en pension.
5 - Consommation d’eau chez les chats
certains individus répondent aux benzodiazépines qui stimulent l’appétit. Le diazépam cependant n’a
qu’un effet transitoire (3 ou 4 jours) et présente un risque potentiel sérieux d’hépatotoxicité aiguë. La
miansérine possède un effet orexigène rapide, mais conduit à une certaine désinhibition. La nourriture
doit être proposée peu après son administration. La cyproheptadine est également utilisée dans certains
cas pour stimuler l’appétit. Les progestagènes et stéroïdes anabolisants ont été utilisés dans le passé mais
leurs effets secondaires rendent désormais leur utilisation déconseillée. Si l’anorexie dure trop longtemps, une sonde nasogastrique doit être mise en place pour permettre une alimentation assistée jusqu’à ce que le chat se remette à manger seul. L’alimentation assistée a cependant un inconvénient: la
digestion et l’absorption sont incomplètes comparées à l’alimentation naturelle car la prise orale de
nourriture stimule la phase céphalique de la digestion, potentiellement responsable de la moitié de la
production gastrique acide.
Pour résumer les choses pratiquement, voici la liste des actions simples pouvant aider à résoudre un
problème d’anorexie par le propriétaire lui-même (Rabot, 1994):
- faire attention à chaque cause d’inconfort pour le chat (gamelle sale, placée dans un endroit bruyant,
odeur forte de litière, lieu d’alimentation trop fréquenté, courants d’air, etc.)
- tiédir éventuellement l’aliment à 38-40 °C (au lieu de le transférer directement du réfrigérateur à la
gamelle)
- placer la gamelle dans un endroit calme (en observant le programme d’activité du chat et en tenant
compte de ses endroits préférés) ou bien dans un lieu séparé d’un autre chat (pour éviter la rivalité)
à des moments précis
- proposer un aliment nouveau et très appétent (mais l’effet ne dure que 2 ou 3 jours), soit à côté de
l’aliment habituel, soit sur plusieurs jours en augmentant les proportions dans la ration quotidienne
- assister au repas des individus fortement dépendants ou mettre de la nourriture sur les doigts et les
faire lécher au chat (intéressant lors dans les cas de dépression réactionnelle surtout mais ce procédé
risque de conduire à la ritualisation)
- s’assurer enfin du renouvellement des aliments humides (pour éviter la dégradation oxydative et bactériologique).
Il faut se rappeler que l’efficacité de ces recommandations peut varier énormément entre les chats et
les situations. Les félins se laissent rarement abuser et sont souvent têtus.
5 - Consommation d’eau chez les chats
Une maison où vivent de nombreux
chats doit offrir plusieurs points d’eau et
d’alimentation pour que tous les chats y aient
accès facilement. Dans beaucoup de cas,
ceci permet à un sujet “anorexique” de
recommencer à manger normalement.
Peut-être à cause de leur évolution, les chats ont tendance à boire très peu. Felis lybica, l’ancêtre du
chat européen, vivait dans le désert et pouvait concentrer son urine pour éviter les pertes d’eau. Le chat
d’aujourd’hui a gardé cette capacité, mais cette dernière accroît le risque de formation de calculs. Un
individu peut ne pas manger pendant plusieurs semaines mais quelques jours de privation d’eau suffisent pour mettre sa vie en danger.
© Y. Lanceau/Royal Canin - Maine Coon
Comportement
Les animaux ont trois sources disponibles pour satisfaire leurs
besoins en eau:
- l’eau de boisson
- l’eau contenue dans la nourriture
- l’eau synthétisée par le métabolisme énergétique (Beaver,
2003). L’eau est produite par l’oxydation des lipides et des
glucides (le métabolisme lipidique produit plus d’eau mais le
rendement du métabolisme glucidique est meilleur).
Quelques considérations
physiopathologiques
Chaque jour, l’organisme du chat nécessite environ 85 mL
d’eau par kg de poids. Les besoins exogènes en eau varient de
55 à 70 mL/kg de poids/jour. Il faut ainsi environ 2 mL d’eau
pour 1 gramme de matière sèche ingérée.
466
5 - Consommation d’eau chez les chats
> Régulation intrinsèque du comportement dipsique
La soif est la sensation qui entraîne la consommation d’eau. Les signaux proviennent de l’hypothalamus latéral, près du centre de la faim. La régulation est complexe mais liée de près aux variations de
l’osmolarité plasmatique, elle-même contrôlée par la vasopressine.
L’apaisement de la soif est d’abord induit par une stimulation orale sur une courte période (une heure).
La distension gastrique interfère plus tard, agissant principalement sur la fréquence des prises. Enfin,
l’hydratation cellulaire vient réguler la consommation d’eau par le biais d’interactions complexes.
Les chats ne sont pas aussi sensibles aux pertes en eau que les chiens et peuvent supporter une déshydratation allant jusqu’à 8 % de leur eau corporelle (Case, 2003).
La prise hydriques varie doit compenser les pertes en eau:
- pertes physiologiques: miction (40 mL/kg/jour), selles et respiration, lactation
- pertes pathologiques: diarrhées, vomissements,œdème, blessures cutanées, diabète sucré, insuffisance
rénale, etc. Une diminution du volume sanguin et de la pression artérielle stimule également la
consommation d’eau, à travers l’angiotensine 2 qui active la sécrétion d’aldostérone agissant à son
tour sur la natrémie.
> Facteurs externes influençant le comportement dipsique
Composition de l’aliment
La consommation d’eau est affectée par le type d’aliment et son humidité. Les chats recevant un aliment en boîte ne boivent presque pas puisque l’alimentation suffit quasiment à couvrir leurs besoins
hydriques. C’est la même chose pour les chats nourris avec du poisson ou de la viande.
Les aliments secs contiennent seulement 7 à 9 % d’eau et l’animal doit donc boire plus pour satisfaire
ses besoins quotidiens. Les aliments secs augmentent les pertes hydriques fécales mais diminuent les
pertes urinaires (Jackson, 1977). Il est important de signaler que si une alimentation sèche augmente
beaucoup la consommation d’eau, l’équilibre hydrique général n’est cependant pas altéré par l’humidité de l’aliment. Le risque de formation de calculs urinaires dépend plus de la composition minérale
de l’aliment et du pH urinaire que de l’humidité du produit. La situation est cependant plus délicate
lorsqu’une transition s’opère depuis les boîtes vers les croquettes et que le chat adapte mal sa consommation d’eau à ses besoins réels.
La densité calorique n’affecte pas l’ingéré liquidien. Réhausser le taux de protéines de l’aliment entraîne par contre une augmentation de la consommation d’eau post-prandiale (à cause de la diurèse accrue
pour éliminer l’urée). Les glucides la font, eux, légèrement diminuer, à cause du bon rendement de production d’eau métabolique lors de l’oxydation. L’ajout de chlorure de sodium dans l’aliment augmente
enfin la consommation hydrique. Une hypernatrémie au-dessus de 160 mEq/L déclenche en effet la
soif.
Température
Le comportement dipsique du chat est bien moins influencé par la chaleur et l’effort que celui du chien,
sans doute parce que les pertes en eau liées au halètement et à la transpiration ne sont pas aussi importantes. L’eau ne doit pas être trop froide (pas moins de 10 °C).
Fourniture alimentaire
Comportement
Ce facteur est bien plus étudié chez le chien que chez le chat. Lors de restriction alimentaire, la consommation d’eau augmente à 2,5 mL par gramme de matière sèche ingérée. Si l’alimentation n’est proposée que pendant une heure par jour, cela entraîne une diminution de la consommation d’eau et de nourriture, par rapport à une situation où l’alimentation est proposée ad libitum. Dans ce mode d’alimentation, la boisson est liée aux repas. Ceci correspond à un processus d’apprentissage.
467
5 - Consommation d’eau chez les chats
Considérations pratiques
pour encourager un chat à boire
Comme pour la nourriture, les chats boivent tout au long du nycthémère, de12 à 16 fois par jour mais
les quantités sont petites: 10 à 12 mL à chaque fois. Beaucoup de variations existent entre les individus: ceci est lié à la somme des effets physiologiques mentionnés plus haut.
Pour encourager une consommation optimale, les chats doivent avoir accès à de l’eau claire et fraîche,
renouvelée tous les jours. Les gamelles en verre, en métal ou en porcelaine sont préférables à celles en
plastique. Les propriétaires doivent aussi faire attention à ce que leur chat ait un accès permanent à
l’eau tout le temps. Il est dangereux de poser un seul bol dans une pièce, qui peut rester fermée pendant un certain temps, empêchant donc l’animal de boire suffisamment. Lors de départ en week-end,
le chat doit pouvoir disposer de plusieurs points d’eau.
L’eau souillée est délaissée par les chats. La place du bol d’eau est donc importante: il doit être placé au
moins à 50 cm de la nourriture et de la litière. La distance est parfois difficile à respecter lorsque le sujet
est hospitalisé. L’eau doit être appétente: les chats sont très sensibles aux odeurs et certains préfèrent
boire aux toilettes ou dans l’évier. D’autres apprécient l’eau des fontaines électriques qui est aérée régulièrement. Ajouter du jus de viande, un peu de lait, ou du sel peut permettre d’augmenter l’appétence
de l’eau. Nourrir avec un aliment humide ou liquide est une autre façon d’encourager la consommation
d’eau.
Troubles du comportement dipsique
> Adipsie ou hypodipsie
Toute cause d’hyponatrémie (cirrhose, insuffisance cardiaque congestive, insuffisance rénale aiguë, syndrome néphrotique) peut entraîner un arrêt de la consommation d’eau. Ces adipsies sont en réalité des
mécanismes compensateurs.
Les lésions buccales (gingivite, abcès, tumeur, ulcère, fracture de la mâchoire, corps étranger, etc.) peuvent diminuer la prise hydrique, pour des raisons mécaniques ou nociceptives.
L’adipsie peut aussi simplement résulter d'une qualité insuffisante de l’eau (ex: eau qui a stagné trop
longtemps dans le bol). Il est enfin important de se rappeler que si les besoins hydriques sont couverts
par une alimentation très humide, il est normal que le chat ne boive pas.
La consommation moyenne en eau
d’un chat dépend de la quantité de
matière sèche ingérée : environ 2 mL
par gramme de matière sèche.
> Polydipsie
Tout changement du comportement dipsique doit être suivi avec attention. La consommation d’eau
devient excessive au-delà de 100 mL/kg. Toute cause de polyurie (> 50 mL/kg) entraîne logiquement
une polydipsie (Tableau 8).
Les valeurs de l’osmolarité plasmatique permettent de différencier
une polydipsie primaire d’une polydipsie compensatoire (Remy,
1986):
- si l’osmolarité plasmatique est supérieure à 310 mOsm/L, la polyurie est primaire et les pertes urinaires entraînent une polydipsie
- si l’osmolarité plasmatique est inférieure à 290 mOsm/L, la polydipsie est primaire et la polyurie est causée par la faible pression
osmotique.
La potomanie peut être une réaction au stress ou bien une activité
de substitution lors d’anxiété permanente. L’hypercortisolémie
déclenche la prise d’eau excessive (Landsberg, 2003). Les situations
conflictuelles doivent alors être identifiées et corrigées.
© Royal Canin
Comportement
L’ingestion d’aliments salés (morceaux de poisson…) entraîne aussi
une polydipsie, puis une polyurie.
468
Conclusion
TABLEAU 8 - DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL DU SYNDROME DE POLYDIPSIE
D’après : Masson, 2004
Analyse urinaire
Cause et Intensité
Densité
Osmolarité
Néphrite chronique +
Pyomètre +
N
Diabète sucré ++
Éléments
anormaux
Analyse sanguine
Urée
Glycémie
Protéines
N
Protéines
N
Glucose
Diabète insipide +++
N
N
N
Syndrome de Cushing ++
N
N
Hyperthyroïdie ++
N
N
N
Insuffisance hépatique ++
N
N ou
N ou
N ou
N
N
N
Gastroentérite +
Hypercalcémie +
N
Bilirubine
Autres
Légèrement
Cortisol
SGPT
Calcium
N = pas de changement
L’hypercalcémie liée à un hyperparathyroïdisme secondaire peut stimuler la soif. L’insuffisance hépatique peut enfin entraîner une polydipsie par une diminution de la dégradation de la rénine et une augmentation de l’activité de l’angiotensine 2.
Conclusion
Toutes les données présentées permettent de comprendre les bases du comportement alimentaire du
chat. Certaines d’entre elles sont empiriques. D’autres dérivent de résultats de recherche, obtenus soit
dans des conditions naturelles, soit expérimentalement. L’extrapolation depuis d’autres espèces (grands
félins) doit être évitée.
Ces informations peuvent en tout cas aider le propriétaire à faire des choix judicieux en ce qui
concerne le rythme d’alimentation à respecter et le type d’aliment à donner. Même si le chat est resté
très sélectif, son statut d’animal de compagnie (augmentation des relations sociales et diminution de
la prédation) a profondément modifié son comportement alimentaire.
Certains troubles pathologiques peuvent ainsi contribuer à le modifier. L’obésité devient par exemple
un problème majeur de santé féline. Une éducation appropriée de la clientèle et une information sur
les aliments disponibles peuvent permettre de mieux prévenir les problèmes de poids. À l’inverse, il
faut savoir relativiser les propos des propriétaires qui se plaignent de l’appétit capricieux de leur chat.
Seule la perte de poids justifie une exploration médicale. Sinon, il s’agit le plus souvent d’un défaut
d’objectivité de la part du possesseur.
Comportement
Les troubles du comportement alimentaire et dipsique peuvent être dus à l’anxiété, à une surpopulation féline dans la maison, à des rituels d’alimentation acquis ou à des troubles compulsifs. Un bilan
médical et comportemental complet doit permettre au clinicien de déterminer la cause du problème
et de prescrire le traitement approprié.
Bien que l’intégration du chat dans la famille puisse apporter bien-être et bonheur, le vétérinaire doit
expliquer aux maîtres comment éviter les pièges d’un anthropomorphisme excessif, surtout en termes
d’alimentation.
469
Q
R
Est-ce nécessaire de varier
régulièrement l’alimentation
d’un chat ?
Non, du moment qu’ils ont accès à un aliment équilibré, les chats n’ont pas besoin de changer d’aliment d’un jour à l’autre.
Pourquoi les chats sont-ils plus
difficiles que les chiens ?
En réalité, les chats ne sont pas plus difficiles que les chiens. Cette croyance commune est fausse.
Un chien mal éduqué peut aussi être très difficile à contenter. Pour certains chiens, refuser la nourriture est une façon d’affirmer sa position au sein de la famille. En revanche, les chats n’attribuent
pas de valeur sociale à la nourriture. S’ils refusent de manger, c’est soit qu’ils sont malades, soit
parce qu’ils n’apprécient réellement pas leur aliment.
La compétition qui existe dans un groupe canin conduit les chiens à avaler un maximum de nourriture dans un temps court, leur conférant un comportement de « glouton ». Les chats, en tant
que chasseurs solitaires, peuvent passer du temps à disséquer et savourer leur proie. Leur comportement est celui d’un “goûteur”.
Les chats sont-ils sensibles au goût
sucré et salé ?
Les chats sont différents des chiens et des humains. Ils n’ont pas d’attirance pour les aliments sucrés.
Ceci est lié à leur nature strictement carnivore. Ils sont également moins sensibles au sel et ont un
seuil de détection plus élevé du chlorure de sodium et de potassium. Leurs proies étant naturellement salées, les chats n’ont pas été sélectionnés pour cette capacité gustative présente chez d’autres
mammifères, comme les herbivores.
A chaque fois que je vais à la cuisine,
mon chat me suit et miaule, que
veut-il ?
Pour le chat, la cuisine représente un lieu propice pour interagir avec son propriétaire et solliciter
son attention. Si le chat est bien nourri et qu’il consomme déjà la ration normale correspondant à
ses besoins nutritionnels, il ne doit pas recevoir de suppléments alimentaires lorsqu’il vocalise. S’il
est nourri à chaque fois qu’il miaule, le chat interprète la nourriture comme une récompense pour
ce comportement et les vocalises vont s’intensifier. Il faut plutôt essayer de répondre à ses sollicitations en jouant avec lui, en le toilettant ou en établissant avec lui d’autres types d’interactions
sociales.
J’ai deux chats dont un seul présente
un poids excessif. Comment fournir
le régime approprié à chacun ?
Chaque chat peut avoir besoin d’un régime particulier pour satisfaire ses besoins nutritionnels. La
solution passe par la distribution de repas séparés. Plusieurs fois par jour, chaque chat reçoit son aliment particulier et un certain temps lui est accordé pour le consommer. Pour que chaque chat
mange la quantité appropriée, ils doivent être séparés pendant les repas. Une fois le repas fini, les
gamelles sont retirées. Il est également possible de laisser à la disposition du chat le plus maigre une
gamelle en hauteur, inaccessible pour le chat obèse.
Comportement
Questions fréquemment posées
Questions fréquemment posées à propos
du comportement alimentaire du chat
470
Questions fréquemment posées
R
Comment dois-je réagir lorsque mon
chat refuse l’aliment prescrit ?
Les transitions doivent se faire de manière progressive. Le nouvel aliment doit être offert à côté de
l’ancien pour familiariser le chat à son odeur. Dans certains cas, les deux aliments peuvent être
mélangés. Si la texture des aliments (ancien et nouveau) est très différente, cela peut être un problème. Le mieux est de choisir un type d’aliment qui ne surprenne pas trop le chat.
Comment empêcher mon chat de
chasser les oiseaux ?
Bien que non désiré par l’homme, le comportement de prédation est normal chez le chat. Pour
l’empêcher de chasser, il faut le garder à l’intérieur. Sinon, il est possible de lui faire porter un collier à clochette qui prévient les oiseaux de son approche. Il est prudent de retirer les mangeoires
et les cabanes à oiseaux pour ne pas les attirer.
Je dois encourager mon chat à boire.
Comment faire ?
Tu recevras enuiLa consommation d’eau varie selon le type d’aliment. Les chats qui mangent des
croquettes boivent plus d’eau que les chats qui mangent des aliments en boîte. La consommation
d’eau peut être augmentée en ajoutant de l’eau à l’aliment en boîte ou en fournissant de l’eau aromatisée par exemple au poisson. Certains chats préfèrent l’eau fraîche et aérée et en boiront plus
si elle provient d’un robinet ou d’une fontaine.
Comportement
Q
471
Références
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473
Informations nutritionnelles Royal Canin
Appétence et précision nutritionnelle sont liées
L’appétence est une condition sine
qua non pour s’assurer que le chat
ingère bien ce qu’on lui apporte.
L’aliment le plus équilibré en théorie
ne vaut rien s’il est boudé par le
chat. Cela est d’autant plus vrai que
sa santé exige un régime particulier,
dont la formulation n’est théoriquement pas favorable à l’appétence :
restriction en sodium, en matières
grasses, en protéines, etc. Un tel obstacle au départ peut être contourné
par différentes solutions pour
conserver un niveau d’appétence
suffisant.
L’appétence
n’est pas un luxe : c’est
une obligation vitale
L’objectif fondamental de la nutrition est d’apporter tous les jours l’ensemble des nutriments indispensables, en quantité suffisante pour
couvrir les besoins. Le premier de ces
besoins est le besoin énergétique,
quelle que soit la forme sous laquelle
les calories sont apportées.
La formulation des aliments doit
d’abord être conçue en fonction de
la densité énergétique : il faut que le
volume de ration proposé au chat
soit compatible avec sa capacité de
digestion.
• Un volume trop réduit ne favorise
pas l’installation d’un sentiment de
satiété.
• Un volume trop élevé risque de ne
pas être bien consommé et/ou
d’entraîner des troubles digestifs.
L’appétence permet de
surmonter certains stress
Pour bien des individus, la perturbation de l’appétit est l’une des premières manifestations du stress. Si
l’aliment n’est pas suffisamment
appétent et que le stress se prolonge, il y a alors risque de sous-consommation chronique et apparition de
déficits alimentaires. Le chat maigrit,
la qualité de son poil s’altère, ses
défenses immunitaires sont affaiblies.
Exemples de situations
où l’appétit du chat est perturbé
• Changement d’environnement : cas
du chaton ou du chat adopté qui
arrive dans un nouveau milieu,
mise en pension, déménagement,
etc.
• Changement alimentaire : certains
chats ont tendance à rejeter un
nouvel aliment (néophobie). Ce
phénomène s’observe surtout si
l’aliment est proposé dans des
conditions d’environnement défavorables ou chez des chats qui ont
longtemps reçu le même aliment.
Vaincre une néophobie implique
de faire une transition alimentaire
la plus progressive possible (Figure
1) dans des conditions idéales de
bien-être pour le chat, afin d’éviter
que ne se développe ensuite une
aversion qui serait plus difficile à
guérir.
FIGURE 1 - TABLEAU DE LA CHRONOLOGIE D’UNE BONNE TRANSITION ALIMENTAIRE
Ancien aliment
Nouvel aliment
Jour 1
Jour 2
Jour 3
Jour 4
Comportement
Lors d’un changement d’alimentation, il est conseillé de procéder de manière progressive. Par exemple, donner 75 %
de l’ancien aliment mélanger à 25 % du nouveau le 1er jour. Le 2e jour, mélanger les deux aliments à parts égales, le
3e jour, donner 75 % du nouveau et 25 % de l’ancien. Au 4e jour, le chat reçoit 100 % du nouvel aliment.
474
Informations nutritionnelles Royal Canin
Comment évaluer l’appétence
d’un aliment pour chat ?
L’appétence est appréciée par des
études objectives du comportement
du chat mis en présence d’un ou plusieurs types d’aliments. Il est surtout
intéressant de chercher à évaluer les
préférences de l’animal et son mode
de consommation de l’aliment.
té du résultat dépend, entre autres
critères, du nombre de chats utilisés
et de la durée de l’étude. La sélection
des chats les plus discriminants permet d’augmenter la sensibilité des
tests.
Le mode d’ingestion
de l’aliment
Les préférences du chat
pour tel ou tel aliment
Il s’agit ici de mesurer la consommation respective de deux aliments différents mis à la libre disposition du
chat (Figure 2). Les critères de sélection sont analysés ensuite. La fiabili-
Il reflète le caractère plus ou moins
attractif du produit pour le chat. La
quantité spontanément ingérée
dans un temps donné, ou le temps
nécessaire à l’ingestion d’une quantité donnée d’aliment sont des don-
nées importantes. Des vidéos montrant le mode de préhension et les
difficultés éventuelles de consommation ajoutent des précisions utiles.
Les informations obtenues en chatterie peuvent être confirmées chez des
chats de particuliers pour évaluer
l’appétence en conditions variées
d’environnement. De telles études
permettent de tenir compte de
notions telles que l’appréciation du
propriétaire sur l’aspect du produit
et son attitude quand il donne à
manger, les conditions variables de
distribution des repas, etc.
FIGURE 2 - DEUX MOYENS DIFFÉRENTS D’EXPRIMER LES PRÉFÉRENCES ALIMENTAIRES
Cas n° 1
Cas n° 2
Pas de préférence
100 %
Aliment B
33
Aliment A
75 %
67
50 %
54
25 %
33
16
0
Proportions d'aliments A et B consommés
Expression des préférences
Comportement
Les résultats peuvent s’exprimer de 2 façons :
- Cas n° 1 : le graphique indique seulement les proportions d’aliments A et B consommées par l’ensemble des chats
- Cas n° 2 : 16 % des chats ont préféré l’aliment A (c’est-à-dire qu’ils ont consommé au moins 2 fois plus de A que
de B), 54 % ont préféré l’aliment B et 33 % n’ont montré aucune préférence. Cette dernière méthode reflète mieux
les différences car elle prend en compte le nombre de chats qui marquent vraiment leur préférence.
475
Informations nutritionnelles Royal Canin
L’appétence diminue-t-elle dans le temps ?
Tous les produits alimentaires ont
tendance à s’altérer avec le temps.
Garantir une bonne appétence pendant la durée de conservation d’un
produit implique de ralentir son
vieillissement.
Qualité
des matières grasses
La conservation des matières grasses
de l’aliment est à surveiller de près,
particulièrement celles qui sont mises
dans l’enrobage de la croquette. Au
contact de l’oxygène de l’air, les molécules lipidiques génèrent en effet la
production de molécules instables, les
radicaux libres, à l’origine de phénomènes d’oxydation. Les graisses
liquides à température ambiante
(graisse de volaille, huiles végétales)
sont les plus sensibles à l’oxydation
car ce sont des graisses insaturées. La
conservation à la lumière et à la chaleur accélèrent le processus.
Le rôle des antioxydants est de bloquer les radicaux libres avant qu’ils
ne provoquent des réactions en
chaîne à l’origine de l’apparition de
peroxydes, puis de composés secondaires d’oxydation, aldéhydes et
cétones. Tous ces composés sont
potentiellement toxiques. Cependant,
il est rare que le chat accepte de
consommer un aliment dont les
matières grasses sont altérées. Il est en
effet très sensible à l’odeur de rance
propre à l’oxydation. L'utilisation
d'antioxydants réellement efficaces
est donc indispensable pour conserver l’appétence et protéger la santé
de l’animal.
Évolution
du profil aromatique
Le savoir-faire en matière d’appétence ne se limite pas à la mise au
point d’arômes particulièrement
attractifs pour le chat. La nature
volatile de ces arômes les rend facilement perceptibles par le chat mais ils
risquent de disparaître progressivement dans l’air ambiant laissant alors
la place aux odeurs internes de la
croquette, dont le profil aromatique
différent peut ne pas plaire autant
au chat.
Autre risque : l’évolution des arômes
au cours du temps. Une flaveur plaisante au départ peut éventuellement se transformer au point de
devenir un facteur négatif d’appétence.
Le travail sur l’appétence implique
donc de suivre l’évolution de ces substances pour vérifier leur comportement au cours du vieillissement du
produit. L’appétence doit rester
satisfaisante pendant toute la durée
de vie du produit, soit jusqu’à la
date d’expiration marquée sur l’emballage.
Pour limiter le risque de perte d’appétence une fois l’emballage ouvert,
il est important de choisir des conditionnements adaptés à la consommation quotidienne du chat. Par
exemple, un chat de 4 kg mangeant
en moyenne 50 g de croquettes/jour
consomme l’équivalent d’un sac de
FIGURE 3 - COMPARAISON DES TENEURS EN ACIDES GRAS
POLYINSATURÉS (AGPI) DANS DIFFÉRENTES HUILES ET GRAISSES
70
66
60
60
AGPI (% MS)
50
40
30
23,4
25,3
20
Comportement
© C. Renner
13,1
10
5,8
1,5
0
Coprah
La qualité des matières grasses est
contrôlée sur les matières premières et
sur les produits finis. La fraîcheur et la
capacité de résistance à l’oxydation des
huiles et graisses sont des critères
majeurs pour une bonne appétence.
476
Suif
Saindoux
Poisson
Volaille
Bourrache
Plus la teneur en AGPI est importante et plus les chaînes d’acides gras
sont longues, plus la matière grasse est sensible à l’oxydation si elle n’est
pas correctement protégée.
Soja
Informations nutritionnelles Royal Canin
© C. Renner
non seulement leur biodisponibilité
est augmentée mais ils deviennent
incapables de catalyser les réactions
d’oxydation dans l’aliment.
Le rôle des antioxydants est de stabiliser les matières grasses incluses à l’intérieur du
produit et en enrobage des croquettes afin de préserver l’appétence et la santé du chat.
1,5 kg en un mois, période compatible avec une bonne conservation
des arômes, surtout si le sac est rangé
à l’obscurité, à l’intérieur d’un récipient hermétique et à température
stable. Mieux vaut ne pas choisir un
sac plus grand qui obligerait à une
conservation plus longue.
Travail sur la conservation
des qualités nutritionnelles
de l’aliment
La préservation des qualités organoleptiques de l’aliment implique une
vigilance à plusieurs niveaux.
initiales des ingrédients. Le délai
entre la fabrication et le conditionnement doit être le plus court possible.
Antioxydation
La prévention de l’oxydation est globale : pour éviter d’initier ces réactions, l’utilisation d’oligo-éléments
chélatés est préférable à des oligoéléments sous forme minérale (fer et
cuivre surtout). Une fois chélatés,
Toutes les matières grasses incluses
dans l’aliment doivent être fraîches
et protégées avant leur transport et
leur utilisation : les substances utilisables pour préserver la fraîcheur des
aliments pour chats sont les mêmes
que celles rencontrées dans l'alimentation humaine ; elles sont choisies
pour leur sécurité et leur efficacité.
Le conditionnement
La prévention absolue de la perte
d’arômes et de l’oxydation consiste
à conserver l’aliment dans un emballage étanche d’où l’oxygène est
absent. C’est ce qu’on appelle le
conditionnement sous atmosphère
contrôlée (Figure 4). L’air est remplacé par un gaz neutre (ex : azote) au
moment
du
conditionnement.
L’aliment ainsi conservé est protégé
tant que le sac est fermé. Après
ouverture, la bonne préservation des
arômes est favorisée en le gardant à
l’abri de la lumière, de l’humidité et
à température fraîche et constante.
FIGURE 4 - PRINCIPE DE L’ATMOSPHÈRE CONTRÔLÉE
Le choix des matières
premières
Le process
Toute la technologie de broyage, de
cuisson, de séchage et d’enrobage
des croquettes doit s’appliquer à préserver le mieux possible les qualités
Sac étanche scellé :
atmosphère contrôlée = AZOTE
L’air est composé d’environ 20 % d’oxygène et de 80 % d’azote.
En atmosphère contrôlée, l’atmosphère du sac est composée d’azote à
100 %, empêchant tout phénomène d’oxydation de se produire.
Comportement
L’appétence doit être prise en compte dès le stade de la formulation : par
exemple, le traitement thermique
utilisé pour séparer les protéines et
les graisses à partir d’une viande
influence l’appétence. De même,
telle ou telle source de matières
grasses sera privilégiée en fonction
de sa résistance à l’oxydation
(Figure 3).
477