la fraise hors sol
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la fraise hors sol
La fraise en culture suspendue La culture de la fraise en culture suspendue permet tout d’abord d’améliorer les conditions de travail, réduire la pénibilité, améliorer la vitesse et le confort de cueillette. C’est également une alternative aux problèmes de fatigue des sols, face à l’interdiction prochaine du bromure de méthyle. Enfin, la culture suspendue permet de produire une fraise de qualité, avec un calibre et une coloration plus homogènes, une absence de souillures, et de réaliser un meilleur potentiel de production. En revanche, elle présente aussi des contraintes : technicité et suivi importants pour bien maîtriser la culture, et surtout investissements importants, avec des coûts de production élevés. Les équipements spécifiques z Les substrats : « Qu’importe le substrat pourvu que la conduite soit bonne » Les expérimentations réalisées par le CIREF n’ont pas permis de mettre en évidence des différences entre les différents substrats, mais chaque substrat nécessite une conduite adaptée. ¾ Substrats organiques, les plus utilisés : à base de tourbe (mélange de tourbe brune et blonde), d’écorce de pin, de mélange tourbe + écorce de pin, de fibre de coco. Ils sont conditionnés en sacs (40 ou 50 cm de long) ou en bacs (50 cm). Les bacs sont plus intéressants que les sacs pour la plantation de plants dotés d’un système racinaire très développé (trayplants). On peut utiliser un goutte à goutte moins cher (gaine ou goutteur en ligne). Par contre, la consommation hydrique est plus importante, il peut y avoir développement de mauvaises herbes et/ou souillure des fruits en contact avec le substrat si le plant est mal positionné. ¾ Laines minérales : laine de roche en module, moins utilisée car se pose le problème du recyclage. z Programmation, irrigation, fertilisation La mise en place de la culture suspendue nécessite l’utilisation de matériels spécifiques et adaptés, non développés ici. z Les supports Les sacs ou les bacs sont posés sur des supports qui permettent de positionner les plantes en hauteur, généralement 1,30 à 1,50 m au-dessus du sol, et de récupérer les solutions de drainage qui s’écoulent dans les gouttières. Il existe plusieurs procédés : ¾ les gouttières suspendues par des chaînettes et des crochets, en serre multichapelle ou en tunnel équipé de supports de culture adaptés. Il faut respecter les normes du constructeur car la structure doit supporter une charge de 30 kg par mètre linéaire en début de récolte. Ce système par suspension permet un réglage de la hauteur pour optimiser les conditions de travail et peut être démonté pour une rotation culturale. ¾ les gouttières sur piquets : ce système est indépendant de la structure de l’abri et concerne les abris plus légers. Les supports sont fixes, demandent un temps d’installation plus long et il n’est pas possible d’envisager une autre culture que la fraise. Les matériels de confection des gouttières sont variés : fer à béton en V + plastique (PVC), gouttière moulée en PVC, tôle aluminium galvanisée... ¾ Il existe un système intermédiaire où les sacs ou bacs sont posés sur un paillage au sol sur des buttes, avec ou sans gouttière. On perd certains avantages de la culture hors sol, comme la facilité et la rapidité de cueillette. Par contre, ce système permet de réaliser des rotations dans l’abri et même dans le substrat, par exemple fraise de printemps suivie d’une culture d’été - automne : tomate, poivron, aubergine… Pour un bon écoulement des eaux de drainage, prévoir une pente de 5 pour 1000 minimum. L’écartement entre lignes varie de 1 à 1,40 m d’axe à axe en fonction des systèmes. Au sol, un paillage blanc améliore la luminosité en période de jours courts. Si présence importante d’adventices, préférer un paillage noir/blanc ou blanc. 1 Quelques éléments de conduite La culture suspendue demande rigueur et surveillance pour placer toujours le fraisier dans les meilleures conditions de culture. z Irrigation ¾ Les besoins en eau du fraisier sont fonction du substrat utilisé, de la variété, du stade végétatif et de l’ensoleillement. La dose d’irrigation est d’environ 150 ml par goutteur, soit une durée d’arrosage de 4 à 5 minutes avec un goutteur de 2 litres/heure. ¾ En règle générale, le volume de solution drainé doit être compris entre 10 et 20 % du volume apporté. Mais attention en culture précoce (en jours courts et froids), il faut contrôler l’humidité du substrat et l’état des racines. Le taux de drainage peut être réduit à 5 - 10%. ¾ Il est important de bien contrôler le drainage, tous les matins par exemple, pour adapter le nombre d’irrigations. z Fertilisation ¾ Composition des solutions nutritives, en meq/litre, préconisations Ctifl. Stade Développement végétatif Floraison – fructification CE NO3- NH4+ H2PO4- K+ Ca++ Mg++ K/Ca+Mg 1,5 10,2 1,8 1,8 4,2 5,2 2,4 0,56 1,5 10,4 0 1,6 5,7 5,7 2,2 0,72 ¾ Equilibres obtenus avec les solutions ci-dessus, après conversion des données en mg/litre. Stade Développement végétatif Floraison – fructification N P2O5 K2O CaO MgO 1 0,8 1,2 0,9 0,3 1 0,8 1,8 1,1 0,3 ¾ Pour les oligo-éléments, la composition,en mg/litre, est identique pour les 2 périodes : fer manganèse zinc bore cuivre molybdène 1 0,5 0,2 0,3 0,06 0,03 ¾ Le pilotage de la fertilisation se pratique en fonction de 2 paramètres : Æ La conductivité ou « CE », exprimée en millisiemens par cm (mS/cm) : Stade Consignes conductivité CE Consignes pH Développement végétatif Débuter à 1,2 puis en fonction du drainage, augmenter graduellement à 1,5 - 1,6. 1,6 à 1,8 sans dépasser 2 au drainage. 5,8 (5,3 à 6,3) Floraison Fructification 1,2 à 1,3 par temps ensoleillé, 1,4 à 1,5 par temps couvert. ¾ Pour les variétés remontantes (Mara des Bois) et les variétés très vigoureuses, diminuer de 0,3 mS/cm les consignes de conductivité CE données dans le tableau ci-dessus. ¾ La concentration en éléments minéraux de la solution nutritive, reflétée par la conductivité, doit être ajustée aux besoins relatifs en eau et éléments minéraux du moment, qui dépendent du climat, du stade de la plante, du substrat et de la variété. Quand la demande en eau est faible, la plante peut supporter une conductivité plus élevée que lorsque celle-ci est forte. ¾ La période la plus sensible à l’excès de conductivité est la période de floraison-fructification. 2 Une conductivité trop élevée peut entraîner des avortements de fleurs et, plus fréquemment, des chutes de calibre et une baisse de rendement, surtout si des températures élevées accélèrent le processus de maturation (récolte groupée) avec une demande en eau élevée en raison du climat et des besoins en eau des fruits. ¾ En règle générale, l’ajustement de la CE à l’apport est conseillé pour tout écart de + ou – 20 %. ¾ La dérive de la CE peut être liée à des irrigations insuffisantes, d’où la nécessité de contrôler le pourcentage de solution drainée. Celui-ci doit rester proche de 20 %, sauf si l’eau contient des éléments en excès (sodium, sulfates, calcium), auquel cas on augmentera les volumes percolés. ¾ Si la conductivité au drainage s’écarte de plus de 0,3 mS/cm de la valeur de l’apport, il faut rééquilibrer les apports : - baisser la conductivité à l’apport pour la ramener au niveau souhaité, - éviter d’arroser avec une conductivité trop basse qui peut conduire rapidement à un déséquilibre nutritif, - réaliser 2 à 3 irrigations plus longues le matin pour provoquer un drainage en excès. ¾ A noter qu’une eau très chargée en bicarbonate de calcium oblige à travailler avec une conductivité plus élevée (1,8 à 2 mS/cm) afin de maintenir l’équilibre recherché entre les éléments. Æ Le pH ¾ La solution d’apport doit avoir un pH voisin de 5,8 avec des variations tolérées entre 5,3 et 6,3. ¾ Le pH de la solution drainée peut varier de 5 à 7 sans conséquence pour le comportement de la plante et la production de fruits. ¾ Pour calculer les solutions nutritives, une analyse d’eau est indispensable et il faut contacter un conseiller spécialisé. Les solutions sont élaborées avec des engrais simples ou complets, solubles ou liquides. z Les contrôles : ils sont indispensables pour un bon suivi des cultures. Ils portent sur les apports aux goutteurs et les drainages ; ils sont réalisés tous les jours pour les quantités apportées et 2 à 3 fois par semaine pour la conductivité et le pH. Pour les réaliser, il faut : ¾ recueillir les apports de 2 à 3 goutteurs répartis dans la parcelle, ¾ récupérer le drainage sur un échantillon représentatif de plantes (10 à 20 sacs), ¾ multiplier les points de contrôle en fonction des surfaces cultivées, ¾ veiller à ce que chaque contrôle corresponde à un mode de conduite homogène (variété, substrat), ¾ s’équiper d’outils de contrôle de terrain : conductivimètre portatif et papier pH. A réaliser impérativement sur la culture au niveau des goutteurs, même si on dispose d’un ordinateur de gestion de la fertilisation. Voici un procédé simple pour connaître le taux de drainage dans une culture suspendue de fraisiers en sacs (ou bacs) de 50 cm équipés chacun de goutteurs d’un débit unitaire de 2 litres/heure. ¾ Mettre en place un dispositif permettant de récupérer dans des contenants de même dimension (d’où une comparaison facile) : • L’apport d’un goutteur • Le drainage de 5 sacs ou bacs. goutteurs substrat Gouttière Apport Volume, CE, pH Contrôles Drainage Volume, CE, pH ¾ Si le volume du drainage (= 5 sacs ou bacs) est égal au volume de l’apport (= 1 goutteur), le taux de drainage est alors égal à 10 %. Si le volume du drainage est égal à la moitié du volume de l’apport, le taux de drainage est de 5 %. Si le volume du drainage est égal au double du volume de l’apport, le taux de drainage est de 20 %. 3 z Conduite du climat pour une production précoce Stade Départ de végétation Jusqu’à la floraison Floraison Maturation-récolte Température ambiante (minimum) nuit jour 8 - 10°C 10 - 12°C 10 - 12°C 12 - 14°C 12 - 14°C 14 - 16°C 10 - 12°C 12 - 14°C Température optimale du substrat : 12 - 17°C Aération 14 - 16°C 16 - 18°C 18 - 20°C 20 - 22°C ¾ Au niveau du substrat, pendant la phase d’implantation du système racinaire, la consigne de température doit être de 2°C supérieure à celle de l’ambiance. Par la suite, elle doit être au minimum égale à la température d’ambiance, sans dépasser 18°C. Si elle est trop élevée, la végétation s’emballe. L’excès de végétation favorise les maladies (Botrytis, oïdium) et gêne la récolte. ¾ La conduite du chauffage est adaptée en fonction des objectifs visés : précocité, étalement de la production… Concernant le matériel d’équipement, le chauffage localisé basse température est bien adapté pour la fraise (2 tuyaux sous le substrat et 2 tuyaux dans la végétation). ¾ L’hygrométrie peut être maintenue aux environs de 60%. L’excès augmente les risques de Botrytis, le manque favorise le développement de l’oïdium et des acariens. ¾ La conduite des aérations doit être menée avec rigueur car une atmosphère trop confinée provoque un emballement de la végétation, des désordres physiologiques et des problèmes sanitaires. z Les variétés L’objectif est de produire une fraise de qualité : - en culture précoce : Ciflorette et Gariguette, - en culture de saison : Darselect (région Rhône-Alpes), - en fraise remontante : Mara des Bois. z Les types de plants Type de plants Plant frigo Plant en motte Trayplant Date de plantation Provence : fin juillet Rhône-Alpes : début juillet Provence : 20 août Rhône-Alpes : 20 juillet Provence : décembre Rhône-Alpes : janvier Avantages Inconvénients *par hiver doux, les besoins en froid pour lever la dormance ne sont pas couverts. *plantation 3 semaines plus *comme pour le plant frigo, par tard que le plant frigo. hiver doux, les besoins en froid *moins d’entretien (coupe des pour lever la dormance ne sont fleurs et des stolons…). pas couverts. *les besoins en froid sont *productivité par plante plus couverts par le passage des faible. trayplants au frigo avant la plantation. z Densité de plantation ¾ Planter 10 plants par mètre linéaire, soit une densité de 7,5 à 7,8 plants/m² selon le type d’abri. ¾ Avec des trayplants et la variété Ciflorette, un essai réalisé en 2002 a donné des résultats intéressants avec une densité plus élevée, soit 12 plants par mètre linéaire. z Pollinisation ¾ Respecter les consignes de chauffage et d’aération pour avoir une bonne qualité de pollen. ¾ Mettre en place des ruches de bourdons et/ou d’abeilles dans l’abri. ¾ Attention au risque de sur-butinage par les bourdons. z Protection phytosanitaire ¾ Se reporter à la fiche de protection de la fraise APREL-SEFRA 2003/2004. z Pour en savoir plus, se reporter à la brochure Ctifl / CIREF : « La culture du fraisier sur substrat ». Groupe de travail : Cédric Coquelet, Metral-Fruits - Daniel Izard, CA 84 / APREL – Jean-Claude Navatel, Ctifl - Michaël Poncet, CA 38 / SEFRA - Catherine Taussig, APREL Mise à jour : Octobre 2003 4