Édifier et dynamiser les collectivités rurales par le biais des arts et
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Édifier et dynamiser les collectivités rurales par le biais des arts et
Édifier et dynamiser les collectivités rurales par le biais des arts et de la créativité : Une analyse documentaire Nancy Duxbury, Ph. D et Heather Campbell Le Centre for Policy Research on Culture and Communities Université Simon Fraser Rédigé à l’intention du Réseau des villes créatives du Canada, mars 2009 Le Ross Creek Centre for the Arts, Canning, Nouvelle-Écosse Photo sur la page couverture : Le Ross Creek Centre for the Arts, Canning, Nouvelle-Écosse The Ross Creek Centre for the Arts is a research and development centre for the arts of all disciplines and cultures. Located on 186 acres of farm and forest overlooking the Bay of Fundy, the Centre offers programs and facilities for artists and students of the visual arts, performing arts, literary arts, architecture, film, and fine craft. The Centre has two performances spaces, two galleries, three visual arts studios, and an outdoor stage, and offers professional artist residencies at the Centre’s multi-disciplinary artist colony. © Les auteurs, le Réseau des villes créatives du Canada ainsi que l’Alberta Recreation and Parks Association 2009. Cet article fait partie du projet intitulé « Édifier et dynamiser les collectivités rurales par le biais des arts et de la créativité », à l’intention du Réseau des villes créatives du Canada, mars 2009. Le projet est une commande du Réseau des villes créatives du Canada, qui tient à souligner l’appui du ministère du Patrimoine canadien, ainsi que du Rural Alberta’s Development Fund, par l’entremise de l’Alberta Recreation and Parks Association. Le projet a été mené par le Centre for Policy Studies on Culture and Communities de l’Université Simon Fraser à Vancouver, en C.-B. Les manuscrits des projets sont disponibles sur le site Web du Réseau des villes créatives du Canada à : www.creativecity.ca Résumé Cet article présente une vue d’ensemble de la littérature issue de la recherche universitaire de langue anglaise et d’études portant sur les politiques en matière de développement culturel au sein des collectivités rurales. L’article comporte quatre sections : 1. L’état de l’activité culturelle et artistique au sein des collectivités rurales, élabore sur les quatre thèmes principaux dont fait état la documentation : (1) l’état de l’activité artistique au sein des collectivités rurales; (2) les festivals, en tant que pratiques pour l’édification d’une communauté; (3) les activités de tournées; ainsi que (4) le rôle des technologies informatiques et de l’information. Les pratiques culturelles mises de l’avant par les autochtones et les Premières nations y sont également abordées. 2. Le contexte communautaire propice à l’épanouissement et à la vitalité du secteur des arts, se penche sur : (1) les composantes essentielles à l’édification de communautés activement engagées dans la pratique artistique, (2) la possibilité d’une destruction créative, ainsi que (3) le recours aux arts à l’intention du renouveau communautaire. 3. Le rôle des arts dans la diversification et la relance de l’économie, met en lumière (1) deux cadres conceptuels qui font le point sur : les plateformes propres au développement régional (ou rural) et les ressources culturelles, dans une perspective économique, ainsi que (2) des thèmes clés et des mises en garde concernant la portée du secteur des arts sur l’essor économique au sein des collectivités rurales. 4. Les stratégies et les projets de gouvernance, font état de thèmes récurrents au sein des projets de politiques et des recommandations visant à soutenir et à appuyer le développement culturel en milieu rural. Cet article compte également des exemples issus d’études de cas, qui témoignent des diverses façons dont le développement des arts, de la culture et de la créativité sont mis à profit de la relance des collectivités rurales canadiennes (Annexe A – en anglais seulement). Abstract This paper provides an overview of English-language academic research literature and policyrelated studies with respect to cultural development in rural communities. The paper is organized into four sections: 1. The nature of arts and cultural activity in rural communities, which discusses four key themes in the literature: (1) the nature of arts activity in rural communities; (2) festivals as community-building practices; (3) touring activity; and (4) the role of information and computer technologies. Aboriginal/First Nations cultural practices are also noted. 2. The community context for the arts development and vitality, which considers: (1) critical ingredients for building arts-active communities, (2) the potential for creative destruction, and (3) community reinvention using the arts. 3. The role of the arts in economic diversification and revitalization, which outlines (1) two informing conceptual frames: regional (or rural) development platforms, and an economic perspective on cultural resources, and (2) key themes and cautions regarding economic development roles for the arts in rural communities. 4. Governance strategies and initiatives, which outlines some of the reoccurring themes among policy efforts and recommendations to support and sustain rural cultural development. A set of case study examples accompanies this paper to illustrate the variety of ways arts and cultural/creative development is being pursued in the revitalization of Canadian rural communities (Annex A). Table des matières Introduction ..................................................................................................................................... 1 1. L’état de l’activité culturelle et artistique au sein des collectivités rurales .......................... 6 1.1. L’état de l’activité artistique au sein des collectivités rurales 1.2. Les festivals, en tant que pratiques pour l’édification d’une communauté 1.3. Les activités de tournées 1.4. Le rôle des technologies informatiques et de l’information 2. Le contexte communautaire propice à l’épanouissement et à la vitalité du secteur des arts .................................................................................................................. 16 2.1. Les composantes nécessaires à l’édification de communautés activement engagées dans la pratique artistique 2.2. La possibilité d’une destruction créative 2.3. Le renouveau communautaire par l’entremise des arts, ou comment attirer le « contre-urbanisme artistique » 3. Le rôle des arts dans la diversification et la relance de l’économie .................................... 29 3.1. Deux cadres conceptuels de l’économie 3.2. Thèmes clés concernant le rôle de l’art à l’égard du développement économique des collectivités rurales 4. Les stratégies et les projets de gouvernance ........................................................................ 38 Remerciements ............................................................................................................................. 43 Annexe A. Profils des collectivités au Canada (en anglais) ...................................................... 44 Biographies des auteurs .............................................................................................................. 65 Liste des tableaux Tableau 1. Les complexités inhérentes aux arts : Une compilation préliminaire des dimensions et caractéristiques des activités artistiques dans les communautés rurales ...................................................................................... 8 Tableau 2. Comment les arts ont des répercussions sur les communautés .......................... 17 Tableau 3. Modèle logique : Ce qui fait prospérer les arts dans les petites villes rurales? Liens hypothétiques ........................................................................................... 20 Tableau 4. Le modèle révisé de la destruction créative en six étapes .................................. 25 Tableau 5. Préférences d’emplacements chez les artistes métropolitains et non-métropolitains aux États-Unis ..................................................................... 28 Tableau 6. Principaux thèmes récurrents dans le cadre des recommandations relatives à l’étude portant sur les politiques ............................................... 41 - 42 Liste des schémas Schéma 1. Des perspectives changeantes : La mobilisation des jeunes, la conservation et les arts ..................................................................................... 2 Schéma 2. Modèle de développement du tourisme rural et culturel en quatre étapes ........ 35 Édifier et dynamiser les collectivités rurales par le biais des arts et de la créativité : Une analyse documentaire Nancy Duxbury, Ph. D et Heather Campbell Le Centre for Policy Research on Culture and Communities Université Simon Fraser Rédigé à l’intention du Réseau des villes créatives du Canada, mars 2009 Terroir culturel – Un lieu qui se nourrit de ce qui est cultivé localement … qui s’alimente de la mise en commun de l’histoire humaine et naturelle… du travail des écrivains, des artistes, des interprètes, des universitaires et celui des meneurs qui contribuent à une culture vivante et diversifiée.1 Introduction Les régions rurales du Canada vivent une période de transition. Parmi les enjeux auxquels les collectivités rurales au Canada font face, notons le déclin et le vieillissement des populations, les problèmes liés à la rétention des jeunes, des occasions économiques et sociales limitées pour les résidents, l’appauvrissement des ressources naturelles, la perte de services locaux, ainsi qu’une hausse du coût de la vie (Nicholls, 2005). Une situation semblable existe au sein des collectivités rurales dans d’autres pays (consultez les articles complémentaires de Patrick Overton, Ph. D, Kim Murphy et Lidia Varbanova, Ph. D). Alors que les collectivités rurales se repositionnent et conçoivent une nouvelle vision d’elles-mêmes, elles cherchent à dynamiser et à diversifier leur économie, à rehausser leur qualité de vie et à se réinventer pour assumer de nouvelles fonctions et un nouveau rôle. La littérature concernant les arts et l’essor des industries créatives au sein des collectivités rurales s’inscrit principalement dans ce contexte. Les enjeux propres à la nature changeante des collectivités rurales sont abordés dans nombre de conférences, de forums et de publications où il est question de renouveau rural, d’entreprise sociale, du renforcement des capacités de la communauté, ainsi que d’« investissements dans le capital créatif et culturel des collectivités rurales ». (Smiles, 2006, p. 3). Certains auteurs affirment que favoriser la mise en place de programmes artistiques et culturels contribuera à « endiguer la vague d’exode chez les jeunes et la diminution de la qualité de vie » dans les régions rurales (Brotman, 2007, tel que cité dans Nolte, 2007, p. 4; consultez également Foundation for Rural Living, 2004; Nicholls, 2005). Par ailleurs, d’autres auteurs soulignent des enjeux, des dynamiques et des stratégies spécifiques ayant une incidence sur l’essor et la vitalité de l’activité artistique dans les collectivités rurales 1 Terme élaboré par des artistes et des agriculteurs dans le cadre du projet The Wormfarm, au Wisconsin (dans Gard Ewell, 2006). Canada 1 Schéma 1. Des perspectives changeantes : La mobilisation des jeunes, la conservation et les arts Les points de vue fondés sur la société relativement au rôle qu’occupent les arts dans les collectivités rurales se sont diversifiés au cours des dernières années, et sont de plus en plus associés à des idées portant sur des occasions d’« économie créative ». Les projets visant à aborder la rétention et la mobilisation des jeunes dans les collectivités rurales sont perçus comme un microcosme de ces changements plus vastes. Traditionnellement, les recommandations relatives à la rétention et à la mobilisation des jeunes dans les collectivités rurales comprenaient fréquemment des références à des projets récréatifs et culturels, ainsi qu’à un renforcement des possibilités économiques et des perspectives de carrière, mais ces éléments ont été traités séparément et rarement jumelés dans le cadre d’une stratégie. Les projets concernant les arts pour la mobilisation des jeunes privilégient en règle générale le développement des relations sociales, de l’estime de soi et des connaissances de la communauté. D’un point de vue qui tient compte des « possibilités récréatives et culturelles », on a misé sur la création d’occasions visant à « augmenter la participation et la cohésion de la communauté, à développer le bénévolat et les compétences en leadership, et à engager les jeunes à rester et à bâtir leur vie au sein de leur communauté » (gouvernement du Canada, Rural Communities as the Cornerstone, 2003, p. 6). Par exemple, le projet Mobilisation of Young Rural Developers (Mobilisation des jeunes développeurs ruraux) au Québec a encouragé les jeunes à « participer au développement de projets artistiques qui symbolisent leur communauté afin de les aider à développer leur estime de soi, leur sentiment d’appartenance et leur intérêt à l’égard de leur communauté ». Par ailleurs, il comportait des partenariats avec des résidences pour personnes âgées et d’autres organisations pour illustrer la vie sociale, le patrimoine vivant, l’histoire et d’autres aspects de leurs communautés (Nicholls, 2005, p. 15). Bien que ces aspects sociaux et communautaires de l’engagement culturel significatif soient encore très importants, les nouvelles recommandations et les nouveaux projets indiquent que ces points de vue traditionnels sur les contributions des activités artistiques se diversifient pour intégrer des idées au sujet de l’emploi et des entreprises à caractère culturel et créatif. Par exemple, on note parmi les recommandations récentes sur la rétention des jeunes pour le Prince Edward County, en Ontario, qui est confronté à un enjeu constant concernant l’exode des jeunes, la participation des jeunes au gouvernement municipal, la promotion de l’entrepreneuriat chez les jeunes et une « économie rurale créative, » ainsi que la création de partenariats avec les établissements postsecondaires avoisinants (Donald, 2008, p. 17, accentuation ajoutée). Au Royaume-Uni, le East Midlands Rural Creative Industries Regional Report indique que la présence de galeries, de studios, de musiciens, de lieux de représentation et de compagnies de spectacles peut « souvent fournir des emplois ambitieux et des exemples d’entrepreneuriat qui sont particulièrement attrayants pour les jeunes (et aident à la rétention de cette clientèle)” (Burns & Kirkpatrick, 2008, p. 34). Les petites entreprises œuvrant dans les industries créatives de cette région se sont également dites intéressés à offrir des stages pour les étudiants et à recruter des employés formés localement. En Australie régionale, on fait la promotion des industries créatives comme un moyen pour retenir les jeunes et offrir des possibilités d’emploi. Gibson (2008) affirme que les jeunes développent souvent naturellement les compétences nécessaires aux industries créatives (compétences en musique et en informatique); par conséquent, à titre de projet d’emploi, il s’agit d’une correspondance naturelle. Cependant, une incompatibilité existe encore entre les études de recherche sur l’exode des jeunes et la croissance des industries créatives dans les secteurs régionaux – les deux éléments pourraient être jumelés dans le but d’élaborer des stratégies de rétention de la population – tout en tenant compte des enjeux d’identité (Gibson & Argent, 2008). 2 Duxbury et Campbell (p. ex. : Shifferd, 2005; Rodning Bash, 2006). Les occasions liées à l’« économie créative » ont été intégrées aux perspectives traditionnelles en matière de développement social et communautaire concernant le rôle de l’art au sein d’une collectivité (p. ex. : Wojan, Lambert & McGranahan, 2007b), ainsi qu’à celles concernant la rétention et l’intégration des jeunes (consultez le Schéma 1). Qu’est-ce que la ruralité? La recherche nationale au Canada fait état d’au moins six définitions de ruralité, mettant chacune l’accent sur des critères géographiques particuliers, tels l’importance de la population, sa densité, le contexte du marché du travail ou celui de l’établissement de localités. Dans son document de travail intitulé Définitions of « rural », Statistique Canada recommande comme point de départ la définition de « région rurale ou petite ville » soit : « la population habitant dans les villes et les municipalités à l’extérieur de la zone de déplacement quotidien vers les grands centres urbains (c.-à-d., à l’extérieur des zones de déplacement des centres dont la population est de 10 000 habitants ou plus) » (du Plessis & Clemenson, 2002, p. 1). Dans le présent article, nous avons tenu compte de cette définition ad hoc, tout en étant conscients que les définitions de ruralité énoncées par les spécialistes peuvent être différentes et, en général, plus flexibles en ce qui concerne cette définition. L’art au sein des collectivités rurales regroupe un large éventail d’activités, notamment des activités informelles, la pratique d’artistes professionnels, ainsi que celles des entreprises commerciales de création (habituellement petites). Selon les données recensées par Statistique Canada en 2001, il y avait 22 100 artistes professionnels résidant dans 264 petites municipalités rurales au Canada2, représentant 17 % des 130 700 artistes établis au Canada. (Hill Stratégies Recherche, données de recensement 2006 et 2001). Entre 1998-1999 et 20002001, le Conseil des Arts du Canada a soutenu des projets dans 825 collectivités; dont 351 (43 %) ont été réalisés dans des collectivités de moins de 5 000 habitants (Conseil des Arts du Canada, 2001). Par ailleurs, l’emploi rural dans le secteur culturel a connu une croissance plus rapide que l’emploi total en milieu rural pendant la période de 1996 à 2003 (Singh, 2006). Une analyse récente menée par Statistique Canada concernant l’emploi dans le domaine culturel au Canada, révèle la présence de grappes géographiques dans nombre de régions rurales (Schimpf & Sereda, 2007). Parmi les constats de l’étude, notons que « dans les régions rurales où l’emploi dans le secteur culturel est important, il existe une main-d’œuvre culturelle hautement spécialisée » comparativement à celle qui se trouve dans les villes où les emplois culturels sont plus diversifiés (p. 7). En règle générale, l’envergure du travail culturel et créatif au sein des collectivités rurales tend à être sous-estimée et peu reconnue. Cela s’explique, en partie, par le fait que la recherche traditionnelle met habituellement l’accent sur les artistes et les travailleurs culturels en milieu urbain où « l’économie symbolique » est hautement documentée, et par le fait qu’il est difficile de comptabiliser l’emploi à temps partiel, si caractéristique du secteur culturel au sein des collectivités rurales (Singh, 2006). De la même façon, il est difficile de comptabiliser la présence d’emplois simultanés dans le cadre de sondages statistiques standard. Par ailleurs, 2 Analyse fondée sur les données de Statistique Canada. Le terme « artistes » englobe (1) les acteurs; (2) les artisans et les artistes des métiers d’art; (3) les chefs d’orchestre, les compositeurs et les arrangeurs; (4) les danseurs; (5) les musiciens et les chanteurs; (6) d’autres artistes (tels que les artistes de cirque et les marionnettistes); (7) les peintres, les sculpteurs et les autres visualistes; (8) les producteurs, les directeurs, les chorégraphes et les autres professions connexes; ainsi que (9) les écrivains. Les petites municipalités rurales comprises ici sont celles comptant moins de 50 000 résidents à l’intérieur des limites municipales de 2001, avec des données fiables (comportant 40 artistes et plus). Canada 3 la capacité des sondages actuels à recenser les activités artistiques et de tournées informelles est aussi un problème. Vue d’ensemble de la littérature L’attention que porte la recherche au développement culturel au sein des collectivités rurales se manifeste également dans les contextes universitaires et politiques, intégrant une vaste gamme de disciplines et d’approches. Tel qu’en témoigne cet article, cette documentation comporte diverses facettes et donne lieu à des discussions sous divers « angles ». Dès lors, il n’est pas aisé de bien saisir toute l’ampleur de la littérature. Habituellement, les spécialistes cherchent à mieux comprendre la notion de culture et son évolution au sein des régions rurales, tout en s’intéressant au rôle que joue la culture dans un contexte plus vaste et, qui tient compte des enjeux liés à l’évolution et à l’adaptation des régions rurales. En ce qui concerne le domaine des politiques publiques, un large éventail de recherches ont été menées dans le but d’informer et d’orienter l’élaboration de politiques, de stratégies ou d’investissements dans le domaine des arts (ou de la culture en général) au sein des régions rurales. Selon Smiles (2006)3, les thèmes principaux dont fait état la littérature incluent : le financement des arts et les investissements dans les arts, l’accès à de nouveaux marchés à l’intention des produits artistiques, les partenariats d’appui aux arts, la hausse des occasions d’emploi et de travail pour les gens vivant en milieu rural ou en régions éloignées et, l’amélioration de la qualité de vie et du bien-être culturel et social des collectivités rurales et des régions. Par ailleurs, nombre de ces rapports soulèvent des aspects intéressants concernant les enjeux auxquels font face les collectivités rurales, et ils énumèrent diverses recommandations pour améliorer les conditions et les capacités locales dans le but de soutenir et d’édifier les activités artistiques. La recherche universitaire en général se situe à la croisée des chemins entre le « tournant culturel », dont font état les études rurales4, et la « dimension rurale » dont font état les études culturelles; deux domaines interdisciplinaires. Un nouveau champ d’études portant sur les Études culturelles rurales – « issu du croisement de l’histoire culturelle et de la géographie culturelle, jumelé aux développements récents dans des domaines interdisciplinaires voisins, notamment l’étude des médias, les études culturelles et de l’environnement, ainsi que les études portant sur l’Australie » – a fait l’objet d’une édition spéciale de la Australian Humanities Review (no 45, 2008) (Carter, Darian-smith & Gorman-Murray, 2008, p. 27). Bien que l’on reconnaisse que les études culturelles rurales « sont encore un phénomène récent, tant dans le cas des études culturelles que rurales » (p. 27), ce champ d’études apporte un correctif nécessaire à la partialité dont fait preuve la recherche envers les cultures 3 Smiles (2006) analyse brièvement les principales dimensions d’une vérification d’envergure internationale concernant la recherche et l’information sur les occasions favorables au développement durable d’industries créatives et culturelles dans les régions rurales et éloignées et les obstacles associés à ce développement. Cette documentation (en grande partie en anglais) a été compilée grâce à la Fédération internationale de conseils des arts et d’agences culturelles (FICAAC), et la majorité des études traitées dans le présent rapport ont pour but d’orienter les politiques à l’échelle nationale ou régionale en matière d’activités artistiques et culturelles dans les régions rurales et éloignées. 4 Dans le manuel Handbook of Rural Studies, la recherche rurale contemporaine se caractérise par des études portant sur la représentation, l’état, la durabilité, les nouvelles économies, la puissance, le nouveau consumérisme, l’identité et l’exclusion en matière de culture (Cloke, Mardsen, & Mooney, 2006). À titre d’exemple, le projet de recherche intitulé « Negotiating the Cultural Politics and Poetics of Identity within the Creative Industries of South West Britain » mené à l’University of Exeter, en Angleterre, examinera comment les liens entre le lieu et l’identité sont négociés par les créateurs et les organismes du secteur des arts. 4 Duxbury et Campbell populaires urbaines. En outre, ce nouveau champ d’études aborde les enjeux ruraux en matière de culture sans être biaisé par des normes urbaines qui tendent à décrire les régions urbaines par leur « absence de… » ou encore, par leur « éloignement de ». Il cherche également à répondre à l’absence notoire de reconnaissance des dynamiques de la culture au sein de la recherche portant sur les collectivités rurales. Dans l’ensemble, il revendique « l’importance de la dimension culturelle – et ses multiples facettes – pour comprendre les questions clés liées au changement démographique, à la productivité économique, à la crise environnementale et climatique, aux relations entre les autochtones et les non-autochtones et à la question de propriété des terres, ainsi qu’à la portée de facteurs ‘culturels’ sur la relance, ou relance potentielle des villes et des collectivités. » (p. 27) Les grandes lignes Cet article présente une vue d’ensemble de la littérature issue de la recherche universitaire de langue anglaise et d’études portant sur les politiques en matière de développement culturel au sein des collectivités rurales.5 Il fait la synthèse des enjeux et des thèmes dominants au sein de la littérature, en mettant l’accent sur ces aspects qui abordent le plus directement les questions directrices de ce projet, soit : 1. Quels sont les occasions favorables au développement durable des entreprises culturelles et créatives dans les régions rurales et, les obstacles à ce type de développement? 2. Existe-t-il des facteurs clés ou des thèmes communs et essentiels à l’édification de la vitalité de l’art, à long terme, dans les collectivités rurales? 3. Quelles sont les « bonnes pratiques » en matière de projets, de programmes, de partenariats et de stratégies, qui connaissent du succès dans les régions rurales ou éloignées? Nous avons tenté de brosser un portrait global de la littérature et de quelques-uns de ses constats, tout en étant conscients qu’une telle vue d’ensemble ne peut pas rendre justice à l’étendue et à la profondeur de la recherche dont cet article témoigne. Dès lors, nous considérons le présent article comme un premier pas permettant de repérer de nouvelles avenues pour d’éventuelles recherches. L’article comporte quatre sections : 1. L’état de l’activité culturelle et artistique au sein des collectivités rurales, élabore sur les quatre thèmes principaux dont fait état la littérature : (1) l’état de l’activité artistique au sein des collectivités rurales; (2) les festivals, en tant que pratiques pour l’édification d’une communauté; (3) les activités de tournées; ainsi que (4) le rôle des technologies informatiques et de l’information. Les pratiques culturelles mises de l’avant par les autochtones et les Premières nations y sont également abordées. 5 Nous avons inclus quelques articles en français dans la bibliographie commentée pour ce projet et avons fait ressortir le Répertoire d’actions culturelles en milieu rural développé par Les Arts et la Ville dans la compilation d’études de cas canadiens qui accompagne ce document. Un examen complet de la documentation en français n’a pas été possible dans le cadre du document actuel. Nous recommandons un examen parallèle de la documentation en français sur le sujet de la revitalisation rurale par le biais des arts pour compléter le projet actuel. Canada 5 2. Le contexte communautaire propice à l’épanouissement et à la vitalité du secteur des arts, se penche sur : (1) les composantes nécessaires à l’édification de communautés activement engagées dans la pratique artistique, (2) la possibilité d’une destruction créative, ainsi que (3) le recours aux arts à l’intention du renouveau communautaire. 3. Le rôle des arts dans la diversification et la relance de l’économie, met en lumière (1) deux cadres conceptuels qui font le point sur : les plateformes propres au développement régional (ou rural) et les ressources culturelles, dans une perspective économique, ainsi que (2) des thèmes clés et des mises en garde concernant la portée du secteur des arts sur l’essor économique au sein des collectivités rurales. 4. Les stratégies et les projets de gouvernance, font état de thèmes récurrents au sein des projets de politiques et des recommandations visant à soutenir et à appuyer le développement culturel en milieu rural. Ces catégories générales nous ont permis de structurer la documentation. Il faut toutefois noter que nombre d’ouvrages chevauchent plusieurs catégories et que certains thèmes récurrents y ont été remarqués. Une série d’exemples issus d’études de cas est présentée en annexe de cet article, pour illustrer les diverses façons dont les arts et le développement culturel et créatif sont mis de l’avant au profit du renouveau des collectivités rurales canadiennes (consultez également les études de cas qui sont présentées dans Brooks-Joiner & McKay, 2008). 1. L’état de l’activité culturelle et artistique au sein des collectivités rurales La perception selon laquelle l’art qui se trouve dans les petites collectivités rurales est différent de celui qui existe dans les collectivités urbaines et métropolitaines, m’a toujours fait sourire. … Les arts, sous toutes leurs formes, s’épanouissent tout autant dans les petites villes que dans les communautés rurales car il y a des artistes et des adeptes des arts qui y vivent. …. Dans les communautés rurales, les gens se rassemblent pour présenter leur art à des gens qu’ils connaissent et pour appuyer des artistes qu’ils connaissent. .... Les arts font partie du tissu social des petites villes parce qu’ils sont intrinsèques aux traditions de la collectivité. … (Janet Brown, 2002) L’époque où le terme « art rural » évoquait des stéréotypes bucoliques, devrait être révolue. Pourtant, la qualité et la diversité des arts qui se démarquent en région sont encore méconnues. (Arts Council England, 2005, p. 7) La nature de l’activité artistique au sein des collectivités rurales – ses dynamiques, ses assises et ses acquis culturels sous-jacents – façonne et oriente le genre d’initiatives économiques et communautaires avec lesquelles les arts interagissent. La littérature concernant les activités 6 Duxbury et Campbell artistiques dans les collectivités rurales a tendance à mettre l’accent sur trois aspects : la nature des activités artistiques mises en œuvre localement au sein des communautés, les festivals, ainsi que les répercussions des activités de tournées. Un thème commun recoupe ces trois dimensions, soit la question de l’auditoire – sa composition et les façons de l’augmenter et de le diversifier – tant pour les activités locales que celles de tournées (Smiles, 2006; p. ex. : Hamilton & Scullion, 2004; Andersen, 2005; Scollent, 2007).6 La portée des technologies de l’information et de l’informatique (particulièrement à large bande) sur la création, le maillage et le développement de nouveaux publics et de nouveaux marchés est aussi un thème commun. Les circonstances spécifiques au développement et à l’activité culturels des communautés autochtones et des Premières nations sont également un thème majeur dans la littérature, particulièrement en ce qui concerne l’Australie et le Canada. Au Canada, le jumelage de (a) projets communautaires et d’envergure plus globale, qui visent à édifier et à affirmer l’identité communautaire, en s’appuyant sur la fierté et le dynamisme culturels, et de (b) l’essor de stratégies et de projets de tourisme liés à la culture autochtone, soulignent l’importance grandissante de ces interventions pour ces collectivités et pour l’avenir de projets de coopération et de partenariats entre les communautés des Premières nations, et les autres. La documentation concernant la culture des Premières nations et des groupes autochtones aborde, en partie, des questions portant sur : des mesures visant à encourager et à appuyer la pérennité des traditions culturelles et leur évolution; la nécessité de mieux situer les pratiques culturelles autochtones par rapport aux autres traditions artistiques et culturelles; et la conception de méthodes et de mécanismes pertinents visant à faire rayonner la culture autochtone auprès d’un public plus vaste. La portée et l’importance de cette question dépassent largement les limites du présent article mais nous en soulignons ici la présence afin qu’elle fasse l’objet d’une recherche plus exhaustive. 1.1. L’état de l’activité artistique au sein des collectivités rurales La littérature faisant état de l’activité artistique locale au sein des collectivités rurales peut être plus ou moins divisée, selon deux catégories : (1) la nature et la portée de l’activité artistique rurale et, (2) la question du contenu, notamment (a) les récits locaux versus ceux qui proviennent de l’extérieur et, (b) la création personnelle versus celle à l’intention du marché touristique. (La recherche portant sur le « secteur créatif » ou sur les entreprises créatives est abordée à la section 3.) Aucun diagramme détaillé illustrant des catégories d’activités artistiques n’a été repéré dans le cadre de cette recherche. Cependant, à la lumière de la documentation consultée, il est évident que l’activité artistique au sein des collectivités rurales englobe de nombreuses facettes et caractéristiques. Par ailleurs, ces caractéristiques se révèlent davantage par leurs nuances que par leurs contrastes et leurs qualités distinctes. Une liste sommaire et préliminaire de certaines d’entre elles est présentée au Tableau 1 et ce, dans le but de souligner la complexité inhérente à toute discussion entourant l’activité artistique. 6 Une grande partie de cette recherche concerne les études portant sur le profil des auditoires pour des régions géographiques et locales particulières; ce thème n’est donc pas examiné ici. Canada 7 Commerciales et expérimentales / l’art pour l’art Collaboration sur le site 8 Duxbury et Campbell Visite avec l’engagement de la communauté (pourrait être une résidence d’artistes avec la communauté) Professionnel(s) + communauté en général Population locale* et visiteurs (touristes) Avec participation Uniques et mixtes Sporadique Commerciales et expérimentales / l’art pour l’art* Grand public et avant-garde Saisonnier et toute l’année Enfants, jeunes, adultes et personnes âgées Exportation Avec participation et en solo Nouvelle création, mentorat possible, co-apprentissage Résidence d’artistes Professionnel + professionnel Sur place + Invité combinés * En caractères gras – la caractéristique a tendance à être pondérée ici. ** Bien d’autres catégories relatives à la composition de l’auditoire pourraient être ajoutées. Références et caractéristiques culturelles Saisonnier et toute l’année Avec participation et en solo Avec participation ou en solo Calendrier Nouvelle création et présentation de l’œuvre existante / traditions Nouvelles ou existantes Population locale et visiteurs (touristes) / Exportation Activités informelles et formelles Quoi Amateur / « communauté en général, » semi-professionnel et professionnel Sur place Commerciales* et expérimentales / l’art pour l’art Régulier et sporadique Population locale* et visiteurs (touristes) En règle générale, sans participation Présentation de l’œuvre existante / traditions Tournée de type « escale » Amateur et professionnel* Invité Les complexités inhérentes aux arts : Une compilation préliminaire des dimensions et caractéristiques des activités artistiques dans les communautés rurales Principal auditoire** Nature des activités Qui Tableau 1. Les discussions qui portent sur l’activité artistique en milieu rural mettent habituellement l’accent sur l’art rural. Gard Ewell (2006) décrit l’art rural comme une activité holistique et rassembleuse, où convergent des gens de toutes les classes sociales, en précisant qu’il ne s’agit pas simplement d’une version à petite échelle des programmes artistiques en milieu urbain. En outre, Brotman (2007) remarqua, lors d’un atelier portant sur les arts et le patrimoine dans les communautés rurales, présenté par l’Observatoire culturel canadien : … L’art rural diffère de l’art urbain, mais de façon inattendue. Nous sommes portés, d’emblée, à considérer les arts comme une version à petite échelle de l’activité artistique dans les localités et les grandes villes, ou qui n’est pas de calibre professionnel, à tout le moins dans la perspective du courant dominant. Or, l’art rural s’est avéré être d’une richesse et d’une complexité en harmonie avec tout ce qui se fait dans les centres plus importants, en plus de posséder des caractéristiques distinctes qui sont justement issues d’activités propres à un milieu rural ou communautaire particulier. Pour leur part, les auteurs Brooks-Joiner & McKay (2008) ont remarqué que la qualité de la participation citoyenne dans les régions rurales et éloignées diffère de celle que l’on retrouve dans les centres plus importants. Bien que les artistes professionnels et les travailleurs culturels soient des acteurs de leur milieu dans toutes les collectivités recensées, il reste que la « pierre angulaire de la capacité culturelle », dans toutes ces collectivités est « le bénévolat et la participation communautaire » (p. 5). Mais encore, la « distinction entre les artistes amateurs et professionnels » n’a pas semblé être aussi prononcée qu’en milieu urbain (p. 5). On associe l’art rural au renforcement des capacités, à l’affranchissement, à la collaboration, à des occasions de mise en réseau élargies, et à l’épanouissement individuel et communautaire. Les projets artistiques les plus fructueux en milieu rural, sont ceux qui permettent à la communauté de sentir qu’elle acquiert de nouvelles habiletés, tout en « concevant de nouvelles structures sociales qui lui permettent de témoigner de sa vie intérieure et spirituelle » (Brotman, tel qu’il est cité par l’Observatoire culturel canadien, 2007). Un intérêt grandissant pour l’art participatif, sommairement décrit comme une synthèse de l’art communautaire et de l’art professionnel, enrichit davantage l’épanouissement potentiel lié à cette forme d’activité. Cela correspond au processus artistique de collaboration entre des artistes et la communauté, tel qu’il est décrit par le Conseil des Arts du Canada, c’est-à-dire, « un processus artistique qui engage activement dans des relations de collaboration et de création des artistes professionnels et des membres de communautés autres qu’artistiques, » et pouvant comporter des projets qui font appel aux jeunes et à l’éducation artistique (McGauley, 2006, p. 4).7 Le Littoral Arts Trust en Angleterre a tracé les premières grandes lignes de ce qu’il décrit comme la tradition émergente du « Nouvel Art Rural ». Celui-ci comporte : une diversité culturelle urbaine et rurale menée par l’art, ainsi que des partenariats d’affaires créatifs; l’appui du secteur artistique à l’égard d’organismes de la santé et de projets de la santé en milieu rural; des projets de création auprès des enfants et des jeunes en milieu rural; la promotion d’un meilleur accès aux arts pour les personnes souffrant de handicaps ainsi que pour les femmes et les aînés en milieu rural » (Hunter, 2006, p. 2). D’autres avenues possibles 7 Vous trouverez un bon aperçu de la pensée actuelle au sujet de ces pratiques dans McGauley (2006). Canada 9 incluent les arts numériques et les nouveaux médias, ainsi que le développement des industries créatives rurales (consultez Hunter, 2003-2005). En outre, on a souligné l’importance d’édifier la culture locale en y intégrant des forces externes, notamment par la présence d’artistes professionnels locaux ou étrangers, au sein d’activités communautaires locales (Brotman, 2007; Nolte, 2007). Du reste, les artistes professionnels et les bénévoles qui vivent en régions rurales se sentent éloignés des grands centres du monde de la culture, et l’apport d’influences externes « contribue grandement à minimiser [cette] solitude » (Brotman, 2007). En ce qui concerne les artistes en visite, ceux-ci se heurtent aux « spécificités de chaque région et de ses habitants, ainsi qu’à son écologie culturelle, sociale, économique et politique » et leurs attentes sont modelées par l’expérience interactive, ce qui peut servir à renouer la confiance perdue au cours d’une collaboration auprès d’un artiste professionnel (Nolte, 2007, p. 3). Deux questions de contenu se dégagent de l’ensemble de la littérature concernant les arts dans les petites collectivités rurales. Ces questions se rapportent aux choix que font les diffuseurs locaux en matière de création et de présentation et, à la nécessité de maintenir un équilibre entre la tendance à vouloir ce qui est « original », et la réceptivité de l’auditoire, ses attentes et sa survie économique : Pièces de théâtre étrangères / Récits locaux. Dans le cadre de ses travaux de recherche actuels, James Hoffman, de la Thompson Rivers University à Kamloops, en C.-B., s’intéresse au lien entre les compagnies de théâtre résidant dans les petites villes de la ColombieBritannique et leur communauté. La recherche aborde notamment la question de la responsabilité des théâtres professionnels à l’égard de leurs communautés, la nature et la compréhension de « l’engagement communautaire » ainsi que la portée et les attentes de l’auditoire local. Les compagnies de théâtre professionnelles peuvent avoir tendance à percevoir leur rôle comme étant celui d’importer, par le biais de productions, les pièces les plus branchées des grands centres urbains et, de ce fait, d’offrir à leur communauté ce qu’il y a de meilleur. Or, lorsqu’un théâtre professionnel local est « l’unique attraction » d’une petite ville, quelle responsabilité a-t-il à l’égard de la diffusion des récits locaux et du témoignage d’enjeux locaux, comparativement à celle de n’être qu’une voie d’accès pour les productions en provenance des centres (urbains) de l’extérieur? À qui la création locale s’adresse-t-elle? Bien que le phénomène ne soit pas exclusivement celui des collectivités rurales, une question découle néanmoins de la popularité grandissante du tourisme culturel (consultez la section 3); celle de la création d’œuvres à l’intention du marché touristique, comparativement à la création de « l’art pour l’art ». Dans le cadre d’une série d’entrevues menées dans la région de Prince Edward County, en Ontario, Hracks (2005) explique que la commercialisation de l’art donne lieu à des artistes qui alternent entre une création artistique à l’intention des touristes et une autre pour eux-mêmes. De la même façon, dans les entrevues menées à Parry Sound, en Ontario, Mitchell et coll. (2004) s’intéressent à la prédisposition des artistes envers la création d’œuvres d’art visuel, en vue d’un marché touristique qui s’intéresse avant tout aux paysages naturels et marins.8 Cependant, la 8 Un artiste cité dans l’article explique : « Je peins des paysages dans la région parce que je descends chaque semaine en bordure des quais à Parry Sound… Si vous voulez vivre de l’art que vous créez, vous voudrez évidemment avoir un marché… même si j’aime peindre de l’art abstrait, si je veux vendre mes œuvres ici, à Parry Sound, aux touristes qui visitent la région, je dois évidemment peindre quelques scènes locales ou des paysages et des paysages marins locaux, sinon, je ne vendrai pas mes œuvres » (Mitchell et coll., 2004, p. 159). 10 Duxbury et Campbell propension à ne produire que pour les touristes est une tendance qui divise la communauté artistique, alors que certains artistes sont d’avis que « la création de l’art pour l’art est rongée par la présence d’artistes à vocation strictement commerciale. » (Hracs, 2005, p. 70; consultez également Mitchell et coll., 2004). 1.2. Les festivals, en tant que pratiques pour l’édification d’une communauté Les festivals ruraux prennent habituellement racine dans la période des récoltes, des équinoxes et des fêtes religieuses, et ils sont étroitement liés au mode de vie rural. Les festivals ruraux s’inscrivent dans un large éventail de pratiques et d’activités culturelles, et sont typiques d’une expression culturelle élargie qui témoigne de l’appartenance au lieu et enrichit celle-ci. En tant qu’événements où « l’identité rurale s’affirme et se répète » (Gibson & Walmsley, 2007, p. 14), les festivals peuvent également servir à favoriser l’identité collective et le sentiment d’appartenance (Gorman-Murray, Waitt & Gibson, 2008). Au cours de la dernière décennie environ, « le tourisme, les festivals et d’autres événements culturels semblables sont devenus le soutien économique principal pour nombre de collectivités en région, en particulier dans le contexte des changements démographiques et industriels » (Gorman-Murray, Waitt & Gibson, 2008, p. 176). La place qu’occupent les festivals au sein du renouveau culturel rural – ainsi que les dimensions sociales et économiques de ce processus – fait l’objet d’une recherche approfondie, en Australie.9 De plus en plus, les festivals évoluent et débordent de leurs origines populaires, et sont utilisés à des fins autres, telles que l’essor économique et la création d’une marque locale distinctive. À mesure que les festivals connaissent du succès, et sont ainsi aptes à diminuer l’ampleur des responsabilités organisationnelles assignées aux bénévoles locaux, certains avantages sociaux dont bénéficiaient ordinairement la communauté, tels l’engagement communautaire et l’acquisition de compétences, sont menacés (Davies, 2007).10 Les commandites et le financement gouvernemental, tout comme la participation d’organismes professionnels, favorisent cette évolution et peuvent même ajouter une connotation et une valeur commerciales aux festivals (Connell & Waitt, 2007). En Australie, on a explicitement recours aux festivals ruraux à thèmes comme un outil de relance (Davies, 2007). Comparativement aux festivals ruraux traditionnels, organisés généralement autour de foires agricoles, ces « nouveaux » festivals mettent davantage l’accent sur les retombées économiques, les commandites et leur capacité à rejoindre un bassin géographique plus vaste (Davies, 2007). De tels festivals peuvent être perçus comme des « imposteurs » par leur communauté s’ils n’ont pas de liens organiques avec l’identité du lieu (Brennan-Horley, Connell & Gibson, 2007). Ces festivals sont souvent le fruit d’une 9 Un projet triennal de festivals du conseil australien sur la recherche (Australian Research Council Festivals Project), intitulé « Reinventing Rural Places: The Extent and Impact of Rural Festivals in Australia, » a cherché à documenter la portée et l’importance des festivals pour les collectivités et les économies rurales. Ce projet a tenté de mesurer l’envergure du phénomène des festivals culturels et communautaires dans l’Australie rurale, et comment cela a contribué à réorienter les économies et les collectivités rurales vers un avenir « postproductiviste » (au delà de l’agriculture). En 2007, le réseau de recherche du conseil australien sur la recherche (ARC Cultural Research Network) a tenu un colloque sur les « Festival Places: Revitalising Rural Australia » qui mettait en évidence 21 présentations portant sur le rôle des festivals dans la revitalisation culturelle rurale. Celles-ci seront publiées dans un livre (en cours). 10 Un autre point de vue sur ce déplacement de la base populaire au profit du personnel, pourrait donner lieu à un développement stable des compétences locales. Néanmoins, la nature de l’engagement communautaire serait changée qualitativement. Canada 11 stratégie de tourisme et, lorsqu’ils ont du succès, ils peuvent servir à dynamiser une communauté et à façonner de nouvelles identités locales. Avec plus de 2 800 festivals ruraux en Australie11, le recours à un thème « kitsch », dans ce cas « Elvis » (consultez Brennan-Horley, Connell & Gibson, 2007), permet à un festival ou à une parade régionale de se distinguer des autres. Étonnamment, une autre étude révèle que les festivals régionaux en Australie, bien que financés par les conseils municipaux locaux, sont rarement intégrés formellement aux stratégies de développement économique local. En fait, les auteurs Gibson & Walmsley (2007) sont d’avis qu’une telle contradiction entre la portée locale et l’« invisibilité au sein des politiques » illustre bien pourquoi nombre de festivals régionaux sont mal perçus ou incompris par les spécialistes en planification. 1.3. Les activités de tournées Les tournées sont un moyen d’accéder à des productions professionnelles de haute qualité, elles élargissent le marché du travail au sein des collectivités rurales et sont source d’expériences enrichissantes pour les diffuseurs et l’auditoire : Les tournées en régions rurales ne sont pas un piètre substitut au genre d’expérience qu’il est possible de vivre dans une salle de concert en milieu urbain. La différence est qualitative et se manifeste à plusieurs égards. Les installations ne sont peut être pas d’aussi bonne qualité, mais l’intimité du lieu, l’occasion de rencontrer les artistes, et le fait que la plupart des membres de l’auditoire se connaissent – confèrent aux prestations présentées dans une salle de village un avantage indéniable. À n’en pas douter, ces attributs sont aptes à enrichir l’expérience de l’auditoire, qui se déplace parfois pour des raisons qui n’ont rien à voir avec un intérêt pour les arts, et celle des interprètes, qui ne peuvent pas s’attendre à ce que le public connaisse leur répertoire. Dès lors, les artistes et le public estiment invariablement que ces prestations sont captivantes, mémorables et imbues d’un attribut particulier qui leur confère une valeur unique. (Matarasso et coll., 2004, p. 7) Une large part de la littérature portant sur les tournées aborde la question de leurs retombées (p. ex. : Matarasso et coll., 2004; Hamilton & Scullion, 2004) ou procède à l’évaluation des programmes de tournées tout en formulant des recommandations concernant les bonnes pratiques de tournées en milieu rural (p. ex. : O’Leary, 2006). Par ailleurs, les rapports émis par les bailleurs de fonds mettent plutôt l’accent sur l’importance des activités de tournées en matière d’accès élargi et de développement de nouveaux publics dans le contexte de productions artistiques et culturelles professionnelles et de qualité, dans les régions rurales (p. ex. : Conseil des Arts du Canada, 2001, 2008; Hunter, 2006). Dans le cadre d’une étude à grande échelle portant sur les tournées en milieu rural en Angleterre et au Pays de Galles, François Matarasso et coll. (2004) décrivent comment les « dispositifs de tournées » occupent une place privilégiée au sein de l’écosystème artistique 11 Plus de 2 800 festivals figurent dans la base de données de festivals « Reinventing Rural Places » en Australie rurale. 12 Duxbury et Campbell rural, en partie à cause de l’importance de leurs partenariats avec les promoteurs locaux.12 L’auteur note « une hausse évidente de l’activité artistique en milieu rural, particulièrement celle qui s’inscrit dans des projets autonomes reliant des artistes professionnels et des communautés », et considère les tournées rurales comme une composante de ce phénomène (p. 5). En outre, cette étude a démontré que « les tournées en milieu rural pourraient avoir une incidence sur la cohésion communautaire en offrant un espace commun et confortable, où les membres des collectivités rurales peuvent se retrouver et discuter. Il a été constaté que les tournées en milieu rural ont un impact important sur le développement communautaire dans ces régions car les tournées ont donné lieu à de nouvelles orientations qui permettent de concevoir de nouveaux projets et de nouvelles organisations communautaires. Par ailleurs, cette étude fait [également] état d’un certain nombre d’enjeux propres aux tournées en région, notamment le bénévolat et le financement » (tel qu’il est cité dans Smiles, 2006, p. 13). Quoique la plupart de la documentation concernant les retombées des activités de tournées mette l’accent sur la communauté, certaines études se penchent également sur l’incidence de cette activité sur ceux qui « prennent la route ». Par exemple, le projet de recherche intitulé Rural Virtues s’intéresse à la portée et au rôle des tournées artistiques professionnelles dans les régions rurales en Écosse (Hamilton & Scullion, 2004). L’étude était divisée en trois sections : (1) un rappel historique de quatre ou cinq compagnies et l’expérience vécue par leurs membres lors de tournées en région, (2) une étude axée sur les cadres stratégiques et de financement afin d’évaluer la disposition et les politiques des agences connexes, et rendre compte de la diversité des bailleurs de fonds qui appuient les activités de tournées en milieu rural, et (3) des études de cas réalisées par Dumfries et Galloway, et portant sur l’incidence des tournées artistiques sur les collectivités rurales. Parmi les constats, le rapport souligne « la problématique à laquelle font face les agents de tournées installés en région, qui tentent de contribuer à la diète culturelle grâce à l’essor de talents locaux. »13 Pour sa part, O’Leary (2006) souligne l’importance d’affranchir les collectivités locales en les incitant à prendre contrôle de leur environnement culturel. En Irlande, cette approche a été facilitée par la création et l’appui de réseaux artistiques locaux dans ces régions. Par ailleurs, la Regional Arts Australia (2005a) souligne également l’importance de contrôler les activités de tournées et d’y participer localement. Cette agence a par ailleurs constaté que si les régions éloignées apprécient les expériences artistiques venues de l’extérieur, il est néanmoins « crucial que ces programmations importées soient mises de l’avant par la communauté plutôt que par une ‘gestion externe’ » (p. 12). 1.4. Le rôle des technologies informatiques et de l’information Les capacités, le potentiel et l’incidence des technologies de l’information et informatiques – surtout l’accès à large bande – sont des thèmes récurrents dans l’ensemble de la littérature portant sur les collectivités rurales. Or, jusqu’à maintenant, cette documentation ne s’est pas particulièrement intéressée à la façon dont cela pourrait avoir une incidence sur la production culturelle ou le développement 12 Le rapport indique que les projets touristiques, qui mettent en contact des promoteurs bénévoles avec des artistes professionnels, ont été actifs en Grande-Bretagne rurale pendant près de 25 ans. En 2003, au moins 40 projets touristiques étaient actifs en Angleterre et au Pays de Galles. 13 Une description du rapport figure sur le site Web de la FICAAC à : http://www.ifacca.org/publications/2004/01/01/the-same-but-different-rural-arts/ Canada 13 de nouveaux auditoires.14 Pourtant, trois tendances incitent à se préoccuper des facettes culturelles et créatives de ces technologies : (1) le souhait grandissant d’attirer une « classe créative » de travailleurs au sein des collectivités de toutes tailles, (2) l’importance et la tendance courante des pratiques de création et du partage de l’information sur Internet, particulièrement chez les jeunes, où la fonctionnalité d’usage dans Internet revêt une dimension beaucoup plus sociale qu’auparavant et, (3) l’intégration du réseau Internet, en tant qu’outil de marketing visant à accéder à un public plus important et à élargir les marchés de produits artistiques et de services dérivés (ce sujet est abordé plus en détail à la section 3). Le désir des collectivités d’attirer une « classe créative » de travailleurs rend plus évidente l’importance de la technologie à large bande, qui permet le télétravail et offre aux travailleurs la possibilité de se relocaliser en région rurale, tout en préservant leurs moyens d’existence actuels. Cela signifie également que le travail de création commence à faire partie de la notion de « développement économique ». Par exemple, Donald (2008) affirme que le dispositif d’accès à large bande sur Internet est l’un des facteurs déterminants qui permet d’attirer des industries créatives dans la région de Prince Edward County, en Ontario. Par ailleurs, l’absence d’un tel accès représente « un obstacle important à la créativité (ainsi qu’à la promotion et à la mise en marché de la créativité) », et une entrave à la capacité de réaliser complètement le potentiel créatif lié à l’économie de la région de PEC » (p. 24). Des constats semblables ont été énoncés au Royaume-Uni : le East Midlands Rural Creative Industries Regional Report a conclu que « les nouvelles technologies, notamment celle de la large bande sont des moyens déterminants pour ‘lancer’ les nouvelles entreprises et permettre une croissance mesurable chez celles qui sont déjà établies. Par ailleurs, ces technologies se sont avérées cruciales pour toutes les entreprises et les ministères interrogés dans le cadre de ce rapport. Là où la technologie à large bande n’est pas encore disponible, ce manque a eu une incidence majeure sur l’efficience » (Burns & Kirkpatrick, 2008b, p. 30). Dans cette région, un haut pourcentage des entreprises créatives sont parvenues à « opérer à partir de n’importe quel endroit où l’accès Internet est facile ». Après avoir réglé cette question, les entreprises ont réalisé que « l’attrait de coûts moindres et d’une meilleure qualité de vie en milieu rural » était des considérations significatives (p. 43). En outre, l’étude a révélé la présence croissante d’entreprises électroniques qui font leur démarchage par l’entremise du publipostage direct à partir des bases de données de leurs clients. Cette dimension du développement économique a été liée (informellement) à des notions élargies du développement communautaire. Par exemple : un grand nombre d’anciens résidents des milieux urbains se lancent dans l’entreprenariat au sein de leur nouvelle région rurale (Labrianidis, 2004), et nombre des nouveaux travailleurs culturels qui s’installent en milieu rural ont tendance à être des citoyens actifs et ils sont souvent les chefs de file de nouvelles productions culturelles et de nouveaux projets communautaires (Jones, 2004; Cuesta, Gillespie & Lillis, 2005). 14 L’approche générale est reflétée, par exemple, dans Rural Communities as the Cornerstone, où le potentiel de la large bande est décrit en termes de fonctionnalités de base sans référence aux utilisations telles que le développement culturel et créatif ou l’augmentation de l’identité et de la promotion communautaires : « La large bande joue un rôle important dans les collectivités rurales et éloignées du Nord, sur le plan de leur connectivité à l’échange d’information à l’échelle mondiale et de leur capacité à faire concurrence au marché mondial croissant. En outre, l’accès à large bande est également perçu comme une exigence essentielle en matière d’infrastructure pour les collectivités rurales, en ce qui a trait à leur durabilité et à leur viabilité à long terme, à leur accès aux services tels que les services bancaires, les soins de santé et la formation à distance, et à leur capacité à créer des réseaux et des connexions entre les collectivités » (Partenariat rural canadien, 2003, p. 4). 14 Duxbury et Campbell En ce qui concerne le processus de création, les technologies informatiques et de l’information sont de plus en plus intégrées en tant qu’outils de création, dans le but de relier des producteurs culturels entre eux et de favoriser la cocréation. Par ailleurs, la diffusion universelle et immédiate du contenu local et mondial par Internet, change la nature même de l’inspiration artistique, de sa visibilité et de sa portée. Elle peut également modifier la perception du lieu et transformer le sentiment « d’isolement » en un « nœud » interactif, au sein de ces réseaux de connectivité. Avec l’évolution rapide, depuis quelques années, des capacités de partage de contenu et de cocréation par l’entremise de ressources disponibles sur Internet, la dimension socioculturelle des communications par Internet et celle du partage de contenu, sont désormais aussi importantes que celle des fonctions plus administratives liées à ces technologies. Dans les deux cas cependant, le terme clé est celui de branchement – tant dans une perspective socioculturelle, comme outil servant à briser le sentiment d’isolement, que dans celle de compétences fonctionnelles dans les domaines économique/commercial/administratif, en tant qu’outil favorisant l’essor et la réinvention économiques. Bowles (2008) décrit l’importance du rôle de ces technologies au sein du mode de vie rural, qu’il décrit comme une sorte de système d’appui aux modes de vie ruraux revitalisés : Les jeunes utilisateurs de médias qui vivent dans des localités à la campagne, sont maintenant intégrés à un réseau social national et mondial, plutôt que d’être confinés aux sous-cultures qui sont présentes dans ces lieux. Les parents, autrefois isolés en milieu rural, peuvent maintenant obtenir des conseils et consulter la communauté par Internet; et les propriétaires d’entreprises ou même les travailleurs autonomes de la mouvance tree-changing15 (changement intérieur) qui œuvrent dans le domaine de la culture, peuvent aisément rencontrer leurs clients et payer leurs factures à partir d’une multitude d’endroits. (p. 94) 15 En Australie, la majorité de la migration urbano–rurale a été qualifiée de sea-change (vague de changement). Depuis peu, sa version à l’intérieur des terres est connue sous le terme de tree change (changement intérieur) : « De telles expressions évoquent principalement des images de couples retraités ou semi-retraités qui s’installent dans des régions côtières et intérieures agréables en raison du mode de vie qu’elles privilégient et, un mouvement que l’on qualifie ailleurs de contre-urbanisation ou d’embourgeoisement rural » (Australia Humanities Review, 2008, p. 55). Canada 15 2. Le contexte communautaire propice à l’épanouissement et à la vitalité du secteur des arts Les arts ont toujours été le ciment qui unit les communautés rurales. Qu’il s’agisse de répétitions de concerts d’opéra amateur, le jeudi soir, ou de tournées réalisées par des compagnies de théâtre professionnel, tel le Wales’ Theatr Bara Caws, qui a recours à des bénévoles pour présenter ses spectacles dans les salles communautaires, les arts font partie du tissu social des sociétés rurales. Mais, il ne s’agit pas que de divertissement puisque, sans les avantages importants liés aux arts, la vie en région serait une expérience beaucoup moins riche, moins heureuse et davantage marquée par l’isolement. (Voluntary Arts Network, 2006, p. 2) Un des thèmes phares de ce rapport est celui du lien étroit entre les arts – sous toutes ses formes – et la vitalité d’une communauté. Une participation accrue dans les arts peut servir à attirer de nouveaux résidents et de nouvelles entreprises, à mousser l’engagement civique, à créer de nouveaux espaces de rencontres, et à jeter des ponts entre les classes sociales et ethniques – contribuant ainsi à renforcer les collectivités. Les arts peuvent non seulement avoir un profond effet sur la capacité d’une localité à survivre, mais également, avec le temps, à prospérer. … [Or] pour qu’il y ait progrès, les idées de relance ne peuvent pas que provenir des artistes ou être à leur seul avantage. (Cuesta, Carlo et associés, 2005, Forward, p. 70) L’incidence de l’activité artistique sur la vitalité communautaire, sur ses participants directs et ceux qui sont passifs, est documentée dans plusieurs études. Par exemple, Guetzkow (2002) en examine plusieurs dans le but d’illustrer comment la revitalisation communautaire est favorisée par la participation à des activités organisées (consultez le tableau 2). Le document intitulé Use or Ornament? fait état d’un vaste ensemble de retombées découlant d’une participation directe dans des activités artistiques (Matarasso, 1997). Par ailleurs, une analyse de la littérature menée dans le cadre de l’étude Shifferd (2005) démontre qu’il existe « de solides preuves empiriques selon lesquelles la présence d’artistes, d’activités artistiques informelles et d’organismes artistiques dans une collectivité contribuent de bien des façons à la qualité de vie communautaire », et confirme que « l’activité créatrice dépasse largement les limites de l’activité artistique organisée et formelle » (p. 6). À mesure que les collectivités rurales décident de s’engager dans la voie du renouveau ou du développement par l’entremise d’une démarche artistique, de quelle façon la documentation de recherche peut-elle jeter un éclairage nouveau sur ces décisions et ces stratégies? De quelle façon les biens culturels peuvent-ils être rehaussés et utilisés afin de maximiser leurs avantages? Quelles sont les étapes de développement propres à ces situations? Quels en seront les choix? Trois thèmes sont particulièrement pertinents à cet égard : (1) les composantes déterminantes de l’édification de collectivités artistiquement actives, (2) la destruction créative potentielle et, (3) le renouveau identitaire d’une collectivité par l’entremise des arts. 16 Duxbury et Campbell Augmente la possibilité et la propension qu’un individu s’implique dans les arts. Libère le stress. Augmente les occasions de satisfaction. Réduit la délinquance chez les jeunes à risque élevé. Augmente les occasions d’extériorisation et de satisfaction. Crée des relations interpersonnelles et promeut le bénévolat, ce qui améliore la santé. Matériel / Santé Augmente la performance scolaire. Augmente le raisonnement visuospatial (l’effet Mozart). Augmente le capital culturel. Améliore le capital humain : les compétences et les aptitudes créatives. Améliore le sentiment d’appartenance ou d’attachement d’un individu envers une communauté. Accroît le sentiment d’efficacité individuelle et d’estime de soi. Cognitif / Psych. Individu Accroît la tolérance envers autrui. Augmente la capacité de travailler avec autrui et de communiquer des idées. Crée des réseaux sociaux individuels. Interpersonnel Économique Plus forte probabilité de revitalisation. Favorise un « milieu créatif » qui stimule la croissance économique au sein des industries créatives. Augmente l’attrait de la région chez les touristes, les entreprises, les gens (particulièrement les travailleurs hautement spécialisés) et favorise les investissements. Augmente la propension à participer aux arts chez les membres de la communauté. Améliore l’image et le statut de la communauté. Conduit à des normes communautaires positives telles que la diversité, la tolérance et l’expression libre. Édifie l’identité et la fierté communautaires. Accroît le sentiment d’identité et d’efficacité collectives. Culturel Communauté Les gens (particulièrement les touristes et les visiteurs) consacrent de l’argent pour assister à des événements artistiques et au profit des entreprises locales. De plus, les dépenses locales engagées par ces lieux d’arts et les entreprises fréquentées ont des effets multiplicateurs indirects. Salaires à verser aux employés rémunérés. Comment les arts ont des répercussions sur les communautés Ce tableau approfondit une typologie proposée par Kevin McCarthy (2002). Source : Guetzkow (2002) Présence d’artistes et d’organismes et d’établissements voués aux arts Participation de l’auditoire Participation directe Tableau 2. Canada 17 Réduit le crime et la délinquance dans les quartiers. Promeut la diversité culturelle dans les quartiers. Les gens qui, autrement, ne seraient pas entré mutuellement en relation, se rassemblent. Crée du capital social en faisant participer les gens, en reliant les organisations entre elles et en offrant aux participants de l’expérience en matière d’organisation et de travail avec l’administration municipale et les organismes sans but lucratif. Social 2.1. Les composantes essentielles à l’édification de communautés activement engagées dans la pratique artistique Existe-t-il des composantes essentielles ou des thèmes communs nécessaires à l’édification de la vitalité des arts à long terme, en milieu rural et dans les banlieues « en périphérie »? À la fin de l’année 2004, le Metropolitan Regional Arts Council commandait une étude portant sur dix petites collectivités du Minnesota, dans le but de se pencher sur cette question et d’y répondre. Cette étude s’inscrivait dans une analyse de la littérature et dans l’élaboration d’un modèle logique issu du secteur du développement communautaire par les arts. L’analyse de la littérature dont fait état cette étude, révèle qu’il existe peu ou pas de documents déjà publiés qui abordent ce même sujet. Plus précisément : Sous quelles conditions le secteur des arts au sein des petites collectivités rurales et des banlieues en périphérie parvient-il à s’épanouir et à prospérer? Et, quel est le processus lié au développement artistique dans ces communautés? (Shifferd, 2005). De ce fait, Shifferd (2005) et Rodning Bash (2006) élaborent ou déterminent, par l’entremise de leur étude : 1. un modèle conceptuel de développement communautaire en milieu rural en trois étapes; 2. des facteurs environnementaux à l’appui du développement culturel au sein de collectivités faisant preuve d’une présence artistique émergente; 3. des caractéristiques et des attributs propres aux collectivités artistiquement dynamiques (c.-à.-d. ayant atteint un seuil de développement viable); et 4. des ingrédients clés pour édifier une collectivité artistiquement engagée. Shifferd (2005) considère l’écologie culturelle des collectivités selon un continuum – « de l’état embryonnaire, éphémère et marqué par l’isolement, à un état où l’activité est hautement intégrée et soutenue, mettant à profit un nombre important d’acteurs » (p. 8). En outre, le contexte au sein duquel l’activité créatrice s’exerce, englobe une vaste gamme de facettes, allant du « personnel et de l’informel », au « structuré et à l’institutionnalisé ». Dans cette étude, toutes les composantes sont jugées essentielles à l’environnement culturel d’une communauté saine et elles sont considérées comme étant d’égale importance. Trois étapes de développement artistique ont été déterminées parallèlement à ce continuum, soit : le développement émergent, le développement durable et le développement mature (consultez le tableau 3). Le développement émergent se caractérise par l’organisation du leadership (c.-à.-d. par la coalescence d’un groupe d’instigateurs) et par la présence d’un ensemble d’activités artistiques informelles et partagées, auxquelles les gens peuvent participer. Le développement durable est marqué par l’élargissement de réseaux et de collaborations, par la participation à des activités artistiques régulières et dans diverses disciplines, par l’engagement civique, par la présence d’une « masse critique » d’artistes, ainsi que par la présence d’un groupe d’intervention établi, dans le domaine des arts. Le développement mature, quant à lui, se définit par la place centrale qu’occupent les arts au sein du développement communautaire, par la présence d’une infrastructure organisationnelle, comportant une ou plusieurs installations, ainsi que par la présence d’artistes établis et d’entreprises liées aux arts. Un exemple de la phase du développement mature est celui d’une communauté devenue une destination artistique (Rodning Bash, 2006). 18 Duxbury et Campbell Le modèle illustre également, intercalés entre ces étapes, des aspects de la collectivité élargie qui sont nécessaires pour parvenir à « intégrer graduellement les arts dans les grandes structures de la vie communautaire », notamment les attitudes de base et les valeurs jugées essentielles à « l’épanouissement fertile du secteur artistique » (p. 9). Le modèle est présenté selon une structure logique et propose une mise en contexte permettant de mieux saisir un processus. Il ne s’agit donc pas d’un modèle de causalité du développement culturel. Dans le cas des collectivités faisant preuve d’une présence artistique émergente (c.-à.-d. les collectivités plus actives), il a été constaté que quatre facteurs environnementaux fondamentaux servent à soutenir le développement culturel. Ces collectivités : a. se distinguent par l’importance accrue qu’elles accordent à l’histoire et à l’appartenance au lieu; … b. démontrent une approche œcuménique à l’égard des diverses croyances religieuses et elles font preuve d’une ouverture sur la diversité culturelle [c’est un constat provisoire]; … c. accueillent une variété d’activités artistiques informelles présentées dans divers lieux; elles mettent l’accent sur les projets de participation; d. font preuve d’un leadership apte à regrouper les défenseurs des arts. (Shifferd, p. 37) Les collectivités artistiquement actives (celles ayant atteint l’étape du développement durable) étaient des localités situées dans des emplacements géographiques bien définis, au sein desquelles « un pourcentage important de citoyens prennent part à l’activité créative, que ce soit en tant que membre de l’auditoire, ou comme apprenant, mentor ou créateur et, où ces initiatives créatives donnent régulièrement lieu à des interactions sociales et, où l’activité culturelle et artistique est largement reconnue comme un élément déterminant de la cohésion communautaire et du capital social » (Shifferd, 2005, p. 8, italiques ajoutées). En règle générale, les collectivités les plus artistiquement actives dénotent les caractéristiques ou les qualités suivantes : 1. les meneurs et les partisans sont liés à de vastes réseaux communautaires; 2. une masse critique de meneurs et de partisans est atteinte, il ne s’agit pas seulement de un ou deux individus; 3. les meneurs forment des coalitions avec d’autres groupes communautaires; 4. un groupe de défenseurs et de responsables des arts est établi et s’exprime; 5. les arts sont perçus, par des meneurs clés à l’extérieur du domaine des arts, comme étant essentiels au bien-être communautaire; 6. la participation aux activités artistiques est délibérément inclusive : de toutes les générations et de tous les groupes sociaux; 7. les festivals communautaires les plus importants comportent des activités artistiques; Canada 19 Organisation du leadership • Groupes ou lieux communautaires qui comprennent une activité artistique : école, église, etc. • Gens qui font de l’art de façon informelle : communauté, théâtre, groupe de musique, chorale, visualistes, guildes de « métiers » Activité artistique • L’émergence d’un groupe consultatif sur les arts, peut-être dans le cadre d’un autre lieu de rassemblement communautaire • Chaque meneur attire ou crée un réseau aux fins d’organisation et de défense des intérêts Coalescence d’un groupe d’« instigateurs » des arts Source : Shifferd (2005). Légèrement adapté pour ce document. • Une intervention planifiée • Une représentation, exposition ou célébration spéciale qui suscite l’intérêt et la motivation Événements catalytiques • Connaissance de la localité et liens au cœur de celle-ci • Passion pour l’art • Expérience de vie avec un ou plusieurs types d’arts; formation (officielle/ informelle), participation, encouragement des parents. Une personne « incitative » (Champion/Meneur) • Expression artistique au sein de la vie spirituelle de la communauté • Une tradition, peut-être ethnique, d’une activité artistique p. ex., groupe de musique municipal, « objets d’artisanat » fabriqués par des femmes • Valoriser l’histoire, le sens d’un lieu en faisant appel à une partie importante de la population locale • Valoriser les arts destinés aux jeunes Attitudes et valeurs Conditions qui peuvent faciliter l’activité artistique Phase du DÉVELOPPEMENT ÉMERGENT • Changement économique (à la hausse ou à la baisse) qui pousse à prendre en considération les arts comme solution • Lieux où la création artistique s’effectue au cœur de la communauté : école, bibliothèque, parc, galerie, rue principale, musée • Couverture médiatique qui fait connaître les activités artistiques • Réseau élargi de soutien envers d’autres secteurs d’influence communautaire • Reconnaissance communautaire de la valeur des arts • Ressources et financement externes Reconnaissance et croissance Autres facteurs : Phase 2 du Développement émergent • Un sens accru de l’engagement civique dans les arts, y compris les politiques et les projets • Réseautage et collaboration entre les groupes et les artistes œuvrant dans le domaine des arts • Accroître la participation entre les catégories démographiques • Un groupe d’intervention et d’organisation établi, p. ex., un conseil des arts • Une masse critique d’artistes, peut-être nonprofessionnels • Représentations dans divers lieux de présentation • Activité artistique régulière dans plus d’une discipline; p. ex., concerts dans les écoles/ expositions, groupes de poètes et d’écrivains, expositions d’arts visuels, groupe de musique, chorale, pièces de théâtre Phase du DÉVELOPPEMENT DURABLE Modèle logique : Ce qui fait prospérer les arts dans les petites villes rurales? Liens hypothétiques Facteurs contextuels : Tableau 3. • un investissement important dans les installations et le marketing. • un environnement naturel ou culturel propice au tourisme; Dans quelques cas, l’ajout des éléments suivants : • Information et formation • Investissement important en temps et en argent fait par des particuliers locaux; un ou plusieurs « anges » du domaine des arts • Un lieu physique destiné à l’activité artistique; rue principale achalandée • Reconnaissance apportée par des bailleurs de fonds et des partisans locaux supplémentaires dans le domaine des arts • Soutien monétaire et organisationnel de la part du gouvernement et du milieu des affaires Autres facteurs : Intégration du secteur des arts Canada 20 La communauté devient une destination artistique • Une forte infrastructure organisationnelle et d’intervention, y compris la diffusion de l’information et la formation • Une ou plusieurs installations; théâtre, centre des arts d’interprétation ou centre des arts visuels • Les arts sont perçus comme étant au cœur du développement communautaire; des projets correspondent à cette idée • Entreprises liées aux arts • Les artistes peuvent vivre à l’aise et travailler sans difficulté • Les artistes servent d’aimant pour d’autres artistes, professionnalisation de la communauté artistique Phase du DÉVELOPPEMENT MATURE 8. toutes les formes d’expression artistique sont reconnues, qu’elles soient formelles ou informelles; 9. la participation est encouragée; 10. une minorité de ces collectivités considère également les arts comme une commodité pouvant attirer les visiteurs. (Rodning Bash, 2006, p. 13) Dans sa synthèse des constats issus de l’étude des collectivités du Minnesota, Rodning Bash (2006) a déterminé cinq composantes clés pour l’édification d’une collectivité artistiquement active. Celles-ci se retrouvent également dans d’autres documentations, et elles sont notées ici. 1. Le contexte social sous-jacent : des attitudes et des valeurs orientées vers l’acceptation des différences, un accueil ouvert et un profond sentiment d’appartenance au lieu Brown (2002) fait valoir que la vitalité de l’art au sein des petites villes rurales est alimentée par la « véritable passion » des artistes locaux et des amoureux de l’art, mais que le défi est de trouver des ressources humaines suffisantes pour continuer à mener les activités. Pour sa part, Shifferd (2005) confirme ces observations et il ajoute : « l’expérience de la participation aux arts dans les petites villes est issue de l’engagement des gens à l’égard de la valeur de la créativité et du défi que représente la création d’une œuvre de beauté, et elle renforce cet engagement. » (p 39). De la même façon, l’investissement local (ou interne) et l’appui des petites entreprises locales ont été déterminants pour les régions rurales des East Midlands. Les auteurs Burns & Kirkpatrick (2008b) ont souligné la nécessité de privilégier l’innovation créative locale, en misant sur la substitution des importations, lorsque les produits créés localement remplacent ceux qui auraient été rapportés à l’occasion de déplacements dans des villes et des localités de l’extérieur. Cette fierté d’appartenance au lieu – et envers les entreprises qui y sont installées– renforce le taux de réussite des petites entreprises et des autres organismes. 2. Les arts informels : Valoriser les arts dans la vie de tous les jours Le travail qui sert à valider et à édifier les arts informels contribue à élargir les assises de la participation aux arts. De plus, la tenue d’un événement artistique spécial peut servir à stimuler davantage l’innovation et le développement au sein de ce secteur (Rodning Bash, 2006). Dans ce contexte, des « interventions de la part des bailleurs de fonds », qui sont planifiées et bien structurées peuvent être des sources d’appui extrêmement importantes pour les groupes d’art locaux et leurs défenseurs. (p. 17) 3. Un leadership à la vision élargie du développement culturel et d’une approche favorisant l’autonomisation Shifferd (2005) a constaté, dans son étude, un certain nombre de particularités liées au leadership artistique, qui sont importantes pour le développement culturel : Canada 21 a. Les meneurs doivent être aptes à attirer un groupe, une masse critique, de partisans afin de partager les tâches liées à la programmation et aux interventions. Ils doivent être bien intégrés aux structures d’influence communautaire plus importantes. Dans cette étude, les meneurs les plus efficaces étaient des résidents établis de longue date et respectés par les résidents de leur localité. Il faut cependant noter qu’il est assurément possible pour un individu d’apprendre à tisser les liens nécessaires à un leadership efficace. Par ailleurs, il n’est pas absolument nécessaire d’être résident de « longue date » d’une communauté pour être un meneur des arts efficace. b. Le groupe de meneurs doit établir des coalitions et des collaborations avec d’autres regroupements civiques afin que le secteur des arts soit bien intégré à l’ensemble des projets et des plans de développement communautaire (Rodning Bash, 2006, p. 19). 4. Les réseaux sociaux : Leur intégration aux structures élargies de la vie communautaire Différents membres de la communauté apprécieront les arts pour différentes raisons, qu’il s’agisse de raisons extrinsèques (c.-à.-d. que les arts sont un attrait pour les visiteurs, et contribuent ainsi à la vitalité économique de la localité), ou intrinsèques (c.-à.-d. « pour le plaisir de vivre des expériences plus riches grâce aux arts, et pour rehausser la qualité de vie en général »), ou encore, pour les avantages qui découlent des arts et de leur capacité à rassembler les gens, à rehausser le sentiment d’appartenance au lieu, à renforcer la cohésion sociale, à surmonter les différences, et à « favoriser la réconciliation, là où il y a des conflits » (Rodning Bash, 2006, p. 20). Les collaborations et les partenariats sont importants pour le développement de l’écosystème artistique d’une communauté et il est possible d’appuyer l’acquisition des compétences qui s’y rattachent. 5. Soutien au développement de l’infrastructure L’infrastructure comporte les lieux et les espaces créatifs, ainsi que l’infrastructure organisationnelle, tels les organismes à but non lucratif et les réseaux sociaux; les écoles et particulièrement, les programmes parascolaires; ainsi que l’appui de la municipalité, des entreprises commerciales et des autres investisseurs. Rodning Bash (2006) souligne que la création d’un groupe d’appui communautaire formel, responsable des interventions et de la coordination en matière de culture, a été particulièrement importante pour les communautés citées dans l’étude Minnesota. Dans le même esprit, Burns & Kirkpatrick (2008b) exhortent à la « création de réseaux plus solides au sein du secteur culturel » et à une « meilleure coordination des organismes du secteur public afin d’appuyer les industries créatives en milieu rural » (p. 33). L’étude des East Midlands incite également à « une meilleure concertation entre les industries créatives et culturelles, les secteurs du tourisme et du patrimoine, et les programmes axés sur le placemaking (édification de la qualité du lieu) », ainsi qu’à « un maillage et à une coordination plus efficaces en matière d’acquisition des compétences, en général, et d’une éducation complémentaire et supérieure, en particulier » (p. 33). 22 Duxbury et Campbell Dans l’ensemble, la littérature met l’accent sur l’importance d’un soutien élargi à l’endroit des projets artistiques communautaires, car celui-ci est essentiel à leur succès et il en maximise les avantages. C’est là une dimension dont fait état un large éventail de rapports et d’études, notamment les trois études du Minnesota (Cuesta, Carlo et associés, 2005; Shifferd, 2005; et Rodning Bash, 2006), la stratégie artistique rurale pluriannuelle Littoral Arts Trust, en Angleterre (2001-2002; Hunter, 2003-2005, 2006 et 2008), ainsi que la recherche canadienne dans la région de Prince Edward County, en Ontario (p. ex. : Baeker, 2008; Donald, 2008). 2.2. La possibilité d’une destruction créative Alors que Shifferd (2005) et Rodning Bash (2006) terminent l’élaboration de leur modèle illustrant le potentiel de certaines collectivités artistiquement actives à devenir une « destination artistique » et une attraction touristique importante, Kebir & Crevoisier (2008), Mitchell (1998) et Mitchell & de Waal (2008) abordent quelques-unes des retombées négatives qui peuvent se manifester lorsque la culture et le patrimoine d’une collectivité font l’objet d’une marchandisation à l’excès, et qu’ils sont victimes de leur propre succès, menant ainsi à une « destruction créative ». Les deux séries de documentation servent donc à contrebalancer le propos et s’inscrivent dans la continuité du développement potentiel. Pour leur part, Kebir & Crevoisier (2008) expliquent que si le legs, le patrimoine et la culture contemporaine communautaire sont à même de devenir des ressources économiques importantes, la marchandisation de certaines composantes culturelles peut également transformer une collectivité en « spectacle folklorique : une transformation du style Disneyland ou encore, celui d’un musée vivant » (p. 67). Si ces forces sont prédominantes, la collectivité risque « de perdre pied et de perdre sa dynamique propre » (p. 67). Cependant, les auteurs se disent optimistes que « certaines collectivités dynamiques trouveront également la force de tirer avantage de leurs ressources culturelles et de continuellement en inventer de nouvelles, tout en préservant leurs revenus et leur spécificité » (p. 68). Le modèle de « destruction créative » proposé par Mitchell (1998) présente une courbe de développement s’appuyant sur le lien qui existe entre trois variables : l’investissement entrepreneurial, la consommation de marchandises liées au patrimoine et, la fin de l’idylle rurale. S’inspirant de la « région étudiée » de St. Jacobs, en Ontario, Mitchell fait valoir que la destruction créative peut survenir lorsque les symboles propres au patrimoine d’une région sont exploités comme des marchandises et ce, dans le cadre de stratégies de relance rurale et de tourisme (consultez également Mitchell & Coghill, 2000, une étude qui s’intéresse à la ville d’Elora, en Ontario). Si cette approche est apte à générer un capital accru pour les collectivités, elle peut également contribuer à la destruction de l’image même du patrimoine rural qu’elle vise à reproduire. Par exemple, la marchandisation axée sur l’engouement pour les régions rurales peut amener à remplacer des sites originaux pour y bâtir des centres commerciaux et des sites patrimoniaux reconstitués – ce qu’on appelle une consommation de l’esthétisme. Dix ans plus tard, Mitchell & de Waal (2008) sont revenus dans la région et ont constaté que la destruction créative s’y était poursuivie. Ils évaluèrent alors l’orientation de cette évolution, à la lumière de la littérature récente la plus pertinente en matière de transformation de l’espace rural. Les auteurs en conclurent que « pour vraiment comprendre le processus de transformation, il faut savoir mesurer les demandes qu’exercent la myriade de sous-cultures, Canada 23 dont les relations sociales, les idéologies et les actions qui contribueront au développement d’un paysage de consommation contesté » (p. 156). Cela amena les auteurs à apporter des ajouts et des modifications à leur modèle conceptuel original, notamment l’évolution de « paysage patrimonial » (c.-à.-d. les centres commerciaux à thème patrimonial) à celui de « paysage ludique », c’est-à-dire un environnement qui met d’abord l’accent sur la capacité à générer des revenus, sans qu’il n’y ait de liens véritables avec le patrimoine. Le tableau 4 illustre ce processus de destruction créative dont il est question dans l’article de 2008. 2.3. Le renouveau communautaire par l’entremise des arts ou attirer le « contre-urbanisme artistique » La revitalisation communautaire et la capacité à se « réinventer » sont habituellement ancrées dans deux situations interreliées. La première aborde la question du maintien ou de la croissance de la population d’une collectivité par l’entremise d’actions visant à retenir les résidents actuels, ou à en attirer de nouveaux. Ce sont-là des démarches déterminantes pour la vitalité, voire la continuité de nombreuses collectivités. La deuxième est relative à la transformation des fondements économiques des collectivités, où le rôle économique traditionnel des communautés rurales n’est plus viable ou adéquat, et où ces collectivités cherchent maintenant à se réinventer et à se repositionner pour répondre aux fonctions et aux besoins actuels. Le renouveau des collectivités visant à attirer de nouveaux résidents et de nouvelles entreprises est lié au mouvement des populations, à contre-courant de l’urbanisation, à l’embourgeoisement rural, ainsi qu’à l’arrivée d’immigrants dans les collectivités rurales. Or, de nombreux exemples ont été documentés, où les perspectives essentielles axées sur ces efforts se font rares. La Ville de Chemainus, dans l’île de Vancouver, est un exemple classique de réinvention, dans ce cas-ci précipitée par la fermeture de la scierie locale au début des années 1980, privilégiant le tourisme en ayant recours aux arts comme outil de relance. Connue principalement pour sa grande variété de murales extérieures, la ville abrite également un théâtre, des métiers d’art et diverses activités artistiques. En Ontario, les efforts ciblés de promotion investis par la région de Prince Edward County dans le but d’attirer de nouveaux résidents à la retraite ou en pré retraite (Donald, 2008), et ses efforts de planification en matière « d’économie créative en milieu rural » est un autre exemple d’une collectivité qui se redéfinit, se réinvente et se repositionne. D’autres collectivités ont évolué de façon plus organique, en misant sur les arts. À titre d’exemple, la Ville d’Annapolis Royal, en Nouvelle-Écosse, reconnue pour ses biens patrimoniaux importants, est également l’hôte d’un nombre important d’artistes et se fait dorénavant connaître en tant que « lieu privilégié des artistes en arts visuels, des artisans, des interprètes et des écrivains » (Brooks-Joiner & McKay, 2008, p. 34). Si la dominante touristique prime dans la localité, l’apport social et économique des arts commence également à être reconnu. Au Minnesota, nombre de collectivités rurales se réinventent pour pouvoir faire face aux défis économiques et au déclin de leurs populations. Pour nombre d’entre elles, les arts et les artistes constituent des outils de renouveau (Cuesta, Gillespie & Lillis, 2005). Le rapport intitulé Bright Stars: Charting the Impact of the Arts in Rural Minnesota constate que les arts sont des « outils de communication précieux et des moteurs économiques qui permettent de tisser des liens culturels vitaux avec l’ensemble du Minnesota, la nation et le reste du monde »; qu’ils jouent un rôle crucial dans le « maintien de la vitalité rurale traditionnelle au 24 Duxbury et Campbell Tableau 4. Le modèle révisé de la destruction créative en six étapes Étape Activités des meneurs : profiteurs, préservateurs et promoteurs Consommateu rs (hôtes et invité) Attitudes envers le tourisme Paysage dominant Avant la marchandisation Inactive Peu En grande partie positives. Productiviste Marchandisation initiale Un investissement du secteur privé dans la marchandisation peut être amorcé. L’activité associée aux préservateurs peut être amorcée. Quelques chercheurs en patrimoine Une certaine prise de conscience des implications négatives entre les ruralités. Nombre croissant de chercheurs en patrimoine Sensibilisation accrue aux implications négatives entre les ruralités. Les chercheurs en patrimoine sont accompagnés de post-touristes Beaucoup de sensibilisation par rapport aux implications négatives entre les ruralités. Les posttouristes font partie de la majorité. La majorité des ruralités font des commentaires négatifs; un exode de cette cohorte peut se produire. Le nombre de prospecteurs en patrimoine est très faible. L’attitude globale dans la communauté devrait être positive, puisqu’il reste moins de ruralités. Ces ruralités qui choisissent de rester garderont leur attitude négative ou en exprimeront une de résignation. Une politique favorisant le développement peut être mise en œuvre. Le secteur privé investit activement dans la marchandisation. Les activités de préservations peuvent être entreprises; certains peuvent s’opposer à des investissements sans valeur patrimoniale. Marchandisation avancée Paysage patrimonial correspondant à la période postproductiviste16 Les politiques du secteur public et les mesures favorisant le développement peuvent être mises en œuvre ou continuer. Un investissement très actif du secteur privé. Certains s’écarteront du thème patrimonial. Destruction initiale Les préservateurs peuvent s’opposer activement aux investissements sans valeur patrimoniale (souvent sans succès). Les politiques du secteur public et les mesures favorisant le développement peuvent être mises en œuvre ou continuer. L’envergure de l’investissement du secteur privé augmente (p. ex. hôtel), alors qu’on observe une grande déviation du thème patrimonial. Destruction avancée Les préservateurs peuvent s’opposer activement aux investissements sans valeur patrimoniale (souvent sans succès). Les politiques et les mesures favorables au développement peuvent être mises en œuvre ou continuer. Les investissements du secteur privé sans valeur patrimoniale dominent. Après la destruction L’activité associée aux préservateurs peut être diminuée. Les politiques favorables au développement peuvent être en place. Paysage ludique correspondant à la période néoproductiviste17 Source : Mitchell & de Waal, 2008 16 Le paysage patrimonial se définit comme un « village spécialisé dans les achats patrimoniaux » (p. 163). La transformation d’un état productiviste à un état post-productiviste se définit comme une « transformation d’un espace rural conçu pour produire un étalage limité de marchandises pour un gain économique, à celle dont la fonctionnalité est issue, en grande partie, d’un discours de préservation, plutôt que d’un profit excédentaire. » (p. 165) 17 Le néo-productiviste se définit comme « un type particulier de paysage post-industriel d’accumulation; un paysage qui reflète les fonctions multiples de l’espace rural, mais qui est dicté en grande partie par le profit (et, dans certains cas, la promotion), plutôt que par la préservation. » (p. 165) Canada 25 Minnesota »; et que « le développement des programmes artistiques peut faire toute la différence entre une petite ville qui survit et une qui prospère » (Smiles, 2006, p. 7). Les citoyens de ces collectivités savent que « les régions de Montevideo et de l’ouest du Minnesota ont besoin d’aide – et ils sont d’avis que les artistes locaux et l’art qu’ils créent peuvent contribuer à façonner une identité distincte pour ces régions » (Cuesta, Gillespie & Lillis, 2005, p. 45). La question de ce qui motive les immigrants à s’installer en région rurale représente l’envers de la médaille en ce qui concerne le renouveau communautaire axé sur l’arrivée d’immigrants. La recherche australienne en matière de contre-urbanisation- un terme parapluie pour décrire globalement « une classe moyenne relativement aisée, qui délaisse le milieu urbain pour entreprendre une nouvelle vie en région » (McManus & Connell, 2008, p. 54) – met l’accent sur la migration à sens unique, c’est-à-dire du milieu urbain vers la région rurale, occasionnée par les coûts d’habitation, une préoccupation à l’égard de la qualité de vie, le début de la retraite ou l’intention de fonder une famille. Par ailleurs, la littérature se penche sur ce qui motive les citadins à déménager en région, notamment à cause d’un style de vie agréable, où il est quand même possible de retrouver nombre des commodités propres à la ville, y compris des événements culturels (et des soins de santé18). Pour leur part, Bunting & Mitchell (2001) proposent cinq facteurs clés qui pourraient expliquer la présence importante des arts visuels, littéraires, et des arts d’interprétation au sein de certaines villes et localités canadiennes : l’accès à un (marché) urbain; l’attrait du paysage; les contraintes économiques (sources d’emplois locaux); la présence d’une culture autochtone (c.-à.-d. la présence d’une culture traditionnelle capable de donner lieu à ses propres regroupements artistiques sur place); et des économies propres aux agglomérations (favorisées par la taille de la collectivité ou la présence d’un organisme qui agit comme catalyseur, telle une université). Les auteurs font remarquer qu’un certain stéréotype britannique ou nord-américain de l’artiste vivant en milieu rural, le représentant dans un décor bucolique, est en fait confirmé par des données de sondage (Bunting & Mitchell, 2001). Mais encore, il existe des artistes de la fin du vingtième siècle qui profitent de l’accès accru des touristes aux régions éloignées pour y pratiquer leur art (Bunting & Mitchell, 2001). De même, les auteurs Mitchell, Bunting & Piccioni (2004) s’intéressent aux artistes qui choisissent de vivre dans les petites collectivités canadiennes. Leur étude démontre que les artistes de la tendance « contre-urbaine » ne constituent pas un groupe homogène, mais diffèrent selon leur type d’emploi et les raisons qui les ont amenés dans les régions rurales. Par ailleurs, le sentiment d’attachement est très important chez les artistes qui ont été interviewés dans le cadre de cette étude, tout comme le sont les incitatifs pragmatiques tels un coût de la vie moins élevé et une certaine flexibilité permettant de travailler dans un lieu non urbain. Hracs (2005) a constaté que les artistes vivant dans la région de Prince Edward County, en Ontario, décidaient de migrer vers les régions rurales pour des raisons telles que : le paysage campagnard et la présence de ce matériel naturel à l’état brut qui inspire leur production artistique (visuelle), un coût de la vie moins élevé en région, des frais plus abordables pour y installer leur entreprise artistique, ainsi qu’une occasion de vivre et de travailler au même endroit. 18 Le comté de Prince Edward est confronté à des enjeux importants visant à fournir des services de santé à une population vieillissante – le résultat de la migration d’entrée. On se préoccupe grandement d’attirer les médecins vers la région rurale pour desservir la population vieillissante d’anciens citadins, qui s’attendent au même niveau de services dans leur nouvelle communauté que celui dont ils ont bénéficié dans leur lieu d’habitation précédent (Donald, 2008). 26 Duxbury et Campbell En examinant les comtés situés à l’extérieur des régions métropolitaines aux États-Unis, McGranahan & Wojan (2007a) ont établi « un lien important entre les installations naturelles et récréatives, et la proportion d’occupations hautement créatives au sein de la main-d’œuvre locale, ». Ce sont-là deux caractéristiques qui pourraient avoir été des facteurs dans le choix d’un lieu par les artistes de ces régions (tel qu’il est cité dans Wojan, Lambert & McGrahahan, 2007b, p. 718). Les auteurs ont également déterminé que « la classe rurale créative est plus âgée, et qu’il est plus probable qu’elle soit mariée, comparativement à ses pairs en milieu urbain. Cela pourrait être révélateur des choix liés aux différents cycles de vie des artistes ciblés au cours de témoignages anecdotiques » (p. 178). Mais encore, Markusen & Johnson (2006) avancent l’idée selon laquelle « le coût de la vie plus abordable, jumelé à une qualité de vie supérieure au sein d’une région rurale riche en commodités, pourraient être attrayants pour les artistes dont la réputation s’est déjà confirmée dans les marchés artistiques urbains » (tel qu’il est cité dans Wojan, Lambert & McGranahan, 2007b, p. 178). En outre, Hracs (2005) décrit la classe rurale créative comme étant constituée « d’individus plus âgés et mieux établis, qui préfèreraient jouir d’un style de vie créatif plutôt que de mener la nouvelle économie » (p. 33). Dans le cadre d’un test statistique concernant la corrélation entre les artistes et divers facteurs d’emplacement au sein des collectivités sur tout le territoire des États-Unis (régions métropolitaines et autres), Wojan, Lambert & McGranahan (2007b) ont constaté la présence de similitudes marquées entre les préférences des artistes en région métropolitaine et non métropolitaine, mais notent toutefois quelques différences importantes (consultez le tableau 5). Un sondage détaillé mené en 2006-2007 dans la région des East Midlands, en Angleterre a mis l’accent, en partie, sur les raisons qui incitent les entreprises créatives à se relocaliser dans les régions rurales. La majorité des entreprises créatives recensées ont indiqué qu’elles avaient choisi une région rurale « pour des raisons intéressées ou associées au mode de vie, plutôt que pour des raisons stratégiques – l’argument de la « qualité de vie » fut souvent entendu. Une seule compagnie déménagea en milieu rural parce qu’elle y trouva les installations qu’elle recherchait » (Burns & Kirkpatrick, 2008b, p. 27). Le sondage démontra aussi la présence de quelques « retours » et quelques cas rares de « citadins sans attaches locales préexistantes » qui démarrèrent une entreprise en région rurale (p. 27). Parmi les principaux attraits cités par les entreprises de la région des East Midlands, notons la présence d’un réseau professionnel ou d’un carrefour de réseautage et des lieux physiques pour se rencontrer (une galerie d’art ou une installation culturelle); des liens créés avec les bureaux locaux d’information touristique; des coûts d’installations plus abordables (particulièrement pertinent dans le secteur du design industriel); ainsi que la présence d’initiatives stratégiques, telles que des mesures incitatives mises de l’avant par l’administration rurale à l’intention du secteur artistique, pour la réutilisation de certains édifices (Burns & Kirkpatrick, 2008b, p. 28). La documentation fait état également d’une tendance où les artistes quittent les centres urbains afin d’éviter des loyers élevés, et parce qu’ils sont souvent sensibles à la notion de « qualité de lieu/qualité de vie » mise de l’avant dans les stratégies de marketing à l’intention des touristes (Baeker, 2008). Quoi qu’il en soit, ces deux groupes ont des attentes similaires en ce qui concerne les commodités auxquelles ils ont accès en milieu urbain. Il n’est d’ailleurs pas rare qu’ils prennent soin de transférer ou d’aménager ces services dans leur nouvelle résidence ou lieu de vacances (Gibson, 2004). Ce genre de transition souligne l’importance de l’uniformisation des avantages pour tous les citoyens (Foundation for Rural Canada 27 Living, 2004), et la nécessité de reconnaître qu’une division pourrait éventuellement se créer entre les résidents ruraux de souche et les citadins nouvellement installés (Hracs, 2005). Le processus de renouveau communautaire et la portée des dynamiques qui y sont liées continuent d’évoluer avec le temps. Au fur et à mesure que les artistes déménagent et continuent d’implanter leur art dans les marchés ruraux, l’essor des industries créatives florissantes et des festivals qui attirent les touristes pourrait mener à une hausse des loyers et du coût de la vie dans les régions rurales, et rendre la vie des artisans ruraux plus difficile à long terme (Gibson, 2004). Tableau 5. Préférences d’emplacements chez les artistes métropolitains et non-métropolitains aux États-Unis Similitudes entre les artistes métropolitains et non-métropolitains Différences entre les artistes métropolitains et non-métropolitains Les villes collégiales et universitaires sont de puissants attraits. À l’extérieur des régions urbaines, on associe plus étroitement les attraits naturels tels que les montagnes, les hivers secs (ensoleillés) et une combinaison de forêt et d’espace ouvert, avec un emplacement destiné aux artistes. Spécialisation dans les services aux entreprises. La présence d’une population cultivée. Effet négatif des grands points de vente au détail, qui peuvent se rapporter à une planification axée sur une dépendance à l’automobile (dont les conclusions laissent entrevoir une tendance à repousser les artistes). Diversité des choix de logements. La croissance de la population au cours de la décennie précédente (de 1980 à 1990) a été associée à une plus grande part du secteur des arts à l’extérieur des régions urbaines, mais n’est pas associée à la part qu’occupe le secteur des arts dans une région métropolitaine. « Cela est en harmonie avec les artistes s’installant dans des régions rurales riches en attraits et qui affichent également une croissance de population importante, et les artistes qui n’affluent pas vers les comtés métropolitains connaissant la croissance la plus rapide » (p. 727). Une densité de population modérée (à tout le moins, relativement à d’autres régions métropolitaines) dans les comtés métropolitains a été associée à l’emplacement des artistes. La part de la population au sein des ménages sans enfant a eu un effet positif sur la part qu’occupe l’emploi dans le secteur des arts dans les comtés non métropolitains, mais non dans les comtés métropolitains. (Cette variable sert d’approximation à l’indice gai de la Floride.) Les artistes métropolitains étaient plus enclins à demeurer dans des villes plus chaudes. Extrait de Wojan, Lambert & McGranahan (2007) 28 Duxbury et Campbell 3. Le rôle des arts dans la diversification et la relance de l’économie Malgré une affinité au milieu urbain, la classe créative – possiblement plus apte et davantage en mesure que les autres classes au sein de la main-d’œuvre à choisir où habiter, en fonction de facteurs liés à la qualité de vie – peut être courtisée hors des villes afin qu’elle s’établisse dans des emplacements ruraux comportant un niveau élevé de commodités. Leurs activités, en revanche, semblent générer de nouveaux emplois et une croissance locale. Les régions rurales manquent de services commerciaux et de services de consommation à l’intention des entreprises et des résidents des milieux urbains, mais elles ont tendance à avoir le dessus sur le paysage, ce qui peut satisfaire le tempérament créatif. (McGranahan & Wojan, 2007b) Une des faiblesses de l’économie du Nord est son caractère fluctuant. Les gens arrivent, ils font beaucoup d’argent et ils partent… Nous pensons à l’économie en termes d’emplois, de projets et d’éléments semblables, mais je pense qu’il existe une économie moins rigide qui implique que les gens restent et construisent près de l’endroit où ils veulent être… J’ai toujours affirmé que des arts et une culture salutaires étaient la clé à cela. (Rob Budde, auteur, Prince George, C.-B., tel qu’il est cité par Follett, 2008) Étant aux prises avec le changement structurel à long terme, à l’écart de l’industrie agricole et d’autres industries primaires, les collectivités repensent et diversifient les moyens de subsistance en milieu rural tout en considérant les possibilités des technologies de l’information et de communication pour accéder à des marchés éloignés. L’influence omniprésente des petites entreprises et des micro-entreprises conditionne la croissance économique dans les régions rurales. Par ailleurs, la recherche se concentre surtout sur la capacité entrepreneuriale de la population locale et sur la création d’une masse critique de cette capacité (Labrianidis, 2004). Bien que les centres urbains continuent à dominer les industries créatives19, bon nombre de stratégies visant la régénération rurale et le développement économique pour « exploiter la créativité » sont axées sur des approches qui tirent profit des projets en réseau et de créneaux de moindre envergure (Gibson, 2004, p. 1). Gibson explique que les arts – dans un contexte de développement à plus petite échelle de l’industrie de créneaux basée sur l’innovation – font l’objet de la majorité du développement économique en Australie, au fur et à mesure que les stratégies se démarquent des projets locaux de grande envergure. Des données récentes 19 Il a été démontré que cela est attribuable en partie au statut de « ville globale » de grands centres et à l’attrait de ce statut chez les industries créatives, principalement l’enregistrement sonore, l’industrie cinématographique et la télévision. Par exemple, les sièges nationaux de plusieurs entreprises de divertissement sont situés à Sydney, en Australie, et les incitatifs fiscaux sont offerts aux équipes de tournage. La masse critique de centres urbains signifie qu’il y a un auditoire possible plus vaste pour l’art expérimental, davantage de clients pour la mode et la décoration, et davantage de collectivités d’appui à la création qui sont organisées (Gibson, 2004). Canada 29 recueillies en Australie « font état de la mesure selon laquelle la créativité, les activités culturelles et les arts, avec leurs réseaux de travailleurs, de micro-entreprises et de soustraitants interreliés plus intensément, génèrent un ‘rendement par dollar investi’ plus important que celui des grands projets pilotes de développement à l’échelle régionale, notamment les mines, les projets de construction d’édifices ou les grandes installations d’usines pour le secteur manufacturier » (p. 2). Cependant, les mécanismes standards associés aux politiques d’urbanisme tels que les incubateurs, les incitatifs fiscaux, la promotion de regroupements de services ou de centres d’activités, et ainsi de suite, peuvent ne pas être appropriés ou suffisants pour que les secteurs régionaux ou les régions rurales relèvent le défi des capitales artistiques bien ancrées dans l’économie et celui de l’envergure, où les artisans et les artistes ruraux font face à des marchés plus petits. 3.1. Deux cadres conceptuels de l’économie La pensée actuelle sur le développement régional (rural) est axée sur les plateformes de développement régional (ou rural), dans une perspective de formation post-sectorielle ou post-regroupement : « L’industrie de l’ère contemporaine se conçoit comme proposant des plateformes flexibles et convaincantes, autour desquelles de nombreuses créations de nouveaux produits et de nouvelles restructurations peuvent se réaliser en mettant à profit des synergies intersectorielles » (Cooke & Lazzeretti, 2008, p. 6). Plusieurs auteurs explorent la notion de « plateformes culturelles agro-alimentaires et créatives en milieu rural » (p. 5). Cette approche émet l’hypothèse que le développement régional contemporain est « une question interactive, intégrée et relationnelle visant à déterminer les atouts régionaux et ruraux-urbains et à ‘exploiter l’avantage régional’… de manière à exprimer le facteur clé au sein de l’économie du savoir, c’est-à-dire, la notion que les nouveaux produits découlent d’un investissement public dans la recherche et d’un investissement privé dans l’innovation » (p. 6). Une étude de l’état actuel de la littérature pertinente sur ce sujet, synthétisée dans l’ouvrage de Cooke & Lazzeretti (2008), révèle trois dimensions : 1. Une approche liée aux mondes de production à l’égard du développement régional, dans laquelle « différentes formes d’organisation de la production sont cohérentes à l’interne, sur le plan de leurs institutions directrices, de leurs interactions avec les réseaux et de leurs conventions » (p. 6-7). Cela résout les quatre tensions entre les éléments suivants : standardisé (production de masse) par rapport à spécifique (personnalisé pour répondre à certaines exigences de créneaux), et spécialisé (produit générique fabriqué de façon spécialisée) par rapport à générique (processus spécialisé utilisé pour des produits standardisés). L’approche fonctionne mieux dans les industries agro-alimentaires et touristiques. 2. Une approche liée au concept de variété connexe de la géographie économique évolutionnaire. Il s’agit principalement d’un concept de nature latérale, donnant lieu à l’idée de capacité d’absorption latérale, de telle sorte que les retombées liées à la connaissance complémentaire au sein des industries ou des activités commerciales avoisinantes pourraient permettre l’application d’un nouveau procédé ou la création de nouveaux produits, et leur diffusion rapide au sein des entreprises ou des industries. Cela est particulièrement intéressant en ce qui concerne le tourisme dans les régions rurales ayant un contact appréciable avec les marchés urbains. 30 Duxbury et Campbell 3. Une approche liée aux systèmes régionaux d’innovation envers l’utilisation des connaissances, souligne l’importance de deux sous-systèmes : un sous-système régional d’exploration des connaissances et, pour interagir avec celui-ci, un soussystème d’exploitation des connaissances axé sur l’innovation commerciale (p. ex. : les entreprises et les intermédiaires). Cette approche, toutefois, est rarement utilisée dans les milieux urbains, ni en ce qui touche « l’industrie culturelle ou créative plus traditionnelle » (elle se concentre généralement sur l’exploration et l’exploitation des connaissances scientifiques et technologiques) (p. 11). Un deuxième ensemble de documentation économique sur les ressources est également instructif. Une approche économique constructiviste présente les ressources comme des produits édifiés, relatifs et « évolutifs » de l’ingéniosité humaine (Kebir & Crevoisier, 2008, p. 50). Les ressources sont définies et développées grâce à une intention entrepreneuriale, et comprises comme un processus relationnel entre un objet et un système de production. Le lien (la ressource) est créé lorsqu’un acteur (p. ex., un entrepreneur) a l’intention d’utiliser un objet dans un processus de production. Bien que les objets culturels soient le résultat de logiques sociétales qui sont en grande partie extra-économiques, telles que les logiques politiques, sociales, culturelles, naturelles, etc., les ressources culturelles sont définies, dans ce contexte économique, comme étant « tous les éléments de nature culturelle qui pourraient servir à un usage, ou être utiles, dans un processus de production. Cela signifie tous les objets culturels désignés comme étant intégrés au sein d’un processus de production d’un bien ou d’un service » (p. 52-53). De plus, les échanges économiques sont également considérés comme des échanges sociaux et une forme de communication culturelle. Par ailleurs, le volet culturel des produits fait partie explicitement de la création de valeur : En devenant une ressource économique, un « objet » culturel se voit intégré aux relations commerciales. … Le système de production et ses clients ont une incidence sur ces objets et, en revanche, sur leur propre reproduction. Un lien est établi entre une collectivité locale qui réussit à arrimer ses ressources culturelles à un système de production et à ses marchés/clients. Le lien n’est plus simplement de nature commerciale, fonctionnelle ou technologique; mais il est également – dans une mesure pratiquement complète – une forme de communication culturelle. (p. 48, 49) Une ressource n’est pas établie une fois pour toutes. Plutôt, elle est le fruit d’un ajustement continu et d’une reformulation de la relation entre un objet et un système de production en évolution. Ce lien est caractérisé par son instabilité, au fur et à mesure que les objets et les systèmes de production interagissent ou évoluent conjointement (Kebir & Crevoisier, 2008; Norgaard, 1994). Les objets choisis « adoptés à titre de ressource » entrent dans une action réciproque de perceptions entretenues au sein de la collectivité et des clients/marchés concernés. La nature réductrice de cette communication, qui devient de plus en plus stéréotypée, est renforcée par la normalisation au sein de la production et par l’expansion des débouchés relatifs à la consommation (Kebir & Crevoisier, 2008). Canada 31 3.2. Thèmes clés concernant le rôle de l’art à l’égard du développement économique des collectivités rurales De nombreux rapports énoncent clairement les rôles et le potentiel des industries artistiques et créatives, en tant que secteurs économiques stratégiques dans les régions rurales. Dans le cadre de cette littérature, trois thèmes clés se dégagent : (1) les industries artistiques et créatives – inédites ou celles qui évoluent à partir d’industries traditionnelles – en qualité d’intervenants importants au sein des économies régionales et rurales; (2) l’emploi créatif, en tant que stimulant de la dynamisation plus étendue de l’économie; et (3) les occasions culturelles associées au tourisme. À la lumière de ces notions de base, deux thèmes très importants se dégagent également : (1) l’attraction d’artistes ou de la « classe créative » vers les collectivités rurales et, (2) l’applicabilité d’approches urbaines dans les milieux ruraux. Il faut également rester prudent lorsqu’on utilise un cadre de développement économique destiné au développement culturel. Alors qu’une partie de cette littérature documente les retombées économiques de l’activité artistique dans un secteur géographique (consultez les listes figurant dans l’ouvrage de Smiles, 2006), d’autres travaux sont axés sur la reconnaissance et la croissance d’industries et de projets existants. On compte parmi eux, une façon de penser pragmatique à l’égard des stratégies et des enjeux commerciaux concernant l’accès aux marchés et le développement de nouveaux marchés (en faisant appel, notamment, aux technologies informatiques et de l’information), ainsi que des enjeux liés au développement durable des entreprises (p. ex., Barringer et coll., 2004; Burns & Kirkpatrick, 2008b). À titre d’exemple, la Highlands and Islands Enterprise Creative Industries Study effectuée en Écosse, en 2007, s’est penchée sur l’accès à de nouveaux marchés et réseaux, ainsi que sur le soutien opérationnel et les projets de stages pratiques. Par ailleurs, l’étude intitulée Financing Creativity s’est intéressée à l’offre et la demande de services financiers à l’intention du secteur créatif en Angleterre du Nord-Ouest (New Media Partners & Culture Finance North West, 2004). Les auteurs Markusen (2007), Hracs (2005) et Burns & Kirkpatrick (2008b) observent tous, quant à eux, que les pratiques de substitution des importations développent et soutiennent les marchés locaux destinés aux produits culturels (p. ex., la faïencerie utilisée dans les restaurants locaux, qui encourage les visiteurs à acheter des articles semblables). Pour leur part, les auteurs Burns & Kirkpatrick (2008b) ont découvert que le secteur de l’industrie créative dans les régions rurales des East Midlands, en Angleterre, différait de ce qui se retrouve fréquemment dans les régions urbaines, où l’on compte « moins de jeunes entreprises et d’entreprises en démarrage, et plus d’entreprises ayant des marchés établis » (p. 4). Ils ont également découvert une relation complémentaire entre les secteurs des industries créatives en milieu urbain et rural. Notons parmi les facteurs de croissance, la proximité d’un centre urbain, les services de transport intra-régionaux, l’ouverture à une migration intérieure, un nombre élevé de démarrages d’entreprises (lié à l’attraction de nouveaux arrivants), et la rétention de travailleurs qualifiés. D’autres études sont axées sur l’attraction et le développement de nouvelles industries créatives et de nouveaux projets. Par exemple, un rapport important réalisé par le Littoral Arts Trust, à l’intention du Arts Council England, décrit sommairement de nombreux projets que le gouvernement a fait valoir pour les collectivités rurales, et qui sont rattachés principalement au développement de nouvelles entreprises : 32 Duxbury et Campbell développer les industries créatives en milieu rural, explorer de nouvelles interfaces culturelles avec les entreprises agricoles et les agro-entreprises, développer le rôle des nouveaux médias, des TIC et des télécommunications avancées en régions rurales, promouvoir les solutions créatives et artistiques pour la diversification agricole et, embaucher des concepteurs, des artistes et des architectes chevronnés pour inventer de nouvelles applications et, des démarches créatrices ‘à valeur ajoutée’ destinées aux projets de plantes à fibres non alimentaires, aux projets renouvelables et d’utilisation plus rationnelle des terres. (Hunter, 2003-05, p. 7) En Australie, on a fait des recherches sur les possibilités de développer de nouvelles industries créatives dans les régions rurales et éloignées en s’appuyant sur la technologie, grâce à des études telles que le Regional Development of Screen Industries in the Digital Era de la Nouvelle Galles du Sud, en Australie (Henkel, 2006). En Nouvelle-Écosse, de nombreux projets exploratoires en art numérique ont été élaborés en milieu rural à l’Acadia University, soulignant l’importance de tels établissements comme générateurs et incubateurs possibles d’idées novatrices. Par exemple, le projet intitulé Ideas in Residence/Creative Dislocations, s’est penché sur la façon dont les technologies du numérique peuvent encourager les gens à s’intéresser à l’environnement naturel de l’écosystème de la baie de Fundy, et nous aider à accroître nos connaissances sur les expériences vivantes d’environnements, à la fois naturels et bâtis (l’artiste Gair Dunlop). En outre, le projet intitulé New Technologies/Creative Practices in Music, Audio and Multimedia: From Theory to the Marketplace a évalué les répercussions des nouvelles technologies sur la création et la diffusion de la musique et d’autres formes d’images sonores (Janet Marontate, Ph. D. et Christoph Both). Par ailleurs, le projet de recherche et de commercialisation MusicPath, actuellement en cours, représente un système et une méthode permettant d’offrir un enseignement de haute qualité avec des instruments de musique, et de donner une représentation sur Internet en temps réel. Les arts se sont aussi positionnés à titre de stimulant de la créativité pour d’autres industries ou de composante principale d’un processus de transformation plus général. Les perspectives de la recherche à cet égard varient grandement. Par exemple, Bright Stars (Cuesta, Gillespie & Lillis, 2005) décrit la croissance et le développement itératifs découlant de projets culturels, et propose un point de vue « organique » sur la revitalisation, l’attraction, la vitalité et le changement progressifs au sein de la communauté. La recherche actuelle portant sur une dissertation effectuée par Jane Andrew et intitulée Towards an Understanding of the Relationship between Creative Capital and Regional Economic and Employment Development, examine la mesure selon laquelle « les indices de créativité » accroissent nos connaissances sur le rôle et l’apport du capital culturel et des industries créatives, relativement à la croissance économique et de l’emploi dans un cadre régional (tel qu’il est cité par Smiles, 2006). De leur côté, les auteurs Wojan, Lambert & McGranahan (2007b) évaluent, d’après des statistiques, l’hypothèse selon laquelle « les mêmes facteurs non observables qui attirent une abondance relative de bohémiens influencent positivement le dynamisme économique local » (p. 712). Les résultats de cette étude américaine confirment que les environnements non métropolitains générateurs d’activité artistique ont tendance également à promouvoir des taux de croissance plus rapides. L’étude fait état de l’effet positif d’une proportion plus importante de l’emploi de la classe créative sur la migration nette, la croissance de l’emploi et l’augmentation nette du nombre d’établissements commerciaux. L’apport principal de l’étude Canada 33 est « une confirmation empirique indiquant qu’un surplus relatif de bohémiens est susceptible de révéler un milieu créatif vivant »; toutefois, elle « ne permet pas de conclure qu’une stratégie particulière visant à promouvoir les arts accroîtra le dynamisme économique » (p. 734). Les résultats inhérents aux environnements non métropolitains « démontrent un apport véritable du lieu en faveur du dynamisme économique… notre explication du rendement régional ne se fonde pas sur l’emplacement de quantités particulières dans un lieu (p. ex., le capital humain, les dépenses de recherche et développement, l’infrastructure de transport), mais sur l’approximation d’une qualité particulière de lieu » (p. 734). Dans le cadre de la diversification de leur base économique, particulièrement celles qui sont traditionnellement des industries de transformation des produits agricoles ou des sites d’entreprises d’exploitation, bon nombre de collectivités rurales sont également passées aux métiers du tourisme. Le tourisme rural est apparu comme un sous-ensemble de l’industrie touristique, mettant en jeu le marketing de la culture rurale à titre de destination, y compris les aspects du patrimoine ainsi que les paysages naturels.20 Le tourisme culturel est reconnu comme le segment de l’industrie du tourisme ayant connu la croissance la plus rapide (BC Arts Council, tel qu’il est cité par Follett, 2008). Indéniablement, l’intérêt croissant à l’égard du secteur du tourisme culturel (y compris le tourisme patrimonial et créatif) et du tourisme rural peut offrir des possibilités importantes pour le renouveau économique et celui de la collectivité.21 Cependant, comme l’ont constaté les auteurs Brooks-Joiner & McKay (2008), on se préoccupe également du fait que les enjeux liés à la capacité locale soient reconnus et abordés antérieurement ou parallèlement à toute stratégie de développement du tourisme culturel. Dans la littérature, on met l’accent sur le tourisme en tant que stratégie de remplacement dans une collectivité lorsque les économies traditionnelles échouent (p. ex., Hracs, 2005; MacDonald & Jolliffe, 2003). Les auteurs MacDonald & Jolliffe (2003) observent que la culture et le patrimoine sont souvent bien préservés dans les régions rurales et, en temps de recul, les populations rurales ont tendance à adhérer à ces traditions, et à s’en servir à titre de moteurs de développement socioéconomique. Or, certains experts dans le domaine du tourisme préviennent qu’« il est improbable que le tourisme soit un choix de développement durable sur lequel il est souhaitable de fonder une économie rurale faible, mais qu’il serait utilisé à meilleur escient dans le but de compléter une économie locale déjà prospère » (Butler & Clark, 1992, tel qu’il est cité par Richards, 2007, p. 72). Par ailleurs, dans un article qui examine le développement du tourisme culturel dans la région d’Évangéline à l’Île-du-Prince-Édouard, les auteurs MacDonald & Jolliffe (2003) décrivent un modèle de développement du tourisme culturel en quatre étapes (consultez le schéma 2). 20 Dans le cadre du projet d’innovation concernant la recherche sur le tourisme (Tourism Research Innovation Project) de la Vancouver Island University, à Nanaimo, on a élaboré une bibliographie importante sur le tourisme rural. Elle est disponible à : www.trip-project.ca/resources.php?page=rt 21 En Angleterre, Jones (2004) a découvert que les activités artistiques sont une mesure de relance majeure pour le tourisme rural et, que les artistes et les activités artistiques communautaires contribuent à la régénération des communautés qui s’effondrent. Le Voluntary Arts Network (2006) observe que lorsque les régions campagnardes anglaises ont cessé toute activité pendant huit mois en raison de la fièvre aphteuse, « 7 milliards de livres sterling ont été perdues en revenus touristiques – dont la plus grande partie est liée à la culture » (p. 1). Le « U.S. National Governors Association Center for Best Practices » quant à lui, souligne la présence du « tourisme et des destinations culturelles florissants » qui sont « issus de ressources artistiques et culturelles jadis latentes et, qui contribuent à la durabilité économique au sein des collectivités et des régions rurales » (p. 3). 34 Duxbury et Campbell Schéma 2. Étape 1. Modèle de développement du tourisme rural et culturel en quatre étapes Quelques résidents reconnaissent les occasions et intègrent les ressources touristiques à la planification socioéconomique Le processus semble commencer lentement, lorsque des touristes arrivent dans la communauté et que quelques résidents y voient une occasion. Cette étape comprend davantage d’offres individuelles. Étape 2. Les groupes communautaires planifient et mettent en œuvre des stratégies sur le tourisme dans le cadre du développement économique Il s’agit de l’étape servant à planifier et à mettre en œuvre des stratégies qui commencent à profiter à la région entière. Ces stratégies se métamorphoseront en plans plus officiels fondés sur la coopération entre les résidents, les organisations et les entreprises de la communauté. Dans les régions rurales, cela pourrait donner lieu à des partenariats entre les groupes locaux et régionaux, les organismes nationaux et les divers ordres de gouvernement. À cette étape, on peut citer à titre d’exemples, les festivals et les événements culturels spéciaux, visant à attirer davantage de touristes dans une région. Étape 3. Développer des partenariats communautaires et créer un organisme de tourisme officiel pour aider à convertir les plans en attractions durables [Cette étape met en jeu] le développement des plans en offres touristiques rurales et culturelles officielles plus élaborées qui profitent à la communauté à court terme et conservent les ressources à long terme. C’est à cette étape qu’on assiste à une efficience accrue et au développement efficace d’attractions, d’activités et de programmes éducatifs plus permanents concernant l’environnement naturel, les sites historiques et les expériences culturelles. Un organisme de tourisme pour la région prend également le contrôle du processus pour assurer un marketing plus cohérent et plus intégré de la région. Étape 4. Planification à long terme entièrement centralisée et coopérative et présence du marketing touristique À cette étape, la planification devrait être responsable, pertinente et durable en ce qui a trait aux avantages à court terme et à long terme pour la communauté, tout en préservant aussi ses ressources. C’est à cette quatrième étape que les cinq principes proposés par la US National Trust jouent un rôle pour aider à guider la préservation du tourisme rural et culturel à long terme. Ces principes comprennent l’authenticité et la qualité, l’éducation et l’interprétation, la préservation et la protection, les priorités et la capacité locale, ainsi que les partenariats (Prohaska, 1995). Source : MacDonald & Jolliffe (2008, p. 309-310) Canada 35 Le tourisme rural est lié étroitement aux discussions portant sur le marketing du lieu. Les techniques de création ou de marquage de l’identité ont eu recours, traditionnellement, au marketing de l’art populaire ou de l’art transitionnel pour développer une identité communautaire (et celle des festivals, tel qu’ils ont été décrits précédemment). Alternativement, comme le constatent les auteurs Burns & Kirkpatrick (2008b), la présence de galeries d’art, de studios, de musiciens, de lieux de spectacles, et d’entreprises peuvent « influencer de nouvelles formations d’identité culturelle » et « présenter des notions plus contemporaines de valeur expressive et de mode de vie » aux collectivités (p. 34). À l’échelle régionale, les « routes culturelles » ou les circuits culturels fondés sur une industrie locale telle que la vinification ou sur les studios d’art, sont également des outils de marketing importants basés sur le lieu (Richards, 2007) et des moyens efficaces pour attirer et faire circuler des visiteurs dans l’ensemble d’une région rurale.22 Une pratique clé dans ce domaine est celle de « HandMade in America », un organisme sans but lucratif situé dans la région rurale à l’ouest de la Caroline du Nord, qui promeut les métiers d’art et les objets faits à la main pour soutenir le développement communautaire et économique (NGA Center for Best Practices, 2001). Dans le cadre de ses activités, il a développé le « Small Towns Program », un programme de « mentorat, d’assistance technique, d’autoassistance et d’apprentissage entre les collectivités et à l’aide des collectivités avoisinantes » auquel quiconque est invité à participer – « du nouvel amateur aux artisans professionnels spécialisés dans la création unique et travaillant à temps plein » (Brotman, 2007). Certaines stratégies de marketing peuvent néanmoins conduire à une rupture de liens entre les résidents et les promoteurs, puisqu’il faut répondre à des demandes exagérées en matière de tourisme, et que les investissements liés à l’élaboration d’arguments promotionnels peuvent ne pas mener à un rendement ou à un profit suffisant pour les résidents (Gibson & Davidson, 2004; Richards, 2007). Alternativement, la commercialisation fructueuse du patrimoine ou d’autres biens culturels peut conduire aux processus de destruction créative, tels qu’ils ont été décrits précédemment. La documentation de la recherche poussée aborde les enjeux liés à la durabilité du patrimoine fragile et des ressources culturelles, aux répercussions du tourisme sur les cultures locales, ainsi que les enjeux connexes à l’activité touristique. L’attraction d’artistes ou de la « classe créative » vers les collectivités rurales, permise par l’accès à large bande dans Internet, est perçue par bien des communautés comme une occasion essentielle à la diversification économique. Aux États-Unis, les travaux de D.A. McGranahan, T.R. Wojan et D.M. Lambert présentent une preuve statistique pour expliquer la présence et la croissance de populations d’artistes dans certaines régions rurales, et la corrélation entre la présence de ces personnes et la croissance de l’emploi dans les régions rurales, entre 1990 et 2004 : « les comtés dont la proportion de résidents de classe créative est élevée avaient en règle générale des taux de croissance de l’emploi qui étaient deux fois plus élevés que les comtés dont la présence de la classe créative était moindre » (McGranahan & Wojan, 2007b). Alors que les commodités qui ont attiré la classe créative 22 Par exemple, le Corridor culturel de l’Okanagan, avec ses vignobles, ses hôtels et d’autres entreprises touristiques, réunit un grand nombre de studios d’arts et d’attractions culturelles. En Nouvelle-Écosse, la carte Studio Rally guide les visiteurs vers des studios d’arts et des boutiques d’artisanat partout dans la province. De la même façon, le Alberta Muse Cruise propose un guide de voyage pour accompagner les visites chez les « conteurs visuels » de l’Alberta et dans leurs studios. Au Nouveau-Mexique, une série de visites guidées à thèmes ont été élaborées, y compris des circuits axés notamment sur les artistes-peintres en textile, les céramistes et les femmes artistes. 36 Duxbury et Campbell sont peut-être responsables de cette croissance de l’emploi, la seule présence de la classe créative peut également servir à créer des commodités (McGranahan & Wojan, 2007b). Certains chercheurs mettent en garde contre la possibilité d’introduire un cadre inapproprié pour les projets culturels en milieu rural. Par exemple, essayer d’appliquer un « index de créativité » générique (p. ex., Florida, 2002) à toutes les régions rurales peut ne pas être adéquat. Dès lors, les chercheurs et les collectivités rurales devraient être soucieux de la façon dont un index pourrait discréditer d’autres visions communes concernant la créativité et la culture (Gibson & Klocker, 2005). Les industries et les populations locales colorent l’expression culturelle des collectivités rurales, et cette réalité ne se retrouve peut-être pas dans les mesures nationales ou l’élaboration des politiques nationales, telles que les expressions culturelles propres au lieu (Luckman & Gibson, sous presse). Pour des raisons semblables, certains chercheurs font des mises en garde contre l’adoption exclusive d’une approche économique à l’égard du développement culturel. Par exemple, les auteurs Gibson & Klocker (2005) soulignent que seulement certains types d’activités « cadrent » mieux avec cette approche, et les possibilités d’utiliser le « tournant culturel » dans le domaine de la politique économique au profit des régions rurales, peuvent limiter les activités artistiques de « remplacement » qui se trouvent dans les régions rurales et qui ne correspondent pas au profil d’investissement économique. On remet également en question l’idée de transférer les politiques concernant l’économie créative « centrée sur l’urbanisme » dans des emplacements ruraux. Les petites communautés peuvent ne pas cadrer avec le même modèle, même si le développement créatif peut faire partie de leur planification économique globale (McCool & Moisey, 2001). Le travail créatif qui n’a pas un effet visible immédiat sur les systèmes économiques – tel que le développement de l’art dans le cadre d’un stage expérimental en « recherche et développement » – peut ne pas avoir de rendements économiques mesurables et il est possible que son intervention essentielle dans l’économie créative globale ne soit pas reconnue dans les petits milieux culturels (Luckman & Gibson, sous presse). Pour sa part, Chris Gibson (2004) fait valoir que « l’univers de la production créative est plus compliqué que l’image d’une simple ‘division entre une ville et un comté’ ». Par ailleurs, il souligne l’« importance de penser au-delà des espaces urbains et ruraux comme étant des entités limitées et distinctes » (p. 5, 6). Dans les emplacements non urbains, les « réseaux et les flux » de personnes, l’information et la production créative sont très importants. Les réseaux interrégionaux appuient les producteurs créatifs dans le but de maximiser les occasions, de chercher des marchés plus vastes, d’« ouvrir l’accès à des contrôleurs plus compatissants au sein d’industries clés, » tout en éliminant les perceptions relatives à une « division entre une ville et un comté » (p. 8). Le rôle des incubateurs et des nœuds dans les réseaux dispersés de producteurs culturels est également vital, permettant des économies créatives plus raffinées et intensément réseautées (Gibson, 2004; consultez également Burns & Kirkpatrick, 2008b). Canada 37 4. Les stratégies et les projets en matière de gouvernance L’analyse de cette littérature a révélé un certain nombre d’études majeures en matière de politiques abordant des enjeux liés au développement des arts dans les collectivités rurales, et qui proposent des pistes possibles s’y rattachant. Un complément précieux à la recherche contemporaine serait un aperçu du cadre stratégique et de gestion des programmes concernant l’art dans les collectivités rurales, notamment un examen détaillé de la longue série de recommandations et de sous-recommandations présentées dans les études en matière de politiques. En général, la gouvernance des arts et de la culture, dans un contexte rural, se situe simultanément dans (a) un ensemble élargi de politiques culturelles et artistiques et, (b) des projets stratégiques de politiques rurales et agricoles. Le secteur des arts peut aussi être intégré à d’autres politiques pan-nationales telles que l’éducation, l’environnement, la durabilité, les industries, le développement des capacités communautaires, les initiatives propres au secteur bénévole, et ainsi de suite. Bien que les recommandations soient habituellement présentées à un ministère ou à un organisme gouvernemental précis, ces derniers en considèrent généralement la mise en œuvre dans un contexte de gouvernance, orientée vers la collaboration ou la coopération à multiples échelons, où chacun des ordres de gouvernement – de pair avec les collectivités – est nécessaire pour assurer la mise en œuvre efficace des recommandations liées aux projets de relance culturelle. Une structure spécialisée de gestion et des politiques ciblées à l’intention de cette perspective semblent rares. Le Regional Arts Australia est l’approche la plus institutionnalisée en matière d’arts en milieu rural dont fait état cette étude. Il s’agit d’un organisme qui représente un réseau d’organismes artistiques et de programmes régionaux (d’État), à la grandeur de l’Australie. Le Regional Arts Australia reçoit l’appui financier du gouvernement de l’Australie, par l’entremise du Regional Arts Fund. En 2005, le Regional Arts Australia entreprit une vaste consultation auprès de résidents des régions rurales concernant « la nature des défis et des occasions liés à leur travail dans les arts, ainsi qu’à leurs aspirations concernant les arts au sein de leurs communautés et localités, ». Puis, il fixa des priorités en matière de réponses futures et stratégiques (Regional Arts Australia, 2005a, p. 8). (Consultez également l’article d’accompagnement, de Kim Dunphy) Au Royaume-Uni, la Rural Strategy23 (stratégie rurale) mise de l’avant par le gouvernement national en 2004 – « une réflexion en profondeur concernant ses liens avec les régions » – marqua le point de départ d’un certain nombre d’initiatives visant à énoncer une réponse concertée du secteur des arts et de la culture à l’endroit de ce nouveau cadre de gestion (Arts Council England, 2005, p. 3). En 2004, le Arts Council England lança une vaste consultation dans le but de confirmer que ses « politiques, programmes et orientations d’investissements… répondaient bel et bien aux besoins du secteur des arts dans les régions rurales ». En 2005, il publia sa liste de priorités pour l’avenir des arts dans les régions rurales en Angleterre (2005, p. 5). Par la suite, le conseil des arts octroya des fonds à la réalisation d’une étude de 23 Depuis, le gouvernement a adopté le Rural Development Programme for England (2007/2008 – 2013) (Hunter, 2008). La mise en œuvre de cette stratégie s’inscrit dans le contexte des règlements du deuxième pilier de la réforme de la PAC au sein de l’Union européenne et à l’intention du développement rural (Hunter, 2003-2006). 38 Duxbury et Campbell deux ans menée par le Littoral Arts Trust (2001-2003) et qui donna lieu à un projet intitulé Cultural Strategy for Rural England, et au Rural Cultural Forum (une stratégie culturelle et la tenue d’un forum culturel à l’intention des régions rurales en Angleterre), pour ne nommer que ceux-là. Le rapport, présenté en 2003, par le Littoral Arts Trust (puis révisé en 2006), propose l’élaboration d’une nouvelle stratégie de développement entre les politiques rurales et agricoles intitulée la « New Rural Arts ». Ce projet s’inscrit dans le cadre « d’un réengagement élargi vis-à-vis le secteur culturel, et fait état d’un discours ‘double’ concernant l’agriculture et la durabilité environnementale » (p. 90). Les efforts de revendication pour qu’une stratégie concertée de la culture rurale en Angleterre soit mise en œuvre se poursuit (consultez par exemple : Hunter, 2008). En considérant ces notions dans le contexte européen élargi, le Rural Cultural Forum (Hunter, 2008) remarque que des idées semblables ont été mises de l’avant au sein d’autres pays membres de l’Union européenne : « les ministères responsables du développement culturel, agricole et rural en Italie, en France, en Allemagne et aux Pays-Bas élaborent actuellement des partenariats en matière d’investissements novateurs entre les médias, les arts et la culture au sein des collectivités rurales, et les industries fermières et agricoles qui s’y trouvent » (p. 2; le rapport comporte des renseignements plus détaillés à ce sujet). En général, ces activités semblent être « en cours de développement » (consultez également l’article d’accompagnement, de Lidia Varbanova, Ph. D.). Aux États-Unis, l’attention accordée aux arts en milieu rural se situe principalement à l’échelon des États, tel que le révèlent un certain nombre d’études de l’État du Minnesota (Shifferd, 2005; Rodning Bash, 2005), le rapport économique de l’État du Maine (p. ex. : Barringer et coll., 2004), ainsi que dans divers articles portant sur la « Wisconsin Idea » (p. ex. : Gard Ewell, 2006). Par ailleurs, on s’attend à trouver des perspectives différentes au sein d’autres États et régions (consultez également l’article d’accompagnement, de Patrick Overton, Ph. D.). Au Canada, l’intérêt des gouvernements pour les arts en milieu rural a été documenté dans un petit nombre d’études nationales, telles que celles issues de rapports émis par Statistique Canada (p. ex. : Schimpf & Sereda, 2007), dans divers rapports comportant des données concernant l’allocation de fonds et la répartition d’activités (p. ex. : le Conseil des Arts du Canada, 2001), ainsi que celles qui sont présentées dans un article de In Focus (En vue), de l’Observatoire culturel canadien (2007). Or, il faut noter l’absence d’un cadre stratégique universel au sein de ces études. En outre, un intérêt particulier pour des questions de politique et de planification locales a été remarqué dans certaines études visant des régions ou des collectivités spécifiques, telles que celle de la région de Prince Edward County, en Ontario (p. ex. : Donald, 2008). Un petit nombre de rapports régionaux et provinciaux ont été consultés dans le cadre de la présente étude, mais sans qu’aucune idée ou donnée spécifique n’y soit notée. Une attention accrue au contexte rural semble évidente lorsque l’on considère certaines politiques culturelles détaillées à l’échelon provincial et territorial ou encore, dans certains rapports plus généraux concernant « l’état des arts » (c.-à.-d. en prévision d’une éventuelle révision du cadre stratégique). Bien qu’une analyse détaillée des initiatives stratégiques dépasse l’envergure de la présente révision, un survol des recommandations clés révèle néanmoins la récurrence de six catégories : Canada 39 1. l’appartenance et la prise en charge locales; 2. l’engagement des jeunes; 3. l’édification du leadership; 4. le financement; 5. l’éducation et les partenariats, notamment les partenariats entre les organismes culturels et l’ensemble de la communauté, ainsi que ceux entre les organismes privés et sans but lucratif; et 6. la mise en œuvre d’études additionnelles. Le tableau 6 illustre quelques exemples de recommandations et des énoncés de priorités issus de la littérature. Ceux-ci sont divisés selon six catégories. Les lecteurs doivent noter que cette documentation comporte des listes de recommandations et de sous-recommandations détaillées (en anglais seulement). Par ailleurs, une révision plus exhaustive se devrait d’aborder un ensemble de thèmes plus vastes (par exemple, le développement d’installations artistiques, dont fait état le Regional Arts Australia, 2005a, ainsi que les études portant sur les tournées au Royaume-Uni). Enfin, ces six catégories récurrentes sont avant tout un point de départ pratique qui servira à exploiter l’ensemble des idées et des recommandations énoncée 40 Duxbury et Campbell Integrate heritage into community life - Encourage a more adventurous economic climate – can be fostered by supporting entrepreneurial leadership Visionary leadership needed Recognize resources, assets, and values that are embedded in the community - Développer le leadership Sense of urgency about a way of life that is being lost - Greater efforts should be undertaken to address the perception of both youth and others that youth who stay in their rural communities rather than leave to acquire different experiences, lack ambition and knowledge to make valuable contributions Promote a more socially inclusive, grassroots and culturally diverse definition of the arts in rural communities Community buy-in - Support capacity building through programs; provide support for frontline organizations The lack of young entrepreneurs may itself be significant, suggesting that support for young entrepreneurs may be insufficiently focused on rural opportunities, and that universities are insufficiently geared up to support and incubate new enterprise for their graduates in the rural hinterlands of the cities in which they operate Construct the new cultural narratives for agriculture: Develop new aesthetic, ethical and theoretical coordinates required to tackle the complexities of farming and agriculture Map new practices, contexts and partnerships: Learn how to work with farming communities Royaume-Uni Key factors in building and sustaining community engagement in rural municipalities: Canada Include arts activities in key community festivals Pursue extensive media coverage - 41 Local government can provide important leadership in valuing the arts Develop a critical mass of leadership, connected into the larger community, establishing coalitions with other community groups Canada Value the professional artists in the community and celebrate their achievements Investigate the creation of a youth element in funding programs Show how the arts can contribute to more fulfilling lives for regional youth Strengthen regional centres: How can the arts respond to current issues, the need for strong identity, and social cohesion in regional centres large and small? Community capacity building: How can the arts be better recognized and equipped as an effective medium for developing more sustainable communities? Local identity and ownership of the arts and culture is priority #1 for the future Australie Identify and cultivate leadership: Leaders motivate communities to engage in the creative economy Include arts activity that is intentionally inclusive of all ages and socio-cultural groups Encourage the strengthening of sense of place and history through the arts Establish group for arts advocacy and planning - Encourage and support local community actors to: The arts valued by non-arts leaders as essential to community well-being Grow awareness and pride in artists and art work in the community États-Unis Exemples d’énoncés figurant dans les rapports Principaux thèmes récurrents dans le cadre des recommandations relatives à l’étude portant sur les politiques Mobiliser les jeunes Appui de la communauté et prise en charge locale Tableau 6. 42 Leadership development, systems, and structures to support volunteers are lacking Networking, processes, and infrastructure are areas in which rural voluntary organizations must improve There are concerns that the needs of rural-based artists very rarely correspond to the eligibility criteria of national programs The financial situation of arts councils/boards in rural areas is very fragile Bigger is often considered better in terms of having a critical mass to justify the need for recreational and cultural services and the costeffectiveness of programs in rural, remote, and northern communities Duxbury et Campbell Mise en œuvre et complément de l’étude Éducation et partenariats Financement Canada The arts sector should review its hitherto (mainly) urban priorities and bias in the light of proposed rural proofing guidelines Develop a national arts and agriculture research, development, and pedagogy program; and possible agency, national initiative, or regional pilot for research and training Prepare the workforce: Increase educational opportunities to learn skills used by the art and culture industries Develop the connection between urban creative industries and rural post-agriculture economy Develop and implement strategies: A range of policies to support and sustain the creative economy must be formulated Provide marketing and collaboration workshops for and encourage networking among artists Establish or extend a training institute to support the long-term growth of community cultural development leadership in rural/suburban communities “Fund the foundation of the pyramid” Provide direct support to the development of the local arts infrastructure Funding agencies should coordinate funding strategies Develop an investment regimen that is flexible and adaptive Consider funding strategies that can respond directly and appropriately to specific community ideas, needs, situations, and opportunities États-Unis Explore new experimental, creative, and cultural interfaces capable of reconnecting the urban consumer arts and cultural institutions with the new agricultural and rural agendas Inner city communities and urban economic regeneration schemes have benefited significantly from strategically directed and generously funded arts and cultural investment program, as should rural schemes There should be a formal commitment on the part of Arts Council England in support of the new Rural Arts Strategy, funded at a level equivalent to that provided by the Arts Council for other similar strategic national partnerships Develop appropriate coordination, funding, and implementation mechanisms Royaume-Uni Exemples d’énoncés figurant dans les rapports There is an urgent need for robust statistics that can be used in media campaigns Governments should insist on the arts being part of the core curriculum, for all students. Support the development of cultural tourism: How can the arts contribute to greater economic growth and diversity through tourism? A desire for small grants with flexible criteria, which involved a minimal amount of paperwork, as well as funding that is ongoing, subject to a performance agreement, rather than applied for on an annual basis Local control over funding decisions is seen as a rural priority, as well as knowledge of who is involved in making jury or other funding decisions Australie Remerciements Cette étude a été commandée par le Réseau des villes créatives du Canada, qui reconnaît l’appui du ministère du Patrimoine canadien et du Rural Alberta Development Fund, par l’entremise de l’Alberta Recreation and Parks Association. Les auteurs tiennent à remercier leurs collègues et à exprimer toute leur reconnaissance pour leurs conseils judicieux lors de la réalisation de ce projet : Kim Dunphy, Cultural Development Network, Melbourne, Australie; Patrick Overton, Ph. D., Front Porch Institute, Astoria, Oregon, É.-U.; et Lidia Varbanova, Ph. D., Center for Intercultural and Social Development, Montréal. Nous tenons également à remercier tous ceux que nous avons contactés dans le cadre de la rédaction de cet article et de celle des études d’accompagnement, notamment : Sylvie Chartrand, Agriculture Canada; Joelle Mader, ministère du Patrimoine canadien; Francesco Manganiello, Sécurité publique Canada, gouvernement du Canada; M. Sharon Jeannotte, Université d’Ottawa; Sheryl McGraw et Rebekah Mahaffey, 2010 LegaciesNow; Jan Marontate, School of Communication, Université Simon Fraser; Craig Campbell, Ville de Saint John; Patricia Summers, ministry of Community Development, gouvernement de la Colombie-Britannique; Brandon Hughes, Partenariat rural du Canada/Service Canada; Greg Goodwin, Rural BC Secretariat; Nicole Chaland, Paul Chamberlain, David Daughton, Mike Toye, Lydia Giles et Janielle Brooks-Smith, Réseau canadien de DÉC; Brenda Herchmer, Alberta Recreation and Parks Association; Alain Comeau, ministère du Patrimoine canadien; Miranda Post, Affaires indiennes et du Nord Canada, région de C.-B., Robert Burrows, Alberta University; Joanna Maratta, BC Touring Council; Keith McPhail, N.-É.; Sue Stewart, Sask.; Robert Greenwood, Ph. D. et Ivan Emke, Ph. D., Memorial University of Newfoundland, T.-N.-L.; David Bruce, Mount Alison University, N.-B.; Will Garrett-Petts, Ph. D. et James Hoffman, Thompson Rivers University, C.-B.; Lori Ellis, Ville de Summerside, Î.-P.-É.; Greg Nielsen, Metropolitan Regional Arts Council, Minnesota; Bill Flood, Portland, Oregon; Greg Richards, Ph. D., Tram Research, Barcelone; Pr Henry Buller, David Harvey, Ph. D., Nicola Thomas, Ph. D., Harriet Hawkins, Ph. D. et Joanie Willett, University of Exeter, R.-U.; Daniel Carpenter, Voluntary Arts Network, R.-U.; Ruth Smiles, Regional Arts Australia; Christopher Madden, Australian Council for the Arts; Sarah Gardner et Natasha Eves, La Fédération internationale de conseils des arts et d’agences culturelles; Chris Gibson, Ph. D., Rural Cultural Research Program, University of Wollongong; et la Pre Kate Darian-Smith, University of Melbourne. Canada 43 Annexe A. Profils des collectivités au Canada (en anglais) These community profiles draw on examples across the country and are, of course, not exhaustive. Some are profiles of towns that have used arts and creativity as a staple of their community planning, while others are profiles of individual projects that have aided in revitalizing the area. All populations are approximate. Liste des profils des collectivités : Dawson City, Yukon Osoyoos, British Columbia Alert Bay, British Columbia Skidegate, British Columbia Hazelton, British Columbia Chemanius, British Columbia Nelson, British Columbia Rosebud, Alberta Strathcona County, Alberta Assiniboia, Saskatchewan Val Marie, Saskatchewan Prince Edward County, Ontario Grand Argenteuil, Quebec (en français) Amqui, Quebec (en français) Bouctouche, New Brunswick Cape Breton Island, Nova Scotia Canning, Nova Scotia Bear River, Nova Scotia Briefs: Elora, Ontario Eastend, Saskatchewan Claybank, Saskatchewan Kensington, Prince Edward Island Norris Point, Woody Point, and Rocky Harbour, Newfoundland Répertoire d’actions culturelles en milieu rural : Liste des profils dressée par Les Arts et la Ville (en français) 44 Duxbury et Campbell Dawson City, Yukon Population 2,000-3,500 (seasonal) Overview According to the Klondike Institute of Arts and Culture, Canada’s Yukon Territory has perhaps the highest per capita population of artists, at every level in every discipline, in the country. As the Klondike Institute of Arts and Culture states, many artists came for two weeks – 20 years ago – and fell for the unique landscape and quality of life offered in the small city. With a combination of natural beauty, colourful history, festivals and arts institutions, the small city of Dawson has supported and produced many widely recognized artists. Main Players Dawson’s cultural institutions and organizations, including Pierre Berton House, Dawson City Art Society, Dawson City Music Festival, Klondike Institute of Arts and Culture, Dawson City Museum, and Dänojà Zho (Long Ago House) Cultural Centre Key Results Dawson promotes a certain mystique in its appeal: “There is something special about this land” reads the Klondike Institute of Arts and Culture website, “Why is it often said by writers-in-residence completing their Pierre Berton House residency program: ‘I won’t leave unless I can come back’?”. The town also promotes the timelessness in the appeal of its art, including that rooted in the history of the 1890s gold rush that made the city famous. There are key groups in Dawson that form an infrastructure around the arts. The Dawson City Art Society (DCAS), formed in 1998, is a community organization created to enrich the quality of life through enhancement of art, culture, and the economy in the Yukon. Formed by local artists, the Society purchased the neglected, historic Odd Fellows Hall in Dawson City, and refurbished the building. To fulfill their mandate, the DCAS created the School of Visual Art, operated by the Klondike Institute of Arts and Culture, the operating arm of DCAS. The school is located in a 7,800 square foot historic building in downtown Dawson City, custom designed specifically for the needs of the program with workspaces for each student, common studio facilities, a lecture room, a media lab, indoor/outdoor common areas, a sculpture shop, a library/resource centre, a student gallery and an art supplies store. Storage areas for student projects and supplies are provided throughout the building, and wireless is available throughout the facility. Festivals in Dawson draw on its history, including the famous gold rush. The word authentic is used with some pride, as historical accuracy is included in all heritage events. Dawson hosts an annual short film festival, arts festival, and several artist residencies. More Information http://www.kiac.org/ Canada 45 Osoyoos, British Columbia Overview NK’MIP Desert Cultural Centre was opened in September 2002. Located in Osoyoos, BC, the Centre celebrates the history and culture of the Okanagan First Nation and the desert lands that they have lived on for thousands of years. The Nk’Mip Desert lands are one of Canada’s three most endangered ecosystems and are home to many rare plant and animal species. The Centre provides visitors an opportunity to experience the rich Okanagan culture and desert environments, with guided walks, a traditional Okanagan village, and desert reptile programs. The mission of the NK’MIP Desert Cultural Centre is to provide visitors with an authentic and unique experience that promotes respect and understanding of the living culture of the Okanagan People and the desert lands that sustained them. Key Players The Osoyoos Indian Band Development Corporation manages businesses with annual budgets in excess of $17 million dollars and administers its own health, social, educational and municipal services. Situated in one of Canada’s premier agricultural and tourism regions, the Band’s 32,000 acres offer opportunities in agriculture, eco-tourism, commercial, industrial, and residential developments. Through leases and joint ventures the community has built meaningful business relationships that have created social and employment opportunities for both natives and non-natives in the South Okanagan. Lessons Learned Economic development, and Native control over this development, seem to be key. "We are very focused on the future, and we realize that we create this future by our actions. The single most important key to First Nation self-reliance is economic development." – Chief Clarence Louie More Information http://www.oib.ca/profile.asp http://www.cultureandcommunities.ca/resources/cultural-facility-profiles/cultural-spacescommunity-impacts/nkmip-desert-cultural-centre.html Alert Bay, British Columbia Overview Alert Bay is the home of the U’mista Cultural Centre and home to the Kwakwaka’wakw people. The mandate of the U’mista Cultural Society is to ensure the survival of all aspects of the cultural heritage of the Kwakwaka’wakw. U’mista Cultural Centre is one of the longestoperating and most successful First Nations cultural facilities in BC, founded in 1980 as a ground breaking project to house potlatch artifacts which had been seized by government during an earlier period of cultural repression. The return of the potlatch artifacts not only provided U’mista’s name (“the return of something important”) and sparked a general trend toward repatriation of First Nations and cultural artifacts, it caused the creation of a physical facility and human resources infrastructure which have been successfully operated for over two decades. U’mista now operates a modern museum and cultural education facility in Alert 46 Duxbury et Campbell Bay. Their operations include the museum, an extensive art gallery and gift shop, group tours, and presentations by dance troupes. The facility also hosts international scholars, and supports researchers in a range of disciplines. Key players The ʼWiʼlaʼmola Project is the business arm of the U’mista Cultural Society, a non-profit organization which holds the mandate to represent the cultural values and property of the Kwakwakaʼwakw First Nation (KFN). The ʼWiʼlaʼmola project serves both the KFN and the non-native population as a whole, with U’mista overseeing any cultural components of the business activity developments. The ʼWiʼlaʼmola Project respectfully explores opportunities to use Kwakwaka’wakw culture to create employment, business development and economic benefits for the community. This initiative of the Kwakwakaʼwakw First Nation is to nurture and steward the cultural heritage of the Kwakʼwala-speaking people through education of both visitors and the community, is put into practice through the activities of the ʼWiʼlaʼmola project. More information http://www.umista.org/home/index.php Skidegate, Haida Gwaii, British Columbia Overview The Kaay Llnagaay Heritage Centre located at Kaay Llnagaay (Sea Lion Town), Skidegate, is a multi-million dollar cultural project. When completed, the Kaay Llnagaay Heritage Centre will present an integrated complex of learning, working and performance facilities. The centre aims to be “a place for nurturing Haida culture and sharing it with the rest of the world. A learning place to discover the cultural worlds within us, the natural and supernatural world around us and the connections between us all. A sacred place to honour our ancestors, the generations gone by. A teaching place to convey knowledge and skills, old and new, to the coming generations.” The Centre includes teaching centres, a large performance area, an expanded museum, and a lodge for visitors. Main Players Skidegate Band Council Funding provided by: the Province of British Columbia; Indian and Northern Affairs Canada; Parks Canada; Western Economic Diversification Canada; Canadian Heritage – Museum Assistance Program; Gwaii Trust Society, Haida Gwaii; Vancouver Foundation; and Skeena Native Development Society. Key Results In this area, commercial fishing and logging were once the main sources of employment but as natural resources have been depleted these industries have declined in importance. Haida art is world-renowned, and the Heritage Centre will be able to both provide local employment as well as showcase this art to the world. In this way, the museum is a well-crafted transitional opportunity for employment, driven by the local population. Canada 47 More Information http://www.haidaheritagecentre.com/ Hazelton, British Columbia Population 1,350 Overview The ‘Ksan Historical Village and Museum is located near Hazelton in northern BC. As a replicated ancient village, ‘Ksan illustrates many features of a historic Gitxsan village, such as the houses that form a single line with each building facing the river, with the decorated fronts and totem poles visible from the water. The Village’s role is to illustrate the richness of Gitxsan culture and history and also provide economic opportunities for First Nations people of the Upper Skeena River region. The collection of cultural objects is housed in what is called a treasure house, as the word museum implies “lifeless and unused items.” Work began in the 1950s, as the Hazelton Mayor and the Library Association believed that the economic and social problems of Hazelton would diminish if all people, both First Nations and non-First Nations, understood the stature, richness, and sophistication of Gitxsan society and culture. In the beginning financial support for the project was limited and progress was slow. Hazelton, a low-income area, had a limited tax base with a small population of 450 at this time. During this period, the members of the association began researching museum administration and operation, as well as Gitxsan history and culture. The association had no thought of buying artifacts, but to obtain them on loan from their owners with the understanding that they could remove them from the proposed museum at any time when they were needed for use. The ‘Ksan Performing Arts Group has worked with ‘Ksan Historical Village and Museum for over 28 years and continues to be a fundamental component of this institution. The ‘Ksan Performing Arts Group are cultural ambassadors for the Gitxsan people. They have performed throughout the province, across Canada, and around the world. Main Players Agricultural and Rural Development Agency Province of British Columbia Hazelton Library Association Hazelton Mayor Margaret Sargent Key Lessons The partnerships between the City, the Library, and the Band were key to coordinating funding efforts. As this was a project with a distinct regeneration goal, this partnership was essential to a sustainable regeneration of the whole community. More Information http://www.ksan.org/html/arts.htm 48 Duxbury et Campbell Chemainus, British Columbia Population 5,000 Overview Chemainus, on Vancouver Island’s east shore, is an isolated town between a mountain range and the ocean, with a river cutting it off from the south and a major highway to the north. Mining, fishing, and forestry were the original industries, but similar to many small BC towns, these industries were not sustainable. As a mill town, Chemanius was dependent on the success of the mill, and in 1981 a recession in BC hit the resource sector very hard. When the Chemanius mill closed in 1983, 650 workers were laid off. The mill reopened two years later but with a major change in technology, which meant that only 145 workers were re-hired. But the town had already moved into a new industry – tourism. Artists stepped in to redefine the town. During the time leading up to the mill closure, Chemainus was faced with the very real possibility of becoming the next BC ghost town. The fact that the town was off the main highway made it more vulnerable. Under the BC government of Bill Van der Zalm, community initiative grants were being developed to aid towns in revitalization projects. The City’s then Mayor, Graham Bruce, presented the concept of a tourism strategy based on an outdoor mural project to the community. Chemanius was to be the first community to complete a revitalization, and also to become a world-famous example of how even a small town can create substantial change for survival. Known now as a “mural town,” Chemanius has inspired many other small towns internationally to use arts and culture as a regenerative tool. The Chemainus Theatre Festival began in 1993, as another key arts event in the town. This festival is a sister-organization to the Rosebud Theatre and School of the Arts, discussed below. Key Players BC Premier Bill Van der Zalm Chemanius Mayor Graham Bruce Lessons Learned The actual creation of the murals was the “easy, fun … and often the least expensive” part of this project, and needed to be incorporated into a complete economic development strategy for tourism. The overall strategy took considerable planning, research, and a dedicated group of people to initiate. The community used murals as a springboard for long-term commitment to tourism. Chemanius found it important to invest in a unique, creative product that became a partnership to serve and include the entire community. Chemainus remains one of the most successful projects of its kind, some 25 years later. The Chemainus Murals have become a model for communities around the world to develop a culture-based economic development model that engages the community by exploring its history, its beauty, and its talents. While mural painting is not a new concept even in North America (Los Angeles is another example), as an economic development strategy it makes this small town’s mural project unique, and the standard by which many communities followed suit. Canada 49 More Information http://www.chemainus.com/ Nelson, BC and area Population approx 10,000 Overview Nelson has earned a reputation as the #1 small arts town in Canada. Businesses throughout the city display art year-round in support of local artists, and the summer months feature a special festival to partner arts and business owners to turn local shops into galleries. Each month during the summer there is a show opening open to the public, with food, drinks, and live music. Other activities and attractions include both local and imported performances at the heritage Capitol Theatre, as well as at smaller venues in bars and restaurants. Artwalk rotates the work of 65-70 artists though 17 restaurants and shops, with a walking tour through downtown Nelson that draws thousands each year. Also in Nelson, the Kootenay School of the Arts at Selkirk College (KSA) offers a two-year diploma in Art, Craft, and Design. Kootenay School of the Arts is dedicated to graduating students who can make a living through their professions in these media. In support of this goal, the school’s curriculum emphasizes studio work and the faculty is made up of individuals who are, first and foremost, practicing artists and craftspeople. The area around Nelson is also known for cultural activity. The annual Kaslo Jazz Festival is nearby, and the Shambhala rave in nearby Salmo River attracts 10,000 people each summer. Main Players Kootenay School of the Arts Nelson and District Arts Council Heritage Capitol Theatre Nelson Visitor Centre Rosebud, Alberta Population 100-300 (seasonal) Overview Rosebud is a rural community located 100 km northeast of Calgary and 35 km southwest of Drumheller. The town literally supports one industry: a performing arts school and theatre. The Rosebud Theatre and Rosebud School of the Arts employs the entire population in one capacity or the other, from teachers to tech staff to performers to the tourism industry. Rosebud is visited by over 40,000 people every year. European settlers began homesteading in Rosebud in 1883, laying the foundation for a strong farming and ranching community. The hamlet flourished in the early 1900s, reaching a population of 300 in the 1920s. By the early 1970s, however, the population dropped to less than 30, and abandoned buildings awaited demolition. But in 1973, LaVerne Erickson, a music and art teacher in Calgary, started Rosebud Camp of the Arts as a summer outreach 50 Duxbury et Campbell program for Calgary youth. This led directly to the founding in 1977 of the Rosebud Fine Arts High School. The school combined academics, arts, and work experience. The school created an artistic hub in Rosebud. In 1986, Rosebud School of the Arts launched its post-secondary apprenticeship programme focused on theatre, music, and creative arts ministry training. In 1988, the Alberta Legislature passed the Rosebud School of the Arts Act, creating a Christian arts guild school. In 1998, the Canadian Badlands Performing Arts Summer School also began. In 2002-03, over 70 students from Alberta, British Columbia, Saskatchewan, Manitoba, Ontario, the United States, and the Netherlands participated in the secondary and post-secondary programmes offered by Rosebud School of the Arts. The theater expanded in the 1990s with renovations to the main Opera House. Seating changed from “150 packed in on old church pews to 220 lounging in tiered-theatre seats.” A heating and air-conditioning system replaced the need to bring blankets in the winter and fans in the summer. Actors were given a larger stage with a full dressing room, and patrons were treated to a lobby complete with washrooms, running water, and a concession area. In 1993, a sister organization, Chemainus Theatre Festival, opened on Vancouver Island. Much of the first staff as well as the first two shows came from Rosebud. It has now grown to the largest professional theatre on the Island, attracting over 60,000 people per year. RSA still oversees the Chemainus Internship Programme, also known as the Young Company. Lessons Learned For this community, one arts-based industry was enough to literally save the town. Community participation and a unique institution created a sustainable core regeneration project. More information http://www.rosebudschoolofthearts.com/ http://www.rosebudtheatre.com/Default.aspx Strathcona County, Alberta County population 71,986 Overview Strathcona County is constructing a new community centre, opening in 2010. It will contain a new library on two floors, flexible indoor and outdoor spaces to accommodate a wide range of community activities, expanded and accessible space for Family and Community Services, new municipal space including meeting rooms and offices, and underground parking. Serving all Strathcona County residents, the Community Centre will become a year-round hub for community events, cultural activity, and learning. Its design and programming will reflect the communities’ mix of urban and rural character. The community is currently looking at having residents become involved in creating a “legacy art piece” to be included in the building. The Centre is dedicated to bringing arts, culture, and heritage groups together to voice longterm space requirements and advocate for a facility to meet these needs. The first objective realized was a display area for culture at the Sherwood Park Mall. Exhibits in this display, located in the Library’s upper lobby, showcased the County’s rich cultural heritage for mall shoppers. Having envisioned a major cultural hub for the County, the Culture and Heritage Canada 51 Association is pleased to see construction underway for the Community Centre as part of Centre in the Park, which will include a new home for the Library and also space for art. The County also has an Arts, Culture and Heritage Community Investment Program, with granting programs for events, arts development, and community arts organizations. The County’s Arts Acquisition program develops and maintains the County’s permanent art collection. The Art Society of Strathcona County operates the Loft Gallery for member exhibitions and coordinates a community mural project. Main Players Strathcona County Library Strathcona Art Society Alberta Lottery Funding Lessons Learned As the community centre project is in progress lessons are not immediately evident. Assiniboia, Saskatchewan Population 2,300 Overview The Shurniak Art Gallery houses founder Bill Shurniak’s private collection of original paintings, sculptures, and artifacts from around the world. Opened in July 2005, the 8,000 square foot gallery has a landscaped courtyard and grounds featuring sculptures by Canadian artists Robert Davidson and Joe Fafard. With the opening of Shurniak Art Gallery on July 30, 2005, Assiniboia left its former unsophisticated small town image behind. The gallery became the most important tourist attraction in the area, attracting art lovers internationally and making the town an art mecca on the map of southern Saskatchewan. The gallery features the works of A.J. Casson, A.Y. Jackson, Lawren Harris, Arthur Lismer, and Allen Sapp, among others. Contemporary Canadian and Saskatchewan artists are featured as part of rotating exhibits. The Assiniboia and District Arts Council has an office in the gallery building. Although the art gallery has a high profile, Assiniboia still considers agriculture its main industry. The arts do not feature on the town’s main website. Main players Founder Bill Shurniak Key Results In this community, it took one man’s passion for art to create a completely new arts-oriented focal point for the town. The relatively small town of Assiniboia in rural Saskatchewan has suddenly become very important in the world of Canadian art. 52 Duxbury et Campbell Val Marie, Saskatchewan Population 140 Overview In August 1994, Val Marie hosted Grasslands — Where Heaven Meets Earth, a multidisciplinary arts experience that drew upon the experiences and materials provided by local residents. This community-wide events is an example of how one event can bring together outsiders and locals, as well as cross-discipline performers and stimulate an revival of aesthetic and community awareness. Main Players The project involved support and participation by Common Weal Community Arts, the Art Gallery of Swift Current, the Swift Current Allied Arts Council, Grasslands National Park, Friends of the Grasslands, as well as choreographer Bill Coleman, visual artist Edward Poitras, musician Gordon Monahan, and dancers Margie Gillis, David Earle, Robin Poitras, Johanna Bundon, Katherine Oledski, Krista Solheim, Jennifer Dahl, Peter Trotzmer, Carol Prieur, and Laurence Lemieux. The event was supported by the Inter-Arts Office and the Dance Section of the Canada Council. Coleman-Lemieux & Compagnie’s Dance in the Community projects are specifically designed to bring professional artists into rural communities. The Val Marie project included much more than the final performance: the community saw contemporary music and dance workshops in Val Marie and Shaunavon; kite-making in the schools, coordinated by the Art Gallery of Swift Current; the creation of banners by 12 visual artists throughout southwest Saskatchewan; collaborative quilting production and the recording of quilters’ stories for an art exhibit in the Prairie Wind & Silver Sage Museum; the construction of corral-style fencing along the main street of Val Marie as a symbol of a community drawn together in farming life; and children’s finger-painting on salt-lick tubs decorated with local plant life. The final performance was in the protected heritage site of Grasslands National Park. Around 600 audience members gathered at the entrance of the park, and followed a set route to the “venue.” Along the way, dancers moved in and out of the landscape, and at the site, the audience found well-known Canadian dancer Margie Gillis standing in the doorway of an abandoned farmhouse. The dancers, audience, and landscape all had an equal role in the final performance. Key Results The former Mayor of Val Marie wrote this letter to the artists following the performance: “…It seemed to have affected the consciousness of the local population – people are still awed at the event and now, 3 months later, it is still a major topic of conversation. Although it seemed a bit high-brow for us at the beginning, it turned out to be an event that made many people appreciate dance. Also, on a more practical level, our business (The Convent Country Inn) has been constantly busy since the dance, which will make it the best business year in the last seven years. I spoke with the owner of the local grocery store, Whitemud Grocery, and their business has been much busier than usual since the dance. We believe that it has somehow made people more community minded. The town itself, with the props that were left, is much more aesthetically pleasing and many of the local people have felt an intense pride in their village being picked for this event. It is very difficult to put a finger on what Canada 53 exactly happened – maybe it was the energy that the dancers brought to the village – this may sound a bit off the wall, but something happened that has changed this town for the better…” Prince Edward County, Ontario Overview Prince Edward County (PEC) is a rural municipality of 25,000 located south of Belleville, approximately midway between Toronto and Montreal. At the turn of the 21st century, a “creative economy” model took over from a resource and farming based economy. A formal cultural planning process took place in 2005, resulting in a municipal cultural plan. Creative industries are a major part of population retention and attraction (see buildanewlife.ca). A key strategy in PEC economic development is promoting The County as an “artistic haven” which will help to attract other “creatives” and will in turn generate economic growth. Main Players P.E.L.A. Institute for Rural Development PEC Economic Development Office Key Results PEC is the focus of a series of “creative class” studies tracking the efforts of the county to use the “creative rural economy” strategy for revitalization. Measured results from the Cultural Plan include: $45 million in wine industry investment over seven years; 12 new wineries – 750 acres of grapes (from zero eight years ago); $18 million per annum in wine sales (from zero eight years ago); $50-$85 million in projected wine sales five to seven years out – potentially doubling the agricultural GDP; building permits up 300% over seven years; $150 million in incremental investment; a booming construction industry; tourism visits from 1999 to 2004 up 74% (225,000 to 500,000); a 168% increase in tourism spending, from $25 million spent in 1999, to $65 million in 2004, and expected to reach $100 million by 2009; property assessment up $750 million; $20-30 million investment in downtown revitalization in Picton (population 3,000) over the last few years with major condominium, commercial, and retail developments, a new boutique hotel with culinary and Jazz Bar, new housing, and waterfront development; from a declining population (1996 – 2001 census) to a 2% rise (2001 – 2006); and currently over a half billion dollars in qualified investment leads (Baeker, 2008, p. 11). A major study undertaken in 2008 for the Prince Edward/Lennox and Addington Community Future Development Corporation, Growing the Creative Rural Economy in Prince Edward County, addressed issues of human capitol, innovation, and tourism in the context of the region’s large growth in these areas. The study includes many recommendations for further development focusing on ecological and community-based sustainability. An earlier study published in 2005 by Brain Hracs addresses many similar trends. Culture in the Countryside: A Study of Economic Development and Social Change in Prince Edward County, Ontario addresses culture-based community economic development, the issues evident in Prince Edward County’s development, and the model’s potential for use as a case study by other communities. 54 Duxbury et Campbell Lessons Learned Picton’s Regent theatre – a 1919 heritage theatre with 1,100 seats – faced a major crisis in 2004. Toronto’s Passe Murraille theatre company was putting on their second summer season and sales did not go well. Accordingly, the summer session was cancelled, and the theatre was forced to lay off its permanent staff. This “crisis” became a focal point for a community that depended on the economic spin-offs of the theatre, such as dinners out and pre-show shopping, but did not themselves buy tickets. This led to substantial community discussion about the role of the theatre, the role of programming, and the theatre’s responsiveness to its local audience. The crisis also revealed that theatre also had not received much municipal support compared to other infrastructure projects, and faced huge operating costs. The community rallied for fundraisers and vocally voiced their support of the theatre, but stressed the need to provide programming not simply aimed at tourists, but at the local population. Grand Argenteuil Quebec Regional population 30,000 Résumé La Route des Arts du grand Argenteuil est un projet géré par les artistes avec très peu de soutien externe. En 2003, le projet a même été presque autofinancé. Sur une période de quatre ans, ce groupe d’artistes est parvenu à plus que doubler le nombre d’ateliers ouverts au public, tripler le nombre des visites des ateliers et à englober la totalité de la région d’Argenteuil et de ses environs (distance du trajet augmenté de 250 km à presque 500 km). Selon les organisateurs, c’est particulièrement impressionnant puisque la région n’est pas reconnue particulièrement pour son offre culturelle. Nul doute que les citoyens sont de plus en plus attirés par la Route des Arts puisque la fréquentation des ateliers ne cesse d’augmenter. De plus, les citoyens apprécient le concours organisé par la Route des Arts. Les visiteurs sont invités à remplir un coupon de tirage dans chacun des ateliers. Les prix sont offerts par les marchands de la région. Par exemple, en 2003, une fin de semaine de deux jours pour six personnes dans un chalet au Domaine de la Nouvelle France à Wentworth Nord a été offerte. La Route des Arts a permis une concertation entre les artistes, les municipalités et les institutions régionales. Ces dernières soutiennent la Route des arts par leurs connaissances professionnelles et leurs propres réseaux. Les organisateurs de la Route des Arts ont établi de bons contacts avec les musées locaux, l’Association touristique des Laurentides, la MRC Argenteuil, le CLD de la MRC Argenteuil, le CRD des Laurentides et le Conseil de la culture des Laurentides, ainsi qu’avec les municipalités de la région. La promotion d’Argenteuil comme destination touristique à caractère culturel s’inscrit à 100 % dans la démarche de promotion économique de la région. Les organisateurs ont constaté que le retour de la Route des arts comme activité annuelle a eu un impact important sur l’industrie touristique locale, soit sur les visiteurs ponctuels ou les vacanciers. Selon les artistes responsables de la Routes des Arts, ceux-ci contribuent au développement du tourisme régional, pas seulement dans une seule ville mais à travers une grande région, celle d’Argenteuil et de ses environs. En dépit des conditions défavorables, et de la concurrence féroce par rapport à d’autres projets populaires qui ont lieu pendant la même période, la Route des Arts a considérablement contribué au développement touristique de la région, d’autant plus que l’achalandage augmente d’année en année. Canada 55 Résultats Pour le milieu artistique, la Route des Arts est un succès stimulant. La fréquence des visites dans les ateliers a augmenté. La circulation des visiteurs dans tous les studios s’est élargie. La visibilité de l’événement dans les médias a été améliorée de beaucoup grâce aux journaux locaux. Plus d’information http://www.artsville.org/index.php?page=repertoire_dactions_culturelles_en_milieu_rural_fr&lang=fr Amqui, Quebec Population 5,000 Souper-gala Artquimédia – Résumé Artquimédia est d’abord un concours ouvert à tous les artistes du territoire de la MRC La Matapédia dans les catégories arts visuels, arts littéraires et arts d’interprétation et ce, pour les artistes en formation, les artistes amateurs, les artistes professionnels et les groupes d’artistes. Ce concours se termine par la remise des prix à l’occasion du souper-gala annuel. Au cours de cette soirée, tous les artistes inscrits sont presents et font partie intégrante de la programmation de la soirée. Les artistes en arts visuels participent à l’exposition alors que les artistes en arts d’interprétation et en littérature font partie du spectacle. Cette activité se veut également une levée de fonds pour la Fondation Artquimédia vouée à la promotion et à l’éducation artistiques sur l’ensemble du territoire de la MRC La Matapédia. Le concours se tient du mois d’août au mois d’octobre et la soirée a lieu en novembre. Le facteur déterminant qui a donné naissance au projet Artquimédia est l’éloignement de la région par rapport aux grands centres urbains et le peu de ressources disponibles pour favoriser le développement des arts et le soutien aux artistes. En région, il est plus difficile d’avoir accès à des musées, centres d’art, écoles de formation en musique, en danse, en théâtre, etc. Toutefois, dans la région de La Matapédia comme partout ailleurs, il y a de nombreuses personnes talentueuses qui ont besoin d’être encouragées à poursuivre leur démarche artistique. Financier par entreprises privées et commerces, Ville d’Amqui, ministère de la Culture et des Communications, député, centre local de développement (CLD). Résultats Pour les artistes, les retombées sont nombreuses. D’abord, ils se font connaître participation au souper-gala Artquimédia, ils sont souvent invités à participer spectacles et d’autres activités culturelles. L’encouragement d’Artquimédia poursuivre leur démarche artistique et incite les jeunes à s’inscrire à des cours spécialisées dans le domaine des arts. Certains artistes ont même été découverts l’occasion d’un souper-gala (par exemple : Geneviève Charest, Alexandre Valade, Par ailleurs, le souper-gala Artquimédia permet à l’ensemble de la population d’assister qualité. Chaque année, l’événement fait salle comble (450 personnes) et, selon les présenté dans une salle plus grande, le souper-gala réunirait une assistance plus personne seulement, on propose, lors de cette soirée, une exposition des artistes inscrits visuels, un souper gastronomique de cinq services, un spectacle des artistes inscrits et en littérature ainsi que la remise des bourses et des agates aux récipiendaires. Il s’agit également 56 Duxbury et Campbell d’une belle visibilité pour la municipalité. Amqui a la reputation règne une vie culturelle très intéressante, une ville vivante où il fait bon vivre. Plus d’information http://www.artsville.org/index.php?page=repertoire_dactions_culturelles_en_milieu_rural_fr&lang=fr Bouctouche, New Brunswick Population 2,380 Overview Located on a small island in the town of Bouctouche, New Brunswick, Le Pays de la Sagouine is a reproduction mid-century Acadian village inspired by the town’s famous novelist, Antonine Maillet, and her most celebrated character, La Sagouine. The village features summer programs of theatre, music, comedy, and dance, allowing visitors to discover not only the tales of the Acadian heroine, La Sagouine, but also the unique Acadian culture of the region. Maillet, who was awarded the prestigious Prix Goncourt in 1979, was approached in the 1980s for permission to create a tourist attraction based on her book. Federal, provincial, and municipal negotiation was needed but finally the site was selected and Le Pays de la Sagouine opened in 1992. The site accommodates eight to ten professional actors, as well as several house bands and a popular dinner theatre featuring authentic Acadian cuisine. Originally, there was local skepticism about the project. The character of La Sagouine is portrayed as poor and uneducated, which locals thought would reflect badly on their culture. The development of a cultural facility in an isolated community was questioned, as was the need for another restaurant in the area, which was seen as competition by existing businesses. Main Players Le Pays de la Sagouine was a municipally driven project, developed originally as a tourism initiative. Prior to its development, explains Executive Director Paul LeBlanc, the cultural scene in Bouctouche was virtually non-existent, and the town’s most popular attraction was the local bingo hall. Since its inception, however, the site has not only given an identity to the community, but has also provided a source of entertainment for local residents. It was in part because of local needs – local residents wanted to see new additions to the program – that the facility began to include several more actors. Key Results According to LeBlanc, the site has developed into much more than just a tourist attraction: “Now we are as much a community attraction, with locals buying season passes and coming to the site dozens of times per season. And let’s not forget that the facility has become a very important economic engine in the region.” The development of Le Pays de la Sagouine has had a profound impact on the community of Bouctouche and the province of New Brunswick. A recent economic impact study found that, as one of the most prominent tourist attractions in the province, the site has contributed significantly to the economic growth of the entire region. “Everything in the town has come to revolve around La Sagouine,” says LeBlanc. Before Le Pays de la Sagouine was built, there were perhaps a handful of bed and breakfasts Canada 57 in the entire town, but now there are dozens. Other significant tourist attractions have also opened in the region. Business owners, who were initially concerned over the construction of a competing business area, now credit the site for their increased success. More information http://www.sagouine.com/ http://www.cultureandcommunities.ca/resources/cultural-facility-profiles/cultural-spacescommunity-impacts/le-pays-de-la-sagouine.html Cape Breton, Nova Scotia Island population 147,454 Overview The Celtic Colours International Festival is a major event for communities in Cape Breton, set apart from other festivals as it incorporates locations across the island. Communities around Cape Breton Island host concerts and workshops at a time when the fall leaves are at their most brilliant and travelling around the island offers stunning views. The 200-year-old heritage of the communities provides context for a celebration of living Celtic culture. In many of these communities, the local fire hall, parish hall, or community centre has hosted musical events for generations, in some cases literally moving the fire trucks out of the hall to accommodate a dance. Venues for Celtic Colours are all prominent community gathering places, and vary from an 18th century reconstructed French Chapel to brand new performance facilities to community halls. A major area of growth for the Festival in 2008 was in education programming and community events with more than 265 events being offered in addition to the 47 concerts. Educational programming ranged from workshops and lectures to square dances and community suppers, reflecting many aspects of the local culture. Festival organizers worked with over 70 non-profit community groups. More than 10,000 people, both locals and visitors, attended these events. Main Players The Festival is supported by local business sponsorships, municipal, provincial, national, and international government agencies, and media and businesses partnerships. It is run by a board of directors. Key Results The 12th annual festival (2008) created a great season for local businesses, generating an economic impact of $4.5 million. In spite of a decline in tourism across the country, the festival sold 18,600 tickets, which is comparable to sales over the past few years. “Last year was a banner year and we almost reached 20,000 tickets, but 18-19,000 is our normal range so we’re delighted to be holding our own when so many events are experiencing major declines,” said Dr. Jacquelyn Scott, Chair of the Board of Directors. The audience was 50% local, 50% visitors, which indicates a long-term vitality for the festival. More Information http://www.celtic-colours.com/index.php 58 Duxbury et Campbell Canning, Nova Scotia Population 859 Overview The Ross Creek Centre for the Arts is a unique institution in Canada, bringing together the best in arts education for youth with community and professional artist programs. The Centre is a research and development centre for the arts of all disciplines and cultures and is proud to help facilitate the development of new art from around the world in wonderful facilities on a picturesque farm in rural Nova Scotia. On 186 acres of farm and forest overlooking the Bay of Fundy, the Centre offers programs and facilities for artists and students of the visual arts (painting, sculpture, ceramics, textiles, multi-media, and new media), performing arts (music, dance, theatre, opera), literary arts (fiction, non-fiction, poetry, journalism), architecture, film (fiction, journalism, documentary, animation), and fine craft (jewellery, fabric, pottery, etc.). Classes for children through adults are offered, at varying levels of experience. A program for aboriginal art, mainly Mi’kmaq, includes community and youth programs. Ross Creek also has two performances spaces, two galleries, three visual arts studios, and an outdoor stage, and offers professional artist residencies at the Centre’s multi-disciplinary artist colony. The founders of the Centre wanted to create the opportunity for Nova Scotia artists to return or remain at home rather than leave for Montreal or Toronto to pursue their careers – as the founders originally had to do. Modelled on the Banff Centre for the Arts, the provision of a dedicated creation and residency space was needed in the area. “In the same way a scientist needs appropriate facilities in which to do their research, I would say that artists need that as well,” said co-founder Chris O’Neill. Main players Founders Chris O’Neill and Ken Schwartz More Information http://www.artscentre.ca/ Town of Bear River, Nova Scotia Overview Many Bear River residents are visiting artists who put down roots, resulting in a thriving community of artists. Natural beauty, together with a peaceful setting, contributes to the inspiration of the talented craftspeople who make up this village. Heritage and artisan and sustainability initiatives characterize the town. Known as the “village on stilts,” Bear River boasts a unique business district – the historic buildings huddled in the downtown area have been constructed upon wooden stilts, suspending them over parceled portions of the river’s edge. The shopping district is characterized by artisan and craft shops. Canada 59 Development initiatives include eco-friendly development such as the existing solar aquatics treatment plant, as well as a vineyard project. The preservation of wooden vessels is an important part of the area heritage. Approximately one mile from the heart of the village can be found the Bear River First Nations Community Heritage and Cultural Centre, an interpretive centre depicting the native Mi’kmaw culture. More information http://www.bearriver.ca/ Brief community initiative summaries Elora, Ontario Population 3,800 Elora is known as a historic village and artisan centre, with a strong tourism base. The Elora Festival is widely known. The town has been called a “heritage shopping village” with such a successful focus on heritage and artisan shopping centres that it tended to destroy the authentic in favour of the tourist-friendly version of an artist’s community (Mitchell & Coghill, 2000). Elora’s strengths lie in the conversion of major historical buildings into modern tourist amenities, without sacrificing their historical qualities, as well as the promotion of its arts, music, and literary festivals. Eastend, Saskatchewan Population 570 Since the discovery of “Scotty,” Canada’s most complete T.rex, thousands of tourists have flocked to the Valley of Hidden Secrets to view the rare collection of ancient artifacts. Eastend also features the site of Crazy Horses’ 1876 encampment, a historical N.W.M.P. post, Chocolate Peak, historical Chimney Coulee, and the scenic viewpoint of Jones Peak. AGES (Artisans Guild of Eastend and surrounding area) showcases artists in the southwest corner of Saskatchewan, gives experience to starting artists, builds a collective arts community, holds workshops, and features artists monthly. Claybank, Saskatchewan The Claybank Brick Plant is a national and provincial historic site. The plant operated from 1914 to 1989 and was known for producing firebricks from the rare refractory clay deposits nearby. It also produced fine quality face bricks for several significant buildings including the Bessborough Hotel in Saskatoon and the Château Frontenac in Quebec City. The large complex features over 20 structures, including a visitor centre and gift shop in the former bunkhouse. Co-operatively owned and managed by the Saskatchewan Heritage Foundation and the Claybank Brick Plant Historical Society, the complex is open to the public annually from mid-May to Labour Day and is a significant tourist draw. 60 Duxbury et Campbell Kensington, Prince Edward Island Population 1,485 The annual Indian River Festival is a major tourist attraction for this area. In the 1970s and 1980s, the St. Mary’s Church, now home to the Indian River Festival, was in need of major renovations. At that time, suggestions were made to tear down the church as the parish alone could not afford the needed work. With the launch of the “Save St. Mary’s” campaign in 1987, area churches, businesses, individuals, families, and other groups raised enough funding to complete the necessary renovations within 3 years. One of the campaign initiatives was the Sundays in the Summer concert series, which has proved to be extremely popular and a successful source of revenue. Originally run by a group of volunteers, in order to expand the festival the Indian River Festival Association Inc. was formed in 1996 as a not-for-profit organization. The Association’s mandate is to present fine music appropriate to the Church, and to aid in the continuing upkeep and restoration of St. Mary’s. The festival is sponsored by the PEI-NB Confederation Bridge. Norris Point, Woody Point, and Rocky Harbour, Newfoundland All three of these communities are located near Gros Morne National Park and the Tablelands, a UNESCO World Heritage Site, and use the natural and heritage features of the area to their advantage in tourism efforts. Gros Morne was established in 1972, giving these former fishing towns a new major industry – tourism. Festivals and tourist attractions have been developed since that time. Norris Point boasts the Trails, Tales and Tunes Festival, while Woody Point hosted “Writers at Woody Point” in 2006, an event that was sold out and featured major Atlantic authors such as Ann-Mare Macdonald and Wayne Johnson. Historically, Woody Point was the main commercial hub of the region, surrounded by fishing and logging settlements. Rocky Harbour is located in the heart of Gros Morne and is the largest community in the park. Tourism is now the major focus of the community’s economy, which was historically based in fishing and forestry, like the others in the area. Canada 61 Répertoire d’actions culturelles en milieu rural, dressée par Les Arts et la Ville This collection contains 74 profiles of cultural projects and initiatives in rural areas: Intitulé de l’action culturelle Municipalité Maison de nos aïeux et Maison Drouin Sainte-Famille Animation Baie-Saint-Paul Baie-Saint-Paul Les Antichambres du livre Baie-Comeau et ses environs Centre d’archives régional de Portneuf MRC de Portneuf Route des Arts du grand Argenteuil MRC Argenteuil Artistes en fête Sainte-Flavie Souper-gala Artquimédia Amqui Semaine des arts du cirque Îles-de-la-Madeleine Automne en chansons et les Trésors de la terre Saint-Eugène-de-Grantham Balades culturelles MRC Beauharnois-Salaberry De la bibliothèque à la maison de la culture Esprit-Saint et Saint-Marcellin Journées traditionnelles festival Blues Grass New Richmond Les Casseux d’veillées Baie-Sainte-Catherine et Tadoussac Centre d’interprétation de la Côte-deBeaupré Château-Richer Circuit des arts Memphrémagog MRC Memphrémagog Circuits photo-découverte MRC de Coaticook Circuit patrimonial et fresque historique Saint-Donat Bibliothèque Françoise-Maurice Coaticook La créativité en héritage MRC L’Île-d’Orléans Symposium des arts de la rue de Danville Danville Découvertes de la chanson de Magog Magog École de musique du Témiscouata Témiscouata Symposium Une époque en art Saint-Basile-le-Grand Mouvement ESSARTS Saint-Pie-de-Guire Espace Félix-Leclerc Saint-Pierre de l’île d’Orléans Festival de théâtre amateur d’Esprit-Saint Esprit-Saint Festi Rock de Richmond Richmond 62 Duxbury et Campbell Intitulé de l’action culturelle Municipalité Fête de la forêt, un modèle à suivre Saint-Eugène-de-Ladrière Gaspésie : Terre et mer d’accueil et de culture MRC Bonaventure, MRC La HauteGaspésie, MRC Avignon, MRC Le RocherPercé, MRC La Côte-de-Gaspé La Grange à Dîme Sainte-Flavie Le Printemps des Artistes MRC du Granit Festival international Contes en Îles Îles-de-la-Madeleine Inventaire du patrimoine de la Côte-deBeaupré MRC La Côte-de-Beaupré Symposium Les ISLOMANES Îles-de-la-Madeleine Festival des Jardins sur la Baie New Richmond Jardins d’écriture au pays de Maria Chapdelaine Péribonka Centre régional d’animation du patrimoine oral de Lanaudière Saint-Jean-de-Matha Biennale internationale du lin de Portneuf MRC de Portneuf Société d’histoire et de généalogie de Louiseville Louiseville Festival des artisans de Sainte-Marcelline Sainte-Marcelline Seigneurie Mauvide-Genest Saint-Jean de l’Île d’Orléans Mégashow en plein air Sainte-Sabine Concours Le Mérite architectural Îles-de-la-Madeleine Les productions Cour des miracles Lachute Moulin du Portage Lotbinière Les Murmures de la Ville Mont-Joli Les Muses, le printemps culturel à BaieSaint-Paul Baie-Saint-Paul Nos maisons, une histoire de vie MRC Rimouski-Neigette Festival Orford Orford Parc maritime de Saint-Laurent Saint-Laurent de l’Île d’Orléans Moulin du Petit-Pré Château-Richer Café-spectacle La Pierre Angulaire Saint-Élie Festival Saint-Zénon-de-Piopolis Piopolis Les Pique-niques chantants New Richmond Canada 63 Intitulé de l’action culturelle Municipalité Centre d’interprétation du patrimoine de Plaisance Plaisance Politique culturelle de la MRC de NicoletYamaska MRC Nicolet-Yamaska Tournée des ateliers d’artistes du Pontiac MRC du Pontiac Programme de restauration patrimoniale Saint-Joseph de Beauce Route de la Nouvelle-France MRC La Côte-de-Beaupré Ruralys, Centre d’expertise et d’animation en patrimoine rural La Pocatière Chanson en fête de Saint-Ambroise Saint-Ambroise Centre culturel du Vieux Presbytère de Sainte-Flavie Sainte-Flavie Salon des artisans Saint-Basile-le-Grand Service d’aide-conseil en rénovation patrimoniale (SARP) Saguenay – Lac-Saint-Jean Salle de spectacle de Sept-Îles Sept-Îles Symposium de peinture de Saint-Germain de Kamouraska Saint-Germain de Kamouraska. Symposium de peinture itinérant MRC La Matapédia Table sectorielle culture de la MRC de Nicolet-Yamaska MRC Nicolet-Yamaska Festival de chanson et d’humour Le Tremplin Dégelis Maison Vézina Boischatel Village gaspésien de l’héritage britannique New Richmond Cap-à-l’Aigle, Village des Lilas et les Jardins du cap à l’Aigle La Malbaie Concours Jeunes cinéastes MRC Beauharnois-Salaberry Comité consultatif d’urbanisme de Kamouraska Kamouraska 64 Duxbury et Campbell Nancy Duxbury, PhD Nancy Duxbury is an Adjunct Professor in the School of Communication at Simon Fraser University, Vancouver. From September 2005 to Fall 2008 she was the Executive Director of the Centre of Expertise on Culture and Communities, a major research and networking initiative on cultural infrastructure in Canadian cities and communities. Prior to that, she was Director of Research of the Creative City Network of Canada and Cultural Planning Analyst at the City of Vancouver’s Office of Cultural Affairs. She is a former member of Metro Vancouver’s Regional Culture Committee, the Advisory Council of the Canadian Cultural Observatory, and Statistics Canada’s National Advisory Committee on Culture Statistics. She holds a doctorate in Communication from Simon Fraser University. Her research has examined Canadian cultural policy, municipal involvement in cultural development, cultural infrastructure, cultural indicators, and Canadian book publishing. Heather Campbell Heather Campbell grew up in New Brunswick, and lived and worked in Montreal and Toronto before moving to Vancouver in September 2008. With a background in freelance writing and public relations, she became immersed in the arts world as the Director of Marketing, Development and Arts Education for the Canadian Children’s Dance Theatre in Toronto. She is very happy to continue her work in the cultural community as the administrator of the Dancer Transition Resource Centre – BC office, while attending Simon Fraser University in a post-degree program in communications, and working as researcher with the Centre for Policy Studies on Culture and Communities. Heather has a strong interest in Canadian cultural policy and its effect on creativity, communication, and communities. Canada 65