Exposition universelle de Milan 2015

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Exposition universelle de Milan 2015
Dossier | Milan accueille l’Exposition universelle
Exposition universelle
de Milan 2015
Nourrir la planète,
énergie pour la vie
La ville de Milan accueille l’Exposition Universelle sur le thème « nourrir la planète, énergie pour la vie »,
à partir du 1er mai prochain et jusqu’en octobre. Cinq ans après l’Exposition Universelle de Shanghai qui
s’est tenue en 2010 sur le thème « meilleure ville, meilleure vie », c’est à Milan que ce tient cette grande
manifestation. Pour la 1re fois depuis sa création en 1851, le thème est orienté vers l’agriculture et l’agroalimentaire. Belle opportunité, pour la France en particulier, de faire connaître ses produits et savoir-faire !
A
vec d’un côté plus de 850 humains
sous alimentés et près de 30 %
de la population mondiale souffrant de malnutrition, et de l’autre une
population qui augmente jusqu’à atteindre
9,7 milliards d’individus en 2050 selon certains prévisionnistes, la question de l’alimentation est plus que jamais au cœur
des débats. La France a des atouts pour
répondre au défi de la préservation de la
qualité des produits et de l’environnement
avec l’objectif de nourrir la planète, et elle
12 | L’Information Agricole - N° 886 Avril 2015
veut le montrer. « La France doit contribuer
à nourrir la population de la planète et
à agir ici pour l’emploi et pour nos territoires », a d’ailleurs annoncé le Président
de la République François Hollande.
Un pavillon de 3 000 m²
Pour répondre au thème de cette Exposition, la France a choisi d’axer sa communication sur quatre piliers : la contribution à
l’alimentation mondiale, le développement
de modèles alimentaires qui répondent à
des enjeux de durabilité, l’amélioration de
la sécurité alimentaire dans les pays en voie
de développement, et l’alliance de la quantité et de la qualité.
Pour Alain Blogowski, conseiller scientifique au Commissariat Général du Pavillon
de la France, « le premier message c’est
que la France est un grand pays producteur aussi bien de produits agricoles que de
produits agroalimentaires, avec de compétences scientifiques qui permettent d’appor-
Milan accueille l’Exposition universelle | Dossier
ter une réponse et de participer à la sécurité
alimentaire mondiale. Tout ça bien entendu
en respectant la planète, l’environnement et
en gardant une place importante à l’emploi
et au revenu agricole ».
Une diversité agricole
Pavillon France
L’objectif de la France durant ces 7 mois
d’exposition, sera donc montrer au monde
qu’« on peut bien manger et avoir une diversité de modèles agricoles ». Q
Claire Nioncel
D. R.
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EXPOSITION UNIVERSELLE EN CHIFFRES
Cinq ans : intervalle entre chaque Exposition
1851 : 1re Exposition Universelle à Londres
147 : nombre de participants, attendus à Milan
140 pays participants, dont 53 construisent leur pavillon
Environ 1 milliard d’euros d’investissement
110 ha : superficie totale du lieu de l’Exposition
1 600 : nombre d’activités prévues
20 millions : nombre de visiteurs attendus
1 000 : nombre de visiteurs par heure envisagés ur le pavillon France, soit 10 000 par jour
3 592 m² : superficie du pavillon France
Chaque pays montrera le meilleur
Les principaux protagonistes de la manifestation sont les pays participants qui présentent leur expérience et leurs solutions dans le
domaine de l’alimentation. En effet, depuis toujours, l’Exposition Universelle est l’occasion de montrer à des millions de personnes provenant du monde entier le meilleur des différents pays. Nombreux sont les produits et les technologies qui ont vu leurs débuts lors de cette
manifestation : de la moissonneuse-batteuse de l’édition londonienne de 1851 à l’ascenseur de 1853 à New-York, jusqu’aux premières
machines à coudre de l’édition parisienne de 1855 ; du téléphone de 1876 à Philadelphie aux systèmes d’illumination externe basés sur
l’ampoule d’Edison en 1878, jusqu’à la première ligne d’assemblage pour automobiles en 1915, à la télévision de 1939, etc.
Aujourd’hui, l’accent est passé de thèmes plus étroitement liés au « matériel informatique » à des problématiques qui nécessitent des
approches plus complexes et multidisciplinaires.
Les clusters, nouveauté d’Expo Milano 2015
Les Clusters sont la grande nouveauté introduite par Expo Milano 2015. Il s’agit d’espaces d’exposition communs dédiés aux pays qui,
pour différentes raisons, ne souhaitent pas réaliser leur pavillon. Ces « villages » seront répandus sur le site et permettront à ces pays de
représenter leur histoire, leur culture et leur tradition agroalimentaire qui les caractérisent le plus.
Certains clusters seront en effet dédiés à la présentation et à la dégustation de produits intemporels, comme le riz, le café, les épices, le
cacao, les fruits et les légumes, les céréales et les tubercules. D’autres regrouperont en revanche les pays autour de thèmes caractérisant des territoires spécifiques comme le bio-Méditerranéen, les îles et les zones arides.
Mise en avant de la durabilité
L’Exposition Internationale de 2015 est la première Expo à avoir publié le rapport de durabilité : il s’agit d’un document, présenté fin 2013,
qui sera rédigé annuellement dans une optique de transparence, comme le contrôle et le rapport des actions réalisées et constituera
un héritage dans l’histoire des grands évènements. L’objectif est de montrer l’efficacité énergétique et des ressources hydriques ainsi
de mettre en avant la lutte contre toutes sortes de gaspillages. L’événement veut faire la promotion et la diffusion de comportements
vertueux qui trouvent leur meilleure expression dans le respect de l’environnement et des écosystèmes naturels. Plus de 200 000 m2
d’espaces verts du site d’exposition aux infrastructures de télécommunication et énergétiques à faible impact sont prévues, aux normes
internationales adoptées pour la gestion durable de l’événement.
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Dossier | Milan accueille l’Exposition universelle
n Giuseppe Sala, Commissaire général de Milano Expo
Le sens de la responsabilité
sociale
Chef d’entreprise réputé, professeur de gestion, Giuseppe Sala a mis son expérience au service de sa ville et de l’état
pour organiser l’Exposition universelle qui aura lieu de mai à octobre. Rigueur, exigence éthique : « il dottore » séduit les
Milanais.
À
proximité du château des Sforza,
dans l’immeuble du légendaire
Piccolo Teatro de Giorgo Strehler,
se prépare le plus grand spectacle que
Milan ait jamais donné. C’est là que Giuseppe Sala, metteur en scène de Milano
Expo 2015, a établi son quartier général pour gérer ce projet titanesque : une
dépense publique totale de 3,2 milliards
d’euros et 5 milliards d’euros de retombées attendues. Loin du bruit et de la
frénésie du chantier de l’Expo, dédiée au
thème « Nourrir la planète, énergie pour
la vie », le commissaire général peaufine
son plan pour attirer les visiteurs à partir
du 1er mai.
Giuseppe Sala doit son succès au fait
qu’il aime relever les défis dans lesquels
il s’implique à fond, qu’il s’agisse de ses
études – il est diplômé en économie de
la prestigieuse université Bocconi –, de la
direction de grandes entreprises comme
Pirelli et Telecom Italia, ou de l’Exposition
universelle. « Il fait partie de ces patrons
milanais qui aiment prendre des risques,
réaliser des choses mais il sort du cadre
classique », explique son proche collaborateur Piero Galli. En Italie, rares sont en
effet les dirigeants du privé qui passent
au service de l’administration, dont les
lourdeurs ont de quoi rebuter plus d’une
bonne volonté. Mais Giuseppe Sala est
parvenu à s’y adapter, ce qui ne l’empêche pas de pester, par exemple, contre
des règles relatives aux marchés publics
qui n’empêchent ni la triche ni les blo-
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Frédéric Brillet
Adaptable
cages, alors même que la date de l’inauguration de l’Expo approche. « Giuseppe
a su devenir un grand serviteur de Milan
et de l’État. C’est devenu rare en Italie.
Il a fait un travail incroyable sur l’Expo,
dont le chantier avait pris du retard »,
relève son ami Piero Maranghi, qui gère
une chaîne de télévision et une maison
d’édition dédiée à la musique classique.
Le commissaire de l’Expo a ainsi obtenu
de la Scala qu’elle donne des spectacles
tout l’été, quand elle fait d’habitude
relâche en août. De l’État qu’il consente à
assouplir les règles sur les appels d’offre,
pour tenir le planning ; des syndicats
qu’ils acceptent des contrats flexibles – les
employeurs locaux pourront disposer des
ressources humaines nécessaires à l’accueil des quelque 20 millions de visiteurs
attendus sur six mois.
Abordable
En Italie, les chefs d’entreprise gagnent
souvent un surnom. Carlo de Benedetti,
qui dirigea Olivetti, était « l’ingegnere »,
Berlusconi « sua Emittenza », en référence
à sa domination du paysage audiovisuel,
Milan accueille l’Exposition universelle | Dossier
ture qui amène Giuseppe Sala à multiplier
les activités pendant son temps libre. Collectionneur d’art contemporain, il se plaît
à visiter les galeries d’art, en Italie comme
à l’étranger ; amateur de voile mais aussi
de football, il lui arrive encore, à 56 ans,
de taper le ballon avec ses collaborateurs
et soutient assidûment l’Inter Milan – il
en conserve un maillot dédicacé mis sous
verre dans son bureau.
devais pas démissionner. Mais le nouveau
maire de Milan et le président de la République m’ont demandé de rester. Jamais
on ne m’a reproché quoi que ce soit dans
cette affaire. Tout le monde sait que je
suis honnête. » S’estimant trahi par un collaborateur déjà en poste avant son arrivée
à la tête de l’Expo, Giuseppe Sala manifeste une exigence éthique qui fait écho à
son sens de la responsabilité sociale. Pour
preuve, la façon dont il a vendu l’entreprise familiale de meubles, au moment
du décès de son père. Pas question de
se limiter au mieux-disant financier : il
impose au repreneur le maintien des
emplois. « Beaucoup de ces salariés travaillaient pour mon père depuis vingt ans,
je les connaissais. Il était normal que je
me préoccupe de leur sort, d’autant que
le chômage augmentait à l’époque. » Dans
une Italie lasse des frasques et scandales
à la mode berlusconienne, son éthique et
son sérieux constituent un atout de choix
pour conquérir le cœur des Milanais, dont
certains l’encouragent déjà à se présenter
aux municipales. Évidemment, ces sollicitations incitent l’intéressé à poursuivre
dans cette voie, d’autant qu’il parvient à
s’entendre avec les élus de droite comme
de gauche. « À ce stade de ma carrière,
je souhaite continuer dans le service
public, si l’on m’en donne l’opportunité.
Mais plutôt que me lancer dans la politique locale, je préférerais œuvrer pour le
pays », explique le commissaire qui, prudent et lucide, attend la fin de l’Expo pour
envisager son avenir. Car en fonction du
bilan, « je serai soit crucifié, soit déifié. » Q
Irréprochable
Dans le vaste bureau qu’occupe Giuseppe Sala, un tableau du peintre expressionniste Ottone Rosai représentant deux
carabinieri accueille le visiteur. « Comme
ça, les gens pensent qu’en entrant ici la
gendarmerie n’est pas loin ! » plaisantet-il. Une façon aussi de signifier à ses
interlocuteurs qu’il entend promouvoir
la transparence dans la gestion de l’Expo
2015, au centre d’un scandale révélé
l’an dernier. La découverte d’un réseau
de corruption portant sur les marchés
publics et l’arrestation du directeur des
achats ont entaché l’image du projet,
placé désormais sous la surveillance renforcée de la commission antimafia. « Ça a
été un moment dramatique pour moi et
mon équipe. Je me suis demandé si je ne
Photos : D. R.
et Giovanni Agnelli, de Fiat, « l’avvocato ».
Le surnom de Sala utilisé seulement en
interne est « il dottore », en référence à
son diplôme de la Bocconi où il enseigne
aujourd’hui la planification et la comptabilité. Mais ses élèves viennent aussi
s’enquérir de son expérience à la tête
de grands groupes et de l’Expo 2015.
« Quand j’y étudiais moi-même au début
des années 80, c’était déjà l’ouverture
sur le monde de l’entreprise que j’appréciais le plus, souligne le commissaire
général, qui prend plaisir à maintenir
cette tradition. Echanger avec les étudiants est rafraîchissant, j’apprends aussi
en les écoutant. » Cette tournure d’esprit explique aussi pourquoi, en 2009, il
accepte « par curiosité » de devenir directeur général de l’administration de Milan.
« Après tant d’années à m’occuper des
clients et des comptes d’entreprise, j’avais
envie de faire quelque chose de différent
et de servir cette ville que j’adore. » À
peine arrivé, il commence par en moderniser la gestion, en mettant en place
des tableaux de bord. Mais dès 2010, la
mairie lui propose de lâcher sa mission
encore inachevée pour s’occuper de
l’Exposition universelle. « C’est un train
qui ne passe qu’une seule fois dans une
vie, je ne pouvais refuser ! » Une ouver-
Frédéric Brillet
pour Enjeux Les Échos
L’Information Agricole - N° 886 Avril 2015 | 15
Dossier | Milan accueille l’Exposition universelle
Q Irène Piria, Directrice d’Euromontana
Encourager des systèmes innovants
Irène Piria, directrice d’Euromontana* nous explique les raisons de sa participation à l’exposition Universelle de Milan. Il
est essentiel, selon elle, de développer des systèmes alimentaires locaux innovants.
L’
I. A. – Quels sont les axes que vous
privilégiez dans ce document ?
I. P. Q Les systèmes de production alimentaires locaux sont des facteurs réels de
ducteurs et les acteurs locaux ont rarement
les moyens d’user de différentes mesures,
vu leur complexité. Et souvent, un produit
réputé au niveau local ne recourt pas forcément aux appellations existantes. D’où l’intérêt d’avoir une approche holistique permettant de créer des synergies entre toutes
les mesures existantes et de permettre aux
opérateurs, un accès facilité aux fonds européens existants.
D.R.
Information agricole – Qu’estce qui a motivé la production
de ce « position paper » ?
Irène Piria Q Une exposition universelle sur
le thème « nourrir la planète » est une opportunité incontournable pour poser la question du rôle des produits alimentaires européens dans cet objectif planétaire. Or, dans
la Stratégie européenne 2020, la recherche,
l’innovation et le développement de nouveaux produits d’excellence sont devenus
des enjeux majeurs de la future compétitivité de l’Europe. En effet, selon le rapport
annuel du CIAA1 de 2010, la production et
le commerce des produits agricoles et agroalimentaires est un atout majeur pour l’Europe. Le secteur agroalimentaire représente
18 % des exportations mondiales et 20 % des
importations. Il est à l’origine de 13,5 % des
emplois à l’échelle européenne et contribue
à hauteur de 12,9 % du total des ventes. Toutefois le constat est que si au niveau international 80 % des produits alimentaires sont
régulièrement produits et commercialisés au
niveau local, en Europe cela ne représente
que 20 %. Il est donc essentiel de développer et encourager, en Europe, des systèmes
alimentaires locaux innovants, en particulier
pour les produits de montagne.
dynamisme économique, social et environnemental. Mais le défi aujourd’hui, c’est
de garantir une chaine alimentaire durable
tout en améliorant la qualité des produits
alimentaires. Voilà pourquoi, soutenir la
recherche et l’innovation, dans un contexte
de changement climatique réel, sont pour
nous un axe fondamental et indispensable
pour assurer la pérennité des systèmes de
production agricole et agro-alimentaire.
Parallèlement, un travail important est à
faire dans les habitudes de consommation
et la conception de la notion de qualité
des produits alimentaires aux yeux des
consommateurs. D’autre part, il existe un
ensemble d’opportunités offertes par les
programmes européens pour valoriser les
produits locaux, notamment les produits de
montagne (ex : AOP/IGP/mention produit
de montagne, etc.). Toutefois les petits pro-
I. A. – Quels sont les objectifs attendus ?
I. P. Q C’est d’abord assurer l’identification
des productions locales et leur promotion
au niveau des consommateurs. De plus,
dans un contexte de développement du
commerce international, il est important,
d’une part, de préserver le bien-être des
consommateurs en garantissant la sécurité
et la santé des produits alimentaires, et
d’autre part, de protéger l’environnement
et les intérêts des opérateurs économiques.
C’est dans cette optique que nous demandons l’amélioration de la lutte contre la
fraude dans le secteur alimentaire et agroalimentaire. Pour cela, un renforcement des
mesures de police et la mise en place d’un
régime de sanctions dissuasives sont essentiels. Nous espérons que les débats, lors de
cette exposition universelle, permettront
de formuler des propositions concrètes au
niveau européen, voire au niveau international.
Propos recueillis par Théo Gning
PROMOUVOIR DES SYSTÈMES ALIMENTAIRES LOCAUX EUROPÉENS
Dans le cadre de l’Exposition universelle sur le thème « Nourrir la planète, Energie pour la
vie », et à l’initiative de la région Lombardie et de l’Unioncamere Lombardia2, Euromontana3 en collaboration avec la Commission européenne et d’autres partenaires4, ont souhaité saisir cette opportunité pour émettre une « position paper » commune sur la promotion
des systèmes alimentaires locaux européens. L’idée est de débattre de la question de la
lutte contre les contre-façons de produits alimentaires à travers la mise en place de propositions au niveau européen voire internationales.
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1
Commission d’enquête sur les abus d’autorité ou Commission for the Investigation of Abuse of Authority (CIAA).
2
Unions des Chambres de Commerce, Industrie et Agriculture
de Lombardie.
3
Association européenne pour la coopération des régions de
montagne.
4
ERRIN (European Regions Research and Innovation
Network), AREPO (Association des régions européennes des
produits d’origine), CITTA’DEL BIO, KEN (Knowlege Economy
Network) et PURPLE (Peri urban platform Europe).
Milan accueille l’Exposition universelle | Dossier
Q Michel Grégoire, vice-président de la région Rhône-Alpes,
délégué à l’agriculture et au développement rural
La ferme Rhône-Alpes
a toute sa place à Milan
Michel Grégoire nous indique pourquoi la région Rhône-Alpes, qui constitue une terre riche de production avec plus de
30 000 exploitations agricoles très diverses et de nombreux signes de qualité en relative proximité avec le consommateur, a
décidé de prendre part à l’exposition universelle de Milan.
’
S. Serrad
L
Information Agricole – Pourquoi votre région prend-elle part
à l’exposition universelle de
Milan ?
Michel Grégoire Q Plusieurs éléments
concourent aux raisons de notre participation à l’Expo Milan. Si la proximité
géographique avec cet événement de
dimension planétaire semble en premier
lieu évidente avec moins de 440 km de
distance entre Lyon et Milan, c’est surtout
le thème de l’expo centré sur la question
de l’alimentation qui présente un intérêt
majeur. Pour rappel, la question posée à
Milan est la suivante « Comment assurer
à toute l’humanité une alimentation suffisante, de qualité, saine et durable ? ».
Cette question étroitement liée aux objectifs du millénaire pour le développement
des Nations-Unies concerne vraiment tout
le monde, le mot universel est vraiment
légitimé !
Je me permets de rappeler sans reprendre
mot à mot le règlement intérieur de l’exposition universelle que son but principal est centré sur la question de l’enseignement au public, sur les capacités
humaines à dévoiler ses progrès dans tel
ou tel secteur.
Rhône-Alpes constitue une terre riche de
production avec plus de 30 000 exploitations agricoles qui ont des productions
très diverses avec des signes de qualité
et une relative proximité du consommateur qui cherche de plus en plus à
comprendre quels sont les modèles de
structure alimentaire à la fois viables et
durables.
Nous voulons montrer que la ferme
Rhône-Alpes a toute sa place pour valoriser ses produits mais aussi ses potentiels
techniques et scientifiques en vue de
développer des coopérations et contribuer à la réflexion universelle.
I. A. – Quels sont les enjeux au niveau
économique pour les entreprises régionales ?
M. G. Q L’agroalimentaire constitue un
secteur économique stratégique de
Rhône-Alpes. On compte environ 50 000
actifs dans le secteur pour un tissu d’entreprises essentiellement composé de
PME avec des productions sur des seg-
ments riches en valeur ajoutée. Pour les
grands groupes et les PME, il ne faut
pas se tromper sur la cible et ne pas
confondre un salon professionnel avec
une exposition universelle ! Si le marché
italien est réputé difficilement accessible
dans l’alimentaire, l’enjeu est de portée
multilatérale, plutôt que bilatérale.
Pour cause, on attend jusqu’à 12 000 visiteurs par jour sur le pavillon France dont
un million de Français ! Concrètement,
pour permettre des événements entre
professionnels, nous mettons à disposition, de façon ponctuelle, de l’immobilier, mais en dehors du site de l’exposition pour permettre des événements du
type forum pour les pros.
Nous encourageons par ailleurs les représentants professionnels à engager leurs
adhérents afin d’être représentés sur le
Pavillon France sous plusieurs formes
possibles grâce au fruit de nos négociations avec le Pavillon France.
I. A. – Quel message voulez-vous véhiculer et quelles retombées en attendezvous ?
M. G. Q Nous voulons dire que la région
est consciente des enjeux à relever. Nous
voulons à la fois faire face au défi climatique tout en insufflant un message fort
dans la volonté de croire dans ce modèle
à venir capable de nourrir la planète de
manière saine et durable.
Propos recueillis
par Claire Nioncel
L’Information Agricole - N° 886 Avril 2015 | 17
Dossier | Milan accueille l’Exposition universelle
Q Œuvre colossale collective
Impliquer le plus grand nombre
C’est précisément pour sa nature et pour la qualité du thème choisi que l’ambition d’Expo Milano 2015 va au-delà de
la simple promotion de l’évènement. L’intention est de créer les conditions pour impliquer dans l’Exposition et dans la
réflexion sur son thème le plus grand nombre possible de personnes dans le monde entier.
E
n plus de l’activité constante exercée
sur le Web et sur les réseaux sociaux,
une série de projets d’inclusion a
vu le jour. Parmi ceux-ci, le Laboratorio
Expo, une collaboration avec la Fondation
Giangiacomo Feltrinelli visant à impliquer
les plus importantes universités du monde
pour mettre en commun des recherches
et des réflexions et déterminer une liste
de recommandations à discuter pendant
le semestre. Le Women for Expo, le plus
vaste réseau féminin dédié aux thèmes de
l’alimentation : il s’agit d’un projet réalisé
avec Fondazione Arnoldo et Alberto Mondadori et le Ministère des Affaires Étrangères. Le Children Share, en collaboration
avec MUBA, vise à permettre aux enfants
du monde entier de partager, à travers le
jeu, des traditions alimentaires, un savoir
et des responsabilités, en stimulant en
eux des sensibilités particulières par rapport au thème de la durabilité.
Enfin, Short Food Movie, un projet de
Fondazione Cinema per Roma (Festival
international du film de Rome) et Centro
Sperimentale di Cinematografia (Centre
expérimental du cinéma), demande aux
jeunes de tous les Pays de réaliser une
vidéo avec une tablette ou un Smartphone
qui illustre les thèmes d’Expo Milano 2015.
Un Centre sur le droit
à l’alimentation
Par ailleurs, sur l’initiative du Président du
Tribunal de Milan Livia Pomodoro, un projet de Centre sur le Droit à l’Alimentation est
en train de voir le jour : il vise à promouvoir
une Convention internationale sur le Droit
à l’alimentation. Q
Claire Nioncel
18 | L’Information Agricole - N° 886 Avril 2015
UNE ŒUVRE CULTURELLE UNIQUE
Expo Milano 2015 est la plus grande œuvre collective dédiée aux thèmes de l’alimentation jamais réalisée.
À cette œuvre contribuent de nombreux intellectuels, architectes et scientifiques
qui sont en train de travailler à divers titres à sa réalisation. Parmi ceux-ci, le réalisateur de l’Albero degli Zoccoli (l’Arbre aux Sabots) Ermanno Olmi engagé dans un filmdocumentaire qui raconte l’importance de l’eau, comme emblème de vie et d’énergie
pour le monde. Et aussi le scénographe trois fois nominé aux Oscars, Dante Ferretti, qui
se charge des aménagements de Cardo et Decumano. L’architecte Norman Foster qui
a dessiné le pavillon des Émirats Arabes Unis et de nombreux ambassadeurs comme le
chef Davide Oldani, les footballeurs Demetrio Albertini, Kakà et Hernanes, la présentatrice Antonella Clerici, l’architecte Massimiliano Fuksas et bien d’autres encore…
LA MASCOTTE FOODY
L’œuvre de communication de l’évènement qui trouve son symbole dans la mascotte
Foody est intense. Réalisée par Disney Italia et composée de 11 personnages (Pomina
la pomme, Piera la poire, Gury la pastèque, Max Mais le maïs bleu, Arabella l’orange,
Chicca la grenade, Rap Brothers les radis, Rodolfo la figue, Joséphine la banane,
Manghy la mangue et Guagliò la gousse d’ail), chacun ayant une histoire curieuse à
raconter.
Milan accueille l’Exposition universelle | Dossier
n Histoire
La Renaissance passa par Milan
Aux tournants des XVe et XVIe siècles, les Rois de France tentèrent de conquérir Milan. S’ils ne parvinrent pas à leurs fins, ils
revinrent porteurs des idées de la Renaissance.
L
e fait est peu connu, mais Milan a
involontairement joué un rôle majeur
dans l’histoire de France. Cet épisode
remonte à la fin du XVe et au début du
XVIe siècles. Après avoir revendiqué le
royaume de Naples au nom d’une lointaine parenté, les souverains français ont
récidivé avec le duché de Milan en tant
que descendants d’une représentante de la
famille Visconti qui régna sur la ville aux
XIVe et XVe siècles.
Louis XII et François Ier s’en allèrent donc
guerroyer dans le Nord de l’Italie pendant
des décennies pour faire valoir leurs droits.
Des campagnes militaires ponctuées de
glorieuses victoires, comme Marignan, mais
aussi de lourdes défaites, comme Pavie, à
l’issue de laquelle François Ier fut fait prisonnier par Charles Quint et ne recouvrit la
liberté qu’en échange d’une forte rançon.
Au final, ils ne purent se rendre maître de
Milan que pendant de courtes périodes.
Mais ces années passées en Italie eurent
une conséquence bien plus durable et
importante, l’introduction en France des
Chenonceaux.
idées de la Renaissance qui engendrèrent
une profonde mutation de notre pays.
Un personnage plus que tout autre a
contribué à cette évolution, il s’agit de
François Ier. Homme lettré, parlant l’italien,
il invita de nombreux artistes transalpins
à venir travailler en France et en particulier Léonard de Vinci qu’il admirait depuis
avoir découvert sa fresque « La Cène » dans
le réfectoire du couvent de Santa Maria
delle Grazie à Milan. Une œuvre qu’il envisagea de ramener en France, ne renonçant
à son projet que parce qu’il réalisa que
cela aurait entraîné sa destruction. C’est
ainsi que Léonard de Vinci passa les trois
dernières années de sa vie à Amboise, au
Clos Lucé, s’occupant des festivités royales
et travaillant sur un projet de château et
d’assèchement des terres à Romorantin. Il
aurait également collaboré aux plans du
château de Chambord concevant entre
autres son escalier à double révolution.
Par ailleurs, François Ier poursuivit la transformation du château d’Amboise commencée par ses prédécesseurs Charles VIII et
Louis XII, fit agrandir le Louvre ainsi que
les châteaux de Blois et de Saint-Germainen-Laye, fit construire le château de Fontainebleau, l’Hôtel de Ville de Paris et le château de Madrid, aujourd’hui disparu, qui
s’élevait dans le bois de Boulogne. Des travaux pour lesquels il fit venir de nombreux
architectes et artistes italiens : Dominique
de Cortone, Girolamo della Robia, Boccador, Le Primatice, Rosso Fiorentino, Cellini… Pour décorer ces châteaux, il acquit
en outre des œuvres de Michel Ange,
Titien et Raphaël qui sont aujourd’hui dans
les collections du Louvre.
Suivant l’exemple du Roi, nobles, ministres
et financiers se firent eux aussi mécènes
et bâtisseurs se faisant édifier des châteaux
Renaissance à Azay-le-Rideau, Chenonceaux,
Ecouen… Un nouvel état d’esprit qui permit
l’éclosion des architectes Philibert Delorme
et Pierre Lescot, des sculpteurs Germain
Pilon et Jean Goujon ou encore des peintres
Jean Cousin, Poussin et Lesueur. Q
Texte et photos Thierry Joly
Azay-le-Rideau.
L’Information Agricole - N° 886 Avril 2015 | 19
Dossier | Milan accueille l’Exposition universelle
Q Capitale économique
Un week-end à Milan
Capitale économique de l’Italie, Milan ne figure pas au rang des grandes villes d’art italiennes comme Venise, Florence et
Rome. Elle possède toutefois assez de monuments pour occuper pleinement un week-end.
U
Couvent Santa Maria della Grazie / Copyright : Fototeca Enit
Galleria Vittorio Emanuele / Copyright : Commune di Milano
n monument justifie à lui seul une
visite de Milan, sa cathédrale, ou
Duomo comme l’on dit en italien,
le plus grand édifice gothique du pays et
l’une des plus grandes églises de la Chrétienté. Construite sur cinq siècles, toute de
marbre blanc, elle présente la particularité
d’être hérissée de 135 flèches et de plus de
2 000 statues. Une dentelle de pierre dont
l’on apprécie au mieux toute la beauté en
se promenant sur son toit-terrasse d’où l’on
a aussi une formidable vue sur la ville. Avec
en arrière plan d’une longue rue piétonne
un autre symbole de Milan, le Castello
Sforzesco, puissante forteresse en briques
rouges du XVe siècle qui cache en son sein
un beau palais Renaissance. Il est flanqué
d’un agréable jardin où s’élève l’Arco delle
Pace, une ancienne porte monumentale
construite au début du XIXe siècle lors de
la destruction des remparts. Sur la place du
Duomo, se trouvent l’ancien palais Royal
et l’entrée de la superbe Galleria Vittorio
Emmanuelle. Réalisé à la fin du XIXe siècle,
ce passage couvert en forme de croix dont
la coupole d’acier et de verre culmine à
20 | L’Information Agricole - N° 886 Avril 2015
47 m de haut abrite magasins de luxe, cafés
et restaurants. À l’occasion de l’Expo 2015,
il est possible de marcher sur son toit qui
offre une vue sans égale sur le Duomo.
Cette galerie mène à la Scala, opéra mondialement célèbre dont la salle richement
décorée d’une capacité de 3 600 pectateurs
se cache derrière une façade néo-classique
d’une telle sobriété qu’elle en est presque
décevante. Lui faisant face, le Palazzo
Marino abrite l’hôtel de ville et possède
une belle cour Renaissance. C’est l’un des
nombreux palais qui s’élèvent dans ce quartier, les plus somptueux bordant le Corso
Venezia réputé être la plus belle artère de
la ville. Toujours près de la Scala se trouve
le quadrilatère de la mode où quatre rues
concentrent les boutiques de tous les grands
noms de la mode italienne. Pour ceux qui
sont plus attirés par l’art, à quelques pâtés
de maisons, la Pinacoteca di Brera est le
musée à voir en priorité à Milan. Il renferme l’une des plus belles collections de
peintures Renaissances et Baroques d’Italie
ainsi que des œuvres de peintres modernes
tels Braque, Modigliani et Picasso.
Si vous êtes amateur de peinture, allez également à la Pinacoteca Ambrosiana où sont
exposées des toiles des plus grands peintres
italiens dont Boticelli, Léonard de Vinci,
Raphaël et Le Caravage. Elle est située dans
le Vieux Milan, quartier où petites rues,
palais gothiques et églises plongent pour un
instant le visiteur dans l’Italie médiévale. Ne
manquez pas d’y voir la Piazza dei Mercanti
et l’église San Satiro, chef d’œuvre Renaissance de Bramante qui a également participé à la construction de l’église du couvent
Santa Maria delle Grazie dont le réfectoire
est décoré par la Cène de Léonard de Vinci.
Une fresque si courue qu’il faut réserver
pour avoir une chance de l’admirer. Enfin,
deux autres églises méritent aussi un coup
d’œil. Sant’Ambrogio, considérée comme
un joyau de l’art roman, et San Lorenzo
Maggiore qui comprend des éléments architecturaux antiques et paléochrétiens. Q
Thierry Joly
Pour préparer votre voyage : Office National
Italien du Tourisme, ENIT, www.italia.it
Milan accueille l’Exposition universelle | Dossier
Q Projets urbains
Une ville en pleine mutation
Le visage de Milan n’est que peu modifié par l’Expo 2015. Par contre, la préparation de l’événement a joué un rôle d’accélérateur de plusieurs projets urbains conçus par les plus grands architectes du monde qui couvrent la ville de gratte-ciel.
Tout ceci n’est toutefois que peu de chose
comparé aux grands travaux en cours dans
le centre et qui se sont accélérés depuis
que la ville s’est vue attribuer l’Exposition
Universelle en 2008. L’ancien parc des
expositions est ainsi le cadre d’un vaste
et ambitieux projet baptisé City Life. Couvrant 360 000 m2, il comprend un espace
vert de 170 000 m2 évoquant la géographie
de la Lombardie et qui sera la plus grande
zone piétonne de Milan. Pourvu de pistes
cyclables, il entourera des zones résidentielles, un Musée d’Art Contemporain et
trois tours de bureaux conçues par des
architectes mondialement connus, Arata
Isozaki, Daniel Libeskind et Zaha Hadid.
Plus avancé car lancé dans les années
2000, l’autre grand chantier en cours, dit
de la Porta Nuova, couvre un terrain de
290 000 m2. Il s’étend sur les quartiers Isola
et Varesine ainsi qu’autour de la station
Garibaldi. Un projet qui a récemment fait
la Une des journaux car le Qatar en est
devenu fin février l’unique propriétaire.
Plusieurs gratte-ciel remarquables y sont
déjà sortis de terre. La Torre Diamante, le
Palazzo Lombardia, siège des institutions de
la région de Lombardie réalisée en partie
par l’architecte chinois Ieoh Ming Pei, la tour
UniCredit signée par l’architecte César Pelli
qui est la plus haute d’Italie avec 231 m. Le
plus innovant est le double gratte-ciel résidentiel « Bosco Verticale » (forêt verticale)
conçu par le studio Boeri dont les balcons
de chaque façade abritent une véritable
forêt d’arbres et d’arbustes ainsi qu’insectes
et oiseaux pour lutter contre les parasites.
Un musée de la Mode (MOdAM) et une
bibliothèque sont également prévus dans
ce quartier.
Au sud du centre historique, la Fondation
Prada inaugurera au printemps un Musée
d’Art contemporain réalisé par l’architecte
Rem Koolhaas. Giorgio Armani, lui, va
ouvrir au public ses archives privées dans
une nouvelle galerie aménagée par Tadao
Ando- dans une ancienne usine. Enfin, Norman Foster signe un quartier résidentiel vert
dans le quartier de Santa Giulia tandis que
Renzo Piano s’occupe de la requalification
de la zone industrielle et d’une aciérie à
Sesto San Giovanni. Q
Thierry Joly
Crédit photos : Fototeca Enit
O
rganisée au nord-ouest de la ville,
sur le territoire des communes de
Rho et de Pero, l’Expo 2015 ne laissera qu’un legs modeste à la cité lombarde.
À savoir le Centre pour le Développement
Durable et son site qui, une fois l’événement
terminé, deviendra un grand parc autour
duquel devrait voir le jour une zone résidentielle. Elle a toutefois également contribué
au réaménagement des canaux de la zone
ouest de Milan et de la Darsena, l’ancien
port fluvial, d’où l’on pourra le rejoindre
par des parcours piétonniers et cyclables.
Par ailleurs, les bretelles créées pour relier
l’Expo aux autoroutes voisines faciliteront
dans l’avenir l’accès au parc des expositions
Feriamilano implanté juste à côté.
De plus, pour gérer le flux de visiteurs
attendus dans la ville, une ligne de métro
entièrement automatique a été prolongée
jusqu’au stade San Siro et une autre va relier
le centre ville à l’aéroport de Linate. Mais
cette dernière ne sera sans doute pas achevée à temps pour l’Expo.
L’Information Agricole - N° 886 Avril 2015 | 21
Dossier | Milan accueille l’Exposition universelle
Q Tendances
Au cœur de la mode
et du design
Mode et design sont deux secteurs qui font la notoriété de Milan dans le monde entier. Les visiteurs internationaux s’y
pressent plusieurs fois par an pour des salons où se créent les tendances.
’
22 | L’Information Agricole - N° 886 Avril 2015
Quadrilatère de la mode / Copyright : Fototeca Enit
L
une des quatre capitales de la mode
avec Paris, New-York et Londres,
Milan n’a accédé à ce statut que
récemment. Jusqu’au début des années 70,
elle ne détenait même pas le leadership
en Italie où c’était Florence qui faisait
référence en la matière. C’est alors que
Giorgio Armani, Gianni Versace ou encore
Gianfranco Ferre sont entrés en scène lançant leurs premières collections de prêt à
porter en 1975 et 1978. Moins conventionnelles, plus simples, plus décontractées
et plus abordables que celles des ateliers
florentins, leurs créations ont immédiatement séduit une large clientèle. Inspirés
par ce succès, d’autres créateurs leurs ont
emboîté le pas. Citons Dolce & Gabana,
Franco Moschino et Miuccia Prada. Certains, comme Gianni Versace ou Gianfranco Ferré se sont ensuite lancés dans
la haute couture dans les années 80. En
l’espace de quelques années, Milan est
ainsi devenu un haut lieu de la mode.
Illustration de cette réussite tous ces créateurs ont ouvert des boutiques dans le
monde entier et ont élargi leur production aux accessoires, aux parfums, à la
maroquinerie et aux chaussures. Armani a
même ouvert des restaurants.
À Milan, leurs boutiques sont concentrées
dans le quadrilatère de la mode formé par
les rues Monte Napoleone, della Spiga,
Sant’Andrea et Manzoni.
L’importance du secteur dans l’économie
locale se traduit par l’organisation de plusieurs événements. Le principal et le plus
médiatique est la « Fashion Week » d’envergure mondiale ponctuée de dizaines de
défilés qui se déroule deux fois par an,
en septembre-octobre et février-mars. La
ville ne vit alors que pour la mode car aux
mêmes périodes se tiennent aussi trois
salons. Le Mipap, dédié au prêt-à-porter
qui réunit tous les créateurs italiens, le
Mipel, le plus important au monde pour
la maroquinerie, et le Micam Shoevent,
son équivalent dans le secteur de la chaussure. S’y ajoute le Mifur, salon de la fourrure et de la pelleterie qui n’a lieu qu’une
fois par an.
Milan est en outre la capitale du design
italien qui a conquis le monde depuis la fin
des années 40 que ce soit par les appareils
électro-ménagers, le mobilier ou les véhicules avec par exemple les Vespa.
Situé près du Parc Sempione, le Triennale
Design Museum y est entièrement consacré et les collections présentées changent
chaque année. Le bâtiment fut à l’origine
construit pour accueillir l’exposition internationale d’architecture moderne et des
arts décoratifs et industriels qui se tenait
jadis tous les trois ans et pourrait renaître
en 2016.
En attendant, la grande messe annuelle
du design est le Salon International du
Meuble qui se tient en avril. Attirant les
plus grands créateurs de toute la planète, il
coïncide avec la Milan Design Week, sans
égale au monde par son importance et sa
richesse, dont l’autre événement phare est
Fuorisalone. Il s’agit de showrooms éphémères créés par les grands noms du mobilier et du décor à travers toute la ville et
en particulier dans les quartiers de Brera,
Tortona et Ventura Lambrate. Q
Thierry Joly
Milan accueille l’Exposition universelle | Dossier
Q Variété des terroirs et cépages
Terre de vins
L’Italie produit une très grande diversité de vins. Aujourd’hui d’excellentes qualités et souvent d’un prix raisonnable, ils sont
de redoutables concurrents sur les marchés exports.
S
econd pays d’Europe où la vigne a
été cultivée, introduite par les Grecs
autour de 1 000 av. J.-C., l’Italie n’a
depuis lors jamais cessé d’être un acteur
majeur de la scène viticole mondiale.
Comme sur tout le Vieux Continent, son
vignoble s’est réduit et ne couvre plus que
790 000 ha, soit le 3e rang mondial derrière
l’Espagne et la France. Par contre l’Italie est
en volume le premier exportateur mondial et, selon les années, le premier ou le
second producteur.
Par ailleurs, aucun autre pays n’offre une
telle variété de vins, de terroirs et de cépages
car toutes les régions recèlent des vignes,
lesquelles sont pour 58 % situées en zones
de collines, 8 % en zone de montagne et
34 % en plaine. Plus de 400 cépages sont
ainsi autorisés par les 74 DOCG (Dénomination d’Origine Contrôlée et Garantie) et
330 DOC (Dénomination d’Origine Contrôlée), les équivalents de nos AOC. Ce à quoi
il faut ajouter 118 IGP parmi lesquelles se
cachent quelques-uns des crus les plus répu-
tés du pays, surnommés Super Toscans. Ils
ont été créés dans les années 70-80 par des
vignerons de renom qui souhaitaient pouvoir incorporer des cépages internationaux
dans leurs vins et ont pour cela quitté les
DOC et DOCG auxquelles ils reprochaient
en outre un manque de contrôles dommageable pour la réputation des appellations.
Cette période de laxisme est aujourd’hui
révolue et la qualité s’est améliorée dans
tous les vignobles. Alliée à des prix raisonnables, elle explique le succès des vins
transalpins à l’exportation. Le plus connu
reste le Chianti, issu du Sangiovese, cépage
de Toscane qui donne aussi le très réputé
Brunello di Montalcino. On le retrouve
toutefois dans toute l’Italie centrale où les
appellations des Marches, d’Ombrie ou
des Abruzzes gagnent peu à peu en notoriété ; citons, le Sagrantino de Montefalco,
aux portes de Perugia, et le Montepulciano
d’Abruzzo.
Le second grand cépage rouge du pays est
le Nebiollo qui, dans le Piémont, donne
le Barbaresco et le Barolo « roi des vins,
vin des rois ». Si l’on note ces dernières
années un rééquilibrage général de l’encépagement vers les blancs, les meilleurs
vins de cette couleur proviennent avant
tout du Nord et en particulier du Frioul,
région proche de l’Autriche. C’est là, et
dans la Vénétie voisine, qu’est produit le
meilleur vin effervescent, le Prosecco, qui
a aujourd’hui supplanté l’Asti. La région
de Venise est par ailleurs l’une des plus
grandes productrices de vin d’Italie avec le
Soave en blanc, le Valpolicella et le Bardolino en rouge.
Les autres sont la Sicile et les Pouilles qui
totalisent à elles deux plus de 25 % de la
production nationale et représentent 30 %
du vignoble. Autrefois lourds et forts, les
vins qui y sont produits connaissent du
succès à l’étranger car ils sont aujourd’hui
plus légers, des trois couleurs et leur qualité
s’est remarquablement améliorée. Comme
en Campanie, la terre du Lacryma Christi,
vin produit sur les pentes du Vésuve. Q
Texte et photos Thierry Joly
L’Information Agricole - N° 886 Avril 2015 | 23
Dossier | Milan accueille l’Exposition universelle
Q Photographies
La réponse artistique
de Pauline Daniel
Les photos de l’artiste Pauline Daniel incorporées à la scénographie du Pavillon sont présentées aux visiteurs. Trois thèmes
y sont abordés « Epluchez-moi », « Biodiversité » et « Cosmogonie de l’œuf ». Plus de 45 photographies sur trois espaces de
présentation : Escalier public, Escalier VIP et Café des chefs.
L
SPÉCIALISTE DE LA
PHOTOGRAPHIE CULINAIRE
Diplômée d’une licence d’Art Plastique à l’Université Paris I et de l’Ecole Nationale Supérieure de la photographie d’Arles en 2002, Pauline Daniel réalise dans un premier temps
de nombreux documentaires d’auteur à l’étranger, répond en France à des commandes
publiques et réalise des portraits de parcs naturels.
La création de son propre studio en 2011 lui permet de reprendre l’un de ses domaines
d’expression privilégiés : la photographie culinaire qu’elle emmène loin de ses codes figés
par un certain académisme. Cette pratique devient pour elle un champ d’exploration et
de transformation de la matière. Le moindre aliment devient porteur de tous les possibles
grâce à ses mises en scène élaborées et son travail de mise en lumière. Son travail a déjà
fait l’objet de nombreuses publications et lui a permis d’être lauréate de différents prix tel
que celui de la Photographie de l’année 2014.
EN SAVOIR + : photographe-paulinedaniel.com
TROIS THÉMATIQUES
« Cosmogonie de l’œuf »
Photos Pauline Daniel
ors de son exposition sur le Parvis de
l’hôtel de ville de Paris en novembre
2014, le commissaire général du Pavillon France, Alain Berger découvre la série
photographique de Pauline Daniel intitulée « Epluchez-moi » réalisée pour et avec
les Banques Alimentaires sur le thème de
« la lutte contre le gaspillage », et présentée également au Salon international de
l’agriculture. Séduit par le travail artistique
de la photographe, Alain Berger choisit de
présenter deux séries supplémentaires au
sein du Pavillon France : « Biodiversité »,
qui vient faire écho aux problématiques
actuelles autour de la nécessaire diversité
du Vivant, sera exposée au sein de l’Escalier
VIP et « Cosmogonie de l’œuf », qui place
cet aliment premier et universel par excellence au cœur de la recherche visuelle de
l’artiste, pourra être découvert au sein du
Café des Chefs. Q
Claire Nioncel
Pauline Daniel
24 | L’Information Agricole - N° 886 Avril 2015
L’œuf, aliment premier et universel
Milan accueille l’Exposition universelle | Dossier
« Biodiversité »
Des légumes évocateurs et conteurs d’histoire
Photos Pauline Daniel
« Epluchez-moi »
La lutte contre le gaspillage
L’Information Agricole - N° 886 Avril 2015 | 25